ŒUVRES  DE  SAINT FRANÇOIS DE SALES  EVEaUE ET PRINCE DE GENEVE ET DOCTEUR DE l' ÉGLISE  ÉDITION COMPLÈTE d'après les autographes et les éditions originales enrichie de nombreuses pièces inedites DEDIEE A SA SAINTETÉ LEON XIII ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX eUBLIEE SOUS LES AUSPICES DE M°^ l'ÉVÊQUE d'aNNECY Par les SOINS de religieuses de La VISITATION DU I^'^ MONASTÈRE d'aNNECY  TOME XVII LETTRES - VOLUME VII  LIBRAIRIE CATHOLIQUE EMMANUEL VITTE  LYON 5, Place Bellecour. 3  PARIS 14, Rue de TAbbaye, 14  ANNECY, IMPRIMEPvIE J. ABRY M C M X I  Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa  http://www.archive.org/details/oeuvresdesaintfr17fran  ŒUVRES  DE  SAINT FRANÇOIS DE SALES  EVEQUE ET PRINCE DE GENEVE  ET  DOCTEUR DE L'ÉGLISE  TOME DIX-SEPTIEME  LETTRES  Vir' VOLUME  6i 5 - i6i7  ^-V^  Propriété  ŒUVPvES  DE  SAINT FRANÇOIS DE SALES  EVEaUE ET PRINCE DE GENEVE  ET  DOCTEUR DE L EGLISE  ÉDITION COMPLÈTE d'après les autographes et les éditions originales enrichie de nombreuses pièces inedites DEDIEE A SA SAINTETÉ LEON XIII ET HONORÉE DE DEUX BREFS PONTIFICAUX PUBLIEE SOUS LES AUSPICES DE M°'' l'ÉVÈQUE d'aNNECY Par les soins de religieuses de la visitation DU I^"^ MONASTÈRE d'aNNECY  TOME XVII LETTRES — VOLUME VII  LIBRAIRIE CATHOLIQUE EMMANUEL VITTE  LYON 3, Place Bellecour. 3  PARIS 14, Rue de l'Abbaye, 14  ANNECY, IMPRIMERIE J. ABRY MCMXI Droits de traduction et de reproduction réservés  AVANT-PROPOS  Nouveau joyau dans le trésor de la sainte Eglise, nouvelle perle dans Técrin des Lettres françaises, le to- me XVII des Œuvres de saint François de Sales offre à ses lecteurs deux cent vingt-deux lettres, s'échelon- nant de juin 1615 à mai 1617(0. Trois faits d'une importance majeure semblent res- sortir avec un relief plus accentué sur le fond si varié, si palpitant d'intérêt de cette correspondance de vingt- trois mois. C'est d'abord le développement et la forma- tion de l'Ordre de la Visitation ; puis, la grande retraite que fit sainte Jeanne-Françoise de Chantai, en mai 161 6, à la veille des premières fondations, sous la con- duite de son éminent Directeur; et, en dernier lieu, les prédications de l'Avent et du Carême à Grenoble. Le précédent volume se fermait au moment où TEvê- que de Genève allait se rendre à Lyon auprès de M"' de Marquemont. Entre ces deux grands hommes, d'intimes rapports ont commencé, empreints dès l'origine d'un res- pect réciproque, d'une déférence profonde, d'une sainte et affectueuse estime. « Il est le premier des Evesques de France, » disait de son collègue l'humble François de Sales, « et moy le dernier de Savoye ( = ). » M-' de Marque- mont, à son tour, l'appelle « l'honneur et la coronne des (i) Cinquante-cinq de ces Lettres sont inédites, sans tenir compte de plu- sieurs fragments et de quelques pièces qui figurent à l'Appendice. (2) Lettre mcxxxii, p. 89.  vi Lettres de saint François de Sales Prelatz(0, » se tient près de lui pour « un escholier qui parle a son maistre, un fils a son père (-), » et vient en novembre 1615 lui rendre la visite reçue en juin. Les détails de Tune et l'autre visite sont pleins d'in- térêt, très caractéristiques des mœurs du temps. A Lyon, c'est r Archevêque qui, « si tost que » les « Vespres » sont « dittes, » monte en carrosse pour aller rendre ses pre- miers devoirs à l'illustre visiteur qui approche (3); c'est le souper auquel assiste le gouverneur de la cité, si char- mé de la conversation du Saint qu'il demeure avec lui (( jusques près d'onze heures, » et se résout d'aller écouter le lendemain le « sermon d'amour » prêché à la Visitation (4); c'est l'empressement de tous, avides de voir et d'entendre celui dont la réputation s'étend de plus en plus en France. « Ces grandes villes sont impor- « tunes pour cela, » gémit doucement François de Sales, (( au moins pour les pauvres villageois comme moy, qui (( n'y sont pas accoustumés (0. » A Annecy, c'est l'émoi causé par l'arrivée prochaine de l'Archevêque, la caravane de « huit hommes a cheval » qui l'accompagne (^); les « deux sermons » et la « petite (( exhortation » dont le « bon peuple » demeurera « lon- « guement consolé (7); » enfin, la séance solennelle où, sans respect pour la présence d'un tel hôte, l'ignorant candidat qui voulait emporter de vive force le bénéfice de Scionzier, s'échappe en plaintes et en menaces con- tre son Pasteur (^). Mais que s'était-il traité dans ces deux entrevues de France et de Savoie? Des langues malignes semèrent à ce sujet des bruits calomnieux. François de Sales, de nouveau soupçonné d'infidélité à son prince, accusé de vues humaines et de connivences secrètes avec l'étranger.  (i) Appendice I, p. 403. (2) Ibid., p. 405. (3) Ibid,, p, 403. (4) Page 18. ( 5) Lettre mc, p. 25. (6) Page 89. (7) Page 86. (8) Voir note { i ), p. 83.  \  \  Avant-Propos vu  écrivit au marquis de Lans, au duc de Savoie et à son secrétaire Vibod, ces lettres mesurées et dignes, où Ton retrouveia noble déclaration faite déjà en pareille occu- rence : « Je suis en toutes façons savoyard, et de nais- « sance et d'obligation... meshuy tantost envielly dans « la naturelle et inviolable fidélité que j'ay vouée et « jurée a Son Altesse ('). » Et défendant son honneur de fidèle sujet, avec quelle noblesse sacerdotale il dé- fend en même temps son honneur d'Evêque ! « Nous (( estimons les discours des capitaines et soldatz indignes (( d'occuper le tems des Pasteurs de la bergerie du Dieu « vivant (0. » :< Nos visites ont esté, a la vérité, pour (( une affaire d'Estat, » continue-t-il(3) : « a sçavoir, pour (( Testât que nous devons constamment establir en la « republique de nostre petite Congrégation de la Visi- « tation. » Tel était, en effet, le but de ce double voyage. Depuis quelques mois, une première colonie, sous la conduite de la Mère de Chantai, était allée implanter, comme un grain de sénevé, la Visitation Sainte-Marie dans l'ancienne capitale des Gaules. On vit alors ce qui ne s'était jamais vu en France : des Religieuses qui, sans vœux solennels, enchaînées par le seul lien de la « dilection, » avaient des exercices semblables à ceux des Monastères les mieux réformés et les plus fervents; des Religieuses qui, tout en se livrant à la vie contem- plative, accordaient une part de leur temps — très mi- nime il est vrai — au service du prochain. L'Archevêque, admirant avec son peuple la vertu, la pureté de vie des Sœurs de Sainte-Marie, s'étonna tou- tefois de cette nouveauté ; de l'étonnement, il passa à la conviction que les choses ne pouvaient demeurer ainsi. On sait le résultat. L'Evêque de Genève enferma ses filles derrière des grilles impénétrables, ne leur laissa que l'apostolat tout puissant de la prière et du sacrifice, et consentit à faire de son Institut un Ordre véritable,  (i) Lettre MCLXXxviit. p. i86. (2) Lettre mcxli, p. 107. (3) Ibid.  VIII Lettres de saint François de Sales bien que « le tiltre de Congrégation n'estant pas si spé- cieux (( ni honnoré, » lui plût « davantage (O. » Que conclure de ce changement ? A-t-on raison de dire ou d'écrire que l'homme de Dieu n'a pas fait ce qu'il avait voulu? Ce serait peu connaître le Saint et la réalité de l'histoire. L'intention du Fondateur en créant son Institut nous est admirablement déclarée par lui-même ( ^ ) : (( Donner a Dieu des filles d'ora3^son et des âmes si inte- (( rieures, qu'elles soyent treuvees dignes de servir sa (( Majesté infinie et de l'adorer en esprit et en vérité. » « Que prsetens-je en tout ceci, » dit-il ailleurs (?), « sinon « que Dieu soit glorifié et que son saint amour soit res- (( pandu plus abondamment... ? » Or, ce but unique, il ne le changera jamais, et le réalisera par des moyens qui semblent d'abord différer de son premier plan. François de Sales est toujours avant tout l'homme de la pensée ; son souple génie sait garder la substance en la revêtant de divers accidents, et peut-être ne le montra-t-il jamais mieux qu'en cette importante circonstance. Il exécuta donc réellement ce que lui avait inspiré le Saint-Esprit, donnant à Dieu des âmes de prière et ouvrant aux na- tures généreuses servies par des corps débiles, un asile assuré. Mais il fut aussi l'instrument docile du Seigneur, à qui seul appartient de faire réussir ses œuvres en la façon qu'il lui plaît ; de là, son admirable condescen- dance. Le témoignage qu'il rend de lui-même U) n'est qu'un hommage à la vérité : « Monseigneur l'Arche- « vesque. . . ne treuvera point en moy un esprit contrariant « ni qui veuille surnager. » Et il ajoute avec son incom- parable humilité accompagnée de tant de bonne grâce : u Ne serois-je pas un chetif homme, si je voulois m'esti- « mer et relever mon esprit en comparayson des autres ? » Toutefois, quand il a enveloppé son idée dans une forme définitive, quand il a fait à ses contemporains des concessions qui n'altèrent pas essentiellement son  (i) Page 140. (2) Lettre mxciv, p. 16. (3) Lettre mclxii, p. 159. (4) Ibid., pp. 139, 140.  Avant-Propos ix dessein, il demeure inflexible sur les grandes lignes déjà tracées, et s'applique désormais à déterminer peu à peu d'une façon précise les moindres points des Règles et Constitutions. Profond connaisseur de la nature humaine, il sait la puissance de l'extérieur sur l'intérieur, et plus que nul Fondateur d'Ordre, peut-être, il protégera son œuvre contre l'inconstance de la volonté et les bizarreries de l'esprit par une infranchissable muraille. Sur ce mur protecteur, François de Sales veut apposer un sceau : la parole du Pape. Il multiplie pour cela let- tres et démarches. Chose remarquable : lui qui souhaite ses filles si petites, si cachées, lui qui se défend avec une vraie ténacité de multiplier les Maisons de la Congréga- tion, et dont le détachement va jusqu'à dire que « si elle « pouvoit estre utile a establir plusieurs autres Congrega- « tions de bonnes servantes de Dieu sans jamais s'esta- (( blir elle mesme, elle n'en seroit que tant plus aggreable « a Dieu (0, » il ne sait plus retenir son cœur et sa plume, ou mieux, il ne sait pas tenir la vérité captive, quand il présente à Rome ces nouvelles épouses du Christ, pour leur obtenir le baptême consécrateur qui s'appelle l'approbation du Saint-Siège. Comme il est éloquent au- près du Cardinal Bellarmin, et quel éloge il fait des pre- mières Mères choisies par la divine Bonté pour être les colonnes de l'Institut naissant (2) ! Tandis que le saint Fondateur s'occupe des grands in- térêts de l'Ordre futur, il descend avec ses filles dans le détail de leurs difficultés, les soutient dans leurs peines, les forme, en maître consommé, à l'art si délicat du gou- vernement. La Mère de Chantai, en quittant Lyon, lais- sait à la Mère Favre la charge de supérieure. C'est le point de départ, entre notre Saint et sa c( grande Fille », d'une belle et active correspondance. Il ne se peut rien de plus instructif. On y trouve une sève de tendresse paternelle et de mâle énergie qui surprend et charme à la fois. « Ma très chère Fille, » écrit le doux Fvêque, « a mesure que ces deux ou troys journées de distance (i) Lettre mclxviii, p. i^o. (2 ) Lettre mccxix.  X Lettres de saint François de Sales (( semblent nous séparer corporellement, de plus fort et « avec plus d'affection je me joins spirituellement a « vous (0. » (( J'appreuve... que vous m'appellies P^r^, « puisque j'ay pour vous un cœur extraordinairement plus « que paternel i-). » Et encore : « Vous sçaves bien que « vous estes la grande fille bienaymee, et que nul ne vous « ostera le rang que vous tenes en mon cœur (3). » Mais avec quels accents ce Père relève le courage de la jeune Supérieure qui plie sous le fardeau ! « Faites » votre « office pour l'amour de ce Sauveur qui vous y a ap- (( pellee ; vous en serés deschargee quand il luy plaira, « vous nous reviendres voir quand il en sera tems(4). » u II ne faut pas. . . permettre a vostre esprit de se regarder « soy mesme et de se retourner sur ses forces ni sur ses « inclinations ; il faut ficher les yeux sur le bon playsir « de Dieu et sur sa providence (5). » Et le bon Saint résume en une phrase rapide et pittoresque sa doctrine d'oubli de soi et d'action quand même : « Il ne faut pas « s'amuser a discourir quand il faut courir, ni a deviser « des difficultés quand il les faut dévider (6). » A son tour bientôt, la Mère de Bréchard reçoit à Mou- lins les encouragements du Fondateur et ses austères conseils de support, de patience, de charité inaltérable envers l'étonnante dame des Gouffiers. C'est, en effet, l'ancienne Religieuse du Paraclet qui introduit la Con- grégation dans la capitale du Bourbonnais, comme elle l'a introduite à Lyon précédemment. Cette histoire d'il y a trois cents ans ne manque pas de piquant par sa propre originalité, et par les comparaisons qu'elle sug- gère entre notre époque actuelle et ce temps lointain, où l'on cherchait avec tant d'ardeur « des ouvrières » pour « sy copieuse moisson que celle de la vie contem- plative (7). »  (i) Lettre mcxxvii, p. 80. {2) Lettre Mcxxxix, p. 103. (5) Lettre mcliv, p. 126. (4) Lettre mcxix, p. 68. (5) Lettre Mcxxii, p. 72. (6) Ibid. (7) Lettre des Echeviiis de Moulins au Saint, Appendice I. p. 413  AVANT-PKOPO^ XI L'empressement, du reste, était g-énéral. Toutes les provinces du royaume très chrétien voulaient des Filles de Sainte-Marie; chaque ville avait sa réserve d'âmes que la Philothêe de l'Evèque de Genève préparait, se- mence bénie, pour la nouvelle moisson ; de toutes parts on se tournait du côté d'Annecy comme vers un foyer de lumière. A Toulouse, une Communauté en désarroi réclame du secours: la Supérieure, la Mère Isabeau de Romillon, accompagnée du président de Rességuier, veut chercher auprès de celui qui est vraiment l'oracle de son siècle, aide et conseil. François, toujours disposé au service du prochain, mais d'une prudence consommée, ne dissimule point son embarras : « Je suis en peine de (( ce bon monsieur... de Ressiguier, » dit-il (0, » qui, « comme homme de qualité,... aura sans doute fort a « faire a supporter nos bassesses et imperfections. » Une plus grande difficulté l'arrête encore. La fondatri- ce des Tiercerettes est une âme extraordinaire, favorisée d'extases et de ravissements ; « si elle vient icy avec ces « espèces de choses inconneûes, » écrit le Saint avec une bonhomie fine et charmante (2), « en lieu de tirer de la « consolation de nous, elle nous donnera fort a faire, « et nous tiendra empeschés a discerner si cela est saint, (( si ceci est faint, et troublera grandement la pauvre pe- « tite trouppe de colombes innocentes qui n'ont preten- {( tion a des choses si ravissantes. » Les voyageurs ne vinrent pas en Savoie, mais Toulouse persista à vouloir une Visitation. L'exemple est contagieux. Riom, Montbrison, Reims, Grenoble, Turin, etc., font à Tenvi des démarches dans ce même but. Le Fondateur s'en effrayerait plutôt que de s'en réjouir. Tout en louant Dieu de ces saints désirs, il contient les ardeurs prématurées ; avant de permettre aux branches de l'arbre de s'étendre, il veut enfoncer profondément les racines. La racine, le cœur de l'Institut, n'était-ce pas la Fille ( I ) Lettre mcv, p. 35. ( 2 ) Lettre mcxxi. p. 71.  xii Lettres de saint François de Sales unique en dilection comme elle Tétait en mérite, la grande coopératrice, l'aide que la Providence elle-même avait donnée au saint Evêque, la Mère de Chantai? Les fondations vont se succéder, plus nombreuses, moins connues, tout aussi célèbres que celles de la Mère Thé- rèse en Espagne. C'est une immolation qui commence pour la Sainte, un laborieux enfantement jusqu'à son dernier soupir. A cette heure solennelle, Dieu semble la rejeter au moule, et sous l'impulsion de la grâce, la main de François de Sales, comme celle de l'ouvrier habile et expérimenté, façonne de nouveau cette âme, et l'amène au point suprême auquel vise toute sa doctrine pour les natures d'élite : le complet et parfait détachement de tout le créé, une pureté d'amour pour Dieu et le pro- chain que seules peuvent comprendre les âmes arrivées, comme il le veut, à « ensevelir » tout elles-mêmes « dans « un éternel abandonnement (0. » Ces pages sublimes des 17, 18, 19 et 21 mai 1616 (2), éclairées et complétées par celles de sainte Jeanne-Françoise qui y correspondent (3), seront lues avec bonheur et avec fruit par ceux qui ai- ment à pénétrer dans le fond intime des Saints, par ceux qu'attire la haute spiritualité, par ceux encore qui se sont passionnés pour l'étude de l'union suréminente créée par Dieu entre les deux Fondateurs. Sujet divin, souvent incompris parce qu'on ne l'éclairé que des lumières d'ici-bas, au lieu de le contempler inondé des clartés d'en-haut. Si la Mère de Chantai a été le chef-d'œuvre de ce Maître des âmes, au-dessous d'elle, voici la foule des Filles de la Visitation, des femmes du monde, des hom- mes même qui veulent être honorés de sa paternité. Ce n'est pas seulement sa renommée qui s'étend au loin : ce sont de nouveaux enfants spirituels que lui font naître son Introduction a la vie dévote, son Traitté de l'Amour de Dieu, naguère « mis en lumière U). » Pour (i) Lettre Mcciii, p. 215. ( 2 ) Lettres mccii-mccvi. (3) Voir à l'Appendice I, pp. 408-411. (4) Page 276. (Cf. la lettre d'une dame à saint François de Sales, Appen- dice I, p. 428,)  Avant-Propos xiii tous, il a la parole spéciale qui s'adapte à leur situation et à leur caractère, sachant bien qu' « il ne se faut « esbahir si chaque herbe et chaque fleur requiert son (( particulier soin en un jardin (0. » Mais il semble que pour tous jaillisse de son cœur la même prière : « lié ! (( Dieu, respandés sur » eux « l'esprit de douceur et de « simplicité, l'esprit d'amour et d'humilité, l'esprit d'o- « beissance et de pureté, l'esprit de joye et de mortifica- « tion (2). » Ce dernier trait est à noter; toutes les lettres de di- rection, nombreuses dans ce volume, nous montreront le doux François de Sales entraînant vigoureusement à la lutte énergique, mais tranquille, contre soi-même. Enten- dez ces mâles accents : « Qui ne gourmande jamais ses « répugnances, il devient tous-jours plus doiiillet (3). » « La paix n'est pas juste, qui fuit le labeur requis a la « glorification du nom de Dieu (4). » — « Cette vie est une « guerre... le repos est réservé pour le Ciel (5). » — Est- ce pour les seuls habitants du cloître qu'il a de tels en- seignements ? Non ; c'est à une femme du monde qu'il écrit ces fortes paroles : « Il faut fourrer nostre cervelle « entre les espines des difficultés et laisser transpercer « nostre cœur de la lance de la contradiction ; boire le fiel (( et avaler le vinaigre (6). « Mais ce ferme Directeur est en même temps Père tendre et dévoué. Signalons comme exemple les lettres à M""^ de la Fléchère au début de son veuvage. Rien n'est plus touchant que la sollicitude affectueuse de ce grand Evêque, absorbé par les plus graves occupa- tions, qui s'intéresse aux moindres détails des affaires de succession et de tutelle. A la fin du volume, nous entrons dans une société nouvelle. Ce n'est plus la Savoie un peu austère, un peu (1) PageSr. (2) Page 114. (3) Page 341. (4) Page 106. (5) Page i6r. (6) Lettre Mccxciv, à la présidente Le Blanc de Mions, p. 370.  XIV Lettres de saint François de Sales cérémonieuse ; ce n'est plus la vie de château avec sa solitude relative et sa traditionnelle simplicité. L'aristo- cratie dauphinoise, brillante et digne, policée et savante, nous apparaît subitement et sous un jour tout différent. A Grenoble et dans toute la province, la guerre avait été acharnée, opiniâtre entre le catholicisme et la religion prétendue réformée, et la Ligue y garda l'un de ses der- niers boulevards. Le temps était passé, sans doute, des luttes sang'lantes pour la défense des opinions religieu- ges; toutefois, les discussions ardentes, mais pacifiques, duraient toujours. L'heure était propice pour l'Apôtre du Chablais, pour le Maître de la sainteté : il allait trouver, parmi les hérétiques, des natures lovales, ayant le désir sincère de connaître la vérité, et dans les familles des anciens ligueurs, une élite d'âmes prêtes à poser, sur le fondement d'une foi éprouvée et invincible, l'édifice de la perfection chrétienne. Encore faut-il ajouter que ce peuple qui, au sein même des troubles politiques et du bruit des combats, n'avait cessé de produire des hommes de lettres et de science, aimait que le vrai et le bien lui fussent exposés dans un beau langage. Aussi tous, catho- liques et protestants — le vieux Lesdiguières lui-même ! — se pressèrent-ils au pied de la chaire de Saint-x\ndré pour entendre l'Evêque savoyard, illustre déjà par son renom d'éloquence et de vertu. François de Sales se sent à l'aise au milieu de cet au- ditoire, le (( plus docile, » le « plus porté a la pieté vO » qu'il eût encore rencontré. Le Parlement est là tout entier, ravi de la doctrine et du bien dire de l'orateur; quelques- uns de ses membres saisissent même au vol ces discours pleins d'onction et de lumière, ils les recueillent pour les méditer à loisir. Près des graves magistrats, les no- bles dames écoutent avidement, et attendent, impatientes, l'heure où elles pourront recevoir de l'homme de Dieu les conseils plus intimes et les leçons de perfection qui ne se donnent pas à la foule. « Icy, comme par tout « ailleurs, » dira le Saint avec un sourire, « les hommes « laissent aux femmes le soin du mesnage et de la (i) Page 356.  Avant-Propos XV « dévotion (0, » Des physionomies très sympathiques se présentent alors à nous : la présidente Le Blanc de Mions, au bouillant caractère et à l'esprit si vif; M'"" de Granieu, déjà bien avancée "dans les voies de la vertu quand TEvèque de Genève prend la direction de son âme ; la jeune M'"" de Veyssilieu, dont les frayeurs de la mort nous ont valu l'indication de remèdes salutaires contre cette commune faiblesse ; l'impétueuse M""" Cottin, et tant d'autres que nous ne faisons qu'entrevoir et dont la correspondance à venir nous dessinera les traits. Mais l'Evêque, pasteur transitoire de cet intéressant bercail, oubliait-il son propre troupeau? Ecoutons le cri de son cœur : « Mon Eglise... que puis-je dire de plus a affectionné (M? » Pour elle, ses pensées, ses sollicitu- des; de loin comme de près, il veille à ses intérêts, s'oc- cupe de tous les détails de l'administration, confiée pourtant au zélé et rigide Jean-François, son frère et fu- tur successeur. Qu'on lise la correspondance avec son vicaire général, les lettres aux princes au sujet des abus à réprimer, des réformes à faire, des bonnes œuvres à promouvoir : partout se révèlent une vigilance toujours en éveil, que rien ne déconcerte, un amour paternel qui veut constamment le bien de ses ouailles. Ceux dont l'attrait va davantage à l'étude du style trouveront de vraies perles dans ces pages. Ils remar- queront celles qui s'adressent à M^"" Fenouillet. Avec ce lettré, François, semble-t-il, donne plus d'ampleur à sa phrase et à sa pensée, tandis que les tristes nouvelles de la petite patrie qu'il transmet à l'exilé de Montpellier lui inspirent des traits de véritable éloquence. Témoin cette peinture des échappés de la guerre récente, au « sortir « d'un grand travail, » prenant « le repos final dans la « sépulture; » car n'ayant « pas eu le loysir de mourir » au milieu des combats, « au premier tems qu'ilz ont de « relasche, ilz font ce devoir (3). » Quelle description (i) Lettre mcclxxxviii, p. 356. (2) Lettre mccxcviii. p. 379. ( 3) Lettre mciii, p. 31.  XVI Lettres de saint François de Sales encore faite à Bellegarde de la rapidité et de la valeur du temps ! « Tenes vos yeux arrestés a cette sainte eter- « nité a laquelle nous allons par la course de ces années, « qui, passant, nous passent comme de poste en poste, (( jusques a cette fin-la. En ces momens, pourtant, comme « dans un petit no3^au, est enclose la semence de toute (( Tseternité (O. » Par contre, à chaque instant, on trouve sous la plume du saint et gracieux écrivain des tournures alertes, vives : ces lettres « esgratignees ^) en « un quart d'heure (2), » écrites « hors d'haleyne » pendant que l'ennemi est aux portes d'Annecy et que tout tremble dans la ville (3), « ces quatre motz le pied a l'estrier (4), » se lisent avec un singulier plaisir. Et peut-on s'empêcher de sourire à ces portraits tracés en deux ou trois lignes par le fin moraliste : le jeune page devenu écolier, qui croit bien (( contraire a sa réputation « de « se ranger a la disci- « pline du collège (5) ; » — « messieurs les financiers. . . « gens grandement esveillés » pour saisir les occasions d'exiger les impôts (6) ; — les deux ennemis qui « pro- « testent fort de ne penser a point de mal, mais. . . en « un langage qui ne veut pas du tout dire cela (/). » Comme il connaît bien le cœur humain, et quelle touche délicate quand il approche de ses misères ! Ailleurs, c'est la tendresse qui a des mots ravissants : Il « me semble que quand vous aves du mal, je l'ay avec (( vous (S). » — Et ce frais souvenir évoqué en passant : « Je n'ay garde d'oublier ce soir... la petite cadette... « puisque je seray chez son père, ou je la vis la pre- (( miere fois habillée de blanc, avec un chapeau de « paille (9). » On dirait une photographie d'enfance de la Sœur de Blonay. (i) Lettre MCLvi, p. 129. (2) Lettre mclxii, p. 158, (3) Lettre Mccxxvni. p. 266. (4) Page 190. (5) Page 27. (6) Page 300. (7) Page 132. (8) Page 195. (9) Page 40.  Avant-Propos xvii Mais pourquoi vouloir tout signaler? « Prenez et lisez, » chantait la voix d'en-haut à l'oreille d'Augustin ; « prenez et lisez, » dirons-nous à chacun de nos lecteurs en leur présentant la nouvelle série de Lettres du « plus français comme du plus aimable de nos Saints. » Dans ces pages, c'est l'àme, l'àme vivante qui parle, c'est le cœur qui palpite, c'est la parole fixée sur le papier, avec son émo- tion et ses bienfaisants effets. Les Editeurs.  Annecy, 26 avril 191 i, Fcte de Notre-Dame du Bon-Conseil.  AVIS AU LECTEUR  Des Lettres publiées dans ce volume, nn grand nombre ont été revues sur les originaux. La pwvenance indiquée à la fin de chaque pièce, est celle qui nous était connue au moment oii elle nous a été communiquée. Lorsqu'un Autographe provient d' une Communauté française exilée ou dispersée, nous donnons l'ancienne adresse de celle-ci. Les Lettres qui ne sont suivies d'aucune indication sont celles dont, à défaut d' Autographes ou de copies authentiques, on a dû emprunter le texte à des publications antérieures. Voir à la fin de ce volume la Table de correspondance, et l'Avant -Propos du tome XI, pp. xxv-xxvij. Les Editeurs sont seuls responsables de l'adresse et de la date qui pré- cédent chaque pièce ; l'une et Vautre sont répétées à la fin quand elles figurent sui l'original, ou quelles sont authentiques, quoique fournies par les textes imprimés. Les points remplaçant quelque énumération de la date indiquent que cette partie de la date est donnée, mais fautivement, par l'édition à laquelle notre texte est emprunté. Qiiand la date attribuée à une lettre n'est pas absolument sûre, elle est insérée entre [ ] . Ces signes sont également employés pour les mots qu'il a fallu suppléer dans le texte. Les divergences qui existent entre quelques minutes et le texte définitif sont données au bas des pages. Le commencement de la variante est indiqué par la répétition en italique des mots qui la précèdent immédiatement au texte; la fin est régulièrement marquée par la lettre de renvoi. Les pas- sages biffés dans les Autographes sont enchâssés entre fJ . Des points placés au commencement ou à la fin des lettres indiquent un texte incomplet. Oiiand les Autographes ont subi quelque mutilation, nous l'indiquons chaque fois. A la suite du Glossaire se trouve un Index, dans lequel il a été jugé à propos de fondre les noms des destinataires avec les titres des principales notes historiques et biographiques. Toutes les notes concernant le clergé de l'-ancien diocèse de Genève sont tirées des Registres de l'époque ; elles sont désignées par les deux initiales R. E. Sauf indication contraire, tous les renseignements relatifs à la noblesse savoisienne sont empruntés au monumental ouvrage du Comte Amédée de Foras, si dignement continué par le Comte de Mareschal de Luciane : Armoriai et Nobiliaire de l'ancien Duché de Savoie.  LETTRES  DE  SAINT FRANÇOIS DE SALES  ANNEE 1615 (Suite)  MLXXXVI A MADAME DE LA FLÉCHÈRE (0 Le Saint n'agrée pas que ses amis se déchargent sur lui d'une responsabilité qui leur incombe. — Un précepteur difficile à trouver même chez les rois. — Qu'on sabstienne d'accabler de devoirs les élèves. — Défense d'un pro- fesseur. — Que faire quand le corps et l'esprit sont languissants. Annecy, i^'- juin 1615. Ma très chère Fille, Les porteurs de vos précédentes lettres m'ont pris en un tems auquel j'estois si fort embarassé de gens et d'affaires que je ne sçavois ou j'en estois, et ne pouvois me desrobber pour vous faire response, laquelle d'ailleurs je ne sçavois comme vous faire, par ce que vous presup- posies que monsieur de Charmoysi mon cousin (2) m'eust donné charge de pourvoir au changement de maistre de vos enfans (3', et jamais il ne m'en avoit fait un seul ( I ) Madeleine de la Forest (voir tome XIV, note ( i ), p. i). ( 2 ) Claude de Charmoisy (voir tome XII, note ( i ), p. 216) . ( 3 ) Il s"agit des enfants de la destinataire, de MM. de Charmoisy et de Vallon, élèves des Barnabites d'Annecy : Charles de la Fléchère (voir tome XV, note [z], p. 86), qui avait alors onze ou douze ans; Henri de Charmoisy, né LHTTRhS VII I  2 Lettres de saint François de Sales mot, bien quil m'eust escrit seulement le jour précèdent. De sorte que, quand cet honneste homme que vous m'en- voyastes me vint parler de cela et que je vis la lettre de monsieur de Charmoysi, je fus tout surpris et dis que je n'avoys point de charge de cela, et que mesme, m'estant enquis des Pères Barnabites (0 et de plusieurs autres sil y avoit du mal en M. Rosset ( = ), pour lequel on le deust renvoyer, je n'avois rien peu treuver qui meritast cela. Mays que, puisque monsieur de Charmoysi et monsieur de Vallon (3) estoyent icy, c'est a dire se devoyent voir le jour suivant, que c'estoit a eux de le renvoyer, si bon leur sembloit. Et sur cela, M. de Vallon se chargea de rechef de s'enquérir des deportemens du sieur Rosset, et en alla parler aux Pères Barnabites et a d'autres qui, comme il me dit par après, treuverent fort estrange qu'on parlast de ce changement; et alla treuver monsieur de Charmoysi qui m'escrivit une lettre par laquelle il me mandoit en termes généraux, que j'avois tout pouvoir, et ne me disoit nulle resolution. Sur quoy, je ne sceu que dire non plus, car vous ne m'avies rien marqué de particulier des defautz de M. Ros- set. En somme, je conclus a iVL. de Vallon qui m'apporta la lettre, qu'en leur absence et la vostre je prouvoirois aux enfans, quand je m'appercevrois quil y eust chose qui meritast que j'y misse la main, pour le devoir que  vers le milieu de 1601, et Claude-François de Vallon, baptisé le 15 mai 1605. Outre les liens de parenté, une étroite amitié unissait leurs familles ; en parlant d'eux à M""^ de la Fléchère, le Saint pouvait donc lui dire « vos en- fans. » A regard des deux derniers, dont les parents avaient eu à subir tant de tribulations (cf. le tome précédent, note (3), p. 10, et note ( i ), p. 100), nul doute que la châtelaine de Rumilly n'ait rempli l'office d'une vraie mère. ( I ) Voir le tome précédent, notes ( i ), p. 189, ( 4 ), p. 228, et ( 2 ), p. 354. Les classes avaient été ouvertes le 2 novembre 1614. (2 ) Parmi plusieurs ecclésiastiques qui portaient à cette époque le nom de Rosset, on peut proposer Jean-François Rosset, sous-diacre le 20 décembre 1614, diacre le 14 mars et prêtre le 4 avril 1615, institué le i^j août suivant, recteur de deux chapelles dans les églises de Passy et de Saint-Gervais. Pourvu le 19 décembre i6r6 d'un canonicat à la Collégiale de La Roche, dont il fut le septième custode, il devint, le 6 juillet 1618, curé de la paroisse de Saint-Laurent-sous-Cornillon. (R. E.) (3) Jacques de Gex, seigneur de Vallon (voir tome XII, note ( i ), p. 260, et tome XVI, note ( i ), p. 99).  Année i6 15 3 je leur avois a tous trois ; mais que les pères et mères estans presens, c'estoit a eux de s'en accorder et de le faire; et que je m'en remettois a eux, puisque principa- lement monsieur de Charmoysi requeroit en la lettre que vous m'envoyastes, des conditions en un maistre qu'on ne treuve pas mesme es maistres ou précepteurs des Roys : un maistre qui n'eust rien a faire qu'après les enfans, ni pour dire la Messe, ni pour estudier d'estude particulier. Or en somme, il ne me sembloit pas raysonnable que les pères estans presens, je fisse rien en cela, n'y ayant rien qui pressast (que je sceusse), et le parti de M. Rosset estant défendu par tant de gens dignes de créance. Voyla tout, ma très chère Fille, sinon quil faut que je vous die que des-ja le changement de M. Romain (0 a M. Rosset fut treuvé mauvais, par ce que ceux la mesme qui parloyent en mal de M. Rosset ont dit despuis quilz avoyent eu tort, et M. de Charmoysi le fit seulement pour ne vous point desagreer, par condescendence. Certes, il ne faut pas craindre que les enfans perdent le tems en ce Collège, ou le P. Prefect (2) mesme fait des répéti- tions particulières, nommément aux vostres, desquelz il a un grand soin, et se contente fort de M. Rosset. Il ne faut pas aussi tenir tous-jours pressé {sic) les enfans de besoigne nouvelle. Hz ont deux grandes leçons le jour, ilz ont des compositions a faire, ilz ont des répétitions fréquentes : ilz ont, a mon advis, tout ce quil faut, et beaucoup plus que nous n'avions de mon tems. Je voy vos enfans qui se font gentilz, et ne me semble pas que vous en deves estre en peyne ; outre que M. Rosset, qui s'est veu a la veille d'estre hors de sa condition avec quelque deshonneur, s'évertuera de faire tous-jours mieux.  (i) Sans doute, Antoine, fils d'Etienne Romain. Tonsuré le 22 février 1614, sous-diacre le 12 septembre suivant, diacre le 14 mars 1615, il fut ordonné prêtre le 19 décembre de la même année. (R. E.) (2) Dans les Acia CoUegii (Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien), D. Vitalien Berretta, qui résidait au collège depuis le 9 novembre 1614, est qualifié de « Préfet des écoles » à la date du 11 novem- bre 1615; l'était-il déjà au mois de juin, ou bien D. Simplicien Fregoso (voir tome précéd., note (2), p. 231) remplissait-il encore simultanément en ce temps- là, les fonctions de supérieur et celles de préfet? Il est difficile de le dire.  4 Lettres de saint François de Sales Et il m'a pieu de quoy il n'a pas nié l'accident qui luy arriva pour avoir mangé hors du logis. Au reste, nostre Mère est guérie (0, avec une grande consolation de voir arriver quantité de damoyselles et dames vefves bien qualifiées, qui demandent place en la Congrégation (2). Elle vous escrivit, et je vous envoyay sa lettre, ce me semble, dans le pacquet auquel je mis la clausule du testament de feu M. Gavent (3). Je désire bien de sçavoir si vous l'aves receue. Il ne se faut point estonner si vostre cors estant inquiété d'infirmité, vostre esprit se treuve aussi un peu languissant, selon la partie inférieure. Il suffit que vostre volonté soit bien debout et résolue de tous-jours estre fidèle. Dieu, a qui nous sommes, nous gardera et fera de plus en plus profiter en son saint amour et au véritable mespris de nous mesme. J'ay bien aussi envie de vous voir, mays quand vous seres remise. Je suis cependant, ma très chère Fille, très parfaitement tout vostre, comme vous sçaves. i''' juin 161 5. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) La Mère de Chantai, alors à Lyon. (Voir au tome précédent, les Lettres mlxxv, mlxxviii, mlxxxi.) (2) Après la véture de M™^ d'Auxerre, première novice de la Visitation de Lyon (voirie tome précédent, note (3), p. 240, et Appendice III), vinrent les réceptions au saint habit de Jéronyme de Villette, 2 juillet 1615, de Jeanne- Françoise Etienne, 15 août, de Catherine et Louise de Villars, Claude de la Martinière et Isabeau Chevalier, 25 août. Une ancienne annaliste note qu'à cette époque « quelques demoiselles, non seulement de la ville de Lion, mais des provinces voisines, s'empressoient a être receiies en cette Maison. Nôtre Mère de Chantai, » ajoute-t-elle, « qui, entre autres dons, avoit celui du discernement des esprits, accorda l'entrée de nôtre Maison a celles qu'elle jugea plus propres a faire honneur a leur vocation. » (Hist. de la Fondation du ler Monastère de Lyon, par la Sœur Gasparde de Saint-Paul.) (3) Probablement, noble et spectable François Gavens ou Gavant, plus tard de Gavant, reçu docteur en droit par lettres du 15 mai 1009. mort le 5 mai 1614. C'est le même, sans doute, qui avait épousé 0'"= Perrine Salteur delà Salle, de Rumilly. Son père, François Gavens, bourgeois de la même ville, notaire public en 1580, fut anobli par patentes du 31 octobre 1597.  ANNÉt 1015 Ç MLXXXVII AU COMTE PROSPER-MARC DE TOURNON (O (inédite) Une absolution que l'Evêque de Genève attend de la courtoisie de son desti- nataire. — Remerciements pour communication de manuscrits. Annecy, 5 juin 1615. Monsieur, Il est vray, j'ay sursis de vous escrire si souvent, pour le respect que je doy a vos affaires, sans que pour cela j'ave laissé de désirer et demander souvent des asseu- rances de vostre santé. En cette espèce de manquemens, je prendray, sil vous plait, l'absolution de vous, que vous ne me refuseres point, en vertu de vostre courtoysie, que j'implore des maintenant, en attendant Ihonneur de vostre praesence quand il vous plaira le nous donner. Et Ihors, je vous protesteray de vive voix ce que la haste de ce porteur ne permet d'escrire qu'en ce peu de motz, que je suis, Monsieur, Vostre très humble serviteur, FRANç^ E. de Genève. 5 juin 1615. Monsieur, je vous remercie très humblement de la communication de ces belles escritures ^^), desquelles je feray selon vostre désir. A Monsieur Monsieur le Comte de Tornon, Gouverneur de Savoye, commandant généralement en l'absence de S. E. Revu sur l'Autographe appartenant à M. Hartwell D. Grissell, à Oxford (Angleterre . (i) Voir tome XIII, note ( i ), p. 336. (2) Le destinataire aimait les lettres (cf. ibid.\ mais il est difficile de savoir quelles étaient « ces belles escritures, » si elles sortaient de la plume du comte, ou si elles avaient pour auteur un autre personnage.  Lettres de saint François de Sales  MLXXXVIII A LA MÈRE DE GHANTAL, A LYON L'anniversaire d'une vocation. — Une race spirituelle que le Saint demande à Dieu de multiplier. — Actions de grâces à la divine Trinité. Annecy, [14 juin 1615 (i).] A mesme que la très souveraine bonté de la divine Trinité renvoyé l'Esprit de son adoration en la sainte Eglise, elle renouvelle, ce me semble, celuy de la sacrée vo- cation de ma très chère, très bonne et très honnoree Mère, laquelle sortant de son païs sans sçavoir ou elle alloit, mais croyant a Dieu qui luy avoit dit : Sors de ta terre Gen., XII, I. et de ton parentage *, elle vint en la montagne qui avoit pour son nom : Dieu la verra; et Dieu Ta veiie, multi- ibid.,xxii, 14, 17. pliant sa race spirituelle comme les estoiles du ciel *. O ! Dieu soit a jamais glorifié, ma très chère Mère, avec laquelle je me res-jouis, ains au cœur de laquelle mon cœur se res-jouit comme en soy mesme. O qu'il soit, ce cœur de ma Mère, éternellement fiché au Ciel comme une belle estoile qui en ayt une grande trouppe autour. Est-il possible que nous chantions éternellement le can- tique de gloire au Père, au Filz, au Saint Esprit? Guy, l'ame de ma Mère le chantera es siècles des siècles. Amen, Et Dieu en sera béni en l'éternité des éternités. Amen. Vive Jésus ! Gloire soit au Père, au Filz et au Saint Esprit, de l'assemblée qu'il a faite de tous ces cœurs pour son hon- neur ; mais, helas ! que de confusion pour le mien qui a si peu fidèlement coopéré a une si sainte besoigne ! Or sus, cette mesme tressainte Trinité, qui est une très souve- raine bonté, nous sera propice, et nous ferons des-ormais sa volonté. Amen. Francs E. de Genève. (i) D'après sa teneur, on voit que cette lettre a été écrite le jour ou la veille de la fête de la sainte Trinité. Le ton affectueux et très confiant de ces lignes, l'allusion à la vocation de la Mère de Chantai semblent indiquer la date proposée, sans exclure toutefois l'année qui suit.  Année 1615  MLXXXIX  A MADAME DE PEYZIEU  Ce qu'il faut éviter et réprimer dans les curiosités d'outre-tombe, à propos de nos parents défunts. — Pourquoi les chrétiens doivent modérer leurs regrets, Annecy, [vers mi-juin] 161 5 (i). Ma très chère Mère, Ayant receu vostre lettre et le message que l'on m'a fait de vostre part, je vous diray que je connois fort dis- tinctement les qualités de vostre cœur, et entre toutes, son ardeur et force a aymer et chérir ce qu'il ayme : c'est cela qui vous fait tant parler a Nostre Seigneur de ce cher trespassé (2), et qui vous porte a ces désirs de sçavoir ou il est. Or, ma chère Mère, il faut reprimer ces eslancemens, qui procèdent de l'excès de cette passion amoureuse ; et quand vous surprendres vostre esprit en cet amusement, il faut soudain, et mesme avec des paroles vocales, re- tourner du costé de Nostre Seigneur et luy dire, ou cecy mesme ou chose semblable : O Seigneur, que vostre pro- vidence est douce ! que vostre miséricorde est bonne ! Hé, que cet enfant est heureux d'estre tombé entre vos bras paternelz, entre lesquelz il ne peut avoir que bien, ou qu'il soit. Ouy, ma chère Mère, car il se faut bien garder de penser ailleurs qu'au Paradis ou au Purgatoire, puisque, ( i) Les douloureuses préoccupations de la mère et les avis appropriés que le Saint lui donne indiquent pour destinataire Françoise de Dizimieu, veuve de Peyzieu, qui avait appris depuis peu la mort d'un de ses fils, (Voir tome XV, note (i), p. 181, et tome XVI, Lettre mlxxx à la même.) On sent, à la lecture de la lettre, que le deuil est récent; cette remarque a suggéré la date que nous lui attribuons. (2) Louis de Peyzieu, seigneur de Sillignieu, tué par les Portugais, le 18 novembre 1614, dans l'île de Maragnan. (Voir au tome précédent, les notes (i), pp. 65, 66, 368.)  8 Lettres de saint François de Sales grâces a Dieu, il ny a point de sujet de penser autrement. Retirés donques ainsy vostre esprit, et après cela, diver- tissés-le a des actions d'amour envers Nostre Seigneur crucifié. Quand vous recommanderas cet enfant a la divine Ma- jesté, dites-luy simplement : Seigneur, je vous recom- mande Tenfant de mes entrailles, mays bien plus Ten- fant des entrailles de vostre miséricorde, engendré de mon sang, mays reengendré du vostre. Et passés outre; car si vous permettes a vostre ame de s'amuser a cet object proportionné et aggreable a ses sens et a ses pas- sions inférieures et naturelles, jamais elle ne s'en voudra oster, et, sous prétexte de prières, de pieté, elle s'esten- dra a certaines complaysances et satisfactions naturelles, qui vous osteront le loysir de vous employer autour de Tobject surnaturel et souverain de vostre amour. Il se faut sans doute modérer en ces ardeurs des affections natu- relles, qui ne servent qu'a troubler nostre esprit et divertir nostre cœur. Or sus donq, ma très chère Mère, que j'ayme d'un amour vrayement filial, ramassons bien nostre esprit dans nostre cœur et le rangeons au devoir qu'il a d'aymer très uniquement Dieu, et ne luy permettons aucun amu- sement frivole, ni pour ce qui se passe en ce monde, ni pour ce qui se passe en l'autre ; mays, ayant départi aux créatures ce que nous leur devons d'amour et de charité, rapportons tout a ce premier amour magistral que nous devons au Créateur, et conformons-nous a sa divine volonté. Je suis très afFectionnement, ma chère Mère, Vostre plus fidèle et affectionné enfant, F.  Annrh 1615  MXC  A MADAME DE L\ FLRCTÏERE La lassitude du corps et les passions de l'âme. — Dans quel cas s'asseoir au temps de la prière. — Les distractions et l'oraison. — La vie en dehors de Dieu est une mort. — C'est au Saint-Esorit de pousser les âmes comme il lui plaît. Annecy^ 20 juin 1015 ( i ). Et moy, ma très chère Fille, j'ay esté grandement consolé desçavoir de vos nouvelles, puisque mesme elles sont toutes fort bonnes; car, quant a la chère fille (0, c'est un signe désirable pour sa future pieté que le cors se ressente des affections du cœur et quil en devienne las, car il en print ainsy a Nostre Seigneur mesme * et a *Joan.,iv, 6. plusieurs de ses plus grans Saintz. Vous Taves bien conseillée qu'elle s'assise, et il faut qu'elle le face avant que les maux de cœur la prennent ; c'est a dire qu'elle face toute l'orayson assise, ayant au paravant fait une adoration a genoux. Et quant aux distractions, pourveu qu'ell'ayt le désir de prier un peu ardent, elles cesseront petit a petit; et si elles ne cessent pas, Torayson en sera d'autant meilleure, comme faite sans goust ni interest, pour le pur amour de plaire a TEspoux. Ce désir qui se présente en l'orayson et cette volonté qui luy vient tous les jours sont aussi des bonnes mar- ques ; mays le tems fera voir plus clairement a quoy elle se devra résoudre. Et ce pendant, nostre bonne Mère viendra (3), avec laquelle elle conférera et tirera d'elle beaucoup de lumière. J'iray en Chablaix ce moys d'aoust (4), Dieu aydant, ou j'auray toute commodité de la voir, si elle y est, pourveu (i) La date manque à la copie conservée à Turin, mais celle que donne Migne, tome VI, col. 984, d'après l'Autographe, doit étrejuste. ( 2 ) Gasparde d'Avisé, nièce de M'"« de la Fléchère, qui corn nençait à sentir des attraits pour la vie religieuse. (Voir le tome précédent, note (6), p. 40.) (5) La Mère de Chantai ne rentrait à Annecy qu'à la fin d'octobre. (4) Défait, saint François de Sales partit pour le Chablaisvers le 18 août.  lo Lettres de saint François de Sales qu'on ne s'apperçoive point des bonnes pensées dont il est question, car ce sont choses que le monde contredit tous-jours. Si nous sçavons le jour auquel la seur Gavent ira a Belloci, nous y ferons rencontrer des gens pour l'assister et voir l'affaire ( O. Je feray ce quil faut pour chasser ces misérables femmes. Nous bénirons aussi Teau; mais vous ne me dites point a qui nous la donnerons. Je loue Dieu du mari (2) et suis son serviteur. Nous verrons dumaistre(3) ce que c'en sera. Ma très chère Fille, vives toute a Dieu, hors lequel la vie est une mort. Vous faites bien de ne point pousser la fille (4), c'est au Saint Esprit de luy donner les inspirations selon son bon play- sir; maispourmoy, j'ay quelque espérance quil la rendra toute sienne très parfaitement, et ne doute point qu'au moins elle ne le soit suffisamment pour obtenir la vérité, car cett' ame la est bien marquée. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) Jean-Jacques Gavens, docteur ès-droits, avocat au souverain Sénat de Savoie, avait épousé Prospère Dacquin ; le contrat dotal est du 17 avril 1603. Par ce contrat, François Gavens son père (voir ci-dessus, note (3), p. 4) lui ayant cédé un domaine à Versonnex, qu'il reprit en 1608, Jean-Jacques plaida pour obtenir une compensation sur d'autresbiens possédés par le même François à Bellossier. M"^ Gavens qui devait aller « a Belloci » pourrait être sa sœur; c'est assurément d'elle que le Saint écrivait le 30 avril 1617 à M."^^ de la Fié- chère : « J'ay dit louange en mon cœur a la Providence céleste sur le trespas « de la pauvre Gavens. » (2) Claude-François de la Fléchère, mari de la destinataire, ( 3) Sans doute, Jean-François Rosset, précepteur de Charles de la Fléchère. (Voir ci-dessus, note (2), p. 2.) (4) Gasparde d'Avisé.  Année 1615 n MXCI A MADAME DE RUANS (O Les visites du Saint-Esprit parmi les tribulations. — Exhortation à l'amour de la Croix. Annecy, 21 juin 1615. Madame, Je vous remercie de la confiance que vous aves en moy, qui réciproquement vous chéris d'une affection toute particulière, et ne cesse point de vous souhaiter les vrayes consolations du Saint Esprit entre les tribulations des- quelles sa Bonté vous visite, pour vous exercer en l'humi- lité et patience. Je vous escris sans aucun loysir, mais non pas sans beaucoup de désir de vous servir. Quand le livre dont vous me parles sera imprimé, qui ne peut estre de deux mois ( 2 ), vous en aures. Dieu aydant, que je prie cependant de vouloir estre luy mesme le livre de vostre cœur, dans lequel vous lisies et apprenies a bien aymer sa tressainte Croix, delaquelle il vous fait parti- cipante. Je suis de tout mon pouvoir, Madame ma chère Fille, Vostre plus humble serviteur. Francs, e. de Genève. XXI juin 161 5. A Madame Madame de Ruan. Revu sur TAutographe conservé à la Visitation de Vitoria (Espagne). (i) Françoise, fille de Pierre de Simiane, seigneur de la Côte et de Moy- rens, et de dame Marie de Baronnat, avait été mariée (contrat dotal du lo fé- vrier 1603) à Léonard Michal, seigneur de Ruans, qui testa le 20 septembre 1614. La destinataire mourut en septembre 1628. De ses quatre filles, Claire- Marguerite, l'une des sœurs du petit habit reçues par les fondatrices de la Visitation de Chambéry, charma la Mère de Chantai par sa ferveur. (Voir ses Lettres, Paris, Pion, vol. II, 1877, p. 244.) (2) Le Traitté de V Amour de Dieu, qui ne fut livré à l'impression qu'en 1616. (Cf. le tome précédent, note (5), p. 361, et tome IV, pp. xiv, xv.)  12 Lettres de saint François de Sales MXCII A madame de la croix d'autherin (0 Dans la correction des défauts, ne pas séparer la pratique de Thumilité de la fidélité envers Dieu. — En quel cas le Bienheureux ne juge pas mauvais qu'on soit un peu privé de la sainte Communion. — Utilité des confessions fréquentes. — Annonce d'un voyage à Lyon et en Chablais. — La lecture spirituelle. Annecy, 23 juin 1615 (2;, Je respons a vos deux lettres, ma très chère Fille, vous conjurant avant toutes choses de ne plus appeller importunité pour moy la réception de vos lettres, la- quelle, en vraye vérité, m'est tous-jours extrêmement aggreable. Je voy bien en la première, vostre cœur tous-jours plein de bons et vertueux désirs, car il est de naturel fort bon ; mais, ce me dites vous, vous ne vous corriges pas asses puissamment de vos imperfections. Vous sçaves que je vous ay souvent dit que vous dévies estre affec- tionnée esgalement a la prattique de la fidélité envers Dieu et a celle de Thumilité. De la fidélité, pour renoiier vos resolutions de servir la divine Bonté aussi souvent que vous les rompres, et vous tenant sur vos gardes pour ne point les rompre; de Thumilité, quand il vous arri- veroit de les violer, pour reconnoistre vostre chetifveté et abjection. Mays certes, il faut tout de bon avoir soin de vostre cœur, pour le purifier et fortifier selon la mul- titude et grandeur des inspirations que vous en aves. (i) Jeanne- Antoine de Chapot, femme de Charles-Sébastien de Pradel- Autherin, seigneur de la Croix. (Voir tome XV, note (i), p. 357.) (2) Migne, tome V, col. 915, place cette lettre en 1614, et en 1621 (d'après l'édition princeps) la suivante, écrite évidemment le même jour et à la même dame que celle-ci. Or, ni 1614, ni 1621 ne s'accordent avec notre texte qui mentionne deux voyages du Saint, l'un à Lyon, l'autre en Chablais ; ces voyages devaient se faire entre la fin de juin et septembre. En 1614 et en 1621, nous n'en voyons aucune trace entre ces deux mois, mais au contraire, tout se réunit en faveur de 1615. Impossible donc de mettre en doute la date attribuée à cette lettre et à celle qui la suit.  Annf.h ihi!^ i^ Et je ne treuve pas mauvais que vous soyes un peu privée de la Lressainte Communion, puisque c'est Tadvis de vostre confesseur, pour voir si le désir de retourner a la fréquentation d'irelle vous fera point un peu prendre plus garde a vostre amendement. Et tous-jours feres vous bien de vous humilier fort aux advis de vostre confesseur, qui void Testât présent de vostre ame, lequel, quoy que je m'imagine asses sur ce que vous m'en dittes par vos lettres, si est-ce qu'il ne me peut pas estre conneu si particulièrement comme a celuy a qui vous en rendes conte. Or j'entens, qu'encor que vous esloigneres un peu vos Communions, vous ne laisseres pas pour cela de bien suivre la fréquence des confessions, car de celles ci, il n'y peut avoir aucune rayson de les esloigner ; au con- traire, elles vous seront utiles pour assujettir vostre esprit qui, de soy mesme, n'ayme pas la sujettion, et pour l'humilier et luy faire mieux discerner ses fautes. Je vay a Eion pour contenter Monseigneur l'Arche- vesque de ce lieu-la, qui vouloit venir vers moy en toute façon si je ne me fusse résolu d'aller auprès de luy (0, puisque c'estoit bien la rayson que je le prévinsse en cet endroit. Ce sera un voyage de 15 jours ou environ (2), après lequel j'en veux faire un autre en Chablaix 13), pour estre de retour de tous deux en septembre ; mais je repas- ser ay par icy (4), et seray tous-jours bien ayse de vous escrire, si je puis. Retenes bien vostre esprit en Dieu ; lises le plus souvent que vous pourres, mais peu a la fois et avec dévotion. Aymes tous-jours mon ame qui chérit très parfaitement (i) « Le lendemain de la Nativité de sainct Jean Baptiste, » raconte Charles-Auguste (Histoire, etc., liv. VIII), « ce bien-heureux Prélat partit d'Anicy pour aller voir le tres-vertueux Archevesque de Lyon, Denis Simon de Marquemont, qui despuisa esté Cardinal, et lequel sçachant qu'il arrivoit, luy envoya soudain un prestre avec une lettre, par laquelle il luy signifioit que tout aussi tost il luy seroit au devant, et Tinvitoit en son archevesché, l'appellant l'honneur et la couronne des Prélats. » (Voir cette lettre à l'Ap- pendice I.) (2) Parti le 2^ juin d'Annecy, saint François de Sales arriva à Lyon le 28, et y séjourna jusqu'au 10 juillet. (3) Voir ci-dessus, note (4), p. 9. (4) Par Annecy, d'où le saint Evèque ne s'absenta qu'après un grand mois.  14 Lettres de saint François de Sales la vostre. Resalues monsieur vostre mary (0 de ma part, et l'asseures que je suis son serviteur. Epist. seq. Je VOUS respons a part, en la feuille ci-jointe *, a la demande que vous m'aves faite pour la dame vefve (2), affin que, si vous voules, vous puissies monstrer ma res- ponse ; et suis invariablement, ma très chère Fille, tout vostre et Vostre serviteur plus humble, Francs E. de Genève. Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy. ( T ) Noble Charles-Sébastien Autherin, seigneur de la Croix et de Césarches, fils de Claude de Pradel Autherin et de Polixène Veillet. Il mourut le i6 novembre 1654, laissant plusieurs enfants. (Cf. tome XV, note ( i ), p. 357.) (2) Impossible de découvrir son nom.  MXCIII . A LA MÊME Vengeances et réparations. — Quelle doit être l'attitude d'une personne hono- rable en face des diffamations, et le meilleur moyen de répondre aux chan- sonneurs. — Dieu protège l'honneur des gens de bien. 23 juin 1615 (i). Madame, Je respons a vostre dernière demande, en peu de paroles, que je n'ay pas changé d'advis despuis que Partie III, ch. VII. j'escrivis V Introductiofi a la Vie dévote* ; diMcontrdâre, je me voy tous les jours affermi en mon sentiment pour ce qui regarde le support des injures. La passion, a l'abord, nous fait tous-jours désirer des vangeances ; mais quand nous avons un peu de crainte de Dieu, nous n'osons pas les appeller vangeances, ains nous les nom- mons réparations. Que cette bonne dame (2) me croye, et qu'elle n'entre point en terme de procès pour ces chansons, car ce ne seroit que multiplier le mal, en lieu de l'estoufiFer. Jamais (i) Pour la date de cette lettre, voir ci-dessus, note (2), p. 12. (2) Voir le dernier alinéa de la lettre précédente.  Année 1615 15 une femme qui a le vray fondement de Thonneur ne le peut perdre ; nul ne croit ces infâmes diffamations, ni ces chansonneurs : on les tient pour des meschans. Le meilleur moyen de reparer les ruines qu'ilz font, c'est de mespriser leurs langues qui en sont les instrumens, et de leur respondre par une sainte modestie et compassion. Mays sur tout, certes, il n'y a point d'apparence que ce pauvre diffamateur se sousmettant a reparer autant qu'en luy est l'injure, au jugement des parens, on aille prendre cet autre biais de playdoyeries, c'est a dire de labirinthes et abismes de conscience et de moyens. Or, je ne desappreuverois pas qu'il confessast sa faute, declairast son animosité et demandast l'oubly ; car encor qu'il soit de peu d'authorité, ayant commis cet acte, si est ce pourtant que c'est tous-jours quelque sorte de lumière pour l'innocence, de voir ses ennemis luy faire hommage. Mays, plustost que de venir par procès, elle devroit faire tout autre chose. J'ay une récente expérience de la vanité, ou plustost du dommage que les procès apportent en ces occasions, en une des plus vertueuses dames du Maconnois (0, qui s'est infiniment mal treuvee d'avoir quitté mon advis pour suivre l'impétuosité de la passion de ses parens. Croyés moy, ma chère Fille, l'honneur des gens de bien est en la protection de Dieu, qui permet bien quelquefois qu'on l'esbransle pour nous faire exercer la patience, mais jamais il ne le laisse atter- rer, et le relevé soudain. Vives toute a Dieu, pour lequel je suis. Madame, Vostre humble serviteur, Veille de saint Jean. P^^^^^' E. de Genève. A Madame de la Croix d'Auterin. Revu sur une copie conservée à la Visitation d'Annecy. (i) D'après la copie qu'à défaut de l'Autographe nous reproduisons ici. on voit que la lecture a fait hésiter entre de ma connoissance et du Maconnois . Toutefois, nous croyons devoir préférer cette dernière leçon; et de fait, la vertueuse dame pourrait bien être M.™^ de Grandmaison, que le Saint avait dû consoler contre des pasquins calomnieux. (Voir le tome précédent, Lettre CMXxx, p. 95.) Elle habitait le Maçonnais, dont son mari était gouverneur. (Voir tome XV, note ( i ), p. 284.)  i6 Lettres de saini François de Sales  MXCIV AU Cardinal denis-simon de marquemont ARCHEVÊQUE DE LYON (0 (fragment) L'intention de saint François de Sales en fondant un nouvel Ordre de Reli- gieuses. — Quelle doit être leur unique prétention.  Annecy, [juin] 1615 (2^.  C'est pour donner a Dieu des filles d'orayson et des âmes si intérieures, qu'elles soyent treuvees dignes (i) Denis-Simon, né à Paris le i®"" octobre 1572 de Marie Rouillard et de Denis-Simon de Marquemont, secrétaire du Roi et receveur des tailles de Paris, alla à Rome en octobre 1595. Il y avait suivi, en qualité de secrétaire, le duc de Luxembourg et Jacques Davy du Perron, alors évêque d'Evreux, envoyés auprès de Clément VIII pour le remercier de l'absolution accordée à Henri IV. Nommé bientôt après auditeur de Rote pour la France, il accompagna à Florence M. de Sillery, chargé de négocier le mariage du Roi avec Marie de Médicis. L'Archevêque de Lyon, Claude de Bellièvre, étant mort le 26 avril 1612, il obtint son siège, en prit possession par procureur le i^"" février 1613, et en personne, le 9 mars suivant. A la séance d'ouverture des Etats généraux, le 27 octobre 1614, Ms"' de Marquemont eut l'honneur de haranguer Louis XIII, et, deux mois après, celui de présider l'Assemblée du Clergé. Nommé en 1617 ambassadeur de France près le Saint-Siège, il reçut la pourpre, avec le titre de la Très Sainte Trinité in Pincio (19 janvier 1626), et mourut très pieusement à Rome le ib septembre de la même année. On l'inhuma dans son église cardi- nalice où Ton peut lire encore sa louangeuse, mais véridique épitaphe. Ce fut un grand évêque. Sa science du droit, l'habitude des affaires, le crédit dont il jouissait à la cour pontificale et à celle de France, servirent à souhait son cœur d'apôtre, qu'une piété tendre et agissante inclinait à toutes les ini- tiatives généreuses. Il eut sa part, et non la moindre, croyons-nous, dans cet admirable essor de rénovation religieuse qui, dans les premières années du xvii^ siècle, fixa ou restaura les traditions chrétiennes de l'Eglise de Lyon. C'est sous ses auspices, avec ses encouragements, que la ville et le diocèse se peu- plèrent de nouveaux monastères et que les anciens Instituts, débilités par les troubles et les guerres du siècle précédent, reprirent leur vigueur première. On sait que M^"" de Marquemont eut de grandes relations d'amitié avec l'Evèque de Genève, et que son nom demeure étroitement lié à l'histoire de la Visitation. La suite de la correspondance du Saint nous fournira l'occasion de dire, avec plus d'exactitude qu'on ne l'a fait peut-être jusqu'ici, les circons- tances qui amenèrent son intervention, et en quel sens celle-ci modifia les destinées de tout l'Institut. (D'après Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., tome IV ; Péricaud, Notes pour servir à l'Histoire de Lyon, 1846, etc.) ( 2 ) « Je me souviens, » disait un jour à ses Filles sainte Jeanne-Françoise  Annhk i()I5 17 de servir sa Majesté infinie et de l'adorer en esprit et en vérité *. Laissant les grans Ordres des-ja establis dans ■'J'>an., iv, 23, 2^. l'Eglise honnorer Nostre Seigneur par d'excellens exer- cices et des vertus esclattantes, je veux que mes filles n'ayent autre prétention que de le glorifier par leur abbaissement ; que ce petit Institut de la Visitation soit comme un pauvre colombier d'innocentes colomVjes, dont le soin et l'employ est de méditer la loy du Seigneur*, * is., xxxvm, 14, sans se faire voir ni entendre dans le monde : qu elles demeurent cachées dans le trou de la pierre et dans le secret des masures *, pour y donner a leur Bienaymé *Cant., n, 14. vivant et mourant, des preuves de la douleur et de l'amour de leurs cœurs, par leur bas et humble gémissement (0.  de Chantai, « que le Cardinal de Marquemont, ayant demandé un jour à notre glorieux Père quelle intention il avait en fondant une nouvelle Religion de filles, puisque déjà on en comptait un si grand nombre, notre aimable Saint lui répondit promptement: « C'est pour donner à Dieu. » etc. (Sainte J .-F. Frémyot de Chantai^ sa Vie et ses Œuvres, Paris, Pion 1875, tome II, p. 186.) Cette réponse, que nous donnons ici, a dû être écrite, car autrement la Sainte ne l'aurait pu retenir si parfaitement. D'ailleurs, nous savons que le Bienheureux lui communiquait souvent les lettres qu"il envoyait à Lyon et qu'elle en prenait copie. Mais en admettant que cette réponse ait été faite de vive voix, on pourrait la dater des derniers jours de juin, (i) Sa Sainteté Pie X, dans le Bref du 13 décembre 1909, donné à l'occa- sion du troisième centenaire de l'établissement de l'Ordre de la Visitation, commente admirablement ces paroles du Fondateur.  MXCV A L.-\ MÈRE DE CHANT.^L, A LYON Le gouverneur de Lyon, commensal et ami du Saint. — L'union des âmes les rend présentes l'une à l'autre. — Annonce d'un sermon d'amour. Lyon, [2 juillet 1615 ( i).] Le billet d'hier ainsy entrecouppé m'anonça bien quelle estoit mon ame. Hé, vive Jésus, et mon ame vivra ! ( I ) La date de ces lignes est prouvée par les allusions qu'elles renferment. (Voir les deux notes suivantes.) Lettres VII 2  i8 Lettres de saint François de Sales Monsieur d'Alincourt (0 soupa hier céans et y demeura jusques près d'onze heures, résolu de venir au sermon ce matin (2), que je ne pensois estre qu'un sermon par- ticulier. Ce soir je seray auprès de vous et de nos Seurs, marri plus quil ne se peut dire que mon loysir s'en aille ainsy. Pour Dieu, ma très chère Mère, tenons nostre cœur en suavité, tous-jours inséparablement présent a soy mesme, puisque l'extraordinaire unité dont Dieu l'a doiié peut bien faire ce coup, et que la nécessité du service de sa gloire requiert que nous employons cette grâce a cela. Cf. Heb., IV, 13. O Seigneur, a qui tout est présent *, donnes a nostre esprit une telle présence de soy mesme comme vous luy aves donné un'unité, affin quil vive autant consolé quil est requis pour vous bien servir en vostre présence, Seigneur, et en la sienne de soy mesme. Vive Jésus ! Amen. Je m'en vay faire un sermon d'amour, le plus ardem- ment que je pourray. Revu sur TAutographe conservé à la Visitation de Nancy. (i) Charles de Neufville, marquis d'Alincourt (voir le tome précédent, note ( I ), p. 2^8). Saint François de Sales était arrivé à Lyon le 28 juin (cf. ci-dessus, notes ( i ), (2), p. 13,) L'Archevêque, « accompagné de plusieurs Comtes » et des principaux personnages, s'était porté au devant de lui et, dit Charles-Auguste {Histoire, etc.liv, VIII), « après les compliments faicts d'un costé et d'autre, le conduisit et receut tres-magnifiquement. Ce bien-heureux Evesque, « ajoute-t-il, « fut tres-splendidement traicté et honnoré de la ville, prescha le jour de sainct Pierre et de sainct Paul, conféra avec ces bonnes dames et damoiselles qui desiroient d'embrasser Tlnstitust de la Visitation, conclut avec le Reverendissime Archevesque d'ériger une Congrégation à Lyon, et en fin jura une tres-saincte et tres-estroicte amitié avec ce grand Prélat, qui ne luy permit point de se retirer qu'avec regret. » Pour faire honneur à son hôte, M»"" de Marquemont invitait à sa table le premier personnage de la cité, et c'est sans doute pour prolonger le charme qu'il goûtait en la compagnie d'un tel Saint, que le gouverneur de Lyon s'invitait au sermon mentionné dans la présente lettre. (2) Le 2 juillet, fête de la Visitation, TEvêque de Genève prêcha pour la vêture de Soeur Françoise-Jéronyme de Villette. Nous savons par VAntiée Sainte (tome VIII, p. 114) qu'il dit dans cette circonstance « des choses admi- rables sur l'état religieux. » Ne serait-ce pas le « sermon particulier, » le « sermon d'amour » auquel M. d'Alincourt eut la pieuse curiosité d'assister.* Rien de plus vraisemblable.  Année 1615 19  MXCVI A LA MÊME, A LYON (billet inédit) Mémoire et visite pour une affaire. [Lyon, i<=''-9 juillet 1615 (i).] Il ny a pourtant remède ; on me dit quil faut que je présente le mémorial, puys on me dit quil ne faut pas l'attendre. Or sus, j'iray aujourdhuy voir ce seigneur (2) : Dieu y mette sa main. C'est Tescrit mesme que je don- nay a M. Sedite (3), quil faut faire voir et corriger. Revu sur l'Autographe qui appartenait aux RR. PP. Missionnaires de Saint-François de Sales, à Annecy. (î) Le « mémorial » mentionné dans ces lignes faisait peut-être partie des pièces exigées pour la fondation du Monastère de Lyon, et c'est à Lyon même, quand ils s'y trouvaient tous deux dans la première quinzaine de juillet 1615, que les Fondateurs durent se concerter pour rédiger et présenter ce document. C'est la seule conjecture qui nous permette de dater ce billet et le suivant avec quelque probabilité. (3) Serait-ce M. d'Alincourt, gouverneur de Lyon ? (Cf. note ( i ) de la page précédente.) (3) Impossible d'identifier ce personnage, qui paraît être un secrétaire ou un officiai chargé d'enregistrer les actes.  MXCVII A LA MÊME, A LYON Annonce d'un départ et d'une visite. [Lyon, i«''-9 juillet 1615 (i).] Ma très chère Mère, Avec mille bonsoir {sic), je vous avertis du départ du (i) Ici encore il est question dun « mémorial »; ce billet a dii suivre à un jour près celui qui précède. Du reste, en confrontant l'écriture, on retrouve dans les deux les mêmes caractères et le même mouvement de la main.  20 Lettres de saint François de Sales P. Cordelier i^\ qui sera demain un'heure devant jour; si vous aves escrit, je fera}^ le mémorial. Ma3^s en atten- dant, conserves vous, je vous en supplie, ma très chère et très bonne Mère , que je verray , Dieu aydant , demain. Bonsoir, ma très chère Mère. Nostre Seigneur soit a jamais au milieu de nostre unique cœur. Amen. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Poitiers. (i) Ce Religieux ne nous est pas connu : peut-être devait-il se rendre à Annecy.  MXCVIII AU SUPÉRIEUR d'une COMMUNAUTÉ Charité compatissante du Saint en faveur d'un Religieux expulsé de son Ordre. Annecy, 13 juillet 1615 (i). Mon Révérend Père, Le Frère N. vint a moy au plus fort de son afflic- tion (2), et puis dire qu'il estoit plus mort que vif, tant sa désolation estoit extrême ; et je me resouvins de Celuy qui (*) linuin finnigans non extinguit, et quod confrac- xn^so!^"'^' ^^' t'^i^ ^st non conterit *. Il me présenta ses patentes de  (*) n'éteint pas la mèche encore fumante et qui ne broie pas ce qui est brisé. (1) L'édition de 1641 date cette lettre de 1618, mais à tort; c'est seulement en 1615 que le Saint fit un séjour un peu prolongé à Lyon, L'erreur est facile à la lecture, entre 1615 et 1618. (2) Le Religieux qui inspirait de la compassion au Bienheureux habitait très probablement un monastère voisin du diocèse de Genève ; il venait d'en être chassé, puisqu'il était « au plus fort de son affliction » en abordant le saint Evéque. Alors comme aujourd'hui, les Dominicains, Capucins, Corde- liers, Chartreux, Minimes, Feuillants, etc., recevaient l'appellation de « Frères », même quand ils étaient prêtres et profès. Malgré de nombreuses recherches, il ne nous a pas été possible de découvrir à quel « parc » appar- tenait la M brebis » égarée, et, par conséquent, de désigner le destinataire de cette lettre.  Annéf 1615 21 démission, éjection et expulsion de l'Ordre, et, par ses larmes, impetra aysement de moy le séjour de quelques semaines en ce diocèse, pendant lesquelles je fus a Lion pour y visiter Monseigneur TArchevesque, chez lequel le R. P. V. me parla. Et pour dire ma pensée, il me parla selon mon cœur, car il me recommanda ce pauvre homme, prestre et lié par les vœux de Religion, affin qu'il fust aucunement consolé. Despuis, je fis encor plus volontier ce que je voulois faire en charité autour de cette ame. Mais, mon Révérend Père, c'a tous-jours esté avec cette reserve, qu'elle res- pecteroit et honnoreroit en toutes occurrences vostre Ordre, et se comporteroit humblement envers tous ceux qui en sont. Et sur vostre advertissement, je tiendray encor plus fortement la main sur luy pour cela, tandis qu'il demeurera dans mon diocèse, ne désirant rien tant que de donner satisfaction aux Religieux, et particu- lièrement a ceux de vostre condition. Mays, mon Révérend Père, vous me proposes le retour de cette brebis en vostre parc. Je croy qu'elle ne desireroit pas mieux, et sur tout, s'il vous plaisoit de l'asseurer que vous favoriseries sa bonne intention de quelque doux accueil et de quelque modération en la pénitence que peut estre vos Constitutions ordonnent a ceux qui revien- nent. Que si vous prenes le soin de me tenir adverti de vostre volonté pour ce regard, je coopereray a ce bon œuvre de tout mon cœur; duquel vous saluant bien hum- blement et vous souhaittant toute sainte bénédiction, je demeure. Mon Révérend Père, Vostre très humble frère et serviteur en Nostre Seigneur, FRANC^ E. de Genève. D'Annessi, ce 13 juillet....  22 Lettres de saint François de Sales  MXCIX A LA MÈRE DE CHANTAL, A LYON Le retour de TEvêque de Genève à Annecy; la présidente Le Blanc l'accom- pagne à Saint-Priest. — M"'s de Travernay à l'article de la mort; une petite histoire villageoise. Annecy, 14 juillet 1615. Par cette première commodité, je vous rens conte de nostre voyage, ma très chère Mère. Certes, quand Mon- sieur TArchevesque me laissa (0, il me tesmoigna beau- coup d'amitié. Or, je cultiveray la faveur que ce grand Prélat me fait, le plus soigneusement qu'il me sera possible. Nous vinsmes donq ce jour-la a Saint Prix (2), et tous- jours avec la bonne madame la Présidente [Le Blanc] qui m'ouvrit son cœur, autant que l'occasion le luy permit, fort franchement. C'est un bon cœur, en vérité, et auquel je souhaitte beaucoup de vraye prospérité. Elle a grand besoin d'estre assistée et appuyée bien doucement, pour la multitude des travaux que la vivacité de son esprit luy donne, qui ne cesse guère de luy fournir des motifz pour aggrandir son mal (3). Elle demanda congé a Mon- seigneur TArchevesque d'entrer vers vous, lequel le luy accorda, et luy donna mesme espérance de luy permettre d'y coucher (4). Quand cela arrivera, aydés-la bien, ma (i) L'Archevêque de Lyon semble avoir accompagné le Saint jusqu'à sa première étape, et très probablement, ce fut le vendredi, 10 juillet. (2) Saint-Priest, à douze kilomètres de Lyon. (3) Parmi les dames de qualité qui visitèrent la Mère de Chantai à Lyon, la femme du président Pierre Le Blanc de Myons fut la première à lui découvrir son cœur. En possession de tous les avantages qui semblaient devoir lui assurer une vie heureuse, elle en était venue, dit la Mère de Chaugy, à de tels ennuis intérieurs, qu'elle « soupiroit de jalouzie sur le bonheur des bergers. » Mais, « des que cette bonne dame heut descouvert son ame a nostre unique Mère et, quelque temps après, a nostre bienheureux Père quy fust faire un voyage a Lion, ces ingénieuses mains osterent de son cœur toutes ces ronces. » (Hist. de la Fondation du Monastère de Grenoble.) (4) La Présidente dut profiter de la permission, car l'annaliste ajoute (ibid.) : « Comme elle demeuroit pour lors en l'un de ses chasteaux aux  Annhi- 1615 23 très rherc Mcre, car elle le mérite et en a besoin. Si elle vient icy l'année prochaine, comme elle en a fait le des- sein (0, alhors nous aurons plus de moyens de la bien consoler. Je vous escriray un petit billet a part aflfin qu'elle le voye, ayant bien du désir qu'elle sache que je la chéris et estime, pour la plus grande gloire de Dieu. J'arrivay samedy a Sessel i-\ ou je preschay le diman- che matin, et vins coucher en cette ville, et treuvay a mon arrivée nouvelles que madame de Treverney (3) estoit en l'article de la mort. Je partis hier de grand matin pour luy rendre mon dernier devoir, puisqu'elle estoit de mes filles. A mon arrivée, elle s'eslança a mon col avec une joye bien extraordinaire a son humeur melancholique, elle qui jamais ne me fit aucune caresse. En somme elle se remit tellement, qu'encor que je ne pense pas qu'elle la fasse longue, si est-ce que je pense qu'elle vivra encor plusieurs jours (4). Elle se confessa derechef a moy, pour sa consolation et non par nécessité, car elle avoit receu le jour précèdent tous ses Sacremens, et mesme l'Extrême Onction, et fit la plus absolue indifférence que j'aye jamais veuë ; car ses domestiques et voysins la pressant de faire des vœux pour guérir, jamais elle ne voulut, mays dit que ce que Dieu feroit luy seroit le plus aggreable et qu'elle ne voudroit pas, par le moindre désir du monde, demander a Dieu ni la vie ni la mort, luy laissant sans reserve sa vie entre ses mains, pour en faire a son gré; et ce qu'il champs, proche de Lion, et que la clôture n'estoit pas establie, nostre Institut n'estant encore reduict en Religion formelle, elle alloit souvent raviver le feu de son amour divin en nostre Monastère, avec tant de consolation, qu'elle se beignoit en toutes les pratiques de la vie religieuse... ainsy qu'une novice. » (i) Il semble que ce voyage à Annecy n'eut pas lieu, et sans doute par cause de maladie : au mois de septembre 1616, la Mère de Chantai parle en effet à la Mère Favre (Lettres, 1877, vol. I, p. 140) d'une maladie de « Sœur Barbe-Marie. » C'est ainsi que se faisait appeler M"'^ Le Blanc. (2) Samedi, 11 juillet, à Seyssel sur le Rhône. ( 3) Péronne de Montfalcon, dame de Travernay (voir tome XIV, note (i), p. 332)- (4) Les prévisions du Saint furent dépassées ; la malade survécut plusieurs années à son bienheureux Père spirituel, mais sans doute grâce à ses prières, qui parurent miraculeusement efficaces aux médecins eux-mêmes.  24 Lettres de saint François de Sales luy plairoit seroit aussi ce qu'elle vouloit. Mais elle disoit cela si fermement, que je voyois clairement que c'estoit tout de bon que ce luy estoit tout un. Et, bien qu'elle dist que sa Françon, ma filleule (0, luy touchoit un peu le cœur parce qu'elle estoit encor si petite, néanmoins elle adjoustoit, non seulement avec force, mays avec tendreté, que si Dieu la retiroit, il sçavoit bien ce qu'il feroit de cette fille, et que, pour elle, elle ne vouloit nullement désirer de vivre, sinon tout ainsy que Dieu le voudroit. En somme, je luy dis ce que je sceu, et tout a son gré. Je la laissay en paix, sans appa- rence de mal, sans plainte, sans tesmoigner aucune sorte de passion, sinon de revoir son mary ( = ), qui estoit la seconde chose qu'elle avoit désiré avant son trespas. Ces petites histoires villageoises me playsent et m'édifient, et c'est pourquoy je vous les raconte. J'escris a Monseigneur l'Archevesque par honneur. Ma très chère Mère, je suis, comme vous sçaves vous mesme, tout vostre, sans reserve ni différence quelcom- que . Vives toute généreusement et noblement joyeuse en Celuy qui est nostre unique jo3^e. Je salue du fond de mon cœur ma très chère fille ma Mère et mes chères Filles (3\ avec nos chères Novices (4), entre lesquelles je chéris particulièrement ma Sœur Françoise Hieronime ma cousine, parce qu'elle est la cadette de Lion. A Dieu, ma très chère Mère, le doux Jésus soit a jamais nostre vie. Amen. France E. de Genève. Le 14 juillet 161 5. (i) Anne-Françoise, fille cadette de M"^^ de Travernay. (Voir tome XV, note (3), p. 352.) (2) Probablement, Balthazard de Mouxy, seigneur de Travernay, se trou- vait encore en Piémont, où il avait été occupé à la guerre. (Cf. le tome précédent, note (i), p. 260.) ( 3 ) Les Sœurs Favre, de Chastel et de Blonay. (4) Sœur Marie-Renée Trunel et Sœur Françoise-Jéronyme de Villette ; celle-ci sera plus tard destinataire. (Cf. ci-dessus, les notes (2) des pp. 4, i8.)  Année 1615 25  MC  A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÈQUE DE .MONTPELLIER (0 (inédite) L'importunité des grandes villes. — La paix après la guerre : courage mili- taire des princes de Savoie et de la noblesse savoyarde; force veuves et orphelins. Annecy, ly juillet 1613. Monseigneur, Convié par Monseigneur TArclievesque de Lion, j'ay esté auprès de luy ces jours passés (2), et pensoisbien de la vous bayser les mains, comme je fay maintenant très humblement par lettre; mais je n'en eus jamais le loysir, a cause de l'empressement des visitari et visitare. Certes, ces grandes villes sont importunes pour cela, au moins pour les pauvres villageois comme moy, qui n'y sont pas accoustumés. Mais, si je n'ay peu vous escrire, je n'ay pas laissé de parler souvent de vous avec ce digne Prélat, qui certes tesmoignede vous honnorer et estimer grandement ; en quoy je prenois grand playsir, comme vous pouves penser. Au reste, nous voyci dans la paix, grâces a Dieu, que je supplie la vouloir rendre longue et heureuse (3). La guerre a esté courte, mais aspre tout ce qui se peut (^t), ( I ) Voir tome XIV, note ( r ), p. 4. (2) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 18. (3) La paix, ménagée surtout par la cour de France et négociée par le marquis de Rambouillet, son ambassadeur extraordinaire, venait d'être signée le 21 juin, par le duc de Savoie et les mandataires de la France, de l'Angle- terre et de la République de Venise; le lendemain, le marquis d'Ynoyosa, au nom de Philippe III, adhérait aux conditions du traité. Celui-ci fut bientôt rompu; TEspagne et le duc de Mantoue n'en ayant pas rempli les clauses, Charles-Emmanuel reprit les armes en 1616. (4) Elle avait duré deux mois, et pendant six semaines, depuis le 12 mai, date delà première journée d'Asti (voir le tome précédent, note (2), p. 366),  26 Lettres de saint François de Sales et ou Son Altesse et les Princes ses enfans ont fait paroistre leur vertu originaire des anciens Amé et Tho- mas (0. Nous y avons perdu plusieurs braves gentilz- hommes savoyards (2), car nostre nation a esté la plus employée et s'est grandement signalée en cette occa- sion ; de sorte que nous avons force vefves et orphelins, desquelz les vœux rendront la paix durable. Je prie la divine Bonté qu elle vous comble de ses plus chères faveurs, et suis immortellement. Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant frère et serviteur. Francs E. de Genève. 15 julliet 16 15, Annessi. Revu sur une ancienne copie, conservée à la Visitation de Montpellier. jusqu'à la signature de la paix, 21 juin, à peine y avait-il eu suspension d'ar- mes. Même à partir de la seconde bataille d'Asti (20 mai), on combattit nuit et jour, sauf les trois fêtes de la Pentecôte, 7,8 et 9 juin. (D'après la plaquette intitulée : Vera e siiccinta relatione de i snccessi tra le due armate di Spaona e Savoia qiiest'anno 161}, sino che fù conclusa la pace. In Torino, per Luigi Pizzamiglio... 1615.) ( I ) Charles-Emmanuel paya beaucoup de sa personne pendant la guerre. Au combat d'Asti, il eut un cheval tué sous lui, et un autre qu'il s'apprêtait à monter eut le même sort; le matin même du jour où fut signée la paix, il incendia les gabions ennemis. (Ibid.) Ses deux fils, le prince Thomas-François, tige des princes de Carignan, et Victor-Amédée, qui devait succéder à son père, se firent non moins remarquer par leur vaillance, en dignes descendants des comtes de Savoie, leurs ancêtres, dont ils portaient les noms : Thomas (ii88-i233\ Amédée V (1285-1323) et Amédée VI (1343-1383), connus dans l'histoire de la dynastie par leurs faits d'armes et leur valeur militaire. (2) On peut citer Louis de Seyssel, baron du Chàtelard (voir le tome pré- cédent, notes (i), p. 346, (2), p. 355, et ci-après, note (2), p. 30),  Année 1615 27 MCI A M. ANTOINE DES HAYES (0 Pourquoi le jeune des Hayes a fini par se ranger à la discipline. — Ce qu'il faudra faire s'il ne persévère pas. — Tendresse et sollicitudes du Saint pour le fils de son ami. — Eloge du prince de Piémont. Annecy, is juillet (2) 1615. Monsieur, Convié par Monseigneur TArchevesque de Lion, j'ay esté ces jours passés auprès de luy, ou je pensois treuver le loysir de demy heure pour vous escrire ; mays je ne sceu onques gaigner cela sur la multitude des visites et de quelques autres occupations qui me furent données, outre quelques prédications. Maintenant je repare la faute, et vous diray hardiment le mal après la guerison. Nostre filz (5) a eu fort affaire a se ranger a la disci- pline du collège, et luy estoit bien advis que cela estoit contraire a sa réputation. La racine de son mal est en une certaine grâce qu'il a de gaigner les espritz et tirer les cœurs a soy, lesquelz par après le tirent a eux et luy donnent telles impressions qu'ilz veulent. Il a eu pour cela prou de disputes avec ses maistres, qui le vouloyent empescher de sortir et de prendre des libertés contraires aux règles du collège. Et je Tay encor plus souvent réprimandé ; en quoy il m'a extrêmement obligé, par le sentiment qu'il a tesmoigné d'estre marry de me desplaire, si que, en fin, pour l'amour de moy, il com- mence fort a se bien ranger ; et par ce moyen, il tireroit encor mon cœur a soy, s'il ne luy estoit des-ja tout acquis. ( I ) Voir tome XII, note ( i ), p. 251. (2) Vives et Migne, après Hérissant (Opuscules, i']6'j, tome IV, p. 60) datent cette lettre du 5 juillet, mais à tort. Elle est écrite d'Annecy, or le Saint ne partit de Lyon que le 9 ; le soir du 12, il coucha à Annecy. La mention de « ces jours passés » fait croire que ces lignes sont du 15 juillet. {3 ) Louis des Hayes (voir le tome précédent, note(5), p. 340, et p. 3')4).  28 Lettres de saint François de Sales S'il persévère, nous aurons occasion de nous en con- tenter ; s'il ne le fait pas, il faudra user de l'un de ces deux remèdes : ou bien le retirer dans un collège un peu plus fermé que celuyci, ou bien luy donner un maistre particulier, qui soit homme et auquel il rende obéis- sance (0. Car en fin, cet enfant est vostre unique, et certes, grandement aymable ; néanmoins, le vo3da en ses années périlleuses, que la nourriture de page rend encor plus dangereuses. Mays il ne se faut point lasser de bien cultiver cette plante, car elle rendra sans doute de très bons fruitz. Il ne se peut dire combien nous sommés grans amis, ni combien il me respecte : cela, avec un maistre parti- culier, suffira pour le bien conduire, si par adventure il ne perseveroit pas. Mais j'espère qu'il le fera, car les Pères Barnabites et M. Peyssard ( = ) m'asseurent gran- dement qu'il observe maintenant fort exactement ce qu'il m'a promis. Je vous supplie de luy escrire que je vous ay tesmoigné du contentement de luy, affin de luy donner courage de continuer. La grande peyne que j'avois de luy, c'est a cause de Teau, sur laquelle il se plaist extrêmement ; et je craignois qu'il ne se pleust encor de se mettre dedans pour se baigner en quelque endroit dangereux, parce que toutes les années il s'y perd quelqu'un. Mais il m'oblige infi- ment en cela, car il ne s'y met point. En somme, saches, je vous supplie. Monsieur, que cet enfant m'est cher comme mes yeux, et que, de son costé, il paternise excel- lemment a m'aymer ; et si, j'espère que, passé ces années périlleuses, on le verra encor paterniser en plusieurs autres conditions. Dieu aydant. ( I ) Le jeune homme retourna à Paris à la fia de l'été de 1617. (2) M. Peyssard, « régent de la tierce classe du collège » à la date du i**" mai 1607 (Reg. par. d'Annecy), reçu bourgeois d'Annecy le 22 décembre suivant, avec son frère Thomas, chnnoine de Notre-Dame, était encore chargé de la régence le 14 octobre 1613. (Ibid. et Reg. des Délibérations municip.) Le 9 juin 1632, il dépose en ces termes au Procès du Saint : « Je m'appelle Anthoyne, filz de feu Eustache Peyssard et de Michielle Jacquier, natif de Montlardier, parroesse du Chastelard en Bauges, aagé de 60 ans. Ma profes- sion a esté d'enseigner la jeunesse, comme je faict au collège d'Annessy. » (Process. remiss. Gebertn. (I), ad. 2um interrog.)  Annhk iOIt 29 Nous avons la paix, grâces a Noslrc Seigneur ('). Playse a sa divine Majesté qu'elle dure, et qu'elle donne ouverture a quelque bonne intelligence et alliance pour le Prince de Piémont ( = ), qui est le plus sage, le plus courageux et le plus dévot prince qui ayt esté il y a long tems. J'escris sans aucun loysir; c'est pourquoy je prendray la confiance de ne point escrire a madame ma très chère fille (3), a laquelle indivisément avec vous. Monsieur, je souhaitte mille et mille bénédictions, demeurant pour jamais Vostre très humble et très affectionné serviteur, Franç'^ E. de Genève. Annessi, le. . . juUiet 161 5. A Monsieur [Monsieur] des Hayes, Conseiller et maistre d'hostel du Roy, Gouverneur et Baillif du chasteau et ville de Montargis. (i) Voir ci-dessus, note (3), p. 25, (2) Victor-Amédée de Savoie, dont le mariage avec Marie-Christihe ou Chrétienne de France, fille de Henri IV, fut célébré le 10 février 1619. (Voir ci-après, note ( i ), p. 45.) (3) Marie Chapelle, femme du destinataire. (Voir tome XIV, note (2), p. 185.  MCII A MADAME DE TRAVERNAY (M (inédite) Paternel intérêt pour une jeune veuve malade, nièce de la destinataire. Annecy, fin juillet ou commencement d'août (2) 161 5. J'ay de rechef beaucoup de consolation, ma très chère Fille, de vous voir si contente auprès de ce cher mari, (i) Péronne de Montfalcon, femme de Balthazard de Mouxy, seigneur de Travernay. (Voir tome XIV, note ( i ), p. 332.) (2) Par suite d'une déchirure, le mois et le quantième ont complètement disparu de l'Autographe; il n'y reste que la date de l'année. Quand saint  30 Lettres de saint François de Sales qui me fait beaucoup d'honneur de m'aymer, quoy que je ne le mérite nullement, si ce n'est par la fidèle affec- tion que je vous ay a tous deux. Mays je suis, certes, grandement en peine de la maladie de madame du Chatelart (O, a mesure que je la chéris tendrement et d'un cœur vrayement paternel, selon qu'elle me fait Ihonneur de se nommer ma fille. Ces fièvres continues sont tous-jours dangereuses, et mesme en une personne attristée {-). J'espère néanmoins que le bénéfice de nature qu'ell'a eii après une si longue rétention, luy sera salutaire et que, moyennant les remèdes que ce bon médecin, qui est fort expérimenté (5), luy appliquera, le mal ne passera pas le septiesme. Dieu aydant, lequel nous prierons ardemment pour elle. Qu'a jamais son saint nom soit béni. Amen. Je suis, Madame ma très chère Fille, Vostre plus humble très affectionné compère et serviteur, FRANC^ E. de Genève. 'ôiS- A Madame Madame de Treverney. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Amiens. François de Sales traça ces lignes, la destinataire se trouvait auprès de son mari; or, le 13 juillet M. de Travernay était absent, comme l'écrivait le len- demain le Bienheureux à la Mère de Chantai. (Voir ci-dessus, note (2), p. 24.) D'autre part, on voit par une lettre du 27 août 1615 à la Sœur de Bréchard, que M'"*^ du Châtelard songeait à prendre le voile de la Visitation. La pré- sente lettre doit avoir été écrite avant cette date, et ainsi se justifie celle que nous lui attribuons. (i) Jacqueline de Chauvirey, baronne du Châtelard, nièce de la destina- taire. (Voir le tome précédent, note (i), p. 346, et la note suivante.) ( 2 ) Allusion au veuvage précoce de la baronne. Son mari, Louis de Seyssel, avait été blessé, non à Asti en juin, comme le disent La Maison de Seyssel et ï Armoriai de Savoie, mais le 20 avril 161 5, lorsqu'après la bataille de Be- stagno (19 avril), où les Espagnols furent vaincus, le duc de Savoie ramenant ses troupes vers Asti, rencontra l'ennemi dans un passage difficile. Peut-être le blessé mourut-il en cette ville, où Charles-Emmanuel arriva avec son armée le 26 avril. (D'après la plaquette citée plus haut, note (4), p. 2e, ; cf. le tome précédent, notes ( i ), p. 346, et (2), p. 3^5.) (3) Peut-être Jean Grandis, médecin d'Annecy (voir tome XV, note(i), p. 20), que le Saint envoyait volontiers vers les malades auxquels il s'intéressait particulièrement.  Année 1615 31  MCIII A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÊQUE DE MONTPELLIER  (inédite)  Les suites de la guerre pour les deux partis. — « La terre des tranchées et '< celle des tombeaux. »  Annecy, 4 août 1615. Monseigneur, Ce n'est que pour me tenir en mon devoir et pour mieux m'asseurer du désir que j'ay que ce porteur vous bayse les mains de ma part, que je luy donne ces quatre lignes affin quil les vous présente. Car, dequoy vous pourrois je entretenir maintenant? Chacun, en ce païs, se repose pour un peu, comme gens qui ne font que de sortir d'un grand travail, et tous-jours quelques uns prennent le repos final dans la sépulture, pour les extrêmes incom- modités quilz ont souffertes en la guerre (0, en laquelle il semble quilz n'ont pas eu le loysir de mourir, et qu'au premier tems qu'ilz ont de relasche, ilz font ce devoir. Mais, ce qui console les misérables, c'est que de ceux qui furent nos ennemis, il en meurt beaucoup davantage (2), comme s'ilz n'estoyent sortis de la terre des tranchées que pour reentrer en celle des tombeaux. Je m'en vay cependant en Chablais pour quelques  ( I ) La guerre entre la Savoie et l'Espagne pour la succession du Montferrat. Comme on l'a dit plus haut, elle avait été suspendue par le traité de paix conclu à Asti le 21 juin. (Voir notes (3), (4). p. 25.) (2) Les maladies et l'insalubrité des eaux firent de sérieux ravages parmi les troupes espagnoles. D'après la relation contemporaine que nous avons citée à la note (4), p. 25, l'armée de Philippe III aurait été réduite de 40.000 hommes à 16.000.  32 Lhttkes de saint François de Salhs semaines, ou les affaires de ces quartiers la m'appel- lent ( ; mais je demeure par tout a jamais, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant frère et serviteur. Francs E. de Genève. 4 aoust 1615, Annessi. Revu sur une ancienne copie, conservée à la Visitation de Montpellier. ( I ) Le Saint partit en effet vers le 18 août, pour négocier et préparer à Thonon rétablissement des Barnabites dans la Sainte-Maison de Notre-Dame de Compassion. (Voir ci-après, note (i), p. 46.)  MCIV A M. ETIENNE DUNANT, CURÉ DE GEX (0 RecoiVimandation en faveur d'un catholique. — Les mariages que l'Evêque de Genève ne voulait pas autoriser. Annecy, 14 août 1615 (2), Monsieur le Curé^ Cette remarquable qualité de catholique que ce porteur possède, me fait luy désirer du contentement (?). Je desirerois néanmoins quil en eut sans préjudice de ma parole, et ne doutant point que les sieurs Gay (4) et Chou- dens (3) ne s'accommodent volontier a mon intention, je vous prie de faire avec eux quilz associent ce personnage ( 1 ) Voir tomes XIV, note ( i ), p. 65, et XV, note ( i ), p. 63. (2) Cette date, donnée dans les éditions précédentes, n'a pas été mise par le Saint à la fin de sa lettre, mais on la trouve au verso de l'Autographe, de la main du destinataire; elle est juste à un jour près, car si le quantième, 14, indique seulement le jour où la lettre fut reçue, celle-ci aura été écrite très probablement le 13. (3) Il est difficile d'avancer un nom ; s'agirait-il d'un candidat qui postulait l'emploi de fermier du Croset et Maconnex ? (Voir tome XV, note ( i ). p. 395.) (4) Sans doute, R*^ Jean Gay (voir ibid., note (5), p. 357). ( 5) François de Choudens, notaire à Gex. (Voir tomes XIV, note (3 ), p. 212, et XV, note (2), p. 338.)  Année 1615 33 qui, pour l'appuy quilaura de monsieur de Siccard( Oetde monsieur de la Faye ( = ), pourra beaucoup pour rendre la ferme plus utile. Que si ilz ne s'accommodent pas a mon désir, je vous prie de surseoir et me venir voir. Pour le mariage, je ne voy ni petite ni grande appa- rence que je le puisse treuver bon ou advoùer sans décla- ration de la fille. Et ne sert a rien de m'alleguer des exemples, car les Evesques qui les permettent peuvent avoir plus d'authorité que je n'ay pas ; et comm'ilz ont, je m'asseure bien, dequoy respondre de leurs actions, aussi respondray-je, comme j'espère, des miennes. Je ne doute point que les mariages des catholiques et haereti- ques ne soyent bons quand ilz sont faitz ; mais de les permettre et faire bénir, le Pape mesme ne le fait pas. Je sçai quil arrive des conséquences peu désirables, mays je m'arreste a mon devoir. Atant, vous priant d'avoir tous-jours bon courage parmi ces petitz tracas, je supplie Nostre Seigneur quil vous comble de ses grâces, et suis. Monsieur, Vostre plus humble confrère, Franç% E. de Genève. A Monsieur Monsieur le Curé de Gex. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Reims. ( I ) Magistrat catholique du pays de Gex (voir tome XV, note (2), p. 337). (2) De nombreuses familles ont porté le nom de la Faye dans la Franche- Comté, le Lyonnais, le Dauphiné, etc. Les documents font défaut pour déterminer à laquelle de ces familles appartenait le personnage dont parle ici le Saint. Peut-être pourrait-on proposer celle des Lériget de la Faye, seigneurs de Condé, Saconnay et Savigny. Il est possible encore que le nom soit modifié et qu'il s'agisse de M. de Fay de Gerlande, chevalier de Malte, visiteur du mandement de Croset et Maconnex en octobre 161 4. (Voir tome XV, note (2), p. 394, et note ( i ),p. 396.)  Lettres VII  54 Lettres de saint François de Sales MCV A LA MÈRE DE CHANTAL, A LYON (inédite) Des Tiercelines de Toulouse en quête d'une direction ; difficulté pour la Visitation de l'accepter. — Expédient proposé pour contenter les dames de Billom. — Il vaut mieux refuser que d'entreprendre témérairement. Annecy. i6 ou 17 août 1615 (i). Quelle presse, ma très chère Mère î Hier, bien tard, je receu vos lettres ; ce jourdhuy, jour de mon départ, je tasche de respondre entre mille embarassemens. Or sus, comme je pourray, je vay dire premièrement, que ces bonnes dames (2) seront les bienvenues après ( I ) Le contenu de la lettre indique qu'elle a été écrite en 1615, pendant le séjour de la Sainte à Lyon et parmi la presse d'-un départ pour Thonon. C'est en effet de cette ville que, le 19 août, le Bienheureux mande à la Mère de Chantai : « Je m'asseure que vous aures meshuy receu la response que je n vous fis sur la venue de cette bonne Mère Isabeau. » celle-là même dont il est question ici. Ce rapprochement entre les deux lettres justifie la date proposée. (2) Ces « bonnes dames » étaient dos Tiercerettes de Toulouse dont il faut raconter Vhistoire pour expliquer leur présence à Lyon, à cette date. En i6og, sur la prière de quelques Toulousains, Isabeau de Romillon et sa fille Françoise de Berthelier, qui menaient les exercices de la vie dévote à VIsle-sur-Sorgues, près Avignon, vinrent à Toulouse. Il s'agissait de fonder un Monastère de filles qui garderaient la Règle du Tiers-Ordre de Saint-François et d'y annexer une maison de retraite pour des veuves qui voudraient vivre en communauté, sous l'invocation de Saint-Louis et de Sainte-Elisabeth. Bientôt on trouva l'emplacement, d'excellentes recrues, un généreux fondateur, Guillaume de Rességuier. (Voir note (2) de la page suivante.) Les autorisations de bâtir et d'ériger canoniquement le monastère furent accordées au mois de juillet i6ro par le Roi, et le 29 octobre 161 1, par le Pape Paul V. Le 28 avril 1612, le fondateur prenait les charges de son titre par une donation de 20.000 livres, confirmée par un acte du 7 juin 1613. Cette même année, M. de Nesmond, premier président du Parlement de Bordeaux, fit au couvent, déjà fondé et doté, un don de 60.000 livres, à la faveur duquel il se porta comme fonda- teur, usurpation qui eut plus tard de grandes conséquences. Le monastère fut béni sous le nom de Saint-Louis et de Sainte-Elisabeth et les Religieuses reçurent celui de Tiercerettes, ou Filles du Tiers-Ordre de Saint-François; elles étaient une vingtaine, parmi lesquelles les cinq filles de M. de Rességuier. Toutes allaient faire profession, lorsque, malgré les expresses réserves des deux fondatrices, les Pères du Tiers-Ordre revendi- quèrent comme un droit la direction de la Communauté. Les dames de Romillon et de Berthelier se rendirent à Paris pour se défendre; au mois  Année 1615 35 la [Toussaint (0,] que vous seres icy, si vous treuves bon qu'on les reçoive dans la Visitation pour le tems qu'elles demandent, et que vous pensies qu'elles doivent estre édifiées de la conversation de nos chères Seurs et de ma veûe; car, ma chère Mère, vous qui les aves veùes, pourres mieux discerner cela que moy. Seule- ment, je suis en peine de ce bon monsieur le président de Ressiguier ( = ), qui, comme homme de qualité, sil d'août, elles étaient à Lyon avec quelques-unes de leurs compagnes et le président de Rességuier. Préoccupée sans doute de laisser sa petite Commu- nauté de Toulouse sans direction, la Mère Elisabeth ou Isabeau avait demandé à sainte Jeanne-Françoise de Chantai de vouloir bien lui donner une de ses filles pour conduire les Tiercerettes orphelines. Les pourparlers se continuè- rent jusqu'au milieu de décembre, mais sans aboutir. Alors les Religieuses toulousaines sollicitèrent de Louis XIII la permission d'embrasser la Règle de Notre-Dame du Mont-Carmel ; elle leur fut octroyée par lettres patentes du 3 février 1616. Déjà, le 31 janvier précédent, elles avaient adressé une semblable requête à Me"" Cospéan, administrateur de l'archevêché ; celui-ci, après avoir obtenu l'assentiment de M. de Rességuier, rendit une ordonnance autorisant les Sœurs du Tiers-Ordre à prendre au plus tôt Thabit des Carmé- lites réformées. La Mère Isabelle des Anges, prieure du Carmel de Bordeaux, amenant avec elle cinq Religieuses de chœur, prenait possession et direction du Monastère le 4 juin 1616. Des vingt postulantes qu'elle y trouva, dix seulement, parmi lesquelles les cinq filles de M. de Rességuier, furent jugées capables de suivre la Règle. Cette substitution des Carmélites aux Tiercerettes fut violemment contestée et combattue par dame Olive d'Aste, veuve de M, de Nesmond ; à son op- position, s'ajoutait aussi celle des dames de Romillon et de Berthelier. La Prieure du Carmel, au lieu de plaider, chercha à se loger ailleurs : une nou- velle maison fut prête le 10 août 1625 (voir note ( i ) de la page suivante), et dès lors, celle des Tiercerettes devenant libre, leur fut rendue : elles s'y établi- rent le 14 septembre suivant. La Mère Isabeau de Romillon était morte à Paris quelque temps auparavant ; sa fille, Françoise de Berthelier, revint à Toulouse et put enfin prononcer ses vœux dans le monastère fondé par elle, sans toutefois y retrouver aucune des Sœurs qui l'avaient habité dès 1610. Ce monastère, qui a duré jusqu'à la Révolution, a été presque entièrement dé- moli ; une place porte aujourd'hui encore le nom de Place des Tiercerettes. D'après La Chapelle du Grand-Séminaire de Toulouse, notice... par un prêtre de Saint-Sulpice. Toulouse, Privât, et Paris, Picard, mdcccxciii.) ( 1 ) La Mère de Chantai revint à Annecy la dernière semaine d'octobre ; il semble donc assez probable que le Saint ait écrit : « après la Toussaint. » Dé- chiré à l'endroit du pli, le papier n'a gardé que quelques traits représentant la partie supérieure de trois lettres. — L'Autographe, en fort mauvais état, est incomplet; il n'en reste que le premier feuillet, et encore celui-ci est-il mutilé au bas de la page. L'écriture des premières lignes du verso est très oblitérée; nous ajoutons entre crochets [ ] les mots qu'il a été possible de suppléer; quant aux autres lacunes, elles sont indiquées par des points de suspension. {2) Guillaume de Rességuier, issu d'une famille du Rouergue, fils de Jean de Rességuier et de Françoise de la Forcade, devint conseiller au Parlement  36 Lettres de saint François de Sales demeure tant parmi nous, aura sans doute fort a faire a supporter nos bassesses et imperfections. Voyes un peu, ma chère Mère, et penses ; et sil vous semble que c'est la gloire de Dieu, dites-leur qu'oiiy, pour moy comme pour vous mesme. Il faut, ma chère Mère, en telles occurrences me dire vostre advis ; car, moy qui ne voy que par vos yeux comme par les miens, en ceci, comme puis-je bien juger sans vous? De l'autre projet, certes, je ne voy nulle apparence que nous employons nos filles pour les monastères du Tiers Ordre, car nous n'en avons pas de reste de filles qui puissent servir de conductrices. Et puis, comme pourroyent elles servir en un Institut qu'elles [ne con- naissent] pas ? J'admire que cette bonne [dame refuse de convertir] ce dessein en Carmelines (0 ; car, pour [le dire à votre cœur] comme au mien propre, les Tierce- lines lesquelles le sont d'un seul Ordre et qui n'est encor [pas reconnu des] doctes, comme n'ayant que cinq ou six petitz monastères. Pour nostre Congrégation, je ne voy pas qu'elle puisse tant faire tout a coup, ni mesme pour ce que nostre chère grande Seur (2) propose pour Billon (3). [Il m'est de Toulouse en 1592, et le 3 juillet 1608, président de la seconde Chambre des Enquêtes. De Jeanne de Sabatéry, qu'il épousa par contrat du 28 novembre 1592, il eut trois fils : François, Gabriel, Pierre, et cinq filles : Marie, Jeanne, Jacquette, Adrienne et une autre Marie, qui entrèrent au couvent des Tiercerettes. (Voir ci-dessus, note (2), p. 34.) Leur père, qui à la mort de sa femme avait embrassé l'état ecclésiastique, était déjà prêtre en 1612. Vers 1619, il entre à l'Oratoire, devient ensuite curé de la Dalbade et quitte la Congré- gation en 1626. Il mourut vers 1630. (D'après la Notice citée, ibid.) (i) Comme on Ta vu ci-dessus, note (2), p. 34, malgré les oppositions de la Mère Isabeau et de ses amis, le Carmel vint s'établir à Toulouse en 1616, dans le couvent des Tiercerettes. Quand la Mère Isabelle des Anges dut le quitter, elle fit bâtir un monastère dans le voisinage de Saint-Sernin, près du collège Saint-Front de Périgord, et le 10 août 1625 elle y entrait avec ses Religieuses. Guillaume de Rességuier, assisté de son fils Pierre, donna une métairie d'un rapport de 12.000 livres pour la dot de ses cinq filles. L'église des Carmélites, classée parmi les monuments historiques, devint en 1810 la chapelle du Grand-Séminaire ; elle a été attribuée à l'Académie de Toulouse depuis la loi de séparation. (2) M""^ des Gouffiers. (3) A Billom comme à Toulouse, un petit groupe s'était assemblé d'âmes choisies, désireuses de mener une vie de perfection. « Vous avez bien fait avec ces bonnes filles de Billom, »> écrivait la Mère de Chantai à la Mère Favre,  Année 1615 37 avis quej ce seroit un bon expédient, que la Mère Elisabeth (0 venant icy, amenast avec soy deux des plus capables de Tholouze et autres deux de Billon, qui, en quatre ou cinq moys, pourroyent estre suffisamment façonnées pour retourner vers les autres et les mettre en train, avec l'assistence des lettres et des visites de mon- sieur TAumosnier (2) ou de quelqu'autre avec lequel nous conférerions ; car en somme, je ne voy rien en cette ville que ma Seur de la Roche (3), pour le présent, laquelle ne seroit encor peut estre pas bonne toute seule. Ma Seur de Gouffier pourroit, si son affaire estoit enté- riné (4). Mays quoy? cela n'est que deux ou trois au plus. Si donq on ne veut pas prendre l'expédient d'envoyer icy les filles a l'apprentissage, et qu'on ne veuille pas attendre au moins un an et demi, il est mieux de refuser humblement ce qu'on ne peut pas bonnement entre- prendre, que de Tentreprendre temerayrement. Et puis, en tous cas, il faut attendre que nos Règles soyent [bien approuvées et] la Mayson de Lion bien establie par [l'autorité de M"'] TArchevesque (5). Et se faut bien gar- der de [vouloir s'établir] en aucun diocaese que l'Evesque n'ayt [donné telle] resolution quil ny ait plus rien a dire de son costé ; car, si sur les (^) Revu sur l'Autographe conservé à Milan, Archives Borromeo. le 30 avril 1616 ; « je les aime bien. Notre Péronne les irait bien servir six mois ou un an, car il ne leur faut que cela à elles. » (Lettres, vol. I, p. ici.) Il s'agissait donc non pas de la fondation d'un monastère de la Visitation, mais de la direction d'une Communauté commençante. Les Filles de Sainte- Marie ne devaient s'établir elles-mêmes à Billom qu'en 1650, ( I ) La Mère de Romillon, fondatrice des Tiercerettes de Toulouse. (Voir ci-dessus, note (2), p. 34.) (2) M. de Sevelinges, aumônier de l'abbaye de Belleville et confesseur de la Visitation de Lyon, (Voir tome XV, note ( 2 ), p. 353, et tome XVI, note ( 2 ), p. 150.) (3) Sœur Claude-Agnès Joly de la Roche (cf. tome XV, note (2), p. 158). (4) La déclaration de nullité de ses premiers vœux. (Voir le tome précé- dent, note (2), p. ;52). ( 5) M^r de Marquemont. (6) La suite manque (voir ci-dessus, note (i), p. 35).  38 Lettres de saint François de Sales  MCVI A LA MÊME, A LYON Affaires variées. — Une mortification pour M."^" de Charmoisy. — Salutations particulières du Saint à ses chères Filles. — Souvenir de sa première ren- contre avec Marie-Aimée de Blonay. Thonon, 19 août 1615 (0- Le bon Frère Adrien (2) part d'icy avec moy ; mais luy, ma très chère Mère, pour aller ou vous estes, et moy pour aller en Abondance (3), ou vous n'estes pas encor, mais ou vous seres quand j'y seray, puisque Dieu a voulu que nous ne fussions qu'une mesme chose en luy. Ce ne sera pas sans parler de nostre bastiment d'Annessi avec ce bon Abbé (4), si toutefois l'arrivée du Père General des  (i) L'Autographe ne porte pas de date, mais celle que nous donnons est sûre. L'Evêque de Genève devait célébrer la fête de saint Bernard, 20 août, à l'abbaye d'Abondance. Or, de Thonon où il écrivait ces lignes, il ne put partir que le 19, puisque ce jour-là même, en cette ville, il nomme Hilaire Vallier chanoine de Sallanches. (2) Adrien des Echelles était un Frère lai Capucin qui fit profession le 27 février 1 596. Il se rendit agréable à la Cour de Rome et à TEvêque de Genève par un apostolat d'un nouveau genre. Pendant que les prêtres de son Ordre prêchaient aux hérétiques et les détachaient de Terreur, lui prenait soin des intérêts temporels des convertis en leur procurant du travail. A cet effet, il avait introduit aux environs de Thonon des métiers de soie. En 1619, la Congré- gation des Evêques et Réguliers recommandait son intelligente initiative à saint François de Sales, en l'avertissant de lui prêter son concours au point de vue spirituel. ( Archiv. des Evêques et Reg., Regesta (Regulares) B. vol. 1619, 24 août.) Le ï8 avril 1620, le Cardinal Borghese faisait une élogieuse mention du Frère Adrien. (Archiv. Vatic, Nun:(. di Savoia, vol. 40). Ces encourage- ments portèrent leurs fruits, mais les succès du Capucin alarmèrent, semble-t-il, les fabricants de soie. Nous voyons, en effet, que le 4 juin 1621 le sieur Magnin, de Lyon, se plaignait de lui aux syndics d'Annecy. (Reg. des Délib. municip.) {3) A l'abbaye d'Abondance, qui avait été remise aux Feuillants en 1607. (Voir tome XII, note ( i ), p. 373.) ( 4 ) Le « bon Abbé, » c'est-à-dire Vespasien Aiazza (voir tome XIII, note ( i ), p. 48), restait toujours l'ami dévoué de la nouvelle Congrégation. Le Fonda- teur aimait à déférer à ses avis; quand Nicolas Baytaz, l'un de ses prêtres, eut dressé vers 1619 le plan du monastère, ce Bienheureux, dit-il dans sa déposition ( Process . remiss. Gebenn. (I), ad art. 43), « le fist encores examiner au R'* seigneur Aiazza, pour Ihors abbé d'Abondance. »  Année 1615 39 Feùillans ( i ) qui, comme moy, y doit estre pour le jour de saint Bernard, ne nous occupe en d'autres affaires que vous sçavés (2). Nous y aurons monsieur de Charmoysi, et la petite seur (3) sera un peu mortifiée, qui me vouloit faire festin aujourdhuy. Je ne Tay encor veu qu'une seule petite fois en commun, car, comme vous sçaves, je ne fay pas ce que je veux a voir mes filles, ni mesme, ce qui importe le plus, a voir ma Mère. A mon retour, je vous escriray de rechef, si j'en treuve la commodité ; or, mon retour sera d'icy a quatre jours. Je m'asseure que vous aures meshuy receu la response ( I ) Sans ou Sens Beauner, connu dans l'histoire monastique sous le nom de Dom Sens de Sainte-Catherine, originaire d'Aurignac, dans l'Aquitaine, avait dix-sept ans quand il fit profession dans l'Ordre des Feuillants (1586). Il mourut à Rome vers le 14 octobre 162g, après avoir exercé trois fois, entre 1607 et 1620, la charge du Généralat. (D'après Morotius, Cistercii refiores- centis... chronoîogica Historia, 1690, Pars II, III.) L'éminent Religieux jouit en son temps d'une grande célébrité comme direc- teur spirituel. D'illustres personnages lui confièrent leur conscience et les deux Fondateurs de la Visitation s'accordèrent à faire grand état de sa haute piété et de l'excellence de ses ouvrages ascétiques. Les plus connus sont : Les Exercices spirituels distribués en vingt méditations {Paris, Jean Henqueville, 1619), et Les Points d'humilité. — Du premier, la Mère de Chantai écrivait le 22 septembre 1622 : « J'estime qu'il sera très utile à vos filles que vous » le « fassiez lire à table...; car, comme m'a dit Monseigneur, il est ample et d'un style mouvant; mais c'est le style des saints, fuyant l'immortification et détes- tant les recherches de l'amour-propre. » (Lettres, vol. II, 1877, p. 6y) — Le second ouvrage, souvent réimprimé même en ce siècle sous le titre de Livre d'or, fut fort prisé de la bienheureuse Fondatrice. « Toutes, » disait-elle en parlant à ses Filles, « peuvent bien avoir les Points d'humilité { i ). » Et le 15 janvier 1632, elle ne craint pas d'affirmer que l'auteur « était un des grands serviteurs de Dieu et des plus expérimentés en la conduite des âmes qu'on puisse guère rencontrer. » (Lettres, vol. IV, 1879, p. 8.) Dans une lettre adressée par François de Sales à la Mère Angélique Ar- nauld, en 1619, on trouvera un bel éloge de D. Sens de Sainte-Catherine, et aussi des remarques fort discrètes qui montrent par quelles nuances l'ascé- tisme du Général des Feuillants se distinguait de celui de l'Evéque de Genève. (Cf. tome XV, p. 390.) (2) Peut-être s'agit-il de la réforme du prieuré de Talloires ; on se rappelle que le Saint eût désiré y introduire les Feuillants. (Voir le tome précédent, Lettres cmxxxvii, p. 113, cmlvii, p. 147, et Appendice, pp. 392, 397, 403.) ( 3 ) M"™*^ de Charmoisy (voir tome XIII, note ( i ), p. 179), à qui la Mère de Chantai donnait le titre de « Sœur. »  ( I ) Responses de itostre tres-honoree et digne Mère Jeanne Françoise Fremiot, sur les Règles, Constitutions et Cotistumier de nostre Ordre de la Visitation saincte Marie. A Paris, m.dc.xxxii. Response sur l'article vingt-septième du Coustumier, p . 785 .  40 Lettres de saint François de Sales que je vous fis sur la venue de cette bonne Mère Isabelle, 'Vid.Epist.praeced. et sur Tenvove des filles *, et j'attendray de sçavoir vostre sentiment. Je salue toutes nos chères filles ; mais permettes que ma chère nièce (0 sache que je suis bien tout sien, et que ma chère Marie Peronne (O me chérisse particulièrement avec la petite cadette (3), laquelle je n'ay garde d'oublier ce soir, puisque je seray chez son père (4), ou je la vis la première fois habillée de blanc, avec un chapeau de paille. Ma très chère Mère, le tems me presse, car Monseigneur TArchevesque d'Evian, mon consecrateur, m'attend a disner, aagé de 86 ans (5). En somme, je suis très par- faitement et inviolablement, comme vous sçaves vous mesme, tout vostre. Vive Jésus. Amen. A Madame Madame de Chantai, Supe de la Visitation. A S^^ Marie de Lyon. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Venise. (i) Saint François de Sales se plaisait à donner ce nom à Sœur Marie- Jacqueline Favre. (Voir tome XV, note ( i ), p. 178.) (2) Sœur Péronne-Marie de Chastel (voir tome XV, note ( I ), p. 133). (3) Sœur Marie-Aimée de Blonay (voir ibid., note ( i), p. 290). (4) Claude de Blonay, qui demeurait au château de Saint-Paul, tout près d'Evian. (Cf. tome XII, note (r), p. 124, et La Vie de la Mère Marie Aymée de Blonay, par Charles-Auguste de Sales, 1655, chap. i.) (5) Mk"^ Vespasien Gribaldi, archevêque démissionnaire de Vienne en Dau- phiné, s'était fixé à Evian. (Voir tome XII, note ( i ), p. 24.)  Annrr 1615 41  MCVII A LA SOEUR DE RRÉCIIARD ASSISTANTE DR LA VISITATION d' ANNECY (0 (iNÉDITRl Une afîaire très heureusement engagée par le Saint. — Dieu fait son bon plaisir malgré les petitesses et l'amour-propre des hommes. — Deux aspirantes à la Visitation. Thonon, 27 août 1615. (2) Cet autre mot tout [fin] seul a ma très chère fille, que je remercie mille fois de sa chère bienveuillance ; aussi suis-je tout sien. Le P. D. Juste (3) viendra, je m'as- seure, soudain icy, pour achever un affaire que Dieu a très heureusement acheminé par mon service (4), et j'es- père que luy mesme fera encor l'accommodement des jardins, que vous aves tant de justes sujetz de désirer et que nostre chère Mère affectionne tant ^5); je dis nostre Mère en tout ce qu'elFest. Et je me suis resouvenu du jardin, quand j'ay veu comme Dieu faisoit son bon playsir malgré la foiblesse des espritz humains et les ténèbres de l'amour propre. ( I ) Voir tome XIV, note ( i ), p. 86. (2) L'Autographe de cette lettre n'ayant pas été retrouvé, nous avons dû en emprunter le texte à deux copies de dates différentes. La plus ancienne semble plus correcte, mais s'arrête à « M. de Vallon » (voir lig. 4 de la page suivante); elle est reproduite jusque là. Les crochets [] encadrent les mots que nous avons pu rétablir, et les points de suspension signalent les autres lacunes. Il est à peine besoin d'ajouter que nous ne saurions garantir la parfaite intégrité de ces lignes. (3) D. Juste Guérin, Barnabite, le futur deuxième successeur de François de Sales sur le siège de Genève, gérait alors la procure au collège d'Annecy. (Cf. le tome précédent, notes ( i ), p. 189, et (4), p. 228.) ( 4 ) L'affaire si bien acheminée était l'établissement des Barnabites à Thonon. (Voir ci-après, note (i), p. 46.) (5) Cet f< accommodement des jardins, » qui se traitait depuis 1614 (voir le tome précédent, notes ( i), (2), p. 227, et (6), p. 228), préoccupait en effet la Mère de Chantai. De Lyon même, elle suivait les négociations et partageait les espérances du Saint. (Voir sa lettre du 9 juillet 161 3 à la Sœur de Bréchard, Lettres, vol. I, p. 47.) Ces espérances, on le verra par la suite des Lettres, devaient être déçues.  42 Lettres de saint François de Sales On m'escrit que nostre très aymable M""" du Chaste- lard (0 s'est déclarée a sa grand mère (2) en faveur du voyle sacré, pour forclorre toutes les recherches du monde. M. de Vallon (3) [a aussi une] brave fille qui pour- suit icy, et on est [après à voir] ce que son père pourra donner (4). et envoyer par la première com- modité [le paquet] ci joint, et aymes [toujours bien mon] ame, la recommandant a la [miséricorde] de Dieu, qui vous comble toute de ses bénédictions. Amen. Je salue nos chères filles très aymees. En haste. 27 aoust 161 5. Revu sur deux copies conservées à la Visitation d'Annecy. ( I ) Jacqueline de Chauvirey, veuve de Louis de Seyssel, baron du Châtelard, (Cf. ci-dessus, p. 30.) ( 2 ) Probablement sa grand'mère maternelle, Adriane du Breul ou Breuil, fille de Bertrand, seigneur de la Bâtie, et de Louise du Châtelard. Devenue veuve de Jean de Châtillon-Michaille, seigneur du Châtelard en Semine, elle épousa en secondes noces Jean de Montfalcon, baron de Flaxieu, gouverneur de Savoie. (D'après Guichenon, Hist.de Bresse et de Bugey, 1650, Partie III, continuation.) (3) Guy Joly, seigneur de Vallon (voir tome XIV, note (2}, p. 355). (4) Dès 1610, Claudine de Vallon désirait entrer à la Visitation, mais elle ne put y être admise qu'en 1617. (Voir ibid., note ( i ), p. 354.)  MCVIII A LA MÊME (0 Liberté de conscience laissée aux Religieuses de la Visitation. — D'où dépend véritablement la ferveur. Thonon, [fin août ou commencement de septembre 161 5 (2).] Je ne sçai rien de cette coustume, et nostre Mère (3), ( I ) Ce billet s'adresse à une Religieuse de la Visitation d'Annecy qui tenait la place de la Supérieure ; si notre date est justifiée, la destinataire est bien celle que nous proposons. (2) L'écriture, l'absence du Saint et delà Mère de Chantai d'Annecy, la nouveauté de la pratique ici mentionnée et les conseils donnés pour s'en ser- vir utilement, indiquent pour ces lignes une date plus proche que lointaine de la rédaction des premières Constitutions et semblent désigner comme pro- bable l'année 1615. (3) La Mère de Chantai, alors à Lyon.  Année i6iç 43 ou je suis le plus trompé du monde, n'a pas eu intention en cela de se lier a faire ainsy toutes les années, comme peut estre ell'a fait deux ou trois fois au plus. Mays si quelques unes désirent de se confesser a quelque con- fesseur autre que l'ordinaire, elles le peuvent sans dif- ficulté et sans que les autres qui n'ont pas ce goust-la soyent obligées a changer de confesseur. On peut le dire a M. Michel (0 qui, comme je pense, est capable de cela et de chose plus grande que cela. O Dieu, qu'il est vray que la ferveur ne dépend pas de la bouche des confes- seurs differens, mays de la grâce de Dieu et de la sim- plicité et humilité du cœur ! Mays les Constitutions sont claires, qu'on peut appeller des confesseurs outre les quatre fois, pour la consolation de celles qui le désirent (2). Vous pourres donq appeller quelque Père Barnabite. Bon jour et bonn'eternité, ma très chère Fille. Vive Jésus ! Revu sur l'Autographe conservé à Beaufort (Maine-et-Loire), chez les RR^'^« Sœurs hospitalières de Saint-Joseph. (i) M. Michel Favre, confesseur ordinaire delà Communauté. (2) Voici le texte des Manuscrits primitifs : « Quatre fois l'année, la Supe- M rieure fera appeller quelque confesseur extraordinaire, auquel toutes se « confesseront, et outre cela, quand quelqu'une désirera de se confesser ou « conférer de sa conscience a quelque autre qu'au confesseur ordinaire, <( pourveu que ce soit a quelque personne de bonne condition, la Supérieure « le luy permettra volontiers. » Voir aussi la rédaction définitive, Constit. xx, Des Confessions extraordinaires.  44 Lettres de saint François de Sales MCIX A MADAME DE PEYZIEU (0 Charitable sollicitude pour la santé de la destinataire. — Conseils appropriés aux besoins de son âme. [Août-septembre 1615(2).] Ma très chère Mère, Si faut il que je vous salue le plus souvent que je pourray. Je suis en peyne de vous, a cause de ces mala- dies qui courent, qui sont populaires. Mon Dieu, ma bonne Mère, que cette vie est trompeuse et que l'éternité est désirable ! Que bienheureux sont ceux qui la désirent ! Tenons nous bien a la main miséri- cordieuse de nostre bon Dieu, car il nous veut tirer après Cf. Matt., XI, 29. soy. Soyons bien débonnaires et humbles de cœur * envers tous, mais sur tout envers les nostres. Ne nous empressons point, allons tout doucement, nous suppor- tant les uns les autres. Gardons bien que nostre cœur Ps. XXXIX, 13. ne nous eschappe : Helas, dit David *, mon cœur ma laissé. Mais jamais nostre cœur ne nous abandonne si nous ne l'abandonnons point; tenons le tous-jours en Cf. Ps.cxviii, 109. nos mains *, comme sainte Catherine de Sienne, et saint Denys sa teste. Jésus Christ soit a jamais en nostre cœur, ma chère Mère. Je suis en luy, Vostre filz, F. (i) L'appellation de « Mère » et le ton de ces lignes permettent de dési- gner, avec beaucoup de probabilité, la destinataire. (2) L'allusion aux '( maladies qui courent » autorise la date approxima- tive attribuée à cette lettre. (Cf. ci-après, note (3), p. 47, et pp. ^r, 56, 57.)  Annéh [615 45 MCX AU PRINCE DE PIÉMONT VlCTOR-AMCDÉE ( (minute) On peut attendre de grands fruits de l'établissement des PP. Barnabites à Tlionon et de la restauration du culte qui sera faite par eux dans l'église de Saint-Augustin. — L'Evéquc recommande au prince les affaires de la religion catholique. Thonon, 3 septembre (2) 1613. Monseigneur, Suivant le commandement de Vostre Altesse, je suis venu icy pour procurer l'introduction des PP. Barnabites ( I ) Victor-Amédée, deuxième fils de Charles-Emmanuel I*^"" et de Catherine- Michelle d'Autriche, né à Turin le 8 mai 1587, mourut à Verceil le 7 octobre 1657, après sept ans de règne. Ce prince n'hérita pas du génie politique de son père, mais il donna, dans sa vie privée, l'exemple des plus hautes vertus. Lorsque pour négocier son mariage avec Christine de France, le Cardinal Maurice de Savoie vint à Paris (novembre 1618), François de Sales faisait partie du cortège : il assista le 10 février 1619 à la cérémonie des noces que présida le Cardinal de la Rochefoucault, grand aumônier de France. Une incli- nation très particulière de profonde estime attira de bonne heure le Saint vers le prince. Et de fait, il semble qu'il veuille épuiser les termes de la louange quand il parle de sa sagesse et de sa piété, de son âme « qui ne respire que « le bien et la vertu, l'amour de son peuple et sur tout la crainte de « Dieu. » (Lettre du 15 août 16x6, au duc de Bellegarde ; cf. ci-dessus, p. 29.) « Je l'aime bien, » disait à son tour la Mère de Chantai ; « je prie Dieu qu'il achève ce qu'il a commencé en sa belle âme, car je crois qu'il sera saint. » (Lettres, vol. IV, 1879, p. 431.) En raison même de son attrait pour les choses de Dieu, Victor-Amédée professait une véritable vénération à l'égard de TEvêque de Genève ; afin de se l'attacher davantage, il l'avait fait nommer grand aumônier de la princesse Christine. Grâce à son appui, la Visitation multiplia ses établissements en Savoie et essaima jusqu'en Piémont. C'est lui qui intervint auprès de la cour de France pour obtenir au i*^"" Monastère d'Annecy le corps du saint Fondateur, que les Lyonnais auraient bien voulu retenir. Deux heures avant d'expirer, il reçut les Sacrements avec des sentiments tout dévots. Il laissait quatre filles et deux fils, François-Hyacinthe et Charles-Emmanuel II ; leur jeune âge les plaçait sous la tutelle de leur mère. Pendant ses onze années de régence, Christine de France déploya d'admirables ressources d'intelligence et de fermeté. Il est possible que les dons brillants de la fille de Henri IV aient atténué par leur voisinage, dans l'esprit des historiens, les réels mérites et la gloire personnelle de Victor-Amédée. (2) L'édition de 1626 ne donne pas de date; Hérissant (17^8), tome III, p. 176, indique celb du 5 septembre. Nous croyons pouvoir la maintenir, car la présente lettre a été certainement écrite l'un des premiers jours du mois. (Cf. note ( i ) de la page suivante.)  46 Lettres de saint François de Sales en la Sainte Mayson de Nostre Dame de Compassion, et en fin le traitté de cette affaire est parvenu jusques a l'arresté cy joint (0. Or, il ne se peut dire combien l'advancement des Pères Barnabites en ces contrées de deçà sera utile pour celuy de la gloire de Dieu, non seulement pour la confirmation de la foy parmi ces bons peuples, qui, a la faveur de l'incomparable courage et rare pieté de Monseigneur, père de Vostre Altesse, ont esté remis dans le giron de la sainte Eglise catholique (2), mays aussi pour la con- fusion des ennemis de la foy qui environnent de toutes parts cette province, delaquelle il ne se peut faire que le bien spirituel ne s'escoule petit a petit sur le voysinage, (i) Nous avons dit au tome XV, note (3), p. 382. que la Sainte-Maison de Thonon, comportait quatre sections. Celle qui embrassait l'instruction publique fut d'abord confiée aux PP. Jésuites qui dirigèrent le collège sous la conduite du P. Monet. (Voir le tome précédent, note (6), p. 149.) Ces Religieux étaient principalement entretenus par la libéralité du Souverain Pontife ; mais à la mort de Clément VIII (1603), ils durent se borner, faute de ressources, à l'enseignement de la grammaire et des belles-lettres, et bientôt les exigences des bourgeois de Thonon les contraignirent de se retirer. Le Conseil appela des régents laïques qui se montrèrent inférieurs à leur tâche ; alors François de Sales songea aux Clercs réguliers de Saint-Paul, dont il avait déjà expé- rimenté le zèle et le savoir au collège d'Annecy. (Cf. Lavanchy, La Sainte- Maison de Thonon, tome XXXIII des Mcm. et doc. de VAcad. Salés., 1910.) Pour négocier l'affaire, l'Evêque de Genève, sur le désir du prince de Piémont, était venu à Thonon à la fin du mois d'août. L'un des premiers jours de septembre — le 3 d'après Charles-Auguste ( i ) (Histoire, etc., liv. VIII), — il put signer une convention préliminaire avec la ville d'une part, et le man- dataire des Barnabites, D. Juste Guérin, de l'autre : c'est « Tarresté » que le Saint adresse à Victor-Amédée. L'une de ses principales clauses avait pour objet de subvenir à l'entretien des nouveaux Religieux et d'affecter spéciale- ment à cet usage les revenus du prieuré de Contamine-sur-Arve. (Cf. tome XII., note (2), p. 241.) Or, la Communauté des prêtres séculiers de la Sainte- Maison s'opposa à cette attribution qui les frustrait des dits revenus, assignés par le Saint-Siège à l'œuvre tout entière dès l'origine. Ainsi s'explique une lettre écrite par François de Sales à Claude de Blonay, vers le 23 octobre suivant: « Le traitté fait, » dit-il, « ne peut subsister. » (Voir ci-après, p. 74.) De nouvelles négociations s'ensuivirent ; il en sera parlé au cours de la correspondance du Saint. L'installation officielle des PP. Barnabites à Thonon se fit le 12 avril 1616. (2) Cf. la Préface du Traitté de V Amour de Dieu, tome IV, p. 15.  ( I ) L'historien confond dans son récit plusieurs faits qui ont eu lieu à des époques différentes ; de là notre doute pour la date de la convention passée au commencement de septembre 16 15.  Année 1615 47 qui, parce moyen, pourra recevoir insensiblement des grandes dispositions pour se convertir et réduire au devoir. Mais encor, Monseigneur, je ne puis me retenir que je ne tesmoigne la joye que je sens dequoy, parla venue de ces bons Pères en cette ville, nous verrons refleurir le saint service divin dans l'église de Saint Augustin, fondée par le fameux Amé, grand aïeul de Vostre Al- tesse!'), et en une ville honnoree de la naissance de cet excellent Serviteur de Dieu, le bienheureux Amé, du- quel nous respirons la canonization avec des désirs non- pareilz (2), espérant que, par la publique invocation de son secours, nous obtiendrons la fin de tant d'afflictions, de pestes et tempestes, desquelles, despuis quelques an- nées, il a pieu a Dieu de visiter ce peuple ( 5). Vostre Altesse, Monseigneur, a pour le partage de la splendeur héréditaire et tous-jours croissante de sa sere- nissime origine, la gloire des œuvres de sa douce et im- mortelle pieté ; et pour cela, comme elle est l'un des fleurons de la couronne de Monseigneur son père, elle est aussi l'une des plus pretieuses colomnes du temple de Dieu* le Père éternel : dont, pour l'une et l'autre * Apoc, m, 12. qualité, je prens la confiance d'implorer la bonté de Vostre Altesse en toutes les occurrences qui regardent les affaires de la sainte religion catholique, entre les- quelz celuy de l'amplification de ces bons Pères Bar- nabiteset le restablissement du service divin en tous les Monastères de deçà estant l'un des plus importans, je le ( I ) Le duc Amédée VIII (Félix V) avait confié cette église, d'abord dédiée à saint Sébastien, aux Ermites de Saint-Augustin qui en prirent possession le 28 juin 1429. Pendant la mission du Chablais, M^"" de Granier la rendit momen- tanément au culte pour la célébration des Quarante-Heures, et en 1616, sous le vocable des Saints-Maurice-et-Lazare, elle fut cédée aux Barnabites qui la desservirent jusqu'à la Révolution. Eglise du Petit Séminaire de 1840 à 1860, elle a été naguère démolie pour faire place à un hôtel des Postes. (Voir tome XIII, p. 346, la note d'Amédée VIII, et cf. tome XVI, note (2), p. 183.) (2) Amédée IX, troisième duc de Savoie, ne fut béatifié qu'en 1677, (Voir tome XIV, notes (3), p. 198, (2), p. 299, et tome XVI. p. 308, Lettre mxlvh.) (3) La peste avait sévi en effet dans le Chablais et le Faucigny en 1613 (voir le tome précédent, note ( i ), p. 30) ; le fléau reparut en 1615, vers la fin d'août, dans cette dernière région. En septembre, il faisait de nombreuses vic- times à Genève, (Voir ci-après, pp. 51, 56.)  4^ Lettres de saint François de Sales recommande très humblement au zèle de Vostre Altesse, a laquelle je fay très humblement révérence, ne cessant point de luy souhaiter le comble des faveurs célestes, et demeure. Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, FRANC^ E. de Genève.  MCXI AU CHANOINE JEAN-FRANÇOIS DE SALES, SON FRÈRE (0 (inédite) Instructions particulières pour assurer la régularité d'un concours. — La science seule ne suffit pas à l'exercice du ministère pastoral. — Nouvelles de la peste. — Le Saint accepte de séjourner aux portes d'Annecy à son retour du Chablais, — Salutations et messages. Thonon, 6 septembre 1615. Mon très cher Frère mon ami, Le P. D. Juste partit hier et vous porta de mes ( i) Jean-François de Sales, frère et premier successeur du Saint, naquit à Thorens en 1578 et reçut la tonsure le 22 décembre 1590. Novice chez les PP. Capucins pendant dix mois, sous la direction du bienheureux Jean de Maurienne; clerc minoré le 22 septembre 1598, sous-diacre le 27 mai 1600, ensuite chanoine de Genève et diacre le 17 mars 1601, curé du Petit-Bornand l'année suivante, il fut ordonné prêtre par François de Sales le 22 février 1603 (R. E.), et délégué par lui en 1606 pour faire à Rome la visite ad liinina. En septembre 161 5, il devint vicaire général (voir ci-après, Lettre mcxiii). Par lettres patentes du 12 février 1620, Jean-François, étant déjà aumônier de Madame Royale, fut nommé coadjuteur avec succession à l'évêché de Genève ; son sacre eut lieu à Turin le 17 janvier 1621, et dès lors il porta le titre d'Evêque de Chalcédoine. Promu en 1633 grand Chancelier de l'ordre de l'Aunonciade, le pieux Prélat mourut le 8 juin 1635. Lorsqu'au décès de son saint frère, il prit la direction du diocèse, Jean- François de Sales, déjà instruit par le Bienheureux « comme il faloit manier la verge et la houlette d'un bon berger, fit merveille au bien de son trou- peau..., avec une force accompagnée de bénignité et majesté fort grandes. Il fesoit la visite de son diocèse sans y manquer,... donnoit beaucoup de temps a la sainte lecture, surtout a feuilleter la Bible et les traités des quatre Docteurs, disant que c'etoit la source et les quatre fleuves du paradis de la sainte Eglise. » (Histoire de la Fondation du ler Monastère de la Visita- tion d'Annecy, par la Mère de Chaugy.) Très libéral envers les pauvres, « il éclata singulièrement en cette vertu Tannée de la contagion » (1629-1630), non content de donner ses biens, l'Evêque se donna lui-même, exerçant à  Année 1615 49 lettres (0 ; mais despuis, je receu celle que vous m'escri- vies pour la difficulté qui doit arriver au concours (O. Je ne sçai si celuy qui la doit faire a sa dispense des deux irrégularités, dont Tune luy est naturelle, estant nay hors le mariage, et Tautre acquise, pour jugé, comm' il est a croire, in criminalibus. Le moindre mémorial qu'on en jettast sur la table le forclorroit du concours, et si on n'en jette point et quil fut jugé le plus sortable pour avoir la cure, on ne le peut nullement recevoir a l'ins- titution. Tout le mal donq en ce cas-la consistera (3) en la clabauderie, en laquelle il faut demeurer grave et tranquille, ne répliquant rien, sinon : La plus part des voix est suivie. Mays sil avoit dispense, alhors encor auroit-il tort s'il croyoit que la seule science donnast le prix en cette lice-lâ ; et tous-jours faudroit-il se tenir a la pluralité des voix, qui est irréprochable a celuy qui les prend, sur tout sil n'en donne point. l'égard des malades de telles actions de charité qu'elles arrachèrent ce cri d'admiration à la Mère de Chantai : '< En vérité,... si François a été un saint Confesseur, Jean François prend la voye de devenir un saint Martyr. » (De Hauteville, La Maison naturelle de St Fr. de Sales, Paris, 1669, Partie I.) L'épidémie respecta le dévoué Pasteur et Dieu prolongea sa vie jusqu'en 1635. La veille de sa mort, '< nostre digne Mère luy envoya demander sa bénédic- tion, laquelle il donna avec un tesmoignage d'affection toute paternelle envers les deux Communautés de cette ville... Il manda aussi a nostre digne Mère qu'il avoit vescu et qu'il mouroit son fils. » (Hist. de la Fondation.) Après avoir eu la consolation d'entreprendre et d'expédier à Rome le I**" Procès pour la Canonisation de François de Sales, l'humble Prélat voulut être inhumé aux pieds de son saint frère dans l'église de la Visitation ; « et je le veux, » dit-il, « pour faire voir à tout le monde que je n'ay jamais mérité de baiser les traces des pieds de cet homme de Dieu. » (De Hauteville, ubi supra.) « En apparence Evesque, » écrit encore la Mère de Chaugy, M»"" Jean- François « etoit en son cœur Capucin, poursuivant » auprès du Saint-Siège « pour se défaire de l'evesché et rentrer en cette sainte Religion. » (i) D. Juste Guérin, procureur des Barnabites, venu à Thonon pour y traiter avec le Saint l'affaire de leur établissement au collège de la Sainte- Maison. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 46.) (2) Ce concours, fixé au 9 septembre, devait pourvoir à la cure de Saint- Pierre de Gruffy, vacante depuis le mois de juin par la mort de Ms»" Jacques Maistret, évèque de Damas, qui avait reçu ledit bénéfice le 5 septembre 1607 ; il fut conféré à R** Biaise Durand. (R. E.) ( 3 ) Migne, tome VI, col. 1081, donne le reste de la phrase, qu'il fait suivre de quelques autres fragments de cette lettre, en les mettant bout à bout avec des changements de style ; ce qui nous laisse le droit de regarder notre texte comme inédit. LriTREs VU 4  50 Lettres de saint François de Sales J'escris néanmoins a monsieur Grandis (0, affin que sil pouvoit, il allast a Tayde, mais j'ay peu d'espérance quil puisse en ce tems. C'est pourquoy, je dis en fin, que si cette cure la peut estre délivrée au jour de l'assi- gnation, j'en seray bien ayse et le désire fort ; que si les difficultés semblent ne pouvoir estre surmontées, on pourra différer jusques a mon retour, qui sera le plus tost que je pourray. Mays cette dilation ne doit estre faite qu'a l'extrémité, et sur la difficulté des-ja esmëue en l'assem- blée, non pas sur l'appréhension de la difficulté. Je croy que ce sera pour monsieur Chevrier qu'elle se fera (-). La pension pour le pœnitentier (?) devroit bien empes- cher ces remuemens. Et a propos de cette pension, il la faut establir en sorte que celuy a qui la cure sera adjugée, ne soit point mis en possession qu'il n'ayt, par consente- ment mis au greffe, déclaré quil prend le bénéfice avec cette juste charge, imposée par mon authorité et par le conseil des examinateurs. Ains, il seroit expédient que quand l'on ira mettre en possession, a mesme tems on assignast quelque corne de dixme pour ladite pension du pœnitentier, sans quil eut rien a faire avec le curé ; car l'esprit humain est si fascheux en tout ce qui regarde tant soit peu l'interest, que malaysement pourra on autrement asseurer ce petit entretien au pœnitentier. Si le curé de Miouxi est decedé (4), on pourra bien (ï) Claude Grandis, chanoine de Saint-Pierre de Genève. (Voir tomes XI, note (i), p. 299, et XIII, note (2), p. 195.) (2) Il s'agit vraisemblablement d'Etienne Chevrier, ordonné prêtre le 19 décembre 1598, pourvu des chapelles du Saint-Esprit à la BioUe, le 13 juin i6or, de Saint-Antoine au château de Montfalcon, le 14 juin de la même année, de Sainte-Marie-Madeleine, encore à la BioUe, le 20 août 1613, et enfin, le 13 septembre 161 5, de celle de Sainte-Marguerite à Albens, vacante par le décès de Jean Favre. (Voir ci-après, note ( i ), p. 55.) Il mourut au mois de janvier 1624. On peut mentionner, mais avec moins de probabilité, Louis Chevrier, ordonné prêtre le 29 mars 1614. (R. E ; cf. ci-après, note (4), p. 55.) (3) D'après les prescriptions du Concile de Trente, toutes les cathédrales doivent avoir un grand pénitencier, nommé par l'Evêque et dépositaire de ses pouvoirs. Dès 1607, le Chapitre de Saint-Pierre de Genève avait accommodé ses statuts à cette ordonnance ; il s'agissait maintenant de pourvoir d'un revenu convenable celui qui exerçait la nouvelle charge. (Voir la lettre suivante.) ( 4 ) Sans doute Mieussy (arrondissement de Bonneville). Etienne de Marignier, prêtre depuis le 22 février 1592, avait reçu l'institution pour cette cure le 5 mai 1599. Par un acte du i*^"^ avril 1632, il permute son bénéfice et l'annexe  Année 1615 51 favoriser monsieur de Monfalcon, a la charge quil mettra des vicaires de poids, tandis que, pour la poursuite de ses estudes, il sera dispensé de sa résidence (0, car il faut des meilleurs vicaires ou les curés ne résident pas ; et le Chapitre mesme, comme y ayant interest, pourroit reser- ver qu'ilz fussent examinés exprès pour cela (2). Or, je dis ceci seulement par manière de proposition, m'estant advis que la charité oblige ces messieurs de gratifier^ es occurrences, les plus pauvres d'entr'eux et ceux qui y ont des-ja esté asses d'années. J'escris a Messieurs du concours *, a toutes fins, pour la pension du pœnitentier. * Epist. seq. Si la dame dont vous m'escrives chancelé, elle sera bien tost résolue au parti du monde, car tout le monde mesme l'y portera (3). Et alhors je feray (mais il n'en faut rien dire) tout ce que je doy a ce cher ami, qui doit croire que je suis parfaitement tout sien. Ne soyes nullement en peine pour mo}', car il ny [a] nul danger en tout le Chablaix ( 4 ), car encor qu'a Lully ( 5 ) soit morte de peste une fille sortie de Genève et que sa mère en soit atteinte, si est ce qu'ell' a esté resserrée d'Onnion avec une chapellenie. (R. E.) Sa mort n'arriva qu'en 1634; il fut inhumé le 27 avril, devant le maître-autel de l'église de Mieussy. (i) Né à Alby, petit bourg du Genevois, le 11 décembre 1588, Pierre de Montfalcon était fils de Barthélémy de Montfalcon, capitaine au fort des Allinges, et de Claudine de Regard. Le 27 avril 1609, avant même sa promo- tion au sous-diaconat (19 décembre, il recevait un canonicat à la cathédrale; noble de père et de mère, le jeune clerc n'avait pas besoin du titre de docteur pour entrer au Chapitre, ce qui explique « la poursuite de ses estudes » à laquelle le Saint fait allusion. Prêtre le 22 décembre 1612, M. de Montfalcon desservit successivement les paroisses de la Chiésaz, de Chessenaz et de Saint-Félix. En 1623 il devint curé de Rumilly eten demeura titulaire jusqu'à sa mort, 22 mai 1649. (^* E.) (2) La paroisse de Mieussy était unie à la mense capitulaire depuis le 30 avril 1217. Le Chapitre de Saint-Pierre possédait en outre sur ce bénéfice les droits de patronage et de personat ; il avait donc tout intérêt à le faire des- servir par des prêtres capables. (Cf. Mém. et doc. de VAcad. Salés., tome XIV, Annecy, 1891, pp. 106 seq.) (3) Peut-être est-il question de M'^<^ de Chàteaufort qui, les premiers temps de son veuvage, avait songé à la vie religieuse. (Voir le tome précédent, note (3), p. 345.) Si cette conjecture a quelque fondement, on pourrait pro- poser Pierre de Duyn comme le « cher ami » que le saint Evêque voulait servir. (Voir ibid.) (4) Voir ci-dessus, note (3), p. 47. (5) Petite localité de l'arrondissement de Thonon, non loin de Bons.  52 Lettres de saint François de Sales si a propos, que cela ne peut aller plus avant, non plus qu'un autre pareil accident arrivé avanthier auprès de Coudree (0. Et quand le mal prendroit accroissement, je feray en sorte que je ne courray nul danger, moyen- nant la grâce de Dieu. Mays je croy bien quil faudra advertir le magistrat de la santé avant mon retour, et quil désirera que j'arreste hors de la ville en quelque mayson séparée, quelque (sic) jours ; ce que je feray volontier et sans réplique, pour ne point donner sujet d'appréhension a personne, et tesmoigner le respect que Ton doit a la conservation de la santé du païs. Je vous prie, a la première commodité, d'escrire ferme- ment a madame de Chantai qu'elle ne se mette nullement en peine pour tous ces bruitz, beaucoup plus grans que le mal, ni pour moy, qui suis bien sage et me garderay fort bien de péril, Dieu aydant. Je salue tous nos messieurs ( 2 ) et, tout a part, nos frères (3) et ma seur du Vilarroget (4), et mon cousin M. le Pré- vost (5) et messieurs les Collatéraux (6), marri de Tin- disposition de monsieur de Quoex, bien qu'elle ne soit périlleuse. En somme, faites mes honneurs, et je suis, Monsieur mon Frère, Vostre. Franç% E. de Genève. 6 septembre 161 5. A Monsieur Monsieur de Boysi (7), Chantre Chanoyne de Genève. Revu sur l'Autographe qui se conservait au Noviciat des RR. PP. Jésuites d'Avignon. (1) Près de Thonon, sur les bords du lac de Genève. (2) Les chanoines de Saint-Pierre de Genève. (3) Bernard et Janus se trouvaient probablement à Annecy à cette époque. Le Saint désigne aussi sans doute Louis de Sales, dont la résidence était peu éloignée. (4) Jeanne du Fresnoy, veuve de Gallois de Sales, seigneur de Villaroget. (Voir tome XV, note ( 4 ), p. 263.) ( 5 ) Louis de Sales, prévôt du Chapitre. (Voir tome XII, note ( i ), p. 6.) (6) Barthélémy Floccard et Claude de Quoex. (7) Déjà en 1606, Jean-François de Sales ajoutait à sa signature le nom de Boisy, qu'il porta jusqu'à ce qu'il reçut en 1620, avec la coadjutorerie de l'évêché de Genève, le titre d'Evêque de Chalcédoine.  Année 1615 53 MCXII A MM. LES EXAMINATEURS POUR LES CONCOURS (0 (inédite) Rappel d'une décision prise pour assurer un revenu au pénitencier de la cathédrale. — Recommandation en faveur d'un concurrent. Thonon, 6 septembre 1615 (2). Messieurs, Vous aures souvenance, je m'asseure, de la resolution que nous prismes, estant presque tous ensemble, de reserver une portion pour le pœnitentier de nostre cathé- drale a la première vacance de quelque cure qui la pourroit porter; resolution juste, équitable et conforme au Concile *. C'est en cett'occasion de la vacance de * Sess. xxiv, de ^ r^ , \ r n ' . ^ . . Rcform., C. VIII. Gruffy (3) [que] je vous prie faire cette reserve jusques a la somme de 200 florins; et pour éviter les disputes que rinterest propre fait naistre en pareilles occurrences, je desirerois qu'en la mise en possession de celuy qui sera curé, on assignast une corne de dixme, telle quil seroit advisé, audit seigneur pœnitentier, laquelle il prendroit par ses mains. Je sçai quil arrivera aussi quelque difficulté sur la ( I ) Le nombre des Examinateurs dans chaque concours pouvait varier de trois à huit, mais neuf ecclésiastiques, au moins, étaient nommés annuellement pour cet office et devaient, en cette qualité, prêter serment au Synode. Saint François de Sales en choisissait six ou sept dans son Chapitre, et deux ou trois parmi les membres de la Collégiale de Notre-Dame ; un seul de ces derniers, cependant, avait droit d'intervenir à l'assemblée. Louis de Sales, Etienne de la Combe, Philibert Roget, Marc-Antoine de Valence, Janus des Oches, Pierre-François Jay, Nicolas Gottry, Louis Jacquier, Nicolas Garnier, furent les Examinateurs désignés au Synode du 6 mai 1615. (R. E.) (2) La lettre précédente (p. 51) annonce celle-ci en ces termes : « J'escris « a Messieurs du concours, a toutes fins, pour la pension du pœnitentier. » Il est donc facile de rétablir la date, coupée dans l'Autographe ainsi que les clausules et la signature. (3) Voir ci-dessus, note (2), p. 49.  54 Lettres de saint François de Sales réception de monsieur Jay au concours, dautant que la rayson pour laquelle nous jugeasmes de le pouvoir excepter sans conséquence de la règle des resignans leurs cures, semble manquer de fondement, puisque le bien publiq que nous desirions ne s'en est pas ensuivi. Mays d'autant quiln'a nulle coulpe en cela et quil demeu- reroit grandement en perte, avec sujet de se plaindre d'avoir esté deceu en nostre parole, je juge et désire quil soit admis comme les autres (0. Dequoy j'ay pensé de vous devoir donner cet advis, m'asseurant que vous le suivres, bien ayse aussi par cett'occasion, de me ramen- tevoir en vos prières, comme (-) A Messieurs [Messieurs] les Examinateurs (3) pour les concours. Revu sur l'Autographe conservé à ia Visitation d'Annecy. (i) Le chanoine Pierre-François Jay, candidat pour la cure de Scionzier, en devint de fait titulaire par institution du 4 novembre 1615. (Voir le tome précédent, note ( i ), p. 22g.) En échange de la cure de Bonneville (voir ibid., note ( I ), p. 230), il avait obtenu plusieurs chapellenies ; mais leurs revenus, ajoutés à sa prébende canonicale, ne suffisant pas à son honnête entretien, il fut autorisé à retenir le bénéfice du Bois-d'Hyot, sans préjudice de la cure de Scionzier pour laquelle il posait sa candidature. C'est sans doute le fait que saint François de Sales rappelle ici. (Cf. ci-après, la lettre du 8 novem- bre au duc de Savoie.) ( 2 ) Voir note { 2 ) de la page précédente. (3) Le mot « Messieurs » mis entre [ ] et celui qui manque ici ont disparu à l'ouverture de la lettre. Du second, il reste la fin, es, et un trait qui repré- sente la queue d'un p : le Saint aurait-il écrit appelles ?  MCXIII AU CHANOINE JEAN-FRANÇOIS DE SALES, SON FRÈRE Regrets du Saint sur la mort de son vicaire général, Jean Favre. — Jean- François de Sales désigné pour lui succéder; motif de ce choix. — La con- tagion à Genève. Thonon, 8 septembre 1615. J'ay regretté des hier au soir la perte que nous avons faite, mon cher Frère, de nostre bon monsieur le  Année 1615 55 Vicaire (0, car j'en sceu la nouvelle par une lettre de monsieur le premier Président ( = ). L'amitié fraternelle que ce pauvre defunct nous portoit a tous, m'obligera a jamais de chérir et honnorer sa memoyre et de prier souvent pour son ame, comme j'ay fait des aujourdhuy. Il y a long tems que je prœvoyois cet accident en la mauvaise conduite quil tenoit pour sa santé. Et ayant pensé, despuys que j'ay sceu plus particulièrement quil estoit en estât de nous quitter bien tost, qui je pourrois rendre successeur en sa charge, en fin, après plusieurs considérations, j'ay résolu de vous y appeller (3). Et ce seul motif vous suffira pour l'accepter, et a tout le monde pour l'appreuver : que de cette charge dépend une grande partie du bien de ce diocsese et de mon honneur, dont nostre proximité vous pressera d'avoir plus de soin et de jalousie que nul autre n'en sçauroit prendre. Ni vous ne deves pas alléguer au contraire que vous n'aves pas la connoissance des choses des procès, car c'est la moindre des functions du grand vicaire, et pour le bon succès delaquelle il suffit quil ayt de la vigilance et du zèle pour faire que les autres officiers facent bien leur devoir, et qu'il establisse un bon substitut et des bons assesseurs. Mays de cela, nous en parlerons a mon retour. Dieu aydant. Cependant, faites pour moy comme si des-ja vous esties establi, et sera bon de mettre la cure de Boussi au con- cours au plus tost (4). Je pense partir d'aujourdhuy en huit jours (5), et d'arrester trois ou quatre jours en che- min, estant prié par monsieur d'Angeville i^) de passer  (i) Jean Favre, vicaire général, était décédé à Chambéry le 5 septembre. (Voir tome XIII, note ( i ), p. 263.) (2) Le président Antoine Favre, frère du défunt. (3) Jean-François de Sales fut en effet nommé vicaire général et garda cette charge jusqu'à la mort de son saint frère. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 48.) ( 4) Le concours pour la cure de Boussy, vacante par la mort de Jean Favre, se tint le 21 septembre de cette même année. R'' Louis Chevrier (voir ibid., note ( 2 ), p. 50), d'abord économe de la paroisse, en devint curé le 9 mai 1616. (5) Saint François de Sales rentrait à Annecy le 14 septembre, sans s'être arrêté à La Roche, comme il se Tétait d'abord proposé. (6) Claude d'Angeville, primicier de la collégiale de La Roche, (Voir tome XI, note ( i ), p. i'y2.)  156 Lettres de saint François de Sales a La Roche pour voir certain différent quil a avec ses chanoynes (0. La contagion ne fait nul progrès, grâces a Nostre Seigneur, sinon dans Genève, ou elle moysonne rudement ( = ). Dieu vous bénisse, et je suis tout en luy, Vostre plus humble frère et confrère, F., E. de Genève. A Thonon, le 8 septembre 161 5. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Biblioteca Civica. (i) « Censeur rigide du clergé, sévère dans ses principes et austère dans sa conduite, « dit un historien (VauUet, Histoire de La Roche, 1874, chap. v, p. 380), le primicier d'Angeville ne manquait pas d'occasions de différends avec ses chanoines. Après avoir réformé sa collégiale, il avait essayé sans succès d'introduire de nouveaux statuts, recourant même, mais en vain, au Conseil du Genevois pour triompher des résistances. Le sujet de conteste entre le Chapitre de La Roche et son chef, en 161 5, était peut-être la suite de ces anciennes difficultés. (Cf. tome XIII, note (i), p. 129.) (2) Dans les Registres du Conseil de Genève- de 161 5, on trouve des men- tions de la terrible épidémie. Dès le 23 août, Jean Gervais, ministre, est établi « consolateur des pestiférés, sous le gage de cent florins par mois, » et l'on arrête de brûler dans les rues du bois de genièvre pour purifier Tair. Le fléau continue jusqu'en novembre, et enfin, le 9 décembre, on prélève une contri- bution sur les deux cent cinquante-quatre chefs de famille qui se sont absentés de la ville pendant la contagion. (Cf. ci-dessus, p. 51.)  MCXIV A LA MÈRE CLAUDINE DE BLONAY ABBESSE DE SAINTE-CLAIRE d'ÉVIAN (0 Trois moyens de perfection pour une Communauté religieuse. — Le mien et le tien : deux mots qui ruinent la charité. — Danger de la liberté de pro- priété et avantage de la liberté des communications spirituelles. Thonon, 12 septembre 1615. Ne penses jamais, ma très chère Seur, que je puisse oublier vostre personne, ni les nécessités temporelles de vostre Monastère, que j'ay treuvees, certes, encor plus (i) Voir le tome précédent, note (i), p. 206.  Année 1615 57 grandes qu'on ne m'avoit dit (0. Je prevoy seulement qu'il nous faudra attendre que ces soupçons de contagion cessent (2), pour faire faire plus fructueusement la queste; ce pendant je feray faire les patentes requises (3). Au reste, mon cœur amoureux de la sainteté de vostre assemblée, quoy que je ne Taye veuë qu'en passant, et plustost entreveuë que veuë, ne me permet pas de partir sans vous exhorter en Nostre Seigneur de poursuivre constamment l'exécution de la sacrée inspiration que Dieu vous a donnée, de perfectionner de plus en plus cette vertueuse compaignie par une pure et simple priva- tion de toute propriété, par les exercices de la sainte orayson mentale et par une fervente fréquentation des divins Sacremens *. * Cf. tom. prœced. 1 T-» /-^ • Epist. CMLXXXIX. Et ne doutés point, ma chère Seur, que le Père (jrarinus ne vous soit favorable, si vous luy représentes naifve- ment et humblement vos dignes prétentions ; car c'est un docteur de grand jugement et de longue expérience (4), grandement zélé aux Constitutions ecclésiastiques et a l'establissement du Concile de Trente, comme sont tous les gens de bien. Vous luy pourres donq confidemment dire que vous m'aves touché un mot de vos affaires ; car je ( i) C'est pendant son voyage en Chablais que François de Sales dut visiter le Monastère de Sainte-Claire d'Evian, probablement à la fin du mois d'août, car le 20 il est à Abondance, s'y arrête un jour ou deux, et rentre à Thonon vers le 27. (2) Cf. ci-dessus, pp. 51, 56. (3) On a vu au tome précédent (Lettre cmxiv, p. 71) l'intérêt plein de sollicitude que l'Evêque de Genève portait aux Clarisses d'Annecy ; leurs Sœurs d'Evian le partagèrent avec elles plus spécialement à partir de 161 5. Malheureusement, les « patentes requises » pour la quête, qui en seraient un nouveau témoignage, ne nous sont pas parvenues. (4) Entre 160-; et 161S, des Registres de finances conservés à Turin (Archives de la Chambre des Comptes et Archives Camérales) mentionnent le P. Nicolas Garinus ou Garin, des Frères Mineurs de l'Observance, comme gardien du couvent de Myans, duquel dépendaient les Clarisses d'Evian ; il exerçait encore cette charge en 1619. Théologien, conseiller et prédicateur de Son Altesse, ce Religieux s'acquit une réputation étendue d'éloquence et de piété, a Au temps de la corruption hérétique en France, il souffrit beaucoup pour la foi, » assure le P. Jean-François Rendu qui, déposant au second Procès de béatification de saint François de Sales, invoque le souvenir de l'estime profonde que « Maistre Garinus » faisait de l'Evêque de Genève (ad. art. 11, 22). Ils avaient pu mutuellement s'apprécier pendant les premières années de sacerdoce du Bienheureux, le Franciscain étant alors au couvent d'Annecy.  58 Lettres de saint François de Sales sçay bien qu'il ne le treuvera pas mauvais, estant, comme il est, de mes meilleurs amis, et qui sçait bien que je n'ay pas accoustumé de rien gaster et que je ne suis point un entrepreneur d'authorité, ains homme qui ne trouble rien ; et pourres encor luy dire tout ce que je vous ay dit, de- quoy, pour vous rafraischir la memoyre, je vous feray une répétition. Premièrement, que le renoncement de toute propriété et l'exacte communauté de toutes choses est un point de très grande perfection, et qui doit estre désiré en tous les monastères et suivy par tout ouïes Supérieurs le veulent ; car encor que les Religieuses qui n'en ont pas l'usage en leurs maysons ne laissent pas d'estre saintes, la coustume les dispensant, si est ce qu'elles sont en extrême danger de cesser d'estre saintes, quand elles contredisent a Tin- troduction d'une si sainte observance tant aymable et tant recommandée par le Père saint François et la Mère sainte Claire, et qui rend les Religions riches en leur pauvreté et parfaitement pauvres en leurs richesses, le mien et le tien estans les deux motz qui, comme disent les Saintz, ont ruiné la charité. Et ne sert a rien de dire « nostre voile, nostre robbe, nos chemisettes, ou nos mutandes, » si en effect leur usage n'est pas indiffèrent et commun a toutes les Seurs, les paroles estans peu de chose si les efFectz ne correspondent. Et comme peut estre dite commune une chose que nul n'employé que moy ? Or, j'ay veu en un monastère ou j'avois une fort proche parente (O, que toute la difficulté de cet article estoit en la douilletterie de quelques Seurs en ce qui regarde les chemisettes et les linges ; et j'admiray que la lessive ne suffist pas pour ce sujet a des filles de celuy qui baysoit tendrement les ladres et de celle qui baysoit les pieds des Seurs revenantes de dehors. Certes, qui est douillet ( I ) La discrète réserve du Saint ne permet pas de désigner le monastère de Clarisses dont il parle ici, ni d'affirmer si la « proche parente » était alors vivante ou décédée. Au couvent de Sainte-Claire d'Annecy, une Sœur Clau- dine de Menthou. morte en 1606, était apparentée avec la famille de Sales ; de même encore la Sœur Adrienne de Chevron-Villette qui, entrée en Reli- gion dès 1603, vécut jusqu'en 1639 (voir tome XIII, note ( i ), p. 344), et la Sœur Françoise de Cerisier, destinataire en 1616.  Année 1615 59 déporter un linge et un drap lavé parce qu'il a esté, aupa- ravant le lavement, porté par son frère chrestien, je ne sçay pas comme il ose dire qu'il ayme son prochain comme soy mesme ; et faut qu'il ayt un grand amour propre, qui le fasse estimer si net en comparayson des autres. Or, la façon de mettre tout en commun est bien aysee quand tout est ensemble en un coffre ou en une garde- robbe, et qu'une distribue a toutes, selon leurs nécessités, indistinctement ce qu'il leur faut, sans avoir esgard a autre chose qu'a la nécessité et a la volonté de la Supé- rieure. En quelques Congrégations mesme, on change les chapeletz et tous les petitz meubles de dévotion, au sort, a chaque commencement d'année (0. Quant a l'orayson et a la fréquence des Sacremens, il n'y a point de difficulté, ce me semble, sinon pour le dernier, de gaigner le Père confesseur (2), affin qu'il ne se lasse pas de faire la charité aux Seurs, les oyant en confession quand il en sera requis par la Supérieure. Mays il y a un point d'importance, duquel je vous touchay un mot, que pour le bien de vostre famille vous deves demander a vos Supérieurs et qu'ilz ne peuvent en bonne conscience vous refuser : c'est que, deux ou trois fois chaque année, ilz vous ayent a offrir des autres confesseurs extraordinaires (suivant le commandement du sacré Concile de Trente *), qui oyent les confessions 'Sess.xxv. deRe- de toutes les Seurs. Et la Congrégation des Cardinaux a p^rxced.'!^ not'. {y)] déclaré que, les Supérieurs estans negligens en cet arti- P- ^°^-^ cle, les Evesques le fassent eux mesmes, et que cela se fasse mesme plusieurs autres fois l'année s'il est requis (3). Or, il est requis quand la Supérieure void des Seurs grandement troublées, et difficiles ou répugnantes a se confesser au confesseur ordinaire , pourveu que ce ne (i) En écrivant ces lignes, saint François de Sales songeait sans doute à la Visitation, à laquelle il avait prescrit cette pratique de parfait dégagement. (Voir tome XV, note ( i ), p. 144.) (2) Peut-être le P. de Coysia (voir le tome précédent, note (2), p. 208). ( 5) La Congrégation mentionnée ici est celle des Evéques et Réguliers (voir le tome précédent, note (5), p. 148). Pour le décret auquel saint François de Sales fait allusion, on peut consulter Pellizzari, De Monialibus, cap. X, sect. m, subsect. II, n. 254, p. 401 de l'édition romaine, 175^.  6o Lettres de saint François de Sales soit pas tous-jours, ains parfois seulement et sans abus. Mays pour ce dernier point, il semble qu'il ne soit pas convenable de le demander, puisque [l'ordre mis par le Concile suffit pour la satisfaction de vostre Congrégation. Et ne faut nullement recevoir les allégations au con- traire ; car rien ne se fait en ce monde qui ne soit con- tredit par les espritz minces et fascheux, et de toutes choses, pour bonnes qu'elles soyent, on en tire des incon- veniens quand on veut picotter. Il se faut arrester a ce que Dieu ordonne et son Eglise, et a ce que les Saintz et Saintes enseignent. Ni il ne faut pas dire que vostre Ordre soit exempt des Constitutions du sacré Concile ; car, outre que le Concile est sur tous les Ordres, s'il y a aucun Ordre qui doive obéir aux Conciles et a l'Eglise romaine, c'est le vostre, puisque le Père saint François l'a si souvent inculqué. Mais, ce dit-on, il se pourroit faire qu'une fille sçachant qu'elle pourra avoir un confesseur extraordinaire, elle gardera ses péchés jusques a s'a venue, la ou, si elle n'avoit point d'espérance d'autre confesseur, elle ne les garderoit pas. Il est vray que cela pourroit arriver ; mays il est vray aussi qu'une fille qui sera si malheureuse que de faire des mauvaises confessions et des Communions indignes pour attendre l'extraordinaire, elle ne fera pas grand scrupule d'en faire plusieurs, et plusieurs mau- vaises, pour attendre la mutation du confesseur ou la venue du Supérieur. Et en somme, cet inconvénient n'est pas comparable a mille et mille pertes d'ames que la sujettion de ne se confesser jamais qu'a un seul peut apporter, comme l'expérience le fait connoistre ; et en somme, c'est une présomption insupportable a qui que ce soit, de penser mieux entendre les nécessités spiri- tuelles des fidèles et de s'imaginer d'estre plus sage que le Concile. Il vous faut donq tenir bon a ce point et ne se laisser point emporter aux considérations de l'esprit humain. Reste les communications spirituelles, lesquelles aussi je vous dis estrefort utiles, pourveu qu'elles soyent faites a propos. Et premièrement, nul, comme je pense, ne les  Année 1615 61 vous peut défendre ; car, tant que j'ay sceu voir en la Rey-le de saint François et de sainte Claire *, il n'y a * Seraphicœ legis- . , , . , -, j-, lat. textus origin., rien qui les empesche, ains seulement ce qui y est ait ReguUSi^ ciarœ, empesche toute sorte d'abus. Ktje vous diray comme on ^x,',.''" '°' ^^' ^^ les fait entre les filles de la Mère Thérèse, qui sont, a mon advis, les plus retirées de toutes. Elles se font donq en cette sorte : La fille qui désire communiquer quelque chose, le dit a la Supérieure ; la Supérieure considère si la personne a laquelle l'on veut communiquer est de bonne qualité et propre a consoler, et si elle est telle, on la mande prier de venir ; et estant venue, on meyne la fille qui veut communiquer a la treille, et le rideau demeure sur la treille ; et puis, on donne tout a l'ayse loysir de communiquer, chacun se retirant en lieu d'où on ne puisse ouyr ce que dit celle qui communique, pourveu seulement qu'on la puisse voir. Que si on void une fille qui veuille trop souvent communiquer avec une mesme, passé trois fois on luy refuse, sinon que Ton vist une grande apparence de beaucoup de fruit, et que les personnes fussent hors de soupçon de vanité, meures d'aage et exercées en vertu. Vous aures veu, je m'asseure, ce que la bienheureuse Mère Thérèse en dit *, et cela suffira pour respondre a *^Le Chemin de la tous les inconveniens qu'on en pourroit alléguer. Et jamais ce ne fut l'intention des Saintz de priver les âmes de telles saintes conférences, qui servent infiniment a beaucoup de vertus et sont sans danger, estant bien faites. C'est grand cas comme c'est une subtile tentation ! Nous voulons garder la liberté (0 de la propriété, qui est contre la perfection, et ne voulons pas recevoir la liberté des communications, laquelle estant bien enten- due, nous ayde a la perfection. Nous treuvons des incon- veniens ou les Saintz n'en treuvent point, et n'en treuvons point ou les Saintz en treuvent tant. Or, ces communications ne se doivent pas faire pour apprendre de diverses manières de vivre en un monas- tère, mais pour apprendre a mieux et plus parfaitement ( I ) La suite de notre texte est donnée d'après une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin qui ne possède que ce fragment de la présente lettre.  Perfection,ch..\,\\.  62 Lettres de saint François de Sales prattiquer celle a laquelle on est obligé ; et si, elles n'em- peschent point les conférences publiques, ains elles ser- vent pour les mieux digérer et appliquer une chacune en «on particulier. J'avois oublié de dire que quand le confesseur extraor- dinaire vient, il faut que toutes les filles se confessent a luy, afïin que celles qui en ont besoin ne soyent point descouvertes et que le malin ne semé point de reproches parmi la Mayson ; mais celles qui ne veulent pas prendre confiance a l'extraordinaire, pourront, avant que de se confesser a luy, faire leur confession a Tordinaire, et par après dire seulement quelques péchés ja confessés, a l'extraordinaire, pour servir de matière a l'absolution. J'ay esté bien long, ma très chère Seur, mais j'ay voulu en ceci vous bien déclarer mon sentiment, affin que vous le sceussiés plus distinctement. Et tenes bon hardiment pour introduire en vostre Mayson la sainte et vrayement religieuse liberté d'esprit, et pour en bannir la fause et superstitieuse liberté terrestre. Ramenés ces bénites âmes aux observances des saintz Conciles, et vous seres bien heureuse. Nostre Maistre Garinus et tous vos Supérieurs majeurs, gens discretz et raysonnables, vous ayderont, je n'en doute point ; et mesme vostre bon Père confesseur, qui est bien vertueux et sage Reli- gieux, ainsy que je puis connoistre, et qui entendra bien la rayson quand elle luy sera bien remonstree. Je vous salue mille et mille fois es entrailles de la miséricorde de Nostre Seigneur, auquel je vous supplie de me recommander continuellement, avec toute vostre chère et vertueuse compaignie. Vostre très humble frère et serviteur, F., E. de Genève. De Thonon, ce 12 septembre 161 5. A Madame ma très chère Seur en N. S^, La Révérende Mère Abbesse de S^« Claire d'Evian.  Année 1615 6j MCKV AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL 1" Recommandation en faveur d'un converti qui se destine à l'état ecclésiastique. Eloge de sa piété et de sa constance dans la foi. Thonon, 14 septembre 1015. Monseigneur, Il y [a] six ou sept ans que je receu au giron de la sainte Eglise le sieur de Corsier (0, lequel despuis a tant rendu de tesmoignages de vraye pieté, que tous ceux parmi lesquelz il a conversé en ont esté grandement édifiés, dautant plus qu'en gaignant Thonnorable tiltre d'enfant de l'Eglise, il a perdu tout le secours qu'il pouvoit prse- tendre en son païs, et estant demeuré extrêmement pauvre, il a vescu riche de vertus. Or, Monseigneur, tous ses devanciers et son frère ( = ), ayant tous-jours esté très affectionnés a l'obéissance de Vostre Altesse, il espère d'elle tout le soulagement qui luy est requis pour estre relevé non de Tindigence, car ayant choysi la profession ecclésiastique il ne prétend pas a cela, mais de la misère seulement. Et moy, Monseigneur, j'intercède de tout mon cœur pour luy, marri de ne pouvoir rien, pour le présent, en (i) Fils de noble Gabriel de Prez. seigneur de Corsier ou Corcelles, et de D"* Antoine de Saint-Jeoire, Jean-Gaspard fut converti à la vraie foi en i6og. Sur les instances de M""® de Charmoisy, il avait eu, avec le saint Evêque, une première entrevue qui ébranla sa conscience. Sans repos pendant six semaines, il résolut de revenir du pays de Vaud à Annecy pour s'éclairer auprès de l'homme de Dieu qui lui accorda, durant « six autres sepmaines,.., chaque jour deux heures de conférence. » et reçut son abjuration le Jeudi-Saint. Après un essai infrutueux à la Grande-Chartreuse, le nouveau catholique entra dans les rangs du clergé séculier. (D'après sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), ad art, 24 et 51.) Sous-diacre le 23 septembre 1617, il fut ordonné prêtre le 9 juin 1618 (R. E.), et mourut le 19 novembre 1636 à la Sainte-Maison de Thonon, où la protection de François de Sales l'avait fait admettre depuis longtemps parmi les membres du Presbytère. (2) Ferdinand de Prez, seigneur de Corcelles. (Voir tome XV, note (2), p. 261.)  64 Lettres de saint François de Sales sa faveur que cela. Je supplie donq très humblement Vostre Altesse de luy estre propice et de me conserver la grâce de sa bienveuillance, comme a l'homme du monde qui, avec le plus de fidélité et sincérité, vivra tous-jours, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, Franç% E. de Genève, xiiii septembre 161 5, a Thonon. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de TEtat.  MCXVI A MADAME DE LA FLÉCHÈRE Nouvelles diverses. — Une fille spirituelle du Saint qui donne espérance de bien servir Dieu. — Maladie de la Sœur de Bréchard. Annecy, 24 septembre 1615. Nous nous sommes entretenus, le bon P. Commis- saire (0 et moy, ma très chère Fille, et conspirerons a bien faire. Dieu aydant. La chère seur (2) est icy, ce soir elle fera sa reveiie. Nous avons, ce matin, espousé M. et M'"^ de Monthouz, leur dispense estant venue en bonne forme (3). Il ne se peut dire combien j'ay treuvé le cœur de cette bonne femme a mon gré et combien j'espère qu'elle servira bien Dieu. Elle s'est confessée avec un'extreme dévotion (i) Le P. François de Chambéry, Capucin, qui, depuis 1614, était commis- saire général de la Province de Savoie. (Voir tome XI, note ( i ), p. 179, et cf. tome XVI, note (2), p. 220.) (2) Saint François de Sales désigne-t-il ici Ennemonde de la Forest, dame de Bressicu, ou bien Jeanne-Bonaventure, Religieuse à Bous ? Il est difficile de le dire, car l'une et l'autre venaient souvent à Annecy. (3) Ignorant qu'ils étaient parents au troisième degré, Gabriel Guillet de Monthoux et Claire-Marie de Maillard-Tournon avaient été mariés le ro novembre 1609. La dispense demandée par le saint Evéque dès 1613, ne fut accordée qu'en 1615 par Sa Sainteté Paul V. (Cf. tome XV, note ( i ), p. 2.)  Année 1615 65 et est toute ma fille ; ce que je vous dis affin que dou- cement et dextrement vous Taydies. La pauvre Seur de Brechard ne guérit point, nous tenant tous-jours entre Tesperance et la crainte (0. Elle est bien résignée, et les Seurs font merveilles a la servir tendrement, nul remède n'ayant esté oublié. Dieu donq face sa tressainte volonté. Je suis en luy, tout parfaitement tout vostre, ma très chère et bienaymee Fille. Amen. Vive Jésus ! 24 septembre 161 5. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. (i) Pendant le séjour de la Mère de Chantai à Lyon, la Sœur Jeanne- Charlotte de Brechard fut chargée de la conduite de la Communauté d'Annecy comme Assistante et Maîtresse des Novices. Vers le milieu de septembre (cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p. ^o), « Nôtre Seigneur, qui vouloit aussi bien tirer des preuves de sa fidélité dans les souffrances que de sa prudence et dextérité dans ses actions, luy envoya une grande maladie qui la mit à Tex- tremité, et luy donna lieu de pratiquer les vertus de patience et de soumission à la volonté de Dieu, » dont elle donna de très beaux exemples. (Les Vies de quatre des premières Mères, par la Mère de Chaugy, 1659-1892, Vie de la Mère de Brechard, chap. x.)  MCXVII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l^"" L'introduction de « l'art de la soye » avantageuse aux intérêts spirituels et temporels du peuple. — Requête pour obtenir à cette industrie la protec- tion du prince. Annecy, 2 octobre 1613, Monseigneur, Il y a quelque tems qu'on a commencé d'introduire en ces païs de deçà Tart de la soye (0, et ne se peut (i) Voir ci-dessus, note (2), p. 38. Lfttres Vil ç  66 Lettres de saint François de Sales dire combien le progrès seroit utile au service de Dieu pour retirer plusieurs âmes d'entre les haeretiques, pour afFoiblir Genève, qui se soustient en bonne partie de ce traffiq, et pour soulager les sujetz de Vostre Altesse qui gaigneroyent en ce commerce ce que nos ennemis gaignent. Pour ces raysons, Monseigneur, je conjure et supplie très humblement vostre bonté et pieté de favoriser puis- samment ce bon œuvre, si heureusement acheminé (^), pour la gloire de ce Sauveur qui vous est si propice et qui maintient en tant d'honneur vostre couronne, vous en préparant une éternelle en la vie future. Monseigneur, je suis de Vostre Altesse wSerenissime, Très humble, très fidèle et très obéissant orateur et serviteur, Francs E^ de Genève. 2 octobre 1615, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. (i) Le duc de Savoie répondit aux désirs du Saint en accordant, le lo mars de Tannée suivante, des privilèges considérables à Pierre Richard et à Pierre Bocquin, négociants en soie. (Cf. le tome précédent, note (2), p. 330.)  MCXVIII A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET. ÉVÊQUE DE MONTPELLIER « Sans guerre, sans nouvelles. » — Fureur de la peste à Genève. Souhait apostolique du saint Evêque. Annecy, 2 octobre 161 5. Monseigneur, Je penserois faillir si a toutes occasions je ne vous representois mon très humble service. C'est le seul sujet que j'ay maintenant, car pour le reste, a mesme que, grâces a Dieu, nous sommes sans guerre, nous nous treuvons aussi sans nouvelles, hormis de nostre misérable  Année 1615 67 Genève que la contagion afflige cruellement (O, sans qu'a 30 lieues a la ronde il y en ait aucun ressentiment ; qui fait plus probable ce que plusieurs disent, qu'elle leur est venue par la puanteur de la foudre qui y tumba prodigieusement cet esté. Pleut a Dieu que l'affliction leur donnast l'entendement *, affin qu'ilz reconneussent * Is., xxvm, 19. aussi bien la peste spirituelle delaquelle ilz meurent et font mourir tant de gens, comme ilz sont contrains de confesser la temporelle. Dieu vous comble de bonheur, Monseigneur, selon les vœux de Vostre très humble et très obéissant • frère et serviteur, Francs, E. de Genève. 2 octobre 1615, Annessi. A Monseigneur, Monseigneur l'Evesque de Montpellier, Conseiller du Roy en ses Conseilz privé et d'Estat. Revu sur deux copies déclarées authentiques, conservées à Turin, Archives de l'Etat, et à la Visitation de Montpellier. (i) Voir ci-dessus, note (2), p. 56.  MCXIX A LA MÈRE FAVRE, SUPERIEURE DE LA VISITATION DE LYON (O Dieu porte avec nous les charges imposées par l'obéissance. Assurance paternelle de prières. Annecy, 4 octobre 161 5. Or sus, ma très chère Fille, puisque vous voyla sous la charge avec un peu d'appréhension ( = ), oyés ce que ( 1 ) Voir tome XV, note ( i ), p. 178. (2) Avant de rentrer à Annecy, la Mère de Chantai fut obligée de faire un voyage en Bourgogne. A son départ de Lyon (premiers jours d'octobre), elle établit Sœur Marie-Jacqueline Favre dans la charge de Supérieure. « Il ne se peut dire, » raconte la Mère de Chaugy (Les Vies de quatre des premières  68 Lettres de saint François de Sales Nostre Seigneur dit en l'Evangile du jourd'huy (0 : Appré- ciés de moy que je suis doux et hicmble de cœur^ et vous treuveres du repos en vos âmes ; car mon joug Matt., XI, 29. est suave et mon fardeau léger *. Ma très chère Fille, moyennant Tayde de Dieu, nous ferons prou ; mais il faut, avec une courageuse humilité, rejetter toutes les tentations de desiiance en la très sainte confiance que nous avons en Dieu. Certes, vous deves croire que cette charge vous ayant esté imposée par le choix de ceux a Cf. Ps. XV, 8. qui vous deves obéir. Dieu se mettra a vostre dextre * et la portera avec vous, ains la portera, et vous aussi. Mais ne vous estonnés point, faites cet office pour l'amour de ce Sauveur qui vous y a appellee ; vous en serés deschargee quand il luy plaira, vous nous reviendres voir quand il en sera tems. Pour moy, il y a long tems que je prie Dieu pour vous fort particulièrement, estimant que sa divine provi- dence se serviroit de vous pour l'acheminement de Tedi- fice spirituel de cette petite Congrégation. Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur. Amen. Franç% E. de Genève. Le 4 octobre 161 5. Mères, 1659-1892, Vie de la Mère Favre, chap. vu), « avec quelle douleur elle receut ce joug qui luy paroissoit insupportable, et que son humilité envisa- geoit comme une croix incompatible avec la foiblesse et le peu de talent qu'elle croyoit être en elle. » Nous verrons que le Bienheureux dut plus d'une fois encore encourager sa chère Fille, dont les grandes qualités et les rares aptitudes pour le gouvernement n'étaient cachées qu'à elle-même, (i) L'Evangile qui se lit en la fête de saint François d'Assise.  Année 1615 69  MCXX A MADAME DE LA FLÉCHÈRE (inédite) Actions de grâces pour la guérison de Charles de la Fléchère. — Prochain retour de la Mère de Chantai et quelques nouvelles. — Une question théologique. Annecy, vers le 7 octobre 161 5 ( i ). Je m'imagine que vous estes a Rumilly maintenant, ma très chère Fille, et je vous escris ce billet sans loysir, pour vous accuser la réception de la lettre que vous m'escrivistes l'autre jour de la FlechereC^), louant Dieu de la guérison de vostre Charles (3), que vous aves maintenant, Dieu aydant, sain pour long tems. Madame de Chantai sera icy dans trois semaines pour le plus tard (4), et, comme je pense, la chère nièce, ma fille (3), aussi ; car M""^ de Charmoysi, qui vous la doit ramener, fait estât de venir pour la ïoussaintz. Madame Favre est Supérieure a Lion (6) et exerce des-ja sa charge ; M'"' de Brechard est un peu mieux (7), mais tous-jours en fièvre et en flux. (i) D'après l'annonce du retour de la Mère de Chantai dans « trois semai- nes, » on peut placer cette lettre aux premiers jours d'octobre, la Sainte n^ayant regagné Annecy qu'à la fin du mois. (Cf. ci-dessus, p. 35, et la note ( 4 ) ci-dessous.) Le 8, François de Sales, parlant de la maladie de la Sœur de Brechard, donne des nouvelles meilleures que celles mentionnées dans les présentes lignes ; la date que nous leur assignons semble donc justifiée, (2) La maison-forte delà Fléchère se trouvait à Vanzy, actuellement dans l'arrondissement de Saint-Julien ; elle existe encore, un peu amoindrie, mais toujours d'aspect imposant. (5) Fils de la destinataire (voir tome XV, note (2), p. 86, et ci-dessus, note (3), p. i). (4) La Mère de Chantai rentra vers le 26 ou le 27 octobre ; on voit en effet. par une lettre adressée à la Mère Favre (vol. I, p. si), que son retour dut précéder de fort peu la venue de M^*" de Marqueniont, qui arriva le ^o Annecy. (5) Gasparde d'Avisé (cf. ci-après, pp. 74, 82). (6) Voir la lettre précédente. (7) Voir ci-dessus, note (i), p. 65, et la lettre suivante.  70 Lettres de saint François de Sales La question de M""" de Mieudry (0 et de vous est aysee a résoudre, mais il n'est pas si aysé d'appayser toutes les allégations et répliques qu'on a accoustumé de faire : c'est pourquoy je remettray cela pour quand nous aurons du loysir. Il suffit que tous les chrestiens damnés ne le seroit (sic) pas si ilz mouroyent après le Baptesme ; mays Nostre Seigneur laisse ordinairement que les choses d'icy bas aillent leur cour (sic) ordinaire et que nous usions de nostre libre arbitre a nostre gré. Que si nous en usons mal et que nous soyions treuvés en mauvais estât Ihors que, par les causes naturelles, (2) A Madame Madame de la Flechere. A Rumilly. Revu sur l'Autographe conservé au 2*^ Monastère delà Visitation de Madrid. (r) Gasparde de Cerisier, dame de Mieudry. (Voir tome XIV, note ( i ), p. 85.) (2) Le bas de l'Autographe est coupé.  MCXXI A LA MÈRE DE GHANTAL, A LYON Convalescence de la Sœur de Bréchard. — Le Général des Feuillants en visite chez le Saint. — Appréhensions au sujet d'une personne dont les voies semblaient extraordinaires. Annecy, 8 octobre 1615. Vous estes raysonnable et n'attendres pas de moy, ma très chère Mère, des grandes lettres en ce tems auquel j'ay tant d'affaires sur les bras, que je n'en puis pas porter davantage. Je vous diray seulement, qu'a mon advis, nostre Seur Jeanne Charlotte est maintenant toute hors de danger (0, bien qu'ell'ayt encor son flux, car c'est avec tant de diminution de fièvre, quil ny paroist presque plus, et si, elle commence fort a manger. (i) Voir ci-dessus, Lettre mcxvi, p. 65.  Année 1615 71 Au demeurant, nous avons eu icy le P. General des P'eûillans i^\ homme de grande vertu et sainteté, lequel, sur certain propos, me parlant de la xMere Isabeau, delaquelle vous m'escrivites il y a troys moys ( = ), m'a dit qu'on luy en avoit mandé des merveilles de Paris a Romme, d'où il vient. Je dis, merveilles es accidens extraordinaires ou de ravissemens, ou d'illusions. Cela me met fort en peine, car si elle vient icy avec ces espèces de choses inconneûes, en lieu de tirer de la consolation de nous, elle nous donnera fort a faire et nous tiendra empeschés a discerner si cela est saint, si ceci est faint, et troublera grandement la pauvre petite trouppe de colombes innocentes qui n'ont prétention a des choses si ravissantes. C'est pourquoy, si vous sçaves que cela soit vray, vous pourres la destourner, luy escrivant que je vous ay escrit que vous luy fissies sça- voir que, ne sachant si je seray icy cet hiver, je désire qu'elle ne s'incommode point, ni monsieur le président Resiguier (3); mais si elle veut envoyer deux ou trois filles, vous les recevres et les garderes volontier jusques après Pasques. Que si il ny a pas tant de danger, vous la laisseres venir. Bonsoir, ma très chère Mère, de tout mon cœur. Vive Jésus ! Amen. VIII octobre 161 5. A ma très chère Mère en N. S. Visitation (4). Revu sur l'Autographe conservé chez les Filles de la Croix, à Guingamp (Côtes-du-Nord). (i) D. Sens de Sainte-Catherine (voir ci-dessus, note ( i ), p. 39). (2) La Mère Isabeau de Romillon, fondatrice des Tiercerettes de Toulouse, qui avait le projet de se rendre à Annecy. (Voir ibid., Lettre mcv, et note ( 2 ), p. 34-) (3) Guillaume de Rességuier (voir ibid., note (2), p. 35). (4) Ce qui manque de l'adresse a dû disparaître à l'ouverture de la lettre.  72 Lettres de saint François de Sales  MCXXII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON (0 Affectueuse sollicitude du Saint pour le cœur de sa chère Fille. — Les choses vont d'autant mieux qu'elles sont plus au goût de Dieu et moins à notre gré. — Ce qu'il faut faire parmi les diftîcultés. — Messages paternels. Annecy, 12 octobre 1615. Que fait le cœur de ma très chère Fille, que le mien ayme en vérité très parfaitement? Je pense, certes, quil est tous-jours fort uni a celuy de Nostre Seigneur et quil luy dit souvent : Le Seigneur est ma lumière C'est ma garde coustumrere. De qui sçaurois-je avoir peur ? C'est l'Eternel qui ni appuyé. Ferme sous tien de ma vie, * Ps. XXVI, I. (Ver- Qiii peut estonner mon cœur*? sion de des Portes; 0I' p.^'^'iy^'^^^' ^^ ^^^s ^^^^^ Fille, y^//^5 profondement vostre pensée *Ps. Liv, 23;! Pe- sur les divines espaules du Seigneur* et Sauveur, et il ^'^Cf^ Oseœ, XI, 3. vous portera * et vous fortifiera. Sil vous appelle (et il est vray quil vous appelle) a une sorte de service qui soit selon son gré, quoy que non selon vostre goust, vous ne deves pas moins avoir de courage, ains davantage que si vostre goust concouroit a son gré ; car, quand il y a moins du nostré en quelqu'affaire, elFen va mieux. Il ne faut pas, ma chère amie ma Fille, permettre a vostre esprit de se regarder soymesme et de se retourner sur ses forces ni sur ses inclinations ; il faut ficher les yeux sur le bon playsir de Dieu et sur sa providence. Il ne faut pas s'amuser a discourir quand il faut courir, ni a deviser ( I ) Le carton sur lequel a été collé l'Autographe ne permet pas d'en voir l'adresse ; mais les encouragements que contient cette lettre et les salutations finales ne laissent aucun doute sur la destinataire. Celle-ci est bien la Mère Favre, qui venait d'être élue Supérieure à la Visitation de Lyon. (Voir ci-dessus, note (2), p. 67.)  Philip., IV, ult.  Année 1615 73 des difficultés quand il les faut dévider. Ceignes vos reins de force * et remplisses vostre cœur de courage, et puis, ' Prov., uit., 17. dites : Je feray prou, non pas moy, maïs la grâce de Dieu avec moy *. La grâce de Dieu, donques, soit a * ^ ^o»"., xv, 10. jamais avec vostre esprit. Amen *. PMUn*"' ^'' "^^■' (0 Ma très chère Fille, salues tendrement ma chère Seur Peronne Marie ^2)^ qui est certes toute dedans mon ame, et ma Seur Françoise Flieronime (3) (je ne vay pas par ordre), et ma Seur Marie Renée (4) et ma Seur Anne Marie (^), et toutes nos autres Seurs que je n'ayme pas moins pour ne les connoistre que pour estre des servantes de Dieu et filles [très chères 1^)] de Nostre Dame. XII octobre 161 5. Revu sur l'Autographe conservé au i*' Monastère de la Visitation de Madrid. ( I ) Ce dernier alinéa est inédit. (2) Sœur Péronne-Marie de Chaste!. On remarquera l'absence de message pour la Sœur de Blonay ; à ce moment, en effet, elle se trouvait^en Bourgo- gne avec la Mère de Chantai. (3) Sœur Françoise-Jéronyme de Villette, cousine du Saint, et voilée par lui le 2 juillet précédent. (Cf. ci-dessus, note (2), p. 18.) (4) Sœur Marie-Renée Trunel, veuve d'Auxerre (voir le tome précédent, note (3), p. 240). (5) M""^ Chaudon, née Bellet, qui, obligée'par diverses circonstances de re- tarder son entrée au noviciat, se faisait appeler cependant Sœur Anne-Marie. (Voir ibid., note (3), p. 25.) (6) Ces deux mots sont oblitérés dans l'Autographe.  MCXXIII A M. CLAUDE DE BLONAY ( (inédite) Pourquoi les Pères Barnabites ne peuvent pas encore s'installer à fhonon. Affaire du prieuré de Contamine. Annecy, vers le 23 octobre 161 5 (2). Monsieur, M'asseurant que vous viendres donq bien tost pour (i) Voir tome XII, note (i), p. 124. (2) L'allusion à la prochaine venue de M"^'^ de Charmoisy, qui se trouve dans cette lettre et la suivante, permet de croire que toutes deux ont été écrites à peu près à la même date.  74 Lettres de saint François de Sales amener madamoyselle d'Avisé ( ^ ), je seray court, et vous diray seulement que les bons Pères Barnabites desire- roit (sic) bien d'aller la( = ); mais ilz n'oseroyent sans nouvelle licence du General (3), puys que le traitté fait ne peut subsister (4). Hz ont envoyé deux jeunes hommes pour la 2. et 4. classe (?). Je ferois les lettres que vous desires si j'en avois le loysir. Monsieur Claude C^) me promit de me venir voir et il ne le fit pas, car ce fut en la rue ou je le rencontray. Vous aures fort a faire a vous défendre pour Contamine, et a la fin vous verres quil faudra donner une grosse pension (7) ; ce que je ne dis pas le sachant, mais le pré- sageant. J'ay dit aux Dames de la Visitation que, a la venue de madame de Charmoysi (^), vous leur envoyeries de l'ar- geant, et elles s'y attendent (9). Voyla une lettre pour  (i) Gasparde d'Avisé (voir le tome précédent, note (6), p. 40), alors chez sa sœur, mariée à Jacques de Blonay. ( 2 ) Au collège de Thonon (voir ci-dessus, note ( i ), p. 46). {3) Don Jean-Ambroise Mazenta, Général de la Congrégation depuis 1612. (Voirie tome précédent, note (2), p. 190.) (4) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 46. (5) La Règle des Barnabites leur interdisait de professer les basses classes de latinité (cf. le tome précédent, note (3), p. 190); aussi, en acceptant la direction d'un collège, se réservaient-ils de faire tenir ces classes par des régents laïques. Les « deux jeunes hommes » étaient-ils destinés à Annecy ou à Thonon ? Les documents font défaut pour trancher la question. (6) Sans doute Claude Magnin, prêtre de la Sainte-Maison, qui, d'après le chanoine Pierre Magnin, son neveu, y résida environ vingt-quatre ans. ( Process. remiss. Gehenn. ( I ), ad art. 11.) Il signe les Registres paroissiaux, de 1606 à 1624. (7) Chef de la Sainte -Maison de Thonon tout entière depuis 161 3, M. de Blonay était supérieur immédiat des prêtres séculiers du Presbytère, et se trou- vait par là daDS l'obligation de sauvegarder leurs intérêts. Aussi devait-il cher- cher à se « défendre pour Contamine, » dont on voulait attribuer les revenus exclusivement aux Pères du collège. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 46.) Sa ré- sistance ne pouvait tenir cependant devant les désirs formels du duc de Savoie et du prince Victor-Amédée, protecteur nommé des Barnabites de Thonon; au reste, l'Evéque l'avertit qu'à défaut du prieuré, il aura une « grosse pension à donner aux Religieux. (8) Voir ci-dessus, p. 69, et ci-après, p. 76. (9) L'argent ne fut reçu par la Visitation que « le I9feuvrier 1616, de monsieur de Blonney, par les mains de M. le Prieur son fils, et ce pour la pension echuee des le quinzième d'ast (août) 1614, de nostre Seur, sa fille : 213 florins 2 sols. » (Livre des comptes du i^"" Monastère de la Visitation d'Annecy, 1612-1616.)  Année 1615 75 M"* d'Avisé, que madame de la Flechere m'a envoyée aujourdhuy. Cependant, aymes moy tous-jours, et me croyes, Monsieur, Vostre plus humble, très affectionné confrère, Franç% E. de Genève. A Monsieur Monsieur de Blonnay, Prefect de la S'' Mayson. A Tlîonon. Revu sur l'Autographe appartenant à M""* Richard-Cottin, à Lyon.  MCXXIV  A MADAME DE LA FLECHERE  Les dîmes et la volonté de Dieu. — Mort d'un religieux Feuillant. — Arrivée très prochaine de la Mère de Chantai et de M""^ de Charmoisy. Annecy, 23 octobre 161 5. Vous aves rayson, ma très chère Fille, d'estre bien franche au payement des dixmes, car c'est la volonté de Dieu. Vous deves demeurer en paix sur ce que vous m'escrives, car il n'y a point de hazart. Le P. General des Feuillans partit lundi ( et laissa icy son compaignon malade, lequel mourut hier au soir (2); c'est pourquoy je croy qu'il reviendra ce soir pour estre a son enterrement, car il laissa charge qu'on l'advertit sil trespassoit, affin de revenir. Mays je ne pense pas que pour cela vous deussies attendre, si vous aves des affaires ailleurs, car peut estre ne repassera il pas vers vous, en- cor que vous demeureres (5). Je me res-jouis des bonnes nouvelles du cher mari. (i) D. Sens de Sainte-Catherine était à Annecy depuis le commencement d'octobre (cf. ci-dessus, p. 71); il en partit le 19. (2) Les Registres paroissiaux d'Annecy ne contiennent pas l'acte de sépul- ture de ce Religieux; il a donc été impossible de l'identifier. (3) Probablement à Rumilly, où M-^'^ de la Fléchère devait se trouver alors.  76 Lettres de saint François de Sales Nostre Mère (0 viendra demain, ou tout au plus tard passé demain, si rien n'est survenu despuis Dimanche qui la puisse empescher. La chère cousine (-) viendra aussi, soudain qu'elle le sçaura. F^t moy je pense que parmi tout cela on vous pourroit peut estre aussi bien [avoir], prin- cipalement si Charles est en estât de pouvoir estre amené icy (3). Dieu vous bénisse de ses plus chères grâces, ma très chère Fille, et je suis en luy, tout parfaitement vostre. Vive Jésus. Amen. 23 octobre 16 15. Je vous supplie d'envoyer les deux lettres ci jointes, toutes deux a monsieur le capitaine Juge (4). A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de TEtat. ( I ) La Mère de Chantai (voir ci-dessus, note ( 4 ), p. 69). (2) M"^* de Charmoisy (cf. ibid., pp. 69, 74). (3) Au collège d'Annecy. L'écolier, on s'en souvient, avait été malade quel- ques semaines auparavant. (Voir ci-dessus, Lettre mcxx, p. 69, à la même.) (4) Maurice Juge, fils de Claude Juge, nommé capitaine et châtelain de la ville de Rumilly par patentes du 31 mars 1604, avait encore cette charge le 7 mai 1619. En récompense des services rendus à Son Altesse dans la profes- sion des armes, on le dispensa dès 1599 du paiement des impôts et il fut mis sur le pied des anciens nobles de Savoie.  JMCXXV A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÊQUE DE MONTPELLIER (inédite) Recommandation en faveur d'un futur étudiant en médecine. Bruits de guerre en France. Annecy, 24 octobre 1615. Monseigneur, L'honnorable réputation que j'ay d'estre très particu- lièrement vostre serviteur, a fait passer ce jeune homme  Année 1615 77 de Moustier icy (0, pour avoir de mes lettres a vous porter, afïin quil puisse plus favorablement vous faire la révérence et vivre en vostre Université, ou il espère faire emplette de la science de médecine sous le bon- heur de vostre protection ( = ). Monseigneur l'Evesque de Saint Paul (?) me conjure fort de vous supplier d aggreer quil s'advoiie des vostres; dequoy je ne fay pas difficulté, puisqu'estant enfant d'une bonne famille, il ne luy arri- vera point de nécessité qui le puisse porter a vous donner aucune autre sorte d'importunité. Je n'ay encor point entretenu nostre bon M. Fran- çois (4) a cœur joye ; ce sera, Dieu aydant, a son premier loysir. (i) Le nom du jeune étudiant nous demeure inconnu, malgré les nom- breuses recherches faites par des érudits aux Archives de la Faculté de médecine de Montpellier. (2) L'Ecole de médecine de Montpellier, la première établie en Europe, fut très florissante dès le xii' siècle ; en 11 53, saint Bernard en parle avec éloge. Ce n'était pourtant encore qu'un centre médical important, qui devint véritable Ecole en 1220, lorsque le Cardinal Conrad, légat d'Honorius III, lui donna des statuts. Le 26 octobre 1289, le Pape Nicolas IV l'unissait aux Facultés de droit et des arts, et fondait ainsi l'Université ou Studium géné- rale ; il déclare dans sa Bulle d'érection que « la cité de Montpellier est née apte aux études, spécialement à celles qui regardent la médecine. » En effet, son enseignement pour cette science jouit d'une réputation universelle jusque dans les temps modernes. Au xvm^ siècle seulement, on voit l'Ecole de mé- decine de Paris lui disputer la prééminence. Celle de Montpellier produisit une foule de docteurs célèbres, parmi lesquels étaient habituellement choisis les médecins des Papes et des rois. Ms"" Fenouillet s'occupa beaucoup de l'Université de sa ville épiscopale. Il rétablit la Faculté de théologie et fit valoir les anciens droits des évêques ses prédécesseurs, en mettant au concours deux chaires vacantes qu'il conféra à des catholiques. En avril 1613, des patentes royales l'avaient déclaré chef de l'Université; mais elles soulevèrent de vives oppositions de la part des con- suls, sous l'influence protestante, et ne furent enregistrées par le Parlement de Toulouse que le 16 juillet 161 5. Celui-ci décida qu'à l'Evêque de Montpel- lier appartenait, mais avec l'assistance des magistrats, le droit de régler et réformer le collège de philosophie et des lettres humaines, d'en instituer et destituer les régents et les professeurs. (D'après Germain, Hist, du Languedoc, tome VII, p. 609; Pélissier, Grande Encyclopédie, et les notes de MM. Carbon et Bousquet, de Montpellier.) (3) Thomas Pobel, évêque de Saint-Paul-trois-Châteaux (voir tome XI, note ( r), p. 356). (4) Deux frères de l'Evêque de Montpellier portaient le nom de François. L'un, diacre le 22 décembre 1607, fut nommé curé d'Arenthon par Bulles du 4 février 1608, exécutées le 15 novembre. L'autre, très probablement celui dont parle ici le Saint, et père de Michel, seigneur de Barraux (voir le tome  78 Lettres de saint François de Sales Je suis tout fasché des bruitz qui courent de guerre par delà (0, souhaitant tous-jours beaucoup de bonheur a ce royaume, ou il y a tant de gens de bien. Dieu, par sa bonté, commandera aux vens et a la mer, et la Matt., VIII, 26. tranquillité se fera grande *. Je suis, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant frère et serviteur, Francs E. de Genève. 24 octobre 161 5. Revu sur uae ancienne copie conservée à la Visitation de Montpellier. précédent, note (i), p. 339), épousa en secondes noces Constance Arpaud ; il mourut avant le 28 avril 1624, date du contrat de mariage de sa fille Perrine avec Jacques Valat, gouverneur du château de Montferrand. (i) A l'occasion des mariages espagnols (octobre 1615), Condé essaya de susciter la guerre civile et leva une armée de si:x mille hommes. Mais tout se passa en simples manifestations, et Tannée suivante Marie de Médicis traitait à Loudun avec les rebelles.  MCXXVI A LA MÈRE DE CHANTaL (billet inédit) Charité attentive du Saint pour la Mère de Chantai. Annecy, [vers le 26 ou le 27 octobre 1615 (i).] Ma très chère Mère, Croyes que si j'eusse eu ma liberté, je vous eusse envoyé vostre soupper plus tost ; mais en somme, il ny a moyen (i) Ces lignes semblent avoir été écrites au retour d'un voyage, plutôt qu'au début d'une convalescence. A la fin d'octobre 1615, la Mère de Chantai reve- nait de Lyon après une absence de neuf mois ; rien d'étonnant que le Saint, empêché d'aller la voir dès son arrivée (voir ci-dessus, note (4), p. 69), lui ait donné une marque spéciale de paternelle affection. Si la date indiquée paraît très probable, nous ne la donnons cependant pas comme certaine.  Annhh 1615 79 d'estre maistre de soymesme en ce monde. Mays sil arrive asses tost, ne laisses pas d'en manger ; et je ne veux point que vous me respondies, ains seulement que je sache si vous vous portes bien. O Dieu, ma chère Mère, Dieu, dis-je, soit a jamais nostre vie. Amen. Revu sur TAutographe conservé à la Visitation de San Remo (Italie).  MCXXVII A LA MÈRE FAVRE, SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Béatitude du dépouillement intérieur. — Le courage des filles du monde et celui des filles de Dieu. — Promesse d'union et de prières. — Il ne faut point permettre « aux appréhensions d'apprehendîr » notre cœur. — Recours aux saints Anges. — Sœur Marie-Renée ; souvenir consolant de sa confession générale. Annecy, fin octobre ou commencement de novembre (i) 1615, Je le voy certes de mes propres yeux, ce me semble, et le sens de mon propre cœur, ma très chère Fille, que vous aves fait une prattique de très grand despouillement. Mais, o que bienheureux sont les nudz de cœur, car Nostre Seigneur les revestira de grâces, de bénédictions et de sa spéciale protection. Pauvres et chetifves créa- tures que nous sommes, en cette vie mortelle nous ne pouvons quasi rien faire de bon qu'en souffrant pour cela quelque mal ; non pas mesme nous ne pouvons quasi pas servir Dieu d'un costé que nous ne le quittions de l'autre, et souvent il nous convient quitter Dieu pour Dieu, renonçant a ses douceurs pour le servir en ses douleurs et travaux. Ma très chère Fille, helas ! les iilles que l'on marie renoncent bien a la présence des pères, mères et leur (i) Les premières éditions ne datent pas cette lettre; Hérissant (1758) la place vers dccembre 161^. Il est plus exact de la rapprocher du retour de la Mère de Chantai à Annecy ; les allusions des deux premiers alinéas le deman- dent, aussi bien que la mention de la mort de Sœur Marie-Renée Trunel. (Voir ci-après, note ( i ), p. 81.)  8o Lettres de saint François de Sales païs, pour se sousmettre a des maris bien souvent incon- neus, ou au moins d'humeurs inconneuës, affin de leur faire des enfans pour ce monde. Il faut bien que les filles de Dieu ayent un courage encor plus grand que cela, pour former en sainteté et pureté de vie des enfans a sa divine Majesté. Mais avec tout cela, ma très chère Fille, jamais nous ne nous pouvons quitter, nous que le propre sang de Nostre Seigneur, je veux dire son amour par le mérite •Cf. lReg.,xvm, I. de son sang, tient collés * et unis ensemble. Certes, pour moy, je suis en vérité si parfaitement vostre. qu'a mesure que ces deux ou troys journées de distance semblent nous séparer corporellement, de plus fort et avec plus d'affec- tion je me joins spirituellement a vous, comme a ma Fille très chère. Vous seres la première auprès de nostre Mère (0 en mes prières et en mes soucis : soucis pour- tant bien doux, pour Textreme confiance que j'ay en ce soin céleste de la divine Providence sur vostre ame, laquelle sera bien heureuse si elle jette aussi dans ce * Cf. Ps. L!v, 23 ; sein d'amour infiny toutes ses appréhensions *. e n, u ., y. Q^ ^^^^ ^^^ chère Fille, tenés vos yeux haut eslevés en Dieu ; aggrandissés vostre courage en la tressainte humi- lité, fortifiés-le en la douceur, confirmés-le en l'esgalité ; rendes vostre esprit perpétuellement maistre de vos incli- nations et humeurs, ne permettes point aux appréhensions d'appréhender vostre cœur : un jour vous donnera la * Cf. Ps. xviii, 3. science de ce que vous aures a faire le jour suivant *. Vous aves ci devant franchi plusieurs passages, et c'a esté par la grâce de Dieu ; la mesme grâce vous sera présente en toutes les occasions suivantes, et vous délivrera des difficultés et mauvais chemins l'un après l'autre, quand il devroit envoyer un Ange pour vous porter es pas plus *Matt..iv,6; Luc, dangereux*. ' ' ^* Ne retournés point vos yeux devers vos infirmités et insuffisances sinon pour vous humilier, et non jamais pour * Cf. Ps. XV, 8. vous descourager. Voyés souvent Dieu a vostre dextre * et les deux Anges qu'il vous a destinés, l'un pour vostre ( I ) La Mère de Chantai.  Année 1615 81 personne, l'autre pour la direction de vostre petite famille. Dites-leur souvent, a ces saintz Anges : Sei- gneurs, comme ferons nous ? Suppliés-les qu'ilz vous fournissent ordinairement les connoissances du vouloir divin qu'ilz contemplent, et les inspirations que Nostre Dame veut que vous recevies de ses propres mammelles d'amour. Ne regardés point cette variété d'imperfections qui vivent en vous et en toutes les filles que Nostre Seigneur et Nostre Dame vous ont confiées, sinon pour vous tenir en la sainte crainte d'oflfencer Dieu, mays non jamais pour vous estonner ; car il ne se faut esbahir si chaque herbe et chaque fleur requiert son particulier soin en un jardin. J'ay sceu quelqu'une des grâces que Dieu fit a nostre très chère Seur Marie Renée sur son trespas (O. Elle estoit fort ma fille; car Ihors que je fus la, elle fit une reveuë de toute sa vie, pour me donner connoissance de ce qu'elle avoit esté, avec une humilité et confiance incroyable et sans grande nécessité, avec une extrême édification pour moy quand jV repense. La voyla mainte- nant a prier pour nous et pour vous spécialement, puis qu'elle est trespassee vostre fille et sous vostre assistance. Faites-moy la consolation, ma chère Fille, de m'escrire souvent, et me dire tous-jours en confiance les choses que vous croires que je puisse utilement sçavoir de Testât  (i) M*"*^ d'Auxerre, la vertueuse fondatrice du i^"" Monastère de Lyon, portait le voile de la Visitation et le nom de Sœur Marie-Renée depuis le 3 février. (Voir le tome précédent, note (3), p. 240.) Le 14 octobre, Notre- Seigneur la rappelait à lui, après avoir comblé de grâces ses derniers jours. A un état de peines intérieures très intense, succéda pour cette âme une joie extraordinaire d'aller voir son souverain Bien. Une extase de trois quarts d'heure suivit la réception du saint Viatique, et M^r l'Archevêque de Lyon, qui daigna la visiter, « dit qu'il n'avoit veu personne aller a la mort avec tant d'allégresse que cette chère mourante, et qu'elle recevoit bien a cette heure finale de sa vie la recompense de tout ce qu'elle avoit fait au long d'icelle pour la gloire de Dieu... A l'instant de son trépas, l'on eut plustost jugé qu'elle tumboit en un grand ravissement que dans les filets de la mort; car, levant les yeux au ciel avec un visage doux et riant, par un amoureux soupir, comme fesant une oraison jaculatoire, son ame fut délivrée du sac de cette mort, et alla... dans l'éternelle liberté des enfants de Dieu. » (Vie manuscrite de Sœur Marie-Renée Trunel, par la Mère de Chaugy; cf. aussi Les Vies de VIII vénérables Veves, etc., Annessy, 1659, chap. vi.) Lettres VII 6  82 Lettres de saint François de Sales de vostre cœur, que je bénis au nom de Nostre Seigneur de tout le mien, et suis en Dieu tout vostre. Francs, e^ ^e Genève.  MCXXVIII A MADAME DE LA FLÉCHÈRE La comtesse de Tournon malade; son mari « un petit fasché » contre le Saint. — Gracieuse humilité de François de Sales qui s'entend peu aux compli- ments et marche « a la bonne foy ». — Nouvelles et messages. Annecy, 6 novembre 1615. Je vous escris a la course, envoyant exprès ce porteur pour apprendre des nouvelles de la santé de M""^ la Com- tesse (0, au service de laquelle je contribuerois volontier ma visite personnelle si la maladie estoit de qualité que cela fut requis et quil luy tournast a consolation. Mon- sieur le Comte (2), pour dire ceci entre nous deux, est un petit fasché contre moy pour un sujet auquel je n'ay point de coulpe ; mays sa bonté adoucira bien tout. Certes, je vay a la bonne foy, et qui voudra m'estre si rigoureux que de remarquer mes imperfections et defautz, il ne m'aymera jamais guère longuement, sur tout mes man- quemens es civilités , complimens et autres choses de bienséance; car, outre que j'ay l'esprit fort lourd, je Tay encor si chargé d'occupations selon ses forces, que je ne voy pas tout ce quil faudroit. Nostre Mère (3) se porte bien et est toute vostre. Nostre chère cousine (4) arrivera ce soir ou passé demain, comme je pense, et avec elle, la chère nièce, ma fille (5). (i) Philiberte de Beaufo'-t, comtesse de Tournon (voir tome XV, note (2), p. I). ( 2 ) Le comte de Tournon. (3) La Mère de Chantai. (4) M'"* de Charmoisy, qui était attendue à Annecy, (Cf. ci-dessus, pp. 69, 74, 76.) {^) Gasparde d'Avisé (cf. ibid., pp. 69, 74).  à  Année 1615 83 (0 II ne se peut dire combien Monseigneur de Lyon nous a rempli d'honneur, de dévotion et de consolation (2 ). Si le cher mari est venu, salues-le bien amoureuse- ment de ma part et l'asseures de mon service. Dieu vous bénisse en toute vostre ame, ma très chère Fille, et je suis en luy parfaitement tout vostre. VI ix^^^ 161 5, Annessi. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) La phrase suivante est inédite. (2) Mer de Marquemont, arrivé à Annecy le 30 octobre, était probablement parti le 5 novembre. Pour les détails de son séjour, voir ci-après, les Lettres MCXXX et MCXXXII.  MCXXIX AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l" L'Evêque de Genève s'excuse de n'avoir pu conférer un bénéfice à un candidat recommandé par Son Altesse. Annecy, 8 novembre 161 5, Monseigneur, Sur la recommandation qu'il a pieu a Vostre Altesse de me faire en faveur du sieur du Chatelard (0, qui me (i) Charles-Auguste (Histoire, etc., liv. VIII) nous raconte l'histoire d'un « gentilhomme ecclésiastique, » qui, n'ayant «■ salué les lettres que de bien loing, » ne laissa pas de se présenter au concours du 4 novembre 161 5, auquel assistait TArchevêque de Lyon, et « se vantoit publiquement d'emporter » le « bénéfice a la faveur des... recommandations des Princes. » Son échec fut éclatant : l'ignorance était notoire, et le saint Evêque, exact observateur des règles de l'Eglise, conféra la cure à un « docteur d'une science éminente et d'une pieté tres-recoguuë, » Pierre-François Jay. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 54.) Le <( pauvre homme ainsy rejette, » recourut alors aux menaces; il fit pire encore. « Un jour de dimanche, pendant que Ton celebroit les divins Offices, » il « n'eut point de honte... de présenter au Bien-heureux François... un libelle diffamatoire remply de mille injures et indignités. » « L'Office achevé, » dit le chanoine Etienne de la Combe (Process. reniiss. Geheiin. (I),  84 Lettres de saint François de Sales tient lieu de commandement, j'eusse grandement désiré de le pouvoir prouvoir du bénéfice qu'il praetendoit ; mays d'un costé, il n'estoit pas en moy d'en disposer, puisque le Chapitre de mon église en avoit la nomination, et d'autre part, tant ledit Chapitre que moy, ne pouvons en sorte quelcomque nous départir des ordonnances du • Sess. XXIV, de Concile de Trente *, que nous avons juré d'observer ; et Reform., c. xviii. , . . elles ne nous permetent pas de distribuer les bénéfices curés que par le concours au plus capable, et faysans le contraire, nous nous exposerions a la disgrâce de Nostre Seigneur et a la damnation. Ce bénéfice la, Monseigneur, ne peut rendre au curé que cinquante ducatons, et la charge des âmes y est fort grande pour la multitude du peuple qui en dépend, lequel hante fort l'Alemaigne et a besoin d'un pasteur qui ayt grand soin de l'édifier et conserver en la fo\' (0. ad art. 34), « le Serviteur de Dieu leust cest escript infâme sans émotion. » Le Chapitre voulait punir '< une si grande impudence, » il s'y opposa ; et, non con- tent de pardonner au coupable, lui « tesmoignat du depuis une particulière dilection. » C'est de ce personnage que le magnanime Evêque parle en termes si modérés à cette date du 8 novembre. Il avait nom Pierre-François de Rossillon, était fils de dame Péronne-Marie de Lambert et de Jacquemin de Rossillon, dit de Châtillon, seigneur du Châtelard, du Bois, de la Naz, etc., et tenait à la famille de Sales par les deux côtés paternel et maternel. Né vers 1578, Pierre-François fut minoré le 20 sep- tembre 1597, et accompagna le Saint, encore Prévôt, dans son voyage à Rome. Lors de sa prêtrise, 17 avril 1604, il était déjà chanoine de Saint-Pierre de Genève. S'il n'eut pas de bénéfices portant « charge d'ames, »» dont son Evêque le jugeait incapable, les titres d'honneur ne lui manquèrent pas : chevalier grand-croix des Saints-Maurice et Lazare, conseiller, comte et com- mandeur des Allinges, prieur commendataire de Notre-Dame de Faulcon à Barcelonnette, de Carruz ai: diocèse de Mondovi, M. du Châtelard devient, le 21 novembre 1620, doyen de la Collégiale de Notre-Dame de Liesse, et résigne son canonicat le 20 mai suivant. Le Bienheureux, de son propre mou- vement, le fit nommer aumônier de Madame Royale, et se montra pour lui bon et généreux encore après sa mort. Pierre-François de Rossillon dépose lui-même dans le P"" Procès de Béatification (ad art. ult.) : « Je baisois maintes fois » la main du vénérable défunt '( et m'en touchay les yeux auxquels j'avois une grande defluction, laquelle » passa par la vertu de ce saint attouchement. M. du Châtelard mourut le 19 décembre 1634, à Saint-Julien, chez son frère le commandeur du Bois. (i) Le bénéfice prétendu était la cure de Scionzier, au canton de Cluses, en Faucigny. Cette partie de la Savoie ne subit point le joug de la Réforme ; mais le voisinage de la Suisse protestante demeurait un danger perpétuel pour la foi de ses habitants, qui avaient dû lutter à diverses reprises contre les Bernois et les (îenevois.  Année 1615 85 Certes, je souhaite tout l)onheur audit sieur du Chate- lard, qui fait ])rofession (raymer le service de TP^glise ; mais pour des bénéfices, je luy en desirerois d'autre nature que de ceux qui portent charge d'ames, et ilz ne luy manqueront pas, sil plait a Vostre Altesse le favo- riser es occurrences. Cependant, suppliant a jamais Dieu quil bénisse de ses plus grandes bénédictions vostre personne et vostre coronne, Monseigneur, je suis, de Vostre Altesse, Très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, France E. de Genève. VIII novembre 16 15, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCXXX A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÊQUE DE MONTPELLIER (inédite) Saint François de Sales se porte garant du repentir d'un coupable. — Souvenirs du séjour de M^'^de Marqueniont à Annecy. — Genève décimée par la peste. Annecy, 8 novembre 1615. Monseigneur, Voyla qu'en fin le sieur de Barraux (0, repentant des il y a long tems, et corrigé de sa faute par le loysir et les raysons qui luy ont bien fait sentir le devoir quil a de vivre sage et sous-mis a vostre obéissance, il s'en va se jetter sous vostre protection, hors delaquelle il con- noist bien quil ne peut bonnement durer. Or il a désiré un passeport et sauf-conduit de moy auprès de vous, (i) Michel Fenouillet, seigneur de Barraux (voir le tome précédent, Lettre MLxiv, et note(i), p. 339).  86 Lettres de saint François de Sales par ce que le bonhomme son beaupere (0 luy a dit que vous m'avies confié Tasseurance que vous pouves prendre de son amendement : qui m'a aussi fait entendre que je pouvois seul donner ouverture a son restablissement en vostre service. C'est pourquoy, le voyant remis au bon chemin, et d'ailleurs fort en peine pour le sujet quil vous dira, très volontier je vous supplie, Monseigneur, de lé recevoir, espérant que des-ormais vous n'en aures que du contentement, ainsy quil m'a solemnellement promis et protesté. J'ay les papiers de l'evesché quil avoit très mal a propos apportés, et les garderay pour en faire ainsy que vous me commanderés. Monseigneur l'Archevesque de Lion m'a fait Ihonneur de me visiter et demeurer six ou sept jours céans (2), pendant lesquelz il a fait deux sermons et une petite exhortation avec tant de pieté, que ce bon peuple en sera longuement consolé. Nostre Genève est tous-jours extrê- mement affligée de contagion (3), mays ell' endurcit sous le chastiment. On asseure que jusques a présent il est mort bien six mille personnes de ce mal, lequel par miracle ne s'est comme point espanché sur la Savoye. Nostre paix est fort entière maintenant, grâces a Dieu, que je supplie la nous vouloir conserver, et vous combler de toutes les faveurs célestes quil départ a ses plus grans serviteurs, tandis que sans fin je suis et seray inviola- blement, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant frère et serviteur. Francs E. de Genève. VIII ix*''"^ 16 15, Annessi. A Monseigneur Monseigneur le Rever'"^ Evesque de Monpelier. Revu sur l'Autographe appartenant à M"^« Laïuothe-Tenet, à Montpellier, (i) Claudin de Gruffy, seigneur de Barraux, d'une famille noble du Ge- nevois sortie du notariat, qui apparaît au xv<^ siècle. Il avait épousé Péron- nette Portier de Charrières. (Cf. le tome précédent, note { i ), p. 339.) (2) Voir ci-dessus, note (2), p. 83, et la Lettre mcxxxii. (3) Voir ibid., note (2), p. 56.  Année 1615 87  MCXXXI A MADAME DE PEYZIEII (inédite) Protestations de respectueuse affection pour la destinataire et ses enfants. Annecy, 15 novembre 1615. Madame ma très chère Mère, Ce m'a esté un grand contentement d'apprendre avec tant d'asseurance le bon estât de vostre santé, et je vous escris ce billet seulement pour me ramentevoir en vostre bienveuillance, et supplier vostre chère ame de me tenir tous-jours au rang quil vous a pieu me donner entre ceux qui ont le bonheur d'estre aymés de vous. Certes, ma très chère Mère, mon cœur est tout filial pour vous, et ne cesse point de faire tous les bons souhaitz quil doit pour vostre consolation. Il y a bien asses long tems que je n'ay point eu de nouvelles de ma seur madame de Grandmayson (0, mais j'en tireray un de ces jours, Dieu aydant, en luy escrivant par la commodité de Lion. En somme, puis que je n'ay pas le loysir de m'estendre davantage, je veux dire en un mot, que je vous chéris avec un honneur et respect tout parfait, et avec vous, tous messieurs mes frères et mes- dames mes seurs (2), entre lesquelz je salue humblement ceux qui sont près de vous. (i) Hélène de Longecombe de Peyzieu, fille de la destinataire. (Voir tome XV, note ( i ), p. 283.) (2) Les enfants de M""^ de Peyzieu : Balthazard (voir le tome précédent, note (i), p. lie), Jacques (tome XIII, note (2), p. 165) et François, dont la notice sera donnée ultérieurement ; Hélène, dame de Grandmaison, Lucrèce, dame de Saint-André de Cervières (tome XV, note ( i ), p. 182). Le Saint veut sans doute aussi désigner Jeanne Armuet de Bonrepos, femme de Balthazard (voir le tome précédent, note (3), p. m).  88 Lettres de saint François de Sales Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, Madame ma très chère Mère, et je suis de tout le mien, Vostre plus humble, très fidèle filz et serviteur, France E. de Genève. xiiiii novembre 1615, Annessi. A Madame Madame de Pezieu. A Thuey (0. Revu sur l'Autographe appartenant à M""" la marquise de Mailly, château de la Roche-Mailly (Sarthe). ( I ) Ordinaire résidence de M"^'^ de Peyziea. (Voir tome XV, note { 2 }, p. 288.)  MCXXXII AU MARQUIS SIGISMOND DE LANS (O Justification loyale et ferme du Saint au sujet des soupçons éveillés par la visite de l'Archevêque de Lyon. — Il proteste de son attachement inviolable à son légitime souverain. Annecy, 15 novembre 161 5. Monsieur, Je respons a la lettre qu'il vous pleut de m'escrire hier, quatorziesme de ce mois, que je reçoy tout présentement, et supplie Vostre Excellence de croire qu'en cette occur- rence je regarde Dieu et ses Anges, pour ne rien dire qu'avec l'honneur que je doy a la vérité. Des Tadvenement de Monseigneur l'Archevesque de Lion en sa charge (2), il m'escrivit une lettre de faveur, par laquelle il me conjuroit d'entrer en une sainte amitié avec luy, a la façon des anciens Evesques de l'Eglise, qui ( I ) Sigismond d'Est, marquis de Lans, gouverneur de Savoie. (Voir tome XV, note (i), p. 49-) (3) Ms"" de Marquemont fit son entrée à Lyon le 9 mars 1613. (Voir ci-dessus, note (i ), p. 16.)  Année 1615 89 n'avoyent qu'un cœur et Qu'une ame * et qui, par la * Act , iv, 3: réciproque communication des inspirations ([u'ilz rece- voyent du Ciel, s'entr'aydoyent a supporter leurs charges, mais principalement quand ilz estoyent voysins les uns des autres. Et parce que je suis plus ancien en Ordre que luy, il m'escrivit des Ihors qu'il me viendroit voir, pour se prévaloir de ce que l'expérience m'auroit peu acquérir en nostre profession ; avec plusieurs telles paroles, exces- sives en humilité et modestie. Despuis, il a tous-jours continué a vouloir me faire cet honneur, auquel n'estimant pas que je me deusse laisser prévenir, puisqu'il est le premier des Evesques de France et moy le dernier de Savoye, je l'allay voir a Lion (0, comme Vostre Excellence sçait. Et luy, par sa courtoysie, a voulu contreschanger ma visite sur l'occasion de celle qu'il faysoit de son diocèse, a Lagnieu, Saint André, Groslee et autres lieux qui en dépendent, esquelz il avoit des-ja gaigné une journée des trois qu'il y a d'icy a Lion. Et je ne sceu nullement d'asseurance sa venue, que le soir avant qu'il arrivast ; car encor que six jours auparavant le sieur de Medio, originaire de ce pais, mais chanoine de l'église de Saint Nizier de Lion (^), m'eust escrit qu'il avoit quelque opinion que Monseigneur l'Archevesque estendroit sa visite jusques icy, si est ce que, n'y faysant pas fondement, j'envoyay un laquay pour le sçavoir, qui ne revint que le jeudy au soir avant le vendredy auquel Monseigneur l'Archevesque arriva. Or, il ne vint point a cachette, comme ont accoustumé de faire ceux qui traittent des affaires odieuses, mays au veu et au sçeu de tout le monde, et amena avec soy huit hommes a cheval, entre lesquelz il n'y en avoit point de (i) Ce voyage s'était effectué à la fin du mois de juin. (Voir ci-dessus, notes ( I ), (2), p. 13, et note ( i ), p. 18.) (2) Jacques de Médio (voir tome XII, note (3), p. 49) avait pris possession de son canonicat à Saint-Nizier, le 27 février 1595. Au mois d'avril suivant, le jeune chanoine demandait aux « sieurs Capitulans de le dispenser de sa rési- dence pour aller aux estudes, » qu'il fit sans doute dans la ville même. Pourvu d'une prébende à Chalaronne, il la permute en 1597 contre celle de la Made- leine, revient par condescendance sur cet acte en 1600; en 1613, le bénéfice de Courteson lui est assigné. M. de Médio mourut le 14 octobre 1620. {Actes capitulaires de la Collégiale de Saini-Ni\ier.)  90 Lettres de saint François de Sales marque, sinon le sieur de Ville, docteur en théologie et grand prédicateur, originaire de Rossillon près de saint Rambert (0, et son aumosnier, nommé monsieur Ray- mond (2). Estant icy, je vous asseure que nous n'avons ni fait ni dit, non pas mesme pensé, aucun traitté, ni pour les choses du monde, qui, si je ne me trompe, nous sont a tous deux fort a degoust, ni pour les choses ecclésias- tiques, n'ayans rien eu ni a demesler ni a mesler ; mays seulement, purement et simplement, nous avons parlé des devoirs que nous avons au service de nos charges, de la façon des Offices ecclésiastiques et de telles choses entièrement spirituelles. Il fit deux excellentes prédications, Tune en l'église cathédrale (3), l'autre au Collège, le jour de saint Char- les (4), pleines de pieté et de zèle. Il célébra tous les jours la Messe en divers lieux, et ne fut jamais parlé de chose  (ï) Remarquable par son savoir et sa piété, Jean-Claude de Ville avait, le 22 décembre 1600, pris le grade de docteur en théologie à l'Université de Tou- louse. Il est prêtre en 1604, et, cette même année, reçoit canonicat et prébende à la Collégiale de Saint-Paul de Lyon. M. de Ville s'adonna avec succès à la prédication, surtout dans le diocèse ; ses vertus et ses services lui attirèrent l'estime et la confiance de son Chapitre. Son nom figure encore dans un acte du 31 octobre 1633. (D'après les Actes de la Collégiale de Saint- Paul.) Le 20 mai 1616, le digne chanoine donnait une approbation pour l'impression du Traitté de V Amour de Dieu. (2) Prêtre du diocèse de Langres et aumônier de l'Archevêque de Lyon, Nicolas Raymond fut pourvu par le Prélat, en 1616, de l'office de sacristain de Fourvière, qui comportait les fonctions curiales, et admis en cette qualité par le Chapitre. Quoiqu'il ne remplît pas ses devoirs à la satisfaction de ses con- frères et des paroissiens, il obtint, le r^ octobre 1620. la chanoinie de Saint- Nizier laissée vacante par Jacques de Médio, et en même temps, l'une des prébendes de Sainte- Croix. Il résigna l'une et l'autre le i^"" octobre 1630; l'année précédente (6 avril), un successeur lui avait été donné à Fourvière. On ignore la date de la mort de M. Raymond. (D'après les Actes capitulaires des Collégiales de Fourvière et de Saint-Nimier.) (3) Pour la fête de la Toussaint. (4) Les Acta Collegii (Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien) relatent avec détails la visite de l'Archevêque de Lyon chez les Pères Barnabites. Ils parlent de la nombreuse et noble assemblée écoutant l'improvisation éloquente, et très élogieuse pour la Congrégation, que M^^"" de Marquemont prononça, revêtu du sacré pallium, le 4 novembre. La cérémonie religieuse dura de 6 heures du matin à 1 1 heures, et l'après-midi fut occupée par le concours public où se produisit l'incident raconté plus haut, note ( r \ p. 83.  Année 1615 91 quelcomque sinon conformément a nos vacations. Vostre Excellence ne m'obligera pas peu si elle en asseure Son Altesse, et je luy engage pour cela mon honneur et ma réputation, et a Dieu qui le sçait, ma conscience et mon salut. Que si Vostre Excellence me le permet, je luy diray avec esprit de liberté, que je suis né, nourry et instruit, et tantost envielly, en une solide fidélité envers nostre Prince souverain, a laquelle ma profession, outre cela, et toutes les considérations humaines qui se peuvent faire me tiennent estroittement lié. Je suis essentiellement Savoysien, et moy et tous les miens, et je ne sçaurois jamais estre autre chose. Je ne sçay pas donq comme je puis jamais donner aucun ombrage, principalement ayant vescu comme j'ay fait. Je me prometz de la faveur de Vostre Excellence que Son Altesse demeurera parfaitement satisfaitte, et que rien ne se sçaura de cet ombrage, qui affligeroit le bon Monseigneur de Lion beaucoup plus qu'il ne m'afflige pas moy, qui, par la suitte du tems et les evenemens, seray tous-jours reconneu très asseuré et très fidèle serviteur de Son Altesse, a laquelle je souhaitte toute sainte prospérité.  92 Lettres de saint François de Sales MCXXXIII A LA MÈRE DE CHANT AL (billet inédit) Le Saint promet à la Mère de Chantai d'aller le lendemain recevoir sa confession annuelle. Annecy, [vers le 20 novembre 1615 (i).] Ma très chère Mère, Voyla bien des lettres que j'ay ouvertes i-) par ce que je suis vostre filz de confiance. Or, bon soir cependant. Je m'essayeray de gaigner demain le tems de vous voir avec le plus de loysir quil me sera possible, pour la confession annuelle. Bon soir donq mille et mille fois, ma très chère, très bonne et très honnoree Mère, vraye- ment mienne, c'est a dire tous les jours plus, grâces au Sauveur qui vous bénisse icy et la. Amen. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. (i) L'écriture de ce billet est bien celle des lettres de 161^; le quantième nous est suggéré par la mention de la « confession annuelle » faite sans doute aux approches du renouvellement des vreux qui, cette année-là, fut fixé pour la première fois au 21 novembre. (Voir ci-après, note (7), p. 104.) (2) Probablement, ces lettres venaient de la Visitation de Lyon.  MCXXXIV A LA MÊME (inédite) Question d'argent à traiter avec le cousin de la Sœur de Monthoux. Annecy, 21 ou 29 novembre 161 5 ( i ). Tandis que j'estois avec vous moymesme au parloir, ( I ) La profession religieuse de Sœur Paule-Jéronyme de Monthoux eut lieu le 27 décembre 1615. (Cf. au tome précédent, les notes ( i ) des pp. 261, 279.) La présente lettre est donc de cette année, mais un peu éloignée, semble-t-il, du jour de la cérémonie; une absence du saint Evêque au commencement de  Année 1615 93 M. de Monthouz (0 me vint chercher, ce que je ne seu qu'en soupant ; et Ihors je luy envoyay un l^illet par lequel je le priois ne point partir quil ne vous parlast, affin d'arrester des affaires de sa cousine (0. Or il fut treuvé chez son hoste, ou il ny avoit ni papier ni encre ; c'est pourquoy il m'envoya dire quil feroit selon mon billet. Au reste, quand il ira vers vous, ne luy dites point de paroles qui le puisse (sic) estonner, comme seroit celle que vous aves esté estonnee de quoy il s'en alloit ; mais simplement, que vous estant apperceue quil s'en alloit, vous aves désiré d'arrester l'affaire, affin qu'a la profes- sion il ny ait rien a traitter, ains seulement a exécuter le traitté. Je croy bien quil ne treuvera pas trop de troys mille florins. Cependant, je vay pensant ce que je vous diray tantost. Dieu, qui sçait ce qui est requis a vostre cœur mien et a ceux de nos Seurs, me veuille suggérer selon sa gloire. Amen, Bonjour mille et mille fois. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Turin. décembre persuade de la placer vers la fin de novembre : 21, fête de la Pré- sentation, ou encore 29, premier dimanche de TAvent. dates plus probables pour le sermon annoncé dans ces lignes. (i) Claude-Louis Guillet (voir tome XV, note (3), p. 35). (2) Sœur Paule-jéronyme de Monthoux, dont le sénateur avait favorisé l'entrée à la Visitation. (Cf. le tome précédent, Lettres Mxni, mxiv.)  MCXXXV A LA MÈRE FAVRE, SUPERIEURE DE LA VLSITATION DE LYON Tristesse témoignée par la Mère Favre à une amie; encouragements paternels. La « grande Fille >» particulièrement chérie des deux Fondateurs. Annecy, [vers fin novembre 16 15 (i)-] Dieu bénisse éternellement vostre cœur, ma très chère Fille, que le mien chérit plus qu'il ne se peut dire. Dites (i) Ces lignes appartiennent sûrement aux débuts de la supériorité de la Mère Favr«, ainsi que nous l'apprend la Mère de Chaugy dans sa Vie  94 Lettres de saint François de Sales moy, ma chère Fille, mais dites le a mon cœur, c'est a dire bien naifvement : quelle tristesse et quel regret mons- trastes vous a madame la Comtesse de la N. ( 0, laquelle la dépeint avec des couleurs si noires, que je croy qu'elle vous a pris pour une autre. May s je serois bien ayse de le sçavoir de vous mesme, pour, par après, en oster plus hardiment la compassion de ceux qui vous plaignent extrêmement sur ce sujet et en tirent des conséquences a leur gré. Or sus, le monde sera tous-jours monde et mourra monde, et nous, ma Fille, nous serons tous-jours a Nostre Seigneur et vivrons a Nostre Seigneur ( = ). Au reste, il me faut appeller vostre Père, et sans céré- monie ; je le suis de tout mon cœur, et vous chéris plus, comme je croy, que les pères naturelz n'ont accoustumé de chérir leurs filles. (3) Nostre Mère et moy, qui ne sommes pas deux, vous chérissons comme nostre grande première fille, laquelle maintenant, mo3^ennant la grâce divine, en va faire d'autres pour l'éternité.  Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy. manuscrite : « Jaçoit qu'elle se soubmit généreusement a l'obéissance » qui lui avait imposé le fardeau, dit l'annaliste, « si est ce qu'elle ne pouvoit si bien emprisonner sa douleur en l'intérieur qu'il ne parut au commencement quelque chose a l'extérieur; ce qui donna sujet a nostre Bienheureux Père de luy escrire » les « douces et paternelles paroles » reproduites par notre texte. Il est diffi- cile toutefois de préciser la date ; celle que nous indiquons est fondée sur l'étude comparative des lettres de cette période à la même destinataire. (i) Bien qu'elle ne portât aucun titre, M""^ de Murât de la Croix, fille du comte deTournon (voirie tome précédent, note (i), p. 78), est celle qu'on peut proposer avec le plus de probabilité. De Rumilly en Berry, où elle allait visiter son beau-père, elle passait par Lyon, et il n'est pas invraisemblable de placer son retour en Savoie, en l'année 161 5, à la fin de l'automne. Amie intime de la Visitation, elle méritait plus que toute autre la confiance de la Mère Favre. — Il est possible encore que « la Comtesse de la N. » soit M""^ de la Croix de Chevrières, née Claudine de Chissé. Dès l'origine de la fondation du i'^"' Monastère de Lyon, elle s'en était faite la bienfaitrice, et la Supérieure l'appelait « Mère ». Sa famille devait l'attirer assez fréquemment en Savoie. (2) Ce premier alinéa est inédit. (3) Ici, la Mère de Chaugy et les éditeurs qui l'ont suivie insèrent une phrase qui appartient à une lettre de 1620. Les quatre dernières lignes au- raient-elles aussi fait partie ti'un autre texte r  Année 1615 9$ MCXXXVI A LA MÈRE DE CIIANTAL (billet inédit) Le Saint empêché d'écrire une lettre par un appointement et un souper. Annecy, [novembre 1615 (i).] Je desirerois pouvoir escrire comme vous mesme(2), ma très chère Mère, mais je ne sçauray pas le faire si le laquay part demain si matin, car je suis embarqué en un appointement et donn'a souper a monsieur de ïal- loyre (3). En tous evenemens, vostre lettre suffira, car j'ay des-ja escrit au Père Theodose (4). Certes, et moy et tout, j'ay grand désir que nous nous voyons un peu; ce sera demain. Dieu aydant. Et mille fois bon soir, ma très chère Mère. J'escris sans loysir. Revu sur l'Autographe conservé au i^"" Monastère de la Visitation de Paris. ( I ) En rapprochant ce billet d'une lettre de la Mère de Chantai où elle parle à la Mère Favre d'une réponse à faire au « Père Théodose » (Lettres, vol. I, p. 59, novembre 1615), on peut conjecturer approximativement la date de ces lignes. (2) Peut-être s'agissait-il d'une lettre pour Lyon. (3) Claude-Louis-Nicolas de Qiioex, prieur claustral de Talloires (voir tome XIV. note ( i ), p. 172). (4) Sans doute le P. Théodose de Bergame, Capucin (voir tome XV, note ; 2), p. 281).  MCXXXVII A M. GUILLAUME DE BERNARD DE FORAS (O Témoignages de très affectueuse amitié au destinataire à son retour de Lorette. Annecy, [novembre] 161 5 (2). Et moy, monsieur mon très cher Frère, je vay en esprit vous embrasser a ce retour, et vous offrir ce cœur que ( I ) Voir le tome précédent, note ( i ), p. 226. (2) Au verso de l'Autographe de saint François de Sales, se trouve un billet  96 Lettres de saint François de Sales j'ay pour vous, tous-jours plus plein de toutes les affec- tions plus sincères qu'un frère peut avoir pour un frère extrêmement aymé et presqu'autant aymé comm'aymable. Mays non, mon très cher Frère, je ne dis pas sinon pres- qu'autant, car je confesse qu'après que je vous ayme extrêmement, encor ne vous ayme-je pas asses selon vos mérites. Venes heureux, avec la bénédiction du Filz et de la Mère, dont vous venes de vénérer la sainte Mayson. Je suis Vostre plus humble frère et serviteur, F., E, de Genève. (0 Revu sur l'Autographe conservé au 2'* Monastère de la Visitation de Rouen.  de son frère Jean-François (voir la note ci-dessous), et, en travers, la note sui- vante, d'une ancienne écriture : « Ce billet est écrit au S"" de Forax, au retour de son voyage de Nostre Dame de Lorette en l'année 161 5. » C'est la seule indication certaine que nous ayons pour la date. D'après d'autres considé- rations, il semble possible de proposer le mois de novembre. En effet, M. de Foras se trouvait à Annecy le 10 décembre, une lettre de sainte Jeanne-Fran- çoise de Chantai en fait foi (vol. I, p. 66), et ici, l'Evêque de Genève fait allusion à une entrevue prochaine. (i) De la main de Jean-François de Sales : « Voylla encor quattres lignes du frère, que je vais glisser dans mon pacquet, par ce que je desesperois, voyant ses affayres, qu'il peut les escrire. Je Tavoys desja fermé, et voyci qu'il m'envoye ce billet. Bon soir, cher Frère, il est extrêmement tard. » Ces lignes expliquent le commencement du billet du Saint : « Et moy, >. etc.  Année 1615 97  MCXXXVIII A MADAME DE LA FLÉCIlÈRE Affaires épineuses que Frnnçois de Sales voudrait arranger à la consolation de M""= de Bressieu. — Une tempête prévue au sujet de l'entrée de deux postulantes à la Visitation. — Haine mortelle du Saint pour le monde ennemi de l'esprit de Dieu. — Les projets de M. de Rességuier. Annecy, ^ décembre 1615 ( i ), Si vous n'esties ma très chère Fille, je m'excuserois d'avoir tant tardé a vous respondre a plusieurs de vos lettres ; mais vostre cœur sçait bien que le mien prend playsir a vous escrire quand il en a la commodité. J'ay esté un peu mal pour toute cette semaine, mais ce n'est rien maintenant, que je m'en vay mesme, Dieu aydant, dire la Messe a la Visitation. J'ayme trop nostre pauvre seur affligée ( = ) et ne suis pas si douillet pour pouvoir estre offencé de chose du monde de sa part. Mays je tarde d'aller a Chamberi, pour voir si nous pourrions accomoder a l'amiable le différend criminel qu'elle et messieurs ses enfans (3) ont avec Charriere U), par ce qu'au préalable, je voudrois (i) Migne a daté cette lettre du 7 décembre 161 5. L'année est juste, les affaires dont il est ici question ne permettent pas d'en douter (voir ci-après, la lettre du 17 décembre à la même) ; mais le quantième est sûrement inexact, puisque, en 1Ô15, le premier samedi de l'Avent tombait le 5 et non le 7. (2) Ennemonde de la Forest, dame de Bressieu, sœur de la destinataire. (3) Laîné des douze enfants de M"^^ de Bressieu, Pierre, avait été tué en duel avant la mort de son père, par Jean-François Portier. Le chef de la famille était alors Nicolas (voir note ( 4 ) de la page suivante) ; venaient ensuite Aimé-François, destiné à Malte dès 1600, capitaine au préside de Montmélian en 1631, et François, marquis de Vérel, comte de Dullin, seigneur de la Bri- doire, etc., gentilhomme de la Chambre et capitaine des gentilshommes archers de la garde de S. A. R., qui épousa par contrat dotal du 3 juillet 1633, Anne de Michal : son testament est daté du 6 mars 1657. (D'après les Notes de M. le comte de Mareschal de Luciane.) Les deux autres fils devaient être trop jeunes en 1615 pour avoir leur part dans les affaires; ils seront nommés plus tard, ainsi que leurs sœurs. (4) Parmi tous les bourgeois et nobles portant à cette époque le nom de Charriera, de Charriere et de la Charriere, il est bien difficile de désigner celui qui avait un « différend criminel » avec la famille de Bressieu. Toute- fois, la manière dont le Saint en parle ici et dans une lettre du 7 avril 1616 permet de croire qu'il n'appartenait pas à la noblesse. Lettres Vil 7  98 Lettres de saint François de Sales qu'entre nous autres nous eussions pris les resolutions convenables a cela, affin qu'a faute de ce, je ne fusse pas contraint de demeurer longuement a Chamberi, ou je ne puis guère estre sans incommoder mes affaires. A cet efFect, j'ay supplié monsieur de Mont-meilleur (0 de persuader a nostre seur de venir jusques en ces quartiers, comme pour voir sa fille ( = ), et estans ensemble, nous verrons ce qui se pourra et devra faire ; puis, sil est expé- dient, j'iray a Chamberi. Et par ce qu'a Taventure elle craindra de laisser Bassin 0), de peur que monsieur de Bressieu son filz (4) nV aille faire quelque passade, j'ay tiré promesse de luy quil ne bougera point tandis qu'elle sera de deçà, de quoy encor monsieur de Montmeilleur est garand. Certes, aussi par un mesme moyen, je serois bien ayse si nous pouvions mettre bien cet enfant avec sa mère, a laquelle je souhaite une très douce paix pour la consolation du reste de sa vie. Faites moy la grâce, ma très chère Fille, de faire un peu sçavoir tout ceci a cette chère seur, de vostre part et de la mienne, car je n'ay nul loysir de luy escrire a présent, ayant a faire un despeche a Thonon par nostre bon monsieur de Blonnay (5). Mays je ne veux pas laisser de vous dire que nostre pauvre Visitation va bien avoir du bruit pour ces deux (i) Prosper d'Avisé, seigneur de Montmeilleur, était fils de Nicolas d'Avisé et d'Antoinette de la Forest, sœur des dames de Bressieu et de la Fléchère. A la rentrée du Sénat de Savoie le 14 novembre 1608, il figure au nombre des nouveaux avocats, et le 13 novembre 161 3 est reçu sénateur. (Mugnier, Les Reor. des Entrées du Sénat.) En décembre 16 17, il contracte une première alliance avec Louise Milliet, fille d'Hector de Challes ; devenu veuf, il épouse en lô/jo (contrat dotal du 8 novembre) Péronne de Montvuagnard, et teste le i^"" septembre 1645, veille de sa mort. (2) Madeleine Roero de Bressieu, femme de Louis de Sales. {Voir le tome précédent, note (4), p. 27.) (3) Actuellement Bassens, à trois kilomètres de Chambéry. Là se trouvait la maison-forte de Bressieu, passée aux Roero, avec le nom et les armes des Bressieu, par testament de noble Louis Gallier de Bressieu, dernier du nom, grand-père maternel d'Emmanuel-Philibert, mari d'Ennemonde de la Forest. (4) Sans doute Nicolas, seigneur de Bressieu, de Bassin et de la Frénière en Bauges (cf. note (3) de la page précédente). Il épousa, par contrat dotal du 2 mars 1628, Isabeau Garnerin, et fut le père de Charles, dont tous les fils moururent sans postérité. ( 5 ) Claude de Blonay, préfet de la Sainte-Maison de Thonon. (Cf. ci-dessus, note (7), p. 74.)  Année 1615 99 braves filles qui désirent, demandent et pressent d'y estre receûes, et auxquelles sans doute on ne refusera pas la porte quand elles viendront, ainsy que Ton leur [a] promis fort saintement (0. Pour moy, j'en seray tous-jours accusé, et si, je n'en puis mays ; car encor que je prendrois a grand honneur d'avoir servi Dieu en cela, si est ce que sa Bonté a voulu le faire ellemesme, par des inspirations venues de sa Providence dans ces âmes Ihors que la mienne n'y pensoit point, et a la première connoissance que j'en ay eu, j'ay intimé le loysir et la dilation, pour voir si c'estoit bien des inspirations. Or, puisque vrayement c'en sont, quel moyen y auroit il de n'estre pas bien ayse du bien de ces chères âmes et de l'avancement de la gloire de Dieu? Et si, je confesse a ma très chère Fille, quil y a un peu de la malice dans mon cœur ; car je suis bien ayse encor que le monde soit trompé et que ces filles, qui sembloyent estre en ses bonnes grâces, se moquent de luy, le quittent et le mes- prisent, car en vérité il le mérite, d'autant quil ne vaut rien et quil mesprise Dieu. Certes, je ne luy ay point fait de déclaration, mais je ne laisse pas en mon ame de le hair a mort, par ce quil ha3^t a mort l'esprit de Dieu et les enfans du Crucifix. O que bienheureuses sont ces chères filles, lesquelles sacrifient ces petitz momens de vie mortelle a la gloire et a l'amour de Celuy qui leur donnera des éternités amoureuses en l'abondance de sa suavité ! Elles s'en vont toutes braves et courageuses ; et Dieu soit a jamais au milieu de leur cœur et du vostre, ma très chère Fille bienaymee, que je salue de toute mon ame. — Ce samedi de l'Advent. Le premier Président de Tholose (2) m'escrit affin que ( I ) Il s'agit de M""*^ du Châtelard et de M"° Gasparde d'Avisé, dont la Mère de Chantai écrit vers le 17 décembre (Lettres, vol. I, p. 68) : Elles '( étaient ici la semaine passée, qui ont requis avec une grande humilité et ferveur que l'on tirât les voix pour être admises à la probation, de sorte qu'elles les ont eues et viendront commencer en ces fêtes prochaines, » Les deux prétendantes ne se rejoignirent pas à la Visitation ; M"'^ du Châtelard passa à de secondes noces (voir le tome précédent, note ( i ), p. 346), et M'"^ d'Avisé entra au noviciat vers le 2 juillet 1616. ( 2 ) Guillaume de Rességuier, président de la seconde Chambre des Enquêtes (voir ci-dessus, note ( 2 ), p. 55). C'est la confusion du titre de « premier président »  100 Lettres de saint François de Sales nous envoyons des Seurs de la Visitation la, en un monastère tout basti, qui a cousté cent mille francz, et dix sept filles qui attendent les nostres pour estre ins- truites (0. L'odeur de la Mayson de Lion a opéré cela, ainsy que vous sçaures plus amplement a nostre première veue. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. du Parlement avec celui de « premier président » de la Chambre des Enquêtes qui a fait attribuer à tort à Gilles Le Mazuyer (tome XV, note ( i ), p. 295) les démarches de 161 5 pour l'établissement d'une Maison de la Visitation à Toulouse. (i) Ce monastère était celui des Tiercerettes, dont on a raconté Thistoire plus haut, note (2), p. 34.  MCXXXIX A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Aimable entente pour l'échange des lettres. — La Visitation féconde dès sa naissance. — Les lis entre les épines et les roses auprès des aulx. — Con- duite à tenir dans une tentation. — Pour agréer à Notre-Seigneur, le soin doit être humble, doux et tranquille. — Dévotion généreuse que le Fonda- teur désire de ses Filles. — Affectueux messages. — Renouvellement des vœux le jour de la Présentation. Annecy, 13 décembre 1615. Il est vray, ma très chère Fille, nous avons bien tardé avons escrire. Il y a aussi troys semaines que, pour moy, je vay traînant entre la santé et la maladie (0; mais ce n'est pas cela qui m'a empesché d'escrire, c'est que nulle commodité ne s'en est présentée, ni petite ni grande. Dores en avant, quand nous n'en aurons point icy, nous envoyerons a Chamberi, car la elles ne manquent jamais. (i) Voir ci-dessus, p. 97.  Année i6i^ lOi Mays vous, ma très chère Fille, n'escrives pas tant de lettres a chasque fois ; il suffira, quand vous aures bien tout escrit a la chère Mère (0, de faire un seul petit billet au pauvre Père, qui ne die rien sinon quil est tout vostre. Je suis consolé plus quil ne se peut dire de voir que vous chérisses ardemment vostre vocation ; cela seul vous peut sanctifier, et rien sans cela. Grâces a Dieu, nous voyons que sa divine Providence s'en veut servir pour le bien de plusieurs âmes en divers endroitz, ou l'on désire cette Congrégation ( = ), laquelle par miracle est fœconde, ce semble, au propre instant de sa naissance. Je pense bien que de ces filles qui veulent venir prendre la forme et la prattique des Règles, il en faudra faire venir une partie icy (3), affin que vous ne soyes surchargée d'un soin excessif, avec nostre chère Seur Marie Aymee, que je voy des-ja, ce me semble, un peu tremblante sous le faix (4). Or, Dieu aggrandira son courage et luy donnera la force d'un zèle généreux, sur le fondement d'une hu- milité profonde. J'ay veu vostre tentation. Helas ! ma très chère Fille, il en faut avoir. Celle la embarasse quelquefois le cœur, mais jamais elle ne le terrasse, sil est un peu sur ses gardes et hardi. Humilies vous grandement et ne vous estonnes point. Les liz qui croissent entre les espines en sont plus blancz, et les roses auprès des aux sont plus odorantes et deviennent musquées. Celuy qui n'est point tenté, que sçait il *? • EccH., xxxiv, 9 ( I ) La Mère de Chantai. {2) Charles-Auguste (La Vie de la Mère Marie Aymée de Blonay, 1655, chap. vu) assure que. dès le retour de Lyon de la Mère de Chantai, le Saint devait conférer avec elle des fondations de Moulins, Grenoble. Bourges et Paris. En 1613 déjà., il avait été question d'un établissement dans cette dernière ville (voir le tome précédent, p. 92), Depuis quelques mois on réclamait aussi des Filles de la Visitation à Toulouse, Riom et Billom. (3) Il s'agit des « filles de Riom » et de Toulouse. (Cf. Lettres de la Sainte, vol. I, p. 68, et ci-dessus, Lettres mcv, p. 34, et mcxxi, p. 70.) (4) Après le départ de la Mère de Chantai. Sœur Marie-Aimée de Blonay avait été nommée Assistante et Directrice. Cette double charge lui parut très lourde ; parler aux Novices, surtout, lui était un supplice. '< J'espère en Dieu qu'elle profitera néanmoins tous les jours davantage à ces chères filles, » écrivait la Sainte à la Mère Favre, « et par son bon exemple, et par sa langue qu'elle déliera. » (Lettres^ vol. I. p. 56.)  102 Lettres de saint François de Sales Si la peine vous tient au sentiment, comme il me semble que vous le signifies, changes d'exercice corporel quand vous en seres pressée ; si vous ne pouves bonne- ment changer d'exercice, changes de place et de posture : cela se dissipe par ces diversités. Si elle vous tient en l'imagination, chanter, se tenir avec les autres, changer d'exercices spirituelz, c'est a dire passer de l'un a l'autre, et les changemens de place encor vous ayderont. Sur tout, ne vous estonnes point, mais renouvelles souvent vos vœux, et, vous humiliant devant Dieu, promettes a vostre cœur la victoire de la part de la Sainte Vierge. Si quelque chose vous tient en scrupule, dites-le hardiment et courageusement, sans faire aucune reflexion, Ihors que vous ailes a la Pénitence. Mays j'espère en Dieu que, avec un esprit noble, vous vous tiendres exempte de tout ce qui peut donner scrupule. Je veux bien que vous porties une fois la semaine la haire, sinon que vous connoissies que cela vous rendit trop paresseuse es autres exercices plus importans, comm'il arrive quelquefois. Tenes bon, ma très chère Fille, pour l'estroitte obser- vance des Règles, pour la bienséance de vostre personne et de toute la ma^^son ; faites observer un grand respect aux lieux et aux choses sacrées Le soin que vous aures en tout cela sera grandement aggreable a Nostre Sei- gneur, sur tout si vous le prenes avec humilité, douceur et tranquillité. Nos Seurs(0 vous diront toutes nouvelles de deçà, et de la réception de la baronne du Chatelart et de M"*" d'Avisé ( ^ ). Cela fait un peu de mal au cœur des mondains, mais il ny a remède, il faut que Nostre Seigneur soit servi . Je dis a nostre Seur de Gouffie ( 3 ) que je voulois meshuy m'essayer de donner de la générosité a la dévotion de nos Seurs, et en oster la tendreté que l'on a souvent sur soy  (i) Les Sœurs de la Communauté d'Annecy, (2) Voir la lettre précédente, p. 99. (3) L'ancienne Religieuse du Paraclet (voir tome XV, note ( i ), p. 343) avait accompagné la Mère de Chantai à Annecy lors de son retour de Lyon, fin octobre.  Année 16115 103 mesme, cette petite doûilleterie qui oste le repos et nous fait désirer des particularités spirituelles et intérieures, nous fait excuser nos humeurs et flatter nos inclinations. Mays, ma très chère Fille, ce n'est pas besoigne faite, bien qu'en vérité toutes s'y acheminent. Or je ne doute point que Dieu ne vous donne les mesmes sentimens, puisque vous estes un seul esprit avec tous nous. J'appreuve que vous continuies d'appeller nostre Mère, Mère, puisque c'est vostre consolation, et que vous m'appellies Père, puisque j'ay pour vous un cœur extra- ordinairement plus que paternel. Saches, ma chère Fille, que despuis que vous estes en charge, vous m'estes tous- jours si présente, que je suis, ce me semble, perpétuelle- ment avec vous, non sans faire mille et mille souhaitz sur vostre chère ame. Pour Dieu, salues un peu Monseigneur l'Archeves- que ( ^ ) quelquefois de ma part ; vous ne sçauries croire ce que je luy suis, et comme Dieu bénit sa petite visite quil fit icy (2). Je salue monsieur de Saint Nizier (5), du soin duquel vous vous loues tant. Dieu aggrandisse ses  (i) Denis-Simon de Marquemont, archevêque de Lyon. (Voir ci-dessus, note ( I ), p. 16.) (2) Voir ibid., pp. 83, 86, 89, 90. (3) Il s'appelait Nicolas Ménard, et était né à Angers en 1581, de Claude Ménard, conseiller au Présidial d'Angers, et de Marie Vallier. D'abord étudiant à l'Université de sa ville natale, puis à celle de Paris, le jeune homme se rend ensuite à Rome où il demeure sept ans. Là, il reçoit la prê- trise, fait connaissance avec M. de Marquemont, membre de l'ambassade française, et avec M. Gauthier, solliciteur de l'abbaye de Fontevrault. Ce dernier lui fit accepter la charge de secrétaire de l'Abbesse, M"^^ d'Orléans. Plus tard, M. de Marquemont ayant été élevé sur le siège épiscopaLde Lyon (1613), l'appela auprès de lui, le nomma chanoine et sacristain-curé de Saint- Nizier (30 juin 1614) et, bientôt après, promoteur du diocèse et vice-gérant de l'officialité de la Primatie. Dans un acte du 21 juin 1621, il est qualifié de « conseiller et auniosnier du Roy. » Placé si près du grand Archevêque, M. de Saint-Nizier fut intimement mêlé aux diverses péripéties de rétablissement de la Visitation de Lyon, dont il devint le premier Père spirituel. Il exerçait pour la seconde fois ces fonc- tions quand François de Sales arriva d'Avignon, en 1622, à la suite de la cour de Savoie. « Le jour de saint Estienne, » dit le P. de la Rivière (La Vie de niîme et Rme Fraiiçois de Sales, Lyon, Rigaud, 1625, liv. IV, chap. liv), le Bienheureux « disna au logis du Révérend monsieur Ménard,... vicaire gênerai substitué,... l'un de ses plus intimes amis. » Le surlendemain, le pieux chanoine était auprès du lit de mort du saint Evêque, et recueillait, avec ses dernières  I04 Lettres de saint François de Sales bénédictions sur luy et sur nostre monsieur TAumos- nier(0. Item, je salue M^'Ma Présidente Le Blanc ( 2), quand vous la verres, et xM'"' Colin (3) et M'"' VuUiat (4), laissant a part ma chère Seur xMarie Peronne (5), a qui je suis tout, et a toutes nos bonnes Seurs. Je salue en fin vostre cœur, que le mien chérit de toutes ses forces, et luy souhaite la bénédiction de celuy de Nostre Seigneur, auquel soit gloire éternellement. Amen. Et a celuy de sa tressainte Mère Nostre Dame. 13 décembre 1615, (<^) Annessi, ou je suis tout vostre sans reserve. Vostre renouvellement n'ayant pas esté fait le jour de la Présentation, vous le pourres faire le jour de Tan ou des Roys, ou comme Monseigneur l'Archevesque voudra; car je croy bien que vous voudres que ce soit luy qui le reçoive (7). Nos Seurs d'icy dirent avant la Messe, tandis  bénédictions, le bienfait de ses admirables exemples. Enfin, le i8 janvier 1623, suivi de son Chapitre de Saint-Nizier, il accompagnait la sainte dépouille jusqu'aux portes de Lyon, où il prononça « une véritable, pieuse et dévote harangue panegirique sur les loiianges et mérites » de l'illustre défunt. (P. de la Rivière, Vie, etc., liv. IV, chap. lvi.) En 1624 ou 1625, M. Ménard quitta la charge de Père spirituel du Monas- tère de la Visitation, sans que la Mère de Chantai pût jamais oublier les services rendus par cet ancien ami. Vers cette époque il songea à rejoindre son frère dans la solitude de la Chartreuse, mais les supérieurs de l'Ordre lui conseillèrent de demeurer au milieu de ses ouailles. Le vertueux prêtre leur donna sa vie même, car il mourut victime de son dévouement aux pes- tiférés, en novembre 1629. (D'après Letourneau, Les saints Prêtres français du XVJ le siècle. . ., 3* série, Préires Angevins, vu (Angers, Germain et Gras- sin, 1898), et les Actes capitulaires de la Collégiale de Saint-Nijier.) (i) Claude de Sevelinges, aumônier de Belleville (voir tome XV, note ( 2 ), p. 333)- (2) Elle sera plus tard destinataire. (Voir ci-dessus, pp. 22, 23.) (3) Isabeau Daniel, veuve de M. Colin. (Voir le tome précédent, note ( i ), p. 241.) (4) Voir ibid., note (2), p. 188. (5) Sœur Péronne-Marie de Chastel. (6) Cette phrase est inédite. (7) Le renouvellement de l'oblation se fit le dimanche dans l'octave de l'Epiphanie jusqu'en 161 5 ; cette année-là, le saint Fondateur modifia la formule de la profession et détermina que les Sœurs, au lieu d'une simple oblation, feraient des vœux. Elles les prononcèrent pour la première fois le 20 novembre, et le lendemain, fête de la Présentation de Notre-Dame, le Bienheureux leur déclara « qu'il avoit choisi ce jour et ce mistere de la  Annér 1615 105 que je m'habillois, le Venï Crealof ; et après le reno:;- vellement, Laudate Dominiim oj^nes /rentes'^, et pro- noncèrent bien gravement leur renouvellement. Ma très chère Fille, helas ! je suis tout vostre. A ma très chère Fille en N. S. Ma Seur Marie Jacqueline Favre, Supérieure de la Conp^regation de la Visitation. A Lion. {^) Le frère n'est pas dans eette ville. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry. sacrée Vierge présentée au Te:nple pour être celui de » leurs « renouvellemens a la suite de la Reine des epouzes de Jésus. » (Ancien Ms de VAnnêe Sainte 21 novembre.) ( I ) Cette phrase, inédite, a été placée par le Saint tout au-dessous de l'adresse. « Le frère » est sans doute René Favre, seigneur de la Valbonne et de Prémery, château tout voisin d'Annecy. (Cf. tome XIII, note ( 4), p. 217.)  MCXL A LA SOEUR DE BLONAY MAITRESSE DES NOVICES A LA VISITATION DE LYON Céleste nourriture des enfants de Dieu. — Agir par obéissance, gage du secours d'En-haut. — Q_nel labeur il ne faut jamais fuir. Annecy, [vers le 13 décembre 1015 (i^] Dieu vous suggérera, ma très chère Fille, tout ce qu'il veut de vous, si en l'innocence et simplicité de vostre cœur, avec une entière résignation de vos inclinations, ( I ) S'il n'y a pas certitude absolue que cette lettre s'adresse à Sœur Marie- Aimée de Blonay (voir tome XV, note ( i S p. 290), au moins y a-t-il très grande probabilité. On sait les humbles appréhensions de la jeune Directrice en face de sa charge (voir ci-dessus, p. loi). Le Saint, qui la voyait « tremblante sous le faix, » dut ne pas tarder à la soutenir de ses conseils et de ses encourage- ments; ces lignes ne peuvent donc être éloignées de celles envoyées à la Mère Favre le 13 décembre. L'absence de messages pour la « chère cadette » dans la lettre de cette date à la Supérieure de Lyon, ne permettrait-elle pas de supposer que le Fondateur lui écrivait le même jour ?  rs. cwi  Cant., ult.. 8.  io6 Lettres de saint François de Sales vous luy demandes souvent en vostre intérieur : Set- Act.,ix, 6. gneur, que vouUs vous que je face * ? Et je suis consolé que vous ayes des-ja ouy sa voix et que vous le servies en la nourriture de ces filles. L'excuse aussi n'estoit pas bonne de dire : Je n'ay^a^ des mammelles *^ je n'ay point de lait ; car ce n'est pas de nostre lait ni de nos mammelles que nous nourrissons les enfans de Dieu ; c'est du lait et des mammelles du divin Espoux, et nous ne faysons autre chose sinon les monstrer aux enfans et leur dire : Prenes, succès, tires et vives. Tenes donq ainsy vostre cœur ouvert et grand pour bien faire tout le service qu'on vous imposera. A mesure que vous entreprendres, sous la force de la sainte obéissance, beaucoup de choses pour Dieu, il vous secondera de son secours et fera vostre besoigne avec vous, si vous voules faire la sienne avec luy. Or, la Cf. iThess.,iv, 3. sienne est la sanctification et perfection des âmes *. Tra- vaillés humblement, simplement et confidemment a cela; vous n'en recevres jamais aucune distraction qui vous soit nuysible. La paix n'est pas juste, qui fuit le labeur requis a la glorification du nom de Dieu. Vives toute a ce divin amour, ma très chère Fille, et saches que c'est de tout mon cœur que je chéris vostre ame bienaymee, et ne cesse jamais de la recommander a la miséricorde éternelle de nostre Sauveur, a laquelle je vous conjure de me recommander réciproquement fort souvent. Je suis tout vostre, ma très chère Fille. FRANç^ E. de Genève.  Année i6i^ 107  MCXLI AU MARQUIS SIGISMOND DE LANS (inédite) Discours de capitaines et discours de Pasteurs de l'Eglise, — Quelle h affaire d'Estat » s'est traitée entre Ms"" de Marquemont et TEvêque de Genève. Annecy, 15 décembre 161 5 (i . Monsieur, Sur les plaintes que l'on a fait de moy (2), je croy d'estre obligé a vous respondre non seulement par la voix de ces messieurs, qui m'ont parlé de la part de Vostre Excellence (3), mais encor par ma plume. Je vous asseure que ceux qui fantasient et philosophent de si près de mes actions et sur mes actions se font plus de tort qu'a moy, car ilz ne peuvent blesser mon innocence et ilz se chargent d'une noire malice. Pleust a Dieu, Mon- sieur, qu'ilz eussent esté auditeurs des discours de Mon- seigneur de Lion et de moy ! et ilz auroyent veu et sceu que nous n'avons pas, que je sçache, dit une parole qui ne tende a l'advancement de la o-loire de Dieu dans nos troupeaux ; et nous estimons les discours des capitaines et soldatz indignes d'occuper le tems des Pasteurs de la bergerie du Dieu vivant. Nos visites ont esté, a la vérité, pour une affaire d'Estat : a sçavoir, pour Testât que nous devons constam- ment establir en la republique de nostre petite Con- grégation de la Visitation (4). Si nous avons mal fait, ( I ) Le texte que nous reproduisons ne porte pas la date, mais elle est clairement indiquée par celle de la lettre suivante au duc de Savoie. (2) Voir ci-dessus, Lettre mcxxxii au même destinataire. {3) Le gouverneur de Savoie était alors à Chambéry ; c'est donc de cette ville qu'il envoya des personnes de confiance pour avertir François de Sales que les calomnies continuaient et pour le sonder sur ses véritables sentiments. ( 4 ) « En ce voyage, » dit Charles-Auguste parlant de la venue de M^"" de Marquemont à Annecy, « il fut traicté de plusieurs choses entre ces deux grands Prélats, pour le bien et la perfection de la saincte Compagnie de la Visitation. » (Histoire, etc., liv. VIII, ) On discuta surtout, mais sans les résoudre encore, les graves questions de l'établissement de la clôture et de l'érection de l'Institut en Ordre religieux.  io8 Lettres de saint François de Sales traittant cela, nous sommes coulpables ; sinon, Ton nous fait tort. Quant a moy, je vous proteste que j'ignore les affaires d'Estat, et les veux ignorer a tel point, qu'elles ne soyent ni en ma pensée, ni a mon soin, ni en ma bouche, sinon quil se presentast quelque occasion de tesmoigner a Son Altesse que je suis son passionné et fidèle sujet, et a Vostre Excellence, Très humble et affectionné serviteur, France E. de Genève. Revu sur le texte inséré dans V Histoire de la Fondation du ler Monastère de la Visitation d'Annecy.  MCXLII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL I^^" Sur Tordre de son prince, François de Sales explique le sujet du voyage en Savoie de l'Archevêque de Lyon. — Eloge de ce Prélat. — Appel respec- tueux à la justice de Charles-Emmanuel. Annecy, 15 décembre 161 5. Monseigneur, Il y a un moys que monsieur le Marquis de Lans m'escrivit de la part de Vostre Altesse, que je luy fisse sçavoir les sujetz pour lesquelz Monseigneur l'Arche- vesque de Lion estoit venu en cette ville et les particula- rités de ce que nous avons traitté ensemble. A quoy je Epist. Mcxxxii. respondis * que le sujet de cette venue n'estoit qu'une simple visite, laquelle ce Prselat avoit projettee des son advenement en la charge qu'il tient, comm' il m'escrivit des Thors, et que nous n'avions traitté de chose quel- comque sinon de ce qui appartient a la dévotion et con- duite spirituelle des âmes. Or, Monseigneur, c'est la Cf. Gaiat., I, 10. pure et vraye vérité : ainsy j'en proteste devant Dieu * et ses Anges. Et néanmoins, monsieur le Marquis de Lans m'a escrit pour la seconde foys ( i ), que j 'aye a luy descouvrir dequoy ( I ) La lettre précédente est la réponse à ce second message du gouverneur de Savoie.  Année 1615 109 nous avons traitté, ce Prselat et moy. Et par ce que c'est de la part de Vostre Altesse que cela m'est enjoint, c'est a elle aussi a laquelle maintenant je m'addresse, con- jurant en toute humilité sa douceur et bonté de croire quej'ay respondu en cett'occasion avec toute franchise et simplicité. Que si, ou ce seigneur, ou autre quelcomque m'eut parlé de chose qui eut tant soit peu regardé le service ou les affaires de Vostre Altesse, ou mesme de chose d'Estat, je n'eusse point attendu de semonce pour la faire sçavoir; car de moy mesme, par le mouvement de mon inviolable fidélité envers la couronne de Vostre Altesse de laquelle je suis sujet, j'eusse promptement rendu le devoir auquel la nature et le serment que j'ay preste m'obligent. Mays, Monseigneur, Dieu m'a fait cette grâce, que jamais personne ne m'a estimé homme d'affaires, ou du moins, ne m'a accosté pour cela. Et ce bon Archevesque est tellement occupé en la pieté, que quicomque le connoistra bien, jugera facilement que ses pensées ne sont nullement tournées du costé du monde. Pleut a Dieu, Monseigneur, que l'Eglise eut plusieurs de telz Pasteurs, car le nom de Nostre Seigneur en seroit bien mieux loiié et sanctifié. J'ay si souvent expérimenté la debonaireté et équité de Vostre Altesse en toutes les occurrences esquelles la calomnie a osé entreprendre sur mon innocence et can- deur, que je demeure fort paysible en celle ci, puisque mesme le tems, garend et protecteur de la vérité, a des-ja fait voir par longues années, que je suis inviolable et immobile en la resolution que Dieu a establie en moy de ne vivre qu'a ma profession et, en icelle, avoir tous-jours le cœur dédié a l'obéissance de Vostre Altesse, a laquelle souhaitant sans fin mille et mille bénédictions, je demeure, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. Annessi, le xv décembre 161 5. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  iio Lettres de saint François de Sales  MCXLIII A M. CLAUDE-AMÉDÉE VIBOD (0 Envoi d'une lettre pour le duc Charles-Emmanuel. Annecy, 15 décembre 161 5. Monsieur, Epist. praced. J'escris a Son Altesse la lettre ci jointe *, et pour luy donner une plus seure addresse, je vous supplie très humblement de la luy remettre, bien que je n'aye pas Ihonneur d'estre conneu de vous, a qui néanmoins je suis de tout mon cœur, Monsieur, Plus humble, très affectionné serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XV décembre 1615, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Biblioieca Civica. (i) Ce billet et la lettre du 4 avril 1616 sont certainement adressés au même personnage, que Migne et les autres éditeurs désignent : Un gentil- homme de la cour du duc de Savoie. D'après Tétude des textes, il semble qu'on doive songer plutôt à un secrétaire du prince, et, sous toutes réserves, nous proposons l'abbé Claude-Amédée Vibod ou Vibo, destinataire en octobre 1616. Issu d'une famille de Chambéry, il eut pour père Maurice Vibod et entra de bonne heure au service de Charles-Emmanuel. Secrétaire de Son Altesse et de la grande Chancellerie, il recevait, déjà en décembre 1610, une pension annuelle de 135 ducatons, pour avoir rempli la première de ces charges pen- dant vingt ans, « en toutes les occasions tant de paix que de guerre, tant deçà que delà les monts. » (Turin, Archiv. de la Chambre des Comptes, Paienti^ vol. 30, 24 décembre.) Des patentes du 26 mai 1635 lui conférèrent, et à son frère Pierre, le titre de comte et le fief de Pontedassio, On le retrouve encore à son poste de confiance en 1645 ; il mourut donc dans un âge très avancé.  Année 1615 1 1 1  MCXLIV A MADAME DE LA FLÉCHÈRE Vigilance du saint Evoque pour le maintien de la justice et de la charité. — Encore l'affaire de M'"'= de Bressieu, — Tapage mondain autour de deux vocations. Annecy, 17 décembre 1615. Ma très chère Fille, J'ay receu l'une et l'autre de vos lettres et ne pense pas avoir dit a M. le Curé (0 quil nereconneut pas, mais ouy bien quil ne reconneut pas sans me communiquer la forme de la reconnoissance qu'on luy demandoit, affin que je visse sil y avoit chose qui fut contre le droit divin ou humain, comme il me semble qu'il y auroit si elle estoit telle qu'il me la descrivoit. Mais puysque les diffe- rens sont sousmis a des si bons arbitres et superarbitres, je m'en rapporte a ce qu'ilz en diront, sachant qu'ilz sont asses clairvoyans pour discerner de cela et de chose plus difficile, et pour conduire ces deux espritz a une paysible concorde que je prie Dieu leur vouloir donner {-). Or, je n'escriray donq pas a monsieur vostre cher mari pour ce regard, comme M. le Prieur (3) s'est imaginé, car je ne doute point que tous ces messieurs n'ayent et l'esprit et le cœur disposé a faire chose juste. Maintenant, parlons d'autre chose. J'attendray donq ma chère seur M"'° de Bressieu, qui ne m'oblige pas peu de venir, m'ostant par ce moyen de la nécessité d'aller a Chamberi (4), ou je ne pouvois aller sans beaucoup ( I ) Jean Viret, curé de Rumilly (voir le tome précédent, note ( i ), p. 259). (2) Les deux esprits divisés seraient-ils M. Charvet et Jean-François de Blonay ? On a vu leurs noms joints ensemble au mois de janvier 1615, au sujet d'un « tappis », objet de litige. (Ibid., Lettre mxxxiv, p. 292,) Il se pourrait aussi que la mésintelligence fût entre Jean Viret lui-même et M. le Prieur. Au 6 novembre 1614, le Saint écrivait au comte de Tournon : « Le bon curé '( ne sçait ce quil demande en la proposition quil fait faire audit sieur de '< Blonnay, car il parle contre Dieu et rayson. » (Ibid., Lettre mxii, p. 259.) ( 3) Jean-François de Blonay, prieur de Saint-Paul. (Voir tomes XII, note ( i ), p. 298; XV, note ( I ), p. 354; XVI, pp. 91, 102, 2^8, 292, 294.) (4) Voir ci-dessus, Lettre mcxxxvh', p. 97.  112 Lettres de saint François de Sales d'incommodité. Je vous prie de regarder un peu entre vous ce qui se pourra bonnement faire, affin que, sil est possible, on prenne le bon biays pour accommoder hon- norablement les affaires. Et puisqu'elle ne peut pas aller a La Thuille, pour peu qu'elle nous en donne la commodité, nous ferons venir une partie de La Thuille icy (0; et je dis une partie, par ce que le petit enfant, qui est le plus beau garçon du monde (2), n'a garde de vouloir venir en ce tems. Il y a grand bruit, certes, de toutes parts pour le des- sein de la chère nièce (3) et de madame du Chatelart (4), et c'est bon signe que Dieu en sera glorifié. Les hommes sont admirables en leurs cogitations humaines, mays Dieu est suradmirable es siennes divines, qu'il fera reuscir selon son bon pla3^sir. Cependant je salue vostre cœur, ma très chère Fille, et celuy de cette chère nièce, vous souhaitant de tout le mien mille et mille bénédictions. Nostre Mère (5), je pense, vous escrit. Je suis Vostre plus humble serviteur, F., E. de Genève. XVII décembre 161 5. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de TEtat. (i) Madeleine, fille de M'"^ de Bressieu, avait épousé Louis de Sales, sei- gneur de la Thuille. (Voir le tome précédent, note {4), p. 27.) C'est sans doute l'un et l'autre que le Saint promet de faire venir à Annecy. (2) Ce « beau garçon » est François, premier enfant du second mariage de Louis de Sales, né au commencement de mai 1614. (Voir ibid., note (2), p. 180.) (3) Gasparde d'Avisé (cf. ci-dessus, pp. 98, 99, 102). (4) Jacqueline de Chauvirey, veuve du baron du Chàtelard. (Voir ibid.) (5) La Mère de Chantai.  Année 1615 li^ MCXLV A DOM SENS DE SAINTE-CATHERINE GÉNÉRAL DES FEUILLANTS (fragment) Consolation donnée au Saint par la sage conduite de la Mère Favre. Annecy, vers le 18 décembre 1615 (i). C'est mon extrême consolation de sçavoir que ma grande Fille marche avec sa petite trouppe selon la divine volonté, ne se lassant point d'avancer en la divine dilec- tion par un soin constant et paysible, parmi ces chères âmes que Dieu a choisies pour son honneur.  Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrife de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy, ( I ) Au dire de la Mère de Chaugy (Les Vies de quatre des premières Mères, i659-i«q2, Vie de la Mère Favre, chap. vu), le Général des Feuillants, dans une lettre à saint François de Sales, lui parlait « fort advantageusement » de la Mère Favre et louait surtout « la solide vertu dans laquelle il avoit remarqué qu'elle eslevoit ses filles. Sur quoy, » ajoute l'annaliste, « ce grand Fondateur écrivit les paroles » que nous reproduisons ici. Bien que le destinataire ne soit pas explicitement indiqué, il semble hors de doute que ces lignes s'adres- sent à D, Sens de Sainte-Catherine lui-même. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 39.) Q.uant à la date, on peut facilement la déduire de celle de la lettre suivante à la Supérieure de la Visitation de Lyon.  MCXLVI A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON (0 Couronnes des épouses et soucis des mères. — La Visitation est « une fontaine sacrée. » — Souhaits du Fondateur à ses Filles. Annecy, i8 décembre 1615. Je croy que Dieu vous tient de sa main *, ma très chère * Cf, Ps. lxxh, 24. (i) Les éditeurs précédents ont adressé cette lettre à la Mère de Chantai; Lettres VII g  114 Lettres de saint François de Sales Fille, car le Révérend Père General des Feuillans (O me Tescrit. Tenes vous donq bien a luy, et regardes deux ou trois fois le jour si vostre main n'est pas tous- jours fermement attachée a la sienne. Voyes vous, cette petite trouppe de filles, c'est une couronne que Dieu vous prépare et dont vous jouires en la félicité éternelle ; mais il veut que vous la porties toute dans vostre cœur en cette vie, et puis il la mettra sur vostre teste en l'autre. Les espouses, anciennement, ne portoyent point de couronne et chappeau de fleurs au jour de leurs noces qu'elles n'eussent elles mesmes amassées, liées et ajan- cees ensemble. Je veux dire, ma chère Fille, ne plaignes point la perte de vos commodités spirituelles et des contentemens particuliers de vos inclinations, pour bien cultiver ces chères âmes ; car Dieu vous en recompensera au jour de vos noces éternelles. Ne voyes vous pas, ma chère ame (car mon cœur me fait dire ainsy), que vostre petite Congrégation est comme une fontaine sacrée en laquelle plusieurs âmes puiseront Cf. Prov.,vm, 3:5. les caux de leur salut *, et que des-ja plusieurs, a l'imi- tation de la vostre, veulent ériger d'autres pareilles Congrégations a la grande gloire de Dieu et a la grande facilité du salut pour plusieurs (2)? Ne vous lassés donq nullement d'estre mère, quoy que les travaux et soucis de maternité soyent grans. O ma Fille très chère, que de bénédictions mon ame souhaitte a la vostre ! Je salue nos Seurs professes (3), du cœur qu'elles sçavent, et nos Novices 4), d'un cœur qu'el- les ne sçavent pas. Hé ! Dieu, respandés sur elles l'esprit de douceur et de simplicité, l'esprit d'amour et d'humilité, erreur évidente : la Sainte se trouvait à Annecy en décembre 1615, et, du reste, le ton de ces lignes ne lui convient nullement, tandis qu'il est en par- faite harmonie avec la correspondance échangée entre le Fondateur et la Mère Favre à cette époque, (i) D. Sens de Sainte-Catherine (voir la note du fragment précédent). (2) Cf. ci-dessus, pp. 99-101. (3) Les Sœurs Péronne-Marie de Chastel et Marie-Aimée de Blonay, pro- fesses d'Annecy. (4) Voir ci-dessus, note (2), p. 4. La dernière Sœur reçue au noviciat, le 8 décembre, était Anne-Catherine Darmesin.  Année 1615 115 l'esprit d'obéissance et de pureté, l'esprit de joye et de mortification ! Ma faille, mon cœur est tout vostre en ce mesme Sau- veur. Dieu soit beny.  Francs, e. de Genève.  Ce 18 décembre 161 s  MCXLVII A MADAME DE VIGNOD RELIGIEUSE DE l'aBBAYE DE SAINTE-CATHERINE (0 De grandes fêtes qui, d'elles-mêmes, parlent divinement. — Le silence de Jésus et de sa Mère ; qu'il dit au Saint de grandes choses ! — Contemplation. — La crèche et l'autel. — Saint Bernard et la Nativité. Annecy, 24 décembre [1610-1615 (2).] Vous pouves penser, ma très chère Fille, comme mon ame, qui ayme extrêmement la vostre, s'imagine tous- jours de vous pouvoir escrire ; car en vérité j'ay un playsir fort grand quand je puis entretenir mon esprit avec le vostre. Mais ces grandes festes nous imposent silence, d'autant que d'elles mesmes elles retentissent et parlent divinement du mystère qu'elles nous repré- sentent. Je ne sçai certes que dire autour de ce divin Enfant, car il ne dit mot, et son cœur, plein de faveur pour les nostres, ne se declaire point qu'avec des plaintes, des larmes et des douces œillades; sa sacrée Mère se taist presque tous-jours et admire ce qu'on luy dit *. Mon Dieu * Cf. Luc.,n, 17-19. que ce silence me dit des grandes choses ! Il m'apprend ( I ) La destinataire, à cause de certaines particularités du texte, semble devoir être une Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine, et probablement Bernarde de Vignod. (Voir tome XIII, note ( i ), p. 103.) (2 ) A ne tenir compte que des présences de saint François de Sales à Annecy pendant les fêtes de Noël, cette lettre peut avoir été écrite entre 1610 et 1621, les années 1616-1618 exclues. Mais, si près de la fondation à Rumilly des Bernardines réformées (voir ibid., note (4), p. 116), il y aurait sans doute quelque allusion au prochain établissement. Ce silence fait écarter 1619-1621.  ii6 Lettres de saint François de Sales a faire la vraye orayson mentale ; il m'apprend la fer- veur amoureuse d'un cœur qui est saisy d'affections que nourrissent ces douces pensées et qui a peur d'en perdre la suavité s'il les prononce. Tenés vous auprès de cette Mère, ce pendant, et ne l'abandonnes pas d'un seul moment tandis qu'elle part de Nazareth et qu'elle va en Bethlehem ; tandis que, sans empressement, mays non pas sans des ardens mouve- mens, elle attend d'heure a autre de voir esclos de son sacré ventre le bel oyseau du Paradis. Helas ! ma chère Fille, vous la verres, cette belle Dame, cette keureuse fille de Sion, que, telle qu'elle est, Mère du Roy de * Cf. Luc, ji, 4, 7. gloire, elle va mendiant l'hospitalité en Bethlehem * ; elle n'en a nulle sorte de honte, ains elle s'honnore de cette sacrée et bienheureuse nécessité. Je vous prometz qu'en cette Messe de la minuit, en la- quelle il me semblera voir une cresche sur l'autel et le divin Poupon faysant ses doux yeux pleins de larmes plus pretieuses que des perles, je l'offriray a Dieu son Père avec le congé de sa Mère, et le demanderay pour vous, affin qu'il soit a jamais le cœur de vostre cœur et l'unique Espoux de vostre ame. O ma Fille, tenes bien ce divin Enfant entre vos bras et luy donnés vos mammelles. * Cf. Cant., V, I. Il manQ;e le lait * de l'humilité et de la douceur cordiale. Mon Dieu, que ce mystère est doux ! Le premier ravis- * Vita 1% 1. 1, c. iT, sèment de vostre saint Bernard fut d'une vision d'iceluy *, ^' et par ce moyen il rendit son cœur et sa bouche pleine du lait de la Sainte Vierge et des larmes de ce doux petit Enfant. Salués la petite cousine (0 de ma part et, a la pareille l'une de l'autre, si tost que vous verres le grand petit Enfant né en vostre ame, dites luy fervemment que je luy sacrifie la mienne avec les vostres éternellement. Amen. Franç% E. de Genève. ( I ) Sœur Louise de Ballon (cf. tomes XIV, note ( 2 ), p. 129, et XVI, p. 126).  Année 1615 i ly  MCXLVIII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON (0 Artifice du démon dans une tentation de joie. — Les Anges venant chercher le Ciel dans « la petite spelonque de Bethlehem. » — S'humilier profondément pour voir de plus près le Sauveur « abismé dans le fin fond de Thumilité. » Annecy, 2^ (2) décembre 161 5. Il faut donq bien faire ainsy, ma très chère Fille : escrire seulement au Père ou a la Mère amplement, et a l'autre un seul petit billet. La tentation de rire en Teglise et a l'Office est mauvaise, quoy qu'elle ne semble que folastre et badine, car, après la charité, la vertu de la religion est la plus excellente ; car, comme la charité rend a Nostre Seigneur l'amour qui luy est deu selon nostre pouvoir, aussi la religion luy rend l'honneur et la révérence requise, et partant, les fautes qui se commettent contre elle sont grandement mauvaises. Il est vray qu'en cela je ne voy pas grand péché, puisque c'est contre la volonté ; mays il ne faut pas pourtant laisser cela sans quelque pénitence (3). Quand l'ennemy ne peut pas rendre nos âmes Marion, il ( I ) Dans la première édition, la destinataire est désignée seulement par son titre de Religieuse de la Visitation ; mais le début de la lettre ne permet pas de douter qu'elle ne soit adressée à la Mère Favre. (Cf. ci-dessus, p. loi.) ( 2 ) Le Saint disant positivement : « c'est aujourd'huy Noël, » il faut conclure à une erreur de l'édition de 1626 qui donne pour quantième le 27 décembre. Nous ne saurions garantir que le texte soit tout entier de 161 5 ; le second alinéa pourrait bien être une interpolation. (Voir la note suivante.) (3) « Nos Sœurs joûissoient de cette sainte allégresse qui est communément le partage d'une ame qui n'a rien a se reprocher et qui ne dispute rien a Dieu, » raconte la Sœur Louise-Gasparde de Saint-Paul (Hist. de la Fondation du ler Monastère de Lyon). « C'est du coté de la joye que l'ennemi les tenta. On donna dans quelques légèretés au chœur pendant l'Office... Pour corriger ce défaut... nôtre Mère Favre commanda que durant neuf jours on feroit après Matines amende honorable... la face contre terre. Cet ordre fut exécuté et la tentation prit la fuite. » L'annaliste place le fait en 1619; si elle ne se trompe pas, il faudrait croire que ce passage appartient à une lettre de cette année-là. (Cf. la note précédente.)  ii8 Lettres de saint François de Sales rend nos cœurs Robin ; et il ne s'en soucie pas, pourveu que le tems se perde, que Tesprit se dissipe et que tous- jours quelqu'un soit scandalizé. Mais voyes vous, chère Fille de mon cœur, n'espouvantes pas ces bonnes filles ; car d'une extrémité, elles pourroyent passer a l'autre, ce qu'il ne faut pas. Je ne vous dis pas encor mes pensées sur le sujet dont vous m'aves escrit, parce que c'est aujourd'huy Noël, jour auquel les Anges viennent chercher le Paradis en terre, ou certes aussi il est descendu en la petite spelonque de Bethlehem, dans laquelle, ma très chère Fille, je vous treuveray tous ces jours suivans avec toutes nos chères Seurs, qui sans doute feront leur résidence, comme des * Vide tom. vill sagcs abcillcs, autour de leur petit Roy*. Celles qui s'hu- xcv^^su^'^finem.'^"'' milicront plus profondement le verront de plus près; car il y est tout abismé dans le fin fond de l'humilité, mais humilité courageuse, confiante et constante. Ce doux Enfant soit a jamais la vie de vostre cœur, ma très chère Fille, que je chéris nompareillement, et qui est tous-jours présent au mien, tant il plaist a Dieu que mon affection se fortifie par cette petite séparation de bien extérieur. Ce . . décembre 1615.  Année 1615 119 MCXLIX A M. JEAN-FRANÇOIS DU MARTHEREY (0 Une affaire qui s'achèvera à la satisfaction du destinataire. — Jeunesse et oisiveté : deux mauvaises compagnes. — Puissance de la « hantise ». — Réponse au sujet d'un mariage. Annecy, 28 décembre 1615 (2). Monsieur du Marterey, Je fay en partie ce que M. le Supérieur (3) et vous aves désiré, et ne me fusse pas arresté la, n'eust esté qu'hier, ceux qui ont esté employés pour vostre affaire m'y vinrent obliger par leurs remonstrances. Je croy que vous ne tarderes pas a les rendre satisfaitz, et je passeray plus outre et vous contenteray. Or, persévères es saintes resolutions que nous avons prises : tenes vostre ame nette, esleves souvent vostre ( i ) Jean-François du Martherey naquit en 1590, de M""* Henri du Martherey, bourgeois de Chambéry, et de damoiselle Bonnevie de Bourg-en-Bresse. De bonne heure chanoine régulier de Peillonnex, il dut quitter le prieuré par suite de la misère des temps, sans toutefois se soustraire à l'autorité du prieur. (Voir tome XV, note (3), p. 232.) En 1614, nous le trouvons prêchant le Carême à Bonne, où il est rappelé l'année suivante par les « scindiez, gentilz- hommes et borgeois » auxquels il avait « apporté grandes ediffications. » On le supplia même de demeurer après la station quadragésimale pour '< instruire la jeunesse aux lettres et pieté. » Le Religieux accepta cet emploi à titre d'essai, attendant la permission de l'Evêque de Genève, et, de son prieur, la dispense de résidence à Peillonnex. Toutes choses furent sans doute obtenues, carie 6 juillet 161 5, Claude de Reydet, dit de Choisy, doyen de la collégiale de Sallancheset curé de Bonne, constitue M. du Martherey vicaire perpétuel de la paroisse, avec charge de l'administrer en son nom. Lorsque, par un acte du 29 avril 1616, émanant de Tévêché, cette institution fut ratifiée, l'ancien chanoine ne dépendait plus de ses Supérieurs réguliers, car François de Sales raye de sa main la mention : « Religieux du prieuré de Peillonex. » — Le 8 juillet 1621, M. du Martherey résigne ses fonctions de vicaire perpétuel à Bonne, pour devenir, le 24 septembre suivant, curé de Vétraz. En 1625, il est chargé de la paroisse de Ville-la-Grand, où il meurt en 1652. (D'après les R. E., sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), etc.) (2) Les premiers éditeurs donnent seulement le quantième; les détails de la note précédente au sujet de l'institution de M. du Martherey pour vicaire perpétuel de Bonne, justifient le millésime. Cette lettre, en effet, concerne cette affaire, et a dû être écrite entre Tacte du 6 juillet 1613 et celui du 29 avril 1616. ( 3 ) Amé Rouge, sous-prieur de Peillonnex (voir tome XV, note ( i ), p. 232).  120 Lettres de saint François de Sales cœur, occupes le en la lecture des bons livres, ne demeu- res point oyseux, ains faites tous-jours quelques bonnes besoignes, ou corporelles ou spirituelles. La jeunesse et l'oysiveté sont deux mauvaises compaignes ; la dernière trahit et ruine la première. Je croy bien, comme vous m'escrives, que la bonne madame de la Flechere (0 vous ayde. La hantise peut infiniment, soit en bien, soit en mal; celle de cette dame ne peut estre que salutaire a qui s'en veut et sçait pré- valoir. Il se faut bien garder de redonner la bénédiction matrimoniale a la sainte Messe, ni de reprononcer ces paroles : Ego vos conjungo ; mais après que ces gens la seront communies, vous pourres bien, après la Messe et secrètement, leur faire confirmer le consentement de leur mariage, et dire sur eux les oraysons, qui sont dans le Missel, de la bénédiction. Cf. Ps. XXVI, I. Dieu soit vostre lumière et vostre protection *! Vostre très humble confrère, France E. de Genève. Ce 28 décembre.  (i) Madeleine de Saint-Michel, veuve de François de la Fléchère, dont TEvêque de Genève écrira un jour à la Mère de Chantai : « C'est une sainte. » (Lettre du 29 juin 1617; voir tome XI, note (2), p. 19g.)  MCL A M. GUILLAUME DE BERNARD DE FORAS Un pacte d'amitié. Annecy, [fin 161 5 (i).] En ce billet, je confirme le don que je vous ay fait, Monsieur mon Frère, de mes plus sincères affections ( I ) Ce billet et celui qui fut écrit au retour d'un pèlerinage du destinataire à Lorette en 161 5 (voir ci-dessus, p. 95), se ressemblent par le format et  Année 1615 121 dédiées a vostre honneur et service. Faites moy récipro- quement le bien de m'aymer selon la véritable qualité que je porte en mon ame, de Vostre plus humble très affectionné frère et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. Revu sur l'Autographe conservé au 2'^ Monastère de la Visitation de Rouen. récriture ; il n'est donc pas téméraire de les rapprocher aussi pour la date. Probablement, le Saint remit ces lignes à son ami au départ de celui-ci; on a vu plus haut (note (2), p. 9^) que M. de Foras était à Annecy en décembre 1615, nous ignorons s'il s'y trouvait encore au commencement de 1616.  MCLI A MONSEIGNEUR HILDEBRAND JOST, ÉVÊQUE DE SION (O Un désir de TEvéque de Sion difficile à satisfaire. — Quel prédicateur il faut aux Valaisans. — Persévérance d'un converti. — La peste à Saint-Maurice. — Envoi d'un aspersoir et de lettres testimoniales, Annecy, 31 décembre 16 15. (2) Illustrissime et Reverendissime Prsesul in Christo colendissime, Quod me praecedentibus litteris monuisti, desiderare te ut aliquem concionatorem ad vos transmitterem, id ego enixe cuperem me prsestare posse. Verum ea res minime sane facile fieri potest, tum quia rarus est qui velit se  Illustrissime, Reverendissime et très vénéré Prélat dans le Christ, Vous m'avez exprimé dans votre dernière lettre le désir que je vous envoie un prédicateur ; je souhaiterais de toute mon âme le satisfaire. Mais la chose n'est nullement facile, soit parce que rare ( I ) Voir le tome précédent, note ( i ), p. 158. (2) Le texte latin est inédit; Migne, tome VI, col. 988, n'en a donné qu'une traduction.  122 Lettres de saint François de Sales vitamque suam addicere illi muneri semper in eodem loco obeundo, tum quia non quolibet praedicatore apud illos vestros Sedunenses opus esse existimo, sed modes- tissimo, prudentissimo et patientissimo. Multos autem invenire licet qui scientiam habeant, qui autem scientiam cum prudentia, hoc opus, hic labor est. Videbo tamensi forte occurrat aliquis quem tuto possim destinare, om- nemque movebo lapidem ut desideriis lUustrissimae Domi- nationis Vestrse satisfaciam. Intérim, non parum gavisus sum D. Nicolaum reman- sisse, ratus illum errores suos preeteritos, vitae futurae integritate deleturum ( ^ ), cum alioquin vir sit, meo quidem judicio, maturse prudentise et sagacitatis. Doleo vero quod Agaunenses peste premantur (2),  est celui qui accepte de se consacrer à ce ministère toujours dans le même lieu, soit parce que j'estime que vos Valaisans ont besoin, non d'un prédicateur quelconque, mais d'un homme qui excelle en modestie, prudence et patience. Beaucoup, à la vérité, possèdent la science, mais d'en trouver un qui, à la science joigne la prudence, là est la grave difficulté. Toutefois, je verrai si je rencontre quel- qu'un que je puisse vous adresser, et je n'épargnerai rien pour satis- faire Votre Seigneurie Illustrissime. En attendant, je me réjouis extrêmement que M. Nicolas soit resté, persuadé qu'il effacera par l'intégrité de sa vie ses erreurs passées (0. D'ailleurs, c'est à mon avis un homme d'une prudence expérimentée et d'un esprit pénétrant. J'apprends avec douleur que les habitants de Saint-Maurice sont affligés de la peste (2), et je ne manquerai pas de les aider des ( I ) Ce converti est Nicolas Bertolonio, que saint François de Sales avait ramené à la foi. (Voir tome XV, note ( i ), p. 341.) (2) En Suisse, le fléau était devenu endémique au commencement du XVII* siècle. On l'appelait peste noire, et, en Valais, peste maculée, à cause des taches livides qui annonçaient aux malheureux la présence du mal terrible dont ils étaient atteints. A la fin de 161 5, la maladie reparut à Sion avec une nouvelle intensité et recommença à moissonner des victimes à Saint-Maurice. « Comme on devait s'occuper d'affaires avec la France..., l'Evêque convoqua la diète à Granges, où elle se tint sur la grande route le 6 février 1616. » L'épi- démie s'aggravant, le 20 mars, une seconde diète prit des mesures sévères pour arrêter la contagion. Au mois de mai suivant, le peuple valaisan était encore plus furieusement décimé. (Voir Grenat, Hist. moderne du Valais de i^j6à i8r^, publiée par M. Lavallaz; Genève, Pasche, 1904, date de TAvant-Propos.)  Année 1615 123 neque deero quin praecibus meorum illos adjuvem, pro mea erga omnes Paternitatis Vestrae Illustrissimae sub- ditos observantia et charitate. Mitto aspersorium pro aqua benedicta impertienda, quod vestra in me benevolentia gratum habebit ; cuperem vero aliquid aliud vestris meritis dignius habere, quo testatum facerem meintimo corde Paternitatem Vestram lUustrissimam venerari et colère. Mitto denique litteras illas testimoniales de consecrationis munere, me promo- vente et assistente, Illustrissimae Dominationis Vestrae coUato (0. Quod superest, Deum optimum maximum impensissime rogo, ut te sospitem, sancte pieque viventem, tuo gregi et mihi conservet. Illustrissimae Dominationis Vestrae, Humillimus et addictissimus in Christo frater et servus, Francs Episcopus Gebennensis. Annessii, xxxi decembris 161 5. Revu sur l'Autographe conservé à Milan, Archives du prince Trivulzio. prières de mes fidèles, selon la considération et l'affection que j'ai pour tous vos sujets. Je vous envoie un aspersoir pour donner l'eau bénite, votre bien- veillance à mon égard l'aura pour agréable ; j'eusse cependant sou- haité vous offrir un objet plus digne de vos mérites, et qui témoignât mieux de ma vénération profonde et cordiale pour Votre Paternité Illustrissime. Enfin, vous trouverez ci-joint les lettres testimoniales de la consécration conférée à Votre Seigneurie, avec mon concours comme prélat assistant. Il me reste de prier ardemment le Dieu très grand et très bon de vous conserver en santé, sainteté et piété à l'affection de votre troupeau et à la mienne. De Votre Seigneurie Illustrissime, Le très humble et très attaché frère et serviteur dans le Christ, François, Evêque de Genève. Annecy, 31 décembre 161 5. (i) Ces lettres testimoniales ne nous sont pas parvenues.  124 Lettres de saint François de Sales MCLII A LA MÈRE DE CHANTAL { INÉDITE ) Compte-rendu d'un entretien avec un prétendant de M"® de Chantai. Annecy, [1613-1615 (x).] Ma très chère Mère, En vous donnant le bonjour de tout mon cœur, je vous diray que M. de Montrotier (2) me vint entretenir hier au soir de son mariage et me dit quil vous iroit voir aujourdhuy. C'est pourquoy il faut que je vous avertisse que je luy dis, sur divers discours, que pour vous, je vous y treuvois asses disposée et que vous en avies escrit a M. de Bourges (3). Et par ce quil me dit que vous luy avies dit que la petite (4) n'en sçavoit encor rien, ni per- sonne, sinon mon frère de Thorens (5) et moy, je le laissay en cette opinion. Il me parla de la dote et quel expédient on pourroit treuver pour la réputation. Je luy dis que vous avies mesuré les affaires de vos enfans il y a long tems, et que de plus en plus vous treuvies quil ny avoit pas moyen de faire autrement. ( i) En 1613 Françoise de Chantai avait quatorze ans, et Ton pouvait songer à rétablir ; d'autre part, une lettre de la Sainte, du 4 janvier 1616, nous apprend qu'à cette époque il était question d'un mariage entre sa fille et M, de Foras. Le projet de M. de Montrottier doit donc être placé entre les deux dates extrêmes que nous indiquons. (2) Deux frères portaient alors le titre de seigneurs de Montrottier. C'étaient les fils de Pierre de Montrottier et de Françoise de la Chesnaye. L'aîné, Charles (voir tome XI, note (2), p. 44), avait épousé en 1597 Marie de Chastillon. Nous ignorons la date de la mort de sa femme. Le second, Claude-Amédée, était chevalier de Malte. Lequel désigner pour le prétendant de Françoise de Rabutin ? Le plus jeune avait au moins cinquante ans, leur père étant mort en 1565. — Ni la généalogie de Menthon ni Y Armoriai de Savoie n'indiquent d'autre personnage de ce nom à cette époque. (3) André Frémyot, frère de la Mère de Chantai et archevêque de Bourges. (Voir tome XII, note ( I ), p. 299.) (4) Françoise de Rabutin-Chantal, fille cadette de la Sainte. (Voir ibid., note (i), p. 360.) (5) Bernard de Sales, qui avait épousé Marie-Aimée de Rabutin-Chantal. (Voir tome XIII, note ( i ), p. 307.)  Année 1615 125 J'ay pensé, ma 1res chère Mère, quil failloit vous avertir de lout ceci. Je luy dis un'autre chose d'une res- ponse que la petite avoit faite a sa seur (0 sur une pro- position générale de mariage ; mais il ny a rien en cela qui porte coup, et je le vous diray peut estre ce soir. Bonjour, ma très chère Mère; Jésus soit a jamais au milieu de nostre cœur. Revu sur l'Autographe appartenant à M"'° la vicomtesse de Saint-Seine, au château de Saint-Seine (Côte-d'Or). ( I ) Marie-Aimée, baronne de Thorens (voir tome XII, note ( 3 ), . 328).  MCLIII A LA SŒUR DE CHASTEL RELIGIEUSE DE LA VISITATION A LYON Constance des saintes affections. — Parmi les sécheresses, attendre en paix la rosée céleste. — « Rien au monde pour nostre cœur que Dieu, ni pour Dieu que nostre cœur. » Annecy, [décembre 1615-janvier 1616 (i).] Il est vray que les amitiés et affections fondées sur la gloire de Dieu sont invariablement inviolables, ma chère Pille, de sorte que ni le silence, ni les esloignemens, ni la variété des accidens ne sauroyent desfaire ce que Dieu a fait. Vives donq tous-jours en cette parfaite asseurance, que mon ame ne sçauroit pas seulement un seul moment oublier l'amour sacré et vrayement paternel qu'il a pour la vostre. Demeurés bien en paix parmi vos sécheresses, et attendes en patience la rosée des consolations célestes. (r) L'étude sérieuse du texte ne permet pas de laisser à ces lignes Tadresse donnée par Datta et les éditeurs qui l'ont suivi. Saint François de Sales n'écrit certainement pas a une Dame, mais à une Religieuse de la Visitation, depuis peu éloignée d'Annecy, et très probablement à la Sœur Péronne-Marie de Chastel (voir tome XV, note ( i ), p. 133). Ce que nous savons de l'épreuve intérieure qu'elle subit peu après le départ de Lyon de la Mère de Chantai (voir sa Vie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de quatre des premières Mères, 1659-1892, chap. xvi), concorde avec les conseils contenus dans cette lettre et justifie la date approximative qui lui est attribuée.  126 Lettres de saint François de Sales Il est bon que nous ne soyons pas tous-jours attachés aux mammelles de nostre Dieu et que nous soyons un peu sevrés de sa douceur. Taschés de rendre le bon odeur parmi le prochain la ou vous estes, affin qu'on loiie le Parfumier céleste en la boutique duquel vous vives. Ah, quel bonheur est celuy que, * Cf. Tr. de l'Am. chansfeant de place, vous ne chansres point de cœur * ! de Dieu, liv. XII, ,, ^. t^.,, . , ch. IV. Mon Dieu, ma r ille, puisque nostre cœur ne change point de Dieu, pourquoy changeroit-il d'amour ? Aussi bien n'y a-il rien au monde pour nostre cœur que Dieu, ni pour Dieu que nostre cœur. Tenes vous donques tous-jours bien ferme aux pieds du Crucifix. Bon soir, ma chère Fille, recommandes moy bien tous- jours dévotement a la miséricorde de Celuy pour lequel je suis sans fin vostre.  MCLIV A LA MÈRE FAVRE, SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON (fragment) Le rang de la Mère Favre dans le cœur du Saint et dans l'Institut. [Fin 1615 ou 1616 (i).] Vous sçaves bien que vous estes la grande fille bien- aymee, et que nul ne vous ostera le rang que vous tenes en mon cœur, après et tout auprès de nostre très chère Mère ; aussi estes vous nostre seconde mère.  Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy. (i) Préciser la date de ce fragment est bien difficile; il semble appartenir aux premiers mois de la supériorité de la Mère Favre.  ANNEE 1616  MCLV  A LA MERE DE CHANTAL Souhaits de nouvel an pour la destinataire et la Congrégation. — Effusions d'amour à Jésus-Christ Notre-Seigneur. — Le chercher uniquement et tout faire pour lui. Annecy, i®"" janvier [1616 (i).] Vous seres la première, ma très chère et très bonne Mère, qui recevres de mes escritz en cette année nouvelle. La rayson, certes, le veut bien, qu'après avoir fait hom- mage au Père et a la Mère céleste, je le rende aussi a la seule Mère que leurs Majestés m'ont donné pour cette vie. Bonne et très sainte année a ma très chère Mère de la part de son filz, quiluy souhaitte l'abondance de la grâce du Père éternel, de la paix du Filz circoncis et de la consolation du Saint Esprit *, dédiant avec ce mesme * Cf. i Tim., i, 2 cœur de ma très chère Mère, le mien comme le sien a la '^ "' '^' ^ gloire de la divine Bonté, et luy consacrant tous les momens de cette nouvelle année pour faire une entière circoncision de ce mesme cœur, et l'appliquer a recevoir purement et parfaittement l'amour sacré que le céleste et divin nom de Jésus nous annonce escrit en sang sur la sainte humanité du Sauveur *. * Cf. Luc, n, 21, Je ne me puis promettre de vous voir avant mercredy, sinon de cette veuë perpétuelle de laquelle mon ame (i) L'appellation de « Mère » indique une date postérieure à 1613. En 1616, le premier de l'an tombait un vendredi, et en cette même année la Sainte écrit le 4 janvier : « Je le vois (Monseigneur) fort peu, et ne saurais dire le temps qu'il y a que je ne lui ai parlé, tant il est accablé d'affaires. » (Lettres, vol. I, p. 73.) On n'aurait pas cependant de raisons péremptoires pour écarter 1617.  128 Lettres de saint François de Sales regarde et garde la vostre chèrement dans le fond de nostre cœur (O. Ah, mon Dieu, ma chère Mère, que je désire d'amour divin a ce cœur, que je luy souhaitte de bénédictions ! Baysons mille fois les pieds de ce Sauveur et disons-luy : Mon cœur, o mon Dieu, vous proteste, 7na face vous • Ps. XXVI, 8. désire ; ah ! Seigneur^ ma face recherche vostre face *. C'est a dire, ma chère Mère, tenons nos 5^eux en Jésus Christ pour le considérer, nostre bouche pour le loiier, et qu'en fin tout nostre visage ne respire que d'aggreer a celuy de nostre cher Jésus ; Jésus pour lequel il nous faut humilier, entreprendre, travailler, souffrir et devenir, • Rom., VIII, 36; comme dit saint Paul *, des brebis conduites a la bou- Ps. XLIII, 22. . ,.,,.. ,. . ,* . , , chérie, quand il plairoit a sa divine Majesté de nous rendre deshonnorables pour son honneur et gloire. Or sus, bonne et très sainte année a ma très chère Mère, toute parfumée du nom de Jésus, toute détrempée de son sacré sang. Que nul jour de cette année, ains que nulle année ni nul jour de plusieurs années, que je supplie Dieu vouloir donner a ma très chère Mère, ne se passe qu'il ne soit arrousé de la vertu de ce sang, et ne reçoive la douceur du vent de ce nom qui respand le comble de toute suavité. Amen. Ainsy puisse ce nom sacré remplir de son aggreable son toute la Congrégation de nos Seurs, et les gouttes du sang du petit Sauveur se convertir en un fleuve de sain- • Cf. Ps. xLv, 5. teté qui res-jouisse * et rende fertiles tous les cœurs de cette chère trouppe, et sur tout celuy de ma très chère Mère, que le mien ayme comme soy mesme. Vive Jésus, vive son sang! Vive Marie, vive son flanc, duquel Jésus a pris son sang ! Francs E. de Genève. ( I ) La lettre paraît se terminer ici; ce qui suit doit être composé de plu- sieurs fragments de différentes dates, mais il est impossible de leur assigner leur vraie place.  Année 1616 129 MCLVI AU DUC DE BELLEGARDE (O Vicissitude des années et permanence des affections formées par Dieu. — Les enfants pensent souvent à leurs pères; les pères pensent toujours à leurs enfants. — L'alcyon sur les ondes. Annecy, 6 janvier 1616. Monsieur, A ce commencement de nouvelle année, je vous repré- sente mes vœux et mon obéissance, dissemblables certes aux ans, en ce quilz périssent tous dans leurs vicissitudes et révolutions ; mais l'infinie afFection que j'ay a vostre gloire est ferme, permanente et exempte de tout autre changement que de celuy de sa continuelle croissance. Aussi fut elle formée de la main éternelle de Dieu, a mesme que la bienveuillance que vous aves pour moy fut créée en vostre esprit; et si, elle ne regarde aussi que l'éternité. Passion toute miraculeuse, qui, au dessus des loix de la nature, m'a donné le bien de vous avoir pour filz, et a vous, Monsieur, le courage et l'humilité de m'advouer pour père. O combien de foys, Monsieur mon cher Filz, ce nom et ce cœur de père que je porte envers vous me presse-il d'amour et de zèle pour supplier la divine Bonté qui l'a volu comme cela, de combler vostre ame de sa sainte dilection, establissant son royaume céleste en vous! Je le sçai bien que les bons enfans pensent souvent en leurs pères ; mays ce n'est pas souvent, c'est tous-jours que les pères ont leurs espritz en leurs enfans. Persévères, Monsieur mon très cher Filz, en cette grandeur de courage qui vous tient relevé au dessus des choses temporelles, entre lesquelles vous passes comme un heureux alcyon * surnageant aux ondes qui inondent Vie'dev., Part. Iiï, ce siècle. Tenes vos yeux arrestés a cette sainte éternité xm', p'^'i^^. ^''"'' (i) Roger de Saint-Lary et de Termes (voir tomes XV, note(i), p. 293, etXVr, note ( r ), p. 58).  Vide Introd. a la  130 Lettres de saint François de Sales a laquelle nous allons par la course de ces années, qui, passant, nous passent comme de poste en poste, jusques a cette fin-la. En ces momens, pourtant, comme dans un petit noyau, est enclose la semence de toute Tseternité, et en ces menus travaux de la dévotion que nous devons Cf. II Cor., IV, 17. prattiquer est enfermé le prix de l'infinité de la gloire *, et ce petit soin de servir Dieu produit le repos d'une joye perdurable. Qu'a jamais le sang du Sauveur soit béni, qui nous a rendu le salut si aysé ! Il ne se peut dire. Monsieur mon Filz, combien j'ay de consolation de sçavoir que monsieur vostre frère, ce digne et brave seigneur qui vous tient lieu de cher enfant, est enfin marié (0 ; car je ne doute point que cela ne luy soit un grand moyen pour bien servir Dieu, a quoy il est asses porté par la générosité de son courage, outre que je m'imagine que vostre contentement. Monsieur, en est grand. Et si Dieu exauce mes souhaitz, ce mariage sera fleurissant en toute sorte de bénédictions, et rendra Ps. I, 3. en son tems les fruitz * d'une désirable et belle postérité. De faire des amas de paroles sur ce sentiment pour en (i) Chevalier de Malte et grand prieur d'Auvergne, César-Auguste de Saint-Lary, seigneur de Termes, céda aux instances de son frère Roger qui, n'ayant pas d'enfant, le pressait de se marier. Il épousa, en lôi^, Catherine Chabot, fille de Jacques, marquis de Mirebeau, et d'Anne de Coligny, C'était un vaillant soldat, sachant encore mieux la guerre que son frère, au témoi- gnage des contemporains, « brave seigneur, au coeur de lion et à la parole douce. » (Mercure français, tome VII, p. 641.) On retrouve assez fréquemment son nom dans les lettres du président Favre au duc de Savoie, car il servit ce prince dans les guerres de 1616 et 1617. Le baron de Termes finit sa brillante carrière le 22 juillet 1621; blessé au siège de Clairac en Guyenne, il avait été transporté aussitôt à Tonneins. Le P. Arnoux, confesseur du Roi, le visita et le salua de la part de Sa Majesté : « Mon Père, » dit le mourant, « il n'est plus temps de me parler des rois de la terre à qui je suis meshuy trop inutile; parlez-moy seulement du Roy du Ciel ( 1 ). » Louis XIII vint lui-même le voir et honora de ses larmes la perte d'un si bon serviteur. François de Sales mêla ses regrets à ceux de la cour et de l'armée : « O certes, il est vray, » écri- vait-il le 21 septembre 1621, « la mort de M. de Termes m'a infiniment tour- « mente le cœur. » (Cf. Moreri, Hoefer, etc., et Oraison funehre sur le trespas de Monseigneur de Thermes, prononcée en V église des R. Pères Jésuites de Dijon le 28 aoust 1621, par F. J. Pétrigny, de V Ordre des Carmes.)  ( I ) Lts dernières paroles de Monsieur le B.iron de Thermes tenues à S.i Majesté. Bourdeaux et Paris, mdcxxi.  Année 1616 131 tesmoigner la grandeur, je n'en ay pas l'art, principale- ment escrivant avec ce cœur tout de bonne foy, a Vostre Grandeur, qui se contente de la realité de mon affection. Mays, ce pendant, j'excède en longueur. Vives a jamais en Dieu et pour Dieu, Monsieur, et aymes constamment Vostre très humble et obéissant serviteur, Franç% E. de Genève. 6 janvier 161 6, Annessi. A Monsieur [Monsieur le Duc de] Bellegarde, Marquis de Seurre et Versoix, Chevalier des deux Ordres du Roy, grand Escuyer de France, Gouverneur de Bourgoigne, Bresse et Beugey. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Saint-Céré.  MCLVII A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÊQUE DE MONTPELLIER (inédite) Efforts du Saint pour amener une réconciliation. — La peste, messagère de la miséricorde divine. Annecy, [14] janvier (i) 1616. Monseigneur, J'ay veu tout ce quil vous plaist de m'escrire touchant M. de Barraux (^^ que je treuve très bon, comme venant de vostr'esprit qui sçait mieux discerner que nul autre ( I ) L'ancien copiste qui nous a conservé ce tsxte a fait certainement erreur en lisant à la date, ig juin. L'étude comparative des lettres où il est parlé de la peste de Genève et de l'affaire de M. de Barraux, oblige d'adopter le mois à.e janvier. Pour le quantième il y a eu aussi confusion, car le 19 le Saint était absent d'Annecy. (2) Michel Fenouillet, seigneur de Barraux, (Voir ci-dessus. Lettre Mcxxx» p. 8v)  ^y  Lettres de saint François de Sales  ce qui est convenable. J'ay commencé a luy parler, et puis a M. Garin (0, du sentiment quilz ont l'un contre l'autre, selon le mot quil vous pleust m'en toucher. Hz protestent fort de ne penser a point de mal, mais c'est en un langage qui ne veut pas du tout dire cela. Je m'es- sayeray de tenir a leur bien et repos, qui despend de l'obéissance quilz doivent rendre a vos intentions, les- quelles, de mon costé, je veux tous-jours respecter et suivre très aflfectionnement. Nous oyons parler de paix, et sentons tous-jours les efFectz de la guerre. Nostre Genève est tous-jours dange- reusement travaillée de contagion (2), et, par merveille, jusques a présent toute la Savoye en est exempte, grâces a ce bon Dieu qui, a l'adventure, par la peste temporelle, les veut guérir de la spirituelle, ou bien les prendre du costé du Ciel, puisque du costé de la terre, les hommes s'en empeschent les uns les autres. Ce porteur a désiré ma recommandation auprès de vous, et puisquil est des vostres, je ne luy sçaurois rien refuser de ce qui est en mon pouvoir. Je vous supplie de m'aymer tous-jours constamment, puisque de tout mon cœur je suis. Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant frère et serviteur, Francs, E. de Genève. 1616, d'Annessi. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Montpellier. (i) En 1632, au mariage de Perrine Fenouillet, sœur du seigneur de Bar- raux, figure comme témoin leur beau-frère Jacquelin Garin. Serait-ce l'irré- conciliable ennemi de Michel Fenouillet, devenu son proche parent ? Il est question de son mariage dans une lettre du Saint du 19 octobre 1617, et de la dispense nécessaire pour cette alliance ; il y avait donc déjà entre eux un lien de famille. (2) Voir plus haut, pp. 67, 86.  Année 1616 15^  MCLVIII  A MADAME DE LA FLÉCHÈRE (inédite) En route pour Samoëns ; une semaine d'hiver. Annecy, 23 janvier 1616 (i). Je partis lundi pour aller a Sales, ma très chère Fille, pensant d'aller de la a Samoen. Mais le mardi les eaux m'en empescherent ; mercredi et jeudi, la neige [était] si grande en ces contrées de delà, qu'on ne pouvoit passer. Et en fin, la cousine est hors de tout danger (-) ; qui m'a fait revenir icy, ou je vous donne mille et mille bénédictions, ma très chère Fille, comm'estant très par- faitement tout vostre, et salue humblement monsieur le cher mari. Vive Jésus ! Amen. XXIII janvier. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) La date de l'année est prouvée par la maladie de M'"® de Charmoisy. On lit en effet dans le Compte de M' Brunet, par lui rendu au seigneur de Charmoisi, i6iyi6iy : « Item, ay payé a un nommé Guilliaume, pour le louage d'un cheval quil auroit baillié a monsieur le médecin Grandis le 18^ janvier dernier [1616], pour aller voir madame a Samoen avec Monseigneur le Reverendissime, pour troys jours quil auroit gardé ledict cheval, jaçoit quil ne soit esté audict Samoen : quattre florins, six sols. » (Archives de M"« Adélaïde Vuy, à Carouge, Genève.) (2) M-^e de Charmoisy, descendant de Marclaz à Annecy par Samoëns, fut arrêtée par la maladie chez sa belle-sœur M'"<= de Vallon. « Hélas! » écrit la Mère de Chantai le 17 janvier (Letires, vol. I, p. 77). « ma pauvre sœur M^^^ de Charmoisy... nous venant voir, est tombée malade à Samoëns. » Le Saint partit le 18, mais ne put franchir la région des Bornes (voir ci-après, p. 135) ; il revint alors à Annecy, où, dès le 23, il apprenait la convalescence de sa fille spirituelle .  34 Lettres de saint François de Sales  MCLIX A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Ce que Dieu fera pour la Visitation, et ce qu'il fera pour la Mère Favre. — Souffrir en Dieu rend la souffrance heureuse. — Manifestations extérieures du zèle. Annecy, [janvier] 1616 (i). Ma très chère Fille, Je ne vous puis dire autre chose sur ce que vous m'es- crives, sinon que Dieu fera plus que les hommes ne peuvent penser pour cette Congrégation, et spirituelle- ment et temporellement ; et n'en avons nous pas d'asses bons gages jusqu'à présent ? Ma très chère Fille, vostre cœur tient un rang dans le mien qui me fait faire sans cesse mille souhaitz pour vostre consolation et prospérité intérieure. Hé, mon Dieu, puisque vous aves tiré ce cœur de ma grande fille a vous, perfectionnes le en vostre saint amour. Il le fera, ma Fille vrayement chère et bienaymee, n'en doutes point; mais resveillés souvent les saintes affections et resolutions que nous avons prises. Ne vous troublés aucunement de vos infirmités, qui ne vous sont données que pour vous affermir. Je compatis grandement a vostre peyne, quoy que je ne doute pas qu'elle ne soit aggreable a vostre esprit, qui l'accepte comme venant de ce Père céleste, lequel donne les tri- bulations avec un amour nompareil aux enfans de sa providence. Souffres toute vostre fièvre en Dieu, et la souffrance vous sera heureuse, ma très chère grande Fille. Je désire que le zèle de la très grande gloire de Dieu arde et règne continuellement en vostre cœur, et qu'en (i) Les allusions à la maladie de la Mère Favre et aux difficultés que rencontrait la Visitation, permettent de rapprocher ces lignes d'une lettre de la Mère de Chantai, datée du 20 janvier (vol. I, p. 83), où sont traitées les piêmes questions.  Année i6i6 135 toute occasion il paroisse par modestie, douceur, humilité et dévotion. Croyes mo3^ ma très chère Fille, je vous chéris très pretieusement, et ne manque deux fois le jour de faire orayson spéciale a vostre intention. O que cet amour est doux, qui nous fait aspirer les uns pour les autres au Ciel ! Dieu vous bénisse a jamais, ma chère Fille. France E. de Genève.  MCLX A MADAME DE LA FLÉCHÈRE (l) Un voyage arrêté par les neiges. — M""^ de Chartuoisy hors de danger. — Pourquoi le Saint ne trouvait pas facilement un prédicateur pour Kuniilly. Annecy, 26 janvier 1616. Il faut respondre courtement, ma très chère Fille, puisque ce porteur m'a pris entre plusieurs affaires que je ne puis laisser. Je m'estois mis en chemin pour aller voir la chère cousine ( = ), mais il ne me fut possible de passer les Bornes (3) en ce tems, a cause de la nouvelle neige qui y estoit tombée. Or, maintenant elle est du tout hors de danger, a ce que m'escrivit avant hier M. de Val- lon (4). Dieu en soit loiié, a la gloire duquel je m'asseure qu'elle destinera encor plus ardemment le reste de sa vie. Je me res-jouis aussi beaucoup de ce que vous me dites de la chère nièce (y), car tout en est bon, et croy bien que M""" du Chastelard aura plus de peyne de s'eschapper (6). Nous nous verrons quand il plaira a Nostre Seigneur vous (i) Nul doute pour la destinataire; c'est bien M'"'= de la Fléchère, comme le prouvent les diverses allusions de la lettre et le titre de « compère » qui se lit à la signature. (2) M"^"^ de Charmoisy (voir ci-dessus, Lettre MCLvni, p. 133). (5) Région montueuse entre Cruseilles et La Roche. (4) Jacques de Gex, seigneur de Vallon, beau-frère de M""* de Charmoisy. (Voir tome XII, note ( i ), p. 260, et les notes ( i ), pp. 99., loo du tome XVI.) (5) Gasparde d'Avisé (cf. ci-dessus, pp. 99, 102, 112). (6) Jacqueline de Chauvirey ne put en effet « s'eschapper », comme on l'g dit plus haut, note { i ), p. 99.  136 Lettres de saint François de Sales en donner la commodité, et a moy cette particulière con- solation. Je suis en peyne de treuver un prédicateur a propos pour Rumilli, puisque nos Pères Capucins n'en ont point, et qu'on y est un peu délicat (0. Je ne sçai si nous pour- rions avoir quelque Jésuite de Chamberi ; j'en escriray demain un mot au P. Recteur ( = ). Si moins, nous en prendrons icy quelqu'un, car nous en avons d'asses bons, pourveu qu'on ne fust pas si douillet comme l'on est en ce tems, auquel tant de gens sçavent bien dire et fort peu bien faire. Vives tout a Dieu, ma très chère Fille, et chérisses tous-jours fortement mon ame qui vous est toute dediee, comme je suis sans fin, Vostre plus humble, tout affectionné serviteur et compère, Francs, e. de Genève. 26 janvier 16 16. ( I ) D'après la lettre du ig février à M™^ de Mieudry (voir ci-après, p. 148), il semblerait que le P. de la Rivière, prédicateur du Carême de 1616 à An- necy, avait été refusé par les trop délicats habitants de Rumilly. Etaient-ils devenus difficiles depuis qu'ils avaient eu le bonheur d'entendre François de Sales lui-même en 1608? (Voir tome XIII, note ( i ), p. 377.) ( 2 ) Le P. Claude Le Maire (voir tome XV, note ( i ), p. 209), qui devait être remplacé dans sa charge au mois de mars suivant, par le P. Jean Brossard.  MCLXI a monseigneur pierre fenouillet évêque de montpellier (o Une amitié toujours heureuse de s'exprimer. — Malades qui refusent les ordonnances du médecin. Annecy, i" février 1616. Monseigneur, Je ne puis m'empescher de vous resaluer tous-jours ( I ) Le destinataire de cette lettre, que Hérissant et les éditeurs qui l'ont suivi adressent à un Evêque, est sûrement Mg"" Fenouillet ; les nouvelles de MM. de Barraux et Garin le démontrent avec évidence.  Année 1616  37  quand les commodités s'en présentent, désireux de vivre continuellement en vos souvenirs et en la sainte bien- veûillance dont vous m'honnores. C'est le seul sujet de ces quatre lignes ; car, quant au reste, ce porteur fidèle ( ' ) vous dira toutes nos nouvelles, qui sont petites comme en tems de paix. J'ay bien voulu essayer d'accommoder sa volonté avec celle du sieur de Barraux(2), mais ilz ont réciproque- ment refusé les ordonnances du médecin, disant qu'ilz n'est03'ent pas malades ; c'est a dire, ilz ont bien advoùé qu'ilz avoyent sujet de se vouloir l'un l'autre, mais qu'ilz n'av^oyent nulle intention de se rechercher pour en tirer satisfaction, pour le respect qu'ilz devoyent a la vostre, laquelle je les exhorteray tous-jours de révérer comme le sanctuaire de leur bonheur. Et moy, je le feray a jamais de tout mon cœur, comme estant sans fin, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant serviteur et frère, France E. de Genève, i*"" febvrier 1616, Annessi. ( i) La suite du texte prouve que ce porteur est M. Garin. (Voir ci-dessus, note ( I ), p. 132.) (2) Michel Fenouillet (voir ibid., Lettre mclvii, p. 131;.  MCLXII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Une réponse à ce que M^"" de Marquemont allègue contre la Visitation. — Pourquoi le Fondateur eût préféré le titre de simple Congrégation; raisons de sa condescendance à faire de l'Institut naissant un Ordre religieux. — « Suavité nompareille » en son acquiescement. — Ses réserves. — Une fondation est désirée à Chambéry. Annecy, 2 février 16 16 (i). Que dires vous, ma très chère Fille, voyant si peu de lignes de ma part, après en avoir si souvent receu de la ( I ) C'est à tort que Migne, publiant pour la première fois ce texte (tome VI,  138 Lettres de saint François de Sales jepensoisesfrepîus vostrc beaucoup plus ? Or, dites, et ce sera la vérité, dites près se, mai s on m a laissé un quart quu taut bien que le pauvre Père ne puisse pas mieux graiignîr^^\ eTû faire ; car il ayme si fort sa toute chère fille, que sil lettre precipitam- pouvoit, il ne se contcnteroit pas de l'entretenir si ment. ^ peu. Je fay response a Monseigneur TArchevesque, sur un grand papier quil m'a envoyé, contenant tout ce quil luy plait d'alléguer contre l'institut de la Congrégation (0. Et sur deux partis quil me propose, hors desquelz il ne veut nullement establir nostre pauvre Congrégation en son diocsese, je luy laisse le choix sans reserve quel- comque ( = ), hormis celle de la principale fin de nostre Congrégation : que les vefves, au moins en leur habit vidual, y puissent estre par manière de retraitte jusques a ce que, desfaites de tous empeschemens, elles puissent faire la profifession et prendre l'habit ; et que les femmes du monde y puissent avoir entrée, pour s'exercer et ré- soudre a la dévotion, selon les occurrences. Or, les deux partis quil propose sont : ou de laisser nostre Congrégation en tiltre de simple Congrégation, avec la clausure, ou de la réduire en Religion formelle, sous la Règle de saint Augustin (3). Et quant au premier parti, il ne le propose qu'a contre cœur ; si que, vo3^ant que malaysement favorisoit [sic] il jamais la Con- grégation si on ne vient au second, je le luy laisse en col. 992), le date du 2 décembre 161^. L'Autographe porte au-dessous de l'adresse, mais sans millésime, 2 febvrier. Le Saint aura écrit ce quantième après avoir cacheté sa lettre, et ajouté en même temps, dans le sens vertical, les quelques mots concernant Sœur Françoise-Jéronyme de Villette (voir ci- après, pp. 141,142). Toutefois, l'année n'est pas douteuse, car « le grand papier » de M^"" de Marquemont auquel il est fait allusion est du 20 janvier 1616. ( I ) Le Mémoire de Me>" de Marquemont et la réponse de François de Sales seront donnés avec les Opuscules. On peut consultera l'Appendice I, la lettre de l'Archevêque qui accompagnait le long exposé de ses pensées sur la nou- velle Congrégation. (2) L'édition de 164 1 intercale les trois lignes précédentes et plusieurs autres passages de notre texte dans une lettre qui est une vraie mosaïque; ce qui en reste, après restitution des emprunts faits à cet Autographe et à une lettre de 1617, est donné ci-après, p. 1^0. (5) Ce dernier parti fut définitivement adopté deux ans plus tard. Le 9 octobre 1618, l'Evêque de Genève, au nom de Sa Sainteté Paul V, érigeait la Visitation en Ordre religieux, sous la Règle de saint Augustin, et, de par l'Autorité apostolique, en approuvait les Constitutions.  Année i6i6 139 liberté, ( » ) estant chose indifférente que le bien de la Con- g-regation se face ou en une sorte ou en Tautre. Or, mon sentiment estoit quil se feroit mieux en tiltre de simple Congrégation, ou la seule charité et crainte de TEspoux serviroit de clausure, avec la retraitte que la bienséance de telles assemblées requiert, ainsy que nous l'avions mise es Règles. Mays, puisque du bon accueil que iM.on- seigneur TArchevesque fera a cette Congrégation en sa ville dépend celuy qu'elle peut praetendre en toute la France, j'acquiesce que Ton en face une Religion for- melle, a la reserve de ces deux pointz sus marqués, puis- que, comm'il dit, on ne changera rien aux Règles, quil loue et proteste estre « excellentes (-) », car c'est son mot, que le fruit de cette Congrégation est admirable, mais que la racine n'en vaut rien ; combien que Nostre Seigneur die * qu'un mauvais arbre ne sçauroit pro- * Matt. duire bon fruit. Je voy aussi que, par ce moyen, on contentera une quantité de censeurs, et les pères et parens des filles qui ne les veulent pas donner a Dieu que pour gaigner les portions qu'elles emporteroyent silz les donnoyent a quelque chetif mari. L'importance est, ma très chère Fille (et je vous le dis de tout mon cœur qui vous parle en simplicité et totale confiance, car en somme vous estes certes ma fille de mon cœur plus que vous ne sçauries penser, ni moy dire), l'importance est que (3) j'ay fait cet acquiescement avec une douceur et tranquillité, ains avec une suavité nom- pareille. Et non seulement ma volonté, mais mon juge- ment a esté bien ayse de se sousmettre et rendre l'homage quil doit a celuy de ce digne Prselat ; car, ma Fille, que prsetens-je en tout ceci, sinon que Dieu soit glorifié et que son saint amour soit respandu plus abondamment dans le cœur de ces âmes qui sont si heureuses que de se dédier toutes a Dieu ? Les Congrégations et les Religions (i) Ici commence la seconde coupure qui avait été insérée dans le texte bâti, mentionné à la page précédente, note (2); elle se termine au mot « clausure ». (2) Mémoire de M^»" de Marquemont. ( 3 ) Ce qui suit jusqu'à « toutes a Dieu » (dernière ligne) se trouvait interpolé dans la lettre indiquée note (2) de la page précédente.  140 Lettres de saint François de Sales ne sont point différentes devant la divine Majesté, car, selon icelle, les vœux des unes sont aussi fortz que ceux des autres ; et le tiltre de Congrégation n'estant pas si spécieux ni honnoré, m'en playsoit davantage. Mays, de bon cœur (voyes vous, ma Fille, je dis très suavement), j'acquiesce que ce soit une Religion, pourveu que, par la douceur des Constitutions, les filles infirmes y soyent receues, les femmes vefves y aient retraitte, et les fem- mes du monde quelque refuge pour leur avancement au service de Dieu. La Règle de saint Augustin est beau- coup plus douce que les nostres, soit pour la clausure, soit pour tout le reste ; de sorte que, gardans nos Règles, nous ferons plus que saint Augustin n'ordonne, et le tiltre de la Règle saint Augustin honnorera nos Règles sans y rien adjouster. Je voudrois bien vous dire beaucoup de choses sur ce sujet, affin que, quand Monseigneur l'Archevesque vous parlera, vous sceussies un peu mieux l'entendre ; mays pour tout, il suffira que vous l'asseuries quil ne treuvera point en moy un esprit contrariant ni qui veuille surna- ger. Ne serois-je pas un chetif homme, si je voulois m'estimer et relever mon esprit en comparayson des autres ? Item, il faudra dextrement et doucement luy faire savourer le prix des entrées des séculières qui viennent pour rabiller un peu leurs espritz (0. En Italie on n'en a pas tant besoin, ains nullement, car il y a tant de compaignies de femmes vefves, mariées, filles, ou les exercices se font ; les maysons et quartiers de femmes, si retirés du reste de leur mesnage ; plusieurs Congré- gations libres ou elles se retirent, et mille autres telles commodités. Joint qu'en Italie, sur tout a Romme, l'esprit des femmes y est tellement soupçonné, que non seulement on ne permet pas aux hommes de parler aux Religieuses a la treille sans expresse et très rigoureuse licence, mais mesme on ne le permet pas aux femmes sans cette mesme licence ; on ne permet pas aux prestres, (i) Voir plus loin la lettre du lo juillet au Cardinal Bellarmin.  Année 1616 14 I quelz qu'ilz soyent, fussent ilz Jésuites, Capucins et tout ce qu'on voudra, d'}^ aller dire Messe, s'il n'a licence par escrit. Or, de deçà, les Carmelines mesme ne font pas ces misteres, par ce que les meurs et humeurs ne requiè- rent pas tant de barricades ni de desfiances. C'est pour- quoy, sil plait a Monseigneur de Lyon, on pourra ayse- ment modérer cette rigueur pour l'entrée des dames et autres bonnes femmes qui, pour une si sainte fin, vou- dront entrer. ( ï ) On parle fort de faire une Congrégation a Cham- beri (2), on en demande en plusieurs endroitz (3); c'est pourquoy je supplie Monseigneur l'Archevesque de ter- miner cet affaire, en sorte qu'on puisse imprimer les Règles bientost (4). Ma très chère Fille, pries Dieu quil remplisse mon cœur de son amour; j'en fay de mesme pour le vostre, qui me semble, certes, estre vrayement mien, comme le mien est tout vostre. Je respondray a la difficulté des désirs a la première commodité (5). Je salue nos chères Seurs, sur tout les deux nostres (6). Il ny a pas grand hazard que le livre de V Amour de Dieu soit retardé; je le fay cependant revoir (?). Je salue M. l'Aumosnier, que j'espère voir parmi ce Caresme (^). (9) Tout maintenant je viens de recevoir une lettre de  ( I ) L'alinéa suivant est inédit. (2) Cette fondation de Chambéry fut retardée jusqu'au 17 janvier 1624. Elle se fit par la Mère de Chantai elle-même, accompagnée de quelques Reli- gieuses d'Annecy. (3) Voir ci-dessus, note ( 2 ), p. ici, et ci-après, pp. 162, 163. (4) Les Règles et Constitutions ne purent être imprimées qu'en i6ig. ( 5) C'est dans sa lettre du 17 avril que le saint Fondateur résout la « diffi- « culte des désirs. » (6) Sœur Péronne-Marie de Chastel et Sœur Marie-Aimée de Blonay. (7) Dès le 28 mars 1616, Pierre Rigaud s'était muni du Privilège d'impri- mer, et n'attendait plus que la communication du manuscrit. Celui-ci fut porté à Lyon au commencement de mai, par M. Michel Favre. (Cf. notre Introduction au Traitté de V Amour de Dieu, tome IV, p. xv.) ( 8 ) Claude de Sevelinges, aumônier de Belleville et confesseur de la Visitation de Lyon (voir tome XV, note ( 2 ), p. 333), ne vint à Annecy qu'au début de l'été. (9) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 137.  142 Lettres de saint François de Sales ma Seur Françoise Hieronime (0; je respondray a la première commodité, car il faut donner les lettres. A ma très chère Fille en N. S. Ma Seur Marie Jaq« Favre, Supérieure de la Congrégation de la Visitation. A Lion. (-) Le 2 febvrier. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière. (i) Sœur Françoise-Jéronyme de Villette (voir ci-après, Lettre mclxxiii, p. 159). (2) Voir ci-dessus, note (i), p. 137.  MCLXIII A MADAME DE LA FLÉCHERE Promesse d'une visite au retour de Mionnas. — François de Sales va dire la sainte Messe à la Visitation pour M. de la Fléchère malade. Annecy, 9 février 1616. Hier, une heure de nuit, vostre lettre me fut rendue. Ce matin j'ay envoyé pour sçavoir si M. Faber estoit parti (M; on m'a fait dire qu'oiiy, cependant le voyla encor. Or il ne se faut point estonner, ma chère Fille, car, Dieu aydant, ce ne sera rien. Nous prierons a cett'inten- tion ; et je m'en vay aujourd'huy a Mionnaz (2), d'où je repasseray vers vous tout en passant, au retour, affin de visiter vostre malade, et rendray par mesme moyen le compliment avec M. le Comte qui est guéri (3). (i) Jean Favre, médecin d'Annecy (voir tome XV, note ( i ), p. 147), qui devait se rendre à Rumilly pour visiter M. de la Fléchère, gravement malade. (Voir la lettre suivante.) (2) Seigneurie d'Ame de Montfort, près de Rumilly. (Cf. le tome précédent, note ( 1 ), p. 60.) ( 3 ) Fils de Philibert de la Forest et de Madeleine Fléard, et frère de M"'« de la Fléchère, Charles de la Forest était baron de la Bâtie-d'Albanais, d'Apremont, etc., et, depuis février 1594, comte de Verel et Dullin. Par ses exploits mili- taires, il mérita les faveurs de son souverain, dont il devint conseiller et chambellan. D'abord marié à Claudine de Bellegarde de Montagny, veuve de Pierre de Maillard, le comte épousa en secondes noces (contrat dotal du 28 mai 1612) Marguerite de Seyssel-la-Chambre, et mourut en décembre 1629.  Année 1616 143 Je vay dire la sainte Messe a la Visitation, ou je feray la recommandation du malade, que je prie Dieu vouloir bénir de sa sainte main, avec vostre cœur et toute vostre mayson. Je suis tout parfaitement vostre. 9 febvrier 16 16. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin Archives de l'Etat.  MCLXIV A M. PHILIPPE DE QUOEX (0 (fragment) Veuvage de M*"^ de la Fléchère. — Eloge de cette « parfaite brebis » d'un bercail affligé. Annecy, vers le 12 février (2) i6i6. J'appris au soir la nouvelle du deces de nostre bon monsieur de la Flechere (3). O Dieu, avec quelle ardeur sa chère vefve va-elle sacrifier le sacrifice de toute jus- tice * a Dieu ! Quand je n'aurois que cette parfaite brebis * Ps. iv, 6. en mon bercail, je ne me sçaurois fascher d'estre Pasteur de cet affligé diocèse. Apres nostre madame de Chantai, je ne sçai si j'ay fait rencontre d'une ame plus forte en un cors féminin, d'un esprit plus raysonnable et d'une humi- lité plus sincère. Je ne doute nullement, Monsieur mon cher Confrère, (i) Philippe de Quoex (voir tome XII, note ( i ), p. 30) est indiqué pour destinataire dans la Vie de M'"^ de la Fléchère par la Mère de Chaugy, d'où notre texte est tiré. (2) Il est difficile de préciser exactement la date de ce fragment, ignorant celle de la mort de M. de la Fléchère. Le 8 février, TEvêque de Genève apprit la maladie du gentilhomme (voir la lettre précédente); le 17, il écrit à sa veuve : « Les sentimens de l'absence du defunct ne peuvent pas si tost passer » (voir ci-après, p. 143) ; le décès était donc survenu déjà depuis plusieurs jours. (3) Voir tome XIV, note ( i ), p. 55.  144 Lettres de saint François de Sales que passant si proche d'elle, vous ne l'allies visiter. Portes luy l'asseurance que mes prières luy sont acquises pour le repos de son cher defunct et pour sa consolation particulière, que je m'asseure estre toute en ces deux *job, 1, 21. motz : Le nom de Dieu soit béni *^ sa volonté soit *Matt.,vi, 10, XXVI, faite *. 42. Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Sœur Madeleine de la Forestde la Fléchère,^ax\z Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy.  MCLXV  A MADAME DE LA FLECHERE  Affaires de tutelle. — Prudence et sainte indépendance en face du monde. — Les prétentions et les plaintes de M. Guidebois. — Un prédicateur de Carême. — Prochains arrangements à la cure de Rumilly. Annecy, 17 février 1616. Ma très chère Fille, Hier au soir seulement je receus vostre lettre et je respons ce matin, jour des Cendres. Il m'est advis que ces formalités de tuteur a vos enfans sont superflues, puisque tout est vostre et qu'aussi bien vostre Espoux nouveau ne vous demandera point de dote. Néanmoins, vous sçaves quel homme je suis pour les affaires du monde ; certes, je n'y entens rien du tout. C'est pourquoy je vous conseille de croire le neveu (O, qui, estant de la profession et ayant l'affection quil a pour vous, ne peut en cela que vous bien conduire. Mays il faudra pourtant bien faire sçavoir au monde vostre bonne intention envers vos enfans ; autrement il criera a la Philothee *Cï.lntrod.alaVie comme au loup garou *, et sera bien ayse de prendre ce (/^tj.,Part. IV,ch.i. g^jg|. . ^ quoy vostre protestation obviera suffisamment. Que sil ne s'en contente, il le faudra laisser crier et braire tant quil voudra, puisque le nouvel Espoux ne • Cf. Joan., II, uit. tient aussi point de conte de son tesmoignage *. (i) Prosper d'Avisé (voir ci-dessus, note ( i ), p. 98).  Année 1616 145 En vérité, il faut ayder M. Guydeboys (0 affin quil ayt sa pension tant que nous pourrons, car le pauvre homme seroit misérable sans cela et auroit grand sujet de se plaindre; et vous pouves penser de quel air il le feroit, puisque il le fait des a présent avec un'extreme doleance. Vous m'envoyeres donq les papiers et je vous renvoyeray ce que vous me marqueres, et Tassisteray en ce que je pourray, affin quil ne soit pas frustré de sa juste prétention. Et M. le Comte (2) n'en sçaura rien, ou sil le sçait, il n'aura point d'occasion de vous en sçavoir mauvais gré. Les sentimens de l'absence du defunct (3) ne peuvent pas si tost passer ; il suffit que, en la pointe de l'esprit, nous soyons bien resignés au bon playsir de Dieu, et que nous taschions de nous unir de plus en plus parfaitement au second Espoux. Demeures bien toute en luy et vives bien toute pour luy, ma très chère Fille, et je suis tout parfaitement Tout vostre. Nous avons un brave prsedicateur (4), je m'en res-jouis ( I ) Les Guy de Boex, Guideboex ou Guidebois, originaires de Cluses en Faucigny, y apparaissent déjà en 1356. Nobles régulièrement en 1585, ils sont réhabilités de noblesse en 1610. Jean-Jacques Guidebois, notaire, fut père, le i*"" juin 1586, de Jean-Fran- çois-Melchior, celui-là même dont le Saint parle ici, et qui devint, le 30 no- vembre 1603, prieur commendataire de Notre-Dame de Vion. Moins de deux ans après (18 février 1605), il résigna ce bénéfice, uni aux biens ecclésiastiques des Chevaliers des saints Maurice et Lazare, en faveur de Claude-François de la Fléchère, mari de la destinataire. M. Guidebois gardait la charge de pour- voir au service religieux du prieuré et à Thospitalité des pauvres et des lépreux. En 1610, il reçut les trois Ordres majeurs, les 5 juin, 18 septembre et 18 décembre. (D'après les Mém. de l'Acad. Salés., tome XI (1888), pp. 77, 230, Y Armoriai de Savoie et les R. E.) (2) Charles de la Forest, frère de M'"'^ de la Fléchère. (Voir ci-dessus, note (3), p. 142.) (3) M. de la Fléchère (voir la lettre précédente). (4) En 1616, le Carême fut prêché à Annecy par le P. Louis de la Rivière, de rOrdre des Minimes, alors supérieur du couvent de Valence. Le Conseil de Ville déclare, à la date du 4 avril, que « pour tant de belles doctrines et prédications quil nous a fourny, il est raisonnable de recognoistre tant de peine, puis quil s"est trouvé très rare en cest estât, et [a] contenté la Ville. » On convient de lui donner « soixante ducatons, » et de le faire accompagner « trois lieues loing par Tung des scindics, assisté de quelques conseillers, et jusques a la disné que sera faicte a la charge et despense de la Ville. » (Reg. I ETTRES VII 10  146 Lettres de saint François de Sales grandement. Vous Touires un peu sur la fin ( ^ ), et madame la Comtesse (2), a laquelle j'ay bien envie de donner de la modération en ses affections, selon le besoin que j'en voy par la démesurée ardeur qu'ell'a en la sollicitation de faire M. Nacot (3), vicaire. Or bien, nous sommes après a donner un fort bon coadjuteur au curé (4), et alhors tous ces inconveniens cesseront. Dieu soit a jamais au milieu de nos cœurs. Je salue la des Délib. municip.) Annecy rappela l'année suivante le P. de la Rivière pour la station quadragésimale. Le pieux Minime put donc voir de près François de Sales; il demeura émerveillé de ses hautes vertus. Prenant congé de ses auditeurs (avril 1616), il fit un éloge public de leur Evêque, ce qui lui attira les reproches du Serviteur de Dieu. « Vous avez tout gâté aujourd'hui en me flatant et en me louant avec exagération, » lui dit-il; « attendez, mon cher Père, attendez que je sois mort pour me louer. » (Ancien Ms. de l''An?tée Sainte.) Le Religieux obéit à ce commandement, et en 1623 revint en Savoie, employant plusieurs semaines « pour s'instruire pleinement de tout ce qui pouvoit appartenir à l'histoire de nôtre Bien-heureux... ; et ainsi bien informé de tout... se retira au Monastère de son Institut à Lyon, où il composa son livre ( I ). » (Charles-Auguste, Le Pourpris hist. de la Maison de Sales, An- nessy, 1659, p. 42.) Après trois siècles, cette Histoire du saint Evêque de Genève, au style antique et chargé d'images, se fait encore lire avec un charme tout particulier. L'auteur, passionné pour son héros, épuise toutes les compa- raisons pour l'exalter; quand il parle de ses vertus, on sent qu'il a pénétré bien avant dans cette âme de saint où Dieu avait fait surabonder ses dons de nature et de grâce. (Voir à l'Appendice I le fragment d'une de ses lettres à l'Evèque de Genève.) Le P. de la Rivière, Minime de Grenoble, était originaire de Romans. Il fut supérieur dans différents couvents de son Ordre, entre autres Montmerle; on lui confia aussi les charges de Procureur pour la nation française à Rome, de Visiteur général en France et de Collègue général ; il reçut ce dernier titre au 24*^ Chapitre général tenu à Rome en 1617. Il vivait encore en 1654. Lanovius le qualifie de « docte, célèbre, pieux orateur et théologien. » (Cht'o- nicon générale Ordinis Minimorum 141^-162^, etc., Parisiis, 1635; Rochas, Biographie du Dauphiné^ etc., Paris, 1860.) ( I ) M""^ de la Fléchère avait sans doute le projet de passer la fin da Carême à Annecy. (2) Philiberte de Beaufort, comtesse de Tournon (voir tome XV, note (2 ), p. I). ( 3 ) R'^ Nicolas Nacot, ecclésiastique prébende à Rumilly. (Voir ibid., note ( 3 ), p. I, et la lettre suivante.) (4) Au curé de Rumilly, Jean Viret. ( Voir le tome précédent, note ( i ), p. 259, et ci-après, p. 148.)  ( 1 ) II parut sous ce titre : La K« de l'Illustrissime et Reverendissime François de Sales, de tres-heureuse et glorieuse mémoire, Evesque et Prince de Genève, et Fondateur de l'Ordre des Damei delà yisitation; où sont contenues ses principales dictions, Vertus et Miracles. Par le R. P. Louys de la Rivière, de l'Ordre des Minimes. A Lyon^ chez Pierre Rigaud et Associez, rue Mercière, au coing de rue Ferrandiere, à l'Enseigne de la Fortune, 1625.  Année i6i6 147 chère compaigne (0 et la très chère nièce ( = ), quand vous luy escrires. Jour des Cendres. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( i) Probablement M'"'= de Mieudry. (Voir la lettre suivante.) { 2 ) Gasparde d'Avisé.  MCLXVI A MADAME DE MIEUDRY (0 Etre ce que Dieu veut : faibles de corps, mais siens de coeur. — Nouvelles difficultés dans le service paroissial de Rumilly. — L'Evêque se justifie humblement, sans blâmer ses détracteurs. — Les « caprices des hommes. »> — Soyons « vaysseaux bien profons » pour recevoir les grâces de Dieu. Annecy, 19 février 1616. Et moy certes, ma très chère Fille, j'oubliay a vous dire (2) que, sans nulle difficulté, vous mangeassies, avec M. vostre père (3) et vos enfans (4), de la chair; vostre complexion est asses lasse sans autre abstinence. Il faut estre ce que Dieu veut que nous soyons : foibles, vilz, abjectz, mais siens de cœur, d'intention et de resolution. Pour M. vostre mari (5) et le reste, vous en feres ce que (i) Gasparde de Cerisier (voir tome XIV, note ( i ), p. 83). (2) Le saint Evèque avait passé à Rumilly vers le 10 février (voir ci-dessus, Lettre mclxiii) et visité la destinataire; sa lettre est comme une suite de leurs entretiens. (3) Jacques de Cerisier (voir la lettre suivante). (4) M'ne de Mieudry eut trois enfants : Charles, cornette du seigneur du Marest, d'après Guichenon fut tué au siège de Montmélian (1630) ; Madeleine, héritière du château de Mieudry, épousa par contrat dotal du 15 avril 1632, Noël-Jean-François de Bellegarde. seigneur des Marches et d'Entremont ; Claude-Philiberte, à qui échut la maison d'Argis en Bugey, la porta en dot (10 mai 1632) à noble Jacques de Montmayeur, seigneur du Monet et de Ma- cognin. Elle mourut avant le 2 mai 1663. (■j) Sébastien Portier, seigneur de Mieudry et d'Argis, fils de Claude-  148 Lettres de saint François de Sales vous estimerés a propos ; je croy bien que ce ne sera pas trop de luy donner des conseilz, attendu quil craint Dieu, et quil faut avoir soin de bien nourrir ceux qui nourrissent bien cette sainte crainte, encor que ce soit avec imperfection. Le vicariat de Rumilly dépend du curé (0; ce que j'ay fait pour condescendre a Textreme instance qui m'a esté faite, c'est de luy permettre quil employast M. Nacot, si bon luy sembloit (2), sans pour cela empescher que Ton employast M. Charvet (3) a cet exercice, pour ceux qui n'auroyent pas agréé l'autre. Il se peut bien faire que j'aye mal fait en cela, et ce ne seroit pas un grand miracle; mais je ne le pense pas pourtant, a cause de la considération pour laquelle je l'ay fait et la liberté que chacun a de se prsevaloir des autres prestres ; outre que cela ne durera comme rien, Dieu aydant. Ne vous mettes nullement en peine de respondre a ceux qui m'en blas- meront ; car encor que je ne le pense pas, peut estre ont ilz rayson. Et pour vous, il vous suffit que je vous assis- teray bien et ne vous tromperay point, ains vous con- duiray le droit chemin de la pieté, avec un' affection et un zèle très invariable. Je considère les caprices des hommes sur le sujet du bon M. de Valence (4) : nous l'escoutons icy de très bon cœur, et moy, qui ay plus estudié en théologie que tous ceux de Rumilly ensemble, je treuve qu'en vérité il presche bien et utilement; on seroit bien ayse en des plus grandes villes de l'avoir (5). Il faut avoir patience, et prier Dieu quil nous face tous humbles, affin que, Lambert Portier et de Guillermine de Loche, Marié à Gasparde de Cerisier le 5 février 1602, il était, en 1612, lieutenant de la compagnie colonelle de Phi- libert de la Villiane, Douze ans plus tard, on le trouve gentilhomme de bouche du duc de Savoie, et capitaine en son fort et préside de Montmélian. Resté veuf le 10 août 1616, il meurt avant le 29 août 1633. ( I ) R** Jean Viret (cf. la lettre précédente, p. 146). (2) Voir ibid. (3) Charles Charvet (voir le tome précédent, note(i), p. 293). (4) Le P. Louis de la Rivière, que saint François de Sales désigne ainsi, parce que, comme on l'a dit ci-dessus, note (4), p. 145, il gouvernait à cette époque les Minimes de Valence. (5) Cf. ci-dessus, p. 136.  Année i6i6 149 comme vaysseaux bien profons, nous soyons capables de recevoir ses grâces en abondance. Je suis en vraye vérité tout vostre, ma très chère Fille, et Dieu soit la vie de vostre ame. Le XIX febvrier 16 16. A Madame Madame de Mioudry. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.  MCLXVII A M. JACQUES DE CERISIER (0 (billet inédit) Dispenses pour le Carême en faveur d'un malade. Annecy, 19 février 1616. Monsieur mon Cousin, Prenes, au nom de Dieu, tout ce qui sera requis pour vostre nourriture *. La grandeur de vostre maladie ne * Cf. Epist.praeced. permet aucune reserve de viandes pour vous, a qui je ne cesseray jamais de souhaiter toute sainte prospérité, et a madame ma cousine (2), ni d'estre de tout mon cœur. Monsieur mon Cousin, Vostre plus humble, très affectionné cousin et serviteur, Francs E. de Genève. 3^ Jour du Caresme 16 16. A Monsieur [Monsieur] de Cirisier. Revu sur TAutographe appartenant à M^^^ la comtesse d'Asnières de Sales, à Metz (Annecy). ( I ) Jacques de Cerisier, écuyer, seigneur d'Argis en Bugey, qui fut capitaine du château de Miolans. Par contrat dotal du 6 mars i 598, il épousa en secondes noces Claudine Portier, sœur de son gendre, le seigneur de Mieudry. (Voir ci-dessus, note (5), p. 147.) (2) La femme du destinataire, Claudine, fille de Claude-Lambert Portier et de Guillermine de Loche, Elle teste le 18 mars 1632.  150 Lettres de saint François de Sales MCLXVIII a la mère favre supérieure de la visitation de lyon (fragments) Humbles réponses qu'il faudra faire à l'Archevêque de Lyon. — « L'esprit parfait et apostolique, n propre esprit de la Visitation. — Quel amour peut vivre sans anxiété. Annecy, [février] 16 16 (i). Ma très chère Fille, Si Monseigneur T Arche vesque ( = ) vous dit ce qu'il m'a escrit, vous luy respondres que vous aves esté laissée la pour servir a l'establissement de vostre Congrégation de tout vostre petit pouvoir; que vous tascheres de bien conduire les Seurs selon les Règles de la Congrégation ; que s'il plaist a Dieu, après cela, que cette Congrégation change de nom, d'estat et de condition, vous vous en rapportes a son bon playsir, auquel toute la Congrégation est entièrement voiiee ; et, qu'en quelle façon que Dieu soit servi en l'assemblée ou vous le serves maintenant, vous seres satisfaite. En effect, ma très chère Fille, il faut avoir cet esprit la en nostre Congrégation, car c'est l'esprit parfait et apostolique. Que si elle pouvoit estre utile a establir plu- sieurs autres Congrégations de bonnes servantes de Dieu sans jamais s'establir elle mesme, elle n'en seroit que tant plus aggreable a Dieu, car elle seroit moins sujette a l'amour propre. (3) Croyes moy, ma chère Fille, j'ayme parfaitement nostre pauvre petite Congrégation, mays sans anxiété, sans ( I ) Ces lignes sont extraites d'un texte absolument bâti, placé par tous les éditeurs, depuis 1641, en octobre i6iy. (Cf. note (3) ci-dessous.) On ne peut douter que les décisions données ici par le saint Fondateur n'aient suivi de près la lettre du 2 février 1616 à la même destinataire. (2) Me"" Denis-Simon de Marquemont, archevêque de Lyon. (3) Ici, l'édition de 1641 avait interpolé un assez long passage composé de plusieurs fragments de la lettre du 2 février 1616 à la Supérieure de la Visi- tation de Lyon. (Voir ci-dessus, les notes (2), p. 138, ( i ) et ( 3 ), p. 139.)  Année i6i6 151 laquelle l'amour n'a pas accoustumé de vivre, pour Tor- dinaire; mays le mien, qui n'est pas ordinaire, vit, je vous asseure, tout a fait sans cela, et avec une très parti- culière confiance que j'ay en la grâce de Nostre Seigneur, que sa main souveraine fera plus pour ce petit et humble Institut que les hommes ne peuvent penser. (0 Et je suis, plus que vous ne sçauries croire, vostre. (2) Revu sur le texte inséré dans VHistoire de la Fondation du ler Monastère de la Visitation d'Annecy. (i) La phrase suivante ne se lit pas dans le texte que nous reproduisons, conforme du reste à celui de \6^i, sauf quelques divergences de style qui sont maintenues comme plus authentiques. (2) Après cette finale, les anciens éditeurs ajoutent un alinéa sur la mort de la jeune baronne de Thorens. On le retrouvera à sa vraie place, en septembre 1617.  MCLXIX A MADAME DE LA FLÉGHÈRE (inédite) Où croissent les lis agréables à TEpoux céleste. — L'ouvrage le plus doux, l'ouvrage le meilleur. — Députer Charles de la Fléchère vers le gouver- neur de Savoie. Annecy, 24 février 1616. Je vous voy, ma très chère Fille, selon ce que vous m'escrives, toute jettee sur les espines. O prenes courage, je vous en conjure ; c'est la ou les lis aggreables a vostre Espoux croissent * et se nourrissent mieux, et le mouton * Cf. Cant., n, : que Dieu volut luy estre immolé au lieu d'Isaac estoit arresté entre les espines *. Travailles fidèlement, ma * Gen., xxh, 13. très chère Fille, avec la pointe supérieure de vostre volonté, parmi ces ténèbres et sécheresses ; une once de l'ouvrage fait en cette sorte vaut mieux que cent livres de celuy qu'on fait entre les consolations et sentimens, et bien que celuy ci soit plus doux, l'autre néanmoins est meilleur. Je communiqueray de vostre affaire avec une bonne  IS2 Lettres de saint François de Sales cervelle et très bonne conscience, et vous escriray son advis (O, combien que tous-jours il faille croire monsieur vostre neveu (2). J'appreuve bien que vous envoyés vostre filz (3) faire la révérence a Son Excellence (4), puisque elle ne vous fait nulle response, ni a moy, a qui néan- moins ell'a respondu sur un'autre point dont je luy escrivois ; et selon que vous la verres inclinée, vous pourres par après recourir a Son Altesse, tandis que la mémoire est fraische du defunct (5). Je suis sans fin, tout parfaitement vostre, ma très chère Fille, dans le cœur delaquelle vive a jamais et règne Jésus. Amen. xxiiii febvrier 16 16. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Riom. (i) Voir ci-après la lettre du i®'' mars à la même. (2) Prosper d'Avisé (voir ci-dessus, note ( i ), p. 98, et p. 144). (3) Charles de la Fléchère (voir ci-après, p. 163). (4) Le marquis de Lans, Sigismond d'Est, gouverneur de Savoie. (5) M. de la Fléchère, mari de la destinataire, de son vivant gentilhomme ordinaire de la Chambre de Son Altesse le duc de Savoie. Sa veuve désirait sans doute que leur fils recueillît, avec 200 pistoles promises au défunt, la succession des bonnes grâces et de l'amitié du prince. (Voir pp. 169, 170.)  MCLXX AU COMTE PROSPER-MARC DE TOURNON (0 ( INÉDITE ) Un prétendant au sacerdoce qui a besoin d'étudier davantage. Annecy, 27 février 161 6. Monsieur, Ce porteur a esté le bien venu pour le contentement que ( I ) L'adresse manque à l'Autographe, mais le ton de ces lignes, les nouvelles de « madame ma cousine », le titre de « parent » que le Saint prend à l'égard du destinataire, désignent sûrement le comte de Tournon, alors à Turin.  ANNHh 1616 153 j'ay eu de sçavoir de vos nouvelles et le désir que j'aurois de servir son Ordre ; mais il a si peu de lettres, que je ferois grande conscience de luy donner l'Ordre de pres- trise sil n'estudie beaucoup davantage (0. C'est pourquoy je luy ay fait sçavoir quil ne revint pas qu'avec cette pro- vision-la. Au reste, il vous rendra tesmoignage de la santé de madame ma cousine (2) et de tout ce que vous aves de plus cher de deçà. Ainsy puissies vous jouir heureusement d'une bonne et longue prospérité, selon le souhait, Monsieur, de Vostre plus humble, très affectionné parent et serviteur, France, E. de Genève. XXVII febvrier 16 16. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Bourg-en-Bresse. (i) Il est impossible de dire quel était ce Religieux protégé par le comte. (2) La comtesse de Tournon, femme du destinataire.  MCLXXI AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l" Reconnaissance de la province envers Son Altesse pour l'établissement des Barnabites à Annecy. — Celui qui a planté un arbre le doit arroser. — Deux prieurés en ruine spirituelle et matérielle. — Le collège d'Annecy antagoniste de celui de Genève. Annecy, 29 février 1616. Monseigneur, Il y a deux ans que par commandement de Vostre Altesse les Pères Barnabites ont esté receus en cette ville pour la direction du collège (0, et ne se peut dire combien de fruit spirituel ilz y ont fait et en toute cette province ; qui a donné un grand sujet aux gens de ( I ) Le collège Chappuisien, cédé aux Barnabites par le contrat du 5 juil- let 1614, et dont les Pères n'avaient pu prendre possession qu'au mois d'octobre suivant. (Voir le tome précédent, note (4), p. 228.)  154 Lettres de saint François de Sales bien de souhaiter plus ardemment toute sorte de pros- périté a Vostre Altesse, de laquelle Tauthorité nous avoit prouveus de ce bonheur. Mais, Monseigneur, puisque la providence de Vostre Altesse a planté ce bon arbre fruitier en cette province, c'est a elle mesme de Tarrouser, affin que, par la grâce de Dieu, il puisse croistre. Ce collège est extrêmement pauvre pour la grandeur des charges qui y sont ; et si on ne le secourt par addition de quelques revenus, ces bons Pères y vivront avec tant d'incommodités, que non seule- ment ilz ny pourront pas faire les progrès que leur pieté et les nécessités de ce païs requièrent. Or, les moyens de leur accommodement seront fort aysés, pour peu quil playse a Vostre Altesse d'affection- ner cette sainte œuvre ; car nous avons icy deux prieurés ruraux, dont le plus grand n'excède pas la valeur de cent ducatz annuelz, par l'union desquelz ce collège seroit fort soulagé. Et, ce qui est plus considérable, comme ces prieurés seroyent utiles a l'entretenement de ces Pères, ces Pères seroyent réciproquement extrêmement utiles a l'entretenement des prieurés, qui, comme la pluspart des bénéfices réguliers de ce païs, s'en vont en ruines quant aux choses temporelles devant les hommes, et quant aux services spirituelz devant Dieu, qui sans doute en est Jerem., xii, ii. grandement ofFencé : (*) Et non est qui recogitet corde*. L'un de ces prieurés s'appelle Silingie (O et l'autre Saint Clair (2), tous deux a une lieuë d'icy, fort propres  (*) Et il n'y a personne qui le prenne à cœur. ( I ) En 1039, Sigibold, seigneur burgonde, et sa femme Udtona, donnèrent à l'abbé de Cluny l'église de Sillingy en Genevois et une manse au même lieu. Le prieuré de Bénidictins ainsi établi, passa vers la fin du siècle sous la dépendance de celui de Contamine-sur-Arve, Parmi les prieurs de Sillingy figurent le célèbre Cardinal de Brogny; François de la Fléchère, parrain de saint François de Sales (voir tome XI, note ( i ), p. 3), et Bérard Portier, de Rumilly, qui, en vertu d'un Décret apostolique, remit son prieuré aux moines de Talloires (1630). Ceux-ci le desservirent par deux Religieux, un prieur et un sacristain jusqu'en 1766, où D. Gibal d'Arcollières, dernier prieur, fut rappelé à son monastère. (D'après les Notes de M. le chayioine Gonthier.) (2) Connu jadis sous le nom de prieuré de La Cluse-Saint-Bernard, ou  Année i6i6 155 a rintention que je représente a Vostre Altesse, laquelle je supplie très humblement, et sous ladveu de sa bonté je la conjure, par l'amour qu'elle porte au service de Dieu et de l'Eglise et par la paternelle aifection qu'elle a envers ce pais, de vouloir estroittement embrasser et presser le bien de ce pauvre collège, qui est au cœur de la Savoye et vis a vis, comme antagoniste, de celuy de Genève ('), et qui est la première retraitte que cette vénérable Con- grégation des Pères Barnabites a eue deçà les monts, sous les favorables auspices de Vostre Altesse, laquelle en aura beaucoup de gloire en ce monde entre les serviteurs de Dieu, et en l'autre encor davantage entre les Anges et les Saintz de Paradis. simplement de La Cluse, le prieuré de Saint-Clair avait été fondé à une époque reculée par les comtes de Genève, qui y appelèrent des Religieux de Gigny en Franche-Comté. Le monastère était situé dans un défilé du Fier, à côté d'un rocher sur lequel les Romains avaient autrefois élevé un temple, dédié, selon les uns à Mercure, selon d'autres à Jupiter. Après les comtes de Genève, les principaux bienfaiteurs furent les seigneurs de Menthon. Deux personnages de cette maison, Robert et Rodolphe, oncle et neveu, élus suc- cessivement prieurs (1458-1523), restaurèrent à grands frais les bâtiments et méritèrent à leur famille le droit de nomination. La demande de TEvêque de Genève au duc de Savoie eut plus de succès pour Saint-Clair que pour Sillingy. Malgré de nombreuses oppositions, Fran- çois de Sales, fort de l'autorisation de Charles-Emmanuel, après une enquête de commodo et le consentement de son Chapitre, décréta, le 18 novembre 1621, l'union du prieuré au collège des Barnabites d'Annecy. Il déclara toutefois que cette union n'aurait son effet qu'au décès du prieur Sonnerat. Celui-ci mourut en octobre 1641. D'après les Notes de M. le chanoine Gonthier.) ( i) Décrété par arrêt du Conseil général de Genève, le 28 février 1428. et bâti en 1429 aux frais d'un riche et pieux négociant, François de Versounex. cet établissement porta longtemps le nom de « Grande Eschole. » L'ensei- gnement y était absolument gratuit, et la seule redevance exigée des élèves était la récitation quotidienne d'un Pater et d'un Ave Maria pour le salut de l'âme du fondateur. Lorsque le protestantisme fut adopté comme religion d'Etat, les Conseils de Genève cherchèrent à mettre l'instruction publique en harmonie avec les principes de la Réforme. Le recteur avait quitté la ville et la désertion s'était mise parmi les élèves. L'Ecole fut alors transférée (l'^^s) au couvent des Cordeliers de Rive, laissé libre par le départ de ses habitants ; mais le local étant délabré, la construction d'un nouvel édifice fut résolue et s'exécuta en 1558 dans les jardins attenant à l'Hôpital du Bourg-de-Four. Calvin eut l'initiative de cette seconde translation de l'Ecole Versonnex. Il s'occupa aussi de réformer les études, et rédigea des règlements qui furent promulgués en grande cérémonie, le 5 juin 1559, dans l'ancienne cathédrale de Saint-Pierre, transformée en temple protestant. Théodore de Bèze fut nommé « recteur de l'Académie et principal du Collège. » (D'après r//î5/oir^ du Collège de Genève, I""*^ Partie, par Thévenaz; Genève, 1896.)  1^6 Lettres de saint François de Sales Ce pendant, sur cet heureux présage, je fay très hum- blement la révérence a Vostre Altesse, comme estant, Monseigneur, Son très humble et très obéissant orateur et serviteur, France E. de Genève. Annessi, le 29 febvrier 1616. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.  MCLXXII AU cardinal FRÉDÉRIC BORROMÉE ARCHEVÊQUE DE MILAN (0 Remerciements pour un envoi de reliques de saint Charles. — Le culte du glorieux Cardinal s'accroît en France et en Savoie. Annecy, 29 février 1616. Illustrissimo et Reverendissimo Signor Padron mio colendissimo, Suavissima è stata verso di me la carità santa di Vo- stra Signoria 111*"* che si è degnata di conservar memoria  Mon très honoré, illustrissime et Révérendissime Seigneur, Combien suave a été pour moi la charité sainte de Votre Sei- gneurie Illustrissime, puisqu'elle a daigné garder le souvenir d'un ( I ) Issu comme saint Charles, son cousin-germain, d'une famille patricienne du Milanais, Frédéric naquit le i8 août 1564, de Jules-César Borromée et de Marguerite Triulzio, Il aspira jeune encore à Tétat ecclésiastique, et aurait même embrassé la vie religieuse si sa santé le lui eût permis. Des mains de son saint parent il reçut l'habit clérical et la tonsure, et alla étudier succes- sivement à Bologne, à Pavie et enfin à Rome, où Dieu lui ménagea la grâce d'avoir pour directeur de sa conscience saint Philippe de Néri et d'assister à son bienheureux trépas. Sixte-Quint le créa Cardinal en décembre 1587, déclarant en plein Consistoire quil répondait ainsi au vœu général; car si Borromée était jeune d'années, il était déjà consommé en vertu. A la mort de Gaspard Visconti, premier successeur de saint Charles, le Pape nomma au  Année i6i6 157 di sogietto tanto indegno corne io sono, et di darne un segno tanto amabile corne è stato il dono sacro délie venerandissime reliquie del gran San Carlo, ricevute da me per via di Monsignor di Belley, Praelato di gran virtù (0. Et non sô corne io possa mai ringratiarne corne si conviene Vostra Signoria 111'"*, senon facendoli humi- lissima riverentia et restando nel silentio quanto a questo, con darglie perô questo grato raguaglio, che in questi  sujet aussi indigne que je le suis, et m'en donner un si précieux témoignage par le présent sacré des vénérables reliques du grand saint Charles, reçues par l'entremise de Monseigneur de Belley, Prélat de grande vertu (0. A la vérité, je ne sais comment en remercier dignement Votre Seigneurie Illustrissime, si ce n'est en lui offrant mes très humbles hommages et en me renfermant dans le silence à cet égard. Je vous donnerai néanmoins une agréable nouvelle, Monseigneur : dans ces pays et par toute la France, la siège de Milan le Cardinal Frédéric. Celui-ci. malgré les résistances de son humilité, dut obéir, et fit son entrée solennelle dans sa ville archiépiscopale le 27 août 1595. Héritier du titre et de la dignité de son glorieux cousin, le nouvel Archevêque sembla faire revivre encore sa haute sainteté. Comme lui, il se montra énergique défenseur des droits de l'Eglise, observateur fidèle des sacrés Canons, protecteur des Religieux et vrai père de son peuple, surtout dans les temps de famine et de peste. Pour enlever tout soupçon de favori- tisme de famille, le pieux Prélat refusa longtemps de travailler à la canoni- sation de saint Charles ; mais, blâmé à ce sujet par Clément VIII. il consentit à s'occuper de cette Cause avec ses évèques suffragants, au septième Concile provincial tenu en 1609. A la sainteté, Frédéric Borromée joignit une science éminente ; très économe de son temps, il put écrire un grand nombre d'ouvrages, publiés seulement après sa mort. Seule, la fondation de la Bibliothèque Ambrosienne suffirait à immortaliser son nom; il l'ouvrit le 8 décembre 1605 et la dota à grands frais de rares et précieux manuscrits. Riche de mérites, il mourut en réputation de sainteté le 20 septembre 1631; sa dépouille mortelle repose dans le Dôme de Milan, devant une image vénérée de la Madone. (D'après Rivola, Vita Jel Card. Federico Borromeo (Milano, Ripamonti, 1656), et Moroni, Diiionario di erudi\ione storico-ecclesiastica, Venezia, vol. VI, 1840.) Le Cardinal Frédéric Borromée avait apprécié de bonne heure François de Sales, car il fut l'un des témoins de cet examen mémorable où le jeune Prévôt ravit par la profondeur de sa doctrine le Souverain Pontife lui-même (1599). En 1(115, quand le Saint se rendit en pèlerinage à Milan, le successeur de saint Charles lui prodigua les témoignages de son estime et de sa vénération. (Voir le tome précédent, note ( i ), p. i.) ( I ) Ms"" Jean-Pierre Camus fvoir tome XIV, noie ( i ), p. 139).  1^8 Lettres de saint François de Sales paësi di qua et per tutta la Francia si dilata et amplifica excellentemente la gloria et divotione di quel beatissimo Santo, con ammiratione et stima cordialissima délia sua perfettissima santità. Et qui in particolare, il giorno délia sua festa, Mon- signor Arcivescovo di Lione essendo venuto per favorirme délia sua prsesenza, fece il sermone nella chiesa de'nostri Padri Barnabiti con tanta eloquentia apostolica, che tutti ne restassimo rapiti di dolcezza et suavità (0, et non si puô dire con che gusto furono sentite le laudi di quel Santo. Et col mezzo délie reliquie sue sonno seguite gratie in molti infermi, il che fa credere che Iddio vuole che la veneratione di quel suo Servo cresca e fiorisca in queste bande. Se io havessi copia et uso maggiore délia lingua ita- liana et non temessi di esser importuno a Vostra Signoria 111""*, mi stenderei in altre particolaritâ ; ma è anche ra- gionevole che io stia nelli termini del respetto dovuto aU'excellentissima dignità sua, et che basciandoli humi- lissimamente le sacratissime mani et preghandoli ogni  gloire et le culte de ce bienheureux Saint s'accroissent et s'étendent merveilleusement, et sa parfaite sainteté est toujours plus admirée et estimée. Ici, en particulier, le jour de sa fête. Monseigneur l'Archevêque de Lyon qui m'avait favorisé de sa visite, prononça le sermon dans l'église de nos Pères Barnabites avec une telle éloquence apostolique, que tous nous en demeurâmes ravis de douceur et suavité (0 ; l'on ne saurait dire avec quelle satisfaction furent écoutées les louanges de ce Saint. Des grâces pour beaucoup de malades ont été obtenues au moyen de ses reliques ; ce qui fait croire que Dieu veut que la vénération pour son Serviteur croisse et fleurisse de nos côtés. Si j'avais plus de connaissance et d'usage de la langue italienne et si je ne craignais de me rendre importun à Votre Illustrissime Seigneurie, je m'étendrais sur d'autres particularités ; mais il est bien raisonnable que je demeure dans les termes du respect dû à sa très haute dignité. Aussi, baisant très humblement vos mains sacrées (i) Voir ci-dessus, note (4), p. 90.  Année i6i6 159 vera prosperità, finisca protestando di restar eterna- mente, Di Vostra Signoria III'"^ et R'"% Humilissimo et divotissimo servo, Franc'', Vescovo di Geneva. XXIX di febbraio 16 16, in Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Milan, à la Bibliothèque Ambrosienne . et VOUS souhaitant toute vraie prospérité, je termine par la protes- tation de vouloir demeurer à jamais. De Votre Seigneurie Illustrissime et Révérendissime, Le très humble et très dévoué serviteur, François, Evêque de Genève. 29 février 1616, à Annecy.  MCLXXIII A LA SOEUR DE CHEVRON-VILLETTE NOVICE DE LA VISITATION DE LYON (0 Des racines qu'on ne peut arracher, mais qui ne doivent pas produire de fruits. — Combattre sur terre, se reposer au Ciel. — N'être ni « pleureuse ni plaignante ». — Remède à la colère. Annecy, [fin février ou mars] 1616. Je me représente vostre lettre, ma très chère Fille, en laquelle avec tant de sincérité vous me descrives vos ( I ) Esprit très vif, naturellement hautain et indépendant, selon son propre témoignage, Sœur Françoise-Jéronyme de Villette eut plus d'une lutte à sou- tenir au début de son noviciat. Le Saint semble répondre ici à ses difficultés, et peint si bien son caractère que, selon toute apparence, cette lettre lui a été adressée. — La date approximative se déduit de diverses remarques faites sur la correspondance de cette époque entre le Fondateur et la Supérieure de la Visitation de Lyon. (Cf. ci-dessus, pp. 141, 142.) Parente de François de Sales et de la Mère Marie-Jacqueline Favre, Jéro- nyme était née en 1593 de Pierre de Chevron-Villette. seigneur de la Couz, de la Bavoysière, etc.. et de Simonne, dame de Bussy et Gevressia. L'enfant avait à peine trois ans quand son père, envoyé en Suisse comme ambassadeur du duc de Savoie, fut empoisonné par les hérétiques. Plus tard, au moment où le monde allait l'entraîner, Vlntroduction à la Vie dévoie tomba entre les  i6o Lettres de saint François de Sales imperfections et vos peines, et voudrois bien pouvoir correspondre au désir que vous aves d'apprendre quelque remède de moy. Mays, ni le loysir ne le permet, ni, comme je pense, vostre nécessité ne le requiert pas ; car certes, ma très chère Fille, la pluspart de ce que vous me marques n'a point d'autre remède ordinaire que la suite du tems et des exercices de la Règle en laquelle vous vives. Il y a mesme des maladies corporelles des- quelles la cure dépend du bon ordre de la vie. L'amour propre, l'estime de nous mesmes, la fause liberté de l'esprit, ce sont des racines qu'on ne peut bonnement arracher du cœur humain, mais seulement on peut empescher la production de leurs fruitz, qui sont les péchés ; car leurs eslans, leurs premières saillies, leurs rejetons, c'est a dire leurs premières secousses ou premiers mouvemens, on ne peut les empescher tout a fait tandis qu'on est en cette vie mortelle, bien qu'on puisse les modérer, et diminuer leur quantité et leur ardeur par la prattique des vertus contraires, et sur tout de l'amour de Dieu. Il faut donq avoir patience, et petit mains de la jeune fille, et lui inspira, avec une solide piété, le désir de la vie religieuse. Sa mère s'étant établie à Lyon, M"^ de Villette fut des pre- mières à visiter les Sœurs fondatrices de la Visitation, des premières aussi à se joindre à elles. Le 2 juillet 1615, M^"" de Marquemont, en présence de saint François de Sales, lui donna le voile des Filles de Sainte-Marie. (Voir ci-dessus, note (2), p. 18.) Deux ans après, la Novice prononçait ses vœux. Elle resta peu à Lyon; au mois d'août 1620, on la trouve Assistante et Directrice à Mou- lins; en 1622, elle est Supérieure de la fondation de Saint-Etienne. A peine y a-t-elle terminé ses six ans de gouvernement, qu'elle succède à Dijon à la Mère Marie-Marguerite Michel, établit deux nouvelles Maisons, Beaune (1632) et Semur (1633), et va fonder à Chalon-sur-Saône le 22 janvier 1636. Deux triennaux à Rouen (1643-1650), deux à Melun (1650-1656) et deux encore à Chalon (1657-1663), complétèrent ses quarante années de supériorité. Cette grande ouvrière du Père de famille entra en 1665 dans le repos éternel qu'elle avait si bien mérité. (Archives de la Visitation d'Annecy.) La Mère Françoise-Jéronyme de Villette a une physionomie à part au milieu des premières Supérieures de l'Institut. Faite pour l'action, soucieuse de garder intact le dépôt des Règles, rigide dans son zèle pour l'observance, elle sut se faire toujours estimer et respecter de ses inférieures; mais peut-être rappela-t-elle un peu sévèrement à l'ordre de vénérables Supérieures dont elle ne pouvait, de loin, apprécier exactement la conduite. Si besoin était, elle se justifierait elle-même par cette parole qu'elle se plaisait à répéter : « J'aime mieux qu'on m'estime sévère que relâchée. » (Voir sa Vie dans VAfinée Sainte, tome VIII, p. 112.)  Année i6id 161 a petit amender et retrancher nos mauvaises habitudes, dompter nos aversions et surmonter nos inclinations et humeurs selon les occurrences; car en somme, ma très chère Fille, cette vie est une guerre continuelle *, et n'y * Job, vu, i. a celuy qui puisse dire : Je ne suis point attaqué. Le repos est réservé pour le Ciel, ou la palme de victoire nous attend. En terre, il faut tous-jours combattre entre la crainte et Tesperance, a la charge que Tesperance soit tous-jours plus forte, en considération de la toute puis- sance de Celuy qui nous secourt. Ne vous lasses donq point de travailler continuelle- ment pour vostre amendement et perfection. Voyés que la charité a troys parties : l'amour de Dieu, l'affection a soy mesme et la dilection du prochain. Vostre Règle vous achemine a bien prattiquer tout cela. Jettes maintes fois la journée tout vostre cœur, vostre esprit et vostre soucy en Dieu * avec une grande con- * Cf. Ps. uv, 2: fiance, et luy dites avec David * : Je suis vostre^ Sei- * Ps. cxvm, 94. gneur, sauves moy. Ne vous amuses point beaucoup a penser quelle sorte d'orayson Dieu vous donne, ains suives simplement et humblement sa grâce. En l'affection que vous deves avoir pour vous mesme, tenés vos yeux bien ouvertz sur vos inclinations desreglees pour les desraciner. Ne vous estonnes jamais de vous voir misérable et comblée de mauvaises humeurs. Helas ! traittés vostre cœur avec un grand désir de le perfectionner ; ayés un soin infatigable pour doucement et charitablement le redresser quand il bronchera. Sur tout, travaillés tant que vous pourrés pour fortifier la supérieure partie de vostre esprit, ne vous amusant point aux sentimens et consolations, mays aux resolutions, propos et eslans que la foy, la Règle, la Supérieure et la rayson vous inspireront. Ne soyes point tendre sur vous mesme : les mères ten- dres gastent les enfans. Ne so3^es point pleureuse ni plaignante; ne vous estonnes point de ces importunités et violences que vous sentes, que vous aves tant de peine a declairer. Non, ma Fille, ne vous en estonnes point ; Dieu les permet pour vous rendre humble de la vraye Lettres Vii ,,  102 Lettres de saint François de Sales humilité, abjecte et vile en vos yeux. Cela ne doit point estre combattu que par des eslans en Dieu, des diversions d'esprit de la créature au Créateur, et avec de conti- nuelles affections a la très sainte humilité et simplicité de cœur. Soyes bonne au prochain, et nonobstant les souleve- mens et saillies de la colère, prononcés es occurrences fort souvent ces divines paroles du Sauveur : Je les ayme, Seigneur, Père éternel, ces prochains, parce que vous les aymes, et vous me les aves donnés pour frères et * Joan., XVII, 6 et seurs *, et VOUS voules que, comme vous les aymes, je les passini ; cf. Matt., • o . -< o i XII, uit. ayme aussi. Sur tout, aymes ces chères Seurs avec les- quelles la propre main de la Providence divine vous a associée et liée d'un lien céleste ; supportes les, caresses les et les mettes dans vostre propre cœur. Ma très chère Fille, sçachés que j 'ay une très particulière affection a vostre avancement, Dieu m'y ayant obligé. Francs, E. de Genève.  MCLXXIV A UNE PERSONNE INCONNUE (fragment) Moissons et moissonneuses. Annecy, [fin février ou mars] 1616 (r). Vrayement la moisson est bien grande; il se faut * Matt., IX, 37, 38; confier que Dieu donnera des ouvrières *. Voyla Tolose ^^'' ^' ^' qui veut de nos Filles de Sainte Marie (2), Moulins (3), (i) La date de ce fragment est déterminée par celles des premières démar- ches faites pour les fondations dont il est ici parlé. (2) Voir ci-dessus, p. 34, note (2), et pp. 99, loi. La question de l'établis- sement de Toulouse ne put se terminer alors ; reprise en 1635 par la duchesse de Montmorency, elle aboutit enfin en 1647. L'essaim fondateur sortit de Montpellier, ayant à sa tête la Mère Anne-Catherine de Beaumont-Carra, professe d'Annecy. (3) Ce fut encore M""^ des Gouffîers qui eut l'initiative de cette fondation. Les détails en seront donnés au cours des lettres de 1616.  Année i6i6 163  Riom (0, Montbrison (2), Reims (3); et c'est grand cas. par tout l'on veut la Mère.  Revu sur le texte inséré dans le Ms. original des Mémoires, etc., par la Mère de Chaugy, conservé à la Visitation d'Annecy. ( I ) Nous retrouvons à Riom quelque chose de semblable à ce qui se passa à Toulouse. « Un vénérable personnage, » nommé Jacques de Murât, « doué d'une extraordinaire pieté, comme aussi madamoiselle sa femme, » Fleurdelys de Nevrezé, « voyant qu'il n'avoit poinct d'enfans, se conseilant au Sainct Esprit, se resoulut de faire Nostre Seigneur héritier d'une partie de ses biens, et considérant qu'en sa ville il n'y avoit encores poinct de couvant de Reli- gieuses, il désira dy en fonder un qui seroit la saincte retraicte des filles de sa patrie. » (Hist. de la Fondation, par la Mère de Chaugy.) On le voit par les Lettres de la Sainte, quelques bonnes âmes s'étaient déjà réunies dans le dessein de se consacrer à Dieu (cf. ci-dessus, notes (2), (3), p. ici), lorsque M. de Murât demanda à Ms"" de Marquemont des Sœurs de la Visitation pour les diriger; l'Archevêque le renvoya au Fondateur. Les pourparlers se pour- suivirent longtemps avec espérance de succès; on pensait même que la Mère de Chantai irait établir cette nouvelle Maison; en octobre 1616, le départ était projeté pour le printemps suivant, « mais deux choses destornerent ce dessein, » continue l'ancien Manuscrit : « l'une, des troubles et mouvemens de guerre entre les François et les Savoyardz. qui rendirent les chemains dan- gereux; » l'autre, la fondation du monastère de Moulins qui avait dépouillé Annecy de ses meilleurs sujets. M. de Murât, ne pouvant avoir des Filles de Sainte-Marie, appela celles de sainte Thérèse, et le Carmel s'établit à Riom le 28 janvier 1618. — La Visitation eut son tour en 1623, fondée par la véné- rable Mère Jeanne-Charlotte de Bréchard, qui y décéda le 18 novembre 1637 en odeur de sainteté. (Cf. tome XIV, note (i), p. 86.) ( 2 ) Ce Monastère, le quatre-vingt-dix-neuvième de l'Ordre, ne fut érigé qu'en 1642, (3) La fondation projetée dans cette ville dès 1616, devait se réaliser seu- lement en 1826.  MCLXXV A MADAME DE LA FLÉCHÈRE La succession de M. de la Fléchera. — Au milieu des ennuis, s'attacher, esclave d'amour, au pied de la Croix. Annecy, i^r mars 1616, Ainsy que je pensois vous renvoyer vos papiers (0 ( I ) Le Saint les avait demandés dans sa lettre du 17 février, (Voir ci-dessus, p. 145.)  164 Lettres de int François de Sales par mon laquay (0, ma très chère Fille, ces deux cou- sins (2) arrivèrent, qui en seront les porteurs. J'ay consulté vostre affaire, et ay treuvé que le conseil de monsieur vostre neveu (3) est extrêmement bon et quil le faut suivre, sinon que vous fussies fort asseuree quil n'y eut es biens de feu monsieur vostre mari que ce quil faut pour vos droitz, auquel cas il seroit plus court de les retenir pour iceux droitz et ne point faire hériter les enfans. Mays puisque vous penses d'aller a Chamberi, vous resoudres tout cela bravement. Vous y treuveres madame de Chasteaufort et M""^ du Chatelard; je vous prie de les bien saluer. Elles sont toutes deux fort affectionnées a nostre Visitation, et en seront, Tune par efifect, comme je pense, estant libre (4), et l'autre d'affection, estant retenue par ses enfans (5). (i) Plusieurs des domestiques de l'Evêque de Genève eurent l'honneur de déposer au Procès de Béatification de leur maître. Nous connaissons ainsi les deux valets de chambre, François Favre et Germain Pilliod, et le cuisinier, Pierre Genêt. Guichard Rosset, qui déclare être demeuré environ vingt ans au service du Bienheureux, serait-il ce « laquay vestu de tanné avec les bords de violet, » complétant le personnel dont parle le P. de la Rivière (Vie, etc., 1625, liv. IV, chap. i) ? Né à La Roche, en juin 1593, de François Rosset et de Mathie Teste, Guichard entra fort jeune dans la maison du saint Prélat. Pen- dant le voyage de Paris (1618-1619), il est de la suite de François de Sales, raccompagne à Maubuisson et partout où le conduit son zèle. Partout aussi Thumble serviteur observe attentivement Thomme de Dieu, et plus que d'au- tres peut-être, il paraît frappé du rayonnement extérieur de sa sainteté. Jamais il ne le voit réciter son chapelet ou son Office qu'il ne soit lui-même « esmeu a la dévotion. » A bien des années de distance, iltressaille encore au souvenir de cette « face angellicque, » de ces « yeux estaincellantz comme un soUeil, » de ce visage « tout enflammé n qui annonçaient la présence des dons surnatu- rels dans Tàme de son bon maître. Guichard Rosset n'assista pas à son trépas, mais il fut le témoin de ses funérailles à Annecy et de nombreux miracles opérés à son tombeau. (D'après sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), passim.) (2) MM. de Charmoisy et de Vallon, cousins de M'"* de la Fléchère et de François de Sales. (3) Prosper d'Avisé, seigneur de Montmeilleur (voir ci-dessus, note ( i ), p. 98, et pp. 144, 152). ( 4 ) On a vu déjà (tome précédent, note ( 1 ), p. 346, et ci-dessuS; note ( i ), p. 99) ce qu'il advint de la vocation de Jacqueline de Chauvirey, baronne du Chatelard. ( 5 ) De son mariage avec Pierre de Grôlée, coseigneur de Châteaufort, Anne de Clermont (voir le tome précédent, note (3), p. 345) avait eu cinq filles. Trois entrèrent en Religion : Claudine, à Notre-Dame de Vernayson; Phili- berte, à la Visitation de Chambéry; Louise, à l'abbaye de la Trinité de Caen .  Annhh 1616 1615 Le bon M. de Guydeboys (0 s'est fort lamenté d'estre demeuré despouillé, a ces deux cousins. Ne faites pas semblant que je vous en aye adverti, mays je seray bien a3'se que vous justifiies vostre bonne intention pour luy, attendu quil est si proche de vostre feu mari. Au reste, ma pauvre très chère Fille, entre les ennuys que vostre imagination vous fournit, jettes souvent vostre cœur entre les bras du cher Espoux nouveau ; attachés vous comme un'esclave d'amour au pied de sa sainte Croix, et souvienne vous que bienheureux sont ceux qui n'ont rien, pourveu qu'ilz ayent ce grand Tout hors lequel tout n'est rien pour nous. Si vous voules aller a Chamberi et y conduire le petit (2) pour faire la révérence a M. le Marquis (3), peut [être] l'un de ces deux cousins fera bien l'office, ou avec vous ou sans voij^s, selon que vous aviseres. Ma très chère Fille, je suis infiniment tout vostre. Nous parlons souvent, nostre Mère (4) et moy, de vous; ell'a un amour nompareil. Ce cousin ''5) va en intention de ne point voir M. le Comte (6); je ne sçai si le sachant a moytié malade, cela luy fera point changer de dessein. De rechef, je vous salue de tout mon cœur, ma très chère Fille, que je souhaite toute sainte en Nostre Seigneur. Le i*"' mars 1616. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. Les deux autres héritèrent par moitié de leur père. Claire-Françoise, darue d'Hauteville, épousa d'abord le fils aîné du second mari de sa mère, Jean- Baptiste de Duyn-Mareschal (i^"" juillet 1623); mais ce mariage ayant été annulé, elle contracta une nouvelle alliance avec Pierre de Montfaucon de Rogles. Marguerite, baronne de Châteaufort, épousa icontrat dotal du 26 avril 1633) Charles-Emmanuel de Mareste, baron de Chevelu. ( I ) R" Jean-François-Melchior (voir ci-dessus, note ( i ), p. 145). (2) Charles de la Fléchère, fils de la destinataire. (Cf. ci-dessus, p. 152.) (3) Le marquis de Lans. (4) La Mère de Chantai. (5) Sans doute M. de Charmoisy. (6) Charles de la Forest, frère de M""* de la Fléchère. (Voir ci-dessus. note (3), p. 142.)  i66 Lettres de saint François de Sales MCLXXVI A UNE DAME (0 La meilleure saison pour la culture du cœur. — Gardons nos résolutions en cette vie mortelle, et elles nous conserveront en réternelle. — Conseils pratiques sur la fréquentation des Sacrements et les exercices de piété. — Faire l'aumône de sa propre main. — Conduite à tenir avec « ceux du logis. » Annecy, 5 mars 1616. Ne pensés pas, je vous prie, ma très chère Nièce, ma Fille, que ç'ayt esté faute de souvenance ou d'affection si j'ay tant tardé a vous escrire; car, a la vérité, le bon désir que j'ay veu en vostre ame de vouloir servir fort fidellement Dieu, en a fait naistre un extrême dans la mienne de vous assister et ayder de l^ut mon pouvoir, laissant a part le devoir que je vous ay d'ailleurs et l'in- clination que j'ay tous-jours eu pour vostre cœur, a cause de la bonne opinion que j'en ay des vostre plus tendre jeunesse. Or sus donq, ma chère Nièce, il faut donq bien soi- gneusement cultiver ce cœur bienaymé et ne rien espar- gner de ce qui peut estre utile a son bonheur ; et quoy que en toute sayson cela se puisse faire, si est-ce que celle ci en laquelle vous estes est la plus propre. Ah, que c'est une rare grâce, ma chère Fille, de commencer a servir ce grand Dieu tandis que la jeunesse de l'aage nous rend susceptibles de toutes sortes d'impressions, et que l'offrande est aggreable, en laquelle on donne les fleurs avec les premiers fruitz de l'arbre ! Tenés tous-jours ferme au milieu de vostre cœur les (i) En 1616, François de Sales n'avait pas de propres nièces mariées. Cette lettre s'adresse donc à une jeune femme qui n'appartenait au Saint que par alliance d'affection. Les différents traits qui, d'après le texte, la caractérisent, paraissent bien convenir à Marie d'Avisé, devenue dame de Blonay au mois de novembre 1613 (voir le tome précédent, note (3), p. 40). Elevée près de sa tante, M'"^ de la Fléchère, elle avait dû être connue de bonne heure par l'Evêque de Genève, et mériter de sa part, comme sa sœur Gasparde, l'appel- lation affectueuse de nièce. — Les notes qui vont suivre sont données d'après la supposition très probable que Marie d'Avisé est la destinataire, supposition que toutes ces notes confirment.  Année 1616 167 resolutions que Dieu vous donna quand vous esties devant luy auprès de moy ( ' ) ; car si vous les conservés en toute cette vie mortelle, elles vous conserveront en l'éternelle. Et pour non seulement les conserver, mays les faire heureusement croistre, vous n'aves pas besoin d'autres advis que ceux que j'ay donné a Philothee dans le livre de Vlntroduction, que vous aves ; mais toutesfois, pour vous aggreer, je vous veux bien spécifier en peu de paroles ce que je désire principalement de vous. 1. Confessés vous de quinze en quinze jours pour re- cevoir le divin Sacrement de la Communion, et n'allés jamais ni a l'un ni a l'autre de ces célestes misteres qu'avec une nouvelle et très profonde resolution de vous amender de plus en plus de vos imperfections, et de vivre avec une pureté et perfection de cœur tous-jours plus grande. Or, je ne dis pas que si vous vous treuves en dévotion pour communier tous les huit jours, vous ne le puissies faire, et sur tout, si vous remarques que par ce sacré mistere vos inclinations fascheuses et les imperfections de vostre vie s'aillent diminuant; mais je vous ay marqué de quinze en quinze jours affin que vous ne diflferies pas davantage. 2. Faites vos exercices spirituelz courtement et fervem- ment, affin que vostre naturel ne soit point difficile a vous y rendre par l'appréhension de la longueur, et que, petit a petit, il s'apprivoyse avec ces actes de pieté. Par exemple, vous deves inviolablement faire tous les matins l'exercice du matin qui est marqué en l'Introduction *. * Partie II, chap.x. Or, pour le faire courtement, vous pourres en vous habil- lant remercier Dieu, par manière d'oraysons jaculatoires, dequoy il vous a conservée cette nuict la, et faire encor le deuxiesme et le troysiesme point, non seulement en vous habillant, mays au lit ou ailleurs, sans différence de lieu ou d'actions quelcomques ; puis, tout aussi tost que vous pourres, vous vous mettres a genoux et feres le qua- triesme point, commençant a faire cet eslan de cœur qui est marqué : « O Seigneur, voyla ce pauvre et misérable ( I ) L'année précédente, au mois de septembre, le Saint avait fait un voyage en Chablais ; c'est sans doute à cette occasion que M'"^ de Blonay se mit spé- cialement sous sa conduite et commença une vie de plus grande piété.  i68 Lettres de saint François de Sales cœur. » J'en dis de mesme de l'examen de conscience, que vous pouves faire le soir en vous retirant, par tout ou vous vous treuveres, pourveu qu'on face le troy- siesme et quatriesme point a genoux, tandis qu'aucune maladie ne vous empesche. Ainsy, en l'église, oyés la Messe avec une contenance d'une vraye fille de Dieu, et plustost que de vous relas- cher de cette révérence, sortes de l'église et vous en retirés. 3. Apprenés a faire souvent des oraysons jaculatoires et des eslancemens de vostre cœur en Dieu. 4. Ayes soin d'estre douce et affable a tout le monde, mais sur tout dans le logis. 5. Les aumosnes qui se font chez vous, soyent aussi faites par vous tous-jours, quand vous le pourres ; car c'est un grand accroissement de vertu que de faire l'au- mosne de sa main propre, quand il se peut bonnement faire. 6. Visités les malades de vostre bourgade ( ^ ) fort volon- tier ; car c'est une des œuvres que Nostre Seigneur regar- Matt., XXV, 36. dera au jour du jugement *. 7. Tous les jours lises une page ou deux de quelque livre spirituel pour vous tenir en goust et dévotion, et les festes un peu davantage, qui vous tiendra lieu de sermon. 8. Continués a beaucoup honnorer vostre beaupere l*), parce que Dieu le veut, le vous ayant donné pour second père en ce monde ; et aymés cordialement le mary (3), luy rendant, avec une douce et simple bienveuillance, tout le contentement que vous pourres; et soyés sage a supporter les imperfections de qui que ce soit, mais sur tout de ceux du logis. Je ne voy pas pour le présent que j'aye a vous dire autre chose, sinon que Ihors que nous nous reverrons, vous me dires comme vous vous seres conduitte en ce chemin de dévotion ; et s'il y a quelque chose a adjouster, (i) Saint-Paul, en Chablais, seigneurie de la famille de Blonay. (2) Claude de Blonay (voir tome XII, note ( i ), p. 124). (3) Jacques de Blonay (voir le tome précédent, note (4), p. 40).  Annrf. 1616 169 je le feray. Vives donq toute joyeuse en Dieu et pour Dieu, ma très chère Fille, ma Nièce, et croyes que je vous chéris très parfaitement, et suis infiniment, Madame, Vostre plus humble oncle et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. Ce 5 mars 16 16.  MCLXXVII  A MADAME DE LA FLECHERE  Divers conseils pour radniinistration des biens laissés par M. de la Fléchère. Paternels avis pour la vente de ses chevaux. Annecy, [vers le 6 ou le 7] mars 1616 ( i ). Je pensois vous envoyer mon laquay (2) demain, ma très chère Fille, pour vous respondre a souhait sur vos trois dernières lettres; mays puisque ce garçon s'est présenté, je m'en vay vous escrire sur tous les pointz que vous m'aves touchés. Quant a la façon avec laquelle vous vous deves com- porter en l'administration des biens délaissés par feu monsieur vostre mari (que Dieu absolve), monsieur de Charmoysi m'a dit que vous en avies pris toutes les resolutions convenables, et que vous feries un inventaire non solemnel pour plus grand esclarcissement de vos droitz, affin qu'a l'advenir rien ne vous fut imputé. Et a cela, je ne sçaurois rien adjouster. Pour les deux cens pistoles que monsieur le Marquis ( 3 ) (i) Migne place cette lettre vers le 2^ février, mais elle est évidemment postérieures celle du i*"" mars (Lettre mclxxv). A cette dernière date, en effet, les « deux cousins » de Charmoisy et de Vallon se rendent auprès de la nou- velle veuve pour Taider dans l'arrangement de ses affaires; ici, revenus déjà vers lEvêque de Genève, ils lui ont rendu compte de leur mission d'amitié et de dévouement. (2) Guichard Rosset (voir ci-dessus, note ( i ), p, 164). (3) Le marquis de Lans,  170 Lettres de saint François de Sales avoit promis de faire payer, M. de Vallon m'a dit quil vous instruiroit de ce que Son Excellence a respondu ; c'est a sçavoir, que maintenant il n'y a moyen, faute de finances. Pour moy, je croy quil faudra obtenir une lettre de Son Altesse qui ordonne que cette somme soyt payée, non obstantle deces de celuy a qui il Tavoit ouctroyee (0. Pour la paye du filz ( = ), je croy quil en faudra faire de mesme, car Son Excellence mesnage avec un soin et un' espargne nompareille l'argent du maistre. Sur ce point, il m'est venu en l'esprit d'ouvrir la lettre de M. de Vallon, et j'ay treuvé quil vous disoit du sei- gneur Roc (3) ce que je vous allois escrire ; de sorte quil ne sera pas besoin que vous envoyies encor a Grenoble pour cela. Je dis a M. de Vallon que M. le Marquis d'Aix(4) desiroit un des chevaux, et il me dit que la préférence luy estoit deûe. Quant a M. de Saint Jeoire (0, sil vous asseure bien Targent, je pense quil seroit bon de luy donner l'autre, car il sera difficile de treuver qui achette tout ensemble ; joint que ce sont chevaux vieux, ainsy qu'on m'a dit, et desquelz Tentretien coustera beaucoup : de sorte qu'a la première rencontre d'un prix raysonnable que vous en feres, il sera bon de les vandre. Le seigneur Roc ne pense pas de vous y pouvoir servir. Monseigneur de Nemours son maistre ne prenant des chevaux que grandement praetieux; toutefois, il fait estât de vous aller voir au premier jour. Il n'y a eu nul poison en vostre cher mari, car (i) Voir ci-dessus, note (5), p. 152. (2) Charles de la Fléchère. (3) L'écuyer du duc de Nemours, Roch Calcagni. (Voir tome XIV, note ( r ), p. 302.) (4) Louis de Seyssel-la-Chambre (voir tome XIV, note (2), p. 89). L'une de ses sœurs, devenue comtesse de la Forest, était belle-soeur de M.'"* de la Fléchère. ^Voir ci-dessus, note (3 ), p. 142.) (5) La baronnie de Saint-Jeoire appartenait alors à Melchior de Mouxy, fils de Pierre-Marc, seigneur de Travernay, et d'Antoinette de Saint-Jeoire (cf. tome XV, note ( i ), p. 348) ; un arrêt de la Chambre des Comptes, en date du 31 mars 1615, avait ordonné qu'il en jouît comme héritier de son oncle, le baron dHermance. Melchior mourut sans alliance et ab intestat, avant le 14 décembre 1618, jour où le procureur du domaine du duc de Genevois fut mis en possession de ses biens, La seigneurie de Saint-Jeoire passa pourtant à sa nièce, Anne-Françoise de Travernay.  Année i6i6 171 M. Faber (0, qui entend extrêmement bien et est homme de grande expérience, m'en a fort asseuré ; de sorte quil vous faut oster toute sorte de soupçon et d'imagination pour ce regard, ma très chère Fille. Nostre voyage sera court, et nous serons éternellement au Ciel et bénirons Dieu. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de TEtat. (i) Jean Favre, médecin d'Annecy. (Voir ci-dessus, p. 142,)  MCLXXVIII A DON JUSTE GUÉRIN, BARNABITE (0 Nouvelles démarches auprès de la cour de Savoie pour l'établissement des PP. Barnabites à Thonon. Annecy, lo mars 1616. Mon Révérend Père, Nos bons Pères d^icy ont esté d'advis que je fisse une (i) Balthazard Guérin vit le jour en 1578, à Tramoy (Bugey), alors du diocèse de Lyon, mais des Etats de Savoie. Ses parents, Claude Guérin et Jeanne Bajard, de condition modeste, le destinèrent cependant au barreau et l'envoyèrent à l'Université de Turin qu'il abandonna bientôt pour celle de Pavie. L'horreur du vice et du monde détermina le jeune homme à entrer, le II décembre 1599, au noviciat des PP. Barnabites à Monza. Le 20 février suivant, des mains du Général, Bonaventure Asinari, il reçut l'habit religieux avec le nom de Juste ; profès un an après (24 février), il partait pour suivre le cours de théologie à Pavie. En revenant de cette ville, il était sous-diacre; le diaconat lui fut conféré à Milan, par le Cardinal Frédéric Borromée, (18 décembre 1604), et la prêtrise par Ms"" Cittadini, le 24 septembre 1605. (Acta Collegii de Saint-Alexandre de Milan.) Désigné pour coopérer à la fondation de la Maison de Turin, le nouveau prêtre s'attira promptement, par ses éminentes qualités, une renommée qui pénétra jusqu'à la cour. Les Infantes Marie et Catherine le choisirent pour directeur de leur conscience, et leur sainteté devint un éclatant témoignage de celle de leur Père spirituel, que le Duc et les princes vénéraient à l'envi. Une amitié plus illustre encore honora l'humble Religieux. En 1613, à Turin, François de Sales le vit pour la première fois, et dès lors, « par une céleste sympathie, s'attacha fortement à lui. » L'année suivante, avec un de ses confrères, il prenait possession du collège d'Annecy. (Voir le tome  • 72 Lettres de saint François de Sales recharge a Son Altesse et a Messeigneurs les Princes (0, pour les affaires de Thonon ; ce que je fay fort a propos, ce me semble, sur l'occasion que Monseigneur le Prince Cardinal m'a donnée de le remercier de Tadvis qu'il m'a envoyé du bon commencement qu'il y a en la négociation * Vide Epist. seq. faite pour la canonization du bienheureux Amé * ; car, d'autant que ce bienheureux Prince naquit a Thonon, je prens sujet de recommander l'introduction des Pères en ce lieu-la ( = ). J'en fay de mesme avec Son Altesse et *Vid.Epist.MCLxxx, Monseigneur le Prince *, me treuvant obligé de leur MCLXXXI. , ° tesmoigner la joye que j'ay en l'espérance de cette cano- nization. précédent, notes ( i ), p. i8q, et (2), p. 231.) « On ne saurait exprimer, » dit son historien, « l'estime et l'affection » que le grand Evêque « avait pour lui ; il l'aimait si teiidrement. que quand on lui disait que le P. D. Juste était dans son antichambre, il quittait ses plus sérieuses occupations pour l'aller embrasser et l'introduire dans son cabinet, où il lui ouvrait les derniers replis de son cœur. » (Arpaud, Vie de Mgr D. Juste Guérin, Anneci, 1837, et Milan, 1859, liv, I, chap. XII, xiv.) La Mère de Chantai, à son tour, regardait le pieux Barnabite comme un homme de Dieu et un sûr conseiller. Elle se réjouit quand, après la mort de son bienheureux Père, les poursuites pour sa canonisation furent confiées à D. Juste, jugeant que cette grande affaire ne pouvait être en meilleures mains. On suit, dans ses Lettres, les travaux que soutint le zélé Promoteur au service de la sainte Cause, qui toutefois n'aboutit que le 28 décembre 1661, date du Décret de Béatification. Après avoir refusé l'archevêché de Turin et Tévêché de Mondovî, un ordre formel du Pape le contraignit d'accepter celui de Genève. Son sacre eut lieu à Turin le 25 juin 1639, et son entrée solennelle à Annecy le 27 août suivant. La mitre et la crosse ne servirent qu'à donner plus d'éclat à la modestie et à l'aus- térité du Religieux, tandis que l'établissement des Pères de la Mission, des retraites des Ordinands, la fondation de deux chaires de théologie au collège Chappuisien, furent les précieux fruits de son épiscopat. Mk"" Guérin prépara aussi la création d'un séminaire, tant désirée par saint François de Sales; les règlements élaborés par le pieux Prélat régissent encore aujourd'hui celui d'Annecy. Accablé d'infirmités plus que d'années, l'Evêque ayant obtenu pour coadjuteur Charles-Auguste de Sales, se retira à Rumilly et y vécut quelques mois dans la prière et la solitude, au milieu des Fils de saint François. Le 5 no- vembre 164s il retournait à Dieu, laissant son peuple dans les larmes. En avril 1862, ses ossements vénérables furent découverts dans l'ancien caveau des PP. Capucins; on en fit la translation solennelle le 12 août 1866, en présence de cinq évêques et d'uu concours de quinze mille fidèles. Un modeste monu- ment, à Notre-Dame de l'Aumône, consacre la mémoire d'un des plus saints évêques de Genève. (D'après Arpaud, ubi supra, et Fleury, Htst. de l'Eglise de Genève depuis les temps les plus anciens Jusqu'en 1802; Genève, Grosset, 1880, tome II, chap. x.) ( I ) Le Cardinal Maurice de Savoie et le prince de Piémont, Victor-Amédée. (3) Voir ci-dessus, note ( i ), p. (6, et ci-après, net* ( r ), p. 177.  Année 1616 173 Que si vous mesme donnes les lettres (0, vous pourres adjouster que Tan passé, sur l'eminent danger auquel Thonon fut de la contagion (2), quand je dis a ce peuple la confiance qu'il devoit avoir aux prières du bienheureux Prince, de la naissance duquel leur ville avoit esté hon- noree, ilz en tesmoignerent tous un ressentiment et espérance extrême. Fratanto (*), me recommandant a vos oraysons et bonnes grâces, je suis sans fin de tout mon cœur, Mon Révérend Père, Vostre très humble et très affectionné confrère et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. 10 mars 1616, Annessi. Au R. P. en Nostre Seigneur, Le Père D. Juste Guerini, de la Congrégation de Saint Paul. A [San] Dalmazzo (3). (*) En attendant, ( I ) Par la lettre du 18 mars au même destinataire, on voit que les messages destinés aux princes ne leur furent envoyés qu'à cette date. (2) Voir ci-dessus, note (3), p. 47, et pp. 51, 56. {3) Des documents gardés aux Archives de Moncalieri démontrent que l'église de San Dalma\:[o existait en 1228; elle appartint dès 1271 aux Cha- noines hospitaliers de Saint-Antoine de Ranverso. Entièrement reconstruite en 1530, par les soins de M^"" Antoine de la Rovere, elle fut érigée en paroisse avant IS84. Vingt-cinq ans plus tard, le duc Charles-Emmanuel l'offrit aux Barnabites, et ces Religieux en sont demeurés possesseurs jusqu'à présent. Des réparations considérables et des embellissements modernes, qui se continuent encore, transforment l'église San Dalma^^^o en une véritable merveille artis- tique. Elle garde toujours la tombe du frère de saint François de Sales, Bernard, baron de Thorens.  174 Lettres de saint François de Sales MCLXXIX au prince cardinal MAURICE DE SAVOIE (0 Souhaits de TEvêque de Genève pour la canonisation du bienheureux Amédée. — Confiance des peuples en l'intercession de ce glorieux Prince, — Les Barnabites à Thonon, moyen de donner un nouvel essor à la piété populaire. Annecy, lo mars 1616. Monseigneur, Je loue Dieu et bénis son saint nom du bon achemine- ment qu'on a donné a la canonization du glorieux et bienheureux Amé (2). Nul, comme je pense, ne sçauroit désirer la perfection de ce saint project avec plus d'affec- tion que moy, qui prevoy que tout ce peuple de deçà en recevra une extrême consolation et un grand accroisse- ment de dévotion, mays spécialement a Thonon, lieu de la naissance de ce saint Prince, ou Tannée passée, Ihors des premières appréhensions de la peste de Genève, je remarquay un mouvement universel de confiance es intercessions de ce bienheureux ami de Dieu, lors que je leur representay le juste sujet qu'ilz en avoyent, pour Ihonneur que leur air avoit eu d'avoir servi a la première respiration de ce grand Prince (3). Et pleut a Dieu, que le tressaint Père eiit esté supplié d'accorder une troysiesme Messe solemnelle, avec l'In- dulgence pleniere, pour ce lieu la, car je m'asseure qu'en cette contemplation, Sa Sainteté l'eut volontier accor- dée (4). Mays puis que cela n'a pas esté fait, je veux espérer en la bonté et équité de Vostre Altesse, que nous ne serons pas laissés en oubli pour la distribution des médailles. ( I ) Voir tome XIII, note ( i ), p. 345, (2) Cf. ci-dessus, note ( 2 ), p. 47. (3) Cf. la lettre précédente. (4) Dans une lettre datée de Turin, 21 février i6r6, le Cardinal Maurice informait l'Evêque de Genève de la permission concédée par Paul V, de célébrer à Turin et à Verceil une Messe en Thonneur du bienheureux Amédée de Savoie, et de travailler au Procès de canonisation. (Bulletin d'autographes, d'Etienne Charavay, Paris, juillet 1897, n° 40630.)  Année 1616  »75  Et cependant, Monseigneur, je la supplie très humble- ment d'embrasser fermement la protection de Tintroduc- tion des Pères Barnabites en la Sainte Mayson de ce lieu-la de Thonon et au prieuré de Contamine (O. Vostre Altesse fera sans doute en cela un'œuvre grandement aggreable a la divine Majesté, et laquelle il me semble que le bienheureux esprit du glorieux Prince Amé luy recommande des le Ciel très saintement; estimant que, comme par ses prières Dieu fortifia le cœur de Son Altesse pour establir la foy en ce lieu la, aussi, par ses mérites. Dieu animera l'esprit de Vostre Altesse pour ayder effi- cacement a y bien establir la tressainte dévotion par le moyen de ces bons Religieux, qui assisteront et arrouse- ront les vieux arbres affin quilz multiplient en fruitz de pieté, et esleveront les enfans comme jeunes plantes a ce que la postérité devance, s'il se peut, leurs praedecesseurs, et sachent tant mieux révérer leur saint Prince Amé et obéir en toute sousmission au sceptre et a la coronne qu'il a laissé en sa serenissime Mayson, que Dieu veuille a jamais prospérer, Monseigneur, selon les souhaitz continuelz du Très humble et très obéissant orateur et serviteur de Vostre Altesse, Francs Evesque de Genève. X mars 16 16, Annessi. Revu sur l'Autographe appartenant à M"« Hélène de ThioUaz, au château de Monpont. près Annecy. (i) Voir ci-dessus, notes ( r), p. 46. (7), p. 74, et ci-après, notes (i), p. 177, et (3), p. 181.  176 Lettres de saint François de Sales  MCLXXX AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL 1*' (inédite) Double droit de Son Altesse sur Thonon. — Difficultés pour la remise du prieuré de Contamine aux PP. Barnabites. Annecy, 12 mars 1616. (a) Monseigneur, Vostre Altesse ayme sans doute le pauvre Thonon ; aussi est il doublement sien, d'autant qu'elle en est le souverain Prince, et par ce qu'elle luy a donné une nou- velle vie par le soin paternel qu'elle eut de remettre tout ce peuple dans le sein de l'Eglise (O : obligation non seulement immortelle, mais éternelle, puisque elle regarde un bienfait qui doit durer es siècles des siècles. Or, Monseigneur, pour la perfection de ce saint ou- vrage, Vostre Altesse me commanda, il y a environ un an, de procurer l'introduction des Pères Barnabites en ce lieu, et cela reuscit par le moyen de la remise que la Sainte Mayson fit du prieuré de Contamine auxditz  (a) [Nous avons deux textes de cette lettre : l'un inédit,, c'est la rédaction définitive; l'autre, publié dès 1626 et reproduit par les éditions postérieures, c'est la minute donnée ci-dessous.] Monseigneur, Vostre Altesse ayme sans doute chèrement son pauvre Thonon, et elle a rayson, car il est doublement sien, puis qu'il la doit reconnoistre pour son souverain Prince, comme fait tout cet Estât, et pour son très honnoré et très aymable Parrain, puis que c'est entre ses bras paternelz que ce peuple perdu par Theresie a fait une nouvelle naissance dans le giron de la tressainte Eglise : obligation non seulement immortelle, mais éternelle, puisqu'elle prend son origine d'un bienfait qui demeure es siècles des siècles. Or, Monseigneur, pour la perfection de ce bon oeuvre, Vostre Altesse me commanda de procurer l'introduction des PP. Barnabites en ce lieu-la; ce qui fut traitté ce mois de septembre passé, par le moyen de la remise du prieuré de Contamine auxditz Pères, pour l'entretenement du Collège et autres exercices propres a leur vocation et a raffermissement de ce bon peuple  (i) Cf. ci-dessus, p. 46.  Annhe i(ti6  '7:  Pères. Mays despuis, sont survenues des difficultés que nul ne peut surmonter que la pieté et le ca-ur invincible de Vostre Altesse (0, que j'implore, en toute humilité sous la faveur du glorieux et bienheureux Prince Amé,  en la religion. Mays du despuis, sont survenues des difficultés que nul ne peut vaincre que la pieté et le cœur invincible de Vostre Altesse, laquelle je supplie en toute humilité de faire reuscir ce très bon et pieux projet, et niesme en considération du glorieux et bienheureux Duc Amé, duquel 1? canonization, que tout ce pais attend en grande dévotion, comblera bien tost de consolation et bénédiction toute la serenissime Mayson de Vostre Altesse, et lequel prit naissance et fut eslevé en ce lieu la.  ( I ) La note ( i ), p. 46, raconte les préliminaires de l'établissement des Barnabites à Thonon, et les oppositions que rencontra, de la part des prêtres séculiers de la Sainte-Maison, le traité de septembre 1615. Le prince Victor- Amédée, délégué pour cette affaire, s'y employa avec zèle, et le 11 mars 1616, il écrivait à l'abbé d'Abondance, lui recommandant de ne rien épargner pour la faire réussir. De son côté, Charles-Emmanuel, après réception de la pré- sente lettre de François de Sales, intima à D. Juste Guérin de manifester au Conseil de la Sainte-Maison sa volonté expresse que les Barnabites prissent possession du collège sous les conditions consenties l'année précédente. Ils devaient jouir de l'église des Saints-Maurice-et-Lazare (voir plus haut, note ( i ), p. 47), percevoir annuellement 1000 ducatons de 7 florins, avoir au Conseil voix délibérative, chanter les Offices divins, administrer les Sacrements, prê- cher la parole de Dieu, entretenir trois régents pour les classes de grammaire, et d'autres encore pour l'enseignement de la rhétorique, philosophie, etc. Les articles qui fixaient ces clauses furent exhibés par D. Guérin, le 10 avril 1616, au Conseil de la Sainte-Maison de Thonon assemblé à l'hôtel du mar- quis de Lullin, et le 12 avril, dans la même salle, on dressa le contrat qui donnait aux conventions préliminaires force de loi. Etaient présents, d'une part : M^"" Gribaldi, ancien archevêque de Vienne, l'abbé d'Abondance, Ves- pasien Aiazza, Claude de Blonay, six prêtres séculiers de la Sainte-Maison. Claude Marin, procureur fiscal du Chablais, le P. Vincent de Ceva, gardien des Capucins de Thonon, avec un de ses confrères; et d'autre part, D. Juste Guérin, député par son Ordre, D. Cécile Ferreri, Barnabite. Comme témoins, François de Sales, Jean-François de Blonay, etc. Ce même iour, les PP. Bar- nabites étaient officiellement installés. (Voir Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. VIII, et le contrat publié dans les Mém. et doc. de la Soc. Sav. d'hist. et d'archéoL, Chambéry, 1862, tome VI, pp. 178 seq.) Le 2 septembre suivant, à Annecy, dans la résidence épiscopale de l'Evêque de Genève, un Sommaire des revenus de la Sainte-Maison, avec le bilan des charges ordinaires qui lui incombaient annuellement, fut dressé et lu en présence du Saint, des Capucins François de Chambéry et Séraphin, des Barnabites D. Chrysostôme Marliano et D. Fulgence Chioccari, et de Pierre Gillette. La pièce, revue d'abord par le prince de Piémont, et signée par les mêmes le lendemain, devait être soumise à l'approbation de M^"" Vespasien Gribaldi, lequel y apposa également sa signature. (D'après l'original conservé à Turin, Archives de V Opéra pia Barolo, Paquet 221, n" 10.) LbTTREi VII 12  lyS Lettres de saint François de Sales qui nasquit en ce lieu, de la canonization duquel j'augure toute sainte prospérité a la coronne de Vostre Altesse, delaquelle je suis infiniment, Monseigneur, Très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, FRANÇ^ Evesque de Genève. XII mars 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe appartenant à M»"^ Boarelli di Verzuolo, à Saluées (Piémont).  Ainsy prie-je la divine Majesté qu'elle prospère vostre coronne, delaquelle je suis infiniment, [Reprendre au texte, lig. 4.]  MCLXXXI AU PRINCE DE PIÉMONT, VICTOR-AMÉDÉE (0 Encore Contamine et les PP. Barnabites de Thonon. Annecy, 12 mars 1616. Monseigneur, Je sçai que la charité et pieté de Vostre Altesse est bien ferme au projet que elle a pour l'introduction des Cf. Epist. Mcx. Pères Barnabites a Thonon *, a laquelle est attachée la conservation du prieuré de Contamine a la Sainte Mayson de ce lieu-la, pour Tusage et entretenement desditz Pères et de leur collège. Néanmoins, puisque c'est mon devoir, je fay de rechef ma très humble supplication a Vostre Altesse pour ces mesmes fins, luy ramentevant seulement que Thonon est le lieu de la naissance du bienheureux Amé, de la prochaine canonization duquel je me res-jouis (i) Datta (tome II, p. 150), suivi par Vives et Migne, adresse ces lignes au Duc de Savoie. Nul doute, cependant, que le prince de Piémont n'en soit le destinataire. Cette lettre est en effet la troisième de celles qu'annonce le Saint à D, Juste Guérin le 10 et le 18 mars (voir ci-dessus, p. 172, et ci-après, p. 181); les deux autres étant destinées au Cardinal Maurice et à Charles-Em- manuel, il reste certain que celle-ci a été écrite à Victor-Amédée,  Année i6i6 179 infiniment, praesageant en icelle beaucoup de tressaintes bénédictions sur la coronne qu'il porta en ce monde et sous laquelle il alla si heureusement estre coronné en l'autre. Je fay très humblement la révérence a Vostre Altesse, et suis immortellement, Monseigneur, Son très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, France Evesque de Genève. XII mars 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCLXXXII A MADAME DE LA FLÉGHERE Solution d'un cas de conscience. Annecy, [vers le 10 ou le 15 mars] 1616 (i). Vous pouves jurer, ma très chère Fille, en saine conscience, puisque ce que vous dites est vrayement vostre et que les juges ne vous peuvent demander le serment que pour les choses laissées par le mary, qui sont a luy ; et vous n'estes aussi obligée de respondre que sur cela. Il n'y a point de difficulté en cela. Dieu vous bénisse a jamais, ma très chère Fille, et nostre Mère (2) vous salue chèrement. Vive Jésus! Amen. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) Le serment dont il est question devait sans doute se prêter devant les juges de Chambéry, Or, on voit par la lettre du i*''" mars (p. 164), que M"^*^ de la Flécher? projetait un voyage dans cette ville; celle placée vers le 6 ou le 7 (p. 169) nous apprend qu'il n'était pas encore effectué. Il semble donc que ce billet soit d'une date postérieure. (2) La Mère de Chantai.  i8o Lettres de saint François de Sales MCLXXXIII AU DUC DE NEMOURS, HENRI DE SAVOIE (0 (inédite) Hommage d'obéissance et souhaits de prospérité à l'occasion des fêtes pascales. Annecy, i6 mars i6i6. Monseigneur, La sainteté de ces jours prochains (2) m'excite a renou- veler les vœux de mon obéissance envers Vostre Gran- deur, et ceux de mes foibles prières a Dieu pour la conservation et prospérité de vostre personne, Monsei- gneur, vous suppliant très humblement d'accepter Tune et l'autre offrande et le tesmoignage que j'en fay sur ce papier, comme venant d'un cœur qui est invariable en la fidélité avec laquelle il veut et doit vivre a jamais. Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, Franç% E. de Genève. XVI mars 16 16, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Orléans. ( I ) Le feuillet qui portait l'adresse a été enlevé, mais au verso de l'Auto- graphe on lit la note suivante, d"une ancienne écriture : « Lettre écrite de la main de notre B'^ Père a Monseigneur le Duc de Nemours. » Les titres de « Monseigneur » et de « Vostre Grandeur » donnés au destinataire ne permet- tent d'ailleurs aucune hésitation. (Voir tome XII, note ( i ), p. 211.) (2) Le 16 mars tombait, en i6i6, le mercredi de la quatrième semaine de Carême.  MCLXXX, MCLXXXI  Année 1616 181  MCLXXXIV A DON JUSTE GUÉRIN, BARNABITE (inédite) Des lettres pour les Princes et une mission auprès du comte de Verrua confiées au destinataire. Annecy, 18 mars 1616. Mon Révérend Père, Je vous escris par le sieur Gilette (0, et ay mis avec cela trois lettres pour les Princes *, en leur recomman- * Epist. mclxxix, dant les affaires de Thonon et Contamine. Despuis, j'apprens que le prieuré de Contamine est très propre et sera très utile a plusieurs choses ; c'est pourquoy, plus tost que de le laisser eschapper, il seroit bon de tenter M. le Comte de Verrue (2), d'une petite pension jusques a cent pistoles (3). Cependant, estant merveilleusement hasté, je me re- commande a vos saintes prières et vous supplie, sil se (i) Pierre Gillette (voir tome XIV, note (i), p. 37). (2) La note de Philibert-Gérard Scaglia, second comte de Verrua, a été donnée au tome XII, p. 105. Ajoutons ici qu'il était fils d'Alexandre Scaglia et de Ginevra Ferrero, marquise de Masserano. A ses fonctions diplomatiques, il joignit les charges de conseiller du Conseil secret et de grand-maître de la Maison des Princes, et devint chevalier de TAnnonciade en iboS. De son mariage avec Blanche, fille du comte César Ponte di Scarnafigi, il eut trois enfants que nous retrouverons dans la suite, (D'après des notes recueillies à Turin, Archives Centrales et Camérales, et Bibliothèque royale.) (3) Le 23 octobre 161 =>, se présentait à Contamine « M* Dominique EUia, se disant notaire apostolique et ducal, » délégué par le « R""^ seigneur Alexandre Scaglia, abbé de Staffarde, » pour prendre en son nom possession du prieuré, en remplacement du commendataire démissionnaire, Philippe Buccio (voir tome XII, note (2), p. 5). Quels étaient les droits du prétendant: D. Marin, représentant de la Sainte-Maison, ne put le savoir et dut se contenter de dresser un acte d'opposition. Un procès s'ensuivit; il était pendant devant le Sénat de Savoie quand François de Sales chargea D. Juste Guérin de « tenter «< M. le Comte de Verrue, » père d'Alexandre Scaglia, d'une pension de « cent « pistoles. » Avec ce sacrifice pécuniaire, on pouvait espérer faire cesser les prétentions de l'abbé de Staffarde sur Contamine. (Voir Bouchage, Le Prieuré de Contamine-sur-Arve, Chambéry, i88g, pp. 105 seq.)  i82 Lettres de saint François de Sales peut, de me faire recouvrer les livretz dont je vous ay ci devant escrit. Je suis, mon Révérend Père, Vostre plus humble, très affectionné confrère et serviteur, Franç% E. de Genève. XVIII mars 1616, Annessi. Au R. Père en N. S., Le P. D. Justin Guerini, de la Congrégation de S^ PauL S* Dalmas. — Thurin. Revu sur l'Autographe conservé au Grand-Séminaire de Malines,  MCLXXXV AU PÈRE DOMINIQUE DE CHAMBÉRY, CAPUCIM (0 Démarches pour l'établissement des PP. Capucins à La Roche. Annecy, 28 mars 16 16. Mon Révérend Père, Le désir ardent de la ville de La Roche, tesmoigné par les lettres ci jointes, a esté longuement désiré par moy qui Siv tous-jours creu que si vous avies un couvent en ce lieu la, vous en auries autant de contentement que de nul autre que vous puissies avoir de deçà, puisque Tair y est extrêmement bon, le voysinage fertile et abon- dant en force bons villages, au passage de Thonon en (i) Entré dans l'Ordre de saint François en 1596, le P. Dominique y fit profession le 11 mai 1597. Dès que les couvents de Savoie furent séparés de la Province de Lyon pour former celle de la Mission de Thonon {161 1), il reçut la charge de définiteur, qu'il exerça longtemps. Vicaire-provincial de 1618 à 1621, provincial en 1628, il mourut à Chambéry en 1650. « Religieux d'une sainteté éprouvée, supérieur ferme et vigilant pour la régulière observance et missionnaire zélé, Dieu le récompensa par le don de prophétie. » {Nécrologe... des FF. Mineurs Capucins, 1611-IÇ02, par le P. Eugène de Bellevaux.) Le P. Dominique avait résidé au couvent d'Annecy et beaucoup connu le saint Evêque. Etant à Rome, en qualité de Custode pour le Chapitre général (1624), il fit par écrit une déposition, complétée plus tard par des pages pleines de charme et d'originalité, qui nous montrent le pieux Capucin pénétrant dans l'intimité de la vie du bienheureux Prélat.  Année i6i6 183 cette ville, esloigné de quatre lieues de tout autre convent de mendians, et ou, en vérité, j'ay reconneu le peuple extrêmement enclin a la dévotion. J'adjouste le continuel commerce de ceux de Genève, qui leur donnera commo- dité de s'édifier par la résidence des bons Religieux qu'ilz y verront. Et en somme, de quel costé que je regarde ce dessein, je le treuve tout aymable, sans inconvénient et avec espérance de beaucoup de fruit. C'est pourquoy, contribuant mes vœux a ceux de ce bon peuple, je vous supplie, et les Pères de la Province (0, de vouloir accepter les bonnes volontés présentes et d'en moyenner les efFectz par les voyes convenables, affin qu'au plus tost on voye reuscir ce projet, plus désiré qu'il ne se peut dire et, comme je pense, grandement dési- rable (2). A quoy la promptitude de la resolution sera fort utile, que, vous recommandant de rechef, je prie Dieu de favoriser, et de vous combler de bonheur selon les souhaitz, mon Révérend Père, de Vostre plus humble, très affectionné confrère et serviteur, Francs E. de Genève. XXVIII mars 1616, Annessi. Au R. Père en N. S., Le P. F. Dominique de Chamberi, Vicecommissaire en la Province de la Mission. A Chamberi. Revu sur l'Autographe appartenant à M""^ Arestan, à La Roche (Haute-Savoie). (i) Les Pères de la Province de la Mission de Thonon. (Voir tomes XV, note (3), p. 167, et XVI, note (2), p. 264.) (2) Ce projet fut exécuté l'année suivante. Plusieurs habitants de La Roche, entre autres noble Michel Saultier de la Balme, premier syndic, se firent les bienfaiteurs du nouveau couvent, établi définitivement le 3 avril 1617. Les PP. Capucins avaient obtenu d'utiliser pour leurs constructions les débris du château, détruit à la fin du xvi° siècle. Forcés de s'exiler au moment de la grande Révolution, les Religieux revinrent en 1821, et purent racheter leur ancien monastère. De nouveau, ils ont dû l'abandonner en 1905. (D'après le Nécrologe cité, et Vaullet, Hist. de la ville de La Roche, Annecy, 1874.)  184 Lettres de saint François de Sales  MCLXXXVI A LA SŒUR DE BLONAY ASSISTANTE ET MAITRESSE DES NOVICES A LYON (fragment) La Visitation d'Annecy « racine petite, basse et profonde. » Annecy, [janvier-mars] 16 16 (i). Ma Fille, faites que cette lumière vous serve pour toute vostre vie. Dites ce que vous aves veu, enseignés ce que vous aves ouy a Annessi. Helas ! cette racine est petite, basse et profonde ; mais la branche qui s'en séparera périra sans doute, séchera et ne sera bonne Jean., xv, 6. que pour estre coupée et jettee au feu *.  (i) Sœur Marie-Aimée de Blonay exerçait au monastère de Lyon la charge de Directrice depuis octobre 1615 (voir ci-dessus, note (4), p. ici). Au rapport de Charles-Auguste, elle inculquait souvent à ses novices « que les maximes particulières de Tesprit de la Visitation doivent estre communes à tout l'Ins- titut, quand il y auroit mille millions de Monastères, comme l'Evangile de Jesus-Christ est et doit estre tousjours le fondement universel de nostre créance et de nostre obéissance, quand mesme il y auroit un million de nou- veaux mondes et autant qu'il y a de momens que l'Evangile est en cettuy-ci. » La jeune Directrice « ayant communiqué cette pensée a son bien-heureux Fondateur, il en fut touché, et ordonna que quand on feroit de nouveaux establissements, l'on insereroit dedans les permissions et dans les premiers actes des fondations, que les Sœurs alloient s'establir pour vivre selon les Règles, Constitutions et Coustumes du Monastère d'Annessy. » (La Vie de la Mère Marie Aymée de Blonay, 165^, chap. vu.) Le fragment que nous reproduisons appartient à la réponse que le saint Evêque envoya sur ce sujet à la Maîtresse des novices; il est daté approxima- tivement d'après l'étude des lettres du commencement de cette année 1616.  Année \(">\(j 185  MCLXXXVII AVOIE, GHARLES- Reinerciements au souverain, bienfaiteur de son peuple. Annecy, \^^ avril 1616. Monseigneur, La charité et bonté que Vostre Altesse a tesmoignee envers ces bons peuples de deçà, par le soin qu'elle a eu de faire reuscir les projetz de l'introduction de Tart de la soye en ces pais (0 et des Pères Barnabites a Thonon (2), ne peut jamais estre asses dignement remerciée. Mays, a la faveur de la sainteté de ce jour, j'en fay néanmoins très humblement la révérence et l'action de grâces a Vostre Altesse, la suppliant de continuer sa dilection et protection sur cette province, en laquelle l'avancement de la gloire de Dieu est de si grande conséquence et plein de mérite pour Vostre Altesse, que sa divine Ma- jesté face a jamais prospérer es bénédictions que luy souhaite, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. Le Vandredi Saint 16 16, Annessi. Revu sur TAutographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. (i) Voir ci-dessus, Lettre mcxvii, p. 65. et note ( i ), p. 66. (2) Voir ibid., note ( i ), p. 46, et les Lettres mclxxix-mclxxxi.  ï86 Lettres de saint François de Sales MCLXXXVIII A M. GLAUDE-AMÉDÉE VIBOD (0 Le Duc autorise François de Sales à prêcher à Grenoble. — Nouvelles expli- cations au sujet des visites de prélats français à Annecy, Annecy, 4 avril 1616. Monsieur, J'ay receu la lettre de Son Altesse, par laquelle elle tesmoigne d'aggreer que je face les sermons du Caresme venant a Grenoble (-), et ay veu par celle qu'il vous a pieu m'esorire, le soin que vous aves eu de lire ce que Epist. McxLii. j'escrivois a sadite Altesse * sur le sujet de la venue de Monseigneur l'Archevesque de Lyon en cette ville (3); dont je vous rens grâces, Monsieur, d'autant plus afFec- tionnement et humblement, que ces bons offices n'ont origine que de vostre bonté et courtoysie, laquelle je vous supplie de vouloir exercer en toutes telles occasions qui m'arrivent plus souvent que je ne desirerois pas, plu- sieurs Praelatz de France me faysant l'honneur de m'aymer et de me vouloir visiter, encor qu'ilz ne me connoissent pas, ains peut estre par ce qu'ilz ne me connoissent pas. Mays, Monsieur, ce sont visites de simple pieté et affection spirituelle, n'ayant, grâces a Dieu, jamais rien eu a demesler avec homme du monde, ni ne m'estant jamais meslé de chose quelcomque qui regarde les affaires séculières. Et en vérité, onques il ne m'est advenu d'avoir esté seulement essayé par homme qui vive, ni qui ayt esté, de ce costé là ; qui me rend d'autant plus estonné quand on me dit que les visites de ces seigneurs ecclé- siastiques sont considérées comme suspectes, ne pouvant seulement deviner ni pourquoy ni en quoy, puisque mesme je suis en toutes façons savoyard, et de naissance et d'obligation, qui n'ay, ni n'eu jamais, ni pas un des (r) Pour le destinataire indiqué, voir ci-dessus, note ( i ), p. no. (2) Suivant la coutume du temps, le saint Evêque commença sa mission à Grenoble par les prédications de l'Avent i6r6; nous en verrons plus loin les détails, et ceux de la station quadragésimale. (3) Il y arriva le 30 octobre 161^. (Voir ci-dessus, les Lettres mcxxxii, mcxli.)  Année 1616 187 miens, ni office, ni bénéfice, ni chose quelcomque hors de cet Estât, et qui ay vescu tellement lié aux exercices ecclésiastiques, qu'on ne m'a jamais treuvé hors de ce train, et qui suis meshuy tantost envielly dans la natu- relle et inviolable fidélité que j'ay voiiee et jurée a Son Altesse. Or, Monsieur, je vous donne la peine de lire tout ceci, affin que sil vous plait de me favoriser en ces occurrences, vous sachiés ces généralités de mes conditions, qui sont fondaments, comme je croy, bien solides pour bastir sur iceux les défenses dont j'auray besoin si ce malheur con- tinue, qui m'a des-ja si souvent fasché, tous-jours sans ma coulpe, grâces a Dieu, ainsy que le tems a fait voir, qui, de plus en plus, descouvrira l'invariable ingénuité et franchise que j'ay en mon devoir de sujettion naturelle envers la coronne sous laquelle je suis nay et nourri. Ces jours passés Monseigneur l'Archevesque de Bour- ges, estant a Nantua (0, vint icy me visiter et une seur Religieuse quil y a ; dequoy j'advertis soudain monsieur le Marquis de Lans, et je croy qu'il aura fait passer Tadvis vers Son Altesse. Tout cela, Monsieur, sont offices d'amitié, de civilité et de pieté rendus a la bonne foy par ces Prselatz, et que je ne puis empescher par aucune sorte de légitime praetexte, puisque je n'oserois seulement penser de leur faire semblant de la peine que mon esprit a dequoy leur visite me fait regarder. Vostre charité, Monsieur, me protégera, sil luy plait, et je l'en conjure par celle de Nostre Seigneur, que je supplie vous estre propice et vous combler de ses bénédictions, demeurant pour tous-jours, Monsieur, Vostre très humble, très affectionné serviteur, Franç% E. de Genève, ilii avril 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. (i) André Frémyot, archevêque de Bourges, était prieur commendataire de Saint-Pierre de Nantua en Bugey. (Voir tome XIII, note ( i ), p. 165.)  i88 Lettres de saint François de Sales MCLXXXIX AU DUC DE NEMOURS, HENRI DE SAVOIE (O Demande d'une faveur pour un gentilhomme. Annecy, 7 avril 1616. Monseigneur, Je joins ma très humble supplication a celle que mon- sieur le baron de Vilette (-) vous va faire, puisque celuy le bien duquel elle regarde est également mon parent comme a luy (3). Vostre Grandeur jugera bien que je voudrois avoir un plus aggreable sujet d'implorer sa bonté ; mays puisque cellu}^ ci me presse, je ne laisse pas de me confier en elle que je ne seray pas esconduit, selon Ihonneur que j'ay d'estre avoiié, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur. Francs E. de Genève. Vil avril 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Paris, Archives de l'Archevêché. ( I ) Bien que l'Autographe ne porte point d'adresse, il ne saurait y avoir de doute pour le destinataire. (2) Amédée de Chevron- Villette (voir tome XI, note ( i ), p. 341). ( 5 ) Ignorant la grâce demandée, il est presque impossible de désigner, entre les nombreux gentilshommes, parents communs des familles de Sales et de Chevron-Villette, celui qui avait besoin de la faveur du duc de Nemours.  Année i6i6 i8c^ MCXC A MADAME DE BRESSIEU (0 iINÉDITe) Une affaire sur le point de se terminer. — Céder aux conseils des amis. Annecy, 7 avril 1616. Madame ma très chère Seur, Je receu l'autre jour une lettre de monsieur le Marquis d'Aix (2I, par laquelle il me dit que le sieur Charriere (3) se resoult a vous rendre toutes les satisfactions possibles, telles qu'elles seront advisees par ceux qui prendront la peine de vouloir terminer l'affaire (4); et que sur cela, il vous avoit fait prier de vouloir ouïr les propositions, selon que je luy avois fait entendre que vous les ouïries, et feries ce que vos principaux parens et amis vous con- seilleroyent ; qui est, a mon advis, ce que nous resolusmes Ihors que nous eusmes le bien de vous voir. Je vous supplie donq qu'il vous playse faire ainsy , puisque vous ne pouves jamais faillir de vous rapporter a vos amis, et que cela obligera quantité de personnes a croire de vostre cœur beaucoup de bien et les contentera. (i) L'affaire traitée dans cette lettre prouve qu'elle a été écrite à M'"^ de Bressieu, Fille de Philibert de la Forest et de Madeleine Fléard, et sœur aînée de M""* de la Fléchère, Fnnemonde avait épousé (contrat dotal du 26 février 1583) Emmanuel-Philibert, de la famille piémontaise des Roero, devenu sei- gneur de Bressieu comme héritier de son grand-père maternel. (Voir ci-dessus, note (3), p, 98.) Douze enfants naquirent de ce mariage (voir ibid., note (3), p. 97), et M'"« de Bressieu, restée veuve vers 1610, eut beaucoup à faire, soit en Savoie, soit en Piémont, pour soutenir d'ennuyeux procès et débrouiller d'inextricables difficultés. Elle eut. pour l'aider, les conseils, la persévérante et paternelle sollicitude de François de Sales; plus d'une fois nous en retrou- verons les preuves dnns la suite de la correspondance du Saint. (2) Louis de Seyssel-la-Chambre (voir tome XIV, note (2), p. 891. (3) Voir ci-dessus, note (41, p. 97. (4) Voir ibid., Lettres mcxxxviii, p. 97, et mcxliv, p. m.  190 Lettres de saint François de Sales Je pars, et vous escris ces quatre motz le pied a l'es- trier (0, mais vous jugeras bien que c'est avec l'affection, Madame, ma très chère Seur, de Vostre plus humble frère et serviteur, France. E. de Genève. VII avril 161 6. Revu sur l'Autographe appartenant à M. Alexis VoUon, peintre collectionneur, à Paris, ( I ) Le saint Evêque partait pour installer les Barnabites à Thonon.  MCXCI A LA MÈRE DE CHANTAL (fragment) Quelles amitiés sont indépendantes des distances et des séparations. Annecy, [7 avril 1616 (i).] Au demeurant, ma très chère Mère, demeurés avec la paix et consolation de Nostre Seigneur : et moyennant sa grâce, dans huit jours au fin plus tard je seray icy, d'où pourtant je ne penseray jamais sortir tandis que Dieu m'y tiendra en moy mesme. Vous mesme, ma très chère Mère, sçavés bien que la sainte unité que Dieu a faite est forte plus que toute séparation, et que les dis- tances des lieux n'ont point de pouvoir sur elle. Ainsy, Dieu vous bénisse a jamais de son saint amour. C'est un cœur qu'il nous a fait, unique en esprit et en vie. Bon jour, ma très chère Mère; conserves moy, je vous supplie, et je vous conserveray bien. Dieu aydant. ( I ) La lettre précédente nous montre le Saint sur son départ ; le lo avril il était à Thonon, et rentrait le i6 à Annecy. C'est sans doute à l'occasion de ce voyage que ces lignes furent écrites. La peste qui, au printemps de 1616, sévissait encore à Genève (cf. ci-après, p. 204), pouvait donner des appré- hensions à la Mère de Chantai, et augmenter sa peine de voir s'éloigner le saint Evêque. Toutefois, nous ne donnons pas la date comme certaine, bien que les autres absences de François de Sales pendant les séjours de la Fonda- trice à Annecy semblent, par leurs circonstances, concorder moins avec la teneur de ce fragment.  Annf.h i6i6 191  MCXCII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Retour d'un voyage en Chablais. — Mort du comte de Tournon. — Deux sortes de bons désirs : ceux qui sanctifient l'âme et ceux qui remplissent l'enfer; comment les distinguer. — Méthode très simple pour la méditation des mystères de la Vie de Notre-Seigneur. — Salutations affectueuses. Annecy, 17 avril i6\6. Je revins hier de Chablaix, ma très chère Fille, ou, grâces a Dieu, j'ay laissé les Pères Barnabites establiz, selon le commandement de Son Altesse et du Prince Cardinal (0. Demain je vay consoler madame la Com- tesse de Tornon sur le trespas de son mari 1^), y estant obligé par le parentage qui est entre nous et par les obligations que j'ay a la mémoire du decedé. C'est pour vous dire, ma très chère Fille, que je vous escris sans loysir, et néanmoins je vous veux respondre aux deux questions que vous m'aves faites ci devant (3), car je voy bien que pour néant j'attens les commodités de mieux faire, puisque je suis destiné au continuel accablement du tracas. Ma très chère Fille, il y a deux sortes de bons désirs : Tune, de ceux qui augmentent la grâce et la gloire des serviteurs de Dieu; l'autre, de ceux qui n'opèrent rien. Les désirs de la première sorte s'expriment ainsy : Je desirerois de faire, par exemple, l'aumosne, mais je ne la fay pas, par ce que je n'ay pas dequoy. Et ces désirs accroissent grandement la charité et sanctifient l'ame ; ainsy désirent les âmes dévotes le martire, les opprobres et la croix, quilz (sic) ne peuvent néanmoins obtenir. (i) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 177. (2) On lit aux Registres paroissiaux de Rumilly, année 1616 : « Le is du mois d'avril a esté ensepulturé noble et puissant seigneur Prosper de Maillard, gouverneur de Savoye et comte de Tournon. » ( 3) Le Saint avait promis une réponse à la première question dans sa lettre du 2 février. (Voir ci-dessus, p. 141.)  «92 Lettres de saint François de Sales Les désirs de la seconde sorte s'expriment ainsy : Je desirerois de faire Taumosne, mais je ne la veux pas faire. Et ces désirs ne sont pas empeschés par l'impos- sibilité, mais par la lascheté, tiédeur et défaut de cou- rage; c'est pourquoy ilz sont inutiles et ne sanctifient point Tame, ni ne donnent nul accroissement de grâce : * Serni.minTemp. dont Saint Bernard dit * que l'enfer en est plein. Resur..§3: Serni. ,, -, . • . . , ,.^ xixinCant.Cf. So- H est vray que pour 1 entière resolution de vostre diffi- Bern ' Ti^^ ^^ ^ culté il faut que vous remarquies quil y a des désirs qui semblent estre de la seconde sorte, qui sont toutefois de la première, comme au contraire il y en a qui semblent estre de la première et sont de la seconde. Par exemple, nul serviteur de Dieu ne peut estre sans ce désir : O que je desirerois bien de mieux servir Dieu ! helas ! quand le serviray-je a souhait ? Et par ce que nous pouvons tous- jours aller de mieux en mieux, il semble que les effectz de ces désirs ne sont empeschés que faute de resolution ; mays il n'est pas vra}^ car ilz sont empeschés par la condition de cette vie mortelle, en laquelle il ne nous est pas si aysé de faire que de désirer. C'est pourquoy ces désirs en gênerai sont bons et rendent meilleure Tame, l'eschaufant et affectionnant au progrès. Mays quand en particulier il se présente quelque occasion de proflfiter, et en lieu d'en venir a Teffect on en demeure au désir, comme par exemple : il se présente occasion de pardonner une injure, de renoncer a la propre volonté en quelque particulier sujet, et en lieu de faire ce pardon ou renoncement, je dis seulement : Je voudrois bien pardonner, mais je ne sçaurois ; je voudrois bien renoncer, mais il ny a moyen ; qui ne void que ce désir est un amusement, ains quil me rend plus coulpable d'avoir une si forte inclination au bien et ne la vouloir pas effectiier ? Et ces désirs ainsy faitz semblent estre de la première sorte, et sont de la seconde. Or, maintenant il vous sera aysé de vous résoudre, comme je croy; que sil vous reste quelque difficulté, escrives-la mo}^, et tost ou tard je vous respondray de tout mon cœur, qui est certes tout vostre, ma très chère Fille.  Année i6i6 193 Celles qui sont tendres des imaginations messeantes, es méditations de la Vie et de la Mort du Sauveur, doivent, tant qu'elles peuvent, se représenter les misteres sim- plement par la foy, sans se servir de l'imagination. Par exemple : Mon Sauveur a esté crucifié, c'est une propo- sition de la foy ; il suffit que je l'appréhende simplement, sans m'imaginer comme son cors pendoit sur la croix. Et Ihors que les imaginations deshonnestes veulent naistre, il faut se revancher et destourner par des affections procé- dantes de la foy. O Jésus crucifié, je vous adore, j'adore vos tormens, vos peines, vostre travail ! Vous estes mon salut*. Car, ma très chère Fille, de vouloir pour ces sales * Ps. xxxvu, uit. représentations quiter la méditation de la Mort et Vie de Nostre Seigneur, ce seroit faire le jeu de Tennemi, qui tasche par ce moyen de nous priver de nostre plus grand bonheur. Il faut donq gauchir et se destourner ainsy par le mo3^en de la simple foy. En vérité, j'escris sans haleine, mais vous suppleeres par vostre douceur. J'escriray un'autre fois a ma Seur Peronne Marie ( et puis a ma Seur Marie Aymee ( ^ 1^ et ce pendant je salue leur dilection, que je prie de me bien recommander a Nostre Seigneur, comm'aussi ma Seur Françoise Hieronime (3) et toutes les autres Seurs que je chéris extrêmement en la Croix du Sauveur. Je salue monsieur l'Aumosnier (4) et suis tout sien. A Dieu, ma très chère Fille, a Dieu soyons nous éter- nellement pour l'aymer et bénir sans cesse. Annessi, le 17 avril 161 6. Je salue humblement M. de Saint Nizier {'•>), et le R. P. Philippe (6); et vous prie, quand vous verres le  (i) Sœur Péronne-Marie de Chastel. (2) Sœur Marie-Aimée de Bionay (voir ci-après, Lettre mcxcvii, p. 205). ( 5) Sœur Françoise-Jéronyme de Villette (voir ci-dessus, note ( i ), p. 159). (4) Claude de Sevelinges (cf. ci-dessus, p. 141). (5) Nicolas Ménard, sacristain de l'église Saint-Nizier, à Lyon. (Voir ci- dessus,, note (3 ), p. 103.) (6) D. Philippe de Saint Jean-Baptiste Malabaila, Feuillant (voir le tome précédent, note (2), p. 240). Lettres VII i j  i94 Lettres de saint François de Sales R. P. Recteur (0, de l'asseurer de ma très humble et sin- cère affection. Je salue mesdames VuUiat ( = ) et Colin (3). A ma très chère Fille en N. S., Ma Seur Marie Jaqueline Favre, Supérieure de S^« Marie. A Lion. Revu sur l'Autographe appartenant à M"*Boissat, à Albens (Savoie). (i) Le P. Charles Mallians, recteur des Jésuites de Lyon. (Voir le tome précédent, note ( i ), p, 333.) ( 2 ) M™" Vulliat, femme du contrôleur Mamert VuUiat. (Voir ibid.. note ( 2 ), p. 188.) (3) Isabeau Daniel (voir ibid., note ( i ), p. 241).  MCXCIIl A MADAME DE LA FLÉGHÈRE Affaires et nouvelles diverses. — Réclamations de créanciers ; comment les supporter. — Quel ordre suivre dans le paiement des dettes. — Projet de séjour à Annecy pour M™® de la Fléchère. Annecy, 21 avril (i) 161 6. Ma très chère Fille, Je vous escris emmi les affaires du Sinode, c'est a dire précipitamment. Je fus lundi voir M'"'' la Comtesse (2), marri de n'y treuver que ma chère filleule de chez vous (3). J'escriray cesoir a M. Bonfilz(4), parle seigneur ( I ) La copie porte le quantième du xix avril, mais il faut certainement XXI. Le Synode, en effet, commença le 20; de plus, ces lignes ont été écrites, non le lendemain du 18 (lundi), mais au moins deux ou trois jours après. Enfin, le voyage du « seigneur Roc » (voir la lettre suivante) achève de fixer la date. (2) La comtesse de Tournon (voir ci-dessus, p. 191). (3) Françoise de la Fléchère. fille cadette de la destinataire. (Voir tome XIV, note (i), p. 56.) (4) Originaire de Nice, Horace Bonfils avait succédé en 1612 à François de Moyron dans la charge de trésorier général du Genevois. Ses fonctions, peut- être aussi l'amitié spéciale de Henri de Nemours (cf le tome précédent, note (i), p. 199), le rendirent suspect au duc de Savoie, quand le prince  Année 1616 195 Roc i 0, du sujet que vous desires, et parleray a M. de Mon- regard ( = ) si tost que je pourray le voir. M. de Galles, médecin de wSessel (3), m'a envoyé la lettre ci jointe que vous verres, comme aussi M. Guydeboys (4) cett'autre. Ma très chère Fille, il n'y a remède, il faut a ce com- mencement estre accablée de demandes et souffrir qu'on se plaigne rudement de vous. Mays il se faut garder, tant que vous pourrés, de contrister personne par vos responses, ains il faut tascher de rendre rayson a un chacun des refus ou retardemens que vous estes contrainte de faire. Et quant aux effectz, il faut s'essayer de payer premièrement les dettes privilégiés, comme je pense estre celuy des médecins, qui, comme mercenaires, demandent leurs gages, entant quil se treuvera deu. En somme, ma Paille, croyes que je compatis avec vous, et me semble que quand vous aves du mal je l'ay avec vous. Un peu de patience surmontera tout. M. de Charmoysi (5) est d'advis que vous venies faire vostre séjour en cette ville, et dit quil vous le signifia Ihors quil vous vit, tant pour estre plus près dufilz (^), que pour avoir meilleur et plus promt advis es occurrences de vos affaires. Vous pouves penser si ce seroit mon inclination ; mays a loysir nous en résoudrons.  vassal se révolta contre son suzerain. Bonfils, emprisonné au mois d'août i6r6, libéré bientôt, puis disgracié par son maître, fut réintégré dans sa charge. Une seconde arrestation en 1620 précède une nouvelle période de faveurs. Conseiller d'Etat, second président de la Chambre des Comptes de Savoie, il devint en 1623 président en chef et général des Finances de Piémont. (D'après Capré, Traité historique, et Carutti, Cariche del Piemonte, etc., Torino, 1798, tome III, etc.) (i) Roch Calcagni, qui se rendait auprès du duc de Nemours. (Cf. ci-dessus, p. 170.) (2) Fils de Philippe Cristan, de Thônes, et de Philippine Juge, noble François Cristan, seigneur de Montregard et coseigneur de la Val-des-Clets, épousa Charlotte de Michaille, qui teste le 19 avril 1630, et en secondes noces Louise de Dalniaz (contrat dotal du 14 août 1631), veuve de Jean Brunet, seigneur de Doucy. (Voir le tome précédent, note (5), p. 184.) (3) Son nom ne figure pas dans VHistoire de Seyssel par Fenouillet, et les recherches faites pour retrouver sa trace n'ont pas abouti. (4) R'* Jean-François-Melchior Guidebois (voir ci-dessus, note (i), p. 14s). ( 5 ) On l'a vu déjà, Claude de Charmoisy s'occupait activement des affaires de la veuve de son cousin. (Cf. ci-dessus, pp. 164, 169.) (6) Charles de la Fléchère, qui continuait ses études au collège d'Annecy.  196 Lettres de saint François de Sales Pour maintenant, Dieu vous bénisse, ma très chère Fille. Vive Jésus ! Amen. XIX avril 16 16. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de TEtat.  MCXCIV A LA MÊME Etre douce et civile envers les solliciteurs. — M. Guidebois et ses Bulles, Annecy, 22 avril 1616. Ce matin le sieur Roch est parti de cette ville (0, ma très chère Fille, et j'ay escrit par luy a M. Bonfilz, qui est a Lagnieu (2), pour vostre affaire (3), puisqu'il nV a pas apparence de le voir si tost, et ledit sieur Roch m'a dit quil y contribueroit son crédit. Il faut tenir bon en la douceur et cordiale civilité envers ceux qui demandent, et Dieu vous assistera et fera que vos affaires se demesleront honnestement et plus tost que vous ne sçaures espérer. Quand le sieur Guydeboix aura ses Bulles (4), vous accommoderes le reste, non pas aysement, mais tout bellement, selon vostre promesse, et on le rendra capable. Je pense que vous aves bien fait de vandre le cheval, car c'est une dangereuse garde (5). (i) Voir la lettre précédente. (2) Au milieu du xiv* siècle, Lagnieu avait passé de la couronne de France à celle de Savoie, et en 1571, comme membre du marquisat de Saint-Sorlin, était devenu apanage de la Maison de Savoie-Nemours. (3) Etait-ce l'affaire des deux cents pistoles promises au défunt (cf. Lettre MCLXxvii, p. 169), ou bien s'agissait-il d'arrérages sur les « 752 livres de gaiges » dues à M. de la Fléchère comme « gentilhomme servant » du duc de Nemours ? (Voir Mugnier, Histoire du Président Favre. Paris, Champion, 1902-1905, note (4), p. 171.) (4) Les Bulles pour la prise de possession de la coramanderie de Notre- Dame de Vion. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 145.) (5) Cf. ci-dessus, Lettre MCLxxvri, p. 170.  Année 1616 i^y Vives tous-jours toute a Nostre Seigneur, ma très chère Fille, et me tenes pour tout voslre en luy, car je le suis plus que vous ne sçauries dire. Vive Jésus ! Amen. XXII avril. A Madame Madame de la Fléchera. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.  MCXCV AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l''' Requête contre Scaglia, le prétendant de Contamine. Annecy, 26 avril 1616. Monseigneur, Les grâces que la bonté de Vostre Altesse nous a faites me donnent confiance d'en requérir tous-jours des nou- velles, puisque mesme elles tendent toutes a la gloire de Dieu, que vostre pieté ne se lasse jamais de servir et accroistre. Les Pères Barnabites sont establiz a To- non (0 ; reste de les y conserver, et pour cela il est requis que le prieuré de Contamine, sur lequel leur entretene- ment est principalement assigné, soit mis en asseurance pour eux et délivré de la conteste que le seigneur Abbé Scaglia en fait (2) ; ce que la prudence de Vostre Altesse fera fort aysement par les moyens convenables. (i) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 177, et cf. p. 191. (2) Abbé de Saint-Just, près de Suze, et de Staffarde, poursuivant encore le bénéfice de Contamine, Philibert-Alexandre Scaglia, second fils de Philibert- Gérard, comte de Verrua, et de Blanche Ponte di Scarnafigi (cf. ci-dessus, notes (2), (3), p. 181), avait, comme son père, embrassé la carrière diploma- tique. Depuis le mois d'août 1614, il était ambassadeur du duc de Savoie à Rome. Sa mission finie, en 1623, il partit pour la France ; envoyé ensuite aux Pays-Bas et en Espagne, il s'acquit la réputation de diplomate des plus adroits et subtils. « L'histoire des négociations de l'abbé Scaglia à Londres, Paris et Bruxelles, » dit un auteur, « et celles de Barocci son secrétaire, feraient  198 Lettres de saint François de Sales Dieu soit a jamais au milieu du cœur de Vostre Altesse pour le remplir de bénédictions, et je suis invariablement, Monseigneur, Vostre très humble, très fidèle et très obéissant orateur et serviteur. Francs E. de Genève. XXVI avril 161 6, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de TEtat. un portrait agréable et instructif, quoique peu édifiant, du temps et des hommes. » (Carutti, Storia délia diplomaîia délia Corte di Savoia, 1876, vol. II, p. 264.) Philibert-Alexandre mourut à Anvers, en 1641.  MCXCVI a un gentilhomme (i) {minute inédite) Un Mémoire dont on doit ignorer Tauteur. — La vie toute sainte et édifiante des Religieuses de la Visitation. — Pourquoi François de Sales n'a pas publié les Indulgences déjà obtenues en leur faveur; celles qu'il désire. — La pension de M. Desplans. — Réveil de la contagion à Genève. Annecy, 27 avril 1616. Molto Illustre Signore mio osservandissimo, Mando a V. S. il Memoriale circa il modo di procurare la conversione delli heretici (-) che a me pare convene- vole ; ma presupone in ogni modo che i Principi siano in Mon très Illustre et très honoré Seigneur, j'envoie à Votre Seigneurie le Mémoire touchant le mode qui me semble plus convenable pour obtenir la conversion des hérétiques (2) ; toutefois, comme il présuppose de toute façon que les princes jouis- ( I ) Quel est le gentilhomme auquel le Saint adresse une lettre si confiante ? De nombreuses et minutieuses recherches faites à Turin et aux Archives Vati- canes n'ont pas réussi à nous donner son nom. Il a été également impossible de retrouver les différentes pièces mentionnées dans ces pages, sauf le Mé- moire sur la conversion des hérétiques. (2) Cf. le tome précédent, note (3), p. 273.  Année 1616 199 pace, et per questo non è tempo di proponerlo adesso, et preg'ho V. S. che mai si sappia che da me sia uscito taie Memoriale. Ma con V. vS. tratto con tutta fiducia, chè io non vorrei celarle cosa veruna, perché se ben io non l'ho conosciuta in faccia, tuttavia so che il suo zelo verso la religion catholica è tanto puro, che io non posso dubitar délia sua carità. Et sopra questo fundamento, vengho a supplicar V. vS. molto Illustre che si degni aiutar, anzi far un'opera pia quale io desidero molto et laquale io non so come fare riuscire, non essendo più che tanto cono- sciuto in quella Corte ^^\ Il negotio non è grande in se, ma, per quanto mi vien detto, non lascia d'esser difficile. Habbiamo qui in questa città d'Annessi una devotis- sima et veramente santissima Congregatione di donne, vedove et vergini, lequali la maggior parte sono nobilis- sime, et non solamente savoyarde, ma ancora di Borgogna et di Francia. Vivono tutte insieme et in commune, sotto l'ubidientiadi una Superiora che esse eleggono ogni terzo  sent de la paix, ce n'est pas le moment de le proposer : aussi, je vous demande que jamais personne ne sache que ce Mémoire est venu de moi. Mais avec Votre Seigneurie je traite en toute confiance, je ne voudrais rien vous celer ; car, bien que je ne vous connaisse pas personnellement, votre zèle pour la religion catholique est si pur que je ne puis douter de votre charité. Sur ce fondement, je viens supplier Votre très Illustre Seigneurie qu'elle daigne aider, voire même accomplir une œuvre de piété que je désire beaucoup, sans néanmoins savoir comment la faire réussir, n'étant guère connu en cette Cour (0. La chose n'est pas considérable en soi, mais à ce que l'on me dit, elle ne laisse pas d'être difficile. Nous avons en cette ville d'Annecy une très dévote et vraiment très sainte Congrégation de femmes, veuves et vierges, qui pour la plupart sont de très noble extraction, non seulement de la Savoie, mais encore de Bourgogne et de France. Elles vivent toutes ensemble et en communauté, sous l'obéissance d'une Supérieure élue par elles tous les trois ans ; observent strictement cette obéissance, s'adonnent (i) Des membres du Sacré-Collège que François de Sales avait connus personnellement en 1399, il ne restait plus à Rome que le Cardinal Borghese. devenu Paul V, et Bellarmin. Il n'en est pas moins vrai, cependant, que son mérite et ses vertus n'étaient point ignorés à la Cour pontificale.  200 Lettres de saint François de Sales anno; osservano quella obedientia strettamente, fanno ogni giorno l'oratione mentale, fanno visitare et aiu- tare, per alcune deputate, le povere donne malate délia città, con una carità incredibile. Hanno una gentilis- sima chiesa attaccata alla loro casa, et hanno un coro interiore nel quale ogni giorno cantano TOfficio délia Madonna Santissima, con uncanto tanto pioet suave, che mettono in devotione ognuno che le sente. Et fra le altre cose usano questa carità, che ricevono nella loro Con- gregatione le donne che per debolezza di complessione et infermità corporali non possono entrare nelle altre Religioni, purchè habbiano la mente buona et il cuor * Cf. Constit. de la sincero *. Et posso dire in verità che sono di buonissimo Visitation, Z)^ /a ^« , . .^.--. .., pour laquelle cette OQore a tutti, ct ctiaudio alli herctici, che vedendo o vero fuslflufe^^^^^^^^^^ sapendo come vivono in quella Casa, confessano che tal vita non puô essere se non dal Spirito Santo. Et esse pregano particolarmente per la santa Chiesa et per la conversione delli heretici. Hora, furono concesse dalla Santità di Nostro Signore alcune Indulgenze a queste Signore et Sorelle (0, le  chaque jour à l'oraison mentale, font visiter et secourir avec une charité incroyable, par quelques-unes d'entre elles, les pauvres femmes malades de la ville. Une gracieuse église est attenante à leur maison, avec un chœur intérieur, où elles chantent chaque jour l'Office de la Très Sainte Vierge d'un air si pieux et si doux, qu'elles donnent de la dévotion à tous ceux qui les entendent. Entre autres choses, la Congrégation pratique cette charité, de recevoir les fem- mes qui, pour la faiblesse de leur complexion ou pour des infirmités corporelles, ne peuvent entrer dans les autres Ordres, pourvu qu'elles aient l'esprit bon et le cœur sincère. En vérité, je puis dire qu'elles sont de très bonne édification pour tous et pour les hérétiques eux- mêmes, lesquels, voyant ou sachant comment elles vivent en cette Maison, confessent que leur genre de vie ne peut venir que de l'Esprit-Saint. Aussi prient-elles particulièrement pour la sainte Eglise et pour la conversion des hérétiques. Or, Sa Sainteté a accordé à ces Dames et Sœurs certaines Indul- gences (0, que je n'ai cependant pas voulu faire publier, parce qu'il (i) Voir le tome précédeat, note (5), p. 149, et la note (i) ci-dessus, p. 198; cf. ci-après, p. 204.  Année i6i6 201 quali perô io non ho voluto che fossero pubblicate, poichè mi è parso che tali Indulgenze siano state concesse corne se questa Congregatione fosse una Società, Confraternita, overo Compagnia di donne che vivessero ognuna in casa sua ; il che non è vero, perché vivono insieme con tanta osservanza religiosa, che non si puô ne anco col pensiero imaginare una osservanza piîi pura et perfetta nella castità, ubedientia et povertà in commune. Et dico in commune, perché non mendicano ne direttamente, ne indirettamente, anzi vivono di q uello che apportano seco *. * ^^- ^°™- P^^^ced., ^ ^^ pp. 105, 107. Onde adesso desiderando io di farli havere l'Indul- genze conforme ail' Instituto loro, non so chi adoprare se non la carità di V. S. molto Illustre, la quale, dove bisognasse, potrà se gli piace farne anco particolar sup- plica a Nostro Signore, acciô si degni favorire detta Congregatione. Et per questo mando a V. S. la copia del- r Indulgenze che io non ho voluto far pubblicare et la copia deir Indulgenze che si desiderano, con un Memoriale del- r instituto di questa Casa pia (0, acciô sappia ogni cosa che a questo negotio sarà necessaria ; dove poi aggiungo  m'a semblé qu'elles avaient été concédées comme si cette Congré- gation eût été une Association, Confrérie ou Compagnie de femmes vivant chacune dans sa maison ; ce qui n'est pas, car elles demeurent au contraire toutes ensemble, avec une observance religieuse telle, qu'on ne saurait, même par la pensée, imaginer une fidélité plus pure et parfaite en chasteté, obéissance et pauvreté qui réduit tout en commun. Et je dis en commun, parce qu'elles ne mendient point, ni directement ni indirectement, mais vivent de ce qu'elles apportent en entrant. Je désire donc maintenant leur faire avoir des Indulgences con- formes à leur Institut; mais je ne sais qui employer pour cela, sinon la charité de Votre très Illustre Seigneurie, qui pourra, si bon lui semble, adresser même une supplique particulière au Saint-Père, pour qu'il daigne favoriser cette Congrégation. Dans ce but, je vous envoie une copie des Indulgences que je n'ai pas voulu faire publier et une copie de celles qu'on souhaite, avec un Mémoire de la fonda- tion de cette pieuse Maison ( i ), afin que vous sachiez tout ce qui sera requis en cette affaire. J'ajoute encore un point très important : cette (i) Voir note (i) ci-dessus, p. 19S.  202 Lettres de saint François de Sales un articolo che è importante. Et è che questa Congrega- tione non havendo i tre voti solenni di ubedientia, castità et povertà, quantunque osservi queste tre virtù strettissi- mamente, per questo non è una Religione formata, anzi una Congregatione di Oblate. Et forse che Sua Santità haverebbe a piacere che se ne facesse una Religione formata, con obbligo alla clausura secondo l'ordine dato * Sess. XXV, de Re- dal Concilio di Trento *; et questo sarebbe a me facilis- *' * ■ simo da fare, purchè Sua Santità si contentasse che le cose passassero secondo il Memoriale (0. Hora, che cosa dira V. S. che io con tanta fiducia vado adoprando la carità sua ? Dica pur, se gli piace, che cha- * I Cor., XIII, 7. ritas omnia sustinet, omnia facit et omnia sperat*. Ho poi sino adesso ricevuti li 75 ducatoni mandati per il signore Desplans (2), et quando havrô ricevuti li altri  Congrégation, n'ayant pas les vœux solennels d'obéissance, chasteté et pauvreté, bien que ces trois vertus s'y observent strictement, n'est pas un Ordre religieux formel, mais une Congrégation d'Oblates. Sa Sainteté aimerait peut-être qu'on en fît un Ordre religieux, avec l'obligation de la clôture selon les prescriptions du Concile de Trente ; cela me serait très facile, pourvu qu'EUe voulût bien agréer que les choses fussent déterminées suivant le Mémoire ( i ). Mais, que direz-vous, Monsieur, de ce que j'emploie votre charité avec tant de confiance ? Dites hardiment, s'il vous plaît, que la chanté supporte tout, fait tout et espère tout. J'ai reçu jusqu'ici les soixante-quinze ducatons pour M. Desplans ( 2 ); (i) Cf. plus haut, Lettre mclxii, p. 137, et ci-après, celle du 10 juillet au Cardinal Bellarmin. (2) Famille genevoise de barbiers-chirurgiens, les Desplans arrivèrent à la noblesse par la charge de syndic confiée à l'un d'eux. Quand vint la Réforme, ils s'exilèrent pour garder la foi catholique, mais quarante ans plus tard, ayant adhéré au protestantisme, ils rentrèrent à Genève, réclamant le titre de bourgeois. Louis Desplans naquit dans cette ville en 1581. Il était fils d'André et de sa première femme Jeanne Panissod. (D'après les Notes de M. Eugène Riiter.) Dans les dernières années du pontificat de Clément VIII, Louis est à Rome où il abjure Thérésie et entre dans les Ordres. Paul Vie pourvut en 1614 d'un canonicat au Chapitre de Saint-Pierre de Genève, et d'une pension dont saint François de Sales eut plus d'une fois à s'occuper. (Cf lettre du Cardinal Borghese au Nonce de Savoie, 12 juillet 1614, Archives Vaticanes, Borghese I. 909.)  Année i6i6 203 25, mandarô un certifficato délia ricevuta delli 100 et del sborso che io n'havrô fatto ( ^ ). lo mi smenticavo che io scrivo alT Illustrissimo Car- dinal Bellarmino (-) et si scrive anco dalli nostri Padri Barnabiti al Procurator générale dell' Ordine loro (3), ac- ciô, dove fosse bisogno, aiutassero il negotio di quelle In- dulgenze ; et spero che la Serenissima Infante Duchessa di Mantova (4) farà scrivere ail' Imbasciatore di Sua Al- tezza » acciôfaccia anche egli ufficio, essendo essa molto affettionata a detta Congregatione. Et a V. S. s'invieranno tutte le lettere acciô le impieghi secondo che vederà esser necessario. Et faccio tutte queste diligentie, perché essendo costî il  lorsque j'aurai reçu les vingt-cinq autres, j'enverrai une attestation de la réception et du déboursement que j'aurai fait de ces cent ducatons (0. J'oubliais de dire que j'écris à l'Illustrissime Cardinal Bellarmin (2) et que nos Pères Barnabites écrivent également au Procureur géné- ral de leur Ordre (3), afin que, s'il en était besoin, ils aidassent pour l'affaire des Indulgences. J'espère aussi que la Sérénissime Infante, duchessse de Mantoue (4), qui affectionne si fort la Congrégation, fera écrire à l'ambassadeur de Son Altesse (5) de s'employer dans le même but. Toutes ces lettres seront envoyées à Votre Sei- gneurie pour qu'elle les utilise selon qu'elle le jugera nécessaire. Je prends toutes ces mesures parce que M. Philippe de Quoex, (i) Voir à TAppendice I une lettre du Nonce de Savoie au Saint, qui fait aussi mention de M. Desplans et de sa pension, (2) Cette lettre ne nous est pas parvenue. (3) Depuis le Chapitre général de 1614, le procureur général des Barna- bites était le P. Tobie Corona. Né en 1566 à Monza d'une noble famille, et profès le 8 octobre 1583, il avait occupé des charges importantes à Bologne, Casai, Montferrat, Rome et Naples. Diverses missions auprès de Charles-Em- manuel I*"" et de Louis XIII lui furent confiées, et les Papes le comblèrent d'honneurs. Urbain VIII le nomma conseiller et théologien de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem et administrateur de la province romaine. Il mourut en 1626, à Naples, où il secondait le Cardinal François Boncompagni. Tobie Corona était grand ami des lettres et auteur lui-même ; nombre d'historiens ont loué sa science et son mérite. (D'après Ungarelli, Bibliotheca scriptorum e Congregatione Cler. reg. S. Panli, Romas, 1856.) (4) Marguerite de Savoie, fille de Charles-Emmanuel, protectrice de la Visitation. (Voir le tome précédent, note ( i ), p. 104.) (5) L'abbé Philibert-Alexandre Scaglia (voir ci-dessus, note (2), p. 197).  204 Lettres de saint François de Sales signor Philippe de Quoex, che ottenne dette Indulgenze( ^ ), egli ci scrisse che era cosa difficilissima di ottenere Indul- genze in altro modo ; sebbene io non vedo che vi sia causa veruna légitima di tante difficoltà, poichè se si concedono liberamente Indulgenze aile Compagnie pie, molto maggiormente si dovranno concedere ad una Con- gregatione di tanta perfettione. La peste è di nuovo svegliata nella città di Geneva i^) et tutto il paese vicino sta benissimo, parendo che Iddio voglia castigare quel populo, nemico del suo santo nome Cf. Is., xxvni, 19. et servitio. Utinam castigatio det intellectum * / Et con questo, pregando sua divina Maestà che a V. S. molto Illustre dia ogni vera félicita, resto eternamente Suo divotissimo et humile servitore, Franc", Vescovo di Geneva. In Annessi, alli xxvil d'Aprile 161 6. Revu sur le texte inséré dans le I*"^ Procès de Canonisation.  qui obtint ces Indulgences (O, nous manda de Rome qu'il était très difficile d'en obtenir d'autre façon. Cependant, je ne vois pas qu'il y ait une cause légitime pour soulever ces difficultés ; car, puisqu'on accorde si libéralement des Indulgences aux Associations pieuses, à plus forte raison devra-t-on les concéder à une Congrégation d'une si grande perfection. La peste s'est de nouveau réveillée à Genève (2), tandis que tout le pays avoisinant n'est nullement atteint ; aussi semble-t-il que Dieu veuille châtier ce peuple, ennemi de son saint nom. Ah ! si du moins le châtiment lui donnait l'intelligence ! Sur ce, priant la Majesté divine de combler Votre très Illustre Seigneurie de tout vrai bonheur, je demeure à jamais Son très dévoué et humble serviteur, François, Evêque de Genève. Annecy, le 27 avril 1616. (i) A la fin de l'année 1613. (Voir le tome précédent, p. 149.) (2) Cette recrudescence de répidémie dura un mois, ainsi que l'indique une lettre des syndics de Genève {12 juillet 1616) au seigneur de Monthoux. Ils demandent la liberté de commerce en Savoie parce que Genève était « libre de pestilence depuis le 17 mai. » (Archives de Giez.)  Année 1616 205  MCXCVII A LA SOEUR DE BLONAY MAITRESSE DES NOVICES A LA VISITATION DE LYON Parallèle entre la vie selon l'esprit et la vie selon le sens humain. Annecy, [fin avril ou commencement de mai] i6i6 ( i ). Qu'il est bien raysonnable, ma très chère Fille, que je VOUS escrive un peu ; et que je le fay de bon cœur ! Pleust a Dieu que j'eusse l'esprit nécessaire a vostre consolation. Vivre selon l'esprit, ma bienaymee Fille, c'est penser, parler et opérer selon les vertus qui sont en l'esprit, et non selon les sens et sentimens qui sont en la chair *. * Cf. Rom., vm, s, T^ . .- , - . ., , V, . . n: Galat.. v. ib, De ceux ci il s en faut servir, u les faut assujettir, et non 17, 25. pas vivre selon iceux ; mais ces vertus spirituelles, il les faut servir et leur faire asservir tout le reste. Mays, que sont ces vertus de l'esprit, ma chère Fille ? C'est la foy, qui nous monstre des vérités toutes relevées au dessus des sens ; l'espérance, qui nous fait aspirer a des biens invisibles; la charité, qui nous fait aymer Dieu plus que tout et le prochain comme nous mesmes *, *Matt.,xxii, 57-39; d'un amour non sensuel, non naturel, non intéressé, mays d'un amour pur, solide et invariable, qui a son fondement en Dieu. Voyes vous, ma Fille, le sens humain appuyé sur la chair fait que maintes fois nous ne nous abandonnons pas asses entre les mains de Dieu, nous estant advis que, puisque nous ne valons rien, Dieu ne doit tenir conte (i) Quelques phrases et plusieurs mots supprimés dans l'édition de 1626, et que nous a conservés un ancien manuscrit gardé à la Visitation de Bourg-en- Bresse, désignent avec certitude Soeur Marie-Aimée de Blonay pour destina- taire. Quant à la date, il semble qu'on puisse la déterminer, non seulement par la comparaison de ces lignes avec les autres lettres à la jeune Directrice de Lyon, mais encore par la promesse du Saint à la Mère Favre, le 17 avril (voir ci-dessus, p. 193): « J'escriray un'autre fois... a ma Seur Marie Aymee. » Peut-être ce message fut-il emporté par M. Michel se rendant à Lyon au commencement de mai. (Voir la lettre suivante.)  Luc. X,  2o6 Lettres de saint François de Sales de nous, parce que les hommes qui vivent selon la sagesse humaine mesprisent ceux qui ne sont point utiles ; au contraire, l'esprit appuyé sur la foy s'encou- rage emmi les difficultés, parce qu'il sçait bien que Dieu ayme, supporte et secourt les misérables, pourveu qu'ilz espèrent en luy. Le sens humain veut avoir part en tout ce qui se passe, et il s'ayme tant, qu'il luy est advis que rien n'est bon s'il ne s'en est meslé ; l'esprit, au contraire, s'attache a Dieu et dit souvent que ce qui n'est pas Dieu ne luy est rien, et comme il prend part aux choses qui luy sont communiquées, par charité, aussi quitte-il vo- lontier sa part es choses qui luy sont celées, par abné- gation et humilité. Vivre selon l'esprit, c'est aymer selon Tesprit ; vivre selon la chair, c'est aymer selon la chair, car l'amour est la vie de l'ame, comme l'ame est la vie du cors. Une Seur est bien douce et aggreable, je la chéris tendrement ; elle m'ayme bien, elle m'oblige fort, et je l'ayme réci- proquement pour cela : qui ne void que je l'ayme selon les sens et la chair ? car les animaux, qui n'ont point d'esprit et n'ont que la chair et les sens, ayment leurs bienfaiteurs et ceux qui leur sont doux et aggreables. Une Seur est rude, aspre, incivile, mays, au partir de la, elle est très dévote et mesme désireuse de s'adoucir et civiliser ; et je fay tout, non pour playsir que j'aye en elle ni pour interest quelcomque, mays pour le bon playsir de Dieu ; je la chéris, je l'accoste, je la sers, je la caresse : cet amour est selon l'esprit, car la chair n'y a point de part. Je suis(0 une pauvre chetifve cadette qui, par ma condition naturelle, suis craintifve, honteuse et desfiante de moy mesme, et pour cela, je voudrois bien qu'on me laissast vivre selon cette inclination, a part, parce qu'il faut faire beaucoup de violence a cette honte imperti- nente que j'ay et a cette crainte superflue. Qui ne void que ce n'est pas vivre selon l'esprit? Non certes, ma chère Fille, car tandis que j'estois encor bien jeune et ( I ) Phrase inédite (voir la note précédente).  Année 1616 207 n'avois pas encor d'esprit je vivois des-ja ainsy; mais, quoy que selon mon naturel je sois honteuse, craintifve, apprehensifve comme une taupe, néanmoins je me veux essayer de surmonter ces passions naturelles, et, petit a petit, faire tout ce qui appartient a la charge que Tobeis- sance procédante de Dieu m'a imposée. Qui ne void que c'est vivre selon l'esprit? Ma chère Fille, vivre selon l'esprit, c'est faire les actions, dire les paroles et faire les pensées que l'esprit de Dieu requiert de nous. Et quand je dis faire les pensées, j'entens des pensées volontaires. Je suis triste, et partant je ne veux pas parler : les charretiers et les perroquetz font ainsy ; je suis triste, mais puisque la charité requiert que je parle, je le feray : les gens spirituelz font ainsy. Je suis mesprisee et je m'en fasche : si font bien les paons et les singes ; je suis mesprisee et je m'en res- jouis : les Apostres faisoyent ainsy *. Vivre donq selon * Act., v, 41, l'esprit, c'est faire ce que la foy, l'espérance et la charité nous enseignent, soit es choses temporelles, soit es choses spirituelles. Vives donq toute selon l'esprit, ma très chère Fille, demeures doucement en paix. Soyes toute asseuree que Dieu vous aydera, reposes vous en toute occurrence entre les bras de sa miséricorde et bonté paternelle. Dieu soit a jamais vostre tout, et moy je suis en luy tout vostre, vous le sçaves bien. Monsieur vostre père (0 se porte bien et tout ce qui vous appartient selon le sang ; ainsy en soit il de ce qui vous appartient selon l'esprit. Amen. (i) Claude de Blonay (voir tome XII, note ( i ), p. 124).  io8 Lettres de saint François de Sales MCXCVIII A M. MICHEL FAVRE (O L' auteur du Traitté de V Amour de Dieu réclame humblement l'examen de son ouvrage. Annecy, commencement de mai 1616. Monsieur Michel, mon Ami, Vous remettres nos pauvres cahiers aux pieds de ( I ) Sur la fin de 1608, un jour que François de Sales allait monter à l'autel, un seul de ses aumôniers se trouva présent pour l'assister. Un tout jeune prêtre était dans l'église; on le revêtit d'un surplis, et il servit la Messe du saint Prélat. Celui-ci le pria ensuite de venir dîner à son logis; il obéit, et, n'osant s'en aller sans l'ordre de l'Evêque, l'Evêque ne songeant pas à lui donner congé, il demeura ainsi trois jours. Enfin le Bienheureux, charmé de la modestie sacerdotale de cet ecclésiastique et de la sincérité de son âme, lui fit cette question : « Monsieur Michel, voudries vous bien vous charger de la conscience d'un Evesque ? » « Il pensa un peu, » raconte la Mère de Chaugy, « et puis repondit aussi sagement qu'humblement : « Ouy da. Monseigneur, d'un Evesque fait comme vous; autrement je craindrois le faix. « Dès ce jour. Michel Favre devint aumônier, et bientôt confesseur et secrétaire de saint François de Sales. 11 était né à Doucy (Savoie), d'Eustache Favre et de Michelette Raffin, et, dès l'âge de dix ans, avait reçu la tonsure. Sous-diacre le 22 septembre 1607, diacre le 22 décembre suivant, il fut ordonné prêtre par le Saint le 28 sep- tembre 1608. Sa santé avait rendu infructueux un fervent essai chez les Capucins. A ses importantes fonctions auprès du bienheureux Evêque, il joignit bientôt celles de confesseur des Religieuses de la Visitation, que le Fondateur ne craignit pas de confier à ce prêtre de vingt-cinq ans, dont la sagesse et la prudence lui étaient connues. M. Michel se dévoua totalement et avec un désintéressement absolu aux Filles de son très cher Maître et Père. Après la mort de celui-ci, un vœu spécial l'engagea à ce service; dette sacrée envers celui qui l'avait honoré de son affection, et dont, mieux que personne, il avait pu connaître la sainteté éminente. Vivre toujours auprès de François de Sales, c'était une grâce et un bonheur qui excitèrent souvent une légitime envie. « J'aymerois mieux estre M. Michiel que Royne de France, » lui disait-on un jour à Grenoble. Lui-même cite cette parole dans sa déposition (ad art. 51); et pourtant, il avoue humblement (ibid.) qu'il était, à cause de son « humeur melancholique, » de « ceux la qui contrarioient le plus » le Bienheureux. Mais, ajoute-t-il, « je n'avois jamais plus de repos et soulagement que de me voir au près de luy, luy parler ou regarder, parce que sa présence dissipoit tous mes ennuys et chagrins. » Il suivit le Saint en divers voyages, alla de sa part à Rome en 162 1 , mais n'eut pas la consolation d'assister à sa précieuse mort, accompagnant alors la Mère de Chantai à Grenoble. Privé de son bien aimé Maître, M. Michel se rendit plus complètement fils spirituel de la vénérable Fondatrice, et « tira de son humilité une petite règle quil observoit avec  Année i6i6 209 Monseigneur TArchevesque (0, s'il est au lieu et en loysir, et s'il veut s'appliquer a cette lecture ; sinon, vous les remettres entre les mains de monsieur de Ville, doc- teur en sainte théologie, député pour l'approbation des livres (2). Et par son advis, vous presenteres ces cahiers a monsieur Meschatin la Faye, vicaire gênerai en l'ar- chevesché de Lion (3), et a d'autres Docteurs (4); car, comme je me connois et suis très fautif, et que j'ay peu  une fidélité aussi exacte qu'un Religieux. » Ce vertueux prêtre n'avait pas quarante-huit ans lorsque, le 25 mars 1633, il expira dans une paix admirable. Sainte Jeanne-Françoise de Chantai, qui l'estimait profondément, le pleura « comme père et comme fils tout ensemble. >» (D'après sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), passim ; les R. E. et VHist. de la Fondation du i'^ M.*'^' de la Visitation d'Annecy, par la Mère de Chaugy.) Les Approbations du Traitté sont des 20 et 25 mai 1616. Or, il semble que « cette instruction, » écrite « de sa main >< par l'auteur (ancien Ms. de Y Année Sainte), dut être remise à M. Michel au moment de son départ pour Lyon, ou le suivre de très près. Supputant le temps du voyage et celui que les « Docteurs » employèrent à examiner le manuscrit, il reste très vraisem- blable d'indiquer le commencement du mois pour date de ces lignes, (r) Denis-Simon de Marquemont, archevêque de Lyon. (2) C'est en effet en cette qualité que « Jehan Claude Deville » donne l'approbation du Traitté de l'Amour de Dieu. (Voir tome V, p, 349.) — Com- plétons les renseignements de la note ( i ),p. 90, sur ce vertueux ecclésias- tique, en disant qu'il fut nommé curé de Saint-Michel de Lyon en 1619; c'est lui que Charles-Auguste désigne sous ce titre dans son récit des funérailles de saint François de Sales, L'acte de décès de M. de Ville, consigné aux Re- gistres paroissiaux de Sainte-Croix, est daté du 15 février 1650 et le qualifie de « premier custode » de cette église, de « chanoine de Saint-Paul, lieute- nant de Tofficialité » et « vicaire gênerai Substitué. » (3) Vicaire général dès 1612, Thomas de Meschatin La Faye, comte de Lyon, remplit cette charge jusqu'à son décès, 19 août 1636, C'est dire la confiance qu'il inspira aux trois archevêques qui se succédèrent durant ce laps de temps, au Chapitre de la cathédrale et aux évêques d'Autun, administrateurs de la Régale pendant les vacances du siège de Lyon, Originaire du Bourbon- nais par son père Claude de Meschatin, gentilhomme de la maison du Roi, aussi bien que par sa mère, Anne de Saint-Hilaire, Thomas était devenu chanoine de Saint-Jean, le 19 octobre 1385; ordonné sous-diacre à Metz le 22 février 1587, il reçut la prêtrise à Lyon le 21 avril 1612, En 1613, il échan- geait la dignité de chantre qui lui avait été conférée en 1604, contre celle de chamarier de son Chapitre. A deux reprises il exerça les fonctions de recteur de l'Aumône générale, et fut encore conseiller au Parlement des Dombes et prieur de Saint-Pourcain. (D'après les Notes de M. Beyssac, érudit lyonnais,) (4) Les autres docteurs auxquels le manuscrit du Traitté fut présenté sont : Frère Etienne Carta, de l'Ordre des Carmes, et Frère Robert Berthelot, Reli- gieux du même Ordre, évêque de Damas et suffragant de Lyon. (Voir tomes V, p, 349, et XIV, note ( i ), p, 384.) Tous deux avaient déjà donné leur approbation à l'édition princeps de l'Introduction à la Vie dévote (voir tome III, p. ii*j. Lettres VII 14  210 Lettres de saint François de Sales de loysir pour revoir mes petitz ouvrages, certainement je désire et supplie très instamment qu'ilz soyent veus a loysir et charitablement examinés par les doctes ser- viteurs de Dieu. Revu sur le texte inséré dans un ancien Ms. de l'Année Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy.  MCXCIX A LA MÈRE DE CHANTAL Un malade qui suivra les ordonnances de la Mère de Chantai. Annecy, [12 ou 13] mai 1616 (i). Bon soir, ma très chère Mère. Tenes, voyla des lettres venantes de Lion ; sil y a chose qui mérite, vous m'en feres part. Je me porte fort bien, ne sentant ni mal ni chose qui le ressemble ; seulement, je me treuve tellement sans appétit, que n'ayant pris qu'un petit bouillon, je voudrois volontier ne rien prendre davantage aujourdhuy, me reservant toutefois de faire ce que ma chère Mère voudra, laquelle je conjure au nom de Dieu, qui sçait bien que je ne mens point, de ne point se mettre en peine de moy, car je me sers (sic) le mieux du monde, hors ce reume qui me fait tousser quelquefois (2). Bon soir donq, ma très chère Mère, a qui je suis certes, comm'elle sçait, tout parfaitement elle mesme. Vive Jésus ! Amen. Revu sur l'Autographe appartenant à M. le comte de Roussy de Sales, à Thorens-Sales (Annecy). (i) Les nouvelles que le Saint donne ici de sa santé indiquent le début delà maladie qu'il souffrit en mai 1616. Le quantième est déterminé approxi- mativement par les dates des lettres suivantes. (2) Ce qui n'était encore qu'un rhume, devint bientôt une grave indispo- sition. « Notre très-bon et cher Seigneur se porte bien, » écrit le 28 mai sainte Jeanne-Françoise à la Mère Favre, « autant toutefois que le peut permettre le mal qu'il a eu. lequel fut court, mais très dangereux : c'était une grande inflammation de gosier dans lequel on craignait qu'il ne se formât un apostème qui l'eût peut-être étranglé. Vous pouvez penser, ma Fille toute chère, si cela me fut une bonne mortification en ma solitude. » (Lettres, vol. I, p. 119.)  Année 1616 21 1 MCC A MADAME DE LA FLÉCHÉRE Un paiement à obtenir. — Comment aider une âme tentée contre sa vocation. Annecy, 13 mai 1616. Je vouspescris sans loysir, seulement pour vous dire, ma très chère Fille, que j'ay receu vos lettres. Si vous venés pour toute cette semaine, ou du moins parmy les festes (0, je pense que vous treuveres M. Bonfilz (O ; si moins, il me faudroit envoyer la cedule, et je verrois si je pourrois tirer le payement que vous désirés (5). Nous parlerons, si vous venes, de la chère fille (4). Helas, que je la regrette si elle se laisse emporter a cette bouffée de tentation ! Mays il ne se faut pas haster, ains il luy faut, sil se peut, laisser autant rouler dans son ame la tentation avant que de l'advoûer, comme on luy a laissé ruminer l'inspiration avant que de la rece- voir ; et faut en cela user de charité et de dextérité a ne faire pas semblant de se desfier de sa persévérance. Des plus grans courages que le sien ont esté esbranlés en pareilles occasions ; je ne treuve nullement estrange cette petite atteinte. Dieu fera son ouvrage et en fin, avec sa grâce, nous le servirons tous un jour fidèlement. Je suis, ma très chère Fille, Vostre plus affectionné, plus humble, fidèle serviteur et compère. XV may 16 16. A Madame Madame de la Fleschere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de TEtat. ( I ) Les fêtes de la Pentecôte ; le dimanche tombait le 22. — Cette fin d'alinéa est inédite ; les clausules de la lettre ont été également supprimées par Migne. (2) Horace Bonfils (voir ci-dessus, note (4), p. 194). (3) Voir ibid., note (3 ', p. 196, (4) Gasparde d'Avisé. Victorieuse des poursuites du monde, la nièce de M.*"^ de la Fléchera entra au monastère de la Visitation d'Annecy dans les premiers jours de juillet. (Voir le tome précédent, note (6), p. 40.)  213 Lettres de saint François de Sales  MCCI A LA MÈRE DE CHANTAL ( INÉDITE ) Le saint Evêque rassure sa fille spirituelle au sujet de sa santé. Annecy, 14-16 mai 1616 (i). Ma très chère Mère, Vous séries bien brave si vous esties un peu bien pay- sible et bien douce sur cette petite incommodité. Elle consiste toute en ce que j'ay le palais de la bouche fort enflé, et qui me donne de la douleur quand je crache ou que j'avale. Cela m'a donné la fièvre encor ce soir, avec beaucoup d'inquiétude ; mais ce matin je me porte bien de tout le reste, hormis de la bouche, et en somme je sens perceptiblement que ceci n'est rien et, pour un peu de retraitte, j'en seray quite. Le bouillon va bien; je le prendray autant amer qu'on voudra. Demeures bien en paix avec Nostre Seigneur, qui seul doit astre le tout de nostre seul (2) cœur. Amen, Revu sur TAutographe conservé au Grand-Séminaire de Montréal (Canada). ( I ) Ce billet est daté d'après l'étude comparative des lettres de cette période, des circonstances de la maladie de saint François de Sales et de la retraite de la Mère de Chantai. (Voir ci-dessus, Lettre mcxcix, ci-après, note ( i ), p. 214, et à l'Appendice I, les lettres de la Sainte.) (2) L'Autographe ne porte ici que la lettre s ; nul doute qu'elle ne repré- sente le mot seul^ dont la répétition est tout à fait selon le style du Saint.  Année 1616 213 MCCII A LA MÊME (fragment) L'amour vrai, indépendant de toutes circonstances et manifestations extérieu- res. — Regarder et aimer le prochain dans la poitrine du Sauveur. Annecy, [15-17 mai] 1616 (r). Quand sera ce que cet amour naturel du sang, des convenances, des bienséances, des correspondances, des sympathies, des grâces, sera purifié et réduit a la parfaite obéissance de l'amour tout pur du bon playsir de Dieu ? Quand sera ce que cet amour propre ne désirera plus les présences, les tesmoignages et significations extérieures, ains demeurera pleinement assouvi de l'invariable et immuable asseurance que Dieu luy donne de sa perpé- tuité ? Que peut ajouter la présence a un amour que Dieu a fait, soustient et maintient? Quelles marques peut on requérir de persévérance en une unité que Dieu a créée ? La distance et la présence n'apporteront jamais rien a la solidité d'un amour que Dieu a luy mesme formé. (2) Quand sera ce que nous serons tous destrempés en douceur et suavité envers nostre prochain ? Quand ver- rons-nous les âmes de nos prochains dans la sacrée poi- trine du Sauveur ? Helas ! qui regarde le prochain hors (i) Cette lettre, ou plutôt ce fragment, a été publié pour la première fois par le P. de la Rivière (Vie, etc., 1625, liv. IV, chap. vi, p. 381). Avant de le citer : « Finissons ce discours, » dit-il, « mettant en avant un beau traict » que le Bienheureux « manda dans un billet, ïl y a environ huict afis, à une sienne fille de cœur, » etc. Il fixe ainsi la date (son livre fut composé en 1624) et la destinataire. La Mère de Chantai, dans sa déposition (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 27), insère en effet le second alinéa comme lui étant per- sonnellement adressé. Nous complétons la date en ajoutant à 1616 : 1^-17 mai. Ces lignes ne se- raient-elles pas un prélude aux lettres écrites à sainte Jeanne-Françoise, pendant la grande retraite où Dieu la fit entrer dans une voie de dépouillement absolu? Tout porte à le croire. (Voir les lettres suivantes.) (2) Cet alinéa et la première phrase de ce fragment ont été interpolés dans l'Entretien de la Simplicité, avec des modifications notables. (Voir tome VI, p. 219.)  214 Lettres de saint François de Sales de la, il court fortune de ne l'aymer ni purement, ni constamment, ni esgalement ; mays la, mays en ce lieu la, qui ne l'aymeroit ? qui ne le supporteroit ? qui ne souffriroit ses imperfections ? qui le treuveroit de mau- vaise grâce? qui le treuveroit ennuyeux? Or, il y est ce prochain, ma très chère Fille, il y est dans le sein et dans la poitrine du divin Sauveur ; il y est comme très aymé et tant aymable, que TAmant meurt d'amour pour luy. Amant duquel l'amour est en sa mort et la mort en son amour.  MCCIII A LA MÊME Dépouillement intérieur auquel le Saint exhorte la Mère de Chantai. Admirables renoncements. Annecy, 18 mai 1616 (i). Ma très chère Mère, Je sçai bien qu'il me faudra demeurer encor aujour- d'huy (2) en solitude et silence, et peut estre demain : si cela est, je prepareray mon ame, comme la vostre, ainsy que je vous dis. (3) Je veux bien que vous continuies l'exercice du despouillement de vous mesme, vous laissant a Nostre Seigneur et amoy. Mais, ma très chère Mère, entrejettés, ( I ) Depuis Hérissant ( 1758), les éditeurs ont daté les quatre lettres suivantes du mois d'août i6ip. Cette erreur a été réfutée dans le I**" volume des Lettres de sainte Jeanne-Françoise de Chantai, note (i), p. 109. Les quelques lignes adressées à la Mère Favre, citées ci-dessus, note (2), p. 210, suffisent, par leur propre date, àdissiper tous les doutes. C'est en 1616, et pendant la semaine préparatoire à la Pentecôte, que la Fondatrice fit une retraite et que François de Sales fut malade. (2) La Pentecôte tombant le 22 mai, « aujourd'huy », 18, était donc le mercredi. (3) Les trois alinéas suivants sont donnés d'après le texte inséré dans un ancien recueil mauuscrit conservé dans les Archives de la Visitation d'Annecy, le même dont il est fait mention au tome XIV, note (i\ p. 103.  Année i6i6 215 je vous prie, quelques actions de vostre part, par manière d'oraysons jaculatoires, en approbation du despouille- ment, comme par exemple : Je le veux bien. Seigneur, tirés, tirés hardiment tout ce qui revest mon cœur. O Seigneur, non, je n'excepte rien, arrachés moy a moy mesme. O moy mesme, je te quitte pour jamais, jusques a ce que mon Seigneur me commande de te reprendre. Cela doit estre fortement, mays doucement entrejetté. Encor ne faut il pas, s'il vous plaist, ma très chère Mère, prendre aucune nourrice ; ains, comme vous voyes, il faut quitter celle que néanmoins vous aures, et demeu- rer comme une pauvre petite chetifve créature devant le throsne de la miséricorde de Dieu ; et demeurer toute nue, sans demander jamais ni action ni affection quelcomque pour la créature, et néanmoins vous rendre indifférente a toutes celles qu'il luy plaira vous ordonner, sans vous amuser a considérer que ce sera moy qui vous serviray de nourrice ; car, comme vous vo3^es, si vous prenies une nourrice a vostre gré, vous ne sortiries pas de vous mesme, ains auries tous-jours vostre conte, qui est néan- moins ce qu'il faut fuir sur toutes choses. Ces renoncemens sont admirables : de sa propre estime, mesme de ce que l'on estoit selon le monde (qui n'estoit en vérité rien, sinon en comparayson des misérables), de sa propre volonté, sa complaysance en toutes créa- tures et en l'amour naturel, et en somme tout soy mesme, qu'il faut ensevelir dans un éternel abandonnement, pour ne le voir ni sçavoir plus comme nous l'avons veu et sceu, ains seulement quand Dieu le nous ordonnera et selon qu'il le nous ordonnera. Escrivés moy comme vous treu- veres bonne cette leçon (0. Dieu me veuille a jamais posséder. Amen. Car je suis sien ici et la, ou je suis en vous, comme vous sçaves, très parfaitement ; car vous m'estes indivisible, hormis en l'exercice et prattique du renoncement de tout nous mesmes pour Dieu. ( I ) Voir à l'Appendice I la réponse de la Mère de Chantai.  2l6  Lettres de saint François de Sales  MCCIV  A LA MEME  Bonheur de la possession de Jésus seul par le dénuement total du créé.  ponsor. II ( i).  • Job, I, 2 1,  Annecy, 19 mai 1616. O Jésus, que de- bénédiction et de consolation a mon ame de sçavoir ma Mère toute desnuee devant Dieu ! Il y a long tems que j'ay une suavité nompareille quand * DeExequiis,Res- j'oys chanter ce respons * : Nu je suis sorty du ventre de ma mere^ et nu je retourner ay la. Le Seigneur me Va donné, le Seigneur me Va ostè : le nom du Seigneur soit béni *. Quel contentement a saint Joseph et a la glorieuse Vierge allant en Egypte, Ihors qu'en la pluspart du che- min ilz ne voyoient chose quelcomque sinon le doux Jésus ! C'est la fin de la Transfiguration, ma très chère Mère, Matt., XVII, 8. de ne voir plus ni Moyse, ni Elie, ains le seul Jésus *. C'est la gloire de la sacrée Sulamite de pouvoir estre seule avec son seul Roy, pour luy dire : Mon Bienaymé Cant., II, 16. est a moy, et inoy je suis a luy *. Il faut donq demeurer a jamais toute nue, ma très chère Mère, quant a l'affec- tion, bien qu'en efifect nous nous revestions ; car il faut avoir nostre affection si simplement et absolument unie a Dieu, que rien ne s'attache a nous. O que bienheureux fut Joseph l'ancien, qui n'avoit ni boutonné ni aggrafé sa robbe, de sorte que, quand on le voulut attraper par 'Gen., XXXIX, 13. icelle, il la lascha en un moment *. J'admire avec suavité le Sauveur de nos âmes, sorti nu du ventre et du sein de sa Mère et mourant nu sur la croix, puis tout nu remis dans le giron de sa Mère pour  (i) Rituale Sacramentorum ad prœscriptum Sanctœ Romance Ecclesiœ, j'ussu Reverendissimi Patris Francisci de Sales, Episcopi et Principis Gebennensis, editum. In qito non tantum ritus, sed ètiam canones ac régula Sacramentorum rite administrandorum, aliaque plurima documenta ad munus pastorale reciè ohenndum, contitientnr. Lugduni, apud Joannem Charvet, 1612. (Cf. tome XV, note (2 ), p. 228.)  Année i6i6 217 estre enseveli. J'admire la glorieuse Mère qui naquit nue de maternité et fut desnuee de cette maternité au pied de la croix, et pouvoit bien dire : Nue j'estois de mon plus grand bonheur quand mon Filz vint en mes entrail- les, et nue je suis quand, mort, je le reçoy dans mon sein. Le Seigneur me Va donné, le Seigneur me Va osté : le nom du Seigneur soit béni *. ' ^^' ^'^- '^^^"^• Je vous dis donq, ma chère Mère : que béni soit le Seigneur qui vous a despouillee ! O que mon cœur est content de vous sçavoir en cet estât si désirable ! et je vous dis comme il fut dit a Isaïe * : Marchés et prophe- ' Cap. xx. 2, 5. tisés toute nue ces troys jours (0. Persévères, en cette nudité, de demeurer auprès de Nostre Seigneur ; il n'est plus besoin que vous faciès des actes, s'il ne vous vient au cœur, ains que seulement vous chanties, si vous pouves, doucement le cantique de vostre nudité : Nue je suis née du ventre de ma mère *, et ce qui s'ensuit. Ne *videpag. pr^ced. faites plus aucun effort ; mais, fondée sur la resolution d'hier (2), allés, ma très chère Fille, et oyés^ et inclines vostre aureille; oubliés toute la peuplade des autres affections, et la mayson de vostre père, car le Roy a convoité vostre nudité et simplicité *. Demeurés en repos la, en esprit de très simple confiance, sans seulement regarder ou sont vos vestemens ; je dis, regarder avec attention ou soin quelcomque. Bon jour, ma très chère Mère. Vive Jésus, desnué de père et de mère sur la croix ; vive sa tressainte nudité ! Vive Marie, desnuee de filz au pied de la croix î Faites doucement les insensibles acquiescemens de vostre nudité ; ne faites plus d'eflfortz, soulagés vostre cors suavement. Vive Jésus ! Amen. Franç% E. de Genève. (i) On était au jeudi, et la Sainte devait terminer sa retraite trois jours après, c'est-à-dire à la fête de la Pentecôte. (2) Ce fut le mercredi, 18 mai, que la Mère de Chantai, ainsi qu'elle le consigne dans son « petit livret, » fit entre les mains de Dieu, l'entier dépouil- lement de tout elle-même. (Cf. la lettre précédente.)  * Ps. XLiv. II, 12.  2i8 Lettres de saint François de Sales  MCCV A LA MÊME Vouloir les vertus selon que Dieu les veut de nous. — Se reposer en Notre- Seigneur ; en lui, oublier toutes choses. — L'intime du cœur du saint Evêque. Annecy, 21 mai (0 1616. Tout cela va fort bien, ma très chère Mère. C'est la vérité, il faut demeurer en cette sainte nudité jusques a ce que Dieu vous reveste. Demeures la, dit Nostre Sei- gneur a ses Apostres, jusques a ce que d'en haut vous Luc, uit., 49. soyes revesius de vertu *. Vostre solitude ne doit point estre interrompue jusques a demain après la Messe. Ma très chère Mère, il est vray, vostre imagination a tort de vous représenter que vous n'aves pas osté et quitté le soin de vous mesme et l'affection aux choses spirituel- les ; car n'aves vous pas tout quitté et tout oublié ? Dites ce soir que vous renonces a toutes les vertus, n'en voulant qu'a mesure que Dieu vous les donnera, ni ne voulant avoir aucun soin de les acquérir qu'a mesure que sa Bonté vous employera a cela pour son bon playsir. Nostre Seigneur vous ayme, ma Mère ; il vous veut toute sienne. N'ayes plus d'autres bras pour vous porter que les siens, ni d'autre sein pour vous reposer que le sien et sa providence ; n'estendes vostre veuë ailleurs et n'arrestes vostre esprit qu'en luy seul ; tenes vostre volonté si simplement unie a la sienne (2) en tout ce qu'il luy plaira faire de vous, en vous, par vous et pour vous, et en toutes choses qui sont hors de vous, que rien ne soit entre deux. Ne penses plus ni a l'amitié ni a l'unité que Dieu a faite entre nous, ni a vos enfans, ni a vostre cors, ni a vostre ame, en fin a chose quelcomque ; car ( I ) Voir à l'Appendice I la lettre de la Mère de Chantai à laquelle le Saint répond par celle-ci, qui paraît avoir été écrite dans la matinée du samedi, 21, et la suivante le soir. (2) Ce membre de phrase, jusqu'à « hors de vous, » omis dans Tédition princeps, est restitué d'après les « papiers intimes » de la Sainte, (Cf. Sainte J.~F. Frémyot de Chantai, sa Vie et ses Œuvres, Paris, Pion, 1875, tome II, p. 62.)  Année 1616 219 vous aves tout remis a Dieu. Revestes vous de Nostre Seigneur crucifié *, aymes le en ses souffrances, faites ' Rom.,xiir, uit. des oraysons jaculatoires la dessus. Ce qu'il faut que vous faciès, ne le faites plus parce que c'est vostre incli- nation, mais purement parce que c'est la volonté de Dieu. Je me porte fort bien, grâces a Dieu. Ce matin j'ay fait commencement a ma reveuë i ^ ), que j 'acheveray demain . Je sens insensiblement au fond de mon cœur une nouvelle confiance de mieux servir Dieu en sainteté et justice tous les jours * de ma vie ; et si, je me treuve aussi nu, * i-uc, i, 74, 75. grâces a Celuy qui est mort nu pour nous faire entre- prendre de vivre nus. O ma iVlere, qu'Adam et Eve estoyent heureux tandis qu'ilz n'eurent point d'habitz ! Vives toute heureusement paysible, ma très chère Mère, et soyes revestue de Jésus Christ Nostre Seigneur. Amen. FRANG^ E. de Genève. ( I ) La revue de sa conscience. Saint François de Sales faisait aussi sa retraite annuelle.  xMCCVI A LA MÊME Les enfants portés entre les bras de Dieu. — Souverain degré de la pureté de l'amour. Annecy, 21 mai 1616. Je n'escris pas, non, car après le repas cela ne se doit pas, ma très chère Mère ; mais je vous donne très affec- tionnement le bon soir, priant Dieu que, vous ayant réduit a l'amiable tressainte pureté et nudité des enfans, il vous prenne meshuy entre ses bras comme saint Mar- tial (0, pour vous porter a son gré a l'extrême perfection de son amour (2). Et prenés courage, car s'il vous a (i) Plusieurs fois déjà, François de Sales nous a rappelé dans ses écrits la tradition qui désigne saint Martial comme Theureux enfant caressé par Notre- Seigneur. Voir en particulier ce qu'il en dit au Traiité de V Amour de Dieu, liv. I, chap. IX, liv. VII, chap. 11, et dans un Sermon, tome IX, p. 473. (2) Jusqu'ici, le texte est pris sur un fragment autographe conservé à la Visitation d'Annecy; les deux premières lignes sont inédites.  220 Lettres de saint François de Sales desnuee des consolations et sentimens de sa présence, c'est affin que sa présence mesme ne tienne plus vostre cœur, mays luy et son playsir ; comme il fit a celle qui, le voulant embrasser et se tenir a ses pieds, fut renvoyée ailleurs : Ne me touche point, luy dit il, mais va, dis Joan., XX, 17. le a Simon et a mes frères *. Or sus, nous en parle- rons. Bienheureux sont les nus, car Nostre Seigneur les revestira. Cette Bonté ne veuille plus permettre que j'aye si peu de sainteté en une profession et en un aage ou j'en devrois tant avoir. Ma Mère, vives toute gaye devant Dieu, et le bénisses avec moy es siècles des siècles. Ainsy soit il. Francs, E. de Genève.  MCCVII A MADAME LOUISE DE BALLON RELIGIEUSE DE l'aBBAYE DE SAINTE-CATHERINE (0 Pourquoi Dieu nous fait attendre la délivrance de nos imperfections. — Petit exposé doctrinal sur l'Eucharistie. — Les Anges et le Saint-Sacrement. Annecy, Fête-Dieu [fin mai-juin 1613-1616.] Vostre cœur sera pur, ma chère petite Fille, puisque vostre intention est pure, et les pensées vaines qui vous (i) D'après les éditeurs de 1626, cette lettre fut adressée à une Religieuse de Saint Bernard. On peut indiquer en toute assurance Soeur Louise de Bal- lon ; Tappellation « ma chère petite Fille » rappelle la manière affectueuse dont François de Sales la désigne toujours en écrivant à Sœur Bernarde de Vignod, Religieuse de la même abbaye. — Quant à la date, il est fort difficile de la préciser. Des indices sérieux permettent de supposer ces lignes antérieures à la retraite que fit la Sœur de Ballon en juin 1617. à la Visitation. D'autre part, ce fut en 1608 que la jeune Cistercienne se plaça sous la conduite de TEvêque de Genève ; mais le Saint ne semble pas parler ici à une débutante dans la vie intérieure, c'est pourquoi on exclut 1609-1612. Louise-Blanche-Thérèse de Ballon, fille de Charles-Emmanuel Perrucard de Ballon et de Jeanne de Chevron- Villette (cf. tome XIV, note (2), p. 129S naquit au château de Vanchy le 5 juin 1591. Prévenue dès l'enfance de grâces insignes, entrée à sept ans dans l'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine (voir tome XIII, note (4), p. 116), professe neuf ans plus tard, elle puisa dans  Année i6i6 221 surprennent ne le sçauroyent souiller en sorte quelcom- que. Demeures en paix et supportes doucement vos petites misères. Vous estes a Dieu sans reserve, il vous conduira bien. Que s'il ne vous délivre pas si tost de vos imper- fections, c'est pour vous en délivrer plus utilement et vous exercer plus longuement en l'humilité, affin que vous soyes bien enracinée en cette chère vertu. Qui reçoit la tressainte Communion, il reçoit Jésus Christ vivant : c'est pourquoy son cors, son ame et sa divinité sont en ce divin Sacrement ; et d'autant que sa divinité est celle la mesme du Père et du Saint Esprit, qui ne sont qu'un seul Dieu avec luy, qui reçoit la tres- sainte Eucharistie reçoit le cors du Filz de Dieu et, par conséquent, son sang et son ame, et par conséquent, la tressainte Trinité. Mays néanmoins, ce divin Sacrement est principalement institué affin que nous receussions le cors et le sang de nostre Sauveur, avec sa vie vivi- fiante : comme les habillemens couvrent principalement le cors de l'homme, mais parce que l'ame est unie au cors, ilz couvrent par conséquent l'ame, l'entendement, la mémoire et la volonté. Ailes bien simplement en cette croyance, et salues souvent le cœur de ce divin Sau- veur qui, pour nous tesmoigner son amour, s'est voulu couvrir des apparences de pain, affin de demeurer très familièrement et très intimement en nous et près de nostre cœur. Voyons bien en esprit les saintz Anges qui environnent ce tressaint Sacrement pour l'adorer, et en cette sainte ses relations avec sainte Jeanne de Chantai et ses Filles, et surtout dans la direction de saint François de Sales, son parent, l'idée et les premiers désirs d'une vie plus parfaite. Quatre autres de ses compagnes embrassèrent son généreux dessein, mais le petit groupe, malgré sa ferveur, ne put entraîner le reste de la Communauté ; il dut quitter Sainte-Catherine et vint s'installer à Rumilly, le 8 septembre 1622. Tels furent, sous les auspices des deux Fonda- teurs de la Visitation, les débuts de la Congrégation des Bernardines réfor- mées. Mais c'est la Sœur Louise de Ballon qui en fut l'âme et qui réussit à l'établir en Savoie et en France, où. de son vivant, l'Institut compta de nom- breuses Maisons. La vénérable Mère mourut saintement à Seyssei, dans un monastère de son Ordre (14 décembre 1668). Ses rares vertus, ses grandes épreuves, ses travaux lui assurent une place, et non la dernière, parmi les illustres réformatrices du xvii^ siècle. (Voir Grossi, La Vie de la Vbk Mère de Ballon^ Annecy, Fontaine, 1695.)  222 Lettres de saint François de Sales octave (0 respandent plus abondamment des inspirations sacrées sur ceux qui, avec humilité, révérence et amour, s'en approchent. Ma chère Fille, ces divins Espritz vous apprendront comme vous feres pour bien célébrer ces jours solemnelz, et sur tout Tamour intérieur qui vous fera connoistre combien est grand l'amour de nostre Dieu qui, pour se rendre plus nostre, a voulu se donner en viande pour la santé spirituelle de nos cœurs, affin que, les nourrissant, ilz fussent plus parfaitz. Francs E. de Genève. (i) L'octave de la Fête-Dieu.  MCCVIII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Tendre au même but, sans vouloir « faire tout ce que les autres font. » — Se conduire selon la Règle, la grâce, Tobéissance. Annecy, juin 1616 (1). Ma très chère grande Fille, Selon mon advis, il n'y aura point d'inconvénient de laisser communier cette bonne Seur ; ains il faut, s'il est possible, arracher aux Seurs de la Congrégation cette imperfection ordinaire aux femmes et filles, de la vaine et jalouse imitation. Il les faut affermir, s'il est possible, a ne vouloir pas toutes faire tout ce que les autres font, ains seulement a vouloir tout ce que les autres veulent : c'est a dire, a ne faire pas toutes les mesmes exercices, fors ceux de la Règle, ains que chacune marche selon le (i) La permission accordée par le saint Evêque à la Soeur Jeanne-Marie Coton de communier tous les jours, fixe cette lettre aux premières semaines du noviciat de M"'^ d'Aix. (Voir ci-après, note ( i ), p. 232.) Sur une question si importante, la Mère Favre dut consulter au plus tôt le Fondateur, sans attendre pour cela le voyage qu'elle fit en Savoie au mois de juillet.  Annér i6i6 ±2^ don de Dieu * ; mais que toutes ayent cette unique et * l Cor simple prétention de servir a Dieu, ayant ainsy toutes une mesme volonté, une mesme entreprise, un mesme projet, avec une grande résignation d'y parvenir une chacune selon les moyens que la Supérieure et le Père spirituel jugeront expediens. En sorte que celles qui communient plus souvent n'estiment pas moins les autres qu'elles, puisqu'on s'approche maintes fois plus près de Nostre Seigneur en s'en retirant avec humilité, qu'en s'en approchant selon nostre goust propre ; et celles qui ne communient pas si souvent, ne se laissent point emporter en la vaine émulation. Il est vray qu'il ne faut pas per- mettre que la Règle soit outrepassée, sinon rarement, et pour des sujetz pareilz a celuy cy. Ma très chère Fille, que nous serons heureux si nous sommes fidèles ! Mon ame salue cordialement vostre esprit, que Dieu bénisse de sa tressainte main. Amen. FRANC^ E. de Genève.  MCCIX A MADAME DE LA FLÉCHÈRE Multiples démarches du Saint pour les affaires de sa fille spirituelle. Encore M""= du Chàtelard et sa vocation. — Paternelles excuses. Annecy, ii juin 1616. Ma très chère Fille, J'ay bien receu toutes vos lettres, et eusse respondu si ceux qui les ont apportées m'en eussent donné la commodité. J'ay parlé a M. de la Roche (0, mais il partit tost après, sans pouvoir voir iM. de Monregard (2). Je m'asseure que M. Flocard (3) vous fera response. ( I ) Sans doute Jean Joly, seigneur de la Roche et d'Alery (voir tome XIII, note(i), p. 364). (2) François Cristan. seigneur de Montregard, mentionné ci-dessus, p. 195. (3) Le collatéral Barthélémy Floccard, destinataire plus loin.  224 Lettres de saint François de Sales Voyla le monitoire que vous desiries. Je parleray a M. Bonfilz (0 quand il viendra. J'ay escrit un billet a la dame Ennemonde (2) ; je verray si on pourroit loger son iilz (3). M""" du Chastelard est a la Visitation, qui proteste grandement de n'avoir jamais eu un seul brin de pensée contraire a la sainte inspiration qu'elle avoit eue et la- quelle elle sent plus forte que jamais (4); et vrayement, c'est une bonne ame qui est en une bonne voye. Elle attend monsieur de Mont Saint Jean (5) pour prendre le tems de sa retraitte, et cependant elle sera icy encor quelques jours. J'escris un billet sur le sujet de la chère fille (6), et m'en vay ce mesme matin a Sainte Catherine (7). Ma très chère Fille, il faut bien supporter le Père qui ne fait pas trop bien son devoir paternel, quo}^ qu'il aye un cœur non pareil pour sa très chère fille, a laquelle il souhaite toutes saintes bénédictions. Je m'asseureque nostre Mère (^) vous escrira qu'il faut faire traitter Charles (9) par les médecins, afïin que l'enfieure de son ventre ne prenne pas suite ; pour le reste, il se porte bien. II juin 1616. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à la Visitation d'Annecy. (i) Horace Bonfils (voir ci-dessus, p. 194, note (4), et p. 196), (2) M'"^ de Bressieu, sœur de la destinataire (voir ibid., note (i), p. 189). Le billet dont parle le Saint ne nous est pas parvenu. (3) Probablement le fils aîné, Nicolas Roero de Bressieu, qui donnait bien des sollicitudes à sa mère. (Voir ibid., note (4), p. 98.) ( 4 ) Voir ci-dessus, note ( t ), p. 99, et cf. p. 164. ( 5 ) Jean-Claude de Clerraont Mont-Saint-Jean, qu'Anne de Montfalcon, mère de Jacqueline de Chauvirey, avait épousé en secondes noces. Il sera destina- taire plus tard. (6) Gasparde d'Avisé. (Voir la lettre suivante.) (7) A l'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine, tout près d'Annecy. (Voir tome XIII, note (4), p. 116.) (8) La Mère de Chantai. (9) Charles de la Fléchère, étudiant au collège d'Annecy.  Année 1616 21s  MCCX  A LA MEME  L'esprit humain en face de la tentation. — Danger de retarder l'exécution des bons désirs. — Compassion affectueuse de François de Sales pour un courage défaillant; ses espérances, Annecy, 1 1 juin (i) 1616. Quant a la chère fille (2), je ne m'en metz pas fort en peine, quoy que je luy désire fort le bonheur auquel elle a esté appellee ; car d'un costé, j'espère que Dieu luy redonnera le courage nécessaire a l'exécution de son inspiration, n'estant pas grande merveille que son ame se soit un peu ralentie parmi les tracas que les mondains luy ont donné, et qu'elle se soit ressentie de la commune condition de l'esprit humain, sujet a la tentation de varier et chanceler Ihors quil donne loysir a l'ennemi de l'atta- quer ; et d'autre part, sil arrivoit que la tentation l'em- portast, j'espère qu'elle ne Temporteroit jamais du tout hors de la resolution qu'ell'a faite de servir fort affec- tueusement Dieu. Et en ce cas, bien que je serois tous- jours marri de la voir un peu ravalée de son plus parfait dessein, si est ce que je ne laisserois pas de l'aymer très chèrement, et il me sera toute ma vie impossible de m'empescher de l'affectionner parfaitement en Nostre Seigneur. Mays, comme je vous dis (3), si les plus fortz espritz, Ihors qu'ilz différent beaucoup l'exécution de leurs bonnes resolutions, sont tentés de les quiter, il ne faut pas s'estonner que cette chère fille ayt esté touchée de cette attaque, a laquelle j'ay néanmoins bonne espérance qu'elle ne cédera pas enfin ; ains, ayant un peu repris haleyne, elle viendra plus forte, plus résolue et plus ardente que jamais. Salues-la, si vous le treuves bon, de ma part, quand vous la verres ou luy escrires. ( I ) Ce billet est certainement celui qu'annonce le Saint dans la lettre pré- cédente ; il est donc de la même date. (2) Gasparde d'Avisé. (3) Cf. ci-dessus. Lettre mcc à la même, p. 211. Lettres VII 15  226 Lettres de saint François de Sales Vives cependant toute a Dieu pour le louer a toute éternité, ma très chère Fille. Amen. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat.  MCCXI A MADAME COLIN (0 (inédite) Remerciements pour un beau présent. Annecy, 13 juin 1616. Madamoy selle, Je vous remercie bien humblement de la souvenance que vous aves de moy, tesmoignee par vostre lettre et vostre beau présent, lequel certes, estant de prix, j'ay disputé en mon esprit si je devois l'accepter ; et ne l'eusse nullement fait, si ce n'eut esté de peur de contrister vostre charité, laquelle néanmoins en cela je treuve excessive et vous supplie de la modérer, au moins envers moy, qui, au demeurant, vous porteray a jamais dedans mon esprit pour vous souhaiter le comble de toutes béné- dictions, et a tout ce que vous chérisses le plus. Vives toute a Nostre Seigneur, ma chère Fille, et me croyes en luy, Vostre humble, très affectionné serviteur. Francs, e. de Genève. XIII juin 1616, Annessi. A Madamoyselle Madamoyselle Colin. Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Collonge, aumônier de la Visitation de Chambéry. ( I ) Isabeau Daniel, veuve Colin (voir le tome précédent, note ( i ), p. 241). Le feuillet sur lequel se trouvait l'adresse a été détaché. Celle qui est imitée sur le taffetas collé au verso de l'Autographe porte Coim ; nous croyons cependant qu'il faut lire Colin. L'erreur a pu facilement se produire, pour peu que la tète de la lettre /ait été oblitérée, ainsi qu'on peut s'en convaincre en examinant ce même nom écrit de la main du Saint.  Année 1616 MCCXII A MADAME DE LA FLÉCHÈRE (inédite) Une rencontre qui ne serait pas à propos. — Différentes nouvelles.  227  Annecy, 25 juin 1616.  Ma très chère Fille,  Je ne pense pas quil fust a propos de faire cette pre- mière veuë ainsy courtement (^\ outre que ces filles (2) ne font quasi que de partir d'icy, ou elles ont demeuré 15 jours, et chacun voudroit sçavoir le pourquoy de leur retour ; et puisque vous reviendres icy bien tost, nous en parlerons avec la Mère (3), et on verra ce qui sera plus expédient. J'ay esté, de vray, entre sain et malade quelques jours, mais je n'ay pourtant eu qu'un accès de fièvre. Je seray bien ayse d'accommoder ces deux parties dont vous m'escrives, mais je ne puis les faire venir s'il n'y a re- queste de l'une des parties, ou de toutes deux, pour cela. Vives tous-jours toute a Nostre Seigneur, ma très chère Fille, et me recommandes souvent a sa miséricorde et bonté. Je suis inviolablement vostre. J'escrivis a M. Cochet (4), et a madame la Comtesse (5)  (i) M™° de la Fléchère caressait le projet d'une alliance entre Prosper d'Avisé, son neveu, et Françoise de Chantai. (Voir ci-après, les Lettres mccxv, MCCXVI.) (2) Sans doute la baronne de Thorens et M"^ de Chantai qui devait être, à cette date, auprès de sa sœur. (3) La Mère de Chantai. (4) Le 22 juillet 1609, nous trouvons, remplissant à Rumilly Toffice de parrain, Antoine Cochet, avocat au Sénat de Savoie. (Reg. par.) C'est lui très probablement que le Saint désigne ici. Il épousa Jeanne Rosset, et mourut après 1641, car son nom figure encore à cette date au registre des Entrées du Sénat. (5) Philiberte de Beaufort, comtesse de Tournon.  228 Lettres de saint François de Sales aussi, pour la petite seur Gavent (O, mais la responce n'est qu'une remise. Je suis a jamais vostre, ma très chère Fille. Amen. xxiiiii juin 1616, Annessi. A Madame Madame de la Fiechere. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. (i) M"® Gavens, dont il est parlé dans la lettre du 20 juin 1615. (Voir ci- dessus, note (i), p. 10.)  MCCXIII A LA MÈRE DE CHANTAL (billet inédit) Envoi de la Préface et de l'Oraison dédicatoire du Traitté de V Amour de Dieu . Annecy, vers le 27 juin 1616 (i). Voyla la Préface et le projet de l'Orayson : voyes la et me la renvoyés ; que je l'aye a un' heure et demi pour le plus tard, affin que je la face transcrire. Escrives moy vostre petit sentiment. Dieu vous bénisse, ma très chère Mère. Amen. Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Sérioh, curé de Saint-Vit (Doubs). (i) La Préface du Traitté de l'Amour de Dieu est datée du 29 juin; d'après la lettre du 8 juillet (voir ci-après, p. 234), elle devait partir pour Lyon « la veille de saint Pierre. » C'est donc au plus tard le 27 que le saint auteur consulte la Mère de Chantai, avant de faire « transcrire » son manuscrit.  Année 1616 229 MCCXIV A LA MÊME Un aumônier qui sera « bravement » remplacé par « un pauvre Evesque ». Annecy, [mai-juillet 1616 (i).] Penses, ma bien chère iMere, si je fus hier bien mortifié que n'eu pas seulement le loysir de vous envoyer un petit bon soir. Du moins, bonjour pour ce matin, ma très chère Mère, et je vous demande si vous pourres avoir un P. Barnabite, car M. Roland est a conter de l'argent (2). Que sil ne se peut bonnement, renvoyés moy, et je vous prouvoyeray bravement, et, tout au fin pis, ce sera d'un pauvre Evesque que vous aymes comme vous mesme ; aussi est il en tout, vostre. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Alzano (Italie). (i) C'était M. Michel Favre qui célébrait ordinairement la Messe à la Visitation ; ce billet, où nulle mention de lui n'est faite, fut donc écrit pendant une de ses absences. Or, la seule qui coïncide avec la présence des deux Saints à Annecy est son séjour à Lyon de mai à juillet 1616, (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 208.) (2) Le chanoine Georges Rolland était économe de la maison épiscopale. (Voir tomes XI, note (2), p. 117, et XVI, note (4), p. 141.)  MCCXV A MADAME DE LA FLÉCHÈRE Affaires et nouvelles, — Une prétendante pour le monde et une prétendante pour le cloître. Annecy, commencement de juillet 1616 (i). Vous n'aures pas si tost monsieur de Charmoysi (*), ma très chère Fille, car il est si galleux et plein de foroncles (i) L'entrée au noviciat de M"^ d'Avisé, qui eut lieu les premiers jours de juillet 1616, détermine la date de cette lettre. (2) Il était alors à Annecy.  230 Lettres de saint François de Sales quil ne peut bouger. Or, Dieu vous aydera en tout, sans doute, puisque vous aves toute vostre confiance en luy. M. Bonfilz (0 est a Chamberi. Le P. Commissaire (2) vous escrit la ci jointe par laquelle vous verres ce quil désire. Je croy bien quil se pourra faire que M"^ de Chantai vienne quand on vestira M"^ d'Avisé (3), et seroit a propos de faire la veue (4) ; mays je n'ay point veue (sic) nostre Mère ( 5 ) despuis vostre départ qu'une seule fois a la Messe, et je luy parleray et vous advertiray asses a tems. Elle fait prou, la pauvre chère nièce, et je croy qu'on l'a mis des hier a l'essay pour commencer tous les exercices. Je ne receu qu'hier bien tard vostre lettre et celle de monsieur de Mont Saint Jean (6), et des-ja l'autre jour que nostre Mère me le fit sçavoir, je luy escrivis en un billet ce quil me sembloit estre a propos de respondre, et je croy qu'elle vous l'aura communiqué. Je vous escris par cette mauvaise commodité qui me presse sans merci. Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, ma très chère Fille. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur TAutographe conservé à la Visitation d'Annecy. (i) Horace Bonfils, trésorier général du Genevois. (Voir ci-dessus, pp. 194, 196, 224.) (2) Le P. François de Chambéry, commissaire général de la Province des Capucins de Savoie. (Voir tome XI, note ( i ), p. 179, et cf. tome XVI, note ( 2 ), p. 220.) (3) Elle prit Thabit religieux le 8 septembre suivant. (4) L'entrevue de M"® de Chantai avec Prosper d'Avisé qui prétendait à son alliance. (Voir ci-dessus, Lettre mccxii.) (5) La Mère de Chantai. ( 6 ) Jean-Claude de Clermont Mont-Saint-Jean (cf. ci-dessus, note ( 5 ), p. 224).  Année i6i6  MCCXVI A LA MÈRE DE CHANTAL (inédite) Le « petit empressement » de M"'* de la Fléchère. — Une visiteuse qu'il faudra bien accueillir. Annecy, commencement de juillet 1616 (i). Ma très chère Mère, Vous verres par ces deux lettres le petit empressement que M"'" de la Flechere a pour marier son neveu a nostre fille ; il luy est advis qu'il ne faut qu'estre filz de nostre Mère pour estre bien heureux. Or, elle m'en escrit comme si je luy avois promis quelque chose, ou qu'elle se fut fort avancée avec moy en paroles ; et il y a au fin moins 6 moys que je n'en ay rien appris. xMays il faut treuver bon tout cela, et qu'elle s'addresse plus tost a moy qu'a vous, car aussi faut-il. Toutefois je ne sçai que luy dire sur sa proposition, si vous ne le me dites. Je vous expli- queray sa première lettre demain a quelqu'heure, Dieu aydant. Ce pendant, escrives moy vostre conception, affin que je face repartir le laquay, lequel est arrivé tandis que j'estois occupé parmi cette bonne compaignie que nous avons eu a disner. Si la bonne M"' de Rochefort (2) vous va voir, faites- la entrer et caresses-la bien, car cet (sic) une bonne fille; ma Seur Claude Simplicienne (3) est sa voysine, et (i) La question du mariage de M. d'Avisé et de M"* de Chantai autorise à rapprocher cette lettre de la précédente et à lui assigner la même date approximative. (2) Seconde femme de Prosper de Menthon, baron de Rochefort, Charlotte de Migieu était fille de Marin de Migieu, écuyer, et de Péronne de Malet. En entrant dans la famille de Menthon, elle était devenue Talliée de saint François de Sales. (3) Originaire du Bugey et de très humble extraction. Sœur Claude-Sim- plicienne Fardel avait pris l'habit au monastère d'Annecy le 2 juillet 1614, et prononcé ses vœux le 6 août 161 5; son extrême simplicité avait gagné à sa cause les deux Fondateurs. Dieu, qui révèle ses secrets aux petits, combla si bien cette âme de ses lumières, qu'on la jugea capable d'en éclairer les autres. Elle exerça la charge de Directrice au monastère de Belley, dont elle fut l'une  232 Lettres de saint François de Sales M™' de la Forest ( i ), de sa connoissance. Je ne sçai si M""^ de la Forest vous aura point parlé de ces amours que la bonne seur ( = ) affectionne si fort. Or, bon soir, ma très chère Mère ; Dieu vous comble de bénédictions comme moymesme. Amen. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nice. des fondatrices, le 20 août 1622. La Mère de Chantai, peu auparavant, l'avait fait passer du rang des Soeurs domestiques à celui des Sœurs associées. Chacun sait les détails de la dernière entrevue du bienheureux Evéque de Genève avec sa « chère fille Simplicienne, » et la prédiction qu'elle lui fit de sa mort pro- chaine (octobre 1622). Revenue à Annecy en 1625, elle y édifia la Communauté par ses vertus jusqu'au 14 septembre 1629, jour de sa précieuse mort. (Voir sa biographie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de VII Religieuses de V Ordre de la Visitation Sainte Marie, Annessy, Jacques Clerc, 1659; cf. tome VI, pp. 397 seq.) (i ) Bonaventure de la Forest, Religieuse à l'abbaye de Bons. (Voir tome XIV, note ( I ), p. 204.) (2) M™^ de la Fléchère.  MCCXVII A LA SŒUR COTON, NOVICE DE LA VISITATION DE LYON (0 Désirer l'amour infiniment désirable. — La contrition doit toujours être accompagnée de confiance. Annecy, juillet 16 16. Vive Jésus ! Je fus certainement consolé, ma très chère Seur, de la lettre que vous m'escrivistes l'autre jour, y voyant de (i) Sœur du célèbre confesseur de Henri IV, Jeanne-Marie Coton avait été mariée, après la mort de son père, à Guillaume de la Chaise, seigneur d'Aix. La vie du moude n'eut aucune influence sur cette âme prévenue dès l'enfance de grâces spéciales, et les affaires extérieures ne pouvaient la retirer de son union avec Dieu. Les faveurs extraordinaires qu'elle recevait furent soumises à l'examen de M. de BéruUe, et le P. Coton, qui reconnaissait lui- même l'action divine en sa sœur, écrivit à son beau-frère pour le rassurer sur ces voies singulières. Guillaume de la Chaise admirait et respectait sa femme comme une sainte, et lui donnait toute liberté de suivre ses attraits de péni- tence et d'oraison. En 161 5, il la laissa veuve avec deux jeunes enfants. M""* d'Aix les confia à son frère aîné, Jacques, seigneur de Chenevoux, et vint se présenter en 1616 à la Visitation de Lyon ; elle y prit l'habit le 24 juin. Une difficulté sérieuse l'empêcha de poursuivre son noviciat : habituée à la  Année 1616  233  bonnes marques du désir que vous aves d'aymer Dieu de toute vostre ame. Que vous puis-je dire, sinon que vous perseveries a désirer l'amour qui ne peut jamais estre asses désiré, estant infiniment désirable ? Pour l'absolution de vos péchés de tant d'années que vous me demandies, ma très chère Fille, vous deves sçavoir que Dieu, par sa bonté, les aura effacés au mesme instant que vous luy voulustes donner vostre cœur, par la resolution que son inspiration vous fit prendre de ne vivre plus que pour luy. Néanmoins, ma chère Seur, vous pourres utilement repeter souvent la prière de ce Pénitent qui disoit * : Seigneur, laves moy davantage * Ps. l, 4. de mon iniquité et me nettoyés de mon péché ; pour- veu que ce soit avec une vraye et simple confiance en cette souveraine Bonté, vous asseurant que sa miséricorde ne vous manquera pas. Soyes donq bien toute a Dieu, marches en simplicité dans le chemin ou la Providence vous a mise ; elle vous tiendra de sa main et vous conduira au port que vous desires de Taymable éternité, pour laquelle vous aves esté créée. Pries réciproquement pour mon ame. FRANÇ^ E. de Genève. Dieu soit béni. Communion journalière, elle obtint d'abord de continuer cette pratique (cf. ci-dessus, Lettre mccviii, p. 222); mais quand on voulut ensuite éprouver sur ce point son obéissance et sa démission de jugement, on ne les trouva point aussi parfaites que le demande l'esprit de la Visitation. On ménagea donc doucement sa sortie, avec l'agrément et par le conseil du P. Coton. (Voir à l'Appendice I, la lettre de la Mère Favre au Saint, 26 janvier 1617.) Retirée à Roanne, M*"® d'Aix y mena une vie exemplaire, couronnée par une très sainte mort. (D'après le P. d'Orléans, La Vie du P. Pierre Coton, de la Com- pagnie de Jésus, Paris, Michallet, 1688, pp. 288 seq.) Au témoignage du P. d'Orléans (ibid.), l'adresse de cette lettre portait : A la Sœur Jeanne Marie Coton; la pieuse veuve avait donc commencé son noviciat, mais le texte même indique qu'elle était encore au début; ainsi est justifiée la date mise en tête de ces lignes.  234 Lettres de saint François de Sales MCCXVIII A M. MICHEL FAVRE (inédite) Les retards d'un voiturin. — Deux fautes notables à corriger au TraHté de V Amour de Dieu. — Pourquoi le Saint redoute les excès de courtoisie de M. Rigaud. — Messages et commissions. — Envoyer un exemplaire de l'ouvrage à l'Archevêque de Vienne. Annecy, 8 juillet 1616. Monsieur Michel, mon Ami, Je suis marri de la peine en laquelle monsieur Rigaud ( ^ ) s'est mis pour la Praeface (2), que je m'asseure vous aurés recëue des maintenant par un voiturin qui porte une charge de soye a M. Magnin (3), qui m'a promis de faire rendre le paquet soudain quil seroit arrivé. Et vous treu- veres les lettres et la Praeface mesme de longue datte, par ce que tout estoit prest des la veille de saint Pierre (4), que le mesme voiturin devoit partir, mais alla despuis retardant jusques a mardi passé (5); et si j'eusse treuvé commodité plus tost, la chose eut encor esté plus avancée. Mays ce que monsieur Rigaud m'avoit assigné la fin de l'impression au 20 de ce moys, m'a empesché d'aller plus viste ; mays il me pardonnera bien cette faute. Et a propos de faute, il y en a deux notables au livre, dont l'une est de l'imprimeur, qui a obmis une ligne entière ; l'autre est de moy, qui ne sçai ou j'avois l'esprit quand j'escrivis les [quatre] vers [qui sont (6)] en la page 725, ligne 8, desquelz je vous envoyé la correction, et vous prie qu'en toute façon on les oste pour y mettre (i) Pierre Rigaud, libraire lyonnais. (Voir tome XIV, note (i), p. 383.) (2) La Préface du Traitté de V Amour de Dieu, dont M. Michel Favre sur- veillait l'impression. (Voir ci-dessus. Lettre mcxcviii.) (3) Négociant en soie, à Lyon. Il sera plus tard destinataire. ^ (4) Cf. ci-dessus, Lettre mccxiii. (5) C'est-à-dire jusqu'au 5 juillet. (6) Les mots entre crochets [ ] sont entièrement oblitérés; nous les réta- blissons d'après le sens.  Année 1616 ;235 ceux que je vous envoyé; car ces vers ainsy quilz sont, sont capables de fascher plusieurs lecteurs et les de- gouster ( ' ). J'ay encor fait un' autre faute remarquable et digne de mon inadvertence ordinaire : c'est qu'au septiesme Livre, le tiltre du Livre et le tiltre du premier chapitre sont de mesme (en la page 369), la ou le tiltre du chapitre devoit astre : Comme l'amour fait l'union de l'ame avec Dieu EN l'orayson (2). Mays pour celleci, il n'importe pas tant comme de celle des vers, a laquelle il faut tout a fait remédier. Il y a bien quelques autres fautes, mais il en faut remettre la correction a la 2Mmpression que, Dieuaydant, ronfera(3). Salues bien fort monsieur Rigaud, lequel, quoy que je désire bien de voir pour l'amitié quil me porte, néan- moins je ne voudrois pas d'ailleurs quil prit la peine de venir, de peur de son incommodité. Nous vous attendrons donq dans dix ou douze jours, et nos chères Seurs (4), que je salue de tout mon cœur. Je voudrois bien avoir un livre intitulé : Adagia (i) Ces vers dont le saint auteur demandait la correction, sont, à n'en pas douter, ceux qui ont été reproduits au tome V de notre Edition, p. 326, va- riante (a). Dans l'édition de 1616, le quatrain corrigé se trouve bien à la p. 725, mais à la neuvième ligne, et non à la huitième. Il est à regretter que les remarques si intéressantes contenues dans la pré- sente lettre n'aient pu être utilisées pour notre Introduction au Traitté ; l'Au- tographe n'a été découvert qu'après la publication. (2) C'est en effet de cette manière que le titre du premier chapitre du Livre VII a été modifié. (Voir tome V, p. i.) (3) La deuxième impression du Traitté parut en 1617, chez Rigaud; elle fut suivie de plusieurs autres, sans que François de Sales pût les revoir et corriger. Signalons une particularité curieuse de celle de 1616. Le libraire lyonnais, prévoyant le succès de l'ouvrage, fit faire deux tirages : l'un, in-S** et plus soigné, destiné à la clientèle riche ; l'autre, in-12 et sur papier moins bon, pour les bourses plus modestes. Le second compte beaucoup plus de fautes typographiques que le premier, dont l'Evêqu^ revit en partie les épreuves. Tous deux sortirent des presses d'Amy de Polier. maître imprimeur, natif d"Annecy, installé à Lyon en 158^ et qui, dès 1595, travaillait pour la maison Rigaud. (D'après les Notes de M. Baudrier^ érudit lyonnais.) (4) La Sœur Péronne-Marie de Chastel, rappelée à Annecy pour raison de santé, devait être accompagnée par sa Supérieure, la Mère Marie-Jacqueline Favre. Les voyageuses arrivèrent le soir du 16 juillet.  236 Lettres de saint François de Sales sacra Martini del Rio, Societatis Jesu ; je croy que M. Cardon les a imprimés (0. J'ay sceu la courtoysie que M. Rigaud use a l'endroit des serviteurs de céans; cela m'oblige fort, mais j'ay peur quil n'en face trop, et cela me tiendra retenu a ne demander pas certains autres livres que je desirois, les- quelz je ne sçaurois pas cotter par ce que je ne sçai pas leur tiltre, dautant que ça esté le P. Grangier ( = ) qui m'en a donné l'envie Ihors quil passa icy. Si je ne vous escris plus avant vostre départ, je vous prie de saluer le R. P. Recteur (3) et le P. Grangier, et les PP. Monet (4) et Fichet (5) ; item, le P. Philippe (6), monsieur de Saint Nizier (?) et tous ceux qui me font la faveur de m'aymer. Je vous escrivis pour avoir un petit Combat spirituel (i) Horace Cardon, marchand libraire à Lyon, acquit dans son commerce une fortune considérable ; il en fit le plus noble Usage. Tout dévoué à Henri IV, il fut assez heureux pour empêcher un corps de ligueurs de s'emparer de Lyon, fait qui se trouve relaté dans les lettres patentes à lui octroyées en 1605. Cardon fut échevin pour les années 1610 et i6ir ; il acheta le château de la Roche, dont ses héritiers prirent le nom, et décéda le 21 juin 1641, laissant tous ses biens à son frère Jacques. Marie Dupin, qu'il avait épousée en 1^98, ne lui avait donné qu'une fille, morte en bas âge. (D'après la notice d'Horace Car- don, à paraître dans la Bibliographie lyonnaise du XK7« siècle de MM. Baudrier.) L'ouvrage du P. Martin-Antoine del Rio avait été en effet imprimé chez Cardon en 1612, et réimprimé par le même, en deux volumes in-4°, en 1614. Il est intitulé : Adagialia sacra Veteris et Novi Testamenti. Saint François de Sales le cite dans un plan de sermon pour le 5 décembre 1616, deuxième lundi de l'Avent. (Voir tome VIII, p. 217.) (2) Pierre Grangier, S. J. (voir le tome précédent, note (2), p. 25). (3) Le P. Charles Mallians, recteur du Collège de Lyon de 1612 à 1616. (Voir ibid., note ( i ), p. 335.) (4) Philibert Monet (voir ibid., note (6), p. 149). (5) C'était le frère de la Sœur Marie-Adrienne, alors Religieuse à la Visi- tation d'Annecy (voir tome XV, note ( 4 ), p. 12). Né au Petit-Bornand (Haute- Savoie), le 2 février 1588, Alexandre Fichet entra dans la Compagnie de Jésus le 22 juin 1607, et y fit profession des quatre vœux le 25 avril 1623. Le 30 mars 1659, il mourut saintement à Chambéry, après avoir soutenu longtemps de glorieux combats contre les hérétiques. Le P. de Guilhermy assure qu'il fut « l'un des plus vaillants défenseurs de la foi romaine dans les provinces du Midi, sous les règnes d'Henri IV et de Louis XIII. » (Ménologe de la de de Jésus, Assistance de France, I""^ Partie, Paris, 1892 ; Hamy, Chronologie bio- graphique, etc., Prov. de Lyon, 1^82-1^62, Paris, 1900.) (6) D. Philippe de Saint-Jean-Baptiste Malabaila, Feuillant (voir le tome précédent, note (2), p. 240). (7) Nicolas Ménard (voir ci-dessus, note (3), p. 103).  Année i6i6 237 de ceux qui sont imprimés a Paris, par ce que tout y est, car si ilz estoit (sic) imprimés a Lyon avec tout le mesme, ce me seroit tout un (0. Si monsieur de Medio ( = ) n'avoit pas achetté les litz pour mes nièces, je le prie de ne les pas achetter encor jusques a ce que je luy escrive (3). Cependant, salues-le très fort de ma part, et madamoyselle Colin (4) et madame Vulliat (5). Je voudrois bien que l'on envoyast de ma part un livre a Monseigneur de Vienne, mon Archevesque (^), car il prendroit avec rayson en mauvaise part si, luy estant ce que je luy suis, je ne luy en ofFrois pas un. A cett' inten- tion, je vous envoyé une lettre pour luy, que monsieur de Medio prendra la peine de luy faire tenir. Pour les autres a qui je désire qu'on en présente , comme la ( I ) Sans doute le Saint veut parler ici de l'édition du Combat spirituel en soixante chapitres, traduite par M. de Santeuil en 1608, et dédiée à l'Evêque de Genève lui-même. (Voir tome III, note (2 ). p. xxxvii ; tome XII, note ( i), p. 122, et tome XIV, p. 384.) Parmi les deux cent soixante éditions du petit volume citées par Vezzosii^/icr^Z/or/û^^' Chierici regolari detti Teatini, Roma, 1780), il ne s'en trouve aucune de la version française entre 1608 et 1616. (2) Jacques de Médio, chanoine de Saint-Nizier. (Voir ci-dessus, note (2), p. 89.) (3) Le 24 mai 1616, le saint Evèque avait donné le voile de la Visitation à deux de ses proches parentes. L'une, Jeanne-Françoise, était fille de son frère Gallois (voir tome XV, note ( 3 ), p. 263). La seconde, Françoise-Agathe, filleule et cousine du Saint, était née le 15 janvier 1596, de Gaspard de Sales, dit de la Feuge, coseigneur de Brens, et de Nicoline de la Faverge. Elle fit pro- fession le 29 septembre de l'année suivante avec sa cousine. En 1625, on l'en- voya en qualité d'Assistante à la fondation d'Evian, transférée deux ans plus tard à Thonon. Elle mourut dans cette ville le 18 mars 1652. Ses vertus carac- téristiques furent une humilité profonde et une générosité parfaite au milieu de longues et pénibles infirmités. François de Sales s'était chargé des frais d'ameublement de cellule pour les deux nouvelles novices, et la Mère de Chantai, écrivant à la Mère Favre, recommandait l'économie dans cette emplette, car, dit-elle, « vous savez que notre bon Seigneur n'a pas trop d'argent. » (Lettres, vol. I, p. 104.) (4) Isabeau Daniel, veuve Colin (voir le tome précédent, note ( i ), p. 241). (5) Voir ibid., note (2), p. 188. (6) L'Archevêque de Vienne, métropolitain de l'Evêque de Genève, était alors Jérôme de Villars. Troisième fils de François de Villars et de Françoise de Gayant, il avait d'abord été conseiller au Parlement de Paris, chanoine et archidiacre de Vienne. Son frère Pierre lui laissa en 1599 son siège archié- piscopal (voir tome XIV, note (i), p. 124), et le sacra de ses propres mains dans l'église Saint-Maurice. Jérôme, à son tour, s'adjoignit comme coadjuteur, en 1612, son neveu Pierre de Villars, et mourut le 18 janvier 1626.  238 Lettres de saint François de S i.es Reyne ( et quelques Princesses, cela se fera a loysir, et suffit que ce soit avant que ces Traittés se publient a Paris (2). Si monsieur Rigaud veut absolument venir, nous le traitterons avec tout le cœur, car en vérité, il m'oblige fort. Dieu soit avec vous. Amen. Le 8 julliet 161 6. A Monsieur [Monsieur] Michel Favre. Chez monsieur Rigaud. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Venise, (i) La Reine mère Marie de Médicis, (2) Paris et la cour apprécièrent promptement le nouvel ouvrage de Fran- çois de Sales : on peut voir à ce sujet la lettre donnée à l'Appendice l.  MCCXIX AU CARDINAL ROBERT BELLARMIN (  Eloge des deux premières Communautés de la Visitation. — Un mot de saint Grégoire. — Chant doux et grave des Soeurs. — L'avis de l'Archevêque de Lyon; condescendance du Fondateur. — Trois particularités qu'il faudrait faire approuver par le Saint-Siège. — Raisons de ces demandes. Annecy, 10 juillet i6i6. Illustrissime et Reverendissime Domine in Christo mihi colendissime, Urbi et orbi ignotus, orbi et Urbi notissimum et aman- Illustrissime et Reverendissime Seigneur, et par moi très vénéré dans le Christ, Ignoré de Rome et du monde, je viens, selon la charité qui est ( i) Quand le célèbre Cardinal reçut cette lettre de l'Evèque de Genève, il était dans sa soixante-treizième année. Depuis cinquante-cinq ans, il honorait par sa sainteté et sa science la Compagnie de Jésus, et le Sacré Collège depuis  Année i6i6 239 tissimum Cardinalem, secundum eam quae in Christo est charitatem, precibus confidenter aggredior. Habemus hic et Lugduni unam et alteram virginum et  dans le Christ, présenter à un Cardinal très connu et très aimé du monde et de Rome une confiante prière. Nous avons, tant ici qu'à Lyon, deux Congrégations de vierges seize ans. Né à Montepulciano d'une noble famille, et neveu du Pape Marcel II par sa mère Cynthia Cervin, Robert Bellarmin était entré jeune encore dans la milice de saint Ignace, espérant ainsi échapper à tout jamais aux dignités ecclé- siastiques. Successivement professeur à Florence, à Mondovi, à Louvain et à Rome, il devint Père spirituel au Collège Romain, et eut sous sa direction l'angé- lique Louis de Gonzague. Nommé ensuite recteur, il ne quitta cette charge que pour le provincialat de Naples. Après la mort du Cardinal Tolet, son éclatant mérite le fit choisir comme théologien par Clément VIII; ce fut le premier pas vers les honneurs qu'il avait tant redoutés. Un ordre formel du Pape lui imposa la pourpre (3 mars 1595); en 1602, l'obéissance l'obligeait aussi d'ac- cepter Tarchevêché de Capoue ; trois ans plus tard, s'inclinant encore devant la volonté du Souverain Pontife, il y renonça et se fixa à Rome. Le 17 sep- tembre 1621, le Vénérable Bellarmin quittait la terre pour le Ciel, « sa mai- son, » comme il se plaisait à l'appeler. Il serait superflu de parler ici des travaux et des vertus de Téminent Prince de l'Eglise. Rappelons seulement l'estime, la vénération réciproques de Bel- larmin et de François de Sales. Après la Bible, l'arme principale de l'Apôtre du Chablais contre la Réforme avait été le livre des Controverses de celui qu'on surnommait le « marteau des hérétiques, » et que François de Sales qualifie toujours dans ses écrits de « grand, docte, très excellent Docteur. » S'aimant déjà sans se connaître, les deux saints personnages se rencontrèrent dans la solennelle séance où le futur coadjuteur de Genève força l'admiration de Clément VIII et de ses examinateurs. Sur une question longuement débat- tue, tous deux se trouvèrent de même avis; dans l'avenir il devait toujours en être ainsi, sauf une seule fois où, sans se séparer d'opinion, ils jugèrent diversement de l'opportunité d'une discussion. (Voir tome XV, note ( 3), p. 95.) A l'entrevue publique succédèrent les visites intimes qui unirent étroitement le Jésuite vieilli dans la lutte et le jeune Prélat. De loin en loin, les lettres continuèrent leur commerce d'amitié ; on déplorera à jamais la perte d'une bonne partie de cette correspondance, reçue de part et d'autre avec une joie et un respect dont tous leurs historiens nous ont gardé le souvenir. Que de fois on entendit les deux amis faire leur éloge mutuel ! Bellarmin protestait que François de Sales semblait n'avoir point péché en Adam ; à son tour, François assurait que l'illustre Cardinal n'ignorait rien tant que le mal. Ils « étaient faits l'un pour l'autre, » dit l'historien du Vénérable, '< et Dieu avait voulu que leur apostolat eût de grands traits de ressemblance. Ils ont eu tous deux la force toute puissante de la douceur, de l'innocence, de la limpide franchise du langage. » (Couderc, S. J., Le VbU Card. Bellarmin, Paris, 1893, tome II, liv. VI, chap. i.) La cause de béatification de Bellarmin fut introduite de bonne heure ; sous Benoît XIV, elle sembla près d'aboutir, mais des difficultés d'ordre extérieur en entravèrent la conclusion.  240 Lettres de saint François de Sales viduarum Congregationem, quse, licet verius Oblatae quam veri nominis Religiosse aut Moniales censendae sint, tamen castitatem acsacram pudicitiam sanctissime colunt, obedientiam simplicissime amplectuntur, paupertatem religiosissime sequuntur. Et quamvis ex earum ritu clau- surae non sint addictse, eam nihilominus ex animi fervore propemodum servant perpetuam, quandoquidem nun- quam, nisi gravissimis et piissimis causis impellentibus, extra domum pedem efFerunt ; sed statutis horis, iisque apte per totum diem dispositis, Officium parvum Beatis- simse Virginis simul in choro recitant, cantu ad pietatis régulas tam fœliciter formato, ut vix dici queat, num gravi- tatem suavitas, vel suavitatem gravitas superet. Orationi vero illi angelicse, quam mentalem vocant, duabus item horis, una matutina, alia vespertina, maximo cum fructu operam navant, ac, ut uno verbo concludam, illas mihi referre videntur fœminas de quibus Sanctus Gregorius * Carm., 1. II, sec- Nazianzenus ad Hellenium tam magnifiée loquitur *, ut Mon'.^exhortat. ), ^as cœlestia et pulcherrima Christi sidéra nominare non n-^-^^,^(>^- vereatur.  et de veuves qui, bien que méritant plus exactement le nom d'Oblates que celui de Religieuses ou de Moniales, ne laissent pas de pratiquer très saintement la chasteté et la céleste pureté, d'embrasser en toute simplicité l'obéissance et de suivre très religieusement la pauvreté. Sans que leur Règle les assujetisse à la clôture, la ferveur de leur âme la leur fait observer presque perpétuelle, car il leur faut des raisons très graves et très saintes pour mettre le pied hors de leur maison. Par contre, à des heures diversement et convenablement réparties le long de la journée, elles récitent ensemble, au chœur, le petit Office de la Bienheureuse Vierge, et avec un chant si heureusement adapté aux règles de la piété, qu'il serait difficile de dire si la douceur l'emporte sur la gravité, ou la gravité sur la douceur. Quant à cette prière angélique qu'on appelle oraison mentale, elles y consacrent pareillement, et avec le plus grand fruit, deux heures, l'une le matin, l'autre le soir. Et, pour conclure d'un mot, elles me parais- sent rappeler ces femmes dont saint Grégoire de Nazianze parle en termes si magnifiques à Hellénius, n'hésitant pas à les appeler de célestes et très belles étoiles du Christ,  Année i6i6  241  Verum, cum non ita pridem Reverendissimum J3omi- num Archiepiscopum Lugdunensem salutandi gratia adiissem (0, verbaque simul de rerum nostrarum eccle- siasticarum statu misceremus, incidit inter alia sermo de istis duabus Congregationibus mulierum, quarum odor suavissimus est in utraque diaecesi, ut proinde earum recta gubernatio maximi omnino videatur esse momenti. Cumque ille suggereret operaepretium fore, ut imprimis eas ad Regulam aliquam religiosam ex iis quse ab Ecclesia approbatae sunt, et ad clausuram ac vota solemnia am- plectenda induceremus, ego quoque in eam sententiam facile descendi, tum ob viri singularem in me auctorita- tem, atque perspectam omnibus peritiam et pietatem, tum ob nominis Religioni splendorem, quem magno ornamento istis, alioquin piissimis, Congregationibus futurum existimabam. Ita ergo inter nos statutum est, atque ubi id aggredi cœpimus, miram in eis et suavissi- mam ad obediendum animorum promptitudinem et faci- litatem invenimus. Tria tantum habent in usu peculiaria pietatis officia, Or, il n'y a pas bien longtemps, étant allé saluer M°'' le Révéren- dissime Archevêque de Lyon (0, et nous étant tous deux entretenus de l'état de nos affaires ecclésiastiques, la conversation tomba, entre autres choses, sur ces deux Congrégations de femmes, qui sont en si bonne odeur dans l'un et l'autre diocèse, qu'il semblerait de toute importance de leur donner une constitution réguHère. Et comme l'Archevêque faisait remarquer l'avantage qu'il y aurait à les amener tout d'abord à embrasser une Règle religieuse parmi celles que l'Eglise a approuvées, avec la clôture et les vœux solen- nels, je me suis, moi aussi, facilement rallié à cette opinion, tant à cause de l'autorité particulière qu'a sur moi ce grand personnage, de son expérience et de sa piété bien connues de tous, qu'à cause de la gloire attachée à ce titre d'Ordre religieux dont il semble que ces Congrégations, d'ailleurs très pieuses, recevraient un grand lustre. Ainsi fut-il donc décidé entre nous. Et nous étant mis à l'œuvre, ce fut merveille que la douce et facile inclination de cœur vers l'obéis- sance que nous rencontrâmes chez les Sœurs. Les devoirs religieux qui remplissent leur vie n'ont que trois ( I ) A la fin de juin 1615 (voir plus haut, notes ( i ), ( 2 ), p. 13, et ( i ), p. 18.) Lettres V;i 16  ^42 Lettres de saint François de Sales quse summopere illis cordi sunt ; et quae si ab Apostolica Sede concedantur, nihil in hac status mutatione durum, nihil insuave futurum est. Ea autem sunt ejusmodi, quae, quantum existimo, cum clausura, aut statu religioso mu- lierum minime pugnent ; quaeque peritis rerum nostrarum Gallicarum sestimatoribus non solum non imminuere, sed etiam plurimum promovere pietatem videantur. (a) Primum est, ut ad Ofïicium cléricale quod magnum vocant non obligentur, sed tantum ad Ofïicium parvum Beatissimae Virginis. Hujus autem earum desiderii ratio est, quia in illis Congregationibus plerumque recipiuntur mulieres jam adultae, quse Officium magnum, cum illius rubricis, vix ac ne vix quidem addiscere possent. Deinde, quia brève illud Ofïicium Beatae Virginis magna vocum, accentuum pausarumque distinctione célébrant, quod ne- quaquam, si longius Ofïicium recitandum foret, praestare possent. Quod ideo maxime consideratione dignum est, quia inter omnes totius orbis mulieres, nullse sunt quse  particularités, mais qui leur tiennent extrêmement à cœur, et dont la concession par le Siège Apostolique enlèverait à ce changement d'état tout ce qu'il pourrait avoir de dur ou d'amer. Or, ces parti- cularités sont de telle nature, qu'à mon avis, elles ne s'opposent nullement à la clôture et à l'état religieux des Instituts de femmes, et que, si nous en croyons les gens les plus au courant de notre situation en France, elles y auraient pour effet, non d'amoindrir la piété, mais plutôt de l'exciter grandement. Le premier point, c'est de n'être pas obligées à l'Office des clercs, à savoir au grand Office, mais seulement au petit Office de la Bien- heureuse Vierge. Et voici le motif de ce désir : ces Congrégations admettent fort souvent des personnes déjà d'un certain âge, qui ne pourraient qu'à grand'peine s'habituer au grand Office avec toutes ses rubriques. En outre, ce petit Office de la Sainte Vierge est par elles récité avec une scrupuleuse observance des tons, accents et pauses, ce qu'elles ne pourraient absolument pas s'il leur fallait réciter un Office plus long. Cela est d'autant plus digne d'être pris en considération, que, de toutes les femmes du monde entier, il n'en (a) [A partir d'ici jusqu'à la p. 245, (g), notre texte est donné d'après l'Autographe appartenant à M. le chanoine CoUonge.. aumônier de la Visi- tation de Chambéry.]  Année i6i6 243 ineptiore latini sermonis pronunciatione utantur quam Gallicae (b), quas proinde impossibile esset accentuum quantitatum et rectse pronunciationis leges in tanta Ofïi- ciorum, Lectionum et Psalmorum varietate observare ^^). Unde dolendum est tantam in plerisque monasteriis mulierum pronunciationis imperitiam audiri, ut etiam alioquin cordatis auditoribus interdum risum, sciolis vero et haeresi infectis cachinnum moveant et scandalum. Secundum est, quod viduas interdum etiam aliquot annis, in habitu seculari, sed tamen modestissimo ('^), secum ad Congregationis pia officia exercenda habitare permittant. Verum, non sane quidem omnes viduas, sed eastantum qusecum Religionem ingredi cupiant, intérim dum de nuncio seculo ac nuptiarum interpellatoribus re- mittendo serio cogitant, thœsaurum castitatis, quem in vasis fictilîbus portant *, abscondere prudenter quaerunt, * ç^^ ^^' '^' ^" ne in manibus illum portantes in conspectu filiorum =0; xm, 44. vide 1 • 1 -1 1 .. 1 ... 4, s. Gregor. Mag., nominum, latronum depraedationi objiciant *. homii.n iuEvang.  est point qui prononcent le latin aussi défectueusement que les françaises, à qui il serait vraiment impossible, dans une telle variété d'Offices, de Leçons et de Psaumes, d'observer exactement les lois de l'accentuation et de la prononciation. C'est en effet une grande pitié que la prononciation que l'on entend dans la plupart des monastères de femmes, et dont l'étrangeté va jusqu'à exciter le rire chez des auditeurs d'ailleurs bien disposés, et la moquerie, sinon le scandale, chez les demi-savants et les hérétiques. Un second point, c'est la permission qu'elles accordent à des veuves de venir, pendant des années parfois, habiter avec elles, en costume séculier, très modeste il est vrai, pour se livrer aux pieux exercices de la Congrégation ; et cela, non pas sans doute à toutes les veuves, mais à celles-là seules qui, désireuses d'entrer en Religion, et, en attendant, songeant d'une manière sérieuse à donner congé au siècle et aux sollicitations matrimoniales, cherchent prudemment à cacher ce trésor de la chasteté, qu'elles portent J<2«5 des vases fragiles, de crainte que, le portant en leurs mains sous le regard des enfants des hommes, elles ne l'exposent à devenir la proie des voleurs. (b) Gallicœ, — fut difficillimum sit eas...j (c) observare. — TAc sane quam inepte in plerisque ut...J (di modestissitno. — faxcipiant et intra earum claustra excipere possint...J  244 Lettres de saint François de Sales Hujus autem desiderii ratio est, quia in istis regionibus tanta libertate viri (^) viduas, quamvis piissimas, coUoquiis et irritamentis secularibus infestant, ut quae veram vidui- tatem colère volunt, vix id tuto prsestare possint ; quibus hac via optime consulitur. Cumque hujusmodi viduae obedientiam et exactam propemodum clausuram obser- vent (vix enim semel bisve quotannis ad domestica négo- cia componenda illis egredi contingit), nihil omnino dispendii, plurimum vero compendii huic consuetudini inesse existimandum est. Imo vero multo minus ea peri- culum habet, quam quae in plerisque piissimis mcnasteriis viget, ut Sorores conversas negociorum gerendorum gra- tia egredi et regredi possint, neque multo plus difficultatis quam illa,quae tamen satis trita est, ut puellae educationis gratia in monasteriis recipiantur. Quid enim interest num puella educationis, vel vidua castitatis gratia, in monas- terio degat? Quae omnia maxime vera existimabit quis- quis harum regionum Gallicarum mores et ingénia recte perspexerit.  Et voici la raison de ce désir : telle est, dans ces pays-ci, la liberté hardie des hommes à harceler les veuves, même les plus pieuses, de leurs conversations et provocations mondaines, que celles qui veu- lent pratiquer la véritable viduité, ont de la peine à le faire en toute sécurité; à quoi on obvie très heureusement par ce moyen. L'obéis- sance et la clôture presque complète à laquelle ces veuves s'astreignent (car à peine leur arrive-t-il de sortir une ou deux fois par an pour régler leurs affaires domestiques), nous autorisent à croire que la pratique dont nous parlons, loin d'avoir des inconvénients, offre au contraire plusieurs avantages. Elle présente même beaucoup moins de péril que celle qui, dans la plupart des monastères les plus pieux, permet aux Sœurs converses d'aller et de venir pour des raisons d'af- faires ; et la difficulté n'y est guère plus grande que dans la coutume, pourtant généralement admise, de recevoir des jeunes filles dans les monastères pour y faire leur éducation. Qu'importe-t-il, en effet, qu'une jeune fille soit reçue dans un couvent pour y être instruite, ou une veuve pour y conserver la chasteté ? Ce sont là des considéra- tions auxquelles souscrira quiconque sera bien au courant des mœurs et des habitudes de nos régions françaises. (e) viri — fn^ulieres etiam devoussimas...J  Annf.e i6i6 245 Tertium est, quod non soluni vidiias hiijusmodi quao serio seculo renunciare intendunt, sed interdum alias etiam conjugatas admittunt; eas, scilicet, quae cum ve- lint novam in Christo vitam instituere *, atque adeo con- * Cf. Coioss., m, 3. fessiones, quas vocant générales, prœviis aliquod exer- citiis spiritualibus facere, opus habent in remotum a secularibus locum tantisper aliquot diebus secedere *. Et *Cf. Marc, vi, 31. sane, quam uberes fructus haec sacra paucorum dierum hospitalitas afferat, nemo satis pro merito dixerit ; per eam enim non quieti tantum, sed et pudori, verecundiae ac honestati mulierum consulitur, dum ad fenestellam craticulis ferreis munitam, pro confessionibus Sororum audiendis efFormatam, confessarios accerserunt, ibique documenta salutis audiunt, quse postea per quietem cum aliqua (^) ex Sororibus animo revolvunt. Porro, si aliqua causa pia subsit propter quam interdum mulieres Monialium claustra ingredi possint (sunt autem aliquot), hae duse inter praecipuas (g) numerandae sunt;  Troisième point. Outre les veuves dont nous venons de parler et qui se proposent sincèrement de renoncer au siècle, il leur arrive aussi d'admettre des femmes engagées dans les liens du mariage, qui, voulant entreprendre une vie nouvelle dans le Christ, et faire, avec la préparation de quelques exercices spirituels, ce qu'on appelle une confession générale, ont besoin de se retirer pour plusieurs jours en quelque lieu éloigné des bruits du monde. Quels fruits abon- dants produit cette sainte et courte hospitalité, on ne saurait assez le dire ; car ce n'est pas là seulement une question de repos, mais de condescendance au sentiment de pudeur, de réserve et d'honnêteté, naturel à leur sexe, que l'on ménage en les mettant en rapport avec leurs confesseurs par une petite fenêtre munie d'un treillis de fer, pratiquée tout exprès pour les confessions des Sœurs ; là, elles re- çoivent des enseignements salutaires qu'elles peuvent ensuite, avec quelqu'une des Sœurs, méditer à loisir. Or, s'il existe des raisons de piété qui autorisent les femmes à franchir de temps en temps la clôture des couvents de Religieuses (et il en existe), il convient de compter ces deux-là parmi les (f ) cum aliqua — rSororum meditantur...J (g) [Fin de la partie autographe,]  246 Lettres de saint François de Sales quas tamen ita obtinere sequum est, si ab Ordinario ejusve Vicario generali scripto probentur, et quamdiu ex liujus- modi praxi nihil detrimenti disciplinae regulari accedet. Quod si ex praeteritis de praesentibus et futuris conjec- tura sumenda sit, nihil omnino sanctius, nihil utilius ; quinimmo, quia res omnino fœlicissimum hactenus habuit successum, in posterum eumdem quoque habituram spe- randum est. Caeterum, habet Reverendissimus Dominus Archiepis- copus Lugdunensis intercessorem potentissimum, Chris- tianissimi scilicet Régis oratorem (0. Habent etiam wSorores hujus civitatis validissimas preces Serenissimse Ducis Mantuse viduae ( = ), quse eas plurimum diligit. Ego vero, Cardinalis amplissime, te unico intercessore utor, principales, à condition toutefois qu'on n'en use qu'avec l'approbation écrite de l'Ordinaire ou de son vicaire général, et pour autant que ces pratiques ne porteront aucun préjudice à la discipline régulière. Que s'il est permis de tirer du passé des conjectures pour le présent et pour l'avenir, il n'est certainement rien de plus saint, rien de plus utile; aussi faut-il espérer que, n'ayant eu jusqu'à ce jour que les plus heureux résultats, il en sera de même dans la suite. Au reste, M»'" le Révérendissime Archevêque de Lyon possède un intercesseur d'un très grand crédit dans la personne de l'Ambassa- deur du Roi très chrétien (0 ; et les Sœurs de cette ville peuvent elles-mêmes compter sur les prières très puissantes de la Sérénissime Duchesse douairière de Mantoue qui les aime beaucoup (2). Pour moi, très éminent Cardinal, c'est à votre unique intercession que j'ai (i) Dès le début de 1614, avait succédé à Savary de Brèves, comme ambassadeur auprès de la Cour romaine, François-Juvénal des Ursins, mar- quis de Tresnel, baron de Neuilly, seigneur de la Chapelle, etc., chevalier des Ordres du Roi. Il était né vers 1570, de Christophe-Juvénal des Ursins et de Madeleine de Luxembourg. Fort peu goûté du Cardinal Borghese qui regrettait son prédécesseur, traité d'ignorant par Richelieu dont la fortune commençait, jugé plus sévèrement encore par la Reine mère, le marquis de Tresnel fut rappelé de Rome au mois de mai 1617. On lui confia cependant une ambassade en Angleterre. Il mourut le 9 octobre 1650, léguant son nom et ses biens à son petit-neveu, François de Harville ; de son mariage avec Guillemette d'Orgemont, il n'avait eu qu'une fille, Charlotte, morte jeune. (D'après Moreri, 1740, tome VI ; De Stefani, La Nun^iatura di Francia del Cardinale Quido Bentivoglio, Lettere a Scipione Borghese ; Firenze, Le Mon- nier, 1863, vol. I, etc.) (2) Marguerite de Savoie (voirie tome précédent, note (i), p. 104).  Année i6i6 247 tum quia te solum ex augustissimo illo Apostolico Collegio novi(0, tum quia de rébus istis noslris cismontanis optime judicare potes, et plerisque illud suggerere, aliter hic, aliter ibi, rem divinam esse promovendam, pro morum ac regionum varietate ; tum quia de tua erga hujus diœ- cesis miserabilis commiseratione libri tui Controversia- rurn ( = ), de tua vero erga pias animas benevolentia, novis- simus ille et amabilis nimis tuus Benjamin (3), dubitare non sinunt. Ouare, de eximia illa Illustrissime Domina- tionis Vestrae in bonos bonorumque conatus propensione confisus, eam enixe rogo et obtestor, ut pro sua prudentia, negotium, sua qua poUet auctoritate, promoveat et con- ficiat (4).  recours. Vous êtes, en effet, le seul membre de cet auguste Collège apostolique que j'aie l'honneur de connaître { ; et étant à même d'apprécier parfaitement nos affaires de ce côté des Alpes, vous pouvez faire entendre aux autres que le progrès des choses divines doit être procuré, ici d'une manière, là d'une autre, selon les diffé- rences de mœurs et de pays. Enfin, comme garant de votre commi- sération à l'égard de ce pauvre diocèse, j'ai vos livres des Contro- verses (2), et, pour gage de votre bienveillance à l'égard des âmes dévotes, j'ai votre dernier-né et tant aimable Benjamin (3) ; ce qui ne me laisse aucun doute. Aussi, me confiant aux excellentes dispositions de Votre Illustris- sime Seigneurie pour les gens de bien et leurs efforts pour le bien, je lui demande instamment et la supplie, m'en rapportant à sa prudence, d'appliquer à la poursuite et au bon succès de cette affaire toute l'autorité qu'elle possède (4). ( I ) Cf. ci-dessus, note ( i ), p. T99 , (2) Disputationes Roherti Bellarmini Poîitiani, de Controversiis Chrisiia- ncefidei. Editio secunda, Ingolstadii, Sartorius, 1388-1593. (3) Le Saint désigne certainement sous ce nom le premier des cinq Opus- cules du Cardinal, celui que l'auteur appelait lui-même son Benjamin. Il a pour titre : De ascensione mentis in Deum per scalas rerum creatarum, opus- culum Roherti Cardinalis Bellarmini. Ad Illustriss. et Reverendiss. D. Card. Aldobrandinum, S. R. E. Camerariiim. Romae, apud Jacobum Mascardum ; Antwerpiae, ex Officina Plantiniana, apud Balthasarum et Joannem Moretos, M.DC.xvi. — Dans sa Préface du Traitté de l'Amour de Dieu, François de Sales assure que ce « petit livret... ne peut estre qu'admirable, partant de cette très ¥. sçavante main et très dévote ame. » (4) Voir à l'Appendice I, la réponse de Bellarmin.  248 Lettres de saint François de Sales Vale, clarissime, amplissime et Illustrissime Praesul, et me pro Christi amore excusatum et amatum velis, rogo supplex et obtestor. F., E. Gebennensis. Annessii Gebennensium, x Julii (0.  Adieu, très célèbre, très grand et très illustre Prélat ; veuillez, pour l'amour du Christ, m'excuser et m'aimer : je vous en prie et sup- plie humblement. François, Evêque de Genève. Annecy en Genevois, 10 juillet (i). (i) Les anciennes éditions donnent la date du lo juillet, sans millésime. Hérissant, le premier, a ajouté 1616, qui est certainement juste, puisqu'il est question dans cette lettre de deux Maisons de la Visitation. Le 22 juillet de cette année 1616, partaient d'Annecy les fondatrices du troisième Monastère de rinstitut, celui de Moulins, (Voir ci-après, note ( i ), p. 258.)  AUTRE MINUTE DE LA LETTRE PRÉCÉDENTE (O (fragment inédit) Illustrissime et Reverendissime Domine in Christo colendissime, Orbi et Urbi ignotus, ego qui minime sum dignus vo- I Cor., XV, (). carï Episcopus * et simpliciter ambulans **, omnium mihi *Cf. Prov., X, 9. ^Q^-q^g Q^^i notissimum et illustrissimum Cardinalem,  Illustrissime et Reverendissime Seigneur, très vénéré dans le Christ, Ignoré du monde et de Rome, très indigne d'être appelé évêque, mais marchant en simplicité, j'aborde avec confiance, selon la charité ( 1 ) Voir l'Avant-Propos du tome XI, p. 25.  Annhr i6i6 249 secundum eam qua3 in Christo est (•'') charitatem, agçre- dior confidenter. Habemus hic quamdam (^) viduarum ac virginum Congreg-ationem, quse licet verius Oblatae quam proprii nominis Moniales esse videantur, tamen tantam pietatem undique spirant, ut quemadmodum de similibus Sanctus Gregorius Nazianzenus olim asseruit *, ego quoque de *Ubi supra, p. 2^0. istis dicere non verear : Mihi quidem etsi parvus est hujus- modi mulierum numerus, cselestibus pulcherrimisque Christi syderibus adeo gestio atque exulto, ut pro paucis his de virtutis praestantia, cum multo pluribus contentio- nem venire non dubitem. Colunt i^) omnes castitatem sanctissime (^), obedien- tiam simplicissime, paupertatem religiosissime ; nam meum et tuum, frigida illa verba, non solum inter eas nemo audit, sed nec etiam in cor earum ascendit. (e) Et modestiam ac verecundiam christianam tanta animi con- tentione complectuntur, ut quamvis clausurse ex earum  qui est dans le Christ, un Cardinal, de tous le plus illustre, et le plus connu de moi et du monde entier. Nous possédons ici une Congrégation de veuves et de vierges qui, bien qu'elles semblent être en vérité plutôt des Oblates que des Moniales proprement dites, respirent pourtant une telle piété, que je ne crains pas d'en dire ce que saint Grégoire de Nazianze affirmait jadis de leurs pareilles : N'ayant dans mon diocèse qu'un petit nombre de ces femmes, je suis tellement fier et joyeux de posséder ces célestes et très belles étoiles du Christ, que, pour l'excellence de la vertu, je ne redouterais pas la comparaison de ma petite troupe avec d'autres bien plus nombreuses. Elles observent très rigoureusement la chasteté, très simplement l'obéissance, très religieusement la pauvreté. Le mien et le tien, — ces froides paroles — non seulement on ne les saisit pas sur leurs lèvres, mais elles n'arrivent pas à leur cœur. Et elles embrassent (a) est — rdilectionemj (b) hic — rpiamJ quamdam fmulierumj (c) Colunt — fenini etiam ex votc.J (d) castitatem — freligiosissime... candidissimej (e) ascendit. — fEt sunt illis omnia adeo communia, ut illis omnibus sint cor unum et anima una, id est, Dei voluntas. Et clausuram modestiamque...j  2ÇO Lettres de saint François de Sales ritu non sint alligatae, clausuram nihilominus ex animi fervore propemodum servent perpetuam, cum nunquam, nisi ex gravissimis et piissimis causis extra domum pe- dem( ^) effectant (sic)^ nunquam autem sine urgentissimis, necessariis et a nobis scripto probatis causis viros in domum admittant. Habent (g) ecclesiam et in ea altare exterius ad Mis- sarum celebrationem, et chorum interius in quo quoti- die statutis horis Ofïicium Beatissimse Virginis simul [concinunt], cantu (h) ad pietatis régulas tam fœliciter formate , ut vix dici queat num psalmodise gravitatem suavitas, vel suavitatem gravitas superet. Sunt praeterea addictissimae orationi illi angelicae quam mentalem vocant et, ut paucis concludam, (0 sponsae Christi sunt antiquas illas Paulas, Marcellas, Eustochios, Melanias imitatione représentantes.  d'une telle ardeur la modestie, la réserve chrétienne que, bien que non obligées à la clôture par une Règle, elles n'en gardent pas moins, par suite de leur ferveur d'esprit, une clôture presque perpé- tuelle. Jamais, en effet, sans des motifs très graves et très pieux, elles ne mettent le pied hors de leur maison ; et jamais non plus elles n'en permettent l'entrée à aucun homme, sauf des cas d'extrême urgence et nécessité, reconnus tels par un écrit de notre main. Elles ont une église, et dans cette église un autel extérieur pour la célébration de la Messe, et, à l'intérieur, un chœur où elles se réunissent chaque jour à des heures fixées pour chanter en commun l'Office de la Bienheureuse Vierge. Leur chant est si heureusement adapté aux règles de la piété, qu'on ne saurait dire si, dans leur psalmodie, la douceur l'emporte sur la gravité, ou la gravité sur la douceur. En outre, elles sont très adonnées à cette prière angélique qu'on appelle oraison mentale. Pour conclure en peu de mots, ce sont des épouses du Christ, vivantes images de ces illustres dames de l'anti- quité chrétienne : les Paule, les Marcelle, les Eustochium, les Mélanie. [{) pedem — Pponant... niittantj (g) Habent — Tchoruai... oratoriumj (h) cantu — fnon quidem secundum musicam composite, sed suavissimo pariter...J (i) concludam. — Te collegio liliorum ac rosarura verae Christi familiae sunt etj  Année 1616 351 Tria autem, aut quatuor habent in usu pecularia (sic), quse plerisque viris rerum nostrarum transmontanarum peritis aestimatoribus (i ), maxime ad pietatem promoven- dum conducere videntur. Primum, mulieres seculares in suam domum interdum admittunt, non passim omnes, sed eas tantum quae cum velint générales confessiones et C^) exercitia quse vocant spiritualia facere, opus habent in remotum a negotiis secularibus locum tantisper aliquot diebus secedere. Et sane, quam uberes fructus istarum hsec sacra hospitali- tas(U afferat, nemo satis exprimere queat ; magna enim libertas qua in istis regionibus viri mulieribus mixti vivunt, plerumque impedit mulieres ne rite ad contritio- nem intimamque pœnitentiam per exercitia se inter domesticos prseparare valeant, quibus propterea hac via (n^) succurritur. Deinde prospicitur etiam earum pudori ac verecundiœ dum peccata sua ad craticulas et fenestellas pro confessionibus Sororum Oblatarum  Cependant, trois ou quatre usages leur sont particuliers, qui semblent fort propres, au jugement de la plupart de ceux qui con- naissent nos mœurs de ce côté-ci des monts, à promouvoir la piété. Premièrement, elles admettent parfois chez elles des séculières, non pas toutes et au hasard, mais seulement celles qui, voulant faire des confessions générales et vaquer aux exercices qu'on appelle spirituels, ont besoin, dans ce but, de se retirer durant quelques jours dans un endroit éloigné des tracas du monde. Et certes, quelle abondance de fruits produit cette sainte hospitalité, nul ne saurait l'exprimer. En effet, la grande liberté qui unit la vie des hom- mes, en ces contrées, à celle des femmes, empêche le plus souvent celles-ci de se préparer, dans l'intérieur de leur famille, par des exercices convenables, à la contrition et à une intime douleur de leurs fautes. On leur rend ainsi service. De plus, on pourvoit égale- ment à leur modestie et à leur réserve ; car, aux confesseurs appelés, elles accusent leurs péchés à travers les grilles et les petites fenêtres ( j ) œstimatoribus — Tprobatissima, propter quîe cum de eis ad Religionem proprii nominis adducendis cogitarem, haerere et tantisper expectare visum est... debere censui.J (k) et — rpi'opositum J ( 1 ) hospitalitas — fexerceaturj (ra) hac — rhospitalitatej  252 Lettres de saint François de Sales audiendis 1°) confessarios constitatas accersunt, neque quicquam in ea re istis («) maxime in partibus periculi unquam esse posse videtur. Secundum est, quod viduas (p) interdum etiam aliquot mensibus secum habitare permittunt, sed eas tantum quae cum verae viduse esse velint, dum de nuntio seculo ac nuptiarum (q) interpellatoribus remittendo cogitant, the- * II Cor., IV, 7. saurum quem in vasis fictllibus portant*, abscondere quserunt, ne in manibus illum portantes, a latronibus * Videsupra,p.243. jn^s depredari contingat*. Atque in hac etiam hospitali- tate cum nihil periculi, plurimum sane compendii, attenta harum regionum conditione esse compertum est. Tertium, non Officium ecclesiasticum, sed tantum Officium Sanctissimae Deiparse recitant, quod ideo faciunt quia plerumque inter eas recipiuntur jam aetatis provectae quae Officium magnum vix addiscere possent ; deinde, quia brève illud Officium, magna (^) vocum pausarumque  arrangées à cette fin pour les confessions des Sœurs Oblates. En cela, aucun danger, surtout en ces pays-ci, ne semble à craindre. Le second usage est qu'elles permettent parfois à des veuves d'habiter chez elles, même durant plusieurs mois ; à des veuves, dis-je, qui, voulant être des veuves véritables, cherchent à cacher, pendant quelque temps, pour dire adieu au monde et aux solliciteurs en mariages, le trésor qu'elles portent dans des vases d' argile; de peur que, le portant dans leurs mains, au vu de tous, il ne leur arrive d'en être dépouillées par des larrons. Et dans ce genre d'hos- pitalité non plus, comme on n'a trouvé (vu les mœurs de ces régions) aucun péril, on y a aussi trouvé beaucoup d'avantages. Le troisième point consiste en ce qu'elles ne récitent pas l'Office ecclésiastique, mais seulement celui de la Très Sainte Mère de Dieu : ce qu'elles font, parce qu'on reçoit fréquemment chez elles des sujets d'âge avancé , qui pourraient bien malaisément ap- prendre le grand Office. D'autre part, elles récitent ce petit Office facilement, marquant avec une parfaite netteté les mots, les accents (n) audiendis — fin ecclesia Oblatarum...J (o) istis — r regioaibusj (p) quod viduas — Tquae verae viduas sunt...J {(\) ac nuptiarum — Tproxenetis remitterc.J (r) magna — fgravitate ac devotionc.J  Année 1616 253 distinctione adhibita facile observant : quod nequaquam in magno Oflficio recitando prse.stare possent. Quartum est, quod incorrigi biles ejicere possunt, ea tamen lege ut prius Episcopum moneant, ejusque décréta expectent, et quicquid propter ejiciendam receperint, eidem restituant : quod quidem nunquam hactenus con- tig-it. Caetera vero omnia, nihil omnino habent peculiare. Illa autem ita proposui quia (s), si istis servatis, vellet Summus Pontifex eas veri nominis Religionem amplecti, ego nuUo negotio rem totam peragerem, eas Regulse Sancti Augustini subjiciendo, et ad clausuram secundum Concilii Tridentini placita reducendo. Sin minus, Sua Sanctitas, quse, quia omnium curam habet, omnibus omnia fieri débet *, eas earumque * l Cor Ecclesiam dignetur Indulgentiis cohonestare, et ad ma- jores in pietate progressus excitare sua paterna et Apos- tolica Benedictione, cum earum mulierum ac virginum maxima pars sit nobilissima, et illustribus parentibus  et les pauses; ce qui leur serait impossible dans la récitation du grand Office. En quatrième lieu, elles peuvent rejeter les sujets incorrigibles, à la condition toutefois d'avertir préalablement l'Evèque, d'attendre sa décision, et de restituer à la personne renvoyée tout ce qu'elles en avaient reçu. Ce fait d'ailleurs ne s'est jamais produit jusqu'à ce jour. Tout le reste de leurs observances n'offre absolument rien à signaler. j'ai proposé tout ceci parce que, si, tout en maintenant ces diverses prescriptions, le Souverain Pontife voulait qu'elles se constituassent en Ordre religieux, je réaliserais facilement son désir en les soumet- tant à la Règle de saint Augustin et en les réduisant à la clôture selon l'esprit du Concile de Trente. Que du moins Sa Sainteté, qui a la charge de tous et doit se faire tout à tous, daigne leur accorder des Indulgences et en enrichir leur église ; qu'Elle daigne les encourager à progresser dans la piété par sa paternelle et Apostolique Bénédiction ; car la plupart de ces femmes et de ces vierges sont de haute noblesse et issues de parents (s) qma — fcum nobilissimas sint omnes propemodum istius Congregationis Oblatae, illustribusque locis ortae et tanta pietate praedit2e.,.J  254 Lettres de saint François de Sales ortarum et tota illa Congregatio etiam hsereticis sit in honore, dum illius pietas omnem etiam pietatis inimi- corum (0 pervicaciam superet. (^)  Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Collonge, aumônier de la Visitation de Chambéry.  illustres, et cette Congrégation tout entière est respectée des héré- tiques eux-mêmes, tant sa piété sait triompher de l'obstination des ennemis même de la piété.  (t) inimicoriim — fcalumniasJ (u) [La suite manque.]  MCCXX A M. MELCHIOR DE CORNILLON, SON BEAU-FRERE (0 « La plus favorable condition » que nous puissions attendre de la mort. — Remercier Dieu quand il nous laisse ceux que nous aimons; acquiescer à sa volonté lorsqu'il nous les ôte. Annecy, \} juillet i6i6. Monsieur mon cher Frère, La longueur du tems que monsieur vostre père a vescu (2) et les dernières langueurs qui vous ont, il y a quelque tems, annoncé son trespas et menacé de son absence future, vous auront donné sujet de vous résoudre en la perte du bonheur que vous avies de le sentir encor ( I ) D'après les particularités du texte, on peut en toute sûreté indiquer pour destinataire le fils de Raymond-Charles de Cornillon et de Philiberte de Thoyre, Melchior, seigneur de Meyrens. De Hauteville (La Mnison naturelle de St Fr. de Sales, 1669, F* Partie, p. 224) raconte à la suite de quelle chevaleresque aventure il était devenu, en 1595, l'époux de la jeune Gasparde de Sales, sœur du saint Evéque de Genève. Il survécut à sa femme, et, « pour le grand respect qu'il portoit à sa chère défunte, >» il ne voulut jamais se remarier. Lui- même descendit dans la tombe le 29 octobre 1641. (2) Raymond-Charles de Cornillon 'voir tome XIV, note (3), p. 36^] devait avoir environ quatre-vingts ans.  Année i6i6  255  en ce monde ; car en somme, puisque nul n'est exempt de la mort, la plus favorable condition que nous puissions avoir d'elle, c'est quand elle nous laisse longuement jouir de ceux a qui nous appartenons. Il faut donq louer Dieu et le bénir de la faveur qu'il vous a faite de vous avoir longuement maintenu ce père, et acquiescer a la volonté par laquelle il vous l'a osté maintenant. Pour moy, je ne veux point icy user des ter- mes ordinaires avec vous ; le lien qui me tient attaché a vostre amitié et service vous servira de gage et d'asseu- rance que je rendray bien mon devoir a prier pour le defunct et honnorer sa mémoire, et, quant au reste, je suis, Monsieur mon Frère, Vostre plus humble frère et fidelle serviteur, Francs E. de Genève. Le 13 juillet 16 16, Annessi.  MCCXXI A M. CLAUDE FEYDEAU DOYEN DE NOTRE-DAME DE MOULINS (O Remerciements à un protecteur du futur monastère de la Visitation de Moulins, auteur de « belles oraysons. » Annecy, 17 juillet 1616. Monsieur, Ces bonnes Seurs de la Visitation qui iront la com- mencer une nouvelle Congrégation, ne pourront qu'estre (i) « Mon fils Claude Feydeau nasquit le jeudy, 20""= jour de mars, Tan 1559, vers onze heures du soir. » C'est ainsi que Jean Feydeau, seigneur de Cluzor, lieutenant particulier au Présidial de Moulins, libelle la naissance du seigneur des Espineaux, que lui avait donné sa femme, Catherine de la Croix. Claude ayant embrassé l'état ecclésiastique, fut reçu docteur en droit canonique à la Faculté de Paris, Il n'était encore ni chanoine ni prêtre, quand, les premiers jours de juin 1593, il fut nommé doyen de la Collégiale de Moulins. Cette élection irrégulière suscita des oppositions ; le ro avril 1596,  ^^6 Lettres de saint François de Sales grandement consolées, puisque vous les protegeres au nom de Monseigneur TArchevesque de Lyon, par l'au- thorité episcopale ; et loue Dieu de TafFection que vous tesmoignes a ce bon œuvre, duquel j'espère que vous aures contentement (0.  M. Feydeau dut céder sa place à Rémy de Beauvais, qui cependant la lui rendit le lo mars 1608. Déjà, il possédait la dignité de théologal et grand pénitencier de la cathédrale de Bourges, Son mérite et sa capacité l'avaient élevé aux honneurs; pendant trente-deux ans le digne doyen soutint sa répu- tation et força l'estime de tous ses contemporains, car « il n'avait pas seule- ment la science du prêtre, il en possédait les vertus et en pratiquait avec rigidité tous les devoirs. »> (Ancien Bourbotinais, Moulins, Desrosiers, 1837, tome II, p. 281.) On verra dans les notes suivantes la part que M. Feydeau prit à la fondation du monastère de la Visitation de Moulins, et les intimes rapports qu'il eut avec les Filles de saint François de Sales. En 1640, le 19 mai, il résigna son décanat en faveur de Louis Feydeau, son parent, et mourut le 27 mai 1643. (D'après les Notes de M. Francis Pérot, de Moulins, membre de plusieurs Sociétés savantes.) (i) A cette date du 17 juillet, la fondation de la Visitation à Moulins était déjà un fait accompli, bien que les Sœurs fondatrices fussent encore à Annecy. L'entreprenante M'"^ des Gouffiers, à elle seule, avait tout organisé, tout conclu. Au mois de janvier, elle avait quitté Lyon pour aller terminer défi- nitivement l'affaire de sa rupture avec le Paraclet, et revenir ensuite se ranger sous les lois du nouvel Institut. Une recrudescence extraordinaire de l'hiver la retint à Moulins. Elle songea bientôt à utiliser son séjour dans cette ville, et « comme elle n'avoit au cœur que nostre Bienheureux Père et sa chère petite et humble Congrégation, » elle ne cessait d'en entretenir son hôtesse, une dame veuve de grande vertu. Peu à peu l'idée d'un établissement des Filles de l'Evèque de Genève germa dans les esprits; « quantité de dames et damoiselles s'assembloit journellement pour ouïr » M™<^ des Gouffiers qui, avec sa grande puissance de persuasion, gagnait toutes les volontés et triom- phait de toutes les incertitudes. Au mois de mars, cette hardie initiatrice annonce à Annecy ses négociations nouvelles. Elles y causèrent une très médiocre joie ; la Mère de Chantai déclarait, le 3 avril, qu'en vérité on ne pouvait « donner des Filles pour faire des Maisons. » Cependant, le 14, elle confiait à la Mère Favre qu'on ne refusait pas « tout à plat d'aller à Moulins, » et faisait envoyer une copie des Règles à M'"= des Gouffiers. Ce fut pour celle-ci comme une acceptation officielle de la fondation. Elle ne se mit plus en souci de communiquer avec la Savoie, et, pendant quatre mois, garda le silence; si bien que la Mère de Chantai la crut à Paris, « à la pour- suite de son affaire. » Apprenant toutefois, par des voies indirectes, sa persis- tance à travailler au projet de Moulins, la Fondatrice s'en désole : « J'admire ma Sœur de Gouffier, » écrit-elle le 6 juin, « elle perd son temps... Oui, elle perd son temps. » L'intrépide femme était bien loin de le perdre; encore un mois, et elle allait toucher au but de ses désirs. Aidée de son frère, le baron d'Anlezy, des PP. Capucins et Jésuites, et surtout du Recteur, le P. Aignan Moreau. elle avait obtenu l'approbation des principaux de la ville, du maré- chal de Saint-Géran. gouverneur de la province, et de l'Archevêque de Lyon,  Année 1616 257 Cependant je vous rens grâces des belles oraysons que vous m'aves communiquées, et du tiltre des beaux livres que vous aves ornés de vostre labeur (0, lesquelz je m'essayeray de voir, et, en correspondant a vostre dilection, tesmoigner, si jamais j'en ay le pouvoir, que je suis, Monsieur, (2) A Monsieur Monsieur Feydeau, Docteur en Tiieologie, Doyen de N. Dame de Moulins. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Orléans. administrateur du diocèse d'Autun par droit de régale. Forte de toutes ces permissions, M.*"^ des Gouffiiers prépare une chapelle dans la maison qu'elle venait d'acheter et l'orne de son mieux. Le samedi, 25 juin, le modeste oratoire se remplit de la plus noble assemblée. Le Chapitre de Notre-Dame s'y était rendu processionnellement, ainsi que tous les Corps réguliers; le gouverneur et sa famille, le maire et les échevins, le baron d'Anlezy et un grand nombre de seigneurs les y avaient suivis. M. Claude Feydeau, doyen de la Collégiale, délégué par Ms"" de Marquemont, « donna la bénédiction episcopale suivant le pouvoir qu'il en avoit reçu, célébra la Messe et fit un discours très pathétique sur le sujet de la cérémonie, » qui se termina par le chant du le Deutn. La fondation était faite; il ne restait plus qu"à obtenir des fondatrices. M»"" de Marquemont, de passage à Moulins le 4 juillet, écrivit à l'Evéque de Genève pour les demander, ainsi que le maréchal de Saint-Géran et les échevins de la ville. (Voir ces lettres à l'Appendice I.) On peut juger de la surprise de François de Sales et de sa digne coopératrice, la Mère de Chantai ! Mais il n'y avait plus moyen de reculer. « Certes, » écrit la Sainte à M"^ des Gouffiers le 17 juillet, « si la gloire de Dieu et votre réputation n'eussent été fort mêlées en cette occasion, nous n'eussions nullement fait » ce « coup. » Quelques jours après, la Mère de Bréchard, à la tête d'une petite et courageuse troupe, partait d'Annecy. (D'après l'Histoire de Li Fondation et les Lettres de S'^ J.-F. de Chantai, vol. I.) ( I ) Le doyen de Moulins avait sans doute envoyé à l'Evêque de Genève son Oraison funèbre de Claude Duret, président du Présidial de Moulins, et son Panégyrique sur la paraphrase des CL Pseaumes de David, par Antoine de Laval, sieur de Bel-Air. Ces deux ouvrages réunis furent imprimés pour la première fois en 1608, et réimprimés en 1619. Un des « beaux livres » mentionnés par le Saint pourrait être le savant Thresor des langues^ de Claude Duret, publié après sa mort, en 1613 ; la pré- face, datée du 2 mars 1612, est de Claude Feydeau. (2) Dans l'Autographe, ont été coupées signature et date ; mais cette der- nière est indiquée par VHistoire de la Fondatiuyi du Monastère de Moulins.  258 Lettres de saint François de Sales  MCCXXII AU MÊME (fragment) Le Saint recommande ses Filles au délégué de rArchevêque de Lyon. Annecy, vers le 22 juillet (i) 1616. Puisque Monseigneur de Lyon vous a establi son vicaire pour l'establissement et le progrès de la Congré- gation de la Visitation de Moulins, c'est donq a vous, Monsieur, que j'addresse ces quatre lignes, affin que sous vostre authorité spirituelle ( = ), elles servent a ce dessein Dieu, qui, comme je Tespere, bénira leur bonne volonté et leur désir Revu sur le texte inséré dans les Annales de la Visitation de Moulins, conservées au Monastère de Nevers. ( I ) La date approximative de ce fragment s'appuie sur celle du départ des fondatrices de la Visitation de Moulins, porteuses de la lettre. (Voir note (i) de la lettre suivante.) (2) M. Feydeau devint en effet Père spirituel de la nouvelle Communauté ; jusqu'en 1633, il figure avec ce titre dans le Livre du Couvent et le Livre du Chapitre de l'ancien Monastère.  MCCXXIII a la mère de bréghard supérieure de la visitation de moulins Un service apostolique. — Quand est bonne la défiance de soi ; quand redou- table. — Dieu ne laisse jamais succomber ceux qui se confient en lui. — Accord de l'humilité, de l'obéissance et de la simplicité. — Avantages des infirmités corporelles. — Quelle est la plus rare vertu. — Sur quoi doit se fonder la charité envers le prochain. — Bénédiction paternelle. Annecy. 22 juillet (i) 1616. Le service que vous ailes rendre a Nostre Seigneur et a sa très glorieuse Mère, est apostolique ; car vous ailes (i) Les fondatrices du monastère de Moulins, raconte la Mère de Chaugy (Hist. de la Fondation), '< allèrent prandre la bénédiction de nostre Bienheu- reux Père avant que partir. Ce sainct et débonnaire Prélat leur donna a  Annéh i6i6  259  assembler, ma très chère Fille, plusieurs âmes en une Congrégation, pour les conduire, comme une nouvelle bande, a la guerre spirituelle contre le monde, le diable et la chair, en faveur de la gloire de Dieu ; ou plustost, vous ailes former un nouvel essaim d'abeilles qui, en une nouvelle ruche, fera le mesnage du divin amour, plus délicieux que le miel *. Or, ailes donq toute courageuse, en une parfaite con- fiance en la bonté de Celuy qui vous appelle a cette sainte besoigne. Quand est ce qu'aucun espéra en Dieu et qu'il /w/ confus *? La desfiance que vous aves de vous mesme est bonne tandis qu'elle servira de fondement a la confiance que vous deves avoir en Dieu ; mais si jamais elle vous portoit a quelque descouragement, in- quiétude, chagrin et melancholie, je vous conjure de la rejetter comme la tentation des tentations ; et ne per- mettes jamais a vostre esprit de disputer et répliquer en faveur de l'inquiétude ou de Tabbattement de cœur auquel vous vous sentires penchée, car cette simple vérité est toute certaine : que Dieu permet arriver beaucoup de difficultés a ceux qui entreprennent son service, mays jamais pourtant il ne les laisse tomber sous le faix tandis qu'ilz se confient en luy. C'est, en un mot, le grand mot de vostre affaire, de ne jamais employer vostre esprit pour disputer en faveur de la tentation du descourage- ment, sous quel prétexte que ce soit, non pas mesme quand ce seroit sous le spécieux prétexte de l'humilité. L'humilité, ma très chère Paille, fait refus des charges, mais elle n'opiniastre pas le refus ; et estant employée par ceux qui ont le pouvoir, elle ne discourt plus sur son indignité quant a cela, ains croit tout, espère tout,  * Psalm. XVIII, 1 1 Eccli., XXIV, 27.  * Eccli., II, II ; cf. Ps. XXXI. i.et alibi.  chacune un papier ou il avoit escrit quelque dévote instruction selon leur particulier besoin. » Les quatre lettres qui suivent sont les précieux avis confiés à la Mère de Bréchard et à ses compagnes, les Sœurs Françoise-Ga- brielle Bailly, Marie-Avoye Hunibert et Jeanne-Marie de la Croix. Elles sortirent d'Annecy le 22 juillet, selon le témoignage du Saint, qui écrit quelques jours après (voir p. 267) : « Les Seurs partirent vandredi; » or, le vendredi tombait le 22, Il est vrai que la profession de la Sœur de la Croix, qui se fit le jour du départ, est datée au Livre du Couvent du 24; mais ce quantième, il est facile de s'en convaincre, a été ajouté après coup, et peut n'être exact qu'à deux jours près.  200 Lettres de saint François de Sales I Cor., XIII, 7. supporte tout Siveclci charité*; elle est tous-jours simple. La sainte humilité est grande partisane de Tobeissance, et comme elle n'ose jamais penser de pouvoir chose quel- comque, elle pense aussi tous-jours que l'obéissance peut tout ; et comme la vraye simplicité refuse humblement les charges, la vraye humilité les exerce simplement. Vostre cors est imbecille, mays la charité, qui est la Matt., XXII, II. robbe nuptiale^ ^ couvrira tout cela. Une personne imbe- cille excite a un saint support tous ceux qui la connoissent et donne mesme une tendreté de dilection particulière, pourveu qu'elle tesmoigne de porter dévotement et amia- blement sa croix. Il faut estre également franche a prendre et demander les remèdes, comme douce et cou- rageuse a supporter le mal. Qui peut conserver la dou- ceur emmi les douleurs et alangourissemens, et la paix entre le tracas et multiplicité des affaires, il est presque parfait ; et bien qu'il se treuve peu de gens, es Religions mesmes, qui ayent atteint a ce degré de bonheur, si est ce qu'il y en a pourtant et y en a eu en tout tems, et faut aspirer a ce haut point. Chacun presque a de l'aysance a garder certaines vertus et de la difficulté a garder les autres, et chacun dispute pour la vertu qu'il observe aysement et tasche d'exagérer les difficultés des vertus qui luy sont malaysees. Il y avoit dix vierges, et n'y en avoit que cinq qui eussent ibid., XXV, I, 4. l'huyle * de la douceur miséricordieuse et debonnaireté. Cette égalité d'humeur, cette douceur et suavité de cœur est plus rare que la parfaite chasteté, mais elle n'en est que plus désirable. Je la vous recommande, ma très chère Fille, parce qu'a icelle, comme a l'huyle de la lampe, tient la flamme du bon exemple, n'y ayant rien qui édifie tant que la charitable debonnaireté. Tenes bien la balance droitte entre vos filles, a ce que les dons naturelz ne vous facent point distribuer ini- quement vos affections et bons offices. Combien y a-il de personnes maussades extérieurement, qui sont très aggreables aux yeux de Dieu! La beauté, la bonne grâce, le bien parler donnent souvent des grans attraitz aux personnes qui vivent encor selon leurs inclinations; la  Annhh 1616 ^^* charité regarde la vraye venu et la beaulc cordiale, et se respand sur tous sans particularité. iues donq, ma chère Fille, a lœuvre pour laquelle Allés uo. H, dextre, affin que Dieu vous a esleue. H sera a vos . ^^^ p^^ ^^,  n PU vous a esieue. j.i =>=>'" " . j 1 .„ ^Je difficulté ne vous esbranle * ; il v- tiendra de ^ main, affin que vous suivies sa voye *. ^yes eu en -r vant le prochain, en vous humiliant jusques dans vostre néant en vous relevant jusques dedans vostre Tout et oTeu so" uniquement vostre tout, ma très chère Fille. '^'^^"- Francs E. de Genève.  MCCXXIV . ... SOBUR BMLUV, RELIGIEUSE DE LA V1S,T..T,0N (O (niÉDITE"» Bonheur, qualués et vertus d'une fondatrice dune Maison religieuse. Annecy, 22 juillet 1616. Vous estes bien heureuse, certes, daller servir a la fondation d'une nouvelle Congrégation de servantes de ( Apt.s avoir et. pendant on. ans un n,ode. de r;f^^;:::X:XT. vilux père infirme. M- BaiUy s'etau re ■ " d,-,' , v '.tation d'Annecy, où S-associan. ensuite à M- f -""7'/;' /.t ,1 „n,e orécédent, note (,,, toutes deux prirent l'hab.t le , )-"^' /^'^ (^"'J.J^ff;, i; , ,„,t .6,,, Sœur î;;:i."S,;,r. ;: =."-"=•';. :=:;;: ;;"•;-  LXXII, 2.|,  Act., IX, 31  202 Lettres de saint François de Sales Dieu, car c'est un office angelique. Contribues y donq de bon cœur vostre personne et tout ce qui en dépend ; joignes l'humilité a la sainte confiance et allégresse d'esprit, vous resouvenant qu'en l'ancienne Loy on rece- voit au Tabernacle l'offrande de ceux qui, n'ayans autre Exod., XXXV, 26. chose, presentoj^ent de bon cœur des poilz de chèvre * Ibid., XXXVI, 14. pour faire le cilice duquel le Tabernacle estoit couvert *. Ailes joyeusement donq, et, telle que vous estes, offres- vous humblement a ce saint service de Nostre Seigneur. Aymés perseveramment vostre propre abjection ; ché- risses le mespris et caresses les croix que Dieu peut estre permettra vous arriver. Tenes vous ferme en la sainte douceur, et Dieu vous bénisse a jamais, ma très chère Fille, comme en son nom je vous bénis. Amen, ainsy soit il. FRANÇ^ E. de Genève. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Rome. encore plus nécessaires à Bourges, où les Fondateurs l'envoyèrent en mars 1619 pour seconder dans l'administration du temporel la Mère Anne-Marie Rosset, En 1622, elle succéda dans la charge de Supérieure à cette vertueuse Mère, et, pendant six ans, fit la joie et l'édification de sa Communauté au milieu d'un dénuement total de secours pécuniaires, h Quel bonheur de pou- voir être martyres de la sainte pauvreté ! » lui écrivait la Mère de Chantai en apprenant la détresse extrême du Monastère de Bourges. (Lettres, vol. II, p. 208.) Quelques années après sa déposition, le 21 mars 1634, elle allait rece- voir la récompense d'une vie de souffrances et de vertus. Cette sainte Reli- gieuse mérite d'être mentionnée parmi les premières de l'Institut qui ouvrirent la voie à la dévotion au Sacré-Cœur ; elle reçut de Dieu, assurait sainte Jeanne- Françoise, des grâces semblables à celles qui furent départies à sainte Cathe- rine de Gênes. (Voir sa biographie par la Mère de Chaugy, dans Les Vies de VII Religieuses de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie, Annessy, Jacques Clerc, 1659.)  Année 1616 363 MCCXXV A LA SOEUR HUMBERT, RELIGIEUSE DE LA VISITATION ( Assurance et remède contre les tentations. — Ne pas s'affliger de ce qui ne peut séparer de Notre-Seigneur. — Souhaits et bénédictions. Annecy, 22 juillet 1616. A ma très chère Fille, ma Seur Marie Avoye Humbert. Ne vous troubles nullement pour ces imaginations et pensées estranges ou terribles qui vous arrivent, car, selon la véritable connoissance que j'ay de vostre cœur, je vous asseure devant Nostre Seigneur que vous n'en pouves encourir aucun péché. Et pour vous affermir en cette créance, a la fin de vostre exercice du matin, des- advoués par une courte et simple aversion toutes sortes de pensées qui sont contraires a l'amour céleste, comme disant : Je renonce a toutes cogitations qui ne sont pas pour vous, o mon Dieu; je les desadvoue et rejette a jamais. Puys, Ihors qu'elles vous attaquerons (sic), vous n'aures rien a dire, sinon par fois : O Seigneur, je les ay rejettees, vous le sçaves. Quelquefois, vous bayseres vostre croix, ou feres quelqu'autre signe que vous con- firmes vostre desaveu. Et ne vous fasches point, ne vous tormentes point, puisque tout cela non seulement ne vous sépare point de Nostre Seigneur, mais vous donne sujet de vous unir de plus en plus a sa miséricorde. Ailes donq doucement et suavement en paix, servir Dieu et Nostre Dame ou vous estes appellee par leur volonté, et la grâce et consolation de son Saint Esprit soit a jamais avec vous *. Amen. (-) iv, uit. (i) Soeur Marie-Avoye (Hedwige) Humbert, douzième Religieuse de l'Ins- titut (voir le tome précédent, notes (2), p. 6r, et ( i ), (2), p. 62), fut un si fidèle miroir d'observance, que la Mère de Chantai « avoit acoutumé de dire que si nos Reigles et Coutumes estoient perdues, on les referoit facilement en » considérant '< sa conduitte. » (Livre du Couvent, du i*"" Monastère d'Annecy.) Elle persévéra toute sa vie dans cette exactitude., malgré des épreuves inté- rieures très pénibles, et mourut le 22 décembre 1637, au monastère de Moulins qu'elle n'avait pas quitté depuis 1616. (2) La signature a été coupée.  Act., IX, 31 ; Col.  264 Lettres de saint François de Sales Ma très chère Fille, vives en Dieu doucement et sim- plement, avec un continuel amour de vostre propre abjection, et un grand courage a servir Celuy qui, pour vous sauver, est mort en la -f-. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Nevers.  MCCXXVI A LA SOEUR DE LA CROIX. RELIGIEUSE DE LA VISITATION (0 Pourquoi la destinataire a été choisie pour une fondation, malgré sa jeunesse. Annecy, 22 juillet 1616. Vive Jésus ! Vous estes employée bien jeune a de grandes œuvres : cela vous doit faire humilier profondement, et vous faire résoudre a fidellement obéir aux Règles et a vostre Supé- rieure ; car c'est pour [ce] service qu'on vous a choisie, affin que, comme d'autres serviront de bon exemple aux filles plus avancées en aage qui se rangeront a la Congré- gation, vous servies aussi de patron aux plus jeunes; ce qui est extrêmement important, car Dieu ayme très parti- culièrement les prémices des années et désire qu'elles luy Cf. Eccii., VI, 18; soyent consacrées *. Ailes donq bien sagement, ma chère Fille; faites que vostre humilité, obéissance, douceur et ( I ) Fille de Jacques de Vincent de la Croix et de Blanche-Diane de Valence de Gruffy (voir le tome précédent, note { i ), p. 271, et notes ( i ), (2), p. 272), et spécialement chère à son saint parent François de Sales, Sœur Jeanne-Marie de la Croix n'avait que seize ans quand elle suivit la Mère de Bréchard à Moulins. Elle coopéra en 1619 et 1626 aux fondations des deux monastères de Paris, et revint en 1635 à Annecy pour servir à l'établissement de la seconde Maison de cette ville, où elle décéda le 3 novembre 1668. La Sœur de la Croix « a porté, » dit le Livre du Couvent (Archives de la Visitation d'Annecy), « les principalles charges... avec un esprit religieusement régulier,... se tenant au pied de la lettre de toutes » les « saintes observances. » (Voir sa Vie dans X" Année Sainte, tome XI, p. i^T.)  Apoc, XIV, 4.  Année 1616 265 modestie serve de miroir aux jeunes et de consolation aux autres. Dieu soit a jamais avec vous et vous veuille bénir de sa dextre. Amen. Vive Jésus! FRANÇ^ E. de Genève, A ma très chère Fille, Ma Seur Jeanne Marie de la Croix, ma Nièce.  MCCXXVII AU CHANOINE ROLAND VIOT PRÉVÔT DE l'hospice DU GRAND-SAINT-BERNARD (O Un accommodement dont le Saint espère bientôt la conclusion. Annecy, 23 juillet 1616. Monsieur, Encor qu'en l'assemblée que nous avons tenue main- tenant, le différent que nous avons n'ayt pas esté du tout terminé, si est ce toutefois que l'accommodement en a esté tellement acheminé, qu'il sera aysé, au premier ren- contre, de le parachever (2), ainsy que monsieur Pergod(3) et le sieur Enpio (4) vous en feront plus amplement le (i) L'hospice du Mont-Joux, ou Grand-Saint-Bernard, était desservi par des Chanoines réguliers, dont le prévôt résidait habituellement au prieuré de Saint-Jacques ou Jaqueme (diocèse d'Aoste). Roland Viot avait d'abord été coadjuteur d'André de Tillier (8 novembre 1604); il fut son successeur en 161 1 et garda la charge jusqu'à sa mort, 16 août 1644. ( 2 ) On a vu déjà au tome XII, note ( i ), p. 376, l'origine du différend entre l'Evêque de Genève et le prévôt du Mont-Joux, à l'occasion de la cure des Allinges et de Mesinges. André de Tillier avait, en 1608, fait appel de la sentence de Claude de Granier qui annulait l'élection de Nicolas Perret, nommé curé par le prévôt. L'Archevêque de Tarentai§e, juge de l'affaire, donna raison aux Chanoines de Saint-Bernard; cette sentence ne fut pas acceptée par l'officia- lité diocésaine. En 1611. nouveau débat devant le Sénat de Savoie; enfin « l'accommodement » commencé dans l'assemblée du 25 juillet 1616, se termina le 21 mai 1618. La nomination au vicariat perpétuel de la paroisse des .Mlin- ges était laissée au prévôt du Mont-Joux, sauf examen et institution du can- didat par l'Evêque de Genève. (D'après les Mss. Besson.) (;) Noèl-Hugon Pergod (voir tome XIII, note ( i ), p. 197). (4) Claude Empioz ou Empiouz, nommé dans la transaction du 21 mai 1618. comme procureur du prévôt de Saint-Bernard et de Nicolas Perret, le prj tendant à la cure des Allinges.  266 Lettres de saint François de Sales récit. A quoy servira beaucoup le désir extrême que j'ay de vous honnorer et conserver vostre amitié, laquelle je vous supplie me départir continuellement, puisque, vous souhaitant toute sainte bénédiction, je veux estre toute ma vie, Monsieur, Vostre plus humble, très affectionné confrère et serviteur. Francs, E. de Genève. 23 juillet 16 16. A Monsieur Monsieur le Prévost de S* Bernard. Revu sur l'Autographe conservé à THospice du Grand-Saint-Bernard.  Mccxxviir A madame de la fléchére Troubles à Annecy. — Arrivée de Bonfils. — Nouvelles de la Visitation. Annecy, 24 ou 25 juillet 1616 (i). Ma très chère Fille, Je vous escris hors d'haleyne, allant dire la Messe solemnelle et prescher. Nous avons icy M. de Charmoysi et M. de Vallon, et sommes grandement embarassés de ces troubles i-). (i) Les détails donnés dans la note suivante précisent la date de ce billet à un jour près. La Messe solennelle et le sermon pouvaient avoir lieu le diman- che, 24, mais plus probablement encore le 25, fête de saint Jacques. (2) Trois compagnies françaises, commandées par Crémeaux de la Grange, colonel du duc de Nemours (voir le tome précédent, note (3). p. 234), se présentaient, le 22 juillet, « feu en main et basle en bouche, » aux portes d'Annecy, déjà occupé militairement par les troupes du duc de Savoie. Cette fois, le grand feudataire du Genevois était en révolte ouverte contre son sou- verain. Charles-Emmanuel, toujours menacé par les Espagnols, infracteurs du traité d'Asti, s'était mis en état de défense, et avait réclamé de son cousin les renforts promis depuis longtemps. Obéissant en apparence. Henri de Nemours leva une armée et fit partir d'abord le régiment de Poligny. Mais celui-ci reçut bientôt l'ordre de rebrousser chemin : le duc de Genevois cédait à ses vieilles rancunes (cf. ibid., note (i), p. 197; Lettre mxii, p. 257, et note (7), p. 269),  Année 1616 267 M. Bonfilz s'estoit retiré a Sessel auprès de Sa Gran- deur, mais il revint hier bien tard, et croy que c'est pour apporter quelque parole et s'entremettre a raccom- modement de ce mal heur (0. Les Seurs partirent vandredi (*), le reste se porte bien et la nièce triomphe (3), Dieu nous veuille donner l'esprit de son saint et pur amour. Amen. Je salue de tout mon cœur vostre chère compagne (4), et très humblement madame la Contesse et sa digne trouppe (5). Vive Jésus ! A Madame Madame de la Flechere. Revu sur l'Autographe appartenant à M*"^ la comtesse Balbo, à Turin. et, comptant sur l'argent et les troupes d'Espagne pour soustraire son apanage à la domination du duc de Savoie, passait du côté de l'étranger. La noblesse et le peuple ne furent point complices de sa trahison. Tandis que Louis de Sales battait les soldats de Poligny et les conduisait à Conflans, Annecy refu- sait le passage au colonel de la Grange et le forçait à se replier sur Annecy- le-Vieux. Pour apaiser son courroux, on lui envoya des présents, qu'il ne voulut pas accepter. Alors les svndics avisèrent à remédier « aux impostures qui pourroient avoir esté dictes » au prince de Nemours sur cette affaire et à prévenir sa vengeance; on députa M. Garin « pour luy reciter le tout au vray. » (Reg. des Délib. municip., 23 juillet.) Pendant ces jours de troubles, « le Bien-heureux François fust la seule espé- rance de ses pauvres enfans, » dit Charles-Auguste (Histoire^ etc., liv. VIII). Il refusa d'abandonner la ville, promit que « ceste levée de boucliers » s'éva- nouirait, et que « ces grands Princes » s'accorderaient « assez, le sang se » con- formant « au sang. » Prophétie qui se vérifia, comme nous le verrons dans la suite. ( I ) Le trésorier du duc de Nemours (voir ci-dessus, note ( 4 ), p. 194), député par son maître pour accommoder la Grange et la ville d'Annecy, réussit sans doute dans sa mission, car le capitaine français et ses troupes se retirèrent dès le 25 juillet. (2) Pour la fondation de Moulins. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 258.) (3) Gasparde d'Avisé, entrée depuis peu au noviciat de la Visitation. (Voir ibid., p. 230.) (4) M"'^ de Mieudry. (5) La comtesse de Tournon et ses filles : Claude-Françoise, veuve de Salomon de Murât de la Croix (voir le tome précédent, note ( i ), p. 78) ; Mar- guerite (voir ibid., note (5), p. 204); sans doute aussi Claire-Marie, dame Guillet de Monthoux (voir tome XV, note (2), p. 372, et ci-dessus, p. 64).  268 Lettres de saint François de Sales  MCCXXIX A LA MÊME Le prince héritier de la couronne de Savoie. — Deux visiteuses attendues au monastère d'Annecy, — Une heureuse novice. — Arrestation de Bonfils; souhaits du Saint pour le prisonnier. Annecy, 14 août 1616. Ma très chère Fille, Je vous escrivis des-ja l'autre jour la lettre ci jointe, mais Thomme qui accompaigna monsieur de Monthouz ( ^ ), qui m'avoit rendu la vostre, ne vint point prendre ma lettre, que je sache. Despuis, comme vous aves sceu. Monseigneur le Prince vint icy {-), a la bonté duquel je suis infiniment obligé, et avec tout le reste du païs je dois mille et mill'actions de grâces a la divine Provi- dence qui nous a donné un homme tant plein de vertu et de bénédictions pour dominer un jour entre nous. Il failloit que mon cœur rendit ce tesmoignage a celuy de ma très chère fille, de la consolation que j'ay de voir ce Prince tant rempli de la sainte crainte de Dieu. Vous pourres venir ic}^ a vostre gré (3), car nostre Mère (4) n'aura point de plus grand playsir que de vous voir, et ne croy pas quil y ayt aucun danger en chemin ; et ne faut non plus faire difficulté pour madamoyselle de Beaufort (5). Mays voyés vous, ma très chère Fille, (i) Probablement, Gabriel Guillet de Monthoux, marié à Claire-Marie de Maillard-Tournon (cf. ci-dessus, note (3), p. 64).. qui devait se rendre assez souvent à Rumilly, chez sa belle-mère. (2) Le prince de Piémont. Victor-Amédée, avait été envoyé par le Duc son père afin de rétablir l'ordre dans le Genevois, et de traiter avec Henri de Nemours. Arrivé à Chambéry le 11 août, il en repartit le 12 pour Annecy, dont les quatre députés le rencontrèrent près d'Alby. Il descendit d'abord chez TEvêque, et eut une longue conférence avec lui et ses deux frères. Louis et Janus de Sales. ( 3 ) A la Visitation. (4) La Mère de Chantai. (5) Née à Ugine avant 1593, Jeanne-Aimée était fille de Jean de Beaufort, coseigneur dHéry, de Cornillon et J.e Marihod, et d'Etiennette de Beaufort,  Année i6i6 269 vous sçaves bien cela, que la Visitation est toute vostre, et nostre Mère et toutes les Seurs, et a madamoyselle de Beaufort, ainsy que vous le jugeres a propos. La chère nièce (0 est si grandement consolée, que son ame est comme une petite pouponne aux mammelles de la douceur ca^leste. Je ne luy ay point parlé qu'une fois il y a trois semaines, mais je n'ay pas laissé de connoistre la bonté que Dieu exerce en elle. En somme, Dieu est bon, et bienheureux est le cœur qui Tayme. Le sieur Bonfilz a esté saysi ce soir passé, environ les onze heures, et mené prisonnier a Chamberi ou Miolans, par ordre de Monseigneur le Prince (-). On a quant et quant cacheté ses coffretz et son logis; cela rendra plus malaysé vostre payement (3). Je parleray a JMessieurs de la justice, pour voir ce qui se pourroit faire pour vostre payement. Ce bon homme ne me voyoit point, des il y a quelque tems, et avoit protesté a Sessel de ne me vouloir jamais aymer, sans quil eut ni rayson ni sujet quelcomque de faire telle déclaration ; c'est pourquoy, quoy que diverses fois il fut venu icy, je n'avois pas eu moyen de luy parler de vostre affaire. Hier seulement, en passant, il me salua et moy luy. Helas, ma très chère Fille, Dieu sçait si je luy souhaite les biens infinis de la paiXj consolation et grâce du Saint Esprit *. ^A'rt., ix. :;i: cf. Mays a vous, ma très chère Fille, cela ne se peut dire dame de Salagine. Héritière des seigneuries de Salagine, de la Villette, de Pierrecharve, etc., et de la maison-forte de Beaufort à Rumilly, elle les porta en dot à François de Longecombe, qu'elle épousa le 3 novembre 1622. Nous aurons à raconter plus tard la part active que le bienveillant Evêque de Genève prit à la conclusion de ce mariage qu'il bénit lui-même. Jeanne-Aimée teste le 26 mai 1641; elle veut être enterrée dans la chapelle des Beaufort, en réglise de Rumilly, et fait divers legs à la Visitation de cette ville, dont elle entend être l'une des fondatrices, à la charge de faire mettre les armoiries des Beaufort sur le portail de l'église du monastère, (i) Gasparde d'Avisé. (2) Horace Bonfils, trésorier et favori du duc de Nemours (voir ci-dessus, note (4), p. 194), allait et venait de Seyssel à Annecy, servant d'intermédiaire entre son maître et la ville fidèle au duc de Savoie. Victor-Amédée jugea opportun d'arrêter ce suspect personnage, ainsi que le procureur fiscal Bar- felly. Après le traité de paix entre Charles-Emmanuel et Henri de Nemours (14 novembre 1616), Bonfils fut relâché. (3) Voir ci-dessus, pp. 169, 170. et note (3), p. 196.  Galat., V,  270 Lettres de saint François de Sales combien mon ame en souhaite, et a nostre chère seur de Mieudri (0. Annessi, le xiiii aoust 1616. Je salue très humblement madame la Comtesse et mes- dames ses filles et les miennes i-\ car il faut dire ainsy. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. (1) Gasparde de Cerisier, dame de Mieudry. (2) La comtesse de Tournon et ses filles (voir ci-dessus, note (5), p. 267).  MCCXXX A LA MÈRE DE CHANTAL Oraison du Saint la veille de l'Assomption. — Marie, morte d'amour, nous fasse vivre en l'amour! — Glorieuse date de la naissance de François de Sales. — Le rameau de la colombe au milieu du déluge, Annecy, 13 août 1616 (i). Ma très chère Mère, Je considerois au soir, selon la foiblesse de mes yeux, cette Reyne mourante d'un dernier accès d'une fièvre plus suave que toute santé, qui est la fièvre d'amour, laquelle, desséchant son cœur, en fin l'enflamme, l'em- brase et le consomme, de sorte qu'il exhale son saint esprit, lequel s'en va droit entre les mains de son Filz. Ah ! veuille cette Sainte Vierge nous faire vivre, par ses prières, en ce saint amour ! Qu'il soit a jamais le très unique objet de nostre cœur ; que puisse nostre unité * aà De°D^^ 1^^^^° rendre a jamais gloire a l'amour divin, qui porte le sacré c.iv. Cf. Tr. (Je /'Am. nom d'(( uuissaut *. » de Dieu, 1. I, c. IX -_ , . , (tom.iv, p. 55). Je n ay pas une si heureuse naissance, ma très chère (i) Cette lettre fut écrite une année où le 21 août, anniversaire de la nais- sance de François de Sales, tombait un dimanche. Depuis l'établissement de la Visitation, cette particularité se rencontre en t6ii, 1616, 1622. Si l'appel- lation de « Mère » fait exclure la première date, l'absence de tout détail rend le choix difficile entre les deux dernières; cependant, le ton de ces lignes indique, semble-t-il, que les Fondateurs n'étaient pas éloignés l'un de l'autre : voilà pourquoi nous adoptons 1616, la Sainte se trouvant à Paris en 1622.  Année 1616 271 Mère, que d'avoir paru en ce monde au jour auquel la très sainte Vierge nostre Reyne parut au Ciel En son beau vestement de drap d'or recamé. Et d' ouvra grès divers a Vesgiiille semé *, ' Ps. xliv, 10. (Ver- sion de des Portes; ainsy que nous dirons Dimanche, jour auquel je nasquis, 7J*!'"^°"^,;^\^^'"°^' avec cette gloire que c'a esté entre les octaves de cette grande Assomption (0. Ah Dieu! ma très chère Mère, que je veux approfondir creusement nostre cœur devant cette Dame eslevee, affin qu'il luy playse le remplir de cette surabondante rosée d'Hermon *, qui distille de * Ps. cxxxn, 3. toutes parts de sa sainte plénitude de grâces. Oh, quelle perfection toute souveraine de cette colom- be *, au prix de laquelle nous sommes des corbeaux ! * Cant., vi, 8. Helas ! parmi le déluge de nos misères, j'ay souhaitté qu'elle treuvast le rameau de l'olive * du saint amour, * Gen., vm, 10, n. de la pureté, de la douceur, de Torayson, pour le rap- porter en signe de paix a son cher Colombeau, a son Noé. Vive Jésus, vive Marie, le support de ma vie ! Amen. Franç% E. de Genève. (i) François de Sales naquit le 21 août 1567, un jeudi, entre neuf et dix heures du soir.  MCCXXXI AU DUC ROGER DE BELLEGARDE L'amour parfait exclut les défiances. — La « coustume des pères. » — Un livre qui suppléera à la rareté des lettres. — Eloge du prince de Piémont. Annecy, 15 août 1616. Il ne faut jamais, certes. Monsieur, puisque j'ay Ihon- neur que vous soyes mon très cher filz, il ne faut point faire d'excuses quand vous ne m'escrives pas ; car je ne puis non plus douter de vostre amour filial envers moy, que je ne puis vivre sans sentir continuellement dedans mon cœur les eslans de l'amour paternel envers vous. Les défiances n'ont point de lieu ou l'amour est parfait.  272  Lettres de saint François de Sales  Mays il est vray toutefois, Monsieur mon Filz, que vos lettres m'apportent tous-jours une délectation extrême, y voyant, ou du moins entrevoyant, les traitz de vostre bonté naturelle et de la sainte charité de vostre ame, qui produit et nourrit la douceur de vostre dilection filiale que vous respandes sur mo}^ et qui me remplit de suavité. Faites donq, Monsieur mon Filz, faites souvent, je vous supplie, cette grâce a mon esprit, mais seulement pour- tant, quand vous pourrés bonnement sans vous incommo- der; car, quoy que vos lettres me soyent plus délicieuses que je ne puis dire, si elles vous coustoyent de l'incom- modité elles me seroyent douloureuses, aymant plus vostre playsir que le mien, selon la coustume des pères. Et moy ce pendant, Monsieur mon très cher Filz, afïin de suppléer en quelque sorte les defautz que le manque- ment de commodités me pourroyent (sic) faire faire de vous escrire souvent, je vous envoyé le livre de V Amour de Dieu que j'ay n'a guère exposé aux yeux du monde (0 ; et vous supplie que si quelquefois Tafifection que vous aves pour moy, vous donnoyt quelque désir d'avoir de mes lettres, vous prenies ce Traitté et en lisies un cha- pitre, vous imaginant que s'il y a point de Theotime au monde auquel s'addresse (sic) mes paroles, vous estes celuy entre tous les hommes, qui estes mon plus cher Theotime. Le libraire a laissé couler plusieurs fautes en cet œuvre, et moy aussi plusieurs imperfections ( 2) ; mays sil se treuve des besoignes parfaites en ce monde, elles ne doivent pas estre cherchées en ma boutique. Si vous lises celle ci de suite, elle vous sera plus aggreable a la fin . Nous avons icy despuis trois jours Monseigneur le Prince de Piemond, qui me fit Ihonneur de venir descen- dre chez moy tout a Timprouveu, estant venu par les postes, luy septiesme ; despuys, il a esté logé au chas- teau (3). C'est le plus doux, gracieux et dévot Prince (i) Il avait été achevé d'imprimer le 31 juillet. (2) Voir ci-dessus, Lettre mccxviii, p. 234. (3) Au château des ducs de Nemours. Le prince n'avait logé chez le Saint Evéque qu'un ou deux jours. (Voir ci-dessus, note (2). p. 268.)  Année 1616 273 qu'on puisse voir ; un cœur plein de courage et de justice, une cervelle pleine de jugement et d'esprit, un'ame qui ne respire que le bien et la vertu, l'amour de son peuple et sur tout la crainte de Dieu. Vous sçaures, je m'asseure, avant la réception de la présente, les causes de sa venue ( ^ ). Reste, Monsieur mon très cher Filz très honnoré, que je vous souhaite toutes les bénédictions célestes; et c'est la respiration ordinaire de mon cœur, puisque j'ay la faveur et le bonheur d'estre advoûé vostre Père, et que je dois estre et suis a jamais, Vostre très humble, très dédié et très obéissant serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XV aoust 161 6, Annessi. Monsieur, c'est tout a la haste que j'escris, et je m'as- seure que de Lyon vous recevres un autre livre (-), selon l'ordre que j'en avois donné. O mon Dieu, que je me res-jouis de la grossesse de madame vostre seur (3), qu'on m'asseure. Revu sur l'Autographe qui se conservait à Evian, chez les Missionnaires de Saint-François de Sales. (i) Voir note (2), p. 268. Victor-Amédée pouvait, d'Annecy, surveiller mieux les mouvements des troupes du duc de Nemours et ses agissements avec la France, Il lui était plus facile aussi de préparer les voies à une ré- conciliation sur les terres mêmes du prince révolté. (2) Un autre exemplaire du Traitié de l'Amour de Dieu. (3) Catherine Chabot, femme de César-Auguste de Saint-Lary, baron de Termes, frère du duc de Bellegarde. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 130.) L'enfant attendu à cette date mourut jeune. En 1621, madame de Termes eut une fille, Marie-Anne, que son oncle Roger maria, avec dispense, au fils de sa soeur, Jean-Antoine de Pardaillan de Gondrin, marquis de Montespaa.  Lettres VII i8  1^4 Lettres de saint François de Sales  MCCXXXII AU PRINCE DE PIÉMONT VICTOR-AMÉDÉE Un dessein sur Genève. Annecy, 23 août 1616. Monseigneur, Vostre Altesse aura mémoire que je luy dis dans sa chambre (^ \ qu'il y avoit un homme lequel, des quelques années, avoit désiré de proposer quelque dessein pour Genève a Son Altesse (2). Maintenant donq il est revenu a moy, qui le rens porteur de cette lettre, affin que si Vostre Altesse le treuve a propos, elle Tescoute sur ce sujet ; car a cette seule intention je Tay renvoyé vers ( I ) Le prince de Piémont était au château d'Annecy. (Voir ci-dessus, note (2), p. 268). (2) Un an plus tard, le 5 août 1617, le président Favre écrivait à Victor- Amédée : « J'ay esté adverty par Monseigneur TEvesque de Genève... que certain gentilhomme bourguignon, nommé Delaborde, qui se présenta l'an passé a V. A. S. a Necy et fut par elle remis au sieur de la Tuille, va rodant par les environs de ce païs, s'estant laissé entendre a quelques uns qu'il avoit une entreprise sur Genève, ou, de fait, il a demeuré plus de quinze jours soubs prétexte de quelques affaires qu'il disoit y avoir, pendant lequel tems on dit qu'il a mesuré et compassé tous les fossés, bastillons et autres forte- resses de la ville, comme grand et excellent geometrien qu'il est, à ce qu'on dit. Mais ayant commencé d'estre découvert et soupçonné, il s'est sauvé n'y a pas plus de huit jours. » (Mugnier, Correspondance du Président Favre, tome II, publié par la Société savoisienne, etc., 1905.) En effet, à la date du 24 juin, le Conseil de Genève s'était ému de la présence de l'étranger dans ses murs : « Il résulte des informations prises sur le sieur de la Borde, » consigne-t-il dans ses Registres, « qu'il a sa maison auprès de Blois, est sei- gneur de trente mille livres de rente, papiste, versé aux mathématiques et entendu au fait des pétards; qu'il n'a jamais servi l'Espagne, mais qu'au contraire il a dépensé 20,000 écus pour lever un régiment dans l'armée des Princes, lequel s'est débandé ; qu'il veut en lever un autre pour le service de Savoie ; que si son dessein manque, il ira vers les Vénitiens, et que si cela lui manque aussi, il ira vers l'Empereur. Sur quoi, arrêté de lui signifier que son séjour ici a été assez long. » (Reg. du Conseil d'Etat de la Rép. de Genève.) Il est évident que le sieur de la Borde est le personnage que François de Sales présente, le 23 août 1616, au prince de Piémont.  Année i6i6 275 elle, a laquelle faysant très humblement la révérence, je suis, Monseigneur, Très humble et très obéissant orateur et serviteur. Franc", E. de Genève. 23 aoust 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCCXXXIII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l" L'avis du Saint sur un projet au sujet de Genève, — Témoignage en faveur de son auteur. Annecy, 29 août 1616. Monseigneur, Il y a deux ans que ce porteur m'a communiqué un dessein qu'il a pour le service de Vostre Altesse, et sur la commodité de la présence de Monseigneur le Prince, il le luy a déclaré ( ; et croy que mesme il aura receu commandement de le représenter a Vostre Altesse, bien qu'a mon advis il ne soit pas tems de rien toucher du costé auquel le dessein vise. Mays, en toute façon, j'at- teste en bonne foy que despuis que j'en ay eu la commu- nication, ce porteur n'a cessé de désirer de le proposer, et s'est engagé en la trouppe delaquelle il est, exprès pour avoir sujet et moyen d'approcher Vostre Altesse, ainsy qu'il m'a tous-jours asseuré et qu'il a désiré que je fisse sçavoir a Vostre Altesse, a laquelle je fay très hum- blement la révérence et suis, Monseigneur, Très humble et très obéissant orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XXIX aoust 1616, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de 1 Htat, (i) Voir la lettre précédente et la note qui raccompagne.  276 Lettres de saint François de Sales MCCXXXIV AU MÊME François de Sales offre à son prince le Traitté de l'Amour de Dieu. Annecy, 6 septembre 16 16. Monseigneur, J'offre a Vostre Altesse un Traitté de V Amour de DieiL que j'ay mis en lumière ces jours passés ; non que je l'estime digne des yeux d'un si grand Prince, mays affin qu'en ce que je puis, je face hommage a Vostre Altesse luy présentant les fruitz de mes labeurs, comme issus d'une personne qui ne pensera jamais d'avoir rien de plus cher en ce monde que l'honneur d'estre advoùé, Monseigneur, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, Francs E. de Genève. Le 6 septembre 1616.  MCCXXXV A LA MÈRE DE CHANTAL (O (fragment) Une des joies du Saint dans le Ciel. — Fleurs à jeter sur le berceau de Marie. Annecy, 7 septembre 16 16. Je vis en espérance, ma très chère Fille, que si mon ingratitude ne me forclost point du Paradis, je jouiray un (i) Nous n'avons ici, évidemment, qu'un texte tronqué, peut-être même composé de deux fragments; cependant, il semble que la Supérieure de la Visi- tation donnée comme destinataire dès 1626 soit la Mère de Chantai. En septem- bre 1616, elle partageait ce titre avec les Mères Favre et de Bréchard; mais le début de la lettre suivante ne permet pas de songer à la Supérieure de Moulins, et le petit défi spirituel proposé dans celle-ci paraît s'adresser aux plus proches Filles du saint Fondateur.  Année i6i6  77  jour par complaysance de la gloire éternelle en laquelle vous vous plaires par jouissance, après avoir saintement porté la croix en cette vie, que le Sauveur vous a imposée, du soin de le servir fidellement en vostre personne et en la personne de tant de chères Seurs, qu'il veut estre vos filles en ses entrailles. Je les salue, ces très chères filles, en Tamour de la très sainte Vierge, sur le berceau de laquelle je les invite de jetter tous les matins des fleurs pendant cette sainte octave : des saintz soucys de la bien imiter, des pensées de la servir a jamais, et sur tout des lis et des roses de pureté et ardente charité, avec les violettes de la très sacrée et très désirable humilité et simplicité *. *Cf. tom.viii huj. Edit., Serm. xcviit,  P-  Franç% E. de Genève. Ce 7 septembre 1616.  MCCXXXVI A LA MÈRE DE BRÉCHARD SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE MOULINS Les débuts de la fondation du monastère de Moulins. — Quels sont les signes de la bonté d'une œuvre. — La tentation des « anges terrestres. » — Encou- ragements à la générosité et à la confiance, Annecy, 19 septembre 1616 ( i ). Je n'ay receu aucune de vos lettres, ma très chère Fille, despuis vostre départ ; cela, je vous prie, que veut il dire ? Or, je sçai bien néanmoins que vostre charité est invariable. Mays j'apprens par lettres venues de Lyon, que vous estes malade, et un peu mesme estonnee de n'avoir pas ( I ) Hérissant, le premier, a donné à cette lettre adresse et date : A la Mère de Chantai, fin janvier i6i^ ; mais il s'est trompé dans ses conjectures. La lecture attentive du texte suffit à convaincre qu'il s'agit ici de la Mère de Bréchard et des épreuves qu'elle eut à supporter à la fondation du monastère de Moulins. La date se déduit du rapport étroit de ces lignes avec celles qui furent écrites le 19 septembre 1616 à M""^ desGouffiers. (Voir In lettre suivante.)  278 Lettres de saint François de Sales treuvé les choses en si bons termes comme nostre désir nous le faysoit imaginer (0. Voyla, ma très chère Fille, des vrays signes de la bonté de l'œuvre : l'accès y est tous-jours difficile, le progrès un peu moins, et la fin bienheureuse. Ne perdes point courage, car Dieu ne perdra jamais le soin de vostre cœur et de vostre trouppe, tandis que vous vous confieres en luy. La porte des con- solations est malaysee ; la suite sert de recompense. Ne vous degoustes point, ma chère Fille, et ne laisses point afFoiblir vostre esprit entre les contradictions. Quand fut ce que le service de Dieu en fut exempt, sur tout en sa naissance ? Mais il faut que je vous die naïfvement ce que je crains plus que tout en cette occurrence : c'est la tentation des aversions et répugnances entre vous et nostre [Sœur des Gouffiers (2)], car c'est la tentation qui arrive ordinaire- ment es affaires qui dépendent de la correspondance de deux personnes ; c'est la tentation des anges terrestres, puisqu'elle est arrivée entre les plus grans Saintz, et c'est nostre imbécillité, de tous tant que nous sommes enfans d'Adam, qui nous ruine, si la charité ne nous en (i) Les difficultés avaient commencé de bonne heure pour les fondatrices : u Elles souffrirent beaucoup dans le voyage, » raconte V Histoire de la Fonda- tion, « parce que, ayant compté sur les grands secours que »> M""* des Gouf- fiers « avait promis, elles n'avaient fait aucune provision et n'avaient que trois pistoles pour les frais » de route. Arrivées dans la capitale du Bourbonnais, ce fut pire encore. « Deux ou trois jours après l'establissement ))(24 août 1616), continue une autre annaliste, « Nostre Seigneur visita ceste petite maison comançante, affligeant la bonne Mère de maladie, en sorte qu'elle fut près de deux mois dans le lict. Elle souffrit beaucoup de disettes, car nostre Congré- gation ayant commancé dans une totale pauvreté, » on « ne peut pas fournir cette fondation que fort petitement... veii mesme que l'on fesoit espérer des grands advantages temporels a Molins, desquels il ne se parla point quand on fut sur le lieu. » (Hist. de la Fondation, par la Mère de Chaugy; voir aussi Les Vies de quatre des premières Mères, 1659-1892, Vie de la Mère de Bré- chard, chap. xi.) (2) Nul doute que « nostre N. » des éditions antérieures, ne soit « nostre Sœur des Gouffiers. » Les différents récits de la fondation la désignent claire- ment, tout en voilant discrètement son nom. « Notre très honorée Mère Jeanne-Charlotte partit, » disent-ils, « sous la conduite d'une dame qui, s'étant mêlée de procurer la fondation, prit tellement le dessus, que la bonne Mère n'osait sonner mot. » (Vie manuscrite, par la Mère de Chaugy.) Les lettres de sainte Jeanne de Chantai (vol. I) révèlent aussi les peines sans nombre que suscita « le terrible esprit » de l'ancienne Religieuse du Paraclet.  Année i6i6 279 délivre. Quand je voy deux Apostres se séparer l'un de l'autre pour n'estre pas d'accord au choix d'un troisiesme compaignon *, je treuve bien supportables ces petites re- *Act., xv, 37-40. pugnances, pourveu qu'elles ne gastent rien, comme cette separation-la qui ne troubla point la mission apostolique. Si quelque chose de tel arrivoit entre vous deux, qui estes filles, cela ne seroit pas estrange, pourveu qu'il ne durast pas. Mays néanmoins, ma très chère Fille, rehausses vostre esprit, et voyes que vostre action est de grande conséquence. Souffres, ne despités point, adoucisses tout, regardes que c'est la besoigne de Dieu a laquelle cette dame (0 s'employe selon son sentiment, et vous selon le vostre, et que toutes deux vous deves entreporter et entre- supporter pour l'amour du Sauveur. Deux ou trois années se passent bien tost, et l'éternité demeure. Vostre maladie corporelle sert de surcharge, mais Tassistance promise aux affligés * vous doit grandement * Cf. Matt., xi, 28. fortifier. En somme, gardes vous bien des descourage- mens. Croyes-moy, il faut semer en travail, en perplexité, en angoisse, pour recueillir en joye *, en consolation, en *Cf. Ps. cxxv, 5. bonheur, et la sainte confiance en Dieu adoucit tout, impetre tout et establit tout. Je suis tout vostre, certes, ma très chère Fille, et je ne cesse point de prier Dieu qu'il vous face sainte, forte, constante et parfaite en son service. Je salue très cordia- lement nos chères Seurs i-), et les conjure de prier Dieu pour mon ame, inséparable de la vostre et des leurs en la dilection qui est selon Jésus, nostre Sauveur *. • Cf. Ephes., v, 2. FRANç^ E. de Genève. ( I ) Il semble que le texte du Saint ait été changé ici : il a dû très probable- ment nommer M"'*^ des Gouffiers, ou lui donner l'appellation de « Sœur ». (2) Les Sœurs Françoise-Gabrielle Bailly, Marie-Avoye Humbert et Jeanne- Marie de la Croix, coopératrices de la nouvelle fondation.  28o Lettres de saint François de Sales MCCXXXVII A MADAME DES GOUFFIERS, A MOULINS (O L'union, condition de la force. — Les renardeaux dans les vignes. Se garder de la prudence humaine. Annecy, 19 septembre 16 16. Cette grande chère Fille qui n'escrit point meriteroit qu'on la laissast aussi en son silence ; mays mon affection ne le permet pas. Et que vous diray-je donq, ma très chère Fille? Je vous recommande la confiance en Dieu, la parfaite simplicité, la sincère dilection. Vous aves la ces pauvres chères Seurs, lesquelles sont sous vostre crédit, et dépendent de vostre assistance au progrès du service pour lequel elles sont allées (2) : unisses vos cœurs et foibles forces, car par l'union vous prendres des forces invincibles. Nostre Mère (3) vous dira peut estre, si elle en a le loysir, la crainte que j'ay que les renardeaux n'entrent Cant., II, i^. dans cette petite nouvelle vigne pour la démolir * ; je veux dire les aversions et répugnances, qui sont les ten- tations des Saintz. Estouffés les en leur naissance ; tenes vostre charité bandée et tenes pour suspect tout ce qui sera contraire a l'union, au mutuel support, a la réci- proque estime que vous deves avoir les unes envers les autres. Gardes vous de la prudence humaine, que Nostre I Cor., III, 19. Seigneur estime folie *, et travaillés en paix, en douceur, en confiance, en simplicité. Si tost que vous aures fait ce que vous aves a faire, vous feres bien d'achever vostre affaire particulière (4). (1) Le titre de « grande Fille » a fait errer les éditeurs précédents, qui ont cru reconnaître dans la Mère Favre la destinataire de cette lettre. Le Saint s'adresse ici à M""^ des Gouffiers ; le second alinéa ne permet pas d'en douter, non plus que l'allusion finale à Va affaire particulière. >» (2) Les Sœurs du monastère de Moulins. On se rappelle les circonstances de la fondation qui en faisaient l'œuvre de M'"* des Gouffiers, et mettaient les Religieuses véritablement sous son « crédit. » (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 256.) (3) La Mère de Chantai. (4) C'était sa rupture définitive avec le Paraclet.  Année 1616 281 Vives toute dans les entrailles de la charité divine, ma très chère Fille, a qui je suis de tout mon cœur Vostre serviteur, France E. de Genève. Le 19 septembre 16 16.  MCCXXXVIII A SOEUR FRANÇOISE DE CERISIER, CLARISSE D ANNECY (0 Charitable intervention du Saint dans une affaire. Annecy, 26 septembre 1616. Ma très chère Cousine, J'ay parlé au R. P. Gardien (2), par le commandement de Son Altesse (3), et il m'a dit quil attendoit dans peu de jours le P. Provincial (4), a la venue duquel la reso- lution se fera sans réplique, et Son Altesse luy recom- mandera l'affaire, selon que ce matin elle me Ta dit. Pour moy, je treuve bon que vous voyies une fin de cette pour- suite, et il ne tiendra pas aux prières que j'en feray au P. Provincial et au P. Gardien. Vives tous-jours toute a Dieu, et me recommandes (i) Françoise de Cerisier, fille d'Antoine, coseigneur de Marthod et Cornil- lon, entra au couvent de Sainte-Claire d'Annecy en 1603, et y mourut en 1629. L'obituaire porte qu'elle « a fait bonne fin. » (Archiv. de TAcad. Salés.; voir Mém. et doc, 1881, tome III.) (2) Déjà en 161 5, le gardien des Cordeliers d'Annecy était Claude Saulnier ou Saunier, « homme d'un grand mérite, aimé de Dieu et des créatures, » dit un ancien registre. Il décéda confesseur des Clarisses, le 10 août 1629. (Archiv. de l'Acad. Salés.; voir ibid.) (3) Le prince de Piémont, que François de Sales avait entretenu désinté- rêts des Maisons religieuses. (Cf. ci-après, Lettre mccxliv. p. 290.) (4) Frère Didier Richard, profès du couvent de Bar-sur- Aube, docteur de Paris, maître célèbre de scholastique chez les Cordeliers de cette ville, élu provincial de la Province de Saint-Bonaventure (cf. le tome précédent, note (4), p. 264) en l'année 1616, au Chapitre de Clermont. Il reçut de nouveau cette charge au Chapitre de Chalon en 1623, et l'exerça quatre ans. (Mém. pour rHist. de la Prov. des Cordeliers dite de St-Bonaventure, Bibl. de Lyon, Ms. n° 1422.)  282 Lettres de saint François de Sales souvent a sa miséricorde et a la charité de la R"^^ Mère (0, afin qu'elle me face part de ses prières, et a celle des autres Seurs. Vostre très humble cousin et frère en N. S., Francs, e. de Genève. XXVI septembre 161 6. Seur Françoise de Cerisier, Religieuse de S*« Claire. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Dole. ( I ) L'Abbesse de Sainte-Claire d'Annecy était alors Charlotte de la Ravoire. Admise au monastère le 5 janvier 1590, elle le gouverna de 1615 à 1620, et de 1636 jusqu'au 25 avril 1637, date de sa mort. (Archiv. de l'Acad. Salés.; vide ubi supra.)  MCCXXXIX A LA MÈRE DE CHANTAL (billet inédit) Démarche du Fondateur auprès des syndics pour garantir les matériaux de l'église de la Visitation. Annecy, commencement d'octobre 16 16 (i). Nous ferons parler aux scindiques i-), ma chère Mère ; car, quant a Son Excellence (3), il ne faut pas, en cette ( I ) Nous lisons aux Registres des Délibérations du Conseil de Ville, en date du 30 septembre 1616 : « Les sieurs scindics ont receu estroict commandement de S. A. et... de S. E.... de reparer promptement les murailles de la ville. » On verra ci-après (note (3), p. 284) à quelle occasion étaient prises ces mesures de prudence. Sans retard, la Mère de Chantai avertit le saint Evêque des difficultés qu'elles soulevaient pour les Religieuses de la Visitation, alors en pleine construction de leur église : « Comme garderons-nous le bois de notre clocher,... que messieurs de la Ville veulent prendre, » écrit la Fondatrice, « comme aussi toute notre chaux et sable ? Et ils disent encore qu'ils nous feront refaire leur muraille. Nous avions pensé de prier M. de Travernay d'aller trouver Son Excellence pour cela, afin qu'elle nous garantît; mais je désire, mon très cher Père, de savoir si vous l'agréerez, et comme nous pour- rons mieux faire. » (Lettres, vol. I, p. 94.) François de Sales répond évidem- ment ici à ces lignes, et la date que nous donnons n'est pas douteuse. (2) Les syndics élus le i**" mai r6i6 étaient : Jacob Garin, docteur ès-droits, Jean Crochet, Guillaume Méclard et Jean-Louis Favre. (Registre des Délib. municip.) (3) Sigismond d'Est, marquis de Lans.  Année i6i6 28? presse, rincommoder. Pour la chaux et le sable, il sera malaysé de la garentir, mais il faudra la faire appretier. Sil failloit employer quelqu'un pour le bois du clocher, ce seroit M. de Monthouz (0; mais je m'en vay envoyer parler aux scindiques. (2)  Revu sur l'Autographe appartenant à M, l'abbé Routier, curé de Saint-Nizier, à Lyon. ( I ) Claude de Monthoux, fils de François de Monthoux et de Claudine de la Lée ou l'Alée, gentilhomme ordinaire de la chambre de Son Altesse, avait épousé en 1612 Péronne de Rossillon. Le 23 août 1616, il fut élu capitaine de la ville d'Annecy, et devint, en 1625, « coronel » du régiment de Genevois. Quand il mourut, en 1651, il était âgé d'environ soixante-quinze ans. (2) Le bas de l'Autographe est coupé.  MCCXL A MONSEIGNEUR PIERRE FENOUILLET ÉVÊQUE DE MONTPELLIER (inédite) La fidélité d'un porteur de lettres qui ne doit pas être suspectée. Nouvelles de guerre. Annecy, 5 octobre 161 6. Monseigneur, Ce jeune homme de cette ville allant a Tolose pour y estudier en droit (0, je ne puis que je ne vous salue très ( I ) En 1229, le traité de Paris, qui mettait fin à la guerre des Albigeois, imposa au comte de Toulouse l'obligation d'entretenir pendant dix ans des maîtres de théologie, de droit et de grammaire, afin d'assurer aux clercs des régions méridionales un enseignement orthodoxe. Ainsi furent jetés les pre- miers fondements de l'Université, officiellement érigée quelques années plus tard (1233) par le Pape Grégoire IX. — La Faculté de droit, organisée dès l'origine, comprenait l'enseignement du droit canon et du droit civil, et se consacrait spécialement à l'étude du droit romain en vigueur dans ces con- trées. Au milieu de la décadence des autres Facultés, décadence qui commença dès la fin du xiv° siècle, elle garda seule un peu de vie et c'était toujours parmi ses membres qu'on choisissait le recteur. Elle comprenait six chaires, auxquelles on nommait à la suite d'un concours et sous l'approbation du Par- lement. Le procès-verbal d'une enquête faite en 1668 nous apprend que, depuis  284 Lettres de saint François de Sales humblement par la commodité quil me donne de vous faire présenter ces quatre lignes (0, auxquelles je joins une lettre de nostre grand amy (2), que j'aurois bien appréhension d'envoyer avec les marques d'avoir esté declose (comme en effect elle me fut rendue telle), si je n'estois asseuré de la confiance que vous aves en ma fidé- lité. Je l'ay donq fait fermer de mon cachet, afiin que, si d'adventure le paquet s'ouvroit, comme fit celuy dans lequel elle me fut addressee, elle ne fust pas ouverte par le froissement du port ; car c'est ainsy qu'elle fut declose, et non par la malice du porteur, qui me rendit tout le paquet debiffé, mais en sorte que je conneus quil ny avoit point touché. Nous sommes a la veille de recevoir bravement nos ennemis, silz sont résolus, comm' on nous menace, de venir a nous, et espérons que Dieu regardera nostre innocen- ce (3). On ne laisse pas pourtant de travailler a la reunion des Princes, sous le crédit desquelz on nous dit que tout ce malheur nous est préparé (4). quatre-vingts ou cent ans, les Ecoles de droit canon et droit civil étaient réunies en une seule : trois professeurs enseignaient le matin et trois l'après-dînée, chacun pendant une heure. (D'après des Notes de M. Léon Le Grand, archi- viste aux Archives Nationales.) (i) Le porteur de cette lettre était Jean-Claude d'Amidoux, né à Cluses, de Nicolas, seigneur de Symond, et de Jeanne de Bieux. (Mém. de l'Acad. Salés., 1888, tome XI, pp. 219, 220.) C'est le seul étudiant savoyard que men- tionnent, comme arrivant à cette époque, les Registres de la Faculté de droit de Toulouse ; il ensuivit les cours de janvier 1617 au 11 février 1622, date des testimoniales qui lui furent accordées. (Archiv. de la Faculté, Reg. 24, fol. 48.) Cette même année, il apparaît parmi les nouveaux avocats du Sénat de Savoie à la rentrée du 14 novembre. (2) Antoine des Hayes. (3) Le duc de Nemours, pour gagner à sa cause la cour de France, avait député à Paris, vers la fin d'août, Guillaume de Bernard de Foras. Pendant que ce gentilhomme traitait auprès de la Reine mère et des princes français. Henri de Savoie, encouragé par les subsides déjà reçus de don Pedro de Tolède, gouverneur de Milan, se préparait à entrer en campagne. Le prince de Pié- mont, de son côté, organisait activement la défense, et la rencontre des deux armées devenait de jour en jour imminente. Plus que toute autre ville, Annecy avait à redouter l'approche du duc de Nemours, irrité de sa courageuse résistance du 22 juillet (voir ci-dessus, note (2), p. 266) et de l'occupation de son château par Victor-Amédée. (4) Ce fut le 26 octobre, dans la vallée de Chésery, qu'eut lieu la rencontre des troupes de Nemours et de Savoie. Le prince de Piémont fut victorieux, et Henri ne songea pas à continuer la guerre. L'accommodement entre les deux  Année 1616 285 Dieu, par sa bonté, nous veuille donner sa tressainte paix, et vous conserver a longues années. Monseigneur, a qui je suis, Très humble et très obéissant confrère et serviteur, Franç% E. de Genève. 5 octobre 16 16. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Montpellier. branches de la Maison de Savoie, préparé par Fresia, l'ambassadeur savoyard à Paris, par de Lassey, Bellegarde et Lesdiguières, fut rapidement conclu. C'est qu'en effet les circonstances commandaient à Charles-Emmanuel des ménagements envers un vassal de la couronne de France. Les deux princes se réunirent le 14 novembre près du pont de Grésin, et le traité de paix fut signé à des conditions plus avantageuses que Nemours n'aurait dû s'y atten- dre. (D'après Ducis, Annecy et les Ducs de Genevois et de Nemours, Annecy, 1883; Mugnier. Hist. du Président Favre. Paris, 1902-1903, chap. xix.)  MCCXLI A MADAME DE LA FLÉCHERE Départ du prince de Piémont. — Condition pour obtenir un bénéfice. Nouvelles différées. Annecy, 6 octobre 1616. Ma très chère Fille, Le Prince part aujourdhuy (i) et M. de Charmoisy le suit pour la conduite de l'artillerie (2). Au retour, je tire- ray quelque resolution du tems auquel on pourra terminer l'affaire que vous aves avec M. de Monregard (3). Ce- pendant, ces bons Pères vous consoleront (4), et j'escris (i) Victor-Amédée, prince de Piémont, qui avait séjourné à Annecy depuis le 12 août. (Voir ci-dessus, note (2), p. 268.) (2) Depuis le commencement des troubles, Claude de Charmoisy avait été l'un des plus intelligents et dévoués serviteurs du duc de Savoie ; son mérite, après ses longues disgrâces passées, se faisait jour enfin, et lui obtenait l'im- portante charge de grand maître de l'artillerie. ( 3) François Cristan. seigneur de Montregard(voir ci-dessus, note ( 2), p. 195). (4) Ce même jour partaient à pied d'Annecy pour Rumilly le P. Simplicien Fregoso, supérieur des Barnabites, et le P. Vitalien Berretta. Ils allaient pu- blier l'Indulgence plénière accordée, le 22 décembre 1615, par un document pontifical dont ils étaient porteurs. Pendant cinq jours, ils se livrèrent avec zèle  286 Lettres de saint François de Sales a M. Rivolat quil s'exerce a faire la Doctrine chres- tienne ; cela le disposera a pouvoir obtenir quelque béné- fice et a le servir (0. Je vous salue de tout mon cœur, lequel, comme vous sçaves, souhaite mille et mille bénédictions au vostre, auquel je diray a nostre première veue deux nouvelles pour Rumilly qui luy seront des plus aggreables (2). Mays il y faut tant de secret, que je ne les veux pas escrire. Ce VI octobre 16 16. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. au ministère de la chaire et du confessionnal, et l'on compta environ six cents personnes qui s'approchèrent des Sacrements à cette occasion. (Acta Collegii, Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien.) (i) Sans doute François Rivollat, né à Rumilly, qui avait reçu la tonsure le 22 mars 1608. Tout autre renseignement nous fait défaut. (2) Il s'agissait très probablement de nouvelles concernant le service divin à Rumilly, où il était si difficile au saint Evêque de l'établir selon ses désirs. François de Sales — on le voit par une lettre du 6 avril 1617 — avait parlé au prince de Piémont d'une fondation de Barnabites dans cette petite ville; peut- être était-ce l'une des bonnes nouvelles.  MCCXLII A MADAME DES GOUFFIERS Difficultés et épreuves de la Visitation de Moulins. — La présence de la Mère de Chantai indispensable à Annecy. — Que M'"« des Gouffiers supporte courageusement le fardeau que sa bonne volonté lui a fait désirer. — Pour- quoi le Fondateur ne veut pas multiplier les Maisons de sa Congrégation. Annecy, 8 octobre 16 16. (0 vigne ; et voyla que ces infirmités se sont interposées, qui la tiennent au lit et hors du train requis ; et a cela surviennent des aversions et répugnances, ( I ) Le haut de l'Autographe a été coupé. Selon toute apparence, la lettre n'avait qu'une page, avec l'adresse au verso.  Année i6i6 287 infirmités spirituelles (0. Or sus, embarqués pourtant que l'on est, il ne faut pas perdre courage, mais user de toute la dextérité possible pour empescher que nos imbécillités ni (sic) scandalisent point ceux du monde. Et puis que le P. Recteur (2) propose un expédient, il le faut prendre tel quil le dit, hormis qu'après avoir envoyé a vostre choix ce qui sera plus propre pour cette Mayson-la et pour Rion(3), vouloir encor faire faire des absences a nostre Mère (4), c'est dire quil faut démanteler cette Mayson et la laisser a la merci des vens ; car, comme vous sçaves, il y a peu de Mères et beaucoup de filles,  ( I ) On a parlé déjà (voir ci-dessus, notes ( i ) et ( 2 ), p. 278) de la maladie qui arrêta la Mère de Bréchard dès le début de la fondation, et de l'impérieuse autorité qu'exerçait M*"* des Gouffiers. Celle-ci avait si bien pris le gouverne- ment de la maison, qu'elle « était tenue pour la Mère, » raconte Soeur Jeanne- Marie de la Croix, « et l'on fut plusieurs mois sans que la très chère Mère Jeanne-Charlotte eût vu presque personne de la ville. » (Vie ma?iuscrite de la Mère de Bréchard.) On conçoit que cette manière d'agir pouvait exciter les « aversions et répugnances » des Sœurs de la petite et pauvre Communauté, tandis que les infirmités de la vénérable Supérieure renouvelaient en M'""^ des Gouffiers ses désirs d'avoir à Moulins la Mère de Chantai elle-même. (2) Depuis 161 1, le P. Aignan Moreau était recteur du collège de Moulins. Né à Chartres, en septembre 1571, il entra dans la Compagnie de Jésus le 28 juin 1593, à Verdun; devint profès des quatre vœux le 30 octobre 161 1, à Paris, et mourut à Blois le 12 août 1642. Pendant les quarante-neuf ans de sa vie religieuse, on le trouve successivement professeur, recteur, père spiri- tuel, etc. Il fut partout un homme de grande édification, vivant exemplaire de l'observance régulière. Arrivé à la vieillesse, le fervent Jésuite ne se relâcha en rien de sa fidélité et de son exacte pratique de la vie commune. Très assidu à entendre les confessions, c'est à ce poste de dévouement que le mal de la mort le surprit. Il ne s'arrêta qu'un jour, l'employa tout entier à se préparer au dernier passage, et s'endormit paisiblement dans le Seigneur. (D'après les Notes du R. P. Hafner, S. J ., archiviste général de la Compagnie.) Le P. Moreau fut un de ceux qui aidèrent M"™* des Gouffiers à négocier la fondation de la Visitation de Moulins (cf. ci-dessus, note ( i ), p. 256, et sa lettre à l'Appendice I). Il devint dans la suite le plus ferme appui de la Mère Jeanne- Charlotte de Bréchard au milieu des difficultés sans nombre qu'elle rencontra. M Ce m'est un grand repos de vous sentir le secours et support de ce bon Père, » écrivait la Mère de Chantai à sa fille. Et encore : « Oh! certes, l'on connaît par ses lettres qu'il marche en sincérité et qu'il a l'esprit de Dieu. » (Lettres, vol. I, pp. 171, 173.) (3) La fondation de Riom était imminente à cette époque (voir ci-dessus, note ( I ); ?• ^63)- Le 4 septembre, sainte Jeanne de Chantai annonce que « si ceux de Riom persévèrent, » on leur enverra au mois de mai « Sœur Marie- Madeleine » de Mouxy, « avec la petite Paule-Jéronyme » de Monthoux « et une brave novice. » (Lettres, vol. I, p. 141.) (4) La Mère de Chantai.  288 Lettres de saint François de Sales dont les unes sont des-ja venues, les autres viendront au premier jour ( O, et il faut une Mère icy qui suffise a tout ; laissant a part les grandes bonnes affaires qui sont par deçà pour cette Congrégation, ausquelles nostre seule Mère peut respondre i-). Ce pendant donq, supportes, ma très chère Fille, le fardeau que vostre bonne volonté au service de Dieu vous a fait désirer et prendre sur vos espaules, lesquelles seront asses fortes pour cela si vous vous appu3^es un peu sur la Croix de Nostre Seigneur, en laquelle il a porté sur les siennes le faix de tant d'iniquités et misères. Si vous juges avec le P. Recteur quil soit expédient que vous venies vous mesme (3), nous vous verrons, et par- lerons plus clairement des raysons que nous avons de ne vouloir pas meshuy multiplier les familles de cette Con- grégation, jusques a ce que nous ayons des mères de famille convenables. Mays tenes vostre cœur en charité, c'est a dire, supportes le prochain, car ce support est la charité, et la charité, ce support. Pries bien Dieu pour moy, et saches que je suis inva- riablement vostre, de toute mon affection. Le VIII octobre 1 616.(4) A ma très chère Fille en N. S., Madame de Gouffiez. A Moulins. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Reims. (i) « Si les troubles n'empêchent, » écrit la Fondatrice le 22 septembre, « nous aurons une douzaine de novices cette année. » (Lettres, vol. I, p. 146.) Parmi ces futures Sœurs, on peut citer Hélène Le Blanc, Anne de Beaumont- Carra, Claudine de Vallon, (2) On travaillait beaucoup en ce moment pour obtenir de Rome les auto- risations nécessaires à rétablissement définitif de la Congrégation. Pour le règlement d'une foule de questions, l'avis de la Sainte était urgent. (3) Malgré le désir des Fondateurs, qui comprenaient la nécessité de retirer de Moulins M'"* des Gouffiers, celle-ci ne vint pas à Annecy. (4) Ici, la Mère de Chantai ajoute de sa main quelques lignes à la lettre du Saint : « Je ne voy pas comment vous puissies avoir des filles qu'en les venant choisir vous mesme ; l'utillité et nesaisité le requiert ainsi. Il m'est per- mis de vous dire cecy, et que je suis toute vostre, vous supliant derechef d'asurer le R. Père Recteur que sa charité m'oblige d'estre a jamais toute sa très humble fille et servante en N. S. Vive Jésus. »  Année i6i6 289  MCCXLIII A LA MÈRE DE BRÉCHARD SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE MOULINS (0 La « plus excellente leçon de la doctrine des Saintz. » — Souhaits de François de Sales à une fille de son cœur, Annecy, 8 octobre 1616. Ma très chère Fille, Les aversions et répugnances dequoy on nous escrit nous exercent un peu. O Dieu ! quand sera-ce que le support du prochain aura sa force dans nos cœurs ? C'est la dernière et plus excellente leçon de la doctrine des Saintz : bienheureux Tesprit qui la sçait. Nous desirons du support en nos misères, que nous treuvons tous-jours dignes d'estre tolérées ; celles du prochain nous semblent tous-jours plus grandes et pesantes. Dieu vous face sainte, ma très chère Pille, et toute vostre chère troupe. Dieu soit exalté en vos misères, sur le throsne de sa bonté et le théâtre de vostre pure et sincère humilité. Dieu vous face tout faire pour sa gloire, affin qu'un jour vous en soyes couronnée. Ma très chère Fille, vous estes la fille de mon cœur, et je ne laisseray jamais de souhaiter que vous soyes la fille du cœur de Dieu, qui nous a donné des cœurs affin que nous fussions ses enfans, en Taymant, bénissant et servant es siècles des siècles. Vive Jésus ! Franç% E. de Genève. Le 8 octobre 1616. ( I ) Cette lettre, de même date et traitant du même sujet que la précédente, est certainement écrite à la Mère de Bréchard. Selon toute apparence, le texte a été mutilé.  I FTTREf VU  290 Lettres de saint François de Sales  MCCXLIV A M. CLAUDE DE BLONAY (inédite) Résolution prise dans une assemblée présidée par e prince de Piémont. La communiquer au Conseil de la Sainte-Maison de Thonon. Annecy, 10 octobre 1616. Monsieur, Il y a quelques jours que Son Altesse fit un' assemblée pour prendre les resolutions convenables a la répara- tion des Monastères, tant en ce qui regarde les bastimens temporelz qu'aussi en ce qui regarde l'édifice spirituel de la discipline régulière (0. Et quant a la première, sadite Altesse a ordonné que, venant a vaquer des prébendes, on les retienne vaquantes jusques a ce que autrement soit prouveu. Je le dis au P. D. Fulgence avant son départ (2); mais sachant quil y a une place vacante maintenant (3), je vous prie de la (i) Profitant du séjour de Victor-Amédée à Annecy, le saint Prélat avait conféré longuement avec lui sur les moyens à prendre pour la réforme des Monastères d'hommes et de femmes de la Savoie. Il lui présenta même un mémoire écrit de sa main sur cet important sujet, et le « Ires-religieux Prince... luy bailla parole » de « faire exécuter, quand il en verroit estre le temps, » les mesures proposées. (Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. VIII.) (2) Le P. Fulgence Chioccari, originaire de Novare, venait d'être nommé supérieur des Barnabites de la Sainte-Maison de Thonon. Depuis le 9 no- vembre 1614, il faisait partie de la petite Communauté d'Annecy qu'il revint gouverner du 8 juillet 1620 au 22 juin 1623. Après avoir dirigé ensuite le collège de Saint-Alexandre de Milan, D. Fulgence fut mis, en 1632, à la tête de la Province de Savoie-Piémont, puis devint assistant du Père Général. Dans toutes ces charges, il se conduisit avec une parfaite humilité et modestie ; son dévouement pour sa Congrégation lui fit entreprendre de fréquents et longs voyages en Italie, en France et en Allemagne. Il mourut à soixante et onze ans, le 28 septembre 1651, au collège de Milan. (D'après les Acta Colle- gii, Archiv. commun. d'Annecy, Série GG, Fonds du Collège Chappuisien, et la Vie de Mgr Guérin, traduction italienne, Milan, 1859, p. 255.) (3) Serait-ce une des prébendes monacales du prieuré de Contamine dont il s'agirait ici ?  Année 1616 291 retenir vacante, c'est a dire, de faire que le Conseil (0, auquel il appartient de prouvoir, sursoye. Et pourres, sur cette lettre que je vous fay, en parler audit Conseil de la part de Son Altesse, puisqu'elle m'a commandé d'y tenir main, et que je le prie tenir , suppliant Monsei- gneur l'Archevesque (^i de le faire, comme je fay par la lettre ci jointe, en vous tesmoignant que je désire que vous y ayes l'œil entant quil vous compete, vous parlant de la part de Son Altesse, et au Conseil par vostre entre- mise, et n'adjoustant plus rien, sinon que je suis, Monsieur, Vostre plus humble confrère, Francs, g jç Genève. X octobre 16 16, Annessi. Monsieur Monsieur de Blonnay, Prefect de la S*^ Mayson. Revu sur une copie conservée à Rome, dans les Archives des RR. PP. Barnabites (3). ( I ) Le Conseil de la Sainte-Maison était composé de TEvêque du diocèse, des prêtres du Presbytère et des Religieux prédicateurs, des seigneurs magis- trats de Son Altesse et de quelques autres laïques. Après 1677, la composition de ce Conseil fut déterminée d'une façon plus précise. (2) Vespasien Gribaldi. archevêque démissionnaire de Vienne. (Voir tome XII, note (i), p. 24.) (3) Plusieurs erreurs se remarquent dans la copie reproduite ci-dessus; quelques-unes ont été facilement rectifiées, mais nous ne pouvons garantir la parfaite exactitude du texte.  292 Lettres de saint François de Sales MCCXLV A M. LAURENT SCOTTO (0 (inédite) Pouvoirs spirituels donnés au destinataire. Annecy, 12 octobre 1616. Molto Reverendo Signor osservandissimo, lo non son huomo di cérémonie, massime con V. S. molto Reverenda, laquale io credo certo che me voglia bene sinceramente, sî come io desidero di servirla di cuore. Onde non accadeva usar meco scuse sopra la sua inopinata partenza ( = ). Si prevaglia poi delTauthorità che Iddio mi ha con- cessa, per le confessioni et assolutioni di quelle anime,  Très Révérend et très honoré Seigneur, Je ne suis pas homme de cérémonies, surtout avec Votre très Révérende Seigneurie qui, j'en suis sûr, m'aime sincèrement, de même que, de tout cœur, je désire la servir. C'est pourquoi, vous n'aviez nul besoin d'user d'excuses avec moi pour votre départ inopiné (2). Veuillez donc vous prévaloir, pour les confessions et absolutions de ces âmes, de l'autorité que Dieu m'a donnée, et que très volontiers (i) Fils d'Antoine Scotto ou Scoto, Laurent était à cette date aumônier du prince de Piémont ; il garda cette charge quand Victor-Amédée monta sur le trône, et la reprit en 1645 auprès de Charles-Emmanuel II. Dans les patentes données à cet effet par la régente Christine de France (2 mars 1643) ^^^^ 1^ qua- lifie « conseiller et aumônier du Roi, mon seigneur et frère, et le nôtre. » Protonotaire apostolique, grand maître des cérémonies de l'Ordre de l'Annon- ciade, il reçut (1632) la commende de l'abbaye cistercienne de Sainte-Marie de Chésery, en succession de Gaspard Perrucard de Ballon, mort en 1629. — L'abbé Scotto fut un ami des belles-lettres; poète lui-même, il conquit les éloges de ses contemporains, et quelques-unes de ses œuvres, en effet, ne manquent pas de valeur. Il mourut en 1664, à l'âge de soixante-seize ans. (D'après Claretta, Storia délia reggen\a di Cristinadi Francia, Torino, Civelli, 1869, tom. II, pp. 478 seq., etc.) (2) Laurent Scotto avait dû accompagner Victor-Amédée à Annecy, et en repartir avec lui le 6 octobre. (Voir ci-dessus. Lettre MCcxLr.)  Année 1616  293  chè io volontieri con Ici la communico e glie ne dô quella parte che seconde la prudenza sua giudicarà esser neces- saria per gloria di Dioe salute del prossimo, acciochè con maggior animo Ella adopri il sacro talento che dal Signor gli è stato dato. Et fratanto, pregandogli ogni vero contento, resto Suo afifettionatissimo fratello et servitore in Christo, Franco, Vescovo di Geneva. XII ottobre 1616, in Annessi. Air Illustre et molto R^° Sig^ Il Sig"* Lorenzo Scoto, Cappellan di S. A. S""*, che Dio salvi. A Clermont (O. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin. je vous communique et dépars dans la mesure où votre prudence le jugera nécessaire à la gloire de Dieu et au salut du prochain, afin qu'avec plus d'ardeur vous employiez le talent sacré que le Seigneur vous a confié. Sur ce, vous souhaitant tout vrai bonheur, je demeure Votre très affectionné frère et serviteur dans le Christ, François, Evêque de Genève. 12 octobre 16 16, à Annecy. A l'Illustre et très Révérend Seigneur, Monsieur Laurent Scoto, Chapelain de S. A S™% que Dieu sauve. A Clermont ( i). ( I ) Clermoiit en Genevois (voir le tome précédent, note ( 5 \ p. 29^\ où le prince de Piémont se retira en quittant Annecy.  294 Lettres de saint François de Sales MCCXLVI A M. CLAUDE- AMÉDÉE VIBOD (O Le Saint réclame une lettre écrite par Charles-Emmanuel au Vice-légat d'Avignon au sujet des étudiants au collège de Savoie. Annecy, 13 octobre 1616. Monsieur, Je vous supplie de me faire la charité que je puisse avoir la lettre que Son Altesse a accordée au Vice Légat d'Avignon (2), en recommandation de l'affaire que la Sainte Mayson de Thonon, mon Chapitre et moy y avons, sur le sujet des places du collège d'Annessi, ou de Savoye, fondé audit Avignon, qui appartient a la nation de Savoye, affin que nous soyons remis en possession de les avoir (3). ( I ) L'adresse que nous donnons est justifiée par celle de la lettre du 29 oc- tobre au même destinataire. (2) Jean-François Guidi di Bagno naquit à Florence, de Fabrice, marquis de Montebello, et de Laura Colonna. Honoré de la prélature à dix-huit ans, il commença sa carrière diplomatique en France, à la suite du cardinal-légat Aldobrandini. En 1614, Paul V lui confia la vice-légation d'Avignon qu'il garda sept ans ; Grégoire XV et Urbain VIII l'envoyèrent à deux reprises, comme nonce extraordinaire et ordinaire, à Paris et aux Pays-Bas. Evêque de Cervia en 1627, il fut créé peu après cardinal-prêtre du titre de Saint-Alexis. Résignant son premier évêché, Ms"" Guidi gouverna celui de Rieti de 1635 à 1638; fixé depuis à Rome, il y mourut en 1641, à l'âge de soixante-trois ans, d'après l'épitaphe de son mausolée dans son église cardinalice. Comme évêque, Guidi di Bagno se fit remarquer par sa vigilance pastorale; prince de l'Eglise, il sut faire un noble usage de ses revenus et se montra protecteur des lettres; partout on s'édifia de son désintéressement et de sa piété. (D'après Ciaconius, Hist. Pontif. et Card., lôy"], tome IV; Moroni, Di{ionario di erudi^ione sto- rico-ecclesiastica, Venezia, 1845, vol. XXXIII.) (3) Peu après sa nomination à l'évêché de Genève (3 décembre 1423), le célèbre Cardinal de Brogny songea à doter sa ville épiscopale d'une Université. La secrète jalousie des Genevois contre les ducs de Savoie, nommés conser- vateurs des privilèges du futur établissement, les empêcha d'accepter cette offre honorable. Le Cardinal, alors, fonda dans son palais d'Avignon le collège de Saint-Nicolas pour l'entretien gratuit de vingt-quatre pauvres étudiants en droit, dont seize de la Savoie. Les évêques des diocèses privilégiés choisissaient les boursiers; le roi de France, le duc de Savoie, le Parlement, étaient pro- tecteurs et même propriétaires du collège. Outre les legs considérables qui assuraient l'avenir de son œuvre, le fondateur lui donna encore sa bibliothèque, riche de plus de sept cents manuscrits. Cette fondation passa par de grandes vicissitudes ; les intentions du Cardinal  Année 1616  295  Je vous envoyeray le Mémorial, et M. Boschiz(0 me fit la faveur de me promettre l'expédition de ladite lettre, laquelle nous desirons avoir, afïin de faire partir au plus test le personnage que nous envoyons pour faire la sol- licitation (2). Ce pendant, je vous conjure de m'aymer tous-jours, de me tenir en la bonne grâce dudit seigneur Boschiz, que je salue humblement, et de me croire, Monsieur, Vostre bien humble et très affectionné serviteur, France E. de Genève. Le 13 octobre 16 16, Annessi. de Brogny furent méconnues, les Savoyards n'eurent plus les places qui leur étaient réservées, et l'étude de la théologie finit par être substituée à celle du droit. Réclamations fréquentes, démarches, recours à Rome : tout demeura inutile. Le collège, cependant, subsista jusqu'à la Révolution française, et possédait encore à cette époque quarante mille livres de rente. (Voir Gon- thier, Œuvres historiques, Thonon, 1903, tome III, pp. 208-210.) Par lettres patentes du 5 janvier 1602, Charles-Emmanuel avait ordonné que le « collège de Savoye... en la ville d'Avignon, soit tellement annexé a la Sainte Maison » de Thonon, « que désormais il despende immédiatement d'icelle, luy cédant a ces fins tous les droictz qu'y avons et pouvons prétendre, comme chose unie a la nation, et donnant plein pouvoir et authorité d'iceux pour- suivre, partout et par devant qui sera de besoin. » (Chambéry, Archives du Sénat, Reg. des Edits-BuUes^ 1^98-1606, fol. 198.) (i) Annibal Boschi (voir ci-après, note (i), p. 309). (2) Il n'a pas été possible de trouver le nom de ce personnage.  MCCXLVII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL I«' Contribution payée à Son Altesse par le clergé du diocèse de Genève. Annecy, 21 octobre 1616. Monseigneur, Ce clergé s'est accommodé avec toute sorte d'humilité et de respect a ce qu'il a pieu a Vostre Altesse de me commander, marris que nous sommes tous de ne pouvoir asses dignement tesmoigner l'infinie affection que nous  296 Lettres de saint François de Sales avons a son service ( i ). Dieu neamoins la sçait, et la void es continuelz souhaitz que nous faysons, affin quil luy playse de combler Vostre Altesse de prospérité, et sur tout que sa dilection règne a jamais au milieu de vostre cœur. Monseigneur, c'est le souverain bonheur que peut demander pour Vostre Altesse, Son très humble, très fidèle et très obéissant orateur et serviteur, Francs, g (jg Genève. 21 octobre 16 16. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. (i) Pressé par les nécessités de la guerre où il se trouvait engagé, Charles- Emmanuel avait obtenu de Rome un Bref lui permettant d'étendre aux privi- légiés et exempts la levée d'impôts ordonnée en septembre à tous les sujets de Son Altesse. « Un soir, » raconte le P. de la Rivière (La Vie de Vlllme et Rme Fr. de Sales... Q,uatriesme édition, reveue et augmentée, Rouen, Loudet, 1631, liv. IV, chap. xvii), « estant à table, » oh apporta au saint Evêque « des lettres patentes du Pape et du duc de Savoye, par lesquelles il lui estoit enjoint de jeter certaine somme de deniers sur son clergé, à fin de survenir aux frais de la guerre. Il n'est pas que le mandement de cette levée pécuniaire ne lui serrast le cœur, comme sçachant très-bien la pauvreté des prestres de sa jurisdiction ; cependant il obéit sans réplique, et voulut qu'à l'instant on se mist en devoir de travailler à ce fascheux et ennuyeux affaire. » Il y eut plus d'une plainte parmi les bénéficiers ; alors François de Sales « entra en zèle, tant pour la maison de Dieu que pour celle de son Prince, » et imposa silence aux mécontents, non seulement par ses paroles mais par son exemple, payant lui-même une forte contribution. (Camus, L'Esprit du B. Fr. de Sales, Paris, Alliot, 1640, tome II, Partie V, sect. xii.) Voir ci-après, la lettre du 31 octobre.  MCCXLVIII AU PRINCE DE PIEMONT, VICTOR-AMÉDÉE (0 Un fermier qui promet ce qui n'est pas à lui. — Supplique des Religieux de Talloires. Annecy, 26 octobre 16 16. Monseigneur, Les Religieux de Talloyres sachans que le fermier de ( I ) Le 28 octobre 1616, le premier syndic d'Annecy, député par la Ville au sujet de l'impôt en coupes de froment (voir la note (s'ï de la page suivante),  Année i 6 i 6 297 leur Prieur commendataire (0 a promis de fournir trois cens couppes de froment pour Tarmee (O, et qu'il prae- tend a cet efifect employer le bled de sa ferme, ilz sup- plient très humblement Vostre Altesse qu'il luy playse de commander qu'avant toute chose les prsebendes des- tinées a la nourriture des Religieux seront réservées, affin que le divin service soit continué, attendu que ledit fermier n'a peu promettre ce qui est aux Religieux. Et moy j'intercède pour eux, estimant que Vostre Altesse l'aura aggreable, comme, Monseigneur, de Son très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, Franç\ E. de Genève. 26 octobre 16 16, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat. est de retour du « camp de S. A. près Ballon, » aux environs de Rumilly. (Reg. des Délib. municip.) C'est donc non avec le duc de Savoie, mais avec le prince de Piémont que se traitait cette affaire, et nous corrigeons justement l'adresse donnée à cette lettre par les précédents éditeurs, ( I ) En 161 3, Charles de la Tour avait résigné la commende de Talloires en faveur de César Perrone, dont le père, Charles, fut le premier comte de San Martino d'Ivrée. Les moines du prieuré l'élurent prieur claustral en 1624; mais, par un Bref du 4 juillet, Urbain VIII annula l'élection. Un acte gardé aux Archives de Turin nous apprend que vingt ans plus tard il possédait encore son bénéfice; c'est sans doute après le décès de son frère Antoine, mort sans enfants (1653), qu'il le quitta pour épouser Prospère de Bellegarde. (2) Ces trois cents coupes de froment avaient été demandées par le pro- cureur patrimonial de Son Altesse à la ville d'Annecy. En vain les syndics tentèrent de « remonstrer le peu de blé que les bourgois... recuillent, n'en ayantz pour leurs mesnaiges ; » en vain M. Garin, porteur d'une lettre au prince, était-il allé vers le marquis de Lans et lui « auroit faict sçavoir » que la ville « est composée d'ung grand nombre de clergé et de la noblesse, et le reste fort pauvre ; » Son Excellence ne voulut rien entendre, et les rançonnés n'eurent plus qu'à s'exécuter. (Reg. des Délib. municip.) On chercha des fermiers qui pussent fournir la quantité de blé nécessaire, et celui de Talloires se présenta.  298 Lettres de saint François de Sales MCCXLIX AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL I*"" Requête en faveur des étudiants savoyards au collège d'Avignon. Annecy, 29 octobre 1616. Monseigneur, Le collège d'Annessi fondé en Avignon ( ' ) recourt par un sien député, natif de Chamberi ( = ), a nostre Saint Père le Pape afïin d'obtenir de Sa Sainteté quelque digne remède contre les desordres qui y sont survenus au pré- judice des sujetz de Vostre Altesse, qui est le mesme Vide supra, Epist. sujct pour lequel elle avoit escrit ces jours passés * au Vice Légat du comtat d'Avignon (3) ; qui me fait la sup- plier très humblement d'employer pour ce bon œuvre la mesme faveur a Romme qu'elle avoit accordé pour Avignon. Et tandis, je prie Dieu qu'il comble Vostre Altesse de toute sainte prospérité, et luy faysant la deuë révé- rence, je demeure, Monseigneur, Son très humble, très obéissant et très fidèle serviteur et orateur, Francs E. de Genève. Annessi, le 29 octobre 161 6. (i) Voir ci-dessus, note (3), p. 294. (2) Les recherches faites pour découvrir la trace du député d'Avignon sont restées infructueuses. (3) M»"^ Guidi di Bagno (voir ci-dessus, note (2), p. 294).  MCCXLVI.  Année i6i6 299  MCCL A M. CLAUDE-AMÉDÉE VIBOD L'affaire du collège de Savoie à Avignon portée en Cour de Rome. Message pour M. Boschi. Annecy, 29 octobre (0 1616. Monsieur, Vous sçaures par ce porteur que toute l'affaire icy avance ; il nous faut changer de méthode et recourir a Romme, ou il va luy mesme en qualité de député du collège (-). Or, il y aura besoin donq, peut estre, de la faveur de Son Altesse, a laquelle aussi je la demande très humblement par une lettre *; et croy que, selon sa * Epist. praeced. bonté et la providence par laquelle elle veut et peut, elle l'accordera très volontier. Reste que monsieur Boschiz (3) nous gratifie aussi de son assistance, laquelle je requiers par vostre entremise, le saluant humblement de tout mon cœur ; car, quant a vous. Monsieur, je ne veux pas, en cett' occasion, employer mes prières pour impetrer vostre courtoysie, sçachant que Tamour du bien de la patrie vous donnera asses d'affection. Mays je vous supplie de continuer envers moy vostre bienveuillance, qui suis Vostre humble, très affectionné serviteur, Franç% E. de Genève. . . octobre 161 6. (i) Le quantième, i^r octobre, donné par Datta, est certainement faux. Cette lettre fut écrite sans aucun doute en même temps que la précédente au duc de Savoie. (2) Voir note (2) de la page précédente, et cf. Lettre mccxlvi. (3) Annibal Boschi (cf. ci-dessus, p. 295).  300 Lettres de saint François de Sales MCCLI A UN GENTILHOMME (0 L'Evêque de Genève expose ses motifs d'accéder aux volontés de Son Altesse au sujet de l'impôt sur le clergé. Annecy, 31 octobre 16 16. Monsieur, Deux motifs m'ont porté, avec tout ce clergé, d'accorder sans scrupule l'ayde et secours de moyens que Son Altesse a désiré de nous (2). L'un a esté, que il y a environ sept a huit ans, que Sa Sainteté accorda a sadite Altesse la décime de six ans sur le clergé de ses Estatz (3), de la- quelle comme Son Altesse n'a rien exigé, aussi ne nous l'a elle pas encor quitté ; de sorte qu'a bon compte nous luy donnons celle ci, bien que nous ne l'ayons pas fait sonner, de peur que cela n'esmeut les humeurs de mes- sieurs les financiers de vouloir ci après exiger le reste, car ce sont des gens grandement esveillés pour telles occasions. L'autre motif est que les Docteurs limitent le chap. Clericis^ in 6. de Immimitate Ecclesiarum, a ce qu'il n'opère pas es cas de quelque grande nécessité publique ; car alhors, les laicz estantz espuisés et ny ayant pas loysir (1) Pour justifier leurs propres réclamations, les exemptés de la noblesse, frappés aussi par l'impôt extraordinaire (voir ci-dessus, note ( i ), p. 296), avaient sans doute reproché à TEvéque de Genève sa soumission. Le Saint répond à tous en la personne de ce gentilhomme, qu'on peut croire, avec quelque probabilité, être le collatéral Barthélémy Flocard (voir ci-après, note ( i ), p. 303). En tout cas, le correspondant de François de Sales n'est pas un ecclé- siastique, comme le suppose Migne ; l'absence du titre de « confrère » suffit à le prouver. (2) Voir ci-dessus, Lettre mccxlvii, p. 295. (3) Le 14 février 1607, le Nonce de Turin, M^"" Costa, avait intimé à tous les bénéficiers de Savoie de payer la double décime en 1607, 1008 et 1609. Au mois de juillet suivant, Paul V accordait encore au duc Charles-Emmanuel les décimes pendant trois ans. (Cf. tomes XII, note ( i ), p. 276, et XIII, Lettre ccclxxx, p. 2îi.)  Année 1616 301 de recourir au Pape, l'Evesque peut ordonner une contri- bution aux clercz de son diocacse, ainsy que remarque Sylvester en sa Somme ^ verbo Immimitas, primo [cap.,] § 20, qui incipit : u Ouartum. De concernentibus, » suivy par le Père Joan. Azor, Jésuite, lib. V Institutio- num moralium^ c. 13, § « Octavo quaeritur, » qu'il faut lire et peser, car il nous a semblé qu'il parloit en nostre propre cas (0. Joint qu'icy on ne traite pas d'imposer ni par voye de prest ni autrement, puisque ce n'est qu'un simple secours pour un cas particulier et qui ne tire nulle conséquence. Voyla donq nos fondemens, sur lesquelz nous avons accordé, contre nos propres commodités, ce que Son Altesse desiroit, et moy le premier ay payé ma quote en blé, quoy que je n'abonde pas. Pour le reste, je ne manqueray pas de rendre auprès de Monseigneur le Prince ( = ), tesmoignage de l'estime que j'ay tous-jours faite de la grandeur de vostre vertu, Ihors ( r ) La célèbre Bulle Clericis laicos de Boniface VIII, promulguée le 25 février 1296, à Toccasion des exactions des princes, et insérée en 1298 dans le Sexte, ou Liher sextiis Decretalium (cap. m, lib. III, De immunitate ecclesia- rum, tit. 23), défend, sous peine d'excommunication, aux clercs de servir aux laïques, et aux laïques d'exiger des clercs, « sans l'assentiment du Saint-Siège, » des impôts et subventions atteignant les biens ecclésiastiques. Les canonistes ont tempéré la rigueur de ce principe de droit, fidèles en cela à l'esprit du législateur qui a pris soin d'expliquer lui-même, dans des Bulles postérieures, que la Constitution Clericis laicos n'était pas applicable aux cas où il y aurait nécessité urgente, François de Sales se réclame en particulier de deux auteurs : le Dominicain italien Sylvestre Mazolini et le Jésuite espagnol Jean Azor. Le premier, dans sa Sutnma Summarum, ou Sylvestrina Summa, publiée en 1516 et souvent rééditée au cours du xvi^ siècle, note la difficulté qui se présente au sujet de l'immunité : § Quartum. De concernentibus autem pietatem, ut est instruciio pontium et viarum, dubitatur. (Pars secunda, éd. de Lyon, 1553, p. 19.) Après avoir signalé les divergences des anciens canonistes et fait ressortir l'opinion commune touchant l'immunité absolue du clergé en matière d'impôt, il propose quelques « distinctions » et remarque spécialement que l'évêque, en cas de nécessité, est libre de contribuer aux besoins publics. — Le P. Azor rapporte brièvement les autorités et la solution de Sylvestre. Il suffira, pour préciser la référence donnée par notre saint Docteur, de reproduire l'énoncé de la ques- tion : § Octavo qnœritur. An valeant laicorum statuta. ut clerici una cuni laicis aliquid contribuant ad rejicienditm fontetn, puteum, t)ontem, viam, portas vel muros urbis communes? (Institntiones morales, éd. de Cologne, 1602, tom. I, al. V, cnp. xiir, pp. ■;62 seq.) (2) Le prince de Piémont.  302 Lettres de saint François de Sales que nous aurons le bien de l'approcher ; car je suis d'un cœur entier, Monsieur, Vostre plus humble, très asseuré serviteur, France E. de Genève. 31 octobre 1616. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Lyon-Fourvière.  MCCLII A MADAME DE LA FLÉCHÈRE Aimable invitation de François de Sales à la destinataire. Annecy, [octobre ou novembre 1616 (i).J Ma très chère Fille, Je me suis advisé des hier qu'il sera bon que, venant a Sainte Claire (2)^ devant et après vous venies vous chauffer avec nous, et disner, et tout ; car cela nous fera grand bien a tous, et de mesme quand vous viendres voir la mayson. Mais je vous advertiray du jour quant a ce second point, et vous m'advertires quant au premier. Je prie Nostre Seigneur que, de plus en plus, il nous fortifie en la resolution de ne vivre que pour son tressaint amour. Bonjour, ma très chère Fille mienne. ( r) Nous ne donnons l'adresse et la date de ce billet que sous toute réserve. Le ton affectueux et familier de ces lignes semble désigner M"" de la Fléchère, et l'on peut croire que la maison à visiter était celle que la nouvelle veuve devait occuper à Annecy, où ses amis lui conseillaient de se fixer. Ou bien, la destinataire serait-elle la baronne de Chantai quand, de fin avril à fin mai 1610, elle séjourna au château de Thorens ? La maison serait alors celle de la Galerie. Cette supposition n'est pas improbable. (3) Le couvent de Sainte-Claire d'Annecy.  Année 1616 303  MCCLIII A M. BARTHÉLÉMY FLOCARD (0 Préliminaires de la paix. — Prochain départ du Saint pour Grenoble. Annecy, 7 novembre 1616. Monsieur, Je vous remercie très humblement de la peine que vous aves prise de m'escrire pour un si bon sujet. Il y a troys jours que Ton nous parle de cet accommodement (2), et chacun l'accommode a sa guise et selon que la praeoc- cupation des affections suggère. Dieu, par sa bonté, nous (i) Le 18 août 1648, déposant au Procès de non-culte pour la canonisation de saint François de Sales (ad aum interrog.), Barthélémy Flocard se dit âgé de soixante et onze ans, fils de '( noble et spectable Guillaume Flocard et de noble damoiselle Péronne-Amédée de Lonnay, » docteur en droit de l'Académie de Bordeaux. En 1603, et le 15 février, il signait son contrat de mariage avec Claudine Viallon de la Pesse « femme d'un mérite si rare, qu'on la proposoit... comme un modèle achevé à celles de son sexe, car n'en aiant aucune des foi- blesses, elle en possedoit toutes les bonnes qualitez. » (Les Vies de plusieurs Supérieures... de U Visitation, par la Mère de Chaugy, Anneci, Humbert Fontaine, 1693: Vie de la Mère Fr. -Agnès Flocard.) L'un et l'autre eurent pour directeur de leur conscience et pour ami le grand Evêque de Genève, qui tint sur les fonts du baptême l'une de leurs filles, Françoise, plus tard Reli- gieuse et Supérieure de la Visitation d'Annecy. Dès le i^*" juillet i6og, M. Flocard avait reçu des lettres de noblesse, mais ces premières patentes furent perdues ; celles de 1628 et 1633 demeurèrent sans effet par suite de diverses circonstances. La régente Marie-Christine en accorda de nouvelles (après le 4 octobre 1638), dans lesquelles elle déclare que son « féal conseil- lier... s'est rendu tousjours bien méritant de telles grâces par ses services continus despuis environ quarente cinq ans, tant en qualité de maistre des Comptes en nostre Chambre de Genevois que de président en icelle, et de collatéral en nostre Conseil dudict Genevois. >» (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J. Vuy .) (2) Après la bataille du 26 octobre, on parla aussitôt d'un « accommode- ment » entre Victor-Amédée et le duc de Nemours ; il ne fut signé que le 14 novembre (voir ci-dessus, note (4), p. 284), Peut-être aussi le Saint avait-il quelque connaissance des démarches tentées par le Cardinal Ludovisi, nonce extraordinaire auprès de Charles-Emmanuel, et M. de Béthune, ambassadeur extraordinaire de France, pour la paix définitive entre la Savoie et l'Espa- gne ; mais les propositions faites à don Pedro de Tolède le 27 octobre, n'aboutirent à rien.  304 Lettres de saint François de Sales donne une vraye paix, en laquelle il soit servi et honnoré d'un chacun. J'espère d'aller bien tost faire la révérence a Son Altesse (0, car voyci le tems de l'Advent qui m'appelle a Grenoble, ou je ne dois m'acheminer qu'après avoir demandé les commandemensd'icelle (-) ; et j'auray alhors le contentement de vous voir et d'apprendre plus parti- culièrement les circonstances de ce traitté, la nouvelle duquel me fait escrire un mot a monsieur de Monthouz (3), affin quil face expédier l'affaire des Dames de la Visita- tion tandis que le beau tems dure et qu'on peut prendre la mesure des bastimens (4). Dieu vous bénisse, Monsieur, et je suis de tout mon cœur et sans fin, Vostre plus humble, très affectionné serviteur. Francs, E. de Genève. VII novembre 16 16. Si monsieur le collatéral de Quoex est encor la (5), je vous supplie quil sache par vostre courtoysie que je le salue humblement et très affectionnement. A Monsieur Monsieur Flocard, Collatéral au Conseil de Genevoys. Revu sur l'Autographe conservé au Collège municipal d'Alassio (Nice). ( I ) A cette date, le prince de Piémont était encore au camp de Ballon (voir ci-dessus, note ( i ), p. 296). (2) Ce fut le 23 ou le 24 novembre que François de Sales partit pour Grenoble. (Cf. ci-après, note (i), p. 312.) (3) Probablement Claude de Monthoux (voir ci-dessus, note ( i ), p. 283). (4) Voir Lettre mccxxxix et la note ( i ), p. 282. On allait reprendre la construction du monastère, interrompue par la guerre civile. (y) Claude de Quoex, collatéral au Conseil de Genevois; il devait être alors auprès du prince, comme aussi Flocard.  Année 1616 305 MCCLIV A MADAME GUILLET DE MONTHOUX (O Remplir son devoir de bon cœur, par amour, mais sans empressement. — Grand prix de la paix dans une famille. — Faire ce que Ton peut, et laisserje reste à Dieu. Annecy, 10 novembre 1616. Encor ne vous escris je pas a loysir, ma très chère Fille, bien que je responde tard a vostre lettre. Or sus, vous voyla donq dans le mesnage, et il n'y a remède. Il faut que vous soyes ce que vous estes : mère de famille, puisque vous aves un mary et des enfans, et il le faut estre de bon cœur et avec Tamour de Dieu, ains pour l'amour de Dieu, ainsy que je le dis asses clairement a Philothee *, sans s'inquiéter ni empresser que le moins * Partie m. chap. qu'il sera possible. Mais je voy bien, chère Fille, qu'il est un peu malaysé d'avoir soin du mesnage en une mayson ou il y a mère et père ; car je n'ay jamais veu que les pères, et sur tout les mères, layssent le gouvernement entier aux filles, encor que quelquefois il seroit expédient. Pour moy, je vous conseille de faire le plus doucement et sagement que vous pourres ce qui vous est recommandé, sans (i) Jusqu'ici, tous les éditeurs ont donné pour adresse : A une Coiisùie. Nouscroyons pouvoir désignerpresqueaveccertitudeClaire-Marie de Maillard- Tournon, mariée depuis 1609 à Gabriel Guillet de Monthoux, On se sou- vient qu'en recevant la bénédiction nuptiale, après les dispenses venues de Rome (1615), elle s'était placée spécialement sous la direction de l'Evêque de Genève (voir ci-dessus. Lettre mcxvi, et la note (3), p. 64). Les premières années de son mariage, la jeune femme dut vraisemblablement habiter le plus souvent chez sa mère pendant les fréquentes absences de son mari, comman- dant d"une compagnie de chevau-légers. A partir de 1616, M"^* de Monthoux paraît s'être établie dans la maison de ses beaux-parents qui, lors du contrat dotal de 1609, avaient cédé tous leurs biens à Gabriel, leur fils aîné, sous la seule réserve de leur entretien personnel. (Voir tome XV, note (2), p. 372.) Cette clause pouvait créer entre tous une situation délicate. Lettres Vii «o  xxxviii.  3o6 Lettres de saint François de Sales jamais rompre la paix avec le père (0 et cette mère (=) ; car il vaut mieux que les affaires n'aillent pas si bien, et que ceux a qui Ton a tant de devoir soyent contens. Et puis, si je ne me trompe, vostre humeur n'est pas faite pour la conteste. La paix vaut mieux qu'une che- vance. Ce que vous verres pouvoir estre fait avec amour, il le faut procurer ; ce qui ne se peut faire que par desbat doit estre laissé, quand on a affaire avec des personnes de si grand respect. Je ne doute point qu'il ne se passe des aversions et répugnances en vostre esprit ; mays, ma très chère Fille, ce sont autant d'occasions d'exercer la vraye vertu de douceur ; car il faut faire bien, et saintement, et amou- reusement ce que nous devons a un chacun, quoy que ce soit a contrecœur et sans goust. Voyla, ma très chère Fille, ce que je vous puis dire pour le présent, adjoustant seulement que je vous con- jure de croire fermement que je vous chéris d'une dilec- tion parfaite et vrayement paternelle, puisqu'il a pieu a Dieu de vous donner envers moy une confiance si entière et filiale; mais continues donq bien, ma très chère Fille, a m'aymer cordialement. Faites bien la sainte orayson ; jettes souvent vostre cœur entre les mains de Dieu, reposés vostre ame en sa Bonté et mettes vostre soin sous sa protection, soit pour le voyage du cher mary (3), soit pour le reste de vos ( I ) Le beau-père de la destinataire, Janus Guillet, fils de Louis, seigneur de Monthoux, et de Claudine de Mouxy. Vaillant guerrier et vaillant catholi- que, ce gentilhomme soutint dans son château de Monthoux un siège célèbre, et préféra la perte de ses biens à la perte de sa foi. Voyant sa demeure brûlée par les hérétiques, il fut contraint, pour sauver sa famille de leur fureur, « de se retirer dans les bois où il souffrit extrêmement pour la cause de la religion. Dieu, en recompense, luy donna des enfants si accomplis, qu'ils ont acquis, par leur mérite, plus d'honneur et de biens que la disgrâce de leur fortune ne leur en avoit enlevé, quoy qu'ils eussent perdu la plus grande partie de leurs titres dans Tincendie de leur terre. » (Notice de la Mère P.-J . de Monthoux, insérée dans la Circulaire de la Visitation de Blois, 30 novembre 1672.) Janus de Monthoux avait épousé (contrat dotal du 18 décembre 1568) Jeanne- Aimée de la Fléchère ; son testament est du 30 septembre 1618. (2) Jeanne-Aimée de la Fléchère, femme du précédent. Elle était fille de François-Philibert de la Fléchère, seigneur de MoUiens, Vanzy, etc., et de Claudine de Maillard. (3) Il allait sans doute à la guerre.  Année i6i6 307 affaires. Faites bien ce que vous pourres, et le reste laisses le a Dieu, qui le fera ou tost ou tard selon la disposition de sa providence. Je voudrois bien sçavoir qui sont ces curés desquelz on murmure contre moy et mon frère ( ; car, tant qu'il nous sera possible, nous tascherons de remédier aux desordres, s'ilz se treuvent. Je suis cependant bien ayse que le vostre soit honneste homme et sage (2). En somme, soyes a jamais toute a Dieu, ma très chère Fille, et je suis tout en luy, Vostre plus humble cousin et serviteur très affectionné, Franç% E. de Genève. Ce 10 novembre 16 16. ( I ) Jean-François, vicaire général du saint Evéque. (2) Philibert Sallier, natif de Reignier et tonsuré en 1578, avait reçu le 21 janvier 1616 l'institution pour la cure de Monthoux, après avoir desservi, de 1 588 au 1 5 janvier 1609, celle d'Etrembières. Il mourut en décembre 1627. (R. E.)  MCCLV .\ MADAME DE LA FLÉCHÈRE Une lettre écrite à Timproviste. — Comment la Mère de Chantai désignait Mme de la Fléchera. — « Tout pour Dieu : l'amour et le cœur qui ayme. » Annecy, [novembre 1616 (i).] Cette digne porteuse vous dira comme je vous escris a rimprouveiie, ma très chère Fille, et si soudainement que je ne sçai que dire, sinon que vous seres la très bien venue, que c'est un grand bien a nostre Charles ( = ) d'avoir un bon maistre, que je suis plus vostre que mien et ne cesse jamais de vous souhaiter mille et mille faveurs du (i) Deux questions auxquelles le Saint fait allusion dans ces lignes nous permettent de proposer une date : la prochaine arrivée de M"^* de la Fléchère à Annecy, et le départ de son fils Charles allant continuer ses études à Lyon. Ce double déplacement a dû se produire au début de l'hiver 1616. (2) Charles de la Fléchère (voir tome XV. note (2), p. 86).  Apoc, V, 13.  308 Lettres de saint François de Sales Ciel, sur tout le saint, puissant, doux et tranquille amour de nostre Dieu. Nostre madame de Chantai vous désire. La dernière fois qu'elle me parla, vous voulant nommer et vostre nom ne luy venant pas en bouche : <( La chère seur, » dit elle, « qui vous ayme si parfaitement. » Je vous demande qui eût entendu ce langage sinon moy, qui vous nommay d'abord. Or sus, tout est pour Dieu : l'amour et le cœur qui ayme. A Dieu soit honneur, gloire et louange I Tim., I, 17 ; éternellement *. Voyla une lettre pour la seur(0, qui est vielle, mais ell'a besoin de l'avoir ; je la luy envoyay par un prestre de Seyserieu qui, l'ayant treuvee partie, me la rapporta, et maintenant je ne puis luy escrire. Vive Jésus ! A Madame Madame de la Flechere. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. (i) Jeanne-Bonaventure de la Forest. Religieuse à Bons. (Voir tome XIV, note (i), p. 204.)  MCCLVI AU PRINCE DE PIÉMONT, VICTOR-AMÉDÉE (0 Entremise de l'Evêque de Genève en faveur d'un ami. Annecy, 18 novembre 16 16. Monseigneur, Je supplie très humblement Vostre Altesse de se resou- venir de la faveur qu'il luy a pieu d'accorder a monsieur le Président de Sautereau (2), sur la recommandation (i) Une lettre du président Favre au prince de Piémont, en date du 22 janvier 1617, rappelle la grâce qu'il avait accordée à M. de Sautereau pen- dant que Son Altesse était « par deçà ». La fausse adresse des éditions précé- dentes : Au Duc de Savoie, est rectifiée d'après cette indication. (2) François de Sautereau fut pourvu le 15 décembre 1607 de la charge de président au Parlement de Dauphiné, en remplacement de Jean de la Croix  Année 1616 309 que monsieur le mareschal Desdiguieres (0 luy en a faite. Et continuant d'invoquer Dieu sur Vostre Altesse, je luy fay très humblement la révérence, comme estant, Monseigneur, Son très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. Annessi, le xvill novembre 1616. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Biblioteca Civica. de Chevrières, nommé évêque de Grenoble. Il était fils de Jeanne de Salvaing et de Michel de Sautereau, juge d'Avalon et de Bayart, puis juge royal de la ville de Grenoble. Marié depuis le 24 avril 1583 à Marie Gibert. dame de Chasse, il en avait eu plusieurs enfants; entre autres, Guillaume, que nous retrouverons dans la suite, Marie, qui épousa Charles de Verdonney, et Anne-Catherine, plus tard Religieuse à la Visitation de Grenoble. Le président de Sautereau résigna son office (1617) en faveur de Gaspard Béatrix- Robert, et décéda quelques mois après. (Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné , Lyon, 1867.) C'était un ami d'Antoine Favre, et, par lui, il avait gagné aussi l'amitié de l'Evèque de Genève, qui Thonorait d\« une affection toute particulière... pour sa vertu et pieté. ^> (Lettre du 21 juin 1617 à la présidente de Sautereau.) La lettre du 17 janvier 1617 expliquera quelle est l'affaire dont il s'agit ici, et la faveur promise au gentilhomme dauphinois. ( I ) François de Bonne, duc de Lesdiguières (voir tome XII, note ( 4 ), p. 100).  MCCLVII A M. ANNIBAL BOSCHI (0 Aumônes du prince de Piémont aux Clarisses et aux Cordeliers d'Annecy. Un galérien qui doit payer sa grâce par des œuvres pies. Annecy, 18 novembre 1616. Monsieur, Il pleut a Son Altesse ( = ) de me commettre pour voir Testât des bastimens de Sainte Claire de cette ville, et (i) Secrétaire du duc de Savoie dès 1598, conseiller d'Etat et secrétaire des finances en 1608, Annibal Boschi devint ensuite « premier secrétaire d'Estat et des commandements de Monseigneur le Serenissime Prince de Piémont. » (Lettre du président Favre au destinataire.) C'est à ce titre qu'il avait accom- pagné Victor-Amédée à Annecy. (2) Le prince de Piémont.  3IO Lettres de saint François de Sales sur le rapport que je luy fis de la ruyne dont ilz estoyent menacés, sa bonté s'estendit a leur vouloir donner 300 du- catons pour la réparation nécessaire (O. Et pour l'assi- gnation de cette somme-la, monsieur de Monthouz (2) me dit avant hier que Son Altesse avoit accordé le rappel des galères en faveur d'un certain notaire ou châtelain, que je pense estre du quartier d'Aiguebelle (3), a la charge quil donneroit les troys cens ducatons dont il est question pour cett'œuvre pie, et qu'il serviroit deux ans aux bastimens de la Sainte Mayson de Thonon. C'est pour- quoy, ce bon Père confesseur des Dames de Sainte Claire va pour voir s'il pourra tirer l'asseurance de ladite somme (4) ; en quoy je vous supplie très humblement de l'assister, comme aussi de luy faire délivrer le mandat des trente vaisseaux que saditte Altesse a ouctroyé pour le couvent de Saint François (5). Je sçai que vostre pieté vous portera asses a tous ces bons offices, sans que j'y employé mon intercession ; mais puisque elle m'est demandée, je ne la puis refuser, mesme sachant que vous me faites Ihonneur de m'aymer, (i) Déjà au 24 octobre 1615, le Registre des finances (Turin, Archives de TEtat) mentionne une aumône de 50 ducatons faite par Victor-Amédée aux pauvres Clarisses d'Annecy. Malheureusement, le Registre du second semestre de 1616 est perdu. (2) Sans doute le sénateurGuillet de Monthoux (voir tome XV, note (3), p. 55}. ( 5 ) Le président Favre écrit au prince de Piémont, à la date du 4 septem- bre 1616 : « J'envoye a V. A. S. la lettre du Sénat pour la grâce du s^ du Molard. » Or, les du Molard étaient de la Maurienne, où se trouve aussi « le mandement d'Aiguebeile. » Ce gracié du Sénat et le rappelé des galères seraient-ils un même personnage ? (4) Il est possible que le P. Saulnier remplît déjà à cette époque les fonc- tions de confesseur des Clarisses. (Voir ci-dessus, note (2 ), p. 281.) Sans doute il devait se rendre à Chambéry où, d'après le Registre des Délibérations municipales d'Annecy, le prince se trouvait alors. (^) Fondé par Pierre de Lambert, évêque de Caserte, ce couvent avait été d'abord une maison de Célestins. Mais ces Religieux ne l'occupèrent qu'envi- ron douze ans et furent remplacés, le 23 mai 1535, par les Franciscains de l'Observance, depuis appelés Cordeliers. L'église que ceux-ci construisirent servit d'asile aux Chapitres des Machabés et de Saint-Pierre (cf. le tome pré- cédent, note (i), p. 85); en 1568, elle devint même la cathédrale d'emprunt des évêques exilés de Genève, et elle est actuellement celle des évêques d'Annecy. Le nombre des Cordeliers fut ordinairement de vingt au couvent de cette ville; ils le quittèrent en 1772 et se retirèrent à Chambéry. (D'après Mercier, Souvenirs hist. d'Annecy. Burdet, 1878, chap. xvi,)  Année 1616 311 lequel je vous conjure de me continuer, ainsy que je veux estre a jamais, Monsieur, Vostre plus humble, très aflfectionné serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XVIII novembre 16 16, Annessi. A Monsieur Monsieur Boschiz, Conseiller d'Estat et Secrétaire des commandemens de S. A. Revu sur l'Autographe appartenant à M. le vicomte de la Villarmois, au château de Montgoger (Indre-et-Loire).  MCCLVIII AU PRINCE DE PIÉMONT, VICTOR-AMÉDÉE (0 La reconnaissance du Saint s'unit à celle des Pères Barnabites. Annecy, 19 novembre 1616. Monseigneur, Ces Pères vont pour rendre grâces a Vostre Altesse du soin qu'elle a de bien establir leur Congrégation en ce pais (2). Et par ce que je voy combien Dieu en sera glorifié et le peuple édifié, j'en remercie très humblement de rechef Vostre Altesse avec eux, la suppliant de con- tinuer en ce tressaint zèle, comme je ne cesseray jamais de luy souhaiter la perfection des grâces célestes, non plus que d'estre. Monseigneur, Très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur de Vostre Altesse, France E. de Genève. Annessi, le 19 novembre 161 6. Revu sur l'Autographe conservé à Turin.. Archives de l'Etat. (i) L'adresse Au Duc de Savoie donnée jusqu'ici à ce billet est erronée ; le vrai destinataire est le prince de Piémont qui, en cette année 1616 surtout, avait témoigné tant de zèle pour l'établissement des Barnabites dans le diocèse de Genève. (Cf. ci-dessus, note(i), p. 177.) (2) Il est difficile de désigner les Religieux députés auprès de Victor- Amédée ; on peut cependant proposer le Supérieur du collège d'Annecy, D, Simplicien Fregoso, et celui de la Maison de Thonon, D. Fulgence Chioccari,  3 1 2 Lettres de saint François de Sales  MCCLIX A MADAME DE LA FLÉGHÈRE Une quittance à retrouver. — Visite de M*"* de Blonay. Annecy, 19 novembre 1616. Ma très chère Fille, Je feray selon le contenu de vostre lettre, si l'occasion s'en présente par la venue de M. de Charmoysi, et encor, passant a Chamberi (0, je confereray avec M. le Prési- dent (2) pour sçavoir ce qui se pourra faire. J'ay des-ja un peu cherché la quittance de Bonfilz (3) et ne l'ay sceu treuver ; mon frère (4) dit quil ne l'a point aussi. May s je chercheray tant, que nous la treuverons, puis que ja- mais je n'ay perdu aucun papier d'importance. Vous sçaures tous-jours de nos nouvelles et par mes lettres et par celles de nostre Mère (5). Nous avons eu icy madame de Blonnay (^) qui estoit venue voir sa seur (7), et s'en est retournée aujourdhuy . Dieu vous veuille a jamais bénir, ma très chère Fille, des bénédictions de son tressaint amour. Je suis en luy, d'un cœur non pareil, Vostre très humble serviteur et père. XIX novembre 161 6. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. (i) En se rendant à Grenoble pour y prêcher TAvent. Le 23, le Saint est encore à Annecy, où il donne des lettres diinissoriales; il dut partir ce jour- là, ou le lendemain au plus tard, puisque le premier sermon de sa station se fit le 27. (2) Antoine Favre. (3) Horace Bonfils, trésorier du prince de Nemours. (Voir ci-dessus, note (4), p. 194.) (4) Jean-François de Sales. (5) La Mère de Chantai. (6) Marie d'Avisé, mariée à Jacques de Blonay. (Cf. ci-dessus, note ( i ), p. 166.) (7) Sœur Marie-Gasparde d'Avisé, novice à la Visitation.  Année 1616 313 MCCLX A M. JEAN MASSEN (0 (inédite) Recoiuniandation en faveur d'un étudiant en théologie. Annecy, 23 novembre 1616. Monsieur, Estant obligé de souhaiter radvancement aux lettres et a la vertu de Nicolas Grillet, qui m'appartient en parentage (2), et le voyant maintenant sur les rangs pour entrer au cours de la sainte théologie, je supplie vostre charité de luy estre propice et l'assister de vostre soin et faveur spéciale, affin quil puisse reuscir tel que nous desirons le voir un jour, propre a servir Dieu et la sainte Eglise en ce diocèse, ou il importe tant, a cause du voy- sinage. Et par ce que vostre zèle vous donnera asses de mou- vement a ce bon œuvre, sans que j'y employé davantage de prières, je ne m'estendray pas plus avant, ains vous asseurant de mon humble affection a vous honnorer, et ( I ) L'ancienne copie gardée à Turin porte comme adresse : A Monsieur Tambay, Président au Collège de Savoye. Or, en i6iô, Louvain ni Avignon n'avaient de personnage de ce nom dans leurs collèges savoyards. Nicolas Grillet ayant commencé ses études à Louvain, il est presque certain quil les poursuivit dans la même ville. Il faut donc conclure que le nom du destina- taire a été ajouté après coup par un copiste distrait, et ignorant la mort de Jacques de Bay, arrivée en 1614. Depuis cette époque. Jean Massen ou Massin, licencié en théologie, était président du collège. (Voirie tome précédent, Appendice II, pp. 416, 417.) Déjà il avait occupé à la Pédagogie de la Fleur de lis les postes de sous- régent et de régent pendant environ quatorze ans, et celui de recteur de l'Académie, du mois d'août 1613 jusqu'en 1614. Le 14 mai 1627, on le trouve chanoine de la cathédrale de Namur, Il mourut en 1636, (D'après Reusens, Documents relatifs à l'histoire de VUniversité de Louvain, 143^-1^9^, et les Analectes pour servir à l'histoire ecclésiastique de la Belgique, Louvain, 1886, tome XX.) (2) Nicolas Grillet était fils de Claudine de Sales, cousine-germaine du saint Evêque. (Voir tome XV, notes (i) et (2), p. 274.)  314 Lettres de saint François de Sales vous désirant mille et mille bénédictions, je demeureray, Monsieur, Vostre plus humble, très affectionné confrère et serviteur en Nostre Seigneur, FRANÇ^ E. de Genève. XXIII novembre 161 6, Annessi. A Monsieur Président au Collège de Savoye. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Turin.  MCCLXI A M. RENÉ GROS DE SAINT-JOYRE (O Remerciements et félicitations pour la communication d'un ouvrage. La M tare » que la modestie du Saint y découvre.  Annecy, 23 novembre 16 16.  Monsieur,  Vous me favorises trop de me communiquer si libé- ralement vos beaux ouvrages. Celuy cy que je vous ( I ) La famille des Gros, seigneurs de Saint-Joyre est-elle la même que celle du Pape Clément IV, appelé dans le siècle Guy Gros? Plusieurs histo- riens l'ont affirmé, et probablement, non sans raison. D'après eux, César Gros, écuyer, conseiller et maître d'hôtel des rois Charles IX et Henri III et du duc de Savoie, vint le premier s'établir dans le Lyonnais. Il eut pour fils Jean-Antoine, qui épousa Marie Richie, De ce mariage naquit, vers 1570, René, filleul de René de Biragne, gouverneur de Lyon. Ayant commencé ses études au collège de la Trinité de cette ville, il les termina à l'Université de Padoue. C'est là qu'il publia son premier recueil de poésies, en 1590. Il se trouvait donc dans la savante cité en même temps que François de Sales; mais les deux jeunes gens ne se connurent pas alors, puisque M. de Saint- Joyre déclare en 1616 ne « cognoistre que par lettres » le saint Evêque de Genève. (Voir à l'Appendice II.) Rentré en France après la mort de son père, et possesseur d'une grande fortune, René Gros l'employa d'abord à la recons- truction du couvent des Cordeliers de l'Observance, à Lyon. Son facile talent poétique lui valut l'amitié et l'estime d'éminents personnages et de plusieurs hommes de lettres; d'aucun il ne reçut les éloges avec autant de plaisir que de notre Saint. Claude Clément, S. J., l'auteur d'une Vie latine de Clément IV (Lyon, 1624), s'adressantà René Gros : « Quel besoin, » dit-il, « d'ajouter un écrit  Année i6i6 315 renvoyé (O, tesmoigne combien vous estes riche d'inven- tions et d'affections pour bien cultiver la pieté. Seulement y voy-je une tare : que vostre désir d'animer un chacun au saint amour, vous a rendu trop favorable a la bonne volonté que j'ay eue d'y exciter les nations de la langue françoise, par le Traitté que j'ay nagueres mis en lu- mière, lequel je suis pourtant bien aysequ'il vous aggree, estimant que vostre jugement luy pourra donner accès et rendre ses documens plus utiles a plusieurs âmes (2). Vives heureux en ce divin amour. Monsieur, et con- tinues d'aymer Vostre très humble serviteur, Francs E. de Genève. XXIII novembre 1616, Annessi. de ma main aux nombreuses lettres par lesquelles un homme au-dessus de toutes louanges, François de Sales, TEvêque de Genève, vous a complimenté et s'est félicité à son tour des suffrages que vous avez donnés à ses œuvres ? >» Que sont devenues, hélas ! ces « nombreuses lettres »? — René Gros de Saint- Joyre mourut vers 1660. (D'après Michaud, Biographie universelle, supplé- ment, tome LXVI, Paris, 1839.) ( I ) C'était le manuscrit de La Mire de vie a Vamoiir parfaict, Lyon, Claude Cayne, 1614 (1), poème en vers français et en octaves, dédié à lAbbesse du royal Monastère de Saint-Pierre de Lyon, Marie de Lévis, dont le nom anagrammatisé a fourni à l'auteur le titre de son livre. René Gros célèbre dans ce poème les grâces, la beauté et les hautes vertus de l'illustre Abbesse, et il l'engag* à n'avoir toute sa vie d'autre amant que Jésus. Voir à l'Appendice I, la lettre du seigneur de Saint-Joyre qui accompa- gnait l'envoi de son ouvrage. (2) Voir à l'Appendice II, le texte auquel le saint auteur fait allusion.  ( I ) Cette date est certainement une erreur de typographie, puisque la dédicace porte : « A Belmont, ce 12 novembre 1616, jour de Sainct René, » et les approbations de Robert Berthelot et de Thomas de Meschatin La Paye sont du 22 décembre 1616.  3i6 Lettres de saint François de Sales MCCLXII A LA MÈRE DE CHANTAL Comment procéder pour l'achat de maisons nécessaires à l'agrandissement du monastère de la Visitation. Annecy, [15-23 novembre 1616 (i).] Voyla les lettres ; mais j'ay oublié de vous dire, ma très chère Mère, que quand monsieur le Président (*) vous parlera des maysons et que vous viendres a traitter de l'estimation des maysons, il seroit bon d'obtenir de luy qu'assemblant les expertz, il leur face prester ser- ment, et leur fasse prendre les resolutions, parties absentes. Bon soir, ma très chère Mère, Dieu vous bénisse. Si je puis, demain je vous iray dire une Messe. Revu sur l'Autographe qui appartenait aux PP. Missionnaires de Saint-François de Sales, à Annecy. (i) Obligées de poursuivre la construction de leur monastère, les Religieu- ses de la Visitation avaient besoin pour cela de maisons appartenant au procureur fiscal Barfelly. Il fallut plusieurs mois pour amener le proprié- taire à consentir à des conditions raisonnables ; les pourparlers commencés vers la fin de 1616 aboutirent seulement au mois d'août 1617. Il semble que ce billet date du début des négociations; c'est pourquoi nous le plaçons avant le départ du saint Evéque pour Grenoble, sans néanmoins vouloir absolument exclure janvier, avril, mai de l'année suivante. (2) Probablement le président de la Chambre des Comptes du Genevois, qui était alors Jacques Pelard, seigneur du Noyret. (Voir le tome précédent, note (3), p. 23.)  Année i6i6 317  MCCLXIII A LA MÊME (inédite) Débuts de l'Avent à Grenoble. — Messages d'un père pour ses filles. Grenoble, 3 décembre 1616. Ce ne sont jamais que troys paroles de ce Père ; certes, ma très chère Mère, il n'a pas de loysir pour plus. Il commence seulement a s'apprivoyser parmi ce peuple (0. Dans quelque tems il vous escrira, sil y a chose qui vous puisse consoler *, car je vous asseure, * Vide Epist. seq. ma très chère Mère, que ce pauvre Père la vous porte dans son cœur comme son esprit propre. Voyla des lettres pour vous. Je salue la très chère toute bienaymee Marie Aymee (2) ; elle sçait bien qu'elle est la fille de mon cœur, et l'autre chère fille Françon (3), et toutes nos chères Seurs. Dieu soyt a jamais, ma très chère Mère, nostre très unique tout. Amen. Samedi, m décembre 161 6. A ma très chère Mère, Nostre Mère. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Cracovie, ( I ) Le Parlement du Dauphiné, heureux d'avoir obtenu le grand Evêque de Genève pour prédicateur de l'Avent dans son église de Saint-André, avait député M. de Sautereauet un autre conseiller pour aller le prendre à Annecy. L'accueil que reçut le Saint fut digne de sa réputation, et son talent oratoire comme sa vertu, loin de la démentir, répondirent à l'attente de la société greno- bloise. On écouta ses sermons avec un intérêt croissant; tous eurent pour thème le cantique de Zacharie : Benedictus. (Voir tome VIII, pp. 202 seq.) (2) Marie-Ainiée de Rabutin-Chantal, baronne de Thorens, belle-sœur du Saint. (3) Françoise de Rabutin-Chantal.  3i8 Lettres de saint François de Sales  MCCLXIV A LA MÊME (inédite) Une lettre faite entre deux sermons. — Les fruits spirituels qui se préparent pour le prochain Carême. — Salutations et souhaits affectueux. Grenoble, 8 décembre 1616 (i). C'est tous-jours quand je puis, ma très chère Mère, que je vous escris, et voyci la quatriesme (2), aussi courte que les autres, comm'estant escritte entre deux sermons : Tun que je viens de faire en Teglise cathédrale, delà- quelle Nostre [Dame] est le Patron (3), et l'autre que je vay faire dans trois heures, en un'eglise, hors ville, ou le tiltre est avec Indulgence pleniere (4). Nos sermons vont asses bien. Hier nous commençâmes a confesser quinze ou vingt dames, très dévotes pour la plus part, et j'entrevoy, ce me semble, un peu de fruit pour le Caresme (5). Ce sont nos nouvelles, et je bénis Dieu pour les vostres. Je salue vos hostesses du tems de vostre lettre, si vous ( i) La seule mention de Marie-Aimée, morte en 1617, suffit à fixer le mil- lésime que ne donne pas l'Autographe. Cette lettre est évidemment de la première station d'Avent à Grenoble. (2) Des trois précédentes, nous n'avons que la lettre du 5 décembre. { 3 ) Œuvre architecturale antérieure au xi^ siècle, la cathédrale de Grenoble, dédiée à la Sainte Vierge, fut construite à côté et tout joignant l'église parois- siale de Saint-Hugues, consacrée primitivement à saint Vincent. (4) C'était l'église des Récollets, où François de Sales revint l'année sui- vante, à la même date, célébrer l'anniversaire de sa consécration épiscopale. Introduits à Grenoble en 1605, les Récollets avaient d'abord obtenu la cession d'un ancien hôpital, sous la condition de servir les pestiférés. En 1608, les consuls reprirent les bâtiments de l'hospice, et les Religieux, protégés et aidés par Henri IV, construisirent, en dehors de la ville, aux Granges, un couvent qui fut placé sous le vocable de l'Immaculée-Conception. Par paten- tes de janvier 161 1, Louis XIII autorisa ce transfert, en confirmant la fon- dation de son père. (Cf. Prudhomme, Hist. de Grenoble, 1888, chap. xvi.) {5) Le Saint prêcha en effet le Carême de 1617 devant le Parlement de Grenoble ; la suite de sa correspondance nous fera connaître la plupart des pieuses dames dont il parle ici.  Année i6i6 319 les revoyes, madame de Monthouz ( O et les autres. Item^ sur tout ma chère Marie Aymee, certes ma toute chère seur, de laquelle je prie Dieu vouloir estre protecteur et de son petit ( = ). Dieu soit a jamais nostre amour, ma très chère Mère, et vous comble de sa tressainte consolation. Amen. Je suis en luy vostre, tout entièrement et absolument, et, puis quil luy a pieu, comme vostre ame, vous mesme. Je suis vostre serviteur. En haste, viii décembre, jour de la tressainte Concep- tion. Je salue nos Seurset mes frères (5), ausquelz je n'escris point. A Madame Madame de Chantai, Super^ de la Visitation. Annessi. Revu sur un fac-similé de l'Autographe qui appartenait à M. le comte de Villers-Masbourg, au château de Schâloen (Limbourg Hollandais). (i) Il est difficile de dire s'il s'agit de Gabrielle Dyan, femme du sénateur Claude-Louis Guillet de Monthoux, ou de Claude-Marie de Maillard-Tournon, qui avait épousé Gabriel, cousin du précédent. Toutes deux étaient filles spirituelles du saint Evèque, mais plus spécialement la seconde. (Cf. ci-dessus, note ( I ), p. 305.) La lettre' de la Mère de Chantai à laquelle répondent ces lignes étant perdue, on ne peut désigner les autres « hostesses ». (2) Voir ci-après, la lettre du 21 janvier 1617 à la Mère Favre, p. 336. (3) Louis, Jean-François, Bernard et Janus de Sales.  MCCLXV A MO.N'SEIGNEUR FENOUILLET, ÉVÊQUE DE MOiNTPELLIER (ikédite) Le duc de Montmorency gagné par Mk"" Fenouillet à l'estime de l'Evêque de Genève, — Témoignages qu'il en donne. — Déplaisir du Saint de n'avoir pu, à son gré, le payer de retour. — Lesdiguières en route pour le Piémont. Grenoble, 17 décembre 1616. Monseigneur, Je n'ay garde que je n'employé cette si bonne commo- dité de vous bayser les mains, quand ce ne seroit que  320 Lettres de saint François de Sales pour vous remercier très humblement de l'honneur que je receus de monsieur de Montmorency (O en son passage par cette ville, puisquil me déclara que vous luy avies donné l'affection de me le faire, par l'honnorable mention que vous luy avies quelquefois fait de moy. Je suis tous- jours honteux quand je pense a l'excès de la faveur que ce seigneur me fit, et confus dequoy ayant esté a son logis pour luy faire la révérence et espié toutes les commodités qu'il pouvoit y avoir, je n'ay peu onques avoir ce bon- heur ( = ). Mais je croy que M. le Président [du Faure (3)] ( I ) Aussi célèbre par sa mort tragique qu'illustre par sa naissance, Henri II, duc de Montmorency, descendait de ceux dont le cri d'armes était : Dieu ayde au premier baron chrestien ! — Petit-fils d'Anne, le grand counétable, il était né en 1595 de Henri, premier du nom, et de Louise de Budos. Amiral à dix-huit ans, il épousait peu après la noble princesse Marie-Félice des Ursins, et recevait le gouvernement du Languedoc. Par ses qualités physiques et morales, par sa bravoure et ses succès, le jeune duc conquit des sympathies enthousiastes, et le II décembre 1630, le bâton de maréchal récompensait ses services et dou- blait son prestige. Toute sa fortune sombra dans la triste bataille de Castelnau- dary. Il avait cru, comme tant d'autres avec lui, qu'on pouvait, sans blesser le patriotisme, distinguer la cause de Richelieu de celle de la France. Fait prisonnier le i*"" septembre 1632, il montait courageusement et chrétiennement, le 30 octobre suivant, sur l'échafaud dressé devant le Capitole de Toulouse ; les supplications et les larmes des grands et du peuple avaient échoué devant l'inflexible politique du tout puissant ministre. L'inconsolable veuve de Henri de Montmorency, libre'après un an de réclu- sion de choisir sa retraite, s'enferma au monastère de la Visitation de Moulins, où elle reçut le seul soulagement que voulut sa douleur : celui de l'épancher dans le grand coeur de la Mère de Chantai. Quand un nouveau règne commença en France, Marie-Félice des Ursins obtint de faire transporter auprès d'elle les restes mortels de son époux, et lui éleva un mausolée, chef-d'œuvre de l'art italien, qu'on admire encore aujourd'hui dans l'église de l'ancien monas- tère devenue la chapelle du Lycée. (2) Le duc arriva à Grenoble le 30 novembre, le Registre des Délibérations consulaires en fait foi : « On ne fera pas de réception solennelle à M. de Montmorency qui doit arriver demain ; on se bornera à aller le saluer dans son logis, » Ceci est du 29 novembre 1616. Le 2 décembre, le nonce Benti- voglio écrit à Rome qu'il a rencontré à Lyon l'illustre voyageur en route pour le Languedoc. (3) Le nom de Favre donné par le texte que nous reproduisons, est sans doute une erreur du copiste ; car rien ne nous indique que, de Grenoble, le duc de Montmorency se rendit à Chambéry, et d'autre part, le Président du sou- verain Sénat de Savoie ne paraît pas s'être absenté à cette époque. François du Faure appartenait à la branche des Faure de la Rivière; son père, François, était procureur général au Parlement du Dauphiné. Lui-même occupa cette charge en 1594 et devint, en 1609, président à mortier. Il mourut vers 1628, après avoir résigné son office. (Cf. Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné, etc.)  >'. 22.  Année ibib jii luy aura fait sçavoir ma diligence, et néanmoins je vous supplie, Monseigneur, de luy faire sçavoir le desplaysir que j'ay pour ce sujet, et que j'ay bien conscience du respect que je doy a sa grandeur et a ses mérites, et de l'extrême obligation que j'ay a son excessive bonté. Vous aves de Tinterest en ce point, Monseigneur, puisque c'est sur l'estime que vous luy avies donnée de moy, quil m'a favorisé. « (*) Amare et sapere, vix cœlitibus concedi- tur *. » Vous luy en avies trop dit et il en a trop fait, et * Pubiius Syrus, j . ._ ^ 1 r • ^ r . Sententiac. litt. A. moy je suis demeure court et n en ay pas asses tait, faute certes d'avoir bien peu le faire. Vous sçaures toutes nos nouvelles et que M. le Mares- chal part demain et que la paix est désespérée en Pie- mont (0. Reste que je prie Dieu pour vostre prospérité, me disant a jamais, Monseigneur, Vostre très humble et très obéissant serviteur, FRANç^ E. de Genève. Ce 17 décembre 161 6. Revu sur une ancienne copie conservée à la Visitation de Montpellier.  (*) « Dans l'amour, garder la modération, c'est à peine si les dieux en sont capables. » (i) Au traité d'Asti, Lesdiguières, sous le bon plaisir de Sa Majesté très chrétienne, avait promis de secourir en personne le duc de Savoie contre les invasions du gouverneur de Milan. L'heure était venue de tenir cette promesse. Charles-Emmanuel en réclamait l'exécution, tandis que, à la cour de France, les ministres partisans de l'Espagne étaient revenus au pouvoir. Le gouverneur du Dauphiné résolut de ne prendre conseil que de lui-même, et, à la défense de passer les Alpes, il répondit au Roi par une longue lettre qui se terminait par ces paroles : « Que Vostre Majesté me pardonne donc, s'il luy plaict, de la licence que je prens pour ce voyage, lequel elle doit avoir agréable, puisque je le fais pour son service. » (Douglas et Roman, Actes et Correspondance du connétable de Lesdiguières, Grenoble 1881, tomell, p. 115.) Il partit quelques jours après, le 19 décembre.  I F.TTRE5 VII  322 Lettres de saint François de Sales  MCCLXVI A LA MÈRE DE CHANTAL (inédite) Que doit faire une âme continuellement attirée par Dieu à se reposer dans le sein de sa Providence. — Le fondement de la joie paisible et dévote. Annecy, [i6i6 (i).] Que peut on dire a Tame que Dieu a tirée il y a si long tems et attire continuellement a se reposer dans le sein de sa providence, sinon : Demeurés la, ma Fille, et vous tenes a recoy au plus secret lieu de ce saint taber- Cf. Ps. XXVI. 5. nacle *, vous laissant absolument manier au gré de Celuy qui daigne prendre soin de vous. Ayés seulement celuy de luy plaire, par cette entière dépendance et confiance en son amour, et par la suave vigilance que vous deves avoir d'avancer ses chères espouses a la pureté de son divin service, par une exacte observance, vous rendant extrêmement attentive a la douceur et support, sans crainte d'excéder en ces saintes vertus. Soyes généreuse, allègre et suave en cet exercice, et vous y treuveres abondamment les grâces de nostre bon Dieu, ainsy que je l'en prie de toute mon ame qui chérit la vostre très parfaitement. Pries pour celuy qui est vostre sans reserve. Dieu soit béni. Amen. Soyes tous-jours joyeuse de cette joye paisible et dévote qui a pour fondement l'amour de sa propre abjec- tion, et nourrisses une douce et paisible humilité de cœur, qui vous face aggreer toutes sortes de souffrances et d'ab- jections, comme n'estant digne d'autre chose. Revu sur un ancien Ms. conservé à la Visitation d'Annecy. ( I ) Les conseils que saint François de Sales donne ici à sa fille spirituelle semblent suivre le grand travail de dépouillement intérieur accompli pen- dant la retraite de mai 1616. (Voir plus haut, pp. 212-220.) Plus tard, Tàme de la Sainte entra dans des états nouveaux auxquels s'appliqueraient moins directement les paroles de son bienheureux Père. Toutefois, on ne prétend pas exclure absolument les années 1617 et 1618.  Année 1616 3^3  MCCLXVII A LA MÊME (fragment inédit) Annecy, [1613-1616 (i).  Ma très chère Mère, dites moy sil est vray ; et cepen- dant, mille et mille fois le bon soir, et cent et cent mille bénédictions sur le cœur de ma très chère Mère et le mien. Amen. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Salo (Italie). ( I ) En face d'un fragment si obscur et si incomplet, on est dans l'impos- sibilité de déterminer une date. Nous écartons les années antérieures à 1613, à cause de l'appellation de « Mère », et, d'après l'examen de l'écriture, les années postérieures à 1616.  ANNEE 1617  MCCLXVIII A LA MÈRE DE CHANTaL Le premier acte d'une journée fait selon l'inclination du Saint. Annecy, commencement de janvier [1614-1617 (i).] Grâces soyent a Dieu, ma très chère Mère ! sinon des que je commence a vous escrire ce billet, je n'ay rien fait de toute la journée selon mon inclination. Sa divine Majesté me veuille bien assister, affin que ces petitz, mays frequens exercices me rendent bien mortifié. (2) Je suis consolé d'avoir vostre sainte Paule vefve pour patronne (3) ; Dieu nous face la grâce de bien imiter en nostre unité cette sainte vefve et son cher Père (4). Demeurés en paix, ma très chère Mère, et reposes vostre cœur sur la poitrine du Sauveur. (5) O Dieu, qu'il faut faire de résignations pour la gloire de ce grand amour divin ! mais ce n'est rien, en compa- rayson de ces anciens hommes et femmes apostoliques. Je suis très uniquement vostre, ma très chère Mère. Vive Jésus ! Francs E. de Genève. ( I ) Le billet que nous donnons ici est ce qui reste d'un texte publié en 1626, après soustraction de nombreuses interpolations. Il fut écrit certainement au début de janvier, une année où les deux Saints se trouvaient dans la même ville; d'où la date flottante que nous indiquons. (2) Ici, les premiers éditeurs intercalent trois lignes appartenant à une lettre du 5 janvier 1619. (3) Le Fondateur de la Visitation avait ordonné à ses Filles de tirer au sort, le 31 décembre, des Protecteurs pour l'année nouvelle. Elles prirent aussi Thabitude d'en tirer un pour leur Evéque et Père : c'est à cet usage que le Saint fait allusion. ( 4) Saint Jérôme. (5) Suit, dans le texte primitif, un assez long passage emprunté à une lettre du 9 janvier 1619.  Année 1617 ^25 MCCLXIX AU CHANOINE DENIS DE GRaNIER (0 (inédite) Le destinataire est prié de vouloir bien résigner sa place de chanoine en faveur d'un digne ecclésiastique. Annecy, 5 janvier 1617. Monsieur, Sur la vacance d'un canonicat de nostre Eglise, au (sic) voys du Chapitre se sont présentés deux personnages (i) Bien que le nom du destinataire ait disparu à l'ouverture de la lettre, le contenu de celle-ci désigne le chanoine de Granier. Plus dune fois déjà, à travers la correspondance du Saint, on a rencontré ce personnage à « l'esprit fort « gentil et bien estudié » (voir tome XV, Lettre dclxxix, p. 44), mais remuant, aventureux, plus brillant que solide. L'Evéque de Genève l'aimait et le pro- tégeait en souvenir de son prédécesseur dont il était le neveu. Une pièce du 26 avril 1399 (Archives de la Visitation d'Annecy, Collection J . Vuy ) fixe les hésitations des historiens qui ont en vain cherché la filiation de Denis de Granier. Il avait pour parents François de Granier, seigneur du Châtelard, et Pernette Ducrest; sa famille habitait Yenne, où mourut son frère Pierre- Claude (voir tome XII, p. 201), et cette petite ville fut peut-être le berceau du futur Auger de Mauléon. Chanoine de Saint-Pierre de Genève dès 1602. il obtint au concours du 6 avril 1609 la cure de Saint-Jeoire et reçut la prêtrise le 28 mai 1611. (R. E.) Peu soucieux de tenir sa place au Chapitre, il se fait remarquer par ses absences dans les comptes-rendus des Synodes. En i6ir, il est à Paris, où, sur la recommandation de saint François de Sales, Antoine des Hayes s'occupe de lui trouver une place; de la capitale, le jeune ecclésiasti- que passe en Languedoc, et revient enfin en Savoie. Le saint Evêque n'eut pas de peine à constater alors les ravages commencés dans cette âme; il vit sa foi chancelante, sa soumission au Saint-Siège ébranlée, une vanité désordonnée rendre inutiles tous les avertissements. Il tremblait pour l'avenir, mais le pauvre aveugle répliquait : Je ne serai jamais qu'un enfant docile de la sainte Eglise. Dans l'automne de 1620, les appréhensions du bon Pasteur ne furent que trop justifiées; l'infidèle brebis fuyait le bercail et allait apostasier en Angleterre. On lira plus tard la lettre que le Saint écrivit à cette occasion, lettre toute baignée de larmes; l'amour de Dieu et l'amour compatissant des âmes ont rarement inspiré de pareils accents. Ces larmes du Serviteur de Dieu devaient un jour porter leurs fruits; le grand coupable qui, vers 1622, avait repassé la mer, rentra dans l'Eglise catholique, et trouva dans une fille de l'Evêque de Genève, celle qui s'appelait '< la grande Fille, » la charité, la compassion, le secours que lui aurait accordés le Saint lui-même (i6a8j. La  326 Lettres de saint François de Sales { I ) , l'un et l'autre désirés de cette com- paignie; et après Telection faite en faveur de l'un (-), il est resté audit Chapitre un grand désir de pouvoir encor avoir l'autre, pour les bonnes qualités qui sont en luy (3). Sur quoy, quelques-uns se sont advisés que vous avies une place, laquelle vous estes résolu de ne vouloir point remplir de vostre personne, ainsy que vous l'aves déclaré, et que le tems escoulé des l'impetration d'icelle fait asses connoistre. Et pour cela, ilz se sont addressés a moy, affin que, tant au nom dudit Chapitre qu'au mien, je vous priasse de la remettre a ce digne ecclésiastique, qui estant de bonne vie, docteur es droitz et en théologie, sera grandement utile a cett'Eglise. Or, je croy que vous ne douteres pas que sil vous Mère Marie-Agnès Le Roy continua les bontés de la Mère Favre à Tégard de M. de Granier qui, pendant huit ans, sembla digne de les recevoir. En rentrant en France, il s'était associé avec deux libraires de Paris, Cha- pelain et Bouillerot, et il publia quelques manuscrits fort rares : Mémoires de Villeroy, Lettres du Cardinal d'Ossat, Mémoires de Marguerite de Valois, etc. Il s'acquit ainsi l'amitié des gens de lettres, devint le précepteur du fils du maréchal de Saint-Luc, et le 3 septembre 1655, il avait l'honneur d'être admis à l'Académie française, de fondation toute récente, sous le nom d'Auger de Mauléon, sieur de Granier. Depuis quand se faisait-il appeler ainsi ? Nous ne saurions le dire. Cet homme, qui une première fois avait cédé à son orgueil et à ses passions, fit une nouvelle chute lamentable. Abusant de la bonté et de la confiance de la Supérieure du second Monastère de la Visitation de Paris,la Mère Le Roy, il lui extorqua une somme considérable et s'enfuit avec son trésor sans avoir donné la signature qu'on lui demandait. Pendant un mois les Religieuses eurent à subir toutes sortes de calomnies et de blâmes, per- sonne ne croyant à la culpabilité de M. de Granier. La Providence obligea pourtant celui-ci à confesser sa faute ; mais il la paya par son exclusion de l'Académie, le 14 mai 1636, ordonnée par Richelieu lui-même. Après cela, Denis de Granier rentre dans l'ombre, sans qu'on puisse savoir quel fut le lieu et quelle est la date de sa mort. (D'après Pellisson et d'Olivet, Hist. de VAcad. française, Paris, 1745, tome I; Hist. de la fondation du 2d Monastère de la Visitation de Paris.) (i) A cet endroit, l'Autographe est déchiré; deux ou trois mots manquent. (2) Le candidat élu était Charles Roero de Bressieu, l'un des fils d'Enne- monde de la Forest et d'Emmanuel-Philibert Roero. seigneur de Bressieu. Le n juillet 1616, il avait succédé à Jean d'Eloise dans son canonicat à la cathé- drale dont il devait être archidiacre en 1634. Il fut ordonné prêtre le 21 dé- cembre 1619 et reçut la cure de Frangy en 1622 ; après l'avoir échangée contre une chapellenie en 1634, il accepte en 1647 celle du Petit-Bornand. Le prieuré de Burdignin l'eut ensuite pour prieur commendataire jusqu'à sa mort, arrivée en septembre 1655. (R. E.) (3) Voir ci-après, note (5), p. 328.  Année 1617 327 playsoit de la garder et nous faire jouir du fruit de vostre résidence, nous ne le souhaitassions plus que toute autre chose ; mays puisque elle vous est tout a fait inutile, et a l'Eglise, présupposé la resolution que vous aves faite, je pense que vous treuveres bon nostre désir et le secon- deres, comme juste quil est, selon Dieu et les loix. Je sçai que vous avies eii intention d'en gratifier le frère de monsieur (xreffiez (O, auquel je ne voudrois en rien praejudicier, ains l'ayder et servir de mon pouvoir. Mays n'y ayant nulle apparence de faire reuscir sa prsetention de ce costé la, je ne pense pas que cela vous doive plus arrester de nous donner, au lieu de vous que nous desi- rions (sic) plus que tous, quelqu'un qui, en quelque sorte, vous puisse dignement représenter : dequoy donq je vous prie avec tout ce vénérable Chapitre, ne doutant point que, selon vostre prudence, zèle et pieté, vous ne vous disposies a suivre nos désirs. Atant, je me recommande a vos prières, vous asseurant que de tout mon cœur je seray tous-jours, Monsieur, Vostre plus humble, très affectionné confrère, Franç% E. de Genève. Monsieur, en cas que vous faciès ce que nous deman- dons, il ne sera besoin sinon de faire la résignation en mes mains, c'est a dire une procure (*) ad resignandiim pure et simpliciter entre mes mains, ou de mon Vicaire (*) pour résigner purement et simplement (i) Les indications fournies par les Registres paroissiaux d'Annecy, par les Registres de TEvêché et d'autres sources, nous permettent d'admettre que François Greyfié eut, de sa femme Françoise Espeautaz, trois fils : Jean, François et Claude. Le premier, conseiller de Son Altesse, procureur fiscal du Genevois, membre du Conseil du collège Chappuisien, syndic en 1621, doit être celui que le Saint nomme ici. Il épousa d'abord Perrine Sappin, et en secondes noces (1624), Louise-Michelle Brunet de Doucy. Ses deux frères, des- tinés à l'état ecclésiastique, avaient été tonsurés le 22 février 1600, et c'est à l'un d'eux que M. de Granier aurait de bon cœur cédé son canonicat. Selon toute apparence, ni l'un ni l'autre ne persévérèrent dans leur première voie. Claude serait devenu greffier de la judicature-mage du Genevois; François, marié à Jacqueline Garbillon, fut père de Péronne-Rosalie qui devait être cé- lèbre un jour dans l'Ordre de la Visitation par ses supériorités à Paray-le- Monial et à Annecy.  328 Lettres de saint François de Sales gênerai (0; car par après, le moys qui vient, auquel je suis en mon alternative i-\ je prouvoirois celuy dont il est question, qui s'appelle monsieur Questan, bourgeois de cette ville (3). Veille des Roys 161 7. A Monsieur Monsieur [de Granier, Docteur] en théologie (4) ville. Revu sur l'Autographe conservé au 2^ Monastère de la Visitation de Marseille. ( I ) Jean-François de Sales, (2) Voir tome XIV, note (3), p. 272. (3) Né vers 1577 à Naves, diocèse de Genève, Jean-Louis Questan était fils de Georges Questan et de Bernarde Arpiaud. Il étudia en philosophie pendant cinq ans au collège de Louvain (1595-1600) et prit le grade de docteur en théo- logie. En 1614, il dessert la cure de Messery, et en 1619, celle de Douvaine. Ce fut le 18 août 1617 qu'il entra au Chapitre de Saint-Pierre comme le sou- haitait François de Sales, juste appréciateur de son savoir et de sa vertu- Quand les Ermites des Voirons élurent M. Questan pour supérieur, l'Evêque approuva leur choix. Plusieurs fois ce digne prêtre fut désigné comme sur- veillant, examinateur pour les concours, député pour les affaires du clergé. II mourut le 31 décembre 1642. (D'après les R. E. et sa déposition, Process. remiss. Gebenn. (I), ad 2um interrog. et passim.) (4) La déchirure de l'adresse (voir ci-dessus, note ( i), p. 325) a enlevé les premières svllabes du nom de lieu, peut-être même plusieurs mots.  MCCLXX A LA MÈRE DE GHANTAL Affaires à régler entre les deux Fondateurs de la Visitation. Annecy, commencement de janvier 1617 (i). Ma très chère Mère, Je n'ay sceu prendre le contentement que je desirois de vous voir moy mesme, occupé par les visites. Je ne ( I ) La date du contrat passé le 22 juin 1617 (voir note ( 4 ) de la page suivante) aide à déterminer approximativement celle de ce billet. D'après une lettre de la Mère de Chantai (Lettres, vol. I, p. 186), l'achat des vignes eut lieu vers le 3 avril précédent; le Saint n'était pas encore revenu de Grenoble, et l'affaire avai^t dû se traiter avant son départ, c'est-à-dire en janvier. L'allusion aux « visites » autorise à croire que ce fut au commencement de ce mois.  Année 1617 339 sçai si aures parlé a M, le Collatéral ( de la difficulté des 800 florins. En voyci un'autre : M. de la Roche ( = ) desireroit mettre sa seconde fille en la Congrégation (3) et constituer sa dote des a présent, avec celle de ma Seur Claude i\gnes, sur les biens quil vous vend (4), a la charge qu'en cas qu'elle ne perseverast, on rendroit tant. Vous y penseres un peu, et nous en parlerons passé demain ; et ce soir, si je puis en passant, je vous salueray, puisque demain je vay a Sainte Catherine (5). Dieu vous bénisse, et tout ce que vous estes icy et la. Revu sur l'Autographe appartenant à M"* Hélène de Thiollaz, au château de Monpont, près d'Annecy. (i) Barthélémy Flocard (voir ci-dessus, note ( i ), p. 303). (2) Jean Joly, seigneur de la Roche et d'Alery (voir tome XIII. note ( i ), p. 364). (3) Après le mariage d'Adrienne Joly avec Bernard Lucas, avocat au sou- verain Sénat de Savoie (10 février 1614), Agnès et Innocente restaient encore au foyer paternel et comptaient onze et huit ans. Ni Tune ni l'autre n'entrè- rent à la Visitation d'Annecy, mais, plus tard, à celle de Chambéry. Une troisième fille, Jeanne-Denise, était née en 1604 et aurait eu treize ans en 1617. C'est elle, peut-être, que son père voulait « mettre en la Congrégation, » mais nous ne savons d'elle que la date de sa naissance. (4) Le 22 juin 1617, le seigneur de la Roche d'Alery vend au Monastère de la Visitation d'Annecy des vignes situées à Chavoire, pour « le pris et somme de quaitorze mil et cinq centz florins,... moyennant ce que, ladicte dame Supé- rieure avec lesdictes Sœurs l'a entièrement acquitté et deschargé d'une pension annuelle... promise et constituée ausdittes Dames pendant la vie de damoy- selle Claudine Joly... lors qu'elle fut receue a ladicte Congrégation. » Et comme, sur les mêmes biens, se constitue aussi partie de la dot d'Adrienne, femme de Bernard Lucas, l'acte porte que les Religieuses se « reservent tous droictz d'anterieurité qu'elles ont, tant pour la somme de deux mil florins..., a compte de quattre mil florins promis pour la réception de ladicte D"* Claudine Joly, fiUie dudict seigneur vendeur, que pour la pension susdicte et esteinte, comme tenant place de partie du prix de la présente vente. » (Archives de la Visitation d'Annecy.) (5) L'abbaye de Sainte-Catherine (voir tome XIII, note (4), p. 116).  330 Lettres de saint François de Sales  MCCLXXI AU DUC DE NEMOURS, HENRI DE SAVOIE (inédite) Regrets de l'Evêque de Genève d'avoir quitté Annecy avant l'arrivée du prince. — Le duc de Nemours, futur fondateur de Téglise des Barnabites. — Dieu « donne séjour dans son temple aeternel a ceux qui luy en font icy bas des temporelz. » — Reconnaissance des Religieux et du peuple. Annecy. 8 janvier 1617. Monseigneur, L'ors que Vostre Grandeur vint en cette ville (0, je me treuvay si pressé de l'assignation prsefigee pour les ser- mons de l'Advent a Grenoble ( = ), que je ne peu attendre le bonheur de vostre arrivée ; dont j'en un extrême des- playsir, mais addouci néanmoins par Tesperance qui me restoit, qu'a mon retour je pourrois en quelque sorte regaigner cet honneur. Et maintenant, deceu en mon attente, je ne puis me contenir que je ne me pleigne de mon malheur et que, pour me soulager au mieux que je puis, je ne vous supplie très humblement, Monseigneur, que si les occurrences m'esloignent de vostre œïl, il vous playse me tenir praesent en vostre grâce, que j'estime l'un des meilleurs et plus désirables honneurs que je puisse posséder en ce monde. Ce pendant. Monseigneur, les Pères Barnabites m'ayant communiqué l'intention que Vostre Grandeur a de faire (i) Entre le 21 et le 28 novembre 1616, le sieur Méclard, syndic, fut député vers le marquis de Lans pour lui transmettre les doléances de la ville d'An- necy, foulée par les gens de guerre. Sans attendre la fin des réclamations, Son Excellence congédia brusquement les délégués, leur disant « qu'ilz heus- sent a partir pour recevoir la Grandeur de Monseigneur » leur « prince, le duc de Genevoys, de Nemours et de Chartres. » Ainsi éconduits, les Anné- ciens épièrent « une heure propre après disné, » pour parler à Victor- Amédée et lui faire « ung petit discours pour le faict de la confirmation des privilèges » de leur ville. Avec quelque espérance de succès, ils reçurent de Son Altesse le commandement de s'en retourner « pour recevoir joyeusement Monseigneur le duc de Nemours. » Le témoignage des Registres du Conseil de Ville corrobore donc celui du Saint au sujet de la venue de Henri de Savoie à Annecy ; la réponse du prince à l'Evêque de Genève (voir Appen- dice I) est une preuve nouvelle de ce fait ignoré des historiens. (2) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 312.  Année 1617 331 bastir leur église, m'ont aussi donné une grande conso- lation (0 ; car jesçai que Dieu bénit ceux qui luy édifient des maisons, qu'il glorifie ceux qui l'honnorent et qu'il donne séjour dans son temple aeternel a ceux qui luy en font icy bas des temporelz. Tout ce pais. Monseigneur, et les circonvoysins vous en auront un'obligation immor- telle ; et par ce moyen, Vostre Grandeur adorera et priera Dieu continuellement a jamais, en la personne de ces bons et devotz Religieux et de tous ceux qui, par leur zèle, s'assembleront en ce saint lieu pour y sanctifier le nom divin. Mays en particulier. Monseigneur, je vous en fay très humble remerciment au nom de tous ceux qui, estans vos très humbles et très obeissans sujetz et serviteurs, sont mes diocaesains, ausquelz je ne manque- ray pas de représenter la singulière redevance qu'ilz en auront a vostre pieté ; non plus que ces bons Pères ne manqueront pas de rendre mémorable a toute leur illustre et dévote Congrégation la grandeur des bienfaitz dont vous les aves favorisés, Monseigneur, qui n'aves pas seulement voulu les recevoir en vostre ville ( = ), qui est leur premier logement deçà les mons, mais de plus, leur aures basti le lieu sacré qui sera le plus grand moyen de bien rendre le service auquel leur vie est destinée. Dieu remplisse a jamais Vostre Grandeur de ses grâces ; c'est le souhait perpétuel, Monseigneur, de Vostre très humble et très obéissant orateur et serviteur, Franç% E. de Genève. 8 janvier 16 17, Annessi. Revu sur l'Autographe appartenant à M*"^ veuve de Marcassus, à Monfort (Gers). ( I ) La bonne volonté du duc de Nemours était plus grande que ses moyens de la mettre à exécution. '( Les occasions passées » l'avaient « un peu mis en arrière, » écrit-il à François de Sales, avouant ainsi discrètement le tort fait à ses finances par la fâcheuse guerre qui venait de se terminer. De fait, les PP. Barnabites ne purent construire leur église qu'en 1645. Pour cela, ils firent « destruire les deux classes qu'estoient au dessoubs la salle du collège, comme aussy ladicte sale. » (Reg. des Délib. municip., 22 décembre 1644.) La chapelle fut édifiée en l'honneur de la Sainte Vierge, sur le plan et la même dimension que celle qui se voit dans la nef de l'église de Lorette. (2) Voir le tome précédent, note ( i ), p. 189. et Lettre miii, p. 233.  332 Lettres de saint François de Sales MCCLXXII AU PRINCE DE PIÉMONT, VICTOR- AMÉDÉE (0 L'imprudence d'un jeune homme. — Avis du Saint sur cette affaire. Annecy, 17 janvier 1617. Monseigneur, Vostre Altesse me renvoya une requeste par laquelle elle estoit suppliée, de la part de damoyselle Marceline de Marcilli, ditte Belot (-), de luy prouvoir sur les pro- messes que le sieur de Chasse, filz de monsieur le Pré- sident de Sautereau (3), luy avoit faites pour mariage, afïin que je fisse ce que j'estimerois estre convenable pour ce regard et que je donnasse mon advis a Vostre Altesse sur le contenu de la supplication. Et pour obéir, Monseigneur, a son décret, estant a Grenoble, je conferay avec le susdit seigneur Prsesident de Sautereau de ce sujet, pour apprendre de luy son intention, laquelle il m'expliqua, se louant infiniment de la justice et équité dont Vostre Altesse Tavoit gratifié luy faysant rendre la promesse faite par son filz, lequel estant en la puissance de son père, et d'un tel père, ne pouvoit nullement s'engager en un mariage si deshon- norable, au praejudice de la réputation de sa famille. De sorte que, non seulement il ne croyoit pas que cette femme peut rien praetendre par rayson, mais tenoit pour certain qu'elle pourroit estre recherchée par justice, (i) Le 22 janvier 1617, Antoine Favre écrit au prince de Piémont : « J"ay receu n'aguieres le pacquet cy joint de Monsieur l'Evesque de Genève pour le faire tenir seurement a V. A. S. ; ce que je fais par ceste première commodité, ne l'ayant voulu confier a la poste, de peur qu'il ne s'esgarast. Je croy, a ce que je puis cognoitre par sa lettre, que c'est sur le subject de la requeste qui fut présentée a V. A. S. parla Bellod et r'envoyee audict sieur Evesque pour en donner son advis. » {}>{ugnier. Correspondance du Président Favre, tome II, publié par la Société savoisienne, etc., 1905.) Ces lignes ne laissent aucun doute sur le destinataire de la présente lettre, que les éditions antérieures ont dit être Charles-Emmanuel. (2) Voir tomes XV, note ( i ), p. 335, et XVI, pp. 21-23; Lettre cmlviii, p. 155; note (i), p. 319. (3) Voir ci-dessus, notes (i), (2), p. 308.  Annék 1617 333 d'avoir séduit et attiré un jeune garçon, enfant de telle famille, a des promesses si prsejudiciables et conceûes en termes si extravagans (0. Que si ce n'eut esté la crainte de donner de Timportunité a Vostre Altesse, il Teut supplié de commander que punition en fut faite. N'ayant donq rien fait de ce costé, il reste que je die mon advis, puis qu'il a pieu a Vostre Altesse de me le commander. Et c'est. Monseigneur, qu'il suffit bien que l'on tolère ces femmes scandaleuses en la republique, sans qu'on leur permette d'entreprendre sur les maysons honnorables et dignes de recommandation , par les infâmes attraitz desquelz elles charment la foible et légère jeu- nesse ; et la condition d'espouser ou doter n'est ordonnée que pour les filles d'honneur qui ont esté deceiies, non pour les femmes deshonnestes qui ont deceu. Celle ci, comme je m'asseure Vostre Altesse aura des-ja sceu, venoit de faire un enfant d'un estranger quand elle tira promesse de ce jeune gentilhomme ; et bien que la charité ayt quelquefois porté des gens de qualité a prendre en mariage des femmes perdues pour les sauver, si est ce qu'il n'en faut pas tirer conséquence pour ceux qui, n'estans pas a eux mesme (sic)^ sous prsetexte de charité violeroyent la justice et l'équité, introduisans en leurs familles des personnes dangereuses contre le gré de ceux qui sont les pères et maistres de la famille, mays sur tout en un aage qui n'a pas ordinairement en consi- dération ni la charité, ni la prudence requise pour exercer une charité en laquelle il faut avoir égard a plusieurs circonstances. Je prie Dieu sans cesse. Monseigneur, quil comble  (i) Seigneur de Chasse par sa mère Marie Gibert, Guillaume de Sautereau, conseiller au Parlement de Dauphiné, épousa, le 28 juin 1621, Méraude de Sarde. Des lettres patentes de Louis XIII, en date du 26 mai 1630, le nom- mèrent conseiller au Conseil souverain de Savoie établi à Chambéry. Il fut Tun des commissaires choisis par le Roi pour l'instruction et le jugement du procès de Cinq-Mars et de Thou {1642). L'année suivante, le 26 septembre, nous le trouvons à Annecy comme témoin et signataire du procès-verbal de la translation des restes précieux de François de Sales et de la Mère de Chantai, de l'église extérieure dans l'intérieur du monastère, translation nécessitée par la reconstruction du sanctuaire. Guillaume de Sautereau testa le 16 mai 1663. (Cf. Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné.)  334 Lettres de saint François de Sales Vostre Altesse de ses plus désirables bénédictions, et suis infiniment, Monseigneur, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XVII janvier 1617, Annessi. Revu sur TAutographe appartenant aux Religieuses de l'Adoration réparatrice, à Paris.  MCCLXXIII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL l^'' Des sujets fidèles méritent les faveurs de leur Prince. Annecy, 18 janvier 1617. Monseigneur, Je joins ma très humble supplication a celle que cette ville d'Annessi fait a Vostre Altesse, pour la continua- tion des privilèges dont ell'a ci devant joiii (0, attestant que, si la fidélité et ardente affection des sujetz doit attirer les faveurs du Prince, cette communauté. Mon- seigneur, sera donq en singulière recommandation auprès (i) Voir le tome précédent, note (2), p. 324. — Quand les députés d'An- necy se présentèrent au prince de Piémont à la fin de novembre 1616 (voir ci- dessus, note (i), p. 330), Victor-Amédée leur déclara « quil n'estoit ja besoing de le suivre jusques en Piedmont, ains quilz recommandassent l'affaire au s"" Boschi, son secrétaire, qui ne manquera de l'en resouvenir soudain quil sera auprès de S. A. Ser*^** son père, envers lequel il poursuivra luy mesme la confirmation des privilèges, accompagné d'ung tesmoignage de fidélité de ladicte ville, » Les prudents Savoyards crurent plus sûr de travailler eux- mêmes au succès de leur affaire; en effet, le 3 février suivant, ils déclarent avoir envoyé à Turin « pour la confirmation des privilèges de la Ville,... le sieur scindic Meclard, » et que « pour le faire acheminer, l'on a esté contrainct d'aller aux emprompt. » (Reg. des Délib. municip.) Méclard fut donc le por- teur de la présente lettre du Saint.  Année 1617 335 de Vostre Altesse, pour la prospérité delaquelle je prie continuellement la divine Majesté, comme je dois, estant, Monseigneur, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, Franç% E. de Genève. XVIII janvier 161 7, Annessi. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCCLXXIV A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Changement de confesseur au monastère de Lyon. — Trois retraitantes en celui d'Annecy. — Rapide passage en ce monde d'une petite nièce du Saint. Annecy, 21 janvier 1617. Ma très chère Fille, Je vous voy, certes, asses occupée parmi tant d'occur- rences ; Dieu soit a jamais vostre force. M. TAumosnier m'escrit que Monseigneur TArcheves- que le vous oste (O ; je croy que ce ne sera pas sans vous bien pourvoir. Je crains pourtant la variété des opinions au maniement des âmes ; mays Dieu aura soin de vostre chère trouppe, affin qu'elle aille tous-jours le mesme chemin, puisque c'est celuy auquel il l'a mise. Nostre Merei^) ne sçait pas que j'escrive. Elle n'est pas sans affaires, mays bonnes et aggreables, ayant (i) Claude de Sevelinges, aumônier de Belleville et confesseur du monas- tère de la Visitation de Lyon (voir tome XV, note (2), p. 333), n'accepta pas alors le poste que lui proposait M^"" de Marquemont, ne voulant pas abandonner les Filles du saint Evêque de Genève (voir à l'Appendice I, la lettre de la Mère Favre, 26 janvier 1617); mais au mois de mai suivant, con- traint d'aller résider à son bénéfice, il fut remplacé à la Visitation par Etienne Brun. (2) La Mère de Chantai.  336 Lettres de saint François de Sales madame la Comtesse de Tournon et ses deux filles ( ^ \ qui font les exercices et préparent leur confession générale. Hé Dieu, quelles nouvelles du Puy d'Orbe ( = )! cela me traverse le cœur. O qu'il faut bien regarder a qui Ton donne accès en telles maysons, et quelles hantises, quelz devis on admet ! La chère seur de la Valbonne (3) pensoit venir, mais le frère (4) n'a pas voulu. Il y a obéissance en leur monas- tère ; ouy, et mortification. Mais celle ci est bien plus grande a Sales, ou ma seur (?) a fait sa troisiesme cou- che d'une fille, laquelle, une heure après son Baptesme, est morte. Pour moy, je n'en aurois nul sentiment, si ce n'est pour compatir un petit avec la mère. Vives tous-jours toute a Dieu, ma très chère Fille : c'est le continuel souhait de mon cœur qui chérit le vostre incomparablement. Vive Jésus ! Franç^. E. de Genève. 21 janvier 1617. A ma très chère Fille en N. S., Ma Seur Marie Jacqueline Favre, Supérieure de la Cong°" de la Visitation. A Lion. (i) Claude-Françoise, veuve de Salomon de Murât de la Croix, et Margue- rite, la plus jeune. (Voir le tome précédent, notes ( i ), p. 78, et ( 5), p. 204.) (2) Sur l'abbaye du Puits-d"Orbe, voir tomes XII, note(i), p. 271, et XIV, note ( I ), p. 35g. — La lettre de la Mère Favre au Saint, du 26 janvier 1617, donne quelque jour sur l'affaire à laquelle il est fait ici allusion (voir à l'Ap- pendice I); nous en retrouverons la suite dans des lettres postérieures. (3) Andrée de NicoUe de Crescherel, femme de René Favre, seigneur de la Valbonne. (Voir tome XV, note ( i ), p. 216.) (4) René Favre, mari de M""^ de la Valbonne. (5) La baronne de Thorens.  Année 1617 337 MCCLXXV A LA MERE DE CHANTAL Un souhait de Job et celui de François de Sales, à propos d'un anniversaire. Annecy, 23 janvier 1617 (i). Ma très chère Fille, Vous m'aves fait playsir en me faysant sçavoir que c'est aujourd'huy le jour de vostre naissance, car je n'y pensois pas. Job desiroit que le jour de sa naissance perist *, et moy je souhaitte que le jour qui a veu naistre * Cap. ma très chère Mère soit conté entre les jours heureux et bénis es siècles des siècles. Cependant, ces jours de nos naissances doivent nous humilier, en nous faysant voir le néant d'où nous venons, et nous encourager, en nous faysant voir la fin pour laquelle Dieu nous a donné commencement. Revu sur le texte inséré dans un ancien Ms. de VAnnée Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy. ( I ) Nous laissons à ce billet le millésime que lui donne l'ancien manuscrit de VAnnée Sainte; mais nous devons ajouter qu'il y aurait quelque probabilité de lui assigner une date antérieure.  MCCLXXVI A LA MÈRE CLAUDINE DE BLONAY ABBESSE DE SAINTE-CLAIRE d'ÉVIAN (inédite) Le saint Evéque s'excuse aimablement de son retard à écrire. — Il promet de s'employer auprès du prince de Piémont pour les Glatisses. — Raisons divines des maladies et des guérisons. — Salutations affectueuses. Annecy, 24 janvier 1617. Vous aves rayson, ma très chère Seur, d'avoir une parfaitte confiance en moy, qui aussi, de mon costé, vous honnore et chéris de tout mon cœur avec toute vostre bénite compaignie ; mays j'ay bien tort, certes, Lettres Vil 22  338 Lettres de saint François de Sales d'avoir tant tardé a vous respondre sur la demande que vous me faysies. Vous estes bonne, et vous m'excuseres bien, je m'en asseure, puisque ma faute ne procède pas de mon affection, [mais] de ma mémoire, laquelle s'estant réservé ce devoir pour m'en faire souvenir a mon retour en cette ville (0, s'en oublia par la multitude du tracas qui m'accabla a mon arrivée. Si, en la place du chasteau (2), il y a de l'eau et dequoy vous bien accommoder, je pense qu'il ne seroit pas diffi- cile d'obtenir de Son Altesse ce que vous aves projette (3) ; et pour moy, je vous serviray très affectueusement en cela, comme en toutes autres occasions, espérant que si nous avons la paix (4), vous seres grandement soulagées du Prince, qui me le dit, estant icy (5). Le bon Dieu, auquel vous serves, disposera par sa providence de tout ce qui sera requis pour vous loger un peu mieux en terre et très heureusement au Ciel. Si j'eusse sceu ce qui arriva despuis, j'eusse fait du Jubilé selon vos souhaitz (6); toutefois. Dieu n'a pas laissé de vous bien consoler par autre voye. Il soit a jamais béni, et encor dequoy il envoyé souvent des maladies a ses servantes pour les rendre participantes de sa croix, et les guérit aussi souvent pour les rendre en quelque chose participantes de sa résurrection. ( I ) Le Saint revint de Grenoble le 31 décembre 1616, ( 2 ) C'était un château-fort dominant la ville d'Evian, construit au xiii^ siècle par Pierre, comte de Savoie, et ruiné par les Genevois, en 1391, lorsqu'ils s'emparèrent de la cité et du pays environnant. (3) Les Clarisses songeaient à édifier un nouveau monastère, le premier ayant été presque entièrement détruit par les hérétiques (voir note précédente). Pour cela, elles désiraient utiliser les ruines du château. François de Sales se fit, en 1619, ^^'^^ intermédiaire auprès du duc de Savoie et sa requête fut favo- rablement reçue. Pourtant les Religieuses ne purent se prévaloir de la bien- veillance du souverain, par suite « de divers empeschements et accidents sur- venus ; » les travaux ne commencèrent qu'en 1638, avec une nouvelle autori- sation de la régente Marie-Christine. (Cf. Les Clarisses d'Evian-les-Bains, par le P. Ladislas de Marlioz, Abbeville-Montreuil, 1883.) (4) Elle se fit attendre quelques mois encore, le traité de Pavie n'ayant été signé que le 9 octobre 1617. (^) Pendant son séjour à Annecy en 1616. (Voir ci-dessus, note (2), p. 268, et Lettre mccxliv, p. 290.) (6) Sans doute l'Abbesse avait désiré, sans pouvoir l'obtenir, un confesseur extraordinaire, à l'occasion des Indulgences que les PP. Barnabites d'Annecy furent chargés de prêcher en divers lieux. (Cf. ibid,, note (4), p. 385.)  Année 1617 339 Mes chères Filles, qui sont les vostres, m'obligent beaucoup d'avoir du soin pour moy en leurs prières ; je les conjure seulement de continuer. Que si le parentage de quelqu'unes avec moy les rend un peu plus affection- nées a me faire cette charité, je leur en seray d'autant plus redevable, et en remercieray Dieu qui a enté l'amitié spirituelle sur le devoir temporel. Je les salue toutes très cordialement, et leurs noms sont escritz dans mon cœur : de ma Seur Beatrix (O, Anne, Marie Mag- deleine, de ma Seur Symon, Pernette, Christine (2), de Blonay (3), Pernette; en somme, toutes, laissant a part ma Seur Claire, qui sçait bien que je luy escris, ni je n'oublie pas ma Seur Estienne (4). En somme, de rechef, toutes nommées et non nommées, je les chéris de tout mon cœur qui leur souhaitte, et a leur Révérende Mère, ma Seur, la grâce, paix * et consolation du Seigneur, * Rom. et suis sans fin, ma très chère Seur, Vostre très humble frère et serviteur, Francs E. de Genève. xxiiii janvier 161 7, Annessi. A la K"^^ Mère en N. S., La Seur Claudine de Blonay, Abbesse de S^« Claire d'Evian. Revu sur une ancienne copie appartenant à M. Levesque, bibliothécaire du Séminaire de Saint-Sulpice, à Paris. ( I ) Béatrix de Grilly était fille de Jacques du Nant, dit de Russin, seigneur de Saint-Paul, Grilly, etc., capitaine du château et de la ville d'Evian. Sa mère fut sans doute Françoise-Gasparde de Clavel, seconde femme de Jacques. Entrée bien jeune au couvent de Sainte-Claire (1593). elle succéda en 1622 à Claudine de Blonay dans la charge d'abbesse, et continua avec zèle l'œuvre de sa devancière. C'est sous son gouvernement que le Monastère fut soustrait à la juridiction des Cordeliers pour passer sous celle des Evêques du diocèse. La Mère Béatrix mourut en 1631. |Cf. Les Clarisses d'Evian, etc.) (2) Sœur Anne, déjà mentionnée par le Saint le 18 août 1614 (voir le tome précédent, note ( 4 ), p. 208). — Marie-Madeleine d'Yvoire, abbesse en 1631, l'est encore en 1636, — Marguerite Simon paraît comme mère-vicaire en 1627. Péronne Ravière et Christine Fontaine se trouvent dans la liste des Clarisses de 1627. (Voir ouvrage cité.) (3) Gabrielle de Blonay, fille de Claude de Blonay et de Louise ou Denise de Livron, sœur de Marie-Aimée, Religieuse de la Visitation. (4) Claire Plaist et Etienne de Thorens. Quant à cette seconde Sœur Per- nette. elle ne figure pas dans la liste de 1627.  340 Lettres de saint François de Sales MCCLXXVII A UNE RELIGIEUSE DE l'aBBAYE DE SAINTE-CATHERINE Eq échange d'un bouquet. — Une prière que le Saint ne ferait pas. — Le choix de sainte Catherine de Sienne. — Chant du rossignol dans son buisson. — Envoi du Traiité de V Amour de Dieu. — Sentir des répugnances à la vertu n'est pas manquer d'amour. Annecy, [fin janvier 1617 ou février 1618 (i).] Que nostre cher Jésus crucifié soit a jamais un bou- * Cant., I, 12. quet entre vos mammelles *^ ma très chère Fille. Ouy, car ses doux sont plus désirables que les œilletz, et ses espines que les roses. Mon Dieu, ma Fille, que je vous souhaitte sainte, et que vous soyes toute odorante des senteurs de ce cher Sauveur ! C'est pour vous remercier de vostre bouquet, et vous asseurer que les petites choses me sont grandes quand elles sortent de vostre cœur, auquel le mien est tout dédié, je vous en asseure, ma très chère Fille. Le Pater que vous dites pour le mal de teste n'est pas défendu ; mays mon Dieu, ma Fille, non, je n'aurois pas le courage de prier Nostre Seigneur, par le mal qu'il a en la teste, de n'avoir point de douleurs en la mienne. A il enduré affin que nous n'endurions point ? Sainte Catherine de Sienne voyant que son Sauveur luy presentoit deux couronnes, une d'or, l'autre d'espi- nes : O je veux la douleur, ce dit elle, pour ce monde ; *^-^^^>'!?'^®^3P' l'autre sera pour le Ciel *. Te voudrois employer le cou- Vita S. Cath. Sen., ^ -^ ^ -^ Pars II, c. IV. ronnement de Nostre Seigneur pour obtenir une couronne de patience autour de mon mal de teste. Ne manger point chose qui ait eu vie, les vendredis de Caresme, n'est pas mal fait non plus, mais cela tire un (i) Est-ce un texte unique que nous avons ici, ou bien une réunion de fragments ? Il est difficile de le dire. La mention du Traitié de l'Amour de Dieu ne permet pas de songer à une année antérieure à 1617; les allusions au Ca- rême indiqueraient la fin de janvier ou le mois de février. Or, cette lettre fut écrite d'Annecy, car la destinataire paraît être une Religieuse de l'abbaye cistercienne de Sainte-Catherine. En 1617, le saint Evêque partit pour Grenoble les premiers jours de février ; en 1618, le 26 du même mois.  Année 1617 341 peu a la vanité d'esprit, quand cela se fait par le rapport de ce qui l'a eue ; mays quand cela se fait par mortification, cela est bon. Vives toute entre les espines de la couronne du Sauveur, et comme un rossignol dans son buisson, chantés, ma Fille : Vive Jésus ! J'ay suivy vostre désir, mais vous verres que ce papier du livre (0 a beu tout ce que j'y ay escrit ; et je croy, certes, que vostre cœur en fera de mesme, car c'est le vin délicieux de l'ame, qui l'enivre et ravit saintement, que ce divin et céleste amour. Chemines tous-jours en cette confiance ; et, en observant une amoureuse fidélité et loyauté envers ce cher Sauveur, ne vous mettes point en crainte de ne pas asses bien faire : non, ma Fille; mays advoùant vostre bassesse et abjection, rejettes vostre soin spirituel en la bonté divine * qui aggree nos petitz et *Cf. Ps. liv, 23. chetifz efFortz, pourveu qu'ilz soyent faitz avec humilité, confiance et fidélité amoureuse. Or, j'appelle amoureuse, la fidélité par laquelle, a nostre escient, nous ne voudrions rien oublier de ce que nous estimerions estre plus aggrea- ble a l'Espoux, parce que nous aymons ses contentemens plus que nous ne craignons ses chastimens. Cette chair est admirable a ne vouloir rien de piquant ; mais la répugnance que vous aves ne tesmoigne pourtant point aucun manquement d'amour ; car, comme je pense, si nous croyions qu'estant escorchés il nous aymeroit plus, nous nous escorcherions, non pas sans répugnance, mays malgré la répugnance. J'appreuverois que, par ma- nière d'essay, on taschast deux ou troys fois de se sur- monter avec un peu de violence, au moins quelquefois ; car, qui ne gourmande jamais ses répugnances, il devient tous-jours plus doiiillet. La pauvre Mère de nostre Visitation (2) est cruellement ( I ) Le Traittè de V Amour de Dieu, la suite de la phrase ne laisse pas de doute. ( 2 ) La Mère de Chantai, souffrante au commencement de 1617 (cf. à l'Appen- dice I. les lettres de la Mère Favre, 26 janvier et 21 février), fut véritablement malade à la fin de l'année; le 30 janvier 1618, elle n'était pas encore guérie. Impossible de proposer une autre Supérieure de la Visitation, et pourtant, est-ce de la Sainte que François de Sales aurnit dit : « C'est une honne fille, et bien résignée? » Ici l'interpolation se trahit, ou peut-être la main de la Mère de Chantai elle-même arrangeant une phrase trop louangeuse pour elle.  342 Lettres de saint François de Sales tourmentée d'un catarrhe qu'elle a sur la bouche ; mais elle s'en res-joûyt et dit que, pourveu qu'elle applique son cœur a Dieu, elle treuve de la douceur en cette cuisante douleur. C'est une bonne fille, et bien résignée, et vous chérit grandement. Si fay-je bien, moy, qui suis tout vostre en Dieu, ma chère Fille. Vives toute en luy. Franç% E. de Genève.  MCCLXXVIII AUX CHANOINES DE LA COLLEGIALE DE SAINT-JACQUES DE SALLANCHES (0 L'Evêque promet aux Chanoines de tenir leur doyen en son devoir. Annecy, 2 février 1617. Messieurs, Je feray tout l'office qui sera requis pour tenir le sieur Doyen en devoir, affin quil ne mange pas le pain du saint autel, quil ne sert ni n'honnore nullement, ains quil mesprise et deshonnore, en tant quil le peut, extrême- ment (2). Je vous envoyé une lettre d'advis sur un fait (i) L'église de Saint-Jacques de Sallanches fut érigée en collégiale, à la demande des habitants, par une Bulle de Clément VII, de juillet 1388, Bulle qui reçut son exécution en juin 1389. Le Chapitre était composé du doyen, de douze chanoines et de quatre bénéficiers. Ce corps ecclésiastique fut pen- dant plus de quatre cents ans un des principaux ornements du diocèse de Genève, par sa régularité et sa conduite édifiante. (Cf. Besson, Mémoires pour l'Hist. ecclés. des dioc. de Genève^ etc., Moûtiers, 1871, p. 145; Grillet, Dici. hist.^ etc., tom. III,) (2) Ce doyen dont la vie contrastait si fort avec celle de ses confrères et avec ses devoirs, était Claude-Nicolas de Reydet, seigneur de Choisy. Sous- diacre le 20 décembre iéo8 et prêtre le 28 mai 161 1, il était devenu, à vingt et un ans, doyen de Sallanches (8 novembre 1607). Quelques années après, il recevait la cure de Bonne qu'il fit desservir dès 161 5 par Jean-François du Martherey (voir ci-dessus, note ( i ), p. 119), et le 23 mai 1624, il permuta son doyenné de Sallanches avec le prieuré de Bellevaux. Au mois d'août 1618 le seigneur de Choisy avait obtenu la coadjutorerie du prieuré de Peillonnex; aussi, à la mort de Thomas Pobel, devint-il prieur commendataire. Il n'honora pas plus cette dignité que les autres ; rien de triste comme le spectacle de ce prêtre conduisant des soldats (voir ci-après, p. 355, la lettre du 5 mars) et recevant l'Evêque dans son prieuré « en bottes et éperons, la houssine en  ;  1 5^ .   ?->â     ^ ^ 1-1 Tl «i â  tU*Tf-Cui\uA. l/ÎX.^ (   t^M.  %    Année 1617 343 auquel je désire que vous metties ordre, puisque c'est de vostre charge, et m'asseurant qu'aussi feres-vous et que vous me feres part a vos prières, je demeureray, Messieurs, Vostre plus humble, très affectionné confrère, France E. de Genève. Le 2 febvrier 161 7, Annessi. A Messieurs Messieurs du Chapitre de Salanche. Revu sur l'Autographe conservé à Annecy, Archives départementales de la H'*-Savoie, G, Collégiale de Sallanches, art. 19. main, suivi de personnes en même équipage, avec plusieurs chiens. » (Procès- verbal de la Visite pastorale du jo septembre 1626.) En 1650, il n'est pas plus respectueux envers Charles-Auguste de Sales; mais enfin, par acte du 21 mai 1661. Claude de Reydet réparait en partie sa conduite passée en renonçant à tous ses droits de juridiction sur le prieuré, et déclarait ne vouloir mettre aucun empêchement aux visites de l'Evêque de Genève. Il mourut l'année suivante. (D'après les R. E., et Peillonnex, par l'abbé Gavard, tome XXIV des Me'm. de l'Acad. Salés. , 1901, chap. xii, xiii.)  MCCLXXIX A LA MÈRE DE CHANTAL On parle à Grenoble de l'établissement d'un monastère de la Visitation. — François de Sales a commencé « heureusement » ses prédications. — Les désirs de son cœur. — Messages paternels. Grenoble, 9 février 1617. Ce billet va dire a ma très chère Mère que je chéris son cœur comme mon ame propre et son ame comme la mienne propre. On commence fort a parler d'une Visi- tation, et le passage de nostre bon Père praedicateur ( en a grandement reveillé Tappetit, et nous verrons que ce sera ( = ). J'ay commencé aujourdhuy , aussi heureusement (i) Sans doute le P. Louis de la Rivière, Minime, rappelé à Annecy par les syndics pour prêcher le Carême de 1617. (Voir ci-dessus, note ( 4 ), p. 145.) ( 2 ) La ville de Grenoble connaissait déjà de réputation les Filles de l'Evêque de Genève. M'"' le Blanc de Mions, intime amie du Monastère de Lyon, en avait parlé avec enthousiasme en Dauphiné. Quand, au mois de juillet 1616,  344 Lettres de saint François de Sales que jamais je fis, les prsedications, hormis que sur le milieu j'ay pensé estre un peu enroué < ^). Mon cœur a mille bons désirs de bien servir le divin amour. Que vous puis-je dire davantage, ma très chère Mère, sinon que vous demeuries toute joyeuse en ce céleste exercice auquel Dieu nous a si souvent et puissam- ment invités. Vous aures la bonne M""^ du Chatelard, que je chéris fort dequoy elle a si bien conservé son affection ; elVaura sans doute besoin de soin et de support (2). J'escriray a nos Seurs de Moulins, ma très chère Mère, n'en doutes point (3). Or sus, qu'a jamais le nom de Nostre Seigneur soit * Matt., VI, 9. sanctifié * en nostre unique cœur. Amen. Je salue chèrement nos Seurs, et si M""" la Comtesse la Mère de Bréchard était partie pour Moulins, elle et ses compagnes, con- duites parla Mère Favre, s'arrêtèrent deux jours à Grenoble, et y « donnèrent une sy grande ediffication... que c'estoit une procession » continuelle « des dames et damoiselles qui les visitèrent. » Le coadjuteur lui-même, M^"" Al- phonse de la Croix de Chevrières, demeura si satisfait des Religieuses, qu'il partagea le désir général d'un établissement de la Visitation dans la ville. Cette affaire fut traitée avec saint François de Sales pendant le Carême de 1617, mais, dit YHistoire de la Fondation, « le temps destiné par la divine Providence n'etoit pas encore arrivé, et le fidèle disciple du Sauveur ne voulut pas le devancer d'un moment. » L'heure providentielle sonna le 8 avril 1618 pour le couvent de Sainte-Marie de la capitale du Dauphiné. (i) En paraissant de nouveau dans la chaire de Saint-André, le saint prédi- cateur parla d'une manière si puissante, disent les anciens manuscrits, qu'il émut tout son auditoire et attira une grande attention. Il faut relire (tome VIII de notre Edition, p. 238) l'exorde tout apostolique de ce premier sermon, pour comprendre comment les cœurs furent gagnés à celui qui, sans leur dissimuler leurs plaies, s'offrait si paternellement à les guérir. Il avait en vue spéciale- ment les hérétiques, alors fort nombreux à Grenoble: aussi tomba-t-il bientôt sur les matières de controverse, et « le premier qui en profita, » raconte une annaliste (Hist. de la Fondation de la Visitation de Grenoble), « fut Boucard de Verdun, fameux renégat qui avait quitté deux fois le parti de l'Eglise romaine pour les seuls motifs de débauche et de libertinage. » (Voir tome XIV, note (2), p. 37, et à l'Appendice I, les lettres de Msf Costa et de Claude Boucard.) De nombreuses conversions suivirent celle-ci. Catholiques et protestants se pres- saient aux pieds de l'orateur ; « plusieurs écrivirent avec une grande diligence » tous ses discours, entre autres un Religieux de Saint-Dominique, un de Saint- François et le conseiller du Faure. (Cf. Ch.-Aug., Histoire, etc., liv. IX.) (2) Les sollicitations du monde furent, on l'a déjà dit, plus puissantes que celles qui attiraient à la vie religieuse Jacqueline de Chauvirey. (Cf. ci-dessus, note (i), p. 99.) ( 3) Voir les deux lettres suivantes.  Année 1617 345 est la, je la salue très particulièrement, et mes chères filles, qui sont les siennes (0. Vous sçaves aussi de quelle affec- tion je salue ma fille de la Flechere i^). Mays ma pauvre chère seur Marie Aymee (3', je n'en dis rien, cette (sic) ma fille toute aymee ; et madamoyselle de Chantai aussi est ma chère fille. Je suis, vous le sçaves vous mesme certes, tout vostre. Le 9 febvrier 161 7. Revu sur l'Autographe conservé au 2^ Monastère de la Visitation de Rouen. ( I ) La comtesse de Tournon et ses deux filles qui avaient fait un séjour à la Visitation. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 336.) (2) Madeleine de la Forest, veuve de Claude-François de la Fléchère, qui habitait sans doute Annecy depuis le commencement de l'hiver. (Cf. ci- dessus, les notes ( r ) des pp. 302, 307.) {3) La baronne de Thorens.  MCCLXXX A MADAME DES GOUFFIERS (inédite) Les vertus qui doivent accompagner le zèle. — Fermeté et délicatesse du saint Directeur. — Raisons de sa persistance à ne pas multiplier les maisons de sa Congrégation. Grenoble, 10 février 1617. (0 Ma très chère Fille, En ce peu de paroles que je puis vistement vous escrire, je voudrois bien vous faire entendre beaucoup de bonnes pensées que j'ay sur vostre sujet. Je voy que Dieu se sert de vostre courage pour l'establissement de cette Mayson de Moulins ; faites cela fidèlement, avec le plus de repos d'esprit que vous pourres. Je voy les petitz ennuys que l'ennemi de ce bon œuvre a suscités ; et que vous puis-je dire, sinon qu'avec le zèle, la patience, douceur, support vous est nécessaire, et que, comme j'ay souvent dit, il est requis a qui entreprend quelqu'action (i) Voir le fac-similé placé en tête de ce volume.  34^ Lettres de saint François de Sales relevée pour le Sauveur, d'avoir provision de toutes sortes de vertus selon les occasions qui s'en présentent . Mays j'impose silence a vostre esprit, ma très chère Fille, et ne veux pas quil die, non pas mesme, s'il se peut, qu'il pense que ces advis luy soyent donnés avec aucun degoust, comme si je craignois que vous oublias- sies ces choses. Non, ma Fille, je dis ainsy ce que je croys estre a propos, sans autre praetention que de vous conforter au bien et vous tesmoigner que je suis tout vostre. La dame de Paris dont vous aves escrit (0 sera bien employée avec ses moyens a Moulins ; quand Dieu vou- dra avoir une de ces Maysons a Paris, il fera naistre les commodités ( ^ ). Pour le présent, vous pouves juger sil est expédient de les multiplier, ayans si peu de filles pour exercer la supériorité. Icy, on en désire une, je dis en une ville voysine, et tout est presque prest (3) ; mais on envoyera les filles faire leur noviciat a Nissi, ou estant façonnées, une médiocre Supérieure suffira par après. Dieu vous veuille combler de son saint amour, ma très chère Fille ; je suis en [lui] parfaitement vostre. A Grenoble, le lo febvrier 1617. A Madame Madame de Gouffiez. Moulins, pour Paris. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Moulins. (i) On peut suggérer le nom de M'"* du Feu, dont les deux filles furent des premières Religieuses de la Visitation de Moulins. Elle séjournait d'ordi- naire à Paris, et il est fort possible qu'elle songeât dès 1617 à s'employer, elle et « ses moyens », en faveur de la Congrégation nouvelle, d'autant que c'était « une damoiselle si pleine de pieté que l'on » l'estimait « une seconde M"* Aca- rie. » (Notice de Sœur Claire-Geneviève du Feu, par la Mère de Chaugy.) (2) Le Monastère de Paris fut fondé en 1619, et M"'^ des Gouffiers eut encore sa large part d'initiative dans cet établissement. (3) Quelques prétendantes de Vienne se rencontrent parmi les premières qui se , présentèrent à Grenoble; peut-être avaient-elles désiré d'abord une fondation dans leur cité natale. M"* de Gérard, cependant (voir ci-après, note ( I ), p. 348), originaire d'Embrun, put faire des démarches pour cette der- nière ville. De fait, la Visitation d'Embrun s'établit en 1623, et celle de Vienne en 1644 seulement.  Année 1617 ^^n  MCCLXXXI A LA MÈRE DE BRÉCHARD SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE MOULINS Le vrai chemin du Ciel. Grenoble, [10 ou u février 1617 ( i ).] J'ay receu tous vos pacquetz, ma très chère Fille. Haussés vostre teste dans le Ciel ; voyes que pas un des mortelz qui y sont immortelz n'y est allé que par des troubles et des afflictions continuelles. Dites souvent entre vos contradictions : C'est icy le chemin du Ciel ; je voy le port et suis asseuree que les tempestes ne peuvent empescher d'y aller. Dieu vous console et bénisse mille fois. Je suis plus parfaitement qu'il ne se peut dire, ma très chère Fille, Vostre très humble et tout fidèle serviteur. Francs, E. de Genève. (i) Bien que le texte soit évidemment tronqué, il est facile de reconnaître que le Fondateur s'adresse à la Mère de Bréchard, dont le partage à Moulins était vraiment les « troubles » et « afflictions continuelles. ., Quant à la date, tout nous autorise à croire que cette lettre fut envoyée en même temps que la' précédente à M™* des Gouffiers.  MCCLXXXII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL I*»* L'Evêque de Genève demande à son prince l'autorisation de revenir prêcher le Carême suivant à Grenoble. Grenoble, 18 février 1617. Monseigneur, Comme l'année passée, sur la demande que le Parle- ment de cette ville me fit de mes praedications, je pris la resolution et response dans le commandement de Vostre  348 Lettres de saint François de Sales Altesse, de mesme maintenant, estant de rechef prié par cette mesme cour, de revenir encor prescher le Caresme suivant, je n'ay voulu rien dire en attendant que Vostre Altesse me face pour cela le commandement qu'il luy plaira (0, estant, comme je doy, Monseigneur, Son très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, Francs, E. de Genève. XVIII febvrier 161 7, Annessi ( = ). Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat, (i) Le 3 avril 1617, la Mère de Chantai écrit à la Mère Favre : « Si Son Altesse le trouve bon, » Monseigneur « retournera Tan prochain à Grenoble, car ces messieurs du Parlement l'ont pressé d'une manière si extraordinaire, qu'encore que ce bon Seigneur était tout résolu, et que ses affaires et son devoir le tirassent ici, il n'a su se défendre autrement que de remettre la chose à Son Altesse, y) (Lettres, vol. I, p, 183.) Charles-Emmanuel donna en effet son assentiment, et TEvêque prêcha une nouvelle station en Dauphiné. (Voir ci- après, la lettre du 12 avril à M. Milletot.) (2) C'est sans doute par distraction que le Saint a écrit Annessi, car l'Auto- graphe portant la date, il est sûr que ces lignes ont été tracées à Grenoble  MCCLXXXIII A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Prétendantes grenobloises pour la Visitation. — Le saint Fondateur attend les nouvelles de Rome avant de leur donner une réponse. — M™* Le Blanc et sa famille. Annecy, 28 février 1617. Et faut il ainsy au moins en courant vous escrire, ma très chère Fille. Il y a icy quatre ou cinq filles qui me parlent fort asseurement d'estre de la Visitation, et me semblent propres et dignes d'y estre receues (0; mais je (i) Les quatre premières postulantes qui sollicitèrent du saint Fondateur l'honneur d'être admises dans sa Congrégation furent M"" de Gérard, de Glézat, de Garcin du Colombier et Brun du Bonnet de la Bastie. Nous les retrouverons plus tard sous le voile.de la Visitation.  Année 1617 349 ne sçai presque comme vous les envoyer, tandis que Ton est la en doute si elles pourront estre establies (O. Je les renvoyé a la fin du Caresme, espérant que nous pourrons avoir, entre ci et la, quelques nouvelles de Rome. Or, en tout événement, nostre Congrégation est grandement estimée en tiltre de Congrégation et sera fort favorisée ; mays puisque nous sommes en poursuite de la réduire en Religion , il faut avoir encor un peu de patience jusqu'à ce que nous sçachions ce qu'on en résoudra (2). Ce pendant, ma très chère Fille, tenes bien vostre cœur debout et courageux, et Dieu vous comblera de bénédic- tions, et vous consolera du bonheur qu'il donne aux âmes desquelles il veut se servir pour l'avancement des autres. Je salue cette chère seur Marie Barbe (3), et je verray monsieur le Président au premier jour, Dieu aydant (4). Elle a ici une seur toute d'or, a mon gré (5). Dieu soit a jamais vostre force et soustien, ma très chère Fille, et je suis en luy très fidèlement vostre. Le 28 febvrier 161 7. (i) En attendant la décision de Rome au sujet de la réduction de la Visi- tation en Ordre religieux, Mk"" de Marquemont faisait de grandes difficultés à Lyon pour la réception des sujets. On comprend donc que TEvêque de Genève hésitât à envoyer ses filles spirituelles à la Mère Favre. (Cf. à l'Appen- dice I, les lettres de celle-ci, 12 février et 7 mars 1617.) (2) Voir à l'Appendice I la lettre de Bellarmin. Même avant l'arrivée du courrier du Cardinal, on avait eu des nouvelles à Annecy : « Nos affaires se remuent fort à Rome, où notre manière dévie est très approuvée et admirée, » écrit la Mère de Chantai le i*^*" janvier 1617, « et tous disent que nous ferions mieux de demeurer ainsi pour la grande utilité qu'elle apporterait. Je ne sais à quoi Monseigneur se résoudra; ce sera à ce qu'il connaîtra être pour la plus grande gloire de Dieu, il n'en faut point douter. » (Lettres, vol. I, p. 161.) (3) La présidente Le Blanc (voir ci-après, note ( i ), p. 366). (4) Le 8 décembre 1600, Pierre Le Blanc acheta la seigneurie de Mions en Viennois et fut anobli deux ans après. D'abord contrôleur des domaines et receveur des Etats de Dauphiné, il était devenu en 1615 second président de la Chambre des Comptes. Après la mort de sa première femme, Ennemonde Chausson (mai 1619), il épousa, le 19 septembre de la même année. Victoire Vignon, sœur de la fameuse marquise de Treffort. Le président Le Blanc de Mions testa le 10 août 1643, laissant à ses héritiers des dettes considérables. (D'après Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné, et Rochas, Biographie du Dauphiné.) (5) Il n'a pas été possible, jusqu"ici, d'identifier cette sœur.  35© Lettres de saint François de Sales  MCCLXXXIV AU CHANOINE JEAN-FRANÇOIS DE SALES, SON FRÈRE (inédite) Affaires ecclésiastiques du diocèse de Genève. — Au sujet d'une excommuni- cation. — Les armes du duc de Savoie victorieuses. Grenoble, 2 mars 1617. Je m'estonne que vous n'ayes receu que le billet que j'escrivis par M. Charbonnet (0, car je vous ay certes escrit a toutes occasions, mon très cher Frère, et fait response a tout ce que vous m'aves proposé. De la cure de Sernex, je vous laissoys faire comme vous jugeries plus a propos (2). Pour M. Vittoz(3), si les meurs et la renommée ne font point d'obstacle, l'habit quil porte ne luy en fait point, car cet Ordre-la est de Clercz réguliers qui, ayans licence de leurs Supérieurs, peuvent servir de curés, ainsy que j'ay déclaré par un escrit que je luy en ay fait (4). Quant a l'excommunication sur les entrées des femmes es monastères des hommes, il faut avant toutes choses voir si il y en a, car jamais je ne l'ay veiie. Et sil y en a une, il faut bien considérer en quelz termes ell'est conceiîe (^), et par après on pourra la promulger (sic)^ (1) Michel Charbonnel (voir tome XV, note (3), p. m). (2) La cure de Cernex était vacante par la mort de Louis de MandoUaz, arrivée en janvier. Le 3 mars eut lieu le concours à la suite duquel François Delespine ou Despine, docteur in utro que jure et chanoine de Saint-Pierre de Genève, en fut institué économe. Il ne garda pas longtemps cette charge, car il mourut au mois de juillet; Tannée suivante, le 20 mai. il eut pour successeur Michel Charbonnel. (R. E.) (3) Lorsque, le 26 octobre 1607, le saint Evêque visita le prieuré de Poisy, l'une des dépendances de l'abbaye d'Entremont (voir tome XII, note (3), p. 2<^i), Gaspard Vitoz, chanoine régulier de Saint-Augustin, était au collège d'Annecy. (R. E.) Serait-il le Religieux mentionné ici? (4) Cet écrit ne nous est pas parvenu. (5) Saint Pie V, par sa Qovi.%W\Vi\\o-!x Reguîarium personarum, du 24 octobre 1^66, révoque toutes les permissions accordées aux femmes pour les entrées  Année 1617 351 n'estant pas besoin d'autre (sic) monitions pour la pro- mulgation des excommunications a jure. Mays il faut bien voir ce qui se pourra faire. Quant a y mettre l'excom- munication par nostre authorité, la difficulté seroit grande, par ce quil y auroit lieu a l'appel ; et c'est une grande besoigne d'avoir a faire a des Religieux qui remueront toutes choses par après pour empescher les efifectz de nostre intention, quoy que juste et sainte. Nous avons l'exemple de Monseigneur de Tarentayse (0, plus fort, plus habile et plus hardi que nous, et qui n'avoit a faire qu'a un seul couvent (2). Et pour conclure, sil y a quelque Canon ou Bulle pa- pale qui porte cette excommunication, je suis content qu'avec bon advis on la promulge (sic) ; sil ny en a point de telle, je suis d'advis que nous facions une simple defence, laquelle nous irons fortifiant, par réservation du cas, ou par excommunication, selon que le tems nous enseignera devoir estre fait. Voyla tout ; et estant pressé, dautant que je n'ay que ce loysir d'entre le chapelet et l'Office, je vous salue mille et mille fois, mon très cher Frère, et prie Dieu quil vous comble de bonheur, avec tous nos frères et confrères, demeurant tout vostre sans fin. A Grenoble, le 2 mars 161 7. dans les monastères ou couvents d'hommes, et leur interdit ces entrées sous peine d'excommunication laiœ sententiœ. Grégoire XIII, successeur immédiat de Pie V, confirma la défense de son prédécesseur et les peines édictées contre les transgresseurs. (Cf. Piato, Prœlcctiones Juris Regularis, tom. I, p. 350.) (i) Anastase Germonio (voir tome XV, note ( i ), p. 183). (2) Une seule abbaye existait au diocèse de Tarentaise, celle de Tamié, de l'Ordre de Cîteaux, fondée au xu* siècle par le saint archevêque Pierre, premier du nom. Pendant Tépiscopat de M»"" Germonio, elle fut gouvernée par François-Nicolas de Riddes qui joignait à ses fonctions d'abbé celle de membre du Sénat de Savoie, et siégeait plus souvent dans l'illustre assemblée que dans sa stalle abbatiale. La discipline religieuse, déjà en décadence, ne pouvait que souffrir beaucoup de cet état de choses. L'Archevêque voulut-il y remédier ? Est-ce à ses efforts sur Tamié que François de Sales fait ici al- lusion ? Les documents font défaut pour résoudre la question. Toujours est-il que ce fut seulement vers la fin du siècle (1677) que l'abbaye cistercienne se réforma. Première fille de la Trappe, elle n"a cessé jusqu'à la Révolution, et depuis sa restauration (1861), d'être un foyer de ferveur. (Cf. Burnier, Hist. de r Abbaye de Tamié en Savoie, Chambéry, 1865.)  3^2 Lettres de saint François de Sales M. de Crequi arriva hier (0, que j'ay veu ce soir et m'a dit que Albe estoit assiégée quand il partit, et tenoit qu'elle estoit prise des avanthier ; que l'on traittoit fort la paix en Espagne, et y avoit diverses opinions si elle se feroit ou non i-). Je salue de tout mon cœur messieurs les Collatéraux (3) et suis leur serviteur fidèle, et mesdames leurs chères espouses (4), avec la plus que toutes (sic), de madame de Quoex, ma seur. A Monsieur Monsieur de Boysi, Chanoyne et chantre de l'Eglise cathed^®. Vicaire gênerai au diocasse de Genève. Revu sur l'Autographe conservé à la Bibliothèque de Besançon, { I ) Charles, sire de Créqui, comte de Sault, prince de Poix, pair de France, était fils d'Antoine de Blanchefort, l'héritier du nom et des biens de la maison de Créqui, et de Chrétienne d'Aguerre. Il fut deux fois le gendre de Lesdi- guières : par sa première femme, Madeleine de Bonne, née du mariage du duc avec Claudine Bérenger, et par la seconde, Françoise, fille de Marie Vignon. Pendant plus de quarante ans, Créqui suivit la carrière des armes et servit avec bonheur son roi et sa patrie, se distinguant au milieu des plus célèbres capitaines de son temps. En 1622, le Roi le créa maréchal de France. La guerre pourtant ne fut pas le seul théâtre de ses succès; on lui confia, en 1633, l'ambassade extraordinaire de Rome, et, Tannée suivante, celle de Venise. Son éloquence naturelle, ses qualités aimables et sa magnificence le rendaient apte à la diplomatie. Un coup de canon l'emporta le 17 mars 1638 devant la ville de Brème. Son fils aîné continua la branche des Lesdiguières, et le second celle des Créqui. (2) On sait que le gouverneur du Dauphiné avait passé les Alpes contre le gré du Roi et des ministres. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 321.) Ses troupes, unies à celles de Charles-Emmanuel, après s'être emparées de San Damiano, assiégèrent Albe, d'où les garnisons ennemies étaient sorties la nuit (14 février). Le duc de Savoie, ayant en personne reconnu la ville, la fit investir, et les habitants, après une sortie inutile, se voyant abandonnés des Espagnols, se rendirent le 26, et se rachetèrent du pillage pour vingt mille ducatons. Mais il y avait bien des mécontents de l'appui donné par Lesdiguières à Charles-Emmanuel ; aussi Louis XIII, sous prétexte de quelques nouveaux mouvements survenus en France, lui avait dépêché Créqui pour le rappeler. (Voir Guichenon, Hist. généal. de la Maison de Savoie, tome II.) {3) Claude de Quoex et Barthélémy Flocard. (4) Bernardine de Chissé (voir tome XII, note ( i ), p. 100), et Claudine Viallon de la Pesse (voir ci-dessus, note (i), p. 303).  Année 1617 353 MCCLXXXV AU PRINCE DE PIEMONT, VICTOR-AMÉDÉE (0 L'Evêque de Genève sollicite la confirmation de M. de Charmoisy dans une charge. Grenoble, 3 mars 1617. Monseigneur, Vostre Altesse ayant fait Ihonneur a monsieur de Charmoysi de non seulement l'employer, mays aussi aggreer son service, jusques a luy vouloir asseurer la charge qu'il avoit exercée i^\ je supplie très humblement vostre bonté, Monseigneur, de luy faire jouir du fruit de cette grâce. En quoy, bien que je sois son parent, je ne me relascherois pas de le recommander si librement, si je ne voyois que cet honneur ne luy peut meshuy manquer sinon avec beaucoup de perte de sa réputation auprès de monsieur le Grand de France (3>, monsieur d'Alincourt (4) et plusieurs autres seigneurs du voysinage, qui, ayans sceu et luy ayans tesmoigné de se res-jouïr que Vostre Altesse l'en vouloit gratifier, attribueroyent le manque- ment a quelque degoust qu'il eut donné despuis en l'exer- cice de cet office, lequel au reste je m'asseure quil fera dignement et au gré de Son Altesse (5) et de la Vostre, Monseigneur, si elle l'y establit (^). (i) La mention de « Son Altesse » à la fin de cette lettre suffit à démontrer l'erreur de Datta, de Vives et de Migne, qui ont donné pour destinataire le Duc de Savoie. Du reste, c'est Victor-Amédée lui-même qui avait choisi, quel- ques mois auparavant, M. de Charmoisy pour « la conduite de l'artillerie. » (Voir plus haut, p. 285.) — Nous rectifions également l'adresse de la lettre suivante : les mêmes éditeurs n'avaient pas remarqué l'allusion au séjour du prince à Annecy. (2) Voir ibid., note (2). (3) Le duc de Bellegarde. (4) Charles de Neufville, marquis d'Alincourt, gouverneur de Lyon. (Voir le tome précédent, note (1), p. 238.) (5) Le duc de Savoie, (6) En effet, le prince de Piémont établit le cousin de François de Sales dans sa charge. (Voir ci-après, la lettre du 12 avril à M, Milletot.) ETTRES VII 23  354 Lettres de saint François de Sales Je prie Dieu qu'il accroisse de plus en plus ses béné- dictions sur Vostre Altesse, a laquelle je fay très hum- blement la révérence, et suis infiniment, Monseigneur, Très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, France. E. de Genève. III mars 1617, a Grenoble. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCCLXXXVI AU MÊME Le sieur Gillette en Piémont. — Prière au prince de lui accorder sa protection . Grenoble, 5 mars 1617. Monseigneur, Les affaires de la Sainte Mayson de Thonon appellans le sieur Gilette par delà, je supplie très humblement Vostre Altesse de protéger et favoriser sa poursuite (0, qui ne peut aussi reuscir sinon par cet appuy, auquel nous recourons d'autant plus asseurement, que Vostre Altesse nous l'a ainsy commandé Thors que nous avions le bonheur de sa présence (2). (i) Pierre Gillette, Téconome général de la Sainte-Maison de Thonon (voir tome XIV, note ( i ), p. 37), avait sans doute à traiter au-delà des monts plu- sieurs questions relatives à sa charge. L'affaire principale, pour laquelle était requis l'appui du prince, paraît être la suppression plus ou moins prochaine du prieuré de Contamine. Déjà elle se préparait par la prohibition d'admettre de nouveaux Religieux et par l'attribution des prébendes vacantes aux Barna- bites d'Annecy et de Thonon : pour de graves raisons, l'Evéque de Genève désirait la disparition des moines d'un couvent d'où avait disparu depuis longtemps la vraie vie monacale. (Cf. Bouchage, Le Prieuré de Contamine- sur-Arve, Chambéry, 1889, pp. 109-123.) (2) Voir ci-dessus, note ( i ). p. 290.  Année 1617 ^55 Dieu, par sa bonté, veuille combler Vostre Altesse de ses bénédictions ; souhait continuel, Monseigneur, de Vostre très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur. Francs, E. de Genève. 5 mars 161 7, a Grenoble. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCCLXXXVII  AU MEME  Un ecclésiastique qui porte les armes et extorque des lettres de faveur au duc de Savoie. — Comment faire cesser un pareil abus. Grenoble, 5 mars 1617. Monseigneur, Il y a long tems que le doyen de Choysi, prestre (0, fait profession de conduire des soldatz et suivre l'armée, voulant néanmoins tirer les fruitz de son decanat sur le Chapitre et église de Salanche (2), comme sil faysoit la résidence a laquelle il est obligé. Et par ce qu'il sçait que ledit Chapitre ne peut en conscience les luy distri- buer, ni moy permettre qu'il en jouisse de la sorte, il obtient de tems en tems des lettres par lesquelles Son Altesse Serenissime commande audit Chapitre de déli- vrer lesditz fruitz. Mays je suis asseuré. Monseigneur, que si Son Altesse sçavoit la qualité de l'homme, elle le ren- voyeroit a son devoir, et ne voudroit pas que l'Ordre ecclésiastique fut violé a son occasion, puisque mesme il n'a rien de si recommandable en la profession militaire que Son Altesse en puisse attendre aucun notable service. Et d'autant que j'en parlay a Vostre Altesse Tors que nous avions le bonheur de sa présence de deçà, et qu'elle (1) Claude-Nicolas de Reydet de Choisy (voir ci-dessus, note (2), p. 342, et plus loin, la lettre du 26 avril su même destinataire). (2 ) Voir ibid., note ( i ].  350 Lettres de saint François de Sales tesmoigna de treuver mes remonstrances dignes d'estre protégées, je la supplie très humblement de me com- mander ce que j'auray a respondre, avec ce Chapitre-la, aux lettres réitérées de Son Altesse que ce mauvais prestre obtient, et par lesquelles il presse plus ce Cha- pitre qu'il ne sçauroit faire par aucune autre voye, la seule ombre de la volonté de saditte Altesse nous estant en extrême révérence. Je prie Dieu quil la conserve, et la Vostre, Monseigneur, delaquelle je suis Très humble et très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, France E. de Genève. 5 mars 1617, a Grenoble. Revu sur l'Autographe conservé à Turin, Archives de l'Etat.  MCCLXXXVIII  A LA MERE DE CHANTAL  Eloge du peuple de Grenoble. — La part que les hommes laissent aux femmes. — Projet d'établissement d'une Maison de la Visitation: sentiment du Saint à cet égard. Grenoble, 12 mars 161 7. Ce ne sera qu'un billet, ma très chère Mère, que vous recevres aujourd'huy de moy ; Dieu me partage a mille choses et ne laisse pas de me tenir dans la sainte unité que sa main a faite en nous. Je ne vis jamais un peuple plus docile que celuy ci, ni plus porté a la pieté ; sur tout les dames y sont très dévotes, car icy, comme par tout ailleurs, les hommes laissent aux femmes le soin du mesnage et de la dévotion. Douze des premières de la ville se sont rendues mes filles (0, et travaillent pour establir icy une Mayson de ( I ) « Les femmes sa distinguèrent par un saint empressement à suivre ce nouveau législateur de la dévotion, » raconte VHistoire de la Fondation de la Visitation de Grenoble : <( grand nombre de dames se mirent sous sa direction, et  Année 1617 357 nostre petite Visitation. Monseigneur TEvesque (0 et MM. du Parlement n'y tesmoignent aucune répugnance, ni moy aucun empressement, quoy que, a vous dire le vray, je désire cette Mayson, parce que j'espère que Dieu en sera glorifié (2). Je voy en sa Providence les moyens propres a l'exécution de ce projet, et néanmoins je n'ay point encor le mouvement intérieur d'en faire l'ouverture. Il faut attendre, prier et espérer, et sur tout nous bien humilier devant la divine Majesté.  Revu sur le texte inséré dans un ancien Ms. de VAnnée Sainte, conservé à la Visitation d'Annecy. devinrent par ses soins de véritables Philothêes... Outre les sermons du matin, il leur faisait des conférences l'après-dîner, quelques jours de la semaine, chez M™"= de Granieu, où elles s'assemblaient pour l'entendre plus particuliè- rement expliquer les exercices de la vie spirituelle. Là, il donnait la solution à tous leurs doutes, répondait à toutes leurs questions, et, avec une douceur angélique, donnait à toutes une générale satisfaction. » ( I ) Depuis deux ans. Alphonse de la Croix de Chevrières, comme coadju- teurdeson père, dirigeait l'administration diocésaine; mais François de Sales soigneux de le désigner ailleurs par son titre d'Evêque de Chalcédoine, veut très probablement parler ici du premier Pasteur du diocèse, qu'on dut consulter pour l'établissement d'une nouvelle Maison religieuse. Fils de Félix de la Croix de Chevrières et de Guigonne Portier, dame de Brie en Dauphiné. Jean de la Croix est l'un des grands hommes de son temps. Magistrat et diplomate distingué, il occupa les premières charges au Parlement de Grenoble et fut envoyé comme ambassadeur extraordinaire en Piémont. Sa femme, Barbe d'Arzac. qu'il avait épousée en 1577, l'ayant laissé veuf, Henri IV lui donna l'évêché de Grenoble (1607); Marie de Médicis le choisit pour être de son Conseil. En 1612, la province de Vienne l'envoyait à l'Assem- blée générale du clergé, et deux ans après, il était député aux Etats généraux. Dès lors, M^r Jean de la Croix résida presque constamment à Paris, où il mourut le 8 mars 1619. (Voir Gallia Christiana et Auvergne, Chronologie des Eve que s de Grenoble.) (2) La fondation s'effectua l'année suivante. !e 8 avril.  358 Lettres de saint François de Sales MCCLXXXIX A MADAME DE GRANDMAlSON Remplacer le jeûne corporel par la mortification du cœur. Moisson de belles âmes. Grenoble, fin mars 1617 (i). Je suis sur mon despart, ma très chère Fille, et pressé pour cela; vous mettres, s'il vous plaist, en considération ces quatre lignes comme s'il y en avoit beaucoup. Croyes, je vous supplie, que jamais vostre très chère ame ne sera plus aymee qu'elle l'est de la mienne. Mais, que me dit on ? On me dit qu'estant grosse vous jeusnes, et frustres vostre fruit de l'aliment qui est requis a sa mère pour luy donner celuy qui luy est deu. Ne le faites plus, je vous supplie, et vous humiliant sous l'advis des docteurs, nourrisses sans scrupule vostre cors en consi- dération de celuy que vous portes. Vous ne manqueres pas de mortification pour le cœur, qui est le seul holo- causte que Dieu désire de vous. O mon Dieu, ma très chère Fille, que j'ay treuvé icy force grandes âmes au service de Dieu ( = ) ! Que sa Bonté en soit bénite. Et vous estes unie avec elles, puisque vous aves les mesmes désirs. Vives toute en Dieu, ma très chère Fille, et persévères a prier pour Vostre très humble frère et serviteur, Franç% E. de Genève. (i) Le titre de « frère >> que prend le Saint à Tégard de la destinataire, le ton de la lettre, ont suggéré le nom d'Hélène de Longecombe de Peyzieu, dame de Grandmaison. (Voir tome XV, note (1), p. 283.) Les nombreuses « grandes âmes >> rencontrées par TEvêque de Genève sont certainement celles qui se rangèrent sous sa direction à Grenoble, pendant le Carême de 1617 ; d'où la date donnée à ces lignes. (3) Voir note ( I ), p. 356.  Année 1617 359  MCCXC A LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON Grande erreur de croire que l'oraison perfectionne sans Tobéissance. — Suivre Notre-Seigneur crucifié, et non son humeur et sa présomption. — Sentence de saint Bernard. — Que faire des gens qui veulent se gouverner à leur guise. — La sainte imprévoyance de la vraie servante de Dieu. Mars ou avril 1617 (i ). Ma très chère Fille, Je vous diray, sur la difficulté qu'a cette bonne fille (2), qu'elle se trompe grandement si elle croit que l'orayson la perfectionne sans l'obéissance, laquelle est la chère vertu de TEspoux, en laquelle, par laquelle et pour la- quelle il a voulu mourir *. Nous sçavons par les Histoires *Cf. Philip., n. et par expérience, que plusieurs Religieux et autres ont esté saintz sans l'orayson mentale, mais sans l'obéissance, nul. C'est bien fait, ma très chère Fille, il ne faut point de reserve ni de condition ; car, qui recevroit des âmes en cette sorte, la Congrégation se verroit toute pleine du plus fin, et par conséquent du plus dangereux amour propre qui soit au monde. L'une mettroit en condition de (i) Quelques allusions de cette lettre autorisent à désigner presque avec certitude la Mère Favre pour destinataire, et l'année 1617 pour la date. Comme il n'est pas question des sujets traités ici dans la correspondance des premiers mois entre la Supérieure de la Visitation de Lyon et le saint Fondateur, nous proposons mars ou avril, afin de n'éloigner pas trop ces lignes de la sortie de Sœur Jeanne-Marie Coton, qui mettait « en condition de communier tous « les jours. » (Voir ci-dessus, note (i), p. 232, et à l'Appendice I, la lettre de la Mère Favre, 26 janvier 1617.) (2) Avec M"® de Villette (voir plus haut, note ( i ), p. 159), sa suivante, Jeanne-Françoise Etienne, entra au noviciat, et reçut l'habit pour le rang des Sœurs domestiques le 15 août 161 5. Au moment de sa profession, retardée jusqu'au 9 septembre 1618, elle fut admise, par grâce, comme Sœur choriste. Certains indices font croire qu'il s'agit d'elle dans cette lettre, et des récla- mations qu'elle aurait faites pour avoir une heure d'oraison le matin, au lieu de la demi-heure prescrite aux Sœurs converses.  360 Lettres de saint François de Sales communier tous les jours; l'autre, d'ouyr trois iMesses; l'autre, de faire quatre heures d'orayson ; l'autre, de servir tous-jours les malades, et par ce moyen, chacune suivroit son humeur ou sa présomption, en lieu de suivre Nostre Seigneur crucifié. Il faut que celles qui entreront sçachent que la Congrégation n'est faite que pour servir d'escole et de conduitte a la perfection, et que l'on y acheminera toutes les filles par les moyens plus convenables, et que les plus convenables seront ceux qu'elles ne choisiront * Epist. Lxxxvii, ad point. « Qui se gouverne soy mesme, » dit saint Bernard*, ^°^^'' ^ "'' (( il a un grand fol pour gouverneur. » Qu'elle demeure donq en paix entre les bras de sa Mère, qui la portera et mènera par le bon chemin. Il faut aymer l'orayson, mays il la faut aymer pour l'amour de Dieu. Or, qui l'ayme pour l'amour de Dieu, n'en veut qu'autant que Dieu luy en veut donner, et Dieu n'en veut donner qu'autant que l'obéissance permet. Si donq cette fille (que j'ayme néanmoins bien fort pour le bien que vous m'en dites) se veut perfectionner a sa guise, il la faut remettre a elle mesme; mais je ne croy pas, si elle est bien dévote et qu'elle ayt le vray esprit d'orayson, qu'elle ne se sousmette a la pure obéissance. Elle est trop prévoyante de dire que, pour un peu de tems, elle s'accommodera a ne faire que demi heure d'orayson ; mais pour tous-jours, qu'il luy fascheroit. La vraye servante de Dieu n'est point soigneuse du lende- main ; elle fait fidèlement ce qu'il désire aujourd'huy, demain elle fera ce qu'il désirera, et passé demain ce qu'il désirera, sans dire ni cecy, ni cela. C'est ainsy qu'il faut unir sa volonté, non au moyen de servir Dieu, mais a son service et a son bon playsir. Ne soy es point soi- gneux du lendemain, et ne dites point : Que mange- rons nous, ni dequoy nous vestirons nous, ni dequoy vivrons nous ? Vostre Père céleste sçait que vous aves besoin de tout cela. Cherches seulement le règne de * Matt., VI, 31-34. Dieu, et toutes choses vous seront données *. Cela s'entend du spirituel comme du temporel. Que donq cette fille prenne un cœur d'enfant, une volonté de cire et un esprit nu et despouilié de toute sorte d'affections, hormis  Année 1617 361 de celle d'aymer Dieu, et quant aux moyens de Taymer, ilz luy doivent estre indifferens. Vives doucement et saintement entre les peynes que vous aves sous vostre charge, ma très chère Fille toute bienaymee, et je prie Dieu qu'il soit la vie de vostre ame. Ainen.  MCCXCI A MADAME DE VELLEPE5LE DE VILLENEUVE (0 Le Saint promet de s'entremettre entre le marquis dAix et la destinataire. Chambéry, i^' avril 1617. Madame, Passant par cette ville avec beaucoup de presse, j'ay receu vostre lettre et les mémoires de vos praetentions ; dont je suis bien ayse, puisque monsieur le Marquis d'Aix (2) m'a escrit que je luy fisse sçavoir ce que vous praetendies, et que, revenant en ce païs (3), il seroit tous-jours bien content de voir tous les differens quil pourroit avoir avec vous, avec le plus de douceur et d'amitié que vous pourries désirer (4). Il est vray, disoit- (i) Charles de Seyssel, baron d'Aix, avait épousé, en 1569, Madeleine d'Avaugour ; il fut assassiné quelques mois après, et sa veuve se remaria avec Nicolas Le Valois. De ce mariage naquit Renée, devenue, le 20 décembre 1609, Mme (Je Vellepesle : à cette date, elle avait trente-trois ans. Déjà veuve de Jean de Pollevé, comte de Fiers, de Benjamin Carbonnel. et de François Le Hérissy, elle perdit en 1614 son quatrième mari, Guillaume Le Gouz, écuyer, seigneur de Vellepesle, de Gurgy-la-Ville, conseiller du Roi et avocat général au Parlement de Bourgogne ; elle-même décéda au château de Ville- neuve, le 2 janvier 1620. (Archives de M. le vicomte de Saint-Seine; voir La Maison de Seyssel, Grenoble, 1900.) (2) Louis de Seyssel (voir tome XIV, note (2), p. 89). (3) En qualité de maréchal de camp, Louis de Seyssel prit part aux guerres continuelles de Charles-Emmanuel. Au mois d'avril 1617, il était donc en Piémont, combattant contre les Espagnols. (4) La dot de Madeleine d'Avaugour et son douaire avaient été hypothé- qués sur les fiefs de Villeneuve et de la Truchère, propriété de son premier mari, Charles de Seyssel (voir note ( 1 ) ci-dessus). Sa fille, M'"^ de Vellepesle, les avait revendiqués contre le neveu et héritier de Charles. Louis de Seyssel, marquis d'Aix ; celui-ci, après un long procès, dut lui vendre les terres en litige (7 mars 1619}. C'est l'affaire à laquelle François de Sales daigna s'intéresser.  362 Lettres de saint François de Sales il, qu'après son arrest de Paris, il pensoit estre exempt d'affaires pour vostre regard. Je luy feray donq part du mémoire qui m'est laissé et, sur ses responses, je vous tiendray avertie, désireux que je seray toute ma vie de vous tesmoigner par effet que je suis, Madame, Vostre plus humble, très affectionné serviteur. Franc», E. de Genève. i'' avril 161 7. A Madame Madame de Vallespelles et de Villeneufve. Revu sur l'Autographe appartenant à M""* Daniel de Vauguyon, château de Monthéard (Sarthe).  MCCXCII A madame de BLANIEU (O Se préparer à rendre compte à Notre-Seigneur. — Comment guider sa barque au milieu des vents. Rumilly (2), 3 avril 1617. Vous aures, je m'asseure, receu ce que vous desiries de monsieur le premier Prsesident de Savoye(3), car il (ï) Marguerite de Sassenage, fille d'Antoine, baron de Sassenage, et de Louise de la Baume-Suze. Malgré l'opinion de quelques historiens (cf. Chorier, Hist. généal. de la maison de Sassenage, Lyon, Thioly, 167a), il est presque certain qu'elle épousa, non Horace, mais Guillaume du Rivail, seigneur de Lieudieu, de Blanieu, etc., qui se distingua sur les champs de bataille parmi les compagnons de Lesdiguières. D'après Giraud (Aymar du Rivail et sa famille, 1849), Guillaume serait mort le 19 décembre 1594. Veuve et sans enfants, M"'^ de Blanieu fonda, en 1613, un couvent de Minimes à Grenoble, devenu dans notre siècle le Grand Séminaire du diocèse. Les procès qu'elle soutint lui furent peut-être suscités par Horace, fils de son mari, tombé dans un état de fortune qui lui faisait désirer des héritages sur lesquels cependant il n'avait aucun droit légitime. (Cf. Almanach général et historique du Dau- phiné de l'an ijSS.) (2) Le Saint, en revenant du Dauphiné, s'arrêta à Chambéry et à Rumilly. (3) Antoine Favre.  Année 1617 363 le despescha soudain ; et maintenant, ma très chère Fille, vous recevrés, sil vous plait, en ce billet, un' asseurance nouvelle que je ne cesseray jamais de vous souhaiter mille et mille bénédictions. Tenes bon, ma chère Fille, et soyes immobile es reso- lutions que vous aves prises pour le salut de vostre ame, affin que vous puissies rendre bon compte de vous mesme a Nostre Seigneur au jour de vostre trespas, lequel, a mesure quil s'approche, nous invite a nous praeparer soigneusement. Soyes bien douce et gracieuse parmi les affaires que vous avés, car tout le monde attend ce bon exemple de vous. Il est aysé de conduire la barque quand elle n'est point pressée des vens et de passer une vie qui est exempte d'affaires ; mais parmi le tracas des procès, comme parmi les vens, il est difficile de tenir le chemin. C'est pourquoy il faut avoir grand soin de soymesme, de ses actions et de ses intentions, et faire tous-jours voir que le cœur est bon et juste, doux et humble et généreux. Vives toute a Nostre Seigneur, conserves bien vostre ame, et aymes la mienne, la recommandant souvent a la miséricorde divine, puisque je suis. Madame, Vostre plus humble serviteur, France E. de Genève. III avril 161 7. A Madame Madame de Blanieu. Revu sur l'Autographe appartenant à M. l'abbé Longin, à Lyon.  3^4 Lettres de saint François de Sales  xMCCXCIII AUX PERES BARNABITES RÉUNIS EN CHAPITRE GÉNÉRAL A MILAN (0  Le Saint présente aux Pères capitulaires un Mémoire concernant l'extension des Barnabites en Savoie.  Annecy. 6 avril 1617. Molto Reverendi Padri in Christo osservandissimi, Habbiamo spesse volte, li RR. Padri délia Congrega- tione vostra di questi collegii di Annessi et Thonone, trattato insieme et di concerto del modo col quale si potrebbe amplificare detta Congregatione in questi paesi di qua dei monti ; et in somma, non troviamo strada me- gliore di quella che si rappresenta nel Memoriale qui alle- gato (2), conforme al quale trattai col Serenissimo Signor  Très Révérends et très honorés Pères dans le Christ, Bien des fois, avec les Révérends Pères de votre Congrégation des collèges d'Annecy et de Thonon, nous avons étudié de concert le moyen d'étendre ladite Congrégation en ces pays d'en deçà les monts. En somme, nous ne trouvons de meilleure voie que celle indiquée dans le Mémoire ci-joint (2), conformément auquel j'ai  (i) Le Chapitre général des Barnabites se tint en 1617 à Milan, du 11 au 26 avril. Il fut présidé par le P. Jean-Ambroise Mazenta (voir le tome pré- cédent, note (2), p. 190) que son Assistant, le P. Jérôme Boerio, remplaça dans le Généralat à la fin de l'assemblée. (Voir ci-après, note (i), p. 380.) Pour représenter les Maisons d'Annecy et de Thonon, on avait député D. Jean- Baptiste Gennari, supérieur du collège de San Dalma^o de Turin, et D. Juste Guérin ; celui-ci, surpris par la maladie, ne put remplir son mandat. (D'après les Acta Capituli generalis, i^ij, conservés aux Archives de San Carlo «' Catinari, Rome.) (2) Si les recherches qui se continuent par les RR. PP. Barnabites pour  Année 1617 36^ Prencipe di Piemonte (0, acciô si potessero anche ampli- ficare Tentrate et havere in Rumigli alcuni beneficii per il Noviciato ( = ) : et Sua Altezza mi promise ogni sorte di assistentia dal canto suo. Hora, resta che le Paternità Loro abbracino le propo- sitioni nostre con amorevolezza et le faciano riuscir dal canto loro, corne io dal canto mio m'adoprarô con tutto il cuore dove vederô Topra mia poter esser utile. Le Vostre Riverentie giudicaranno facilmente che la dila- tatione de la Religion sua sia per far buonissimo progresso a gloria d'Iddio in quesii (sic) regioni, et che questa dilatatione non si puô fare se non col tempo et methodo conveniente, secondo il beneplacito délia Providentia divina ; la quale io supplico che conservi, accresca et perfettioni nella sua gratia le Riverentie Loro et la loro divotissima Congregatione, aile orationi  traité avec le Sérénissime Prince de Piémont (0, afin de pouvoir augmenter encore les revenus et avoir à Rumilly certains béné- fices pour le Noviciat (2). Son Altesse me promJt, pour sa part, toute sorte d'assistance. Reste maintenant que Vos Paternités daignent embrasser avec bienveillance nos propositions et que, de leur côté, elles les fassent aboutir ; quant à moi, je m'emploierai de tout cœur là où je verrai que mon concours pourra être utile. Vos Révérences jugeront aisé- ment que l'extension de leur Ordre est en voie de faire d'excellents progrès à la gloire de Dieu en ces régions, mais que, d'ailleurs, cette extension ne peut s'obtenir qu'avec le temps et une méthode con- venable, suivant le bon plaisir de la divine Providence. Je la supplie de conserver, faire grandir et perfectionner dans sa grâce Vos Révé- rences et leur très pieuse Congrégation, aux prières et Sacrifices de découvrir ce Mémoire ont un heureux succès, la pièce sera donnée avec les Opuscules. ( I ) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 290. (2) D'après les Acta Capituli generalis, cette question d'un Noviciat des Clercs réguliers de Saint-Paul à établir en Savoie fut traitée, mais non résolue, par les Pères capitulaires. Jamais il n'y eut de Maison de Barnabites à Rumilly; les désirs du saint Evèque de Genève, désirs qu'il exprime encore dans une lettre écrite vers la fin de 1617. échouèrent devant des obstacles dont la nature nous est inconnue.  366 Lettres de saint François de Sales et Sacrificii del (sic) quale humilissimamente mi raccom- mando, restando con tutto il cuore, Délie Paternità Vostre molto Révérende, Humile et afFettionatissimo, corne fratello et servitore, Franc°, Vescovo di Geneva. VI di Aprile 161 7, in Annessi. Alli molto R*^' Padri del Ven. Capitolo Générale délia Congregatione de Chierici regolari di S. Paolo. Milano. Revu sur l'Autographe conservé à Rome, Archives des RR. PP. Barnabites. laquelle je me recommande très humblement, restant de tout cœur, De Vos très Révérendes Paternités, Humble et très affectionné, comme frère et serviteur, François, Evêque de Genève. 6 avril 1617, à Annecy. Aux très Révérends Pères du vénérable Chapitre général de la Congrégation des Clercs réguliers de Saint-Paul. Milan.  MCCXCIV A LA PRÉSIDENTE LE BLANC DE MIONS (0 Conseils pour l'oraison. — Comment « accommoder cet exercice » avec la promptitude de l'esprit. — Les larmes de dévotion et Tusage qu'il en faut faire. — La douceur et la tranquillité n'empêchent pas l'action, mais la font réussir. — Contre les tentations au sujet de Tétat de vie où l'on est embar- qué. — L'extérieur dune fille de Dieu. Annecy, vers le 7 avril 1617. Je proteste, ma très chère Fille, que voyci mon premier loysir. Je [le] desrobe encor parmi mille sortes d'affaires, (1) L'une des premières conquêtes du Serviteur de Dieu durant son voyage à Lyon en 161^ (voir ci-dessus, note (3), p. 22), Ennemoade Chausson a sa place bien caractéristique au milieu de la pléiade des Philothées de Grenoble. La situation de son mari, Pierre Le Blanc de Mions (voir ibid., note (4), p. 349), la mêlait à toute la haute magistrature, tandis que sa grâce extérieure,  Année 1617 367 pour vous escrire un peu amplement sur le sujet duquel vous me parles pour vostre chère ame, a laquelle je vous conjure de dire cordialement ce que mon cœur désire estre dit au sien. O que vous estes heureuse, ma chère Fille, de vous estre desprise du monde et de ses vanités aussi ! Certes, a ce que j'ay peu reconnoistre en ce peu de tems que je vous ay considérée (0, vostre ame estoit faite très parti- culièrement pour le divin amour et non pour le terrestre. [i.] Immolés donq souvent toutes vos affections a Dieu par le renouvellement de la resolution que vous aves faite, de ne vouloir pas employer un seul moment de vostre vie que pour le service de la sacrée dilection de l'Espoux céleste. 2. Faites soigneusement l'exercice du matin qui est marqué au livre de V Introduction *; et bien que la * Partie il chap.x. vistessé de vostre esprit comprenne en un seul regard tous les pointz de cet exercice, ne laissés pas de vous y entretenir autant de tems comme il en faut pour dire deux fois le Pater, et après cela, prononcés de bouche son esprit extrêmement vif et prompt, son ardente piété, lui donnaient sur ses amies une influence incontestable. C'est elle qui tout d'abord excite dans la capitale du Dauphiné le désir d'une fondation de la Visitation (voir ci- dessus, note (2), p. 343); et quand, par ses soins et ceux des nobles femmes dont les noms nous deviendront bientôt familiers, l'oeuvre a heureusement abouti, elle provoque une réunion de dames, et lève sur toutes, sans s'oublier elle-même, l'impôt de la charité en faveur de celles qu'elle appelait « ses chères Religieuses. » La Présidente reportait sur les filles l'affection respec- tueuse et profonde vouée au Père. L'Evèque de Genève avait été pour elle l'envoyé de Dieu ; il aidait dans son chemiu souvent semé d'épines l'épouse d'un homme dissipateur et léger; en même temps il admirait les précieuses qualités de cette âme et de ce cœur '< tout aimable en sa cordiale franchise, » selon l'expression de la Mère de Chantai. (Lettres, vol. I, p. 202.) « C'estoit « une rare femme, » écrira-t-il à la nouvelle de sa mort (mai 1619). Un tel mot dans une telle bouche n'est-il pas le plus bel éloge ? Le rapport étroit de cette lettre avec celle du 26 avril, qui détermine la destinataire, sert encore à fixer la date. M""^ Le Blanc ayant répondu à son saint Directeur le 14 (voir ci-après, p. 386), il faut en conclure que ce premier courrier partit d'Annecy le 7 ou le 8. ( I ) La Présidente n'était venue à Grenoble que vers la fin de la station quadragésimale. « Ma pauvre Sœur Barbe-Marie arriva trop tard, » écrit la Mère de Chantai à la Mère Favre, « mais elle doubla le pas ; Monseigneur l'a toute gagnée. » (Lettres, vol. I, p. 190; cf. à l'Appendice I, les lettres de la Mèr3 Favre, 21 février et 7 mars.)  36â Lettres de saint François de Sales cinq ou six paroles d'adoration, et ensuite vous dires le Pater avec le Credo. 3. Vous prepareres après vostre orayson : un mistere de la Vie ou Passion de Nostre Seigneur, que vous vous proposeres de méditer, si tel est le bon playsir de Dieu. Mays si, estant en Torayson, vostre cœur se sent attaché a la simple présence du Bienaymé, vous ne passeres point plus outre, ains vous vous arresteres a cette présence ; que si, au contraire, vous ne vous sentes pas attachée a cette présence, bien que toutefois vous y soyes, vous mediteres doucement le point que vous aures disposé. 4. Or, vous feres tous les jours Torayson, sinon que quelque violente occupation vous en empesche ; puisque, comme vous m'aves dit, Ihors que vous continues en ce saint exercice, vous ressentes un grand avancement de recueillement, duquel vous estes privée quand vous l'abandonnes. 5. Mays affin d'accommoder cet exercice si utile a la vistesse et incomparable promptitude de vostre esprit, il suffira que vous y employés une petite demi heure chaque jour, ou un quart d'heure ; car cela, avec les eslans d'esprit, retraittes du cœur en la présence de Dieu et oraysons jaculatoires qui se feront parmi les heures du jour, suffira très abondamment pour tenir vostre cœur serré et joint a vostre divin Object ; et mesme, cette orayson se pourra faire pendant la Messe pour gaigner tems. 6. Or si, en faysant l'orayson, ou vous arrestant a la sainte présence, le sentiment se faysoit en la teste et qu'il en arrivast du travail et de la douleur en cette partie-la, il faudroit relascher l'exercice et n'appliquer pas l'enten- dement, ains, par des paroles intérieures et affectionnées, appliquer le seul cœur et la volonté. Et c'est pour res- pondre a ce que vous me dites, qu'au commencement, le sentiment de la présence de Dieu se faysoit en la teste, qui parfois vous travailloit fort. 7. S'il vient des larmes, vous les respandres ; mais si elles viennent souvent et avec trop de tendreté, vous releveres vostre esprit, si vous pouves, a gouster plus  Année 1617 369 paysiblement et tranquillement les misteres en la partie supérieure de l'ame ; non pas contraignant et serrant les souspirs ou sanglotz, ou les larmes, mays divertissant d'une heureuse diversion vostre cœur, en le relevant petit a petit a l'amour pur du Bienaymé par des doux eslans : O que vous estes aymable, mon Bienaymé ! O que vous estes relevé en bonté et que mon cœur vous ayme ! ou autrement, selon que Dieu vous tirera. 8. Et parce que vous me dites que vous n'aves fait que fort peu d'orayson pendant que vous aves esté chez vous, vostre esprit estant si actif et mouvant qu'il ne se peut arrester, je vous dis qu'il faut pourtant l'arrester, et allen- tir petit a petit ses mouvemens, afïin qu'il face ses œuvres doucement et tranquillement, selon les occurrences. Et ne vous imagines pas que la douceur et tranquillité em- pesche la promptitude et l'œuvre, car au contraire, elle la fait plus heureusement reuscir. Or, ceci se peut faire en cette sorte. Par exemple : vous aves besoin de manger, selon la misère de cette vie ; il faut que vous vous assoyes tout bellement, et que vous demeuries assise jusques a ce que vous ayes honnestement refectionné vostre cors. Vous vous voules coucher ; des- pouilles vous tranquillement. Vous vous deves lever ; faites le paysiblement, sans mouvement desreglé, sans crier et presser celles qui vous servent. Et qu'en cela vous allies trompant vostre naturel et le réduisant petit a petit a la sainte médiocrité et modération ; car a celles qui ont le naturel mol et paresseux, nous dirions : Hastes vous, d'autant que le tems est cher ; mays a vous, nous vous disons : Ne vous hastes pas tant, d'autant que la paix, la tranquillité, la douceur d'esprit est pretieuse, et que le tems s'employe plus utilement quand on l'employé pay- siblement. 9. Je vous dis, mays, ma chère Fille, je vous le dis fermement, que vous servies fidèlement la volonté de Dieu et sa providence sur le sujet de vostre ancienne tentation, acquiesçant en toute humilité et sincérité au bon playsir céleste, par lequel vous vous treuves en Testât auquel vous estes. Il faut que l'on demeure en la Lettres VII 24  370 Lettres de saint François de Sales barque en laquelle on est, pour faire le trajet de cette vie a l'autre, et que Ton y demeure volontier et amia- blement ; parce qu'encor que quelquefois nous n'y ayons pas esté mis de la main de Dieu, ains de la main des hommes, après néanmoins que nous y sommes, Dieu veut que nous y soyons, et partant il faut donq y estre doucement et volontier. O combien d'ecclésiastiques sont embarqués par des mauvaises considérations et par la force que les parens ont employé pour les faire entrer en cette vocation, qui font de nécessité vertu et qui demeurent par amour ou ilz sont entrés par force ! autre- ment, que deviendroyent ilz ? Ou il y a moins de nostre choix, il y a plus de sousmission a la volonté céleste. Que ma chère fille donq, acquiesçant a la volonté divine, die souvent de tout son cœur : Ouy, Père éter- nel, je veux estre ains}^, parce qu'ainsy il vous a esté Matt., XI, 26. aggreable que je fusse *. Et la dessus, ma très chère Fille, je vous conjure d'estre bien fidèle a la prattique de cet acquiescement et dépendance de Testât auquel vous estes ; et partant, ma chère Fille, il faut que vous nommies quelquefois, es occurrences, les personnes que vous sçaves, du nom auquel vous aves aversion ; et quand vous parleres a la principale d'icelles(0, que quelquefois vous employies parmi vos remonstrances des paroles de respect. Ce point est de telle importance pour la perfection de vostre ame, que je l'escrirois volontier de mon sang. En quoy voulons nous tesmoigner nostre amour envers Celuy qui a tant souffert pour nous, si ce n'est entre les aversions, répugnances et contradictions? Il faut fourrer nostre cervelle entre les espines des difficultés et laisser transpercer nostre cœur de la lance de la contradiction ; boire le fiel et avaler le vinaigre, et en somme, manger l'absinthe et le chicotin, puisque c'est Dieu qui le veut. En somme, ma chère Fille, puisqu'autrefois vous aves nourri et favorisé de tout vostre cœur la tentation, main- tenant, de tout vostre cœur, vous deves nourrir et favo- riser cet acquiescement. Que s'il vous arrivoit quelque (i) Fort probablement le mari de la destinataire.  Annhe 1617 371 notable difficulté sur ce sujet par le défaut de cette per- sonne, ne remues rien néanmoins qu'après avoir regardé l'éternité, vous estre mise en l'indifférence et avoir pris l'advis de quelque digne serviteur de Dieu, si la chose presse, ou mesme de moy, puisque je suis vostre Père, si le tems le permet ; car l'ennemi, nous voyant vainqueur de cette tentation par nostre acquiescement au bon play- sir divin, remuera, je pense, toutes sortes d'inventions pour nous troubler. 10. Au reste, que la tressainte et divine humilité vive et règne en tout et par tout : les habitz, simples, mais selon la propre bienséance et convenance de nostre con- dition, en sorte que nous n'espouvantions pas, ains allé- chions les jeunes dames a nostre imitation ; nos paroles, simples, courtoises, et néanmoins douces ; nos gestes et nostre conversation, ni trop resserrée et contrainte, ni trop relaschee et molle ; nostre face, nette et décrassée ; et en un mot, qu'en toutes choses la suavité et modestie règne, comme il est convenable a une fille de Dieu.  MCCXCV A MADAME DE VEYSSILIEU (0 La crainte excessive de la mort empêche l'àme de sunir à Dieu par amour. Dix remèdes indiqués pour s'en affranchir. AnnecV; 7 avril 1617. Madame, A cette première commodité que j'ay de vous escrire, je tiens ma promesse, et vous présente quelques moyens ( I ) Les précédentes éditions n'ont pas donné le nom de la destinataire, mais il semble hors de doute que ces conseils soient écrits à M'"'' de Veyssilieu, l'une des plus chères filles spirituelles de l'Evêque de Genève à Grenoble. Il lui « écrivoit souvent, » dit une ancienne annaliste, « et nous reconnois- sons dans le livre de ses Epistres beaucoup de lettres adressées à cette ver- tueuse dame. » (Circulaire de la Mère Marie-Antoinette de Villiers, supérieure  372 Lettres de saint François de Sales par lesquelz vous pourres addoucir la crainte de la mort, qui vous donne de si grans effroys en vos maladies et enfantemens : en quoy, bien qu'il n'y ayt aucun péché, si est ce qu'il y a du dommage pour vostre cœur, lequel, troublé de cette passion, ne peut pas si bien se joindre par amour avec son Dieu, comme il feroit s'il n'estoit pas si fort tourmenté. Premièrement donq, je vous asseure que si vous persé- vères a l'exercice de dévotion, comme je voy que vous faites, vous vous treuveres petit a petit grandement al- légée de ce tourment ; d'autant que vostre ame, se tenant ainsy exempte des mauvaises affections et s'unissant de plus en plus a Dieu, elle se treuvera moins attachée a cette vie mortelle et aux vaines complaysances que l'on y prend. Continués donq en la vie dévote selon que vous aves commencé, et ailes tous-jours de bien en mieux au chemin dans lequel vous estes ; et vous verres que, dans quelque tems, ces terreurs s'affoibliront et ne vous in- quiéteront plus si fort.  au 2d Monastère de la Visitation de Grenoble, 21 novembre 1674, Archives de la Visitation d'Annecy.) Le 26 avril (voir ci-après, Lettre mccci, p. 389) le Saint en indique une qu'il lui aurait envoyée récemment; selon toute probabilité, c'est celle-ci. La mention du « petit Jean » (p. 375), et ce que les Registres paroissiaux de Saint-Hugues et de Saint-Jean de Grenoble nous apprennent sur les naissances des enfants de M.™^ de Veyssilieu, confirment notre propo- sition. Marguerite de la Croix de Chevrières. fille de Jean de la Croix de Che- vrières et de Barbe d'Arzac, avait épousé le 24 avril 1608 (1), Laurent Rabot d'Aurillac, seigneur de Veyssilieu (voir ci-après, note ( i ), p. 374). Elle fut toujours « un modelle de modestie, de pieté et d'humilité chrétienne, » assure l'annaliste citée plus haut; mais ces vertus parurent avec bien plus d'éclat quand elle eut le bonheur d'être conduite dans la vie spirituelle par saint François de Sales. La noble dame contribua beaucoup à rétablissement de la Visitation dans la capitale du Dauphiné, et les peines prises pour cela lui paraissaient bien récompensées « par la conversation toute sainte et dévote qu'elle avoit. . . fréquemment avec » la « Mère de Chastel et sa bénite troupe. » Cinquante ans après, M""^ de Veyssilieu aimait à rappeler ces heureux com- mencements du nouveau Monastère auquel elle donna l'une de ses filles. Celle-ci coopéra, en 1648, à la fondation de la seconde Maison de l'Ordre à Grenoble, dont sa mère se plut encore à être la bienfaitrice.  (i) V Armoriai du Dauphiné et l'Histoire généalogique des familUi de la Croix de Chevrières, etc. (1678), donnent la date de ;6/S. Moreri lui-même (éd. de 1740) répète cette erreur à l'article Croix (tome III), mais la rectifie à l'article Rabot {\om^ VII).  Année 1617 373 Secondement, exerces vous souvent es pensées de la grande douceur et miséricorde avec laquelle Dieu nostre Sauveur reçoit les âmes en leur trespas, quand elles se sont confiées en luy pendant leur vie et qu'elles se sont essayées de le servir et aymer, chacune en sa vocation . O que vous estes bon, Seigneur, a ceux qui ont le cœur droit ""l •Ps.lxx,., r. Tiercement, relevés souvent vostre cœur par une sainte confiance meslee d'une profonde humilité envers nostre Rédempteur; comme disant : Je suis misérable, Seigneur, et vous recevres ma misère dans le sein de vostre miséri- corde, et vous me tireres de vostre main paternelle a la jouissance de vostre héritage. Je suis chetifve, et vile, et abjecte; mays vous m'aymeres en ce jour, parce que j'ay espéré en vous et ay désiré d'estre vostre. Quatriesmement, excités en vous, le plus que vous pourres, l'amour du Paradis et de la vie céleste, et failes plusieurs considérations sur ce sujet, lesquelles vous treuveres suffisamment marquées au livre de Vlntro- duction a la Vie dévote, en la Méditation de la gloire du Ciel, et au choix du Paradis *; car, a mesure que * P^rt. [, ch. vous estimeres et aymeres la félicité éternelle, vous aures moins d'appréhension de quitter la vie mortelle et péris- sable. Cinquiesmement, ne lises point les livres ou les endroitz des livres esquelz il est parlé de la mort, du jugement et de l'enfer ; car, grâces a Dieu, vous aves bien résolu de vivre chrestiennement et n'aves point besoin d^ estre poussée par les motifs de la frayeur et de l'espouvantement. Sixiesmement, faites souvent des actes d'amour envers Nostre Dame, les Saintz et Anges célestes ; apprivoysés vous avec eux, leur addressant souvent des paroles de lou- ange et de dilection ; car ayant beaucoup d'accès avec les citoyens de la divine Hierusalem céleste, il vous fas- chera moins de quitter ceux de la terrestre ou basse cité du monde. Septiesmement, adorés souvent, loués et bénisses la très sainte Mort de Nostre Seigneur crucifié, et mettes toute vostre confiance en son mérite, par lequel vostre mort  XVII.  374 Lettres de saint François de Sales sera rendue heureuse ; et dites souvent : O divine mort de mon doux Jésus, vous benires la mienne, et elle sera bénite ; je vous bénis, et vous me benires, o mort plus aymable que la vie ! Ainsy saint Charles, en la maladie de laquelle il mourut, fit mettre a sa veuë l'image de la sépulture de Nostre Seigneur et celle de Torayson qu'il fit au mont des Olives, pour se consoler en cet article, *CaroiusaBasiiica SUT la Mort et Passion de son Rédempteur *. ta^s^.^ CaroiTBÔrr!, Huitiesmement, faites quelquefois reflexion sur ce que 1. VI, c. VIII. vous estes fille de l'Eglise catholique, et vous res-jouisses de cela ; car les enfans de cette Mère qui désirent de vivre selon sesloix, meurent tous-jours bienheureux, et, comme * Ribera, Vita Ma- dit la bienhcurcuse Mère Thérèse *, c'est une gfrande tris Teresias, 1. III, , . ,, ° c.xv.(Cf.tom.xii, consolation a 1 heure de la mort d'estre « fille de la sainte P-'^^-) Eglise. » Neufviesmement, finisses toutes vos oraysons en con- fiance, comme disant : Seigneur, vous estes mon espe- */s. cxLi, 6. rance'^ ; en vous j'ay jette ma fiance '^^. O Dieu, qui * Eccii., l'i, II. espéra jamais en vous, lequel ayt esté confondu *? f espère en vous, o Seigneur, et je ne seray point * Ps, XXX, I, Lxx, I. confondu éternellement *. En vos oraysons jaculatoires parmi la journée, et en la réception du tressaint Sacre- ment, usés tous-jours de paroles d'amour et d'espérance envers Nostre Seigneur, comme : Vous estes mon Père, o Seigneur ! O Dieu, vous estes l'Espoux de mon ame ; vous estes le Roy de mon amour et le Bienaymé de mon • ame ! O doux Jésus, vous estes mon cher Maistre, mon secours, mon refuge ! Dixiesmement, considères souvent les personnes que vous aymes le plus et desquelles il vous fascheroit d'estre séparée, comme des personnes avec lesquelles vous seres éternellement au Ciel : par exemple, vostre mary ( ^ ), vostre  (i) Héritier d'une noble famille qui donna de nombreux officiers au Parle- ment du Dauphiné et des hommes de grande érudition, le conseiller Laurent Rabot d'Aurillac, ou d'Avrillac, seigneur de Veyssilieu et de Fontaines, avait pour parents Falco ou Falques Rabot et Ennemonde de Loras de Montplaisant. 11 vivait encore en 1640, époque de Tentrée de sa fille Marguerite au i*"" Mo- nastère de la Visitation de Grenoble, (D'après Moreri, et Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné.)  Année 1617 375 petit Jean(0, monsieur vostre perev^). O ce petit gar- çon, qui sera, Dieu aydant, un jour bienheureux en cette vie éternelle, en laquelle il jouira de ma félicité et s'en res-jouira, et je jouiray de la sienne et m'en res-jouyray sans jamais plus nous séparer. Ainsy du mary, ainsy du père et des autres : en quoy vous aures d'autant plus de facilité, que tous vos plus chers servent Dieu et le craignent. Et parce que vous estes un peu melancholique, vo3^es au livre de V Introduction a la Vie dévote ce que je dis de la tristesse et des remèdes contre icelle *. * P^''^- l^', ch. Voyla, ma chère Dame, ce que pour le présent je vous puis dire sur ce sujet, que je vous dis avec un cœur grandement affectionné au vostre, lequel je conjure de m'aymer et recommander souvent a la miséricorde divine, comme réciproquement je ne cesseray jamais de la sup- plier qu'elle vous bénisse. Vives heureuse et joyeuse en la dilection céleste, et je suis Vostre plus humble et très affectionné serviteur, Francs E. de Genève. Le 7 avril 161 7. ( I ) Cet enfant, baptisé le 15 avril 1613 (Reg. par. de Grenoble), avait alors quatre ans. Plus tard, il suivit, comme son père, la carrière de la magistra- ture, fut reçu, le 5 mai 1645, avocat général au Parlement et devint, en 1662, conseiller d'Etat. De sa femme, Anne de Reyaard d'Avançon, Jean de Veys- silieu eut un fils et quatre filles. (D'après Moreri et Rivoire de la Bâtie, Ar- moriai du Dauphiné.) (2) Jean de la Croix de Chevrières, alors évêque de Grenoble (voir ci- dessus, note (i), p. 3^7). Sa cadette, Marguerite, semble avoir eu sur lui une influence particulière. C'est elle qui, lors des pourparlers au sujet de la fon- dation de la Visitation dans sa ville épiscopale, triomphe de ses résistances et obtient son consentement.  376 Lettres de saint François de Sales MCCXCVI A MADAME COTTIN (0 (inédite) Assurance de paternelle affection. — « Se mortifier et faire toutes choses selon la volonté de Dieu. » Annecy, 8 avril 1617. Par ces quatre lignes je vous asseure, ma chère Fille, que je vous chéris tous-jours sans varier et vous souhaite toute bénédiction, et a monsieur le Maistre (2) et a toute (i) M.'"^ Cottin, née Isabeau Daspres, fut des premières, à Grenoble, à se placer sous la conduite de François de Sales. Nature extrême, impérieuse, dès qu'elle eut entrevu la perfection, elle voulut l'embrasser dans sa forme la plus haute, la vie religieuse. Son saint Directeur contint ses impétueuses aspirations, lui montra la volonté de Dieu dans l'accomplissement de ses devoirs de famille; mais après la mort de ce guide prudent et éclairé, les désirs à peine assoupis de l'ardente femme se réveillèrent. La Mère de Chantai essaya de les calmer et obtint d'elle la promesse « de patienter et de servir son mari déjà à moitié mort, jusqu'à ce qu'il le fût tout à fait. » (Lettres, vol. II, 1877, p. 411.) Promesse vaine! Le 20 mars 1625, la Fonda- trice recevait l'annonce du « grand bruit... causé à Grenoble » par « la sortie de M*"^ Cotin. » (Ibid.) La fugitive était à la Visitation de Lyon avec sa fille. Quelques mois après, ses affaires la rappelant dans la capitale du Dauphiné, elle « s'y trouva tout à propos pour la mort de son mari, » qui emporta devant Dieu le mérite du consentement donné à la retraite de sa femme. De retour à Lyon, la nouvelle veuve y prit l'habit en janvier 1627, avec le nom de Françoise-Elisabeth ; au mois de mars, l'assassinat d'un de ses fils l'obligea à rentrer de nouveau dans le monde. Rien cependant ne lassa sa persévérance, et, le 30 mars 1631, elle signait au second monastère de Lyon, dit de TAntiquaille, l'acte de sa profession religieuse. Le 24 mars 1646, Sœur Françoise-Elisabeth mourut en celui de Bellecour, où elle était revenue depuis huit ans. (D'après la Notice de Sœur F.-E. Daspres, Archiv. de la Visitation d'Annecy; le Livre du Couvent et le Livre du Chapitre du i^"" Monastère de Lyon, transféré à Venise.) (2) Il y avait alors à Grenoble un conseiller au Parlement nommé Jean- Louis Le Maistre, dont la femme devint une Philothée de l'Evèque de Genève ; un consul François Lemaître paraît vers le même temps. Mais quels rapports existaient entre eux et la famille de la destinataire ? — Ne s'agirait-il pas plutôt du mari même de M'ns Cottin, désigné ici, non par son nom, mais par son office? La question reste jusqu'à présent insoluble. Nous savons seulement que M. Cottin occupait quelque charge au Parlement, et que, outre les pré- sidents à la Chambre des Comptes, il y avait MM. les Maîtres et MM. les Correcteurs. Les mêmes titres se trouvaient au Bailliage, aux Eaux et Forêts.  Annhr 1617 577 vostre famille. Ne permettes pas a vostre esprit d'entrer en ces défiances qui le rendent amer et triste. Tenes vostre cœur doux et bon envers le prochain, et ainsy Dieu vous bénira de ses grandes bénédictions, comme de tout mon cœur je l'en supplie, et suis sans fin, Vostre plus humble, très affectionné, et a M. le Maistre que je salue icy avec vous de tout mon cœur. Annessi, le viii avril 1617. Je salue encor M'^'' Baro (0, et luy recommande de tenir son ame en dévotion. Pour plusieurs bonnes raysons, je désire que vous ne venies point cett'annee (-', ou du moins pas si tost, puisqu'aussi bien, quant a Marie, elle ne peut en façon quelcomque estre receue avant Taage (3). Il faut se mor- tifier, et faire toutes choses selon la volonté de Dieu. Il ny a rien qui presse, ni rien a faire en vostre ame que de la rendre douce et amiable es contradictions. (4) A Madamoyselle Madamoyselle Cottin. A Grenoble. Revu sur l'Autographe conservé à Laval, chez les Dames du Sacré-Cœur. (£) Peut-être Lucrèce Berthier, femme de Gaspard Baro. conseiller au Parlement du Dauphiné. Elle était déjà mariée avant 1603, date de la naissance de son fils François. (Reg. par. de Grenoble.) (2) A Annecy, où la destinataire fit plusieurs voyages pour conférer de sa conscience avec le saint Directeur. (3) Marie Cottin était alors une enfant de douze ans à qui sa mère souhaitait la vocation religieuse; mais, entraînée par des attraits tout différents, elle se maria fort jeune. Bientôt elle perdit son mari qui lui laissa deux filles. Lorsque M""^ Cottin se retira au monastère de Lyon, elle l'accompagna sans songer à la suivre au noviciat. La grâce de Dieu, cependant, triompha soudainement de cette âme dont tous les désirs étaient pour le monde, et l'on vit se réaliser une prophétie du saint Evéque de Genève qui lui avait annoncé ce futur chan- gement. Sœur Marie-Aimée prononça ses vœux le i^"" novembre 1626; quatre ans après, jour pour jour, elle mourut au monastère de Paray-le-Monial dont elle fut l'une des fondatrices. (D'après le Livre du Couvent du i"" Monastère de Lyon, transféré à Venise.) (4) L'adresse est de la main d"un secrétaire.  378 Lettres de saint François de Sales MCCXCVII AU PRÉSIDENT ANTOINE FAVRE (0 (inédite) Une aspirante à la Visitation. — Mortalité à Chambéry. Annecy, 10 avril 1617. Monsieur mon Frère, Avec mille remercimens de la faveur de vos lettres, je vous donne le bonjour, et vous asseure que j'ay escrit pour la nièce de monsieur Chanal ( = ), non seulement a nostre fille (3), dont il n'estoit pas besoin, mays aussi a Monseigneur l'Archevesque duquel tout dépend (4). On me fait peur par le bruit qui court qu'a Chamberi il y a des maladies si dangereuses, et que monsieur d'Avisé s'en va mort (5), qui est le sujet du voyage de ce porteur. Nous sommes icy sans nouvelles. ( 1 ) Voir tome XI, note ( i ), p. i8. ( 2 ) Le père de M. Chanal, Isaac, avait épousé en premières noces une tante maternelle d'Antoine Favre, Louise de Chastillon; de son second mariage avec Aimée de Venet, naquit François., qui devint homme d'épée et se distingua dans les guerres de Piémont. Il mourut en juin 1617, à Rivarolo (Italie), sans avoir été marié, laissant son nom, ses armes et ses biens à un fils de sa sœur Catherine, dame de Saint-Loup. (D'après Guichenon, Hist. de Bresse et de Bugey, 1650, Partie III.) Une demoiselle de Saint-Loup protégea plus tard les débuts de la Visitation de Bourg; elle est, peut-être, la prétendante du prin- temps de 1617. On peut encore penser à une fille d'Anne Chanal, née du pre- mier mariage d'Isaac, et par conséquent cousine-germaine du président Favre. La Mère de Chantai, au mois de mai suivant, parle en effet à la Supérieure de Lyon des prétentions à la vie religieuse d'une « damoiselle » sa « pa- rente. » (Lettres, vol. I, p. 194.) (3) La Mère Marie-Jacqueline Favre. ( 4 ) Dans la lettre citée plus haut, note ( 2 ), la Mère de Chantai explique la double difficulté que soulevait M»*" de Marquemont : « Pour le regard de cette bonne damoiselle votre parente, il faut essayer de gagner M^"" l'Archevêque, et lui dire que puisque nos affaires sont résolues, il ne doit plus avoir tant de crainte... Il faudra doucement persuader ce bon Prélat de regarder plus aux esprits qui seront propres que non pas aux richesses. » ( 5) Prosper d'Avisé ne mourut qu'en 1645. (Voir ci-dessus, note ( i ), p. 98.)  Année 1617 379 Je prie Dieu quil vous conserve, avec madame ma chère seur (0, et suis sans fin, Monsieur mon Frère, Vostre très humble et obéissant frère et serviteur, Francs E. de Genève. X avril 161 7. A Monsieur Monsieur Favre, Baron de Peroges, Conseiller d'Estat de S. A., premier Président de Savoye. Revu sur l'Autographe appartenant à M. le chanoine Collonges, aumônier de la Visitation de Chambéry. (i) Philiberte Martin de la Pérouse, que le destinataire avait épousée en secondes noces. (Voir tome XIV, note ( i ), p. 372.)  MCCXCVIII A M. BÉNIGNE MILLETOT (0 Le Saint prie son ami d'appuyer une requête fondée « sur la pieté et la justice. » — M. de Charmoisy grand maître de l'artillerie. — Engagement pour le prochain Carême à Grenoble. Annecy, 12 avril 1617. Monsieur mon Frère, C'est maintenant pour mon Eglise (et que puis-je dire de plus affectionné ?) que j'implore vostre fraternelle faveur, et croy qu'elle me sera facilement accordée, sur tout quand vous aures ouy la remonstrance que ce por- teur vous fera, par laquelle vous verres que le brevet dont il s'agit est non seulement fondé sur la pieté, mais encor, si je ne me trompe, sur la justice ( = ). Je vous supplie donq très humblement, Monsieur mon Frère, de nous estre ardemment propice. Vous me demandies l'autre jour, par la dernière lettre que j'ay eii le bien de recevoir de vous, des nouvelles de (i) Voir tome XV, note ( i ), p. 5. ( 2 ) Le brevet en question n'a pu être retrouvé aux Archives de la Côte-d'Or.  380 Lettres de saint François de Sales monsieur de Charmoysi, mon parent ; en quoy vous tesmoignes vostre bon et beau naturel, et cet honneste chevalier vous en sera grandement obligé quand il le sçaura ; ce qui sera dans peu de jours, que luy et sa femme viendront en cette ville, puisque Monseigneur le Prince de Piémont ayant reconneu en cette dernière occasion sa valeur et suffisance es choses de la guerre, l'a créé grand maistre de Tartillerie de cet Estât (0, et despuis a esté embrassé et caressé sans mesure par Mon- sieur le Duc de Nemours, qui Tinvitâ de venir en cette ville et le traitta très honnorablement. En fin, il n'est que d'estre gens de bien. Je suis engagé encor pour Tannée suivante a Grenoble, monsieur le Mareschal Desdiguieres Tayant demandé a Son Altesse, qui Ta volontier accordé ( = ). Veuille la Bonté divine m'y rendre fructueux ! Et il failloit bien rendre ce conte de moy mesme a monsieur mon Frère, que j'honnore de tout mon cœur et auquel je suis Très humble frère et serviteur, France E. de Genève. Annessi, le xii avril 161 7. A Monsieur [Monsieur] Milletot, seig"" de Villy, Conseiller du Roy au Parlement de Bourgoigne. Revu sur l'Autographe conservé au 2'^ Monastère de la Visitation de Rouen. (i) Voir ci-dessus, note (2), p, 285, et Lettre mcclxxxv, p. 353. (2) Quoique protestant, le maréchal s'était fait, pendant les quelques semaines qu'il demeura à Grenoble, l'auditeur assidu de l'Evêque de Genève. Non content de cela, il l'entretint un jour en particulier quatre heures de suite, « et quand ilz se séparèrent, » raconte Bernard de Passier dans sa dé- position (Process. remiss. Gebenn. (I), ad art. 35), « il dict tout haut audict Bien-heureux : Tout ce que vous dictes est bon. » René Favre assure en outre, qu'aussi souvent que le discours tombait sur le saint Prélat, Lesdiguières avait coutume de l'appeler « un Evêque très parfait, un homme vraiment envoyé de Dieu ; » le seul regret qu'il gardât était de n'avoir pu l'entendre chaque fois, lors de ses prédications à Grenoble. (Process. remiss. Gebenn. (II), ad art. 80.) Rien d'étonnant aonc que le duc s'employât pour faire revenir en Dauphiné un orateur dont il appréciait autant l'aimable vertu que la per- suasive éloquence.  Année 1617 381  MCCXCIX AU PÈRE GÉNÉRAL DES BARNABITES (0 Prière instante de renvoyer le P. Fulgence Chioccari en Savoie. Annecy, 12 avril 1617. Reverendissimo Padre in Christo osservandissimo, Andando il P. D. Fulgentio (2) costi per le cose le quali io con l'ultima mia raccomandai a V. P. R'"^ *, * VideEp.Mccxc.n. non è necessario che adesso dica altra cosa, se non che se per sorte occorresse qualche tentatione ad esso Padre  Révérendissime et très honoré Père dans le Christ, Puisque le P. D. Fulgence (2) se rend auprès de vous pour les affaires que je recommandai à Votre Paternité Révérendissime par la mienne dernière, il n'est pas besoin que j'ajoute autre chose. Si toutefois ce Père avait par hasard la tentation de rester là-bas, je (i) A cette date du 12 avril 1617, D. Jean-Ambroise Mazenta (voir le tome précédent, note (2), p. 190) n'était pas encore remplacé dans sa charge, mais quand le courrier arriva à Milan, pendant les sessions du Chapitre général, l'élection allait donner pour chef à la Congrégation des Clercs réguliers de Saint-Paul, D. Jérôme Boerio. (Cf. ci-dessus, note(i), p. 364.) A lui, désor- mais, appartenait de décider sur la question dont il s"agit ici. Le nouveau Général était natif de Tortone. Après avoir étudié en droit et en philosophie à l'Université de Pavie, il entra, à peine âgé de vingt ans, chez les Barnabites, et fit profession le 22 octobre 1589. Sa rare prudence et son amour de l'observance régulière engagèrent ses Supérieurs à le mettre à la tête du collège de Saint-Biaise de Rome en 1599. Depuis lors il ne cessa de porter le poids du gouvernement. D. Boerio garda jusqu'en 1623 la charge suprême reçue en 1617, et le 12 mai 1626, il retournait à Dieu, riche d'œuvres et de mérites. L'un des premiers actes de son Généralat avait été d'accorder au saint Evêque de Genève des lettres d'affiliation à la Congrégation des Bar- nabites, le 7 mai 1617. (D'après une Note du R. P. Riganti, Barnabite milanais.) (2) D. Fulgence Chioccari, supérieur des Barnabites de Thonon (voir ci- dessus, note (2), p. 290). Suivant les désirs du Saint, il revint en Savoie.  382 Lettres de saint François de Sales di restar là, per amor d'Iddio V. P. non consenta ; per- ché in questo principio è necessaria la perseverantia et stabilità de' Padri li quali han già imparata la lingua et fatta la santa amicitia necessaria al maneggio délie Case. Et con questo, implorando le orationi sue, resto, Di V. P. R"'% Humile et divoto, corne fratello et servitore in Christo, Franco, Vescovo di Geneva. XII Aprile 1617, in Annessi. Al R"^° Padre in Christo osservandissimo, Il Padre Générale délia Congr"« de' Chierici regolari di S. Paulo. Milano. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. supplie Votre Paternité, pour l'amour de Dieu, de n'y pas consentir ; car, en ce commencement, la persévérance et la stabilité des Pères qui ont déjà appris la langue et contracté la sainte amitié requise au maniement des Maisons, sont absolument nécessaires. Sur ce, implorant vos prières, je demeure, De Votre Paternité Révérendissime, Humble et dévoué, comme frère et serviteur dans le Christ, François, Evêque de Genève. 12 avril 16 17, à Annecy. Au Révérendissime et très honoré Père dans le Christ, Le Père Général de la Congrégation des Clercs réguliers de Saint-Paul. Milan.  Année 1617 383 xMCCC A LA COMTESSE DE SAN SECONDO (O A quelles âmes François de Sales dédiait volontiers son service. — Envoi des Règles de la Visitation. — Une instance en Cour de Rome. — Assurance de prières pour la Maison de Savoie. Annecy, 23 avril 1617. Madame, Bien que je n'aye pas le bonheur d'estre conneu de vous, si est ce que je ne laisse pas de reconnoistre en vous les qualités par lesquelles vous mérites d'estre honnoree de tous ceux qui font profession de l'honneur ; dequoy madame la Baronne de Giez, ma cousine, se rendra, je m'asseure bien, ma caution (2). Mays, laissons cela a part. Le sujet de vostre lettre, qu'il vous a pieu de m'escrire, me tesmoigne asses que vous aves dédié vostre amour a Dieu ; et que faut-il davantage pour m'obliger a vous dédier mon service ? Je le fay donq certes de tout mon cœur, et a madame la signora Donna Genevra (3), bénis- sant la bonté souveraine de Nostre Seigneur qui, par ses célestes attraitz, vous a donné de si désirables affec- tions. Or, voyla les Règles de la Visitation, esquelles nean- ( I ) L'Autographe est sans adresse, mais la destinataire est indiquée par la note suivante, d'une écriture du xvii* siècle, qui se lit à la quatrième page : Lettera del Beato Franc° di Sales, gia Vescovo di Geneva, alla fà Sig^'^ Donna Bona di Chiallant, Confessa di S. Seconda. Bonne de Challant était fille de Georges de Challant, baron de Chatillon et du Chatelard, et de sa seconde femme, Adrienne Costa de la Trinité. Elle avait épousé Octave Parpaglia, comte de San Secondo, qui fut investi par la ville de Chieri des fiefs de Revigliasco et de Celle le 12 février 1602. (D'après Vaccarone, / Challant e loro questioni per la siiccessione ai feiidi dal XI1° al XIX'^ secolo, Torino, 1893.) ( 2 ) La sœur de la destinataire, Claire-Marguerite de Challant. était devenue cousine de l'Evéque de Genève par son mariage avec Gaspard de Chevron- Villette, seigneur de Giez. (Voir le tome précédent, note (i), p. 16.) ( 3 ) Donna Ginevra, fille de Philibert-Gérard Scaglia (voir ci-dessus, note ( 2 ), p, 181) et de Blanche Ponte di Scarnafigi, sera plus tard destinataire.  384 Lettres de saint François de Sales ^ Despuis fay fait moiiis Oïl n'a pas estendu les derniers articles +, par ce suppléer par addi- , 1 r 1 • tion ce qui man- qu ilz Comprennent des formulaires asses longs et qui ^"^'^" ne regardent pas tant les actions communes des Seurs, comme les particulières des formes et cérémonies dont on use en leurs réceptions seulement. Mays si vous les désirés encores, je vous les envo3^eray au premier advis que vous m'en feres donner, comm'encor les prattiques des Règles, qui est une besoigne a part ; bien qu'après tout cela, il faut que vous sachies que les Règles sont a Rome, ou l'on sollicite pour réduire cette Congrégation en Religion . Et peut estre que Sa Sainteté y fera adjouster quelque chose ; ce que je ne pense toutefois pas devoir estre chose d'importance, puisque, comme nous escrit celuy qui a l'affaire en main (0, il ny a point d'autre difficulté sinon pour le regard de l'Office, que les mes- sieurs qui ont l'intendance de cela veulent estre le grand Office du Bréviaire ; et nous désirerions que cette Congré- gation ne fut obligée qu'au petit Office, affin qu'elle continuast a le chanter avec la gravité, distinction, tran- quillité et, pour le dire en un mot, avec la sainteté que ces âmes le prononcent maintenant ( = ). Et pour obtenir cette grâce, nous employons la faveur de monsieur l'Ambassadeur (3) qui, avec le nom de Madame la Sere- nissime Infante (4), fera a mon advis reuscir heureuse- ment l'affaire ; en quoy la signora Donna Genevra n'a pas peu de crédit (5). Cependant, vives et l'une et l'autre toutes en Dieu, hors lequel la vie est une mort, et auquel la mort est une heureuse vie. Que si vous me faites la faveur de demander a sa divine Majesté une pareille grâce pour ( I ) On voit par les lettres de sainte Jeanne-Françoise de Chantai que le Procureur général des Barnabites, le P. Tobie Corona (voir ci-dessus, note (3), p. 203), s'occupait beaucoup à Rome des affaires de la Visitation. C'est lui sans doute que le Saint désigne ici, ou encore, peut-être, le gentilhomme destina- taire de la lettre du 27 avril 1616. (Voir ibid., p. 198.) (2) Cf. la lettre au Cardinal Bellarmin, pp. 238 seq. (3) Philibert-Alexandre Scaglia (voir ci-dessus, note ( i ), p. 197), ambas- sadeur de la cour de Savoie à Rome. (4) Marguerite de Savoie, duchesse de Mantoue, protectrice de la Visitation. (Voir le tome précédent, note ( i). p. 104. et cf. ci-dessus, pp. 203, 246.) (5) Elle était soeur de l'ambassadeur.  Année 1617 38^ moy, ce sera m'obliger de plus en plus a vouloir estre pour jamais, Madame, Vostre plus humble, très affectionné serviteur en Nostre Seigneur, FRANÇ^ E. de Genève. Annessi, le xxv avril 161 7. Quand il en sera tems, Madame, j'escriray a Monsei- gneur le Prince (0, pour la prospérité duquel, et de toute la Mayson ( = ), nous faysons des spéciales et continuelles prières, tant publiques que particulières : en quoy nous obéissons avec anticipation de sousmission aux désirs des Serenissimes Infantes (3). Madame de Bressieu, qui est la (4), m'a fait grandement presser d'envoyer ces Règles ; c'est pourquoy je n'ay pas pris le loysir de lés faire mieux escrire, dont je vous supplie de m'excuser. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Pignerol. (i) Victor-Amédée, prince de Piémont. (2) La Maison de Savoie. (5) Marie et Françoise-Catherine de Savoie, huitième et neuvième enfants de Charles-Emmanuel I^"" et de Catherine-Michelle d'Autriche, étaient nées, l'une le 8 février 1594, la seconde le 6 octobre 1595. Rapprochées par l'âge, elles le furent encore par les mêmes attraits surnaturels vers la vie parfaite. Toutes deux entrèrent dans le Tiers-Ordre de saint François d'Assise, et au milieu des pompes de la cour, en observèrent les Règles et en gardèrent plus soigneusement l'esprit. Vers 1612, D. Juste Guérin, Barnabite, était devenu leur confesseur et directeur ; sous la conduite de ce maître habile, on les vit faire de tels progrès dans la vertu, qu'elles parurent, dit un historien, « comme deux astres brillants qui ont éclairé tout l'Etat et attiré l'admiration du monde. » (Arpaud, Vie de Mgr D. Juste Guerin, 1857, liv. I, chap. viii.) Leur temps était partagé entre la prière et les bonnes œuvres, et Ton raconte de ces saintes princesses les merveilles de dévotion, d'humilité et de cha- rité admirées dans la vie des plus illustres serviteurs de Dieu. L'infante Marie séjourna longtemps à Bologne, puis se rendit à Rome où elle mourut en 1656, instituant le Pape Alexandre VII son exécuteur testamentaire. Sa sœur Catherine était décédée à Biella quinze ans auparavant, le 20 novembre 1641. (Guichenon, Hist. généal. de la Maison de Savoie, tome II.) En 1617, les Serenissimes Infantes, avec plusieurs dames de kb cour, son- geaient à fonder une Maison de la Visitation à Turin. Les détails des préli- minaires de cet établissement seront donnés dans la suite de la correspondance de saint François de Sales. {4)Ennemonde de la Foreàt, veuve Roero de Bressieu (voir ci-dessus, note ( I ), p. iSgV était alors à Turin.  Lettres VII 2-  386 Lettres de saint François de Sales MCCCI A LA PRÉSIDENTE LE BLANC DE MIONS Agir et parler sans regard sur le qu'en dir?.-t-on, — Est-ce hypocrisie « de ne pas faire si bien que Ton parle? » — Marcher « par le milieu des belles vertus, » et non «par les extrémités » des subtilités. — Différents conseils sur quelques points particuliers et sur l'oraison. — La vocation de M."^ de Gérard. — Pourquoi les livres du Saint « ont treuvé de l'accès » en l'esprit de la Présidente. — Salutations à plusieurs dames de Grenoble. — Une triste affaire. — Folie des enfants du monde. Annecy, 26 avril 1617. Je respons a vostre lettre du 14, ma très chère Fille. I . Dites a cette chère Barbe Marie ( ^ ), qui m'ayme tant et que j'ayme encor plus, qu'elle parle librement de Dieu par tout ou elle pensera que cela soit utile, renonçant de bon cœur a tout ce que ceux qui Tescoutent peuvent penser ou dire d'elle. En un mot, je luy ay des-ja dit quil ne faut rien faire ni rien dire pour en estre loiié, ni laisser aussi de rien faire ou rien dire crainte d'estre loiié. Et ce n'est pas estre hipocrite de ne faire pas si bien que l'on parle, car, vSeigneur Dieu ! a quoy en serions nous? Il faudroit donq que je me teusse, de peur d'estre hipocrite, puisque si je parlois de la perfection il s'ensuivroit que je penserois estre parfait. Non certes, ma très chère Fille, je ne pense pas estre parfait parlant de la perfection, non plus que je ne pense pas estre Italien parlant italien ; mais je pense sçavoir le langage de la perfection, l'ayant appris de ceux avec qui j'ay conversé qui le parloyent. 2. Dites luy qu'elle poudre ses cheveux, puisque son intention est droite ; car les cogitations qui viennent sur cela ne sont nullement considérables. Il ne faut pas entortiller vostre esprit parmi ces toiles d'araignée. Les  ( I ) La présidente Le Blanc elle-même (voir ci-dessus, note ( r ), p. 23). C'est sans doute pour condescendre aux désirs de sa fille spirituelle que le Saint lui parle ici comme s'il s'agissait d'une tierce personne; M'"* Le Blanc crai- gnait peut-être de voir tomber en d'autres mains des lettres où sont traitées des questions assez intimes.  Annhe 1617 387 cheveux de l'esprit de cette fille sont encor plus déliés que ceux de sa teste, et c'est pourquoy elle s'en emba- rasse. Il ne faut pas estre si pointilleuse, ni s'amuser a tant de répliques ausquelles Nostre Seigneur n'a point d'égard. Dites luy donq qu'elle marche a la bonne foy, par le milieu des belles vertus de la simplicité et humilité, et non par les extrémités de tant de subtilités de discours et de considérations. Qu'elle poudre hardiment sa teste, car les faysans gentilz poudrent bien leurs pennages, de peur que les poux ne s'y engendrent. 3. Qu'elle ne perde pas le sermon ou quelque bonne œuvre faute de dire : Despechés! mais qu'elle le die dou- cement et tranquillement *. vSi ell' est a table et le Saint * Cf. supra, Epist. C ^ , -. ,, . -^ • -1 MCCXCIV, p. 369. oacrement passe, qu elle 1 accompaigne en esprit, si il y a d'autres gens a table avec elle. Sil ny a personne, qu'elle l'accompaigne, si, sans s'empresser, elle peut y estre asses test ; et puis, qu'elle retourne doucement prendre sa réfection, car Nostre Seigneur ne vouloit pas mesme que Marthe le servit avec empressement *. * Luc, x, 40, 41. 4. Je luy ay dit qu'elle pouvoit parler fortement et résolument, es occasions ou il est requis, pour retenir en devoir la personne qu'elle sçait (0; mays que la force estoit plus forte quand ell'estoit tranquille et qu'on la faysoit naistre de la rayson, sans meslange de passion. 5. La Société des Dou\e ne sçauroit estre mauvaise, car l'exercice duquel elle se sert est bon ; mays il faut que cette Barbe Marie, qui ne veut point de peut estre, soufre celuy ci : que, peut estre, cette Société est véritable, car n'estant nullement tesmoignee par aucun Praelat, ni aucune personne digne de foy, nous ne sçaurions estre asseuree (sic) qu'elle ayt esté instituée, le livret qui le dit n'alléguant ni autheur, ni tesmoin qui en asseure(2). Ce qui ne peut nuire et peut proffiter est néanmoins bon, 6. Qu'elle marche en Torayson, ou par pointz, comme nous avions dit, ou selon son accoustumee, il importe peu ; (r) Selon toute probabilité, le mari de la destinataire, Pierre Le Blanc de Mions, (Cf. ci-dessus, p. 370.) (2) Des recherches sur cette Société des Dou^e ont été faites à Grenoble et ailleurs, et sont malheureusement demeurées sans résultat.  388 Lettres de saint François de Sales ains nous nous souvenons bien que nous luy dismes que seulement elle praeparast les pointz et s'essayât, au com- mencement de l'orayson, de les savourer; et si elle les savoure, c'est signe que Dieu veut qu'elle suive cette méthode, au moins alhors. Que si néanmoins la douce présence accoustumee l'occupoitpar après, elle s'y laissast aller, et aux colloques aussi qu'elle fait par Dieu mesme, qui sont bons en la sorte qu'elle me les représente en vostre lettre; mays pourtant, il faut aussi quelquefois parler a ce grand Tout, comme voulant que nostre rien face quelque chose. Or, puisque vous lises nos livres, je n'adjousteray rien, sinon que vous aillies simplement, rondement, franchement, et avec la naifveté des enfans, tantost entre les bras du Père céleste, tantost tenue par sa main. 7. Quant a M"'' de Gérard ou Reautier (0, sil y a apparence qu'on puisse ériger une Mayson par delà ( = ), il la faut faire venir icy, car il y aura plus de facilité de la renvoyer ; si moins, je persévère qu'elle suive sa première visée (3). Mais au premier cas, je vous laisseray mesnager l'affaire pour 'Lyon, non pas envers ma Seur Favre (4), qui sera tous-jours contente de ce que nous  (r) Nous avons déjà nommé cette demoiselle parmi les premières aspiran- tes de Grenoble à la Visitation (voir ci-dessus, note (i), p. 348), et nous la retrouverons plus tard comme destinataire. Son père, Honoré de Gérard ou Girard, seigneur de Reautier et des Orres, était d"Embrun. Il s'établit dans la capitale du Dauphiné par une charge à la Chambre des Comptes, épousa la sœur du président de Bouqueron, Anne Béatrix-Robert, et mourut au bout de quelques années. Après avoir vu sa mère passer à de secondes noces, Hélène de Gérard fut rappelée dans sa famille paternelle. Elle avait dix-huit ans quand, de retour à Grenoble, elle se consacra entièrement à la piété, à la suite de l'assassinat de son fiancé. M™^ de Bouqueron, sa tante, la prit avec elle, lui laissant toute liberté de s'adonner à la vie dévote. D'abord résolue d'entrer chez les Dames de Sainte-Claire, M'"^ de Gérard, dès qu'elle eût connu l'Evéque de Genève, n'aspira qu'au bonheur d'avoir place dans la Congréga- tion fondée par lui. (D'après YHistoire de la Fondation de la Visitation de Grenoble ; cf. à TAppendice I, les lettres de la Mère Favre, 12 février et 7 mars 1617.) (2 ) A Grenoble. (3) Le premier désir de M"" de Gérard avait été d'entrer à la Visitation de Lyon. (Cf. à l'Appendice I, les lettres de la Mère Favre, 12 février et 7 mars 1617 . ) (4) La Mère Marie-Jacqueline Favre, Supérieure de la Visitation de Lyon.  Annhk 1617 389 ferons, estant si grandement nostre fille et seur comme eir est; mais ailleurs, a Lion, ou vous sçaves(0. Or, de ceci faites en la responce a M'"" de Boqueron {^\ sil vous plait, en cas que je ne puisse pas luy escrire, car je suis fort pressé, certes, et par conséquent ne sçaurois escrire a M""" de Saint André (5) pour ce coup. Si vous luy faites voir la copie de ce que j'escrivoys a M""' de Vi- cillieu (4), cela suffiroit pour un tems. Je suis bien ayse que mes livres (0 ont treuvé de l'accès en vostre esprit, qui estoit si brave que de croire quil se suffisoit a soymesme ; mays ce sont les livres du Père, et du cœur duquel vous estes la chère fille, puisque ainsy a-il pieu a Dieu, auquel soit a jamais honneur et gloire. Je n'escris donq a personne qu'a vous, mais je désire bien pourtant que, par vostre entremise, je puisse saluer madame de Saint André et madame de Virieu (6), que vous chérisses si ardemment. Et puis, madame Odeyer (7), qui m'a bien escrit une lettre fort dévote, dont je suis bien consolé, car je luy souhaite beaucoup de bonheur spirituel ; et madame de Boqueron, et puis en fin la bonne (i) Auprès de l'Archevêque, Denis-Simon de Marquemont, qui avait agréé l'admission de la prétendante. (2) C'était la femme de Gaspard Béatrix-Robert, seigneur de Bouqueron, président au Parlement de Grenoble. (Cf. note ( i ) de la page précé- dente.) (3) Fille du célèbre chancelier Pomponne de Bellièvre et de Marie de Prunier, Marguerite de Bellièvre épousa, le 6 février 1604, à Paris, Laurent de Prunier-Saint-André, qui devint, en 1616, président au Parlement de Grenoble. (D'Hozier, Armoriai général de France.) (4) Marguerite de la Croix de Chevrières, dame de Veyssilieu (voir ci- dessus, note ( i ), p. 371). (5) Vlntrodiiciion a la Vie dévote et le Traitté de l'Amour de Dieu. (6) Née du mariage d'Artus de Prunier, marquis de Saint-André, premier président au Parlement du Dauphiné, et d'Honorade de Simiane, Gasparde avait épousé en 1608 François de Virieu, seigneur de Pupetières, etc. Elle n'eut que deux enfants, Charles et Marguerite, et vivait encore en 1644. (Rivoire de la Bâtie, Armoriai du Dauphiné.) M""* de Saint-André (voir note (3) ci-dessus) et M""- de Virieu étaient belles-sœurs. (7) Jean-Claude Audeyer ou Odeyer, conseiller au Parlement de Greno- ble en 1616 et président en 1622, fut marié deux fois. Le 10 août 1606, il épousa Marguerite de Fay, et, à une date qui nous est inconnue, Françoise de Bazemont. Celle-ci, devenue veuve en i6^o, teste le 16 février 1662. (^A^o/c de M. le comte de Terreb.isse).  390 Lettres de saint François de Sales mère (0, et nostre bon M. d'Urme, que mon ame honnore et ayme parfaitement (-). J'envoyeray les Règles de la Visitation au premier jour ; je les avoys fait des-ja transcrire, mais il les faut envoyer a Thurin, ou Ton pense a l'érection d'une May- son puissamment (3). Le Président qui a tué sa femme estoit un bon homme, mais cholere(4); l'Abbé qui a esté blessé n'estoit pas prestre, ni ordonné es Ordres sacrés, mais possedoit le bénéfice de son abaye, pour estre de grande mayson (5). On dispute qui avoit le tort ; helas ! je les regrette tous, car je pense quil l'avoit (sic) tous. O que les enfans du monde sont sages! ce dit on. O quilz sont folz ! ce dit Dieu. Bienheureux sont les enfans de Dieu, car ilz l'ayment et sont aymés de luy. Annessi, le xxvi avril 161 7. A Madame Madame la Présidente de Mions. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation de Chambéry. (i) Jusqu'ici il n'a pas été possible de découvrir qui était la mère d'En- nemonde Chausson, dame Le Blanc de Mions. (2) Jean-François d'Ulme, chanoine de Grenoble qui contribua beaucoup à la fondation du Monastère de la Visitation de cette ville. Il sera destinataire. (3) Voir ci-dessus, Lettre mccc, p. 383. (4) Second président à la Chambre des Comptes de Savoie, Jean-Georges Crespin était originaire du Dauphiné, et s'était marié avec Lucrèce Belly. On verra dans le tome XVIII la suite de l'affaire malheureuse dont il est ici question et qui eut lieu dans la première quinzaine d'avril. (5) Sylvestre de Saluces, fils de Michel-Antoine, comte de la Mente, de Versolier, etc., et de Bernardine d'Aubry, avait, en 1617, environ quarante- cinq ans. Ancien abbé de Mézières. il régit d'abord l'abbaye d'Hautecombe en qualité d'économe, et en reçut la commende le i^"" février 1605. Remplacé quelque temps par son neveu Adrien, à qui il laissa plus tard son bénéfice, il obtint de nouvelles Bulles d'abbé le 21 juin 1610. La volonté de Charles- Emmanuel suppléa aux conditions exigées des abbés d'Hautecombe pour avoir place de droit au Sénat, et Sylvestre de Saluces prit séance dans cette assemblée le 4 décembre 1606. Il s'occupa davantage des intérêts de son sou- verain que de ceux de son abbaye et remplit plusieurs missions diplomatiques, particulièrement en France, où nous le retrouverons dans la suite. II mourut à Chambéry le 29 septembre 1656, et fut enseveli sous le cloître d'Hautecombe. (Cf. Blanchard, Histoire de l'abbaye d'Hautecombe, Chambéry, 1874. Partie III, chap. VII.)  Année 1617 391 MCCCII AU PRINCE DE PIEMONT. VICTOR-AMÉDÉE (0 Nouvelles plaintes au sujet du doyen de Sallanches. Annecy, 26 avril 161 7. Monseigneur, Vostre Altesse est protectrice de la discipline ecclésias- tique, et la regardant en cette qualité, je luy remonstre que le Doyen de Salanche, nommé Choysi, vient parmi ce pais faire des levées de gens de guerre et, tant de deçà comme delà les montz, profane furieusement sa profes- sion ecclésiastique et l'Ordre de prestrise qu'il a, par mille mauvais et scandaleux deportemens, indignes mesme d'un soldat desbauché (2). Mays le bon est, qu'avec cela il obtient subrepticement et par surprise des lettres de Son Altesse ( 3 ), par lesquelles elle commande au Chapitre de Salanche de le faire joïiir des fruitz de sa praebende comme s'il estoit résident (4); ce que Vostre Altesse sçait trop mieux estre contraire au droit divin, ecclésiastique et civil. Et néanmoins, il ne laisse pas de presser et molester ledit Chapitre, abusant ainsy du nom et de Tauthorité de Son Altesse, laquelle sans doute n'a point de telle intention, puisque mesme cet homme ne la sert nullement a ses despens, et n'est pas capable de luy faire aucun service qui mérite aucune considération spéciale, n'estant non plus bon soldat que bon prestre. Qui me fait recourir a la providence de Vostre Altesse, affin qu'il luy playse de renvoyer ledit Choysi a sa résidence pour y rendre son devoir, et déclarer que, sans cela, il ne peut recevoir ni demander les fruitz (i) Les éditeurs précédents adressent à faux cette lettre au Duc de Savoie; c'est son fils, le prince de Piémont, qui était plus spécialement le protecteur de la discipline ecclésiastique et secondait lEvêque de Genève dans le travail de réforme. Notre texte, d'ailleurs, fait mention de « Son Altesse, » c'est-à- dire du souverain. (2) Voir ci-dessus, note (2), p. 342, et la Lettre mcclxxxvii, p. 355. (3) Le duc de Savoie. (4) Voir les Lettres mcclxxviii, p. 342 et mcclxxxvii, p. 355.  392 Lettres de saint François de Sales de sa praebende, et que ce n'est pas la volonté de Son Altesse qu'on se départe des loix et constitutions ecclésias- tiques. Il importe que cette insolence en cette sorte de personnes soit réprimée. Cependant, je ne cesseray jamais de souhaiter toute sorte de parfaite prospérité a Vostre Altesse, demeurant a jamais, Monseigneur, Son très humble, très obéissant et très fidèle orateur et serviteur, FRANÇ^ E. de Genève. XXVI avril 1617, Annessi. Revu sur TAutographe appartenant à M.'"^ Morrison, à Londres.  MCCCIII AU DUC DE SAVOIE, CHARLES-EMMANUEL I" Indifférence de l'Evêque de Genève pour le choix de la ville où il doit prêcher. Le bon plaisir de son souverain décidera entre Paris et Grenoble. Annecy, 30 avril 1617. Monseigneur, J'ay receu maintenant le commandement que Vostre Altesse me fait de me préparer pour aller prescher TAdvent et Caresme suivant a Paris ; et néanmoins, par lettres de M. le Baron de Marcieu (0, j'ay sceu que ( I ) L'éditeur de la Correspondance de Lesdigutères et d'autres auteurs se sont mépris au sujet du baron de Marcieu, chargé d'affaires du gouverneur du Dauphiné. Le titre de baron de Marcieu n'appartint jamais à Octavien Emé de Saint-Julien, mais au frère de sa femme, Diane de Montaynard. Fils de Guy-Balthazard de Montaynard, seigneur de Marcieu (mort en 1579), et de Joachime de Guiffrey. Guy-Balthazard, second du nom, épousa Anne Fléard. et en eut une fille unique, Virginie. Celle-ci porta en dot la baronnie de Marcieu à son cousin-germain Ennemond Emé de Saint-Julien (1622). En 1617, Guy-Balthazard, baron de Marcieu, était en Italie, occupé à diver- ses missions ; l'année suivante on le trouve à la cour de France, servant d'in- termédiaire entre les ministres et le duc de Lesdiguières qui l'aimait beaucoup. Il fut aussi l'un des négociateurs du mariage de Christine, fille de Henri IV, avec Victor-Amédée de Savoie. (D'après Moreri, et Rivoire de la Bâtie, Ar- moriai du Dauphiné, passim.)  Annéf. 1617 593 Vostre Altesse m'avoit accordé pour le mesiiie Advent et Caresme a la cour du Parlement de Grenoble ( O : qui me fait supplier très humblement Vostre Altesse de me faire sçavoir auquel des deux lieux je m'attendray d'aller, m'estant,pour moy, chose asses indifférente, pourveuque, ou que je sois, ce soit selon le bon playsir de Vostre Altesse, a laquelle je suis, et a laquelle je souhaite toute sainte prospérité, comme doit, Monseigneur, Vostre très humble, très fidèle et très obéissant orateur et serviteur, Franç% E. de Genève. Annessi, 30 avril 161 7. (1) Voir ci-dessus, la lettre du 12 avril à Bénigne Milletot, p. 380. Des démarches avaient été faites par les amis de l'Evêque de Genève pour l'avoir comme prédicateur à Paris en 1618; jusqu'à la fin de l'année 1617, la question resta en suspens; ce fut le Parlement du Dauphiné qui l'emporta.  MCCCIV A MADAME DE LA FLÉCHÈRE La grâce d'un trépas. — Difficultés au sujet d'un mariage. — Une pénitente du Saint. — Messages et nouvelles. Annecy, 30 avril 1617. Il faut bien pourtant, ma très chère Fille, vous res- pondre un mot. J'ay dit louange en mon cœur * a la 'Ps. cxviu, 164. Providence céleste sur le trespas de la pauvre Gavent ( ; ce luy a esté une grâce spéciale de partir de ce monde, puisqu'elle y couroit tant de hasard de s'y perdre. Vous aves fort bien traitté avec madame la Comtesse ( ' ) pour le cousin (3) et pour moy. Certes, je ne pense pas  ( i) Voir ci-dessus, note ( i ), p. lo. (2) La comtesse de Tournon (voir note (3 ) de la page suivante^ (3) M, de Charmoisy.  394 Lettres de saint François de Sales que le cousin ne se soit fort bien comporté en cette occa- sion, ainsy quil en rendra bon compte si Ton veut. Pour moy, vous le sçavés ; mays il faut avoir un peu de pa- tience. Le cousin auroit grand'envie de sçavoir si c'est Son Excellence (0 qui a dit quil ne s'estoit pas voulu engager d'escrire a M. de Saint Damian pour ce mariage l^); par ce que si c'estoit elle, il faudroit en parler plus reser- vement, quoy qu'il n'en soit rien. Si vous le pouvés sçavoir, vous le me pourres escrire, et je le mesnageray. Hier nous fismes une bonne confession, M""^ de Tor- non (3) et moy, et nous nous sommes rendus grans cousins, et croy qu'elle fera merveilles en la dévotion. Le P. Commissaire (4) vous dira que je n'ay eu nul loysir de luy parler, sinon presque de M. le Prieur (5), pour un affaire quil a avec les exacteurs de la décime. Je salue infiniment madamoyselle de Beaufort, que je chéris parfaitement (6) ; mays je n'ay pas du tems asses pour luy escrire. Dieu soit a jamais au milieu de vostre cœur, pour le bénir de ses plus chères bénédictions, ma très chère Fille.  ( I ) Sigismond d"Est, marquis de Lans. (2) Le marquis de Saint-Damien était Henri, fils aîné de Prosper-Marc de Maillard, comte de Tournon, et de Philiberte de Beaufort, né en 1590. Il se signala dans la guerre du Montferrat, particulièrement devant Trino où il fut blessé (1613), et au combat d'Asti (mai 1615). C'est en récompense de ses services, et pour acquitter une dette de quinze mille écus envers son père, que Charles-Emmanuel lui inféoda le marquisat de San Damiano et Pagliera (2 juin 1616), Quel est le projet de mariage auquel M. de Charmoisy était soupçonné de n'être pas favorable ? Tout ce que nous savons, c'est que Henri de Maillard épousa par contrat dotal du 11 janvier 1621, Charlotte-Emmanuelle d'Urfé, fille de Christophe d'Urfé et de Marie de la Forest. Dix ans plus tard, Victor- Amédée le créait maréchal de camp général de ses armées, et le 30 octobre 1632, il décédait « très chrestiennement » à Rumilly, où il fut « ensepulturé » le lendemain a dans la chapelle de ses prédécesseurs. » (Dufour et Mugnier, Les Maillard, Chambéry, 1889, et Reg. par. de Rumilly.) {3) Philiberte de Beaufort, veuve de Prosper-Marc de Maillard, comte de Tournon, ou peut-être encore Jéronyme sa belle-sœur, ancienne abbesse de Sainte-Catherine. (Voir tome XIV, note (i), p. 79.) (4) Le P. François de Chambéry, Capucin (voir le tome précédent, note (3), p. 264). (5) Jean-François de Blonay, prieur commendataire de Saint-Paul en Chablais. (Voir tomes XV, note ( i ), p. 354, et XVI, notes (2), pp. 91, 157.) (6) Jeanne-Aimée de Beaufort (voir ci-dessus, note (5), p. 268).  Année 1617 395 M. de Torens (0 n'est pas icy. Nostre Mère i^) est toute malade de sa defluxion et a pris médecine. Dieu vous bénisse, ma très chère Fille. Amen. XXX avril 161 7. A Madame Madame de la Flechere. Revu sur une copie déclarée authentique, conservée à Turin, Archives de l'Etat. ( I ) Bernard de Sales, baron de Thorens. (2) La Mère de Chantai.  MCCCV A MADAME DE GRANIEU Ce que François de Sales aimait « passionnément » dans l'âme de la destina- taire. — Une vérité connue des enfants de Dieu avant la dernière heure. — Le repos dans la patrie. Annecy, [avril 1617 (r).] C'est la vérité, Madame ma très chère Fille, qu'entre les souvenirs que j'ay des âmes que Dieu m'a fait aymer, (i) Quand l'Evêque de Genève vint prêcher à Grenoble, il logea chez M. de Granieu, et trouva la femme de son hôte « dans l'exercice d'une fer- vente piété... ; il n'eut qu'à modérer les ardeurs de cette dame, et à régler ses exercices avec ce tempérament de douceur et d'égalité d'esprit qui luy estoit si naturelle. » N'avons-nous pas là le signalement de la destinataire que le Saint déclare dépouillée « des créatures et de leurs vanités ? » Née en 1579 de François de Ferrus, conseiller du Roi et maître ordinaire de la Chambre des Comptes en Dauphiné, et d'Emeraude de Portes, Laurence avait à peine sept ans quand elle demeura orpheline. Elle en comptait seize lorsqu'elle fut accordée en mariage (25 avril 1595) à François de Gratet, con- seiller du Roi, trésorier général de France en Dauphiné, seigneur de Granieu, du Bouchage, de Dolomieu, etc. La vertu de la jeune femme fit l'admiration de la ville et le charme de sa famille. Se séparant du monde sans le quitter, M""^ de Granieu s'appliqua « à l'éducation de ses enfans et au bon ordre de sa maison. Ces soins, qui semblent si divers, ne partagèrent jamais son esprit ; elle y eut un recueillement qui l'attacha toujours à Dieu, et son naturel tout de feu n'éclata jamais au dehors que par le zèle qu'elle eut de faire servir Dieu chez elle. »> Amie intime de la Mère de Chantai, grande bienfaitrice des deux Maisons de la Visitation à Grenoble, M'"* de Granieu voulut avoir sa  396 Lettres de saint François de Sales celuy de la vostre m'est de très grande consolation ; car j'ay veu un certain despouillement des créatures et de leurs vanités, qu'il m'est impossible de n'aymer pas passionnément. Tenes bien, je vous supplie, vostre cœur haut eslevé comme cela, ma très chère Fille ; qu'il ayt tout a fait son soin attaché a la belle éternité qui vous attend. Les enfans du monde confessent ordinairement en mourant que cette vie n'est pas considérable que pour l'éternelle ; mais les enfans de Dieu touchent toute leur vie cette vérité. Vives comme cela parmi toute cette multitude de fas- cheuses occupations que vostre condition vous oblige de voir et d'avoir ; et comme ceux qui s'acheminent a leurs patries n'espèrent le repos qu'après y estre arrivés, ainsy prétendes tous-jours a cette paix perdurable a laquelle vous ailes et ardes, travailles et marches. Je suis consolé dequoy petit a petit vous faites vostre chemin très aysé. Dieu soit a jamais au milieu de nos espritz, qui est le souhait continuel, Madame, de Vostre très humble et plus obéissant serviteur, France E. de Genève.  sépulture au second Monastère de Sainte-Marie. Son corps y fut porté le jour même de sa mort (3 janvier 1652) et inhumé onze jours après. (Menestrier, Vie de Laurence de Ferrus, dame de Granieu, Dauphinoise, Lion, Brun, 1898,) Le ton de cette lettre indique un début de correspondance, surtout si on la compare avec celles qui suivront, beaucoup plus confiantes. C'est pourquoi nous la plaçons après le premier Carême prêché à Grenoble par saint Fran- çois de Sales.  Année 1617 397  MCCCVI AU Cardinal robert bellarmin (minute inédite) Désirs et démarches du saint Evèque pour Térectioa d'un Sé:ninaire. Annecy, [1615-1617 ( i).] Illustrissimo et Reverendissimo Signor Padron colendissimo, Fra le cose che potrebbono aiutar questa misera et afflitta diocsesi di Genevra, l'una délie principal! sarebbe Terettione d'un Seminario, laquale fù già tentata dalla buona memoria del Signor Vescovo mio predecessore (2) ; ma coir incontro di tante contradittioni , che non fù  Illustrissime, Révérendissime et très vénéré Seigneur, Entre les choses qui pourraient aider ce pauvre et affligé diocèse de Genève, l'une des principales serait l'érection d'un Séminaire. Déjà, des tentatives furent faites par Mg'^rEvèque mon prédécesseur, de pieuse mémoire (2) ; mais il y rencontra tant de contradictions, ( I ) Tout ce qu'on peut dire pour la date de cette lettre, c'est qu'elle pré- céda presque certainement le voyage de D. Juste Guérin à Rome vers la fin de 1617, et qu'elle semble postérieure à celui de Philippe de Quoex, fin 1613-1614. (Cf. le tome précédent, pp. 113, 147 seq., et 239.) (2) Fidèle observateur des ordonnances du Concile de Trente, Claude de Granier avait en effet voulu établir en son diocèse un Séminaire. En 1589, il dressa l'acte d'érection, et lui-même prit « cinq jeunes enfans qu'il entretint à ses despens une année entière, » raconte l'auteur de sa Vie ; « mais il fut contraint de tout quitter à cause de sa pauvreté... et par l'impossibilité de pou- voir mettre en exécution le Décret du Concile en prenant une partie des re- venus des abbayes, prieurés et autres bénéfices du diocèse pour fournir a l'entretien des jeunes enfans et de ceux qui les dévoient enseigner. » (La Vie du Rmeet Illme Evesque Claude de Granier... par le P. Constantin, S.J., Lyon, Rigaud, 1640, liv. II, chap. viii.) François de Sales partageait les désirs de son Evèque. Sa pensée principale dans l'établissement de la Sainte-Maison de Thonon fut, avec le refuge offert aux nouveaux convertis, le recrutement des vocations sacerdotales. Les articles xviii, XIX des Constitutions ordonnèrent la création d'un Séminaire, lui attri- buant les revenus réalisables du prieuré de Saini-Hippolyte. Ce n'était là qu'un  398 Lettres de saint François de Sales possibile tirarla inanzi, perché egli procedeva per via (3) deirapplicatione de' beneficii, delli quali grhuomini sono tanto bramosi, che, quanto possono, impediscono che a' collegii et simili opère pie si uniscano, acciô loro in particolare li possino godere. Per il che, con altro mezzo desiderarei ripigliar quel dissegno, se perô Sua Santità si degnarà favorirci in quel modo che dal R. P. Benedetto Giustiniano (0 sarà proposto a V. S. Iir"" et R™% laquale perciô supplico humilissimamente che appresso Nostro Signore si degni adoprare la charità et zelo suo et ajutarci in questo ne- gotio (b) ; non dubitando che il zelo il quale riluce nelli suoi i^) scritti, li quali di tanto aiuto ci sono contro gli  qu'il ne fut pas possible de les poursuivre, car il procédait par voie d'application des bénéfices, dont les hommes sont si avides que, pour en jouir en leur particulier, ils en empêchent de tout leur pouvoir l'union aux collèges et à telles autres œuvres de piété. C'est pourquoi je désirerais reprendre ce dessein par un autre biais, si toutefois Sa Sainteté daigne nous favoriser en la façon qui sera proposée à Votre Seigneurie Illustrissime et Révérendissime par le R. P. Benoît Giustiniani ( O. Je vous supplie donc très humblement d'employer votre charité et votre zèle auprès du Saint-Père et de nous aider en cette affaire. Ce zèle qui reluit en vos écrits, lesquels nous sont d'un si grand secours contre les hérétiques, vous pressera (a) per via — fàeir unionej (b) negotio — fpoichè con tanto frutto..,J (c) suoi — futilissimij  embryon ; le Saint voulait un Séminaire véritable, et en 1606, il chargea son frère Jean-François de poursuivre à Rome ce projet. Le messager crut au suc- cès. « Vous aurez un Seminayre, » écrit-il le 2 avril, « et je pense qu'il sera de 24... » Belles espérances dont la réalisation ne vint pas. François de Sales ne se découragea pas cependant. Après les négociations du P. Giustiniani, il en- verra à Rome, à la fin de 1617. D. Juste Guérin pour traiter de l'affaire qui lui tenait si fort au cœur. Dieu donna à d'autres la joie et la gloire de récolter là où son Serviteur avait si péniblement semé ; mais on doit à la vérité de l'his- toire de reconnaître la part qui lui revient dans l'œuvre continuée et menée à bonne fin par M*^"" Guérin et Msr d'Arenthon d'Alex. (i) Le P. Benoît Giustiniani, Jésuite (voir le tome précédent, note ( i ),  Année 1617 399 heretici, non la spinga ancora a favorirci in questa oc- casione, laquale alla destruttione delT heresia calviniana nel su(3 capo, che è Genevra, giovarà molto. Et cosî, bascio humilissimamente le mani a V. S. lU""" et R'"'^ et le pregho dal Signor Iddio ogni vera félicita. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Autun.  aussi, je n'en doute point, de nous favoriser en cette occasion, qui contribuera beaucoup à la destruction de l'hérésie de Calvin dans son siège même, la ville de Genève. Sur ce, je baise très humblement les mains de Votre Seigneurie Illustrissime et Révérendissime, en implorant pour elle, de Dieu notre Seigneur, tout vrai bonheur.  400 Lettres de saint François de Sales  MCCCVII (0 A LA MÈRE DE CHANTAL, A LYON (FRAGMENTS INÉDITS) Annecy-; 21 septembre 161 5. Ce garçon me vient dire q[u'il part demain à]. heures. Ma très chère Mère, quel moyen de vous escrire ? Or bien, me voyci de retour [de Chablais (2), où il n'y a plus de] danger (3), sinon comme [trois] ou quatre jours. Je re [avec] intention de passer a [La Roche (■')] pporte {'•>) Certes, j'ay esté fa bonne fille. Vraye[ment] en sa perte, si elle Tabsence de réparée (6). . [Monseigneur TArJchevesque (7). J'ay receu vos [lettres] etjedisquil sera bon vous deves venir, qui la mi octobre, et je tascheray (1) Vers la fin de l'impression de ce XVII^ volume, nous fut remis un Autographe en si triste état, qu'il tombait presque en poussière : reste d'une grande lettre de trois pages in-4° ; la quatrième portait l'adresse. Nous don- nons ce qu'il nous a été possible de sauver de la destruction complète, laissant aux lignes leur disposition première, afin que le lecteur puisse se rendre compte de ce qui manque. Le millésime a disparu ; mais la maladie de la Sœur Jeanne-Charlotte de Bréchard et d'autres allusions ne laissent aucun doute pour 161^. Ces frag- ments devraient donc se placer entre les Lettres Mcxv et Mcxvi, pp. 63, 64. (2) En août-septembre 161 5, le Saint avait fait un séjour en Chablais pour l'établissement des Barnabites dans la Sainte-Maison de Thonon (cf. Lettre mcx, p. 45) ; il était rentré le 14 à Annecy. (3) Voir ci-dessus, note (3), p. 47, et pp. 51, 52, 56. (4) Voir ibid., pp. 55, 56. (5) Les cinq lignes suivantes occupaient le bas de la première page. (6) Ici commence la deuxième page. (7) L'Archevêque de Lyon, Denis-Simon de Marquemont.  Annhh ibi^ 401 a ravantage. Si vous en litière : c'est une façon de faire chemin celle [de] monsieur et de sa (0 possible a . . . . Recteur ( = ). J'escris après [souper, et ne puis] escrire a Monseigneur '5) l'Arche- vesque, ni a vous, ma très chère Mère, plus longuement. Je vous tiendray advertie du succès de la maladie de la pauvre Seur Jeanne Charlotte, bien digne de com- passion (4). Ma Seur de la Roche (5) la sert et préside de bonne sorte. Ne vous faschés point, car nous avons encor de l'espérance ; et M. Grandis (6), avec lequel . m'a dit occurren[ces] Seur M (7) Amen. Vive Jésus. tout vostre, vous mesme. V Mère. — Le xxi sep[tembre] A Madame [Madame de Chantai] A S*^ Marie de la Visitation. A Lion. Revu sur l'Autographe appartenant à M. Gonthier. à Lyen. ( I ) Bas de la deuxième page. (2) Le P. Charles Mallians, recteur des Jésuites de Lyon. (Voir le tome précédent, note (i ), p. 333.) (3) Commencement de la troisième page. (4) Voir ci-dessus, note ( i ), p. 65, et cf. Lettres mcxvi, mcxx et mcxxi. ( 5 ) Sœur Claude-Agnès Joly de La Roche, l'une des premières professes qui restaient alors au monastère d'Annecy, après la Sœur de Bréchard. (Voir tome XV, note (2), p. 138.) (6) Médecin d'Annecy (voir ibid., note ( I ), p. 20), (7) La lettre se termine tout au bas de la troisième page.  Lettres Vli jg  Lâs notes marginales indiquent la corrélation des pièces de l'Appendice avec h texte des Lettres de saint François de Sales.  APPENDICE  LETTRES ADRESSÉES A SAINT FRANÇOIS DE SALES PAR QUELQUES CORRESPONDANTS  A  LETTRE DE M^^ DENIS-SIMON DE MARQUEMONT ARCHEVÊQUE DE LYON  Monseigneur, * Je viens d'apprendre que nous aurons aujourd'liuy l'honneur de " vide pp. i_j, i6, not. vous veoir en cete ville, et ne fauldray point de monter an carosse pour vous aller rendre mes premiers devoirs si tost que nos Vespres seront dittes. Cependant, avec ce peu de motz, fidèles interprètes de mon allégresse, je commence a vous rendre grâces très humbles du bonheur et des bénédictions qu'attirera sur ce pais vostre arrivée, et vous supplie très humblement d'honorer de vostre séjour cete maison, qui desireroit, an cete heureuse conjoncture, avoir encor les plus grands et plus illustres Prelatz qui l'ont autresfois régie, afin que plus dignement elle peust recevoir vous, Monseigneur, qui estes l'honneur et la coronne des Prelatz. Elle retiendra, s'il vous plaist, ses anciens mérites, bien que possédée par un successeur indigne qui vous en supplie, avec toutes les affections de son ame, et est, Monseigneur, Vostre très humble et très affectionné confrère et serviteur, Denys, Archev. deLyon. Ce dimanche, 28« juin [1615]. Revu sur le texte inédit, inséré dans le IP Procès de Canonisation.  404 Appendice  LETTRE DE M^^ PIERRE-FRANÇOIS COSTA NONCE APOSTOLIQUE A TURIN (0  Molto Illustre et Reverendissimo Signor mio osservandissimo, Diedi conto à Roma, con mandar anco copia del capitolo délia lettera di V. S. R""^, délia speranza che si haveva délia conversione • videtom.xiv.p. 37, alla santa fede cattolica del R. Claudio Boucard*, già délia Compa- not! (o'/erinfraf''p! S^^^ ^' Giesù, relasso nell'heresie, et délie difficoltà che haveriano ^^^' '• potuto impedire tal buon opéra. Sopra di che ne ricevo la risposta che V. S. R'"^ vedrà per l'annesso foglio, contentandosi la Santità di Nostro Signore non solo di concéder facoltà à lei di assolverlo et reconciliarlo alla santa Chiesa Cattolica, ma pensando anco di sov- venirlo nelle nécessita accennate. Do perô parte di tutto à V. S. R'"* conforme al commandamento délia Sacra Congregatione, à fme che persistendo il suddetto nel medesimo proposito, lo assolvi, havuto risguardo à quel che scrive il Signor Cardinal Verallo ( 2 ) per accertar il modo. Intorno à che, se mi par superfluo di mandar à V. S. R'^* altra instruttione, contuttocio, per obedire à superiori, le invio l'altro alligato foglio per quel più che m'è sovvenuto e par che soglia prat- ticarsi in simili occasioni. Scrissianco nell'istesso tempo à Monsignor Vescovo di Padova (3), dal quale mi furno rimessi li 50 ducatoni che presento haver poi •Vide pp. 202, not. (2), V. S. R""* havuti per servitio del R. signor D. Lodovico Despiano*, che me n'hà inviati venticinque altri, come vedrà per l'alligate, che le saranno pagati in vigore dell'annessa poliza di cambio. Si come di questi et de primi, mi sarà caro esser avvisato da V. S. R"^* délia ricevuta. Et non occorrendomi di vantaggio che annunciarle per molti (i) Voir tome XIII, note ( i ), p. 231. (2) Fabrice Veralli, créé cardinal-prêtre par Paul V en 1608, mort en 1624 à l'âge de cinquante-huit ans, (3) M^r Marc Cornaro qui gouverna le diocèse de Padoue de 1394 à 1625.  et 203, not. (i).  Lettres de auELQUEs correspondants 405 anni le buone feste del santo vicino Natale in abbondanza délie divine gratie, resto, baciandole le mani, Di V. S. molto Illustre et R"'^ Affezionatissimo servitor, PiER Fran""", Vescovo di Savona. Di Turino, li xxi di Décembre 1615. Mons"" Vescovo di Geneva. Revu sur l'original inédit, appartenant à M. le comte de Roussy de Sales, Archives de Thorens-Sales (Annecy).  LETTRE DE M^^ DENIS-SIMON DE MARQUEMONT ARCHEVÊQUE DE LYON  Monseigneur, * Puisque jamais plus il n'y doibt avoir entre nous de cérémonies, '^ vicu^ l^'\^y''''' '* je vous direy tout naifvement que j'ay diferé si longtemps de vous escrire, pour ce que j'avois honte que vous vissies mes lettres sans veoir par mesme moyen l'advis que je vous avois promis sur les Règles de la Visitation. Je n'ay jamais eu ou le loisir ou le courage de m'applicquer sérieusement a le dresser. C'est pourquoy, cognois- sant quil me seroit malaysé de faire mieulx, et géhenne d'autre part de tout plein de considérations qui me pressent de me resouldre, j'ay employé deux soirées, hier et avant hier, a brouillasser ce que je vous envoyé présentement *. Je creins bien fort que vous ayes grand' ' vide p. 158, not. (.). peine a le lire, tant il est mal escript, et encor plus a l'entendre, tant il est mal digéré. Il est en sa pureté naturelle, tel quil s'est présenté a mon esprit et a ma plume. C'est un escholier qui parle a son maistre, un fils a son père ; il n'y fault pas plus de mystère. Vous devineres un peu et les motz et le sens, mais aussy seres vous asseuré que cet escript n'ha point passé par les mains des co- pistes et que personne ne l'ha veu sinon celuy qui l'ha escript. bi quelqu'un l'eust deu veoir, il y a dedans des libertés qui n'y seroyent pas. Si vous trouves bon que madame de Chantai le voye, je m'an  4o6 Appendice remetz a vostre jugement ; mais bien vous supplie je que personne autre ne le voye et quil vous plaise, dans quelques jours, me le ren- voyer, pour ce que je fais dessein de m'an servir comme d'un Mémoire qui, sur le sujet de cet Institut, me fournira diverses choses qui ont passé par mon esprit, mais ne s'arrestent point fidèlement en ma mémoire ; et j'an ay besoing pourtant, tant que cet affaire soit terminé entièrement. Je n'userey point icy de compliment ; j'ay mis au commencement de cet escript, en peu de paroUes, ce que j'ay deub dire, et que de nouveau je confirme et par ces lignes et par toute l'affection de mon cœur. Je ne touche sinon l'institut : car pour la disposition des exer- cices de cet Institut, j'y ay de la complaisance et de la passion, et n'ay point a an faire autre jugement, sinon les estimer et admirer infiniment. Selon que nous demeurerons d'accord de l'estofTe, sil y a quelques motz ou quelques périodes a changer en l'ouvrage, il n'y aura pas a travailler pour plus d'un jour. Il est nécessaire quil vous plaise faire deux reflexions : l'une, aulx incommodités communes a vostre diocèse et au mien ; l'autre, a celles qui sont particulières au mien. J'ay touché les unes et les autres, mais a la haste, et pourtant confusément ; qui m'oblige de vous supplier, comme je fais très humblement, d'y prendre garde. Certes, mon premier souhet seroyt que nous peussions l'un et l'autre changer nos Congrégations en Religions formelles. Si cela ne se peult, je désire au moins que nous puissions convenir de Règles qui soyent uniformes pour les deux Congrégations. Enquoy, si vous approuves l'ouverture que je fais d'allunger le noviciat des veufves et de defïendre les sorties aulx professes, on peult reserver celles qui ont desja fait profession, lesquelles ayantz encor des affaires, pour- ront sortir, et le règlement aura lieu seulement pour celles qui en- treront désormais ; et cete reserve pourra estre expresse, ou mentale, comme vous le jugeres a propos. Il sera malaysé que sans cet article ou sans un autre de pareille teneur nous puissions convenir ; car jamais je ne pourrey bien establir icy la Congrégation si je n'y metz la closture. C'est l'advis de touts les Religieux et casuistes qui an entendent parler ; mais c'est ce que me dient ouvertement les plus honorables et qualifiés (sic) personnes de cete ville. Encor desire- royent ils bien fort que ce fust une Religion formelle, et ont grand' peine a permettre autrement que leurs filles y entrent. Que sil m'arrivoyt ce malheur que nous ne peussions convenir de cet article, je vous supplie de tout mon cœur quil vous plaise en ce cas me donner vos bons et charitables advis, si je debvrey ou conti- nuer ma Congrégation sur le modelle et les Constitutions de la vostre, y changeant ce que je jugerey nécessaire en mon diocèse,  Lettres de auEtauEs correspondants 407 comme nous voyons qu'ont fait diversement les Evesques de la pro- vince de Milan, ou bien si je changerey tout a fait ma Congrégation en une Religion formelle, en la manière portée par mon escript. Mais ce dont je vous supplie plus cordialement que de tout le reste, est quil vous plaise, après avoir pezé meurement toutes choses, me mander ce que vous juges selon Dieu que je doibs faire ; car, si après avoir recommendé l'affaire a Nostre Seigneur, vous voules que je laisse les sorties et que je me conforme a vous entièrement, et quil vous plaise an respondre a Dieu pour moy, je vous déclare qu'avec cete condition, et soubs la confiance que j'ay en vostre vertu, je mettrey soubs les pieds mon sentiment et tout ce que le monde pourra dire ou faire, et establirey la Congrégation, et an ferey publier et imprimer les Constitutions de mot a mot, telles que vous ordon- neres, sans y changer rien du tout. Et au bon augure de ces motz je ferey fm, vous baisant en toute humilité les mains et recommendant a vos prières et Sacrifices mes infinies misères. Je salue cordialement Messieurs vos frères et madame de Chantai et toutes ses filles, et suis. Monseigneur, Vostre très humble fils et très affectionné serviteur, Denys, Archev. de Lyon. De Lyon, ce 20 janvier 16 16. Monseigneur, je ne vous renvoyé point encor les Constitutions, pour ce quil ne semble pas que vous an ayes besoing pour vous re- souldre sur l'Institut, lequel estant arresté, je vous renvoirey les dittes Constitutions afin que vous y metties la dernière main pour les faire imprimer. A Monseigneur Monseigneur le R^e Evesque de Genève. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.  4o8 Apphndice D LETTRES DE LA MÈRE DE CHANTAL  I Vive | Jésus • Vide Epist. mcxcix, * Comme VOUS portez-vous. mon pauvre très unique Père? Tou- MCCi, etpp.2io,not.(2), . . - i ^ , r\- -- n > r\- t • 212, 213, not. (I). jours mieux, moyennant la grâce de Dieu, non pas r He Dieu ! oui, s'il vous plaît, mon bon Sauveur, et pour longtemps, je vous prie, que cette chère santé de mon Père soit bien établie. Or bien, nous en parlerons de cela. Mais cependant, me pourrez-vous dire oui ou non, simplement et courtement, de ce que je vous vais demander ? Mes quatre jours sont passés, auxquels vous m'aviez marqué ce que je ferais ; et je vous rends compte en ces deux derniers petits feuillets de ce qui s'est passé, car les deux premiers, c'est ma confession en laquelle vous n'entendrez rien. Pourrai-je encore demeurer quelques jours en ma chère solitude, y continuant cette dernière affection ? j'y aurais bien de l'inclination, pour un peu bien accoiser mon esprit en Dieu ; car vraiment, j'ai été un peu distraite ces jours passés, et si bien votre mal ne m'a pas donné de l'inquiétude, il m'a donné de la douleur et de la distraction ; à trois diverses fois, l'on en parla assez pour me toucher jusqu'au fond. Quand l'on me disait enfin qu'il était dangereux, pensez, mon très cher Père, où cela allait. Oh bien ! Notre-Seigneur m'a assistée ; il soit béni ! Montrés cher Père, un mot de vos nouvelles et si je demeurerai ou non en ma petite retraite ; car pour le reste, il se fera à loisir, je demande ce mot, pourvu qu'il n'incommode rien ; autrement ma Sœur Marie-Jacqueline (0 me le dirait bien. Bonjour, mon pauvre très cher Père, le doux Jésus soit notre tout ! [Annecy, i8 mai i6i6, matin.] Revu sur TAutographe conservé à la Visitation d'Annecy. (i) Sœur Anne-Jacqueline Coste (voir tome XIV, note (2), p. 63). C'est sans doute par distraction que la Sainte a écrit M. J. ; car la Mère Marie-Jac- queline Favre était à Lyon en i6i6, et il n'y avait pas alors au monastère d'Annecy une autre Religieuse de ce nom.  l.KTTRKS DR Q.UKLCIUHS CORRESPONDANTS  4OQ  II Vive f Jésus Hélas ! mon uni [ue Père, que cette chère lettre* me fait de bien ! Béni soit (^elui qui vous l'inspira, et que béni soit aussi le cœur de mon Père au siècle des siècles ! Certes, j'ai un extrême désir, et, ce me semble, une ferme résolu- tion de demeurer en ma nudité, moyennant la grâce de mon Dieu, et j'espère qu'il m'aidera. Je sens mon esprit tout libre, et avec je ne sais quelle infinie et profonde consolation de se voir ainsi entre les mains de Dieu *. 11 est vrai que tout le reste demeure fort étonné ; mais faisant bien ce que vous me dites, mon unique Père, comme je ferai sans doute, Dieu m'aidant, tout ira toujours mieux. Il faut que je vous die ceci : mon cœur chercherait, si je le vou- lais laisser faire, de se revêtir des affections et prétentions qu'il lui semble que Notre-Seigneur lui donnera ; mais je ne le lui permets nullement, de sorte que ces propositions ne se voient que de loin ; car enfin, il me semble que je ne dois plus rien penser, désirer ni prétendre que ce que Notre-Seigneur me fera penser, aimer et vouloir, ainsi que la nourrice qu'il me donnera me l'ordonnera ; car je suis exacte à ne la point regarder. Mon Dieu nous veuille fortifier par sa douce bonté, et nous faire accomplir parfaitement ce qu'il désire de nous, mon très cher Père. Que Jésus vous fasse un grand saint ; et je le crois ainsi. Bénite soit sa bonté de votre guérison et bon repos ! Bonjour, mon vrai Père. Ce soir je vous manderai de mes nou- velles. [Annecy, 18 mai 1616, après-midi.]  Epist. Mcciii.  Cf. Epist. Mcciv.  III  Vive f Jésus Mon unique Père, * M. Grandis** m'a dit aujourd'hui que nous eussions encore bien soin de vous, que vous ne deviez plus faire une si grande diète, qu'il fallait vous bien tenir et contregarder, à cause de la fluxion qu'il faut craindre. Je suis bien aise de toutes ces ordonnances, et que vous gardiez votre solitude, puisqu'elle sera encore employée au service de votre cher esprit. Je n'ai pu dire nôtre, car il me semble  • vide Epist. mccv. et p 2'S. not. (I ». " ViJe torn . XV. p. 20, not. (I).  4«o Appendice n'y avoir plus de part, tant je me vois nue et dépouillée de tout ce qui m'était le plus précieux. Mon Dieu ! mon vrai Père, que le rasoir a pénétré avant ! pour- rai-je demeurer longuement dans ce sentiment ? Au moins notre bon Dieu me tiendra dans les résolutions, s'il lui plaît, comme je le désire. Hé ! que vos paroles ont donné une grande force à mon âme ! que Epist. Mcciv. celles-ci m'ont touchée et consolée quand vous me dites * : « Que de bénédictions et de consolations » votre âme a reçues, de me « savoir toute dénuée devant Dieu !» Oh ! Jésus vous veuille continuer cette consolation, et à moi ce bonheur. Je suis pleine de bonne espérance et de courage, bien paisible et bien tranquille. Dieu grâce, je ne suis pas pressée de regarder ce que j'ai dévêtu ; je demeure assez simple, je le vois comme une chose éloignée, mais il ne laisse pas de me venir toucher ; soudain je me détourne. Que béni soit Celui qui m'a dépouillée ! Que sa bonté me confirme et fortifie à l'exécution quand il la voudra. Quand Notre- Seigneur me donna cette douce pensée que je vous mandai mardi ( i ), de me laisser à lui, hélas ! je ne pensais point qu'il commencerait à me dépouiller par moi-même, me faisant ainsi mettre la main à l'œuvre. Qu'il soit béni de tout et me veuille fortifier ! Je ne vous disais pas que je suis avec peu de lumière et de con- solation intérieure ; je suis seulement paisible partout, et semble même que Notre-Seigneur, tous ces jours passés, avait un peu retiré cette petite douceur et suavité que donne le sentiment de sa chère présence. Aujourd'hui encore, plus ou moins, il me reste fort peu pour appuyer et reposer mon esprit ; peut-être que ce bon Seigneur veut mettre sa sainte main par tous les endroits de mon cœur pour y prendre et le dépouiller de tout : sa très sainte volonté soit faite ! Hélas ! mon unique Père, il m'est venu aujourd'hui en la mémoire qu'un jour vous me commandiez de me dépouiller ; je dis : « Je ne sais plus de quoi. » Et vous me dites : « Ne vous l'avais-je pas bien dit, ma Fille, que je vous dépouillerais de tout ? » O Dieu ! qu'il est aisé de quitter ce qui est autour de nous ! mais quitter sa peau, sa chair, ses os, et pénétrer dans l'intime de la moelle, qui est, ce me semble, ce que nous avons fait, c'est chose grande, diffi- cile et impossible, sinon à la grâce de Dieu. La seule gloire donc lui est due et lui soit rendue à jamais. Mon vrai Père, ne me revêts-je point sans votre congé de cette consolation que je prends à vous entretenir ? Il me semble que je ne dois plus rien faire, ni avoir pensée, ni affection, ni volonté qu'ainsi qu'elles me seront commandées. Je finis donc en vous donnant ( i) Le 17 mai.  Lettres de quelclues correspondants 411 mille bonsoirs, et vous disant ce qui me vient en vue : il me semble que je vois les deux portions de notre esprit n'être qu'une, unique- ment abandonnée et remise à Dieu. Ainsi soit-il, mon très cher Père, et que Jésus vive et règne à jamais ! Amen. Ne vous avancez point de vous lever trop tôt; je crains que cette sainte fête (0, ne vous fasse faire un excès. Dieu vous conduise en tout. [Annecy, 21 mai 1616.] ( I ) La fête de la Pentecôte qui tombait le 22 mai.  LETTRE DU MARÉCHAL DE SAINT-GÉRAN '  Monseigneur, * Ayant esté adverty que pour la perfection du bon œuvre que * videp.256, not. (1 nous avons commancé en ceste ville, capitale de mon gouverne- ment, qui est le nouvel establissement d'une Maison de Sainte Marie, il failloit recourir a vous pour avoir vostre permission, afin de faire venir les Dames qui doivent perfectionner ceste entreprise, j'ay creu que vous m'accorderiez la très humble requeste que je vous en fais, comme Monseigneur de Lion m'a libéralement octroyé sa permission pour l'establissement. Nous avons desja une maison propre, un fort bel oratoire, ou la bénédiction pontificale a esté faicte par procuration expresse de Monseigneur l'Archevesque de Lion, lequel, pour me favoriser, y fust venu luy mesme planter la croix, s'il n'heust esté retenu pour affaires pressez. 11 ne reste donc plus que vostre permission, afin que ces dévotes Dames viennent; dont je vous supplie derechef très humblement, vous asseurant que je fais gloire que, du temps de mon gouvernement, le Bourbonnois soit des premières provinces a recepvoir les Religieuses de vostre Ordre, n'ignorant pas quelle est (i) Jean-François de la Guiche, seigneur de Saint-Géran, maréchal de France et gouverneur du Bourbonnais. Une note plus détaillée sera donnée au cours de la correspondance de saint François de Sales.  412 Appendice vostre réputation et le renom de vostre sainte vie et mérite parmi la France ; ce qui me faict désirer de donner une de mes filles a vos Religieuses, quand elles seront icy. Et outre l'asseurance que ma- •videtom. xv,p.343, dame dcs Goufier* vous pourra donner qu'elles seront bien et hono- not. (i). ^ ^ rablement receues, je vous jure que je veux employer a leur service toute l'authorité que le Roy m'a donnée en cette province, estant a vous, et a elles a vostre considération, Très humble et passionné serviteur, Saint Geran. Du chasteau de Moulins, 3 juillet 16 16. Revu sur le texte inséré dans l'Histoire de la Fondation de la Visitation de Moulins, conservée au i^"" Monastère d'Annecv.  LETTRE DU PERE AIGNAN MOREAU UE LA COMPAGNIE DE JESUS (ïj  Monseigneur, videp.2s6, not.(:). * Vostrc lUustrissime Seigneurie sera suppliée partant d'autres de nous envoyer de voz chères Filles, que j'ay douté si je devois adjouster ma prière a celle de sy puissans intercesseurs. Toutesfois, sçachant que vous recepvez les grands et les petitz, j'envoye ces lignes vous pourter ma suplication, vous asseurant que je reçois une joye singulière en l'espoir de son interinement, car l'odeur de voz fleurs naissantes commence a donner jusques a nous ; de noz plaines, dis je, nous commençons a descouvrir l'excellence de vostre ouvrage. Ce n'est pas merveille, Monseigneur, que ce qui est sur les mon- tagnes soit visible a tous ; au contraire, je m'esbays de l'admirable voile 'dont vostre humilité a sy longtemps couvert son ouvrage. Or, Monseigneur, tirez le rideau, sil vous plaist, et nous commu- niqués ce que vous aves faict pour la gloire de nostre commun Maistre. Ce que madame de Chantai a faict a Lyon, et encores plus (i) Voir plus haut, note (3), p. 287.  Lettres de ciUtLuuEs correspondants 4 , , ce qu'elle est. la faict extrêmement désirer icy. Pour mon particulier J ambit.onerois puissamment le bonheur quelle y vint au moins pour quelques mois ; mais d'autant que c'est au maistre de famille de sçavo.r sy la mère de la famille peut quicter la principale Maison pour aller travailler ailleurs, je me remetz et soubmetz a vostre jugeirient et disposition, vous asseurant que, quelles que ce soient de voz F.llesqu, viennent, nous les recevrons, chérirons et servirons avec la mesme sincérité, respect et dilection non feinte que je suis du Père de ces vertueuses Filles, Très humble, très obéissant serviteur, A[GNAN MOREAU, Jcsuite. De Moulins, 4 juillet 1616. Rêva sur le texte inséré dans VHislolr. ,e la Foni.Hon He U V^sUaUon d. Moulins, conservée au i" Monastère d'Annecy.  LETTRE DU MAIRE ET DES ÉCHEVINS DE MOULINS "' Monseigneur, ^Madame des Goufier ayant pris désir, avec bonne comna^nie de quitter PEgipte du monde pour se ranger en ces e vUren^unê Ma^on de vostre Ordre de la Visitation sLcte Marie, c mme e„ la terre de promission en laquelle elle espère jouyr des délices de son ce^ste Espoux ; après y avoir aporté les ceL'^nies ne sa re en la bénédiction du lieu faicte par monsieur le Doyen de No stre a pTet m Z l ""r" "^.^--'^-^ "-t- Gouverneur , .^ a présent la favorable assistance de vos grâces, pour envoyer des e uX '^:iTT "°'"°" ''"^ «"^ '^ '^ '-^ contemTlativ lesquelles, recuillans le pain des Anges en leurs ordinaires exercice^ piiua chr,::da'„^j,'::'rMout: ': -"^r''^^ ''-'' '-" '- '^'^-p^- -»- Beancou^njou Beaucrs.r^l'T^:: -fj'- ^^ ' ^ ^^-^ ^ -.-^, 2 Claude Feydeau (voir plus haut, note (I) p ,,o (3) Le maréchal de Saint-Géran (cf. ci-dessus, p.' ',]]', E).  Vide p. 256, not.(i)  4i4 Appendice et s'acquerans les faveurs du Ciel, puissent rendre nostre ville parti- cipante des bénédictions qui se reçoipvent par le mérite de sy sainctes hostesses, lesquelles venant de vostre part nous apporte- ront un esprit céleste et nous seront autant chères comme asseure- ment, et a Vostre Seigneurie et a leur pieté, nous demeurons a jamais, Voz très humbles et très obeissans serviteurs, Les Maire et Eschevins de Moulin, Feydeau, Beaucousin, Heroys, Roussel. De Moulins, ce 4 juillet 16 16. Revu sur le texte inédit, inséré dans V Histoire de la Fondation de la Visitation de Moulins, conservée au i^"" Monastère d'Annecy.  H  LETTRE DE M^^ DENIS-SIMON DE MARQUEMONT ARCHEVÊQUE DE LYON  Monseigneur, videp,256,not.(i). * Passant par cete ville pour m'en aller a Paris, j'ay veu les commencemens que madame des Goufier a donné a une maison de la Visitation. Il est nécessaire d'envoyer icy promptement madame de Chantai ou, si sa santé ne le peut permettre, quelque autre Dame qui puisse donner l'habit et l'esprit aulx filles et veufves qui veuUent servir a Nostre Seigneur dans ce sainct Institut. Les commencemens que je veoy icy sont si heureux, qu'il fault, Monseigneur, que je vous die ce que j'ay apris d'un bon médecin ; qu'encor que l'on veuille faire nourrir les enfans par d'autres que par leur mère, il seroit a souheter, pour le proffit de l'enfant, que la vraye mère luy donnast le premier laict, par un secret de nature qui, donnant et faisant produire l'enfant, ne manque pas a fournir ce qui est pour son mieulx. Vous entendes ce que je veulx dire : si madame de Chantai, vraye Mère de vostre Congrégation, pou voit venir icy donner le premier laict aulx filles commençantes, je pre- voyrey autant de bonheur a cete institution et fondation que de celle de nostre Lyon, qui donne tousjours plus de contentement et d'espé- rance que Dieu y sera glorifié (fidelis sermo est); car c'est ce que nous  Lettres de cluelq.ues correspondants 415 pretandons. Il y aura encor icy, comme je prevoy, quelques petites difficultés, qui se dissiperont des que l'on verra des Religieuses et que l'Office se fera. Envoyés en donc au plus tost, Monseigneur, je vous supplie, et me donnes la bénédiction de vos sainctes prières, que je vous de- mande du bon de mon cœur, qui se proteste Vostre très humble et très affectionné frère, Denys, Archev. de Lyon. A Moulins, 6 juillet 1616. Revu sur le texte inséré dans VHistotre de la Fondation de la Visitation de Moulins, conservée au \^^ Monastère d'Annecy.  I LETTRE DE M. CLAUDE BOUGARD^')  Mon Seigneur Reverendissime, *I1 faut en fin que Dieu soit victorieux; la chair a beau regimber ♦ videp.344, not.(i). contre l'esguillon, et le diable à redoubler ses tentations ; quant il plaist au S. Esprit de convertir une ame, il faut en fin que sa voca- tion soit efficace. J'en sens les mouvements et l'expérience en moi mesmes. Quant je fus dernièrement a Tonon, plusieurs considérations humaines et les troubles causées (sic) par l'ennemy de mon salut m'empescherent de passer outre, mais non toutefois en sorte que mon dessein fut aucunement changé, ni ma bonne volonté diminuée en façon quelconque*. Au contraire, Dieu par sa bonté infinie, qui avec • cf. supra, p. 404, b. la tentation faict accroissement de grâce, m'a depuis mon retour eslargy nouvelle force et vertu, voire jusques à surmonter et vaincre toutes les puissances adverses. Et afin, Monseigneur, quil soit évident que ce ne sont pas parol- les seulement et que vous en aiez pleine asseurance, outre l'obliga- tion que j'y ay desja, j'ay faict vœu a Dieu, et le faicts encor main- tenant en vostre présence, de quitter et abandonner tout pour me rendre à la sainte Eglise Catholicque ; et ce, dedans brief temps et sans beaucoup temporiser par négligence. Si j'avois la cognoissance (i) Voir tome XIV, note (2), p. 37.  4i6 Appendice des temps et des moments que te Père Céleste retient en sa puissance, j'apposerois quelque terme prefix a ce mien vœu ; mais au moins, incontinent après la S. Martin prochaine, sil plaist a Dieu me pres- ter santé, toutes mes pensées, touts mes efforts et desseins se bande- ront à effectuer ma promesse ; et ay ferme espérance en Dieu, qui ne me confondra point, puis que l'entreprinse est pour son service, honneur et gloire, que par sa grâce il me suppeditera touts moiens a ce nécessaires, et ostera touts empeschements invincibles : Erunt prava in directa, et aspera in vias planas. Ce sera donc au plus tost, Monseigneur, que j'iray vers vous pour recevoir voz commande- ments et faire tout ce que vous jugerez expédient pour la gloire de Dieu, à quoy je me dispose de bon cœur. Si donc quelqu'un estoit entré en doute de ma constance, je prie (et c'est icy presque la principale fm pourquoy j'escry la présente) que telle deffiance soit levée, car jamais je ne fus mieux résolu. Je hay infiniment l'heresie et l'ay en telle abhomination que, par force, il faut que je quitte le lieu ou elle règne, nonobstant toutes affec- tions naturelles vers les miens. Je suis du tout dédié à l'Eglise Catholicque. Oblivioni detur dextera mea si non meminero tui Hieru- salem. C'est a elle que je voue le service de tout le reste de ma vie, et si les forces estoint pareilles au courage, ce ne seroit pas pour petites choses mais pour grandes ; toutefois, j'attendray la vocation de Dieu. C'est pourquoy je désire d'estre tousjours recommandé a la bénignité et grâce de ladicte saincte Eglise, et de ressentir son indulgence, laquelle j'espère et m'y confie. Le commun bruit est par deçà que l'alliance entre Son Altesse et Messieurs de Berne est si fort avancée qu'elle s en va comme con- clue. Je tiens pour certain de bon lieu que Messieurs de Berne, entre ♦Videtom.xi,p.277, autres conditions, ont demandé que Ylnterim'^ soit remis aux bail- "°*' ^'^" liages de Chablais esquels il a esté autrefois ; qiwd Deiis avertat. Il est vray que je ne sçay pas a quoy penche et incline cest affaire la, mais selon mon petit advis, c'est chose qu'il ne faut pas négliger. Je vous prie d'avoir assiduellement mémoire de moy en voz saincts Sacrifices et oraisons ; je suis, Monseigneur Reverendissime, Vostre très humble et dédié serviteur, C. BOUCART. De Lausanne, ce 4 octobre 1616. A Monseigneur Monseigneur le Reverendissime Evesque de Genève. A Nissy. Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation d'Annecy.  Lettres de auEi-dUEs correspondants 417  LETTRE DE M. RENE GROS DE SAINT-JOYRE  et Append.  Monsieur, * En response de la vostre tres-aggreable du 28 septembre ( i ), que • vide Epist. mcclxi. j'ay receùe le 10 du présent, je vous diray non seulement que je voy vos Œuvres de l'œil favorable que je dois, et fais en icelles le profit que je peux ; mais de plus, je vous confesseray de bouche que, de vostre plénitude Je me suis tout remply, et qu'estes mon estude. La Mire de vie a V amour parfaict, que j'ay faicte au nom et sur le nom de madame Marie de Levi, tres-digne Abbesse du monastère Royal de S. Pierre de Lyon (2), vous en fera foy, et à tout le monde, si elle s'imprime*, ainsi que désirent plusieurs de mes amis, à la «videp. îi5,not.(i), volonté desquels j'acquiesceray, si vostre approbation m'en donne le courage. J'attends avec avidité d'estudier en ces beaux traictez que vous me faites espérer par la vostre susdicte, afin, nous les donnant, qu'à moy et à ceux qui mieux que moy y feront leur profit, vous nous disiez le dire du Poète : Vous estes mes ruisseaux, je suis vostre fonteine. Et plus vous m'espuisez, plus ma fertile veine Repoussant le sablon, jette une source d'eaux D-'un surgeon éternel pour vous autres ruisseaux. En cette qualité et toute autre, je me diray toujours. Monsieur, Vostre très humble serviteur, René Gros de S. Joyre. A Belmont, ce 13 novembre 1616. A Monsieur le Reverendissime Evesque de Genève. Revu sur le texte inséré dans La Mire de vie, etc. (Bibliothèque de Lyon, 317, 181.) ( I ) Cette lettre de saint François de Sales ne nous est pas parvenue. (2) Marie de Lévis-Ventadour, fille d'Anne de Lévis, duc de Ventadour, et de Marguerite de Montmorency. Elle fut successivement abbesse des monas- tères bénédictins d'Avenay (diocèse de Reims) et de Saint-Pierre de Lyon.  Lettres VII  «7  4i8 Appendice K LETTRE DU CARDINAL ROBERT BELLARMIN  Admodum Illustrissime et Reverendissime Domine, • VideEpist. Mccxix. "^ Etsi fortasse non multis in Urbe Reverendissima Amplitudo Vestra nota sit, mihi tamen a multis annis virtutes vestrae, multae et magnae, notissimae sunt ; neque mihi tantum, sed etiam Sanctis- simo Patri Nostro nota est vigilantia pastoralis et charitas in gregem •Cf. p. 199, not. (i). proprium Reverendissimce Dominationis Vestrae *. Sed quod attinet ad negotium virginum et viduarum quod mihi Amplitudo Vestra commendat, non scio prorsus quid agam ; tum quia nemo hic est, quod sciam, qui causam sollicitât, tum quia certum est cum illis tribus conditionibus obtineri non posse ab Apostolica Sede, ut confirmetur vera monastica professio. Ego quidem paratus sum pro viribus adjuvare propositum Reverendissimce Dominationis Vestrœ, si quis sit qui ad me veniat et negotium urgeat ; hactenus enim neminem vidi, nec satis scio cui litteras tradam quas nunc scribo. Sed tamen, intérim consilium dabo, quod mihi ipse acciperem, si res mea ageretur. Ego igitur retinerem virgines et viduas istas in statu in quo sunt, nec mutarem quod bene se habet ; nam ante tempora Bonifacii VIII, erant in Ecclesia Sanctimoniales, tum in Oriente, tum in Occidente, quarum saepe mentionem faciunt sancti Patres : ex Latinis, Cyprianus, Ambrosius, Hieronymus, Augusti- nus; et ex Graecis, Athanasius, Basilius, Chrysostomus et alii, sed illae non erant ita clausae in monasteriis, ut non exirent quando opus erat. Nec ignorât Amplitudo Vestra, coram Deo vota simplicia non minus obligare, nec minoris meriti esse quam solemnia ; solemnitas enim, ut etiam clausura, inchoata est ecclesiastico instituto ab eodem Bonifacio VIII. Et nunc, etiam Rom^, floret valde Monasterium nobi- lium fœminarum a Sancta Francisca Romana institutum, in quo ♦videtom.xiv.p. 330, tauieu, neque clausura est, nec solemnis illa professio *. not. (2),etXV,p.29, „•,..., . . , f . , . not, (I). Promde si m ista regione, sme clausura et sme proiessione vir- gines et viduae tam sancte vivunt, ut audio, et simul prodesse possunt ♦Cf. Epist.MccLxxxm, saecularibus, non video cur ista ratio vivendi mutari debeat *. Hoc tamen consilium meum meliori judicio libenter submitto.  et p. 349, not. (2;.  Lettres de q.uelq.ues correspondants 419 Accepi, dum hanc epistolam scriberem, alias litteras Revcrendis- simae Dominationis Vestrae (0 pro negotio Avenioncnsi *, pro quo * vide Epist. mccxlvi, , , , . , MCCXLIX, MCCl, et p. laborabo quantum potero. 294, not.(3). His bene valeat Reverendissima Dominatio Vestra, mei memor in sanctis precibus suis. Admodum Illustrissime et Reverendissimœ Dominationis Vestrae, Addictissimus atque ad obsequendum promptissimus, RoBERTus, Cardinalis Bellarminus. Romae, die 29 Decembris 16 16. ( I ) Ces lettres n'ont pas été recouvrées.  LETTRE DE HENRI DE SAVOIE DUC DE NEMOURS  Monseigneur, * Le desplaisir que je reseus de ne vous avoir encores trouvé a * vide Epist. mcclxxi, Nissy quant j'y arrivé, ne fut pas moindre que seluy que vous tes- ^* p-^3o> "ot- (')• moignes en avoir eu, car j'avois une estreme envie de vous voir et entretenir ; mais je me consolle avec l'esperanse que j'ay d'avoir bien tost se contantement, que je désire passionnément, pour estre un des plus grans que je puisse recevoir. Ce qu'attendant, je vous prie de vous asseurer tousjours de mon affection et du désir que j'ay de la vous faire congnoistre aus occasions, lesquelles ne s'offriront jamais aussy souvent que je les souhaite, pour l'envie que j'ay que vous croies quil ny a personne qui vous soit plus aquis que moy. Quant a se que vous m'escrivés pour le regard du bastiment de l'église des Pères Bernabites, je contriburay tousjours tout se qui me sera possible pour ung si bon œuvre, estant bien marry que je ne puis des a présent leur faire congnoistre la volonté que j'en ay ; mais parse que les occasions passées m'ont un peu mis en arrière, cela ne me peult permettre de faire tout se que je voudrois bien *. -vide p. 33i,not.(i). Neantmoins, je satisferay au désir de ses Pères le plus tost que je  420  Appendice  pourray, voulant en toute occasion leur tesmoigner l'affection que j'ay a tout se qui leur touche, et a vous combien je suis, Monsieur, Vostre plus affectionné a vous faire servisse, Henry de Savoye. Ce 26"'® janvier, a Lagnieu, 1617. A Monsieur Monsieur l'Evesque de Genefve. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy,  M  LETTRES DE LA MERE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON (0  • Epist. MCCLXXIV.  * Vida p.335, not. (i). * Vide tom.XIl^p.271, not. fi), et cf. supra, p. 336, not. (2).  ♦ Cf. p. et infra.  341, not, p. 424.  (2),  I Vive f Jésus iMonseigneur, Nous avons reçu aujourd'hui votre dernière lettre *, où vous nous parlez de M. l'Aumônier. 11 a quitté la condition que l'on lui voulait donner, parce qu'il n'a pas eu le courage de nous quitter. C'est un bon homme tout à fait ; il est nôtre pour longtemps *. Pour M™^ du Puits-d'Orbe *, elle est revenue à son abbaye, là où on ne la voulait pas recevoir, et lui a-t-on fait la correction bien sèchement. Elle était allée voir certaine damoiselle. Pour leur confes- seur, il est de delà Paris, à ce que son frère même a dit ; et à même temps que ces Dames et lui sortirent, M. l'Evèque Dangre (de Lan- gres) (2) a donné une sentence contre lui, que s'il retournait en Bour- gogne, il n'y irait que de la vie. Nous n'en savons pas la raison. Enfin, il s'en est parlé fort mal à propos ; Dieu veuille qu'il y ait plus d'innocence que le monde ne pense ! Mon Dieu, mon très honoré Père, que de malheurs qui sont parmi le monde ! Bienheureux qui vit en crainte! Pour moi, je ne puis mal penser de cette Dame {3), je la crois trop vertueuse. Monseigneur, notre chère Mère s'est trouvée mal * ; nous vous supplions très humblement de mettre bon ordre, avant que partir de (i) Nous avons substitué l'orthographe moderne à celle de la Mère Favre, qui rendrait la lecture de ses lettres trop difficile. (2) Mk"" Sébastien Zamet qui avait pris possession du siège de Langres en 161 5. (5) Rose Bourgeois, abbesse du Puits-d'Orbe.  Lettres de auF.LQ.uEs correspondants 421 Nicy ( I ), que l'on la fasse conserver ce Carême ; autrement elle se gâtera et se ruinera de santé tout à fait. O Dieu ! mon très cher et honoré Père, c'est la douleur la plus sensible au cœur que l'on puisse avoir ; toutes les contradictions ne sont rien, au prix de savoir du mal à cette chère Mère. L'affliction de madame de Thorens nous a touchée vivement *; ' vide p. 336. il faudra qu'elle ait recours à saint François de Paule, sans doute elle y trouvera du bonheur *. Monseisrneur, nous vous envoyons des * ^^- ^°"^- pr«ced. ^ , ^ ■' Epist. CMLXIV. lettres de nos chères Sœurs de Moulins ; nous n'écrivons point sépa- rément à notre chère Mère, faute de temps. La sortie de ma bonne Sœur Marie-Jeanne s'achemine assez dou- cement (2) ; nous en avons écrit amplement au R. Père Coton *, son * vide tom. prœced. confesseur, qui est celui qui nous l'a remise ; il nous a conseillé de la mettre dehors, et le Père Remont, Jésuite ( 3 ), et tous ceux à qui nous en parlons et qui la connaissent. Hélas ! Monseigneur, demandez bien cette force pour votre pauvre grande fille ; elle en a bien besoin, il se présente plusieurs occasions à la bien employer. Nous vous supplions d'agréer que nous saluions mille fois en toute humilité notre chère Mère. Toutes nos Sœurs vous saluent très humblement, Monseigneur; nous supplions Notre- Seigneur vous continuer ses plus chères grâces. Après vous avoir salué en toute révérence, je me dis, Monseigneur, Votre très humble et plus obéissante fille et servante en Notre-Seigneur, M. J. Favre, de la Visitation. Dieu soit béni. De Lyon, ce 26 janvier [1617]. Ma sœur Le Blanc * vous salue très humblement ; elle est auprès * videp.366, not. (i). de nous, elle vous prie de ne la point nommer dame, mais Sœur Barbe Marie *. * cf. pp. 23,367, not. A Monseigneur Monseigneur le R°^® Evêque et Prince de Genève. A Nicy. Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation d'Annecy. (i) Pour se rendre à Grenoble. (2) Il s'agit de la sortie de Sœur Jeanne-Marie Coton du monastère de la Visitation de Lyon, où elle était novice. (Voir note ( i ), p. 232, et cf. note ( i ), P- 359-) (3) Aucun Religieux de ce nom ne se trouvait alors dans la Province lyon- naise de la Compagnie de Jésus. On rencontre en celle d'Aquitaine un P. Fran- çois Remond qui, vers 1617, fut envoyé à Rome; il est fort possible qu'il se soit arrêté à Lyon en se rendant en Italie.  (')•  423 Appendice II Vive f Jésus Monseigneur, Nous supplions Notre-Seigneur vous continuer abondamment l'assistance de son Saint-Esprit et faire réussir votre travail à sa plus grande gloire. Nous avons reçu les lettres que vous écrivîtes la veille de Noël ( i ), environ cinq semaines après. Nous avons donné à Monseigneur de Lyon celle qui s'adressait à lui ; nous ne l'avons pas vu du depuis. Nous louons Notre-Seigneur, mon très honoré Père, de ce que •Cf.Epist.MccLxxxvm, vous trouvez des âmes si fort disposées au bien *, et de quoi vous ♦ videp.'î88,'not!{i), trouvez la nièce de M. de Bouqueron propre *. A la vérité, Monsei- ^ '""■*'?• 425- gneur, son infirmité nous met un peu en peine, car elle est grande, bien que l'on dise que ce soit un mal qui n'ira pas en empirant, parce que ce n'est pas une défluxion, ains une incommodité que la vérole lui a laissée. Je trouve son cœur et son esprit, pour le peu de connaissance que nous en avons, bien à notre gré. Oh ! Dieu fera bien tout réussir selon sa sainte volonté, s'il lui plaît. ♦ Cf. Epist. praeced. Nous avons reçu une fille à l'essai, de la main de M'"^ Le Blanc *, qu'on espère qui fera bien ; elle a eu une étrange persévérance à vouloir être toute à Dieu. Monseigneur l'Archevêque dit qu'il ne veut pas que l'on en reçoive ♦ Vide p. 549, not.(i), davantage que l'on ne sache la fin des affaires de Rome *. (2) Nous et cf. Epist.MCCtxxxiii. , . , , . , , , , ... . Vivons avec des incertitudes et des irrésolutions et humiliations si grandes, que je ne sais quelquefois où nous en sommes. Mon Dieu, Monseigneur, que nous avons bon besoin de l'assistance de sa divine Majesté et qu'il nous fortifie ! Avec toutes ces rencontres journalières, qui sont assez pleines de mortification, je n'ai nul sentiment de confiance, ni quasi de courage, bien que, grâces à Dieu, nous ressen- tons toujours, à la pointe de l'esprit, de l'amour à tout ce qui arrive, parce que nous le voyons partir comme des choses que Dieu permet et qu'il nous donne pour nous humilier. 11 faut avouer, Monseigneur, que tout ce qui se passe ici conduit fort à l'humilité, à qui en vou- dra faire profit. 11 nous semble que le fruit que Notre-Seigneur nous (i) Malheureusement, ces lettres et celles que mentionne la lettre sui- vante n'ont pas été retrouvées. (2) Tout ce qui précède est inédit. Ce qui suit, jusqu'à ces mots (p. 433, lig. 4) : « Nous implorons l'assistance de vos prières, » a été inséré, mais avec des modifications notables, dans la Vie de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy (Les Vies de IV des premières Mères, etc., Annessy, 1659, chap. viii, p. 34), et reproduit par Migne, tome V, col. looi. La fin de la lettre est également inédite.  Lettres de q.uelq.ues correspondants 42) fait tirer de cela est un dénuement de toutes choses créées et l'aflec- tion de ne tenir qu'à Dieu seul. Nous avons quelquefois ces vues avec quelque sentiment, et quelquefois non. Eh ! Dieu nous rende telle que sa Bonté nous désire. Nous implorons l'assistance de vos prières, mon très cher Père, pour ce sujet et pour cette petite Maison tant remplie de traverses. Monseigneur, nous vous envoyons une Valentine (0. Toutes nos chères Sœurs vous saluent très humblement : elles sont bonnes filles, Dieu merci. Sa Bonté nous fasse la grâce de les imiter, et de nous rendre digne de l'heureuse qualité que je possède à me nommer, Monseigneur, Votre très humble et plus obéissante fille et servante en Notre-Seigneur, M. J. Favre, de la Visitation. Dieu soit béni. De Lyon, ce 12 février 1617. A Monseigneur Monseigneur le R^o Evêque et Prince de Genève. A Grenoble. Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy. (i) Sainte protectrice que l'on tirait au sort le 14 février, fête de saint Va- lentin, selon que l'avait établi François de Sales, pour remédier à un usage tout profane et dangereux. (Voir Charles-Auguste, Histoire, etc., liv. V, éd. 1634, p. 284; éd. Vives, 1857, tome I, p. 343.)  III Vive f Jésus Monseigneur, Nous supplions Notre-Seigneur vous donner et continuer de plus en plus son saint amour. Nous avons reçu vos lettres avec toujours une particulière conso- lation : c'est le remède à tous les maux qui nous pourraient arriver ; je veux dire que, quelle sorte de peine ou d'abattement d'esprit que nous ayons, vos nouvelles nous remettent en courage et en vigueur. Le livre de V Amour de Dieu nous sert et nous aide grandement à être un peu courageuse aux contradictions dont cette vie est remplie. Plaise à la divine Majesté conserver longuement et heureusement l'auteur, pour sa gloire.  • Cf. supra, p.34i,not. (2), et p. 42'-  424  Appendice  Mon Dieu, mon très honoré Père, nous sommes un peu en peine de notre digne Mère qui reprend si fréquemment ces accidents si fâcheux et dangereux *; elle en a eu un depuis que vous êtes à Gre- noble, à ce que nous écrit monsieur de Boisy (0, force d'avoir trop parlé à nos Sœurs au Chapitre. Si vous ne lui faites des commande- ments bien exprès, Monseigneur, de se conserver, elle demeurera un jour en ces convulsions. Nous vous demandons très humblement pardon si nous parlons de la sorte ; nous savons bien le soin que votre bonté en a, mais mon affection s'échappe toujours un peu, et nous espérons que vous ne le trouverez pas mauvais.  Monseigneur l'Archevêque nous a remises tout à fait à M. de Saint- vide p. 103, not.(}). Nizier et l'a fait le Père spirituel de la Maison *. Nous vous envoyons les Règles des Ursulines de Paris, avec les Bulles qu'elles ont obtenues de Sa Sainteté; Monsieur de Chenevoux(2) nous les a envoyées, nous avons pensé que vous seriez peut-être bien aise de les voir. Nous louons Notre-Seigneur de ce que cette chère Sœur de la Val- Cf. supra, p. 336. bonne fait tous les jours mieux * ; elle nous fait grande honte, elle avance, et nous croyons que nous allons en arrière. Nous sommes toujours la moindre de vos filles, mon très honoré Père, mais de celles qui ont plus de désir de vous obéir et de plaire à Dieu. Nous ne vous disons rien de ma Sœur Barbe-Marie (3); nous croyons qu'elle vous écrira et qu'elle aura l'honneur de vous voir bientôt. C'est une bonne âme, et à laquelle cette Maison est fort obligée. Toutes nos chères Sœurs vous saluent très humblement en toute révérence, mais plus que toutes, celle qui a l'honneur de se dire, Monseigneur, Votre très humble et plus obéissante fille et servante en Notre-Seigneur, M. J. Favre, de la Visitation. Dieu soit béni. De Lyon, ce 21 février 16 17.  Revu sur l'Autographe conservé à la Visitation d'Annecy.  (i) Jean-François de Sales (voir plus haut, note ( i ), p. 48). (2) Jacques Coton, seigneur de Chenevoux, frère aîné de M""* d'Aix ; celle- ci, en entrant à la Visitation de Lyon, lui avait confié ses deux enfants. (Cf. ibid,, note ( r ), p. 232.) (3) La présidente Le Blanc (cf. ibid., note ( r ), p. 367, et p. 421).  Lettres de ciuelq,ues correspondants  425  IV  Vive f Jésus Monseigneur, Nous supplions notre Sauveur vous continuer l'abondance de ses grâces. Nous vous remercions très humblement du soin que vous avez de nous faire savoir de vos nouvelles, bien qu'à même temps nous vous supplions de n'en point prendre la peine, vous avez assez d'autres occupations; il suffira que M. Michel (0 nous fasse savoir quelque- fois comme vous vous portez. Nous venons de recevoir à l'essai cette damoiselle pour laquelle vous prîtes la peine de nous écrire. Nous ne la connaissons point ; néanmoins son premier abord nous agrée assez, et nous espérons qu'elle sera propre pour notre sorte de vie : Dieu lui en fasse la grâce ! Ce sera le plus grand bonheur qu'elle puisse avoir, que de se rendre digne de la grâce que sa divine Majesté lui a faite, et à nous aussi. Monseigneur et mon très digne Père, nous louons notre bon Dieu et vous remercions très humblement de la bonne nouvelle que vous nous dites de nos affaires de Rome * ; nous espérons qu'à (sic) la seule difficulté qui reste sera bientôt éclaircie, s'il plaît à Notre-Seigneur ( 2 ). Nos Sœurs sont toujours là, en attendant de faire profession *. Nous aurons bon courage, s'il plaît à Dieu, Monseigneur, puisque vous nous le commandez. J'ai toujours des grands désirs d'être telle que vous nous désirez et que Dieu nous veut ; mais il faut que tout vienne de lui, par l'intercession de vos saintes prières. Monseigneur, nous serons bien aise que la nièce de M. de Bouqueron vienne * ; nous avons une grande bonne opinion que ce sera une bonne servante de Dieu. Nous espérons que, avant que vous sortiez de Grenoble, que nous vous écrirons que nous sommes logées (3) ; au moins, l'on est fort après.  * Cf. p. 349, not. (2), et supra, p. 418, K. • Cf. Epist. MCCLXXXUI, et p. 349, not. (r).  • Vide p. 388, not.(r), (3) et supra, p. 422.  ( I ) M. Michel Favre, aumônier de saint François de Sales. (Voir plus haut, note ( I ), p. 208.) (2) La difficulté concernait l'obligation du petit Office de la Sainte Vierge, qui devait remplacer, pour les Religieuses de la Visitation, celui du Bréviaire. (Cf. ibid., p. 383.) (3) Le 29 avril 1617, fut passé le contrat d'acquisition de la maison et du jardin de M. Thierry, sis en Bellecour, paroisse Saint-Michel; et le 14 juin, la petite Communauté quitta sa première demeure de la rue du Griffon (voir le tome précédent, note (3), p. 304), pour s'installer dans le nouveau monastère.  426 Appendice Nous avons eu nouvelles de Nicy. Notre chère et digne Mère se Vide tom. prœced., porte bien ; M"^^ Colin * l'est allée voir et y sera quelques jours. Vous ). 241, no . (I). ^^^^ ^^ Sœur Le Blanc à Grenoble, nous en sommes extrêmement aise ; cela la rendra toute brave, d'avoir le bonheur de vous corn- er, p. 367, not. (i). muniquer de son âme *. Nous supplions Notre-Seigneur qu'il vous conserve longuement et heureusement pour la gloire de son saint Nom. Nous nous disons en toute humilité, Monseigneur, Votre très humble et plus obéissante fille et servante en Notre-Seigneur, M. J. Favre, de la Visitation. Dieu soit béni. Toutes nos chères Sœurs vous saluent très humblement et en toute révérence, et tout à part, nos Sœurs professes (0, mais plus que toutes, votre chétive grande fille. Ma Sœur Marie-Aimée a bien reçu la lettre que vous dites avoir pris la peine de lui écrire (2). A Lyon, ce 7 mars 1617. A Monseigneur Monseigneur le R°i« Evêque et Prince de Genève. A Grenoble. Revu sur l'Autographe inédit, conservé à la Visitation d'Annecy. { I ) Les professes se réduisaient alors à deux : les Soeurs Marie-Aimée de Blonay et Anne-Françoise Chardon ; cette dernière avait remplacé au monas- tère de Lyon la Sœur de Chastel. (Voir le tome précédent, note (4), p. 337.) Six novices attendaient l'autorisation de Ms"" de Marquemont pour prononcer leurs vœux ; la permission vint enfin, et la cérémonie eut lieu le 18 juin 1617. (a) Cette lettre ne nous est pas parvenue.  Lettres de q.uelq.ues correspondants 427  N  LETTRE DU P. LOUIS DE LA RIVIERE MINIME (0 (fragment)  J'ay veu, passant a Lyon, ceste grande et admirable Fille de vostre cœur (2), devuider ses affaires avec un si profond jugement, accom- pagné d'un recueillement si religieux et d'une douceur si atrayante et sans altération, que si je n'eus pas sceu qui elle estoit, je n'aurois pas laissé de juger, par une conséquence indubitable : Voyla la grande Fille de nostre très débonnaire Père, Monseigneur de Genève. [Avril-mai 1616 ou 1617 (3).] Revu sur le texte inséré dans la Vie manuscrite de la Mère Favre, par la Mère de Chaugy, conservée à la Visitation d'Annecy. (i) Voir plus haut, note (4), p. 145. ( 2 ) La Mère Marie-Jacqueline Favre. (3) Le P. de la Rivière a dû écrire cette lettre après l'un des deux Carêmes qu'il prêcha dans la ville d'Annecy, en 1616 et 1617 (cf. plus haut, notes (4), p. 145, et ( I ), p. 343) ; d'où la date flottante que nous indiquons. Du reste, la Mère de Chaugy, citant ce fragment dans la Vie de la Mère Favre, le place à la suite du récit des contradictions suscitées par l'Archevêque à la Supérieure de la Visitation de Lyon, ce qui correspond à la même époque.  428 Appendice  LETTRE d'une DAME ^'^  Monsieur, J'ay leu six fois depuis un an vostre Philothée ; je ne sçay si sa conversation m'a rendue meilleure, mais au moins je voudrois bien luy ressembler, j'ay leu aussi depuis un mois tout vostre Theotime, où j'ay appris que l'amour de nostre bon Dieu n'est pas de la nature Cf. p. 238, not. (2). de ceux du monde et de la Cour *. Je m'en vais donc tascher de mouler ma vie sur celle de vostre Philothée, et n'aimer avec Theotime rien que Dieu, ou pour luy, et selon sa très aimable volonté. Je vous prie donc, Monsieur, de m'assister de vos prières et de me donner quelques conseils particuliers. Au reste, je ne vous ferois pas cette demande, si je n'estois très-assurée que Dieu vous a ouvert le livre des consciences, et qu'en vous déclarant mon nom je vous découvre qui je suis et tout ce qui se passe dedans mon intérieur. De plus, je trouve vos pratiques et vostre dévotion si ajustée à mon humeur et à la foiblesse de mon sexe, que je ne croy pas que vous me puissiés rien commander que je ne puisse très-facilement accom- plir. Je connois aussi plusieurs dames qui ont le bien de vivre dessous vostre saincte conduite, et qui m'ont assuré que Dieu vous avoit fait naistre en ce siècle pour nous apprendre la vertu, et qu'il ne tiendra qu'à nous d'estre sainctes, si nous voulons suivre les douces loix de vostre saincteté. Pour moy, je vous choisis pour mon bon Père et mon bon Directeur, et je vous jure que, voulant estre toute à Dieu, je me resous d'estre vostre tres-chere fille selon Dieu. Adieu, Monsieur et très-cher Père, et continués de faire, comme vous commencés, autant de sainctes comme il y a de femmes dans le monde.  (i) Le P. Talon, S. J., en citant cette lettre dans sa Vie du Bien-heureux François de Sales, Evesque et Prince de Genève (éd. de 1641), chap. x, la dit écrite par « une Dame tres-noble et tres-vertueuse ; » malheureusement, il ne la nomme pas. Peut-être nous sera-t-il possible plus tard de la découvrir parmi les disciples de François de Sales à Paris. Quant à la date, tout ce qu'on peut assurer c'est qu'elle est postérieure à 1616.  II  RENE GROS DE SAINT-JOYRE AUX AMANS DE L'AMOUR PARFAICT (Extrait des pièces préliminaires de la Mire de vie, etc.)  * L'oracle de cet Escript est desployé à chascun. Il est loisible à * cf- Epist. mccux, et tout le monde de consulter son trépied, qui est le Traitté de l'Amour ^' *^ ^ ^'^' "° " * ' de Dieu de Monsieur de Sales, Evesque de Genève. J'ay emprunté ses richesses, sans en rien diminuer le fonds, de ce tres-docte Gentil- homme et tres-devot Prélat, lequel je n'ay l'honneur de cognoistre que par lettres*, mais que je recognois avec tous, particulièrement 'Cf. p. 314,001. (i). en ce parfaict amour, Estre un parfaict miracle apparu de nos jours. Car celuy qui, ravy du son de ses discours, Oit et void tout ensemble une telle merveille^ Douteux de ce que plus il y faut admirer. Ne sçait lequel des deux il devroit désirer : De se voir devenir tout œil ou tout oreille. Quant a la tissure et l'ordre que j'ay donné à ce petit ouvrage, je croy que Celle au nom de qui il vient en lumière (0, m'obtiendra de son Amour parfaict, la grâce particulière de mourir de Tamour qu'obtint l'amoureux Chevalier sur le mont des Olives *. . . . 'Vide Tr.de l'Am.de Dieu, liv.VII, chap, xu  (tom. V, p. 45).  ( I ) Marie de Lévis-Ventadour, abbesse de Saint-Pierre de Lyon. (Cf. ci- dessus, note (2), p. 417.)  GLOSSAIRE  DES LOCUTIONS ET DES MOTS SURANNÉS ou PRIS DANS UNE ACCEPTION INUSITEE aujourd'hui (0  ( L'astérisque désigne les mots qui ont paru dans leGlossairedestomes précédents.)  A — pour dans (p. 372, lig. 9), de (pp. 107, lig. 3; 147, lig. 17; 343> lig. 3), ^«(pp. 50, lig. 19; 89, lig. 28), entre (p. 356, lig. 23), pendant de (p. 285, lig. 2). ACTION — pour actes (p. 215), œuvre (p. 279). ADMIRABLE — pour d'une douil- let ter ie étonnante (p. 341). ADVENTURE (a Y) —peut-être (p. 132). AFFECTION — pour ^ièle, désir, volonté (pp. 29g, 320, 344). AFFECTIONNÉ — pour affectueux, cher, qui tient au cœur (pp. 368, 379)- AFFECTIONNEMENT —affectueu- sement, avec affection (pp. 8, 186, etc.) AGGRANDIR — pour donner une part plus large (p. 103). AINS — bien plus, et même, mais, mais au contraire, mais encore, mais plutôt, même.  *AINSY QUE — pour lorsque, au moment où (p. 163). ALANGOURISSEMENT — /««^M^Mr, état de langueur (p. 260). *ALLENTIR — modérer (p. 369). AMENDER — pour s'amender de (p. 161). *A MESME QUE — en même temps que ( pp. 6, d^, 129). * AMIABLE — gracieux, aimable (p. 376). *AMIABLEMENT — gracieusement, doucement (pp. 260, 370). AMPLIFICATION - du lat. ampli- FiCA-Tio, accroissement, extension (p. 47)- ♦APPREHENDER — du lat. appre- HENDERE, saisir (p. 80), action de saisir par l'esprit (p. 195). * ARDRE — du lat. ardere, brûler (pp. 134, 396). ASSEURANCE (d') — assurément, d'une manière certaine (p. 89). *ASSEUREMENT — pour sans  (i) Nous n'avons pas songé à dresser ici, pour ce volume, en toute rigueur scientifique, le Lexique de saint François de Sales. Un tel travail, à peine est-il besoin de le dire, ne pourra être établi qu'après l'achèvement de cette publication. Notre but a été surtout de rendre provisoirement service aux lecteurs français ou étrangers qui seraient peu familiarisés avec les particu- larités du vieux langage. On voudra bien, en se servant de ce recueil, se souvenir de la pensée d'ordre tout pratique qui l'a inspiré.  432  Lettres de saint François de Sales  hésitation (p. 348), avec assurance (P- 354)- * ASSEURER (s') — pour se persuader, être sûr, avoir confiance [^^. 39, 55, 338, etc.) ASSISE (qu'elle s')" — quelle s'asseye (p. 9)- *ATANT — là-dessus (pp. 33, 327). ATTENDRE DE (s') — pour s'attendre à (p. 393). * atterrer — pour renverser par terre (p. 15). *AU — pour dans (p. 6). * AUCUN — pour un, quelqu'un (pp. 60. 259). * AUCUNEM ENT — en quelque façon, quelque peu (p. 21). AUPARAVANT — pour avant (p. 59). * AUQUEL — TpoviT dans lequel{^. 384). AU SOIR — pour hier au soir (pp. 143, 270). AUTANT QU'EN LUY EST - autant qu'il est en lui (p. t^), * AUX — Tp o\xr par les (p. 60). AVANT QUE DE - avant de (p. 62). * AVANTAGE (a 1') — d'avance, par avance (p. 401). AVEC LES — pour auprès des (p. 373). * BELLEMENT (tout) — tout douce- ment (pp. 196, 369). BENITE — pour bénie (pp. 261, 358, 374)- * BONNEMENT — pour facilement (pp. 112, 272). * BRAVE — pour hon (p. 145), rai- sonnable, sage (p. 212), confiant en lui-même, sûr de lui-même (p. 389). •BRAVEMENT — pour 5^^^w^«/,/r^s bien (p. 164), bien, de la bonne sorte (p. 229). * CARESSE — pour démonstration extraordinaire d'affection (p. 23). * CARESSER — pour traiter avec af- fection, avec bienveillance, faire bon accueil (pp. 331, 380). •CAI^MELINE — Carmélite (pp. 36, Ml)- *CE — pour ceci^ cela. * CEANS — îW(pp. 86, 236). *CE PENDANT, CEPENDANT -  pour en attendant, a cette heure, présentement, pendant ce temps (pp. 9, 92, 116, 131, etc.). CE QUE C'EN — ce qu'il en (p. 10.) CE QUE. . . M'AVOIT ASSIGNÉ - l'assignation que... m'avait donnée pour (p. 234). CHETIFVETÉ — faiblesse, misère (p. 12). *CHEVANCE — fortune (p. 306). De l'ancien verbe chevir. CI APRES — pour dans la suite (p. 300). CILICE (du Tabernacle) — étoffe de poils de chèvre qui couvrait le Taber- nacle (p. 262). *CLAUSURE — du lat. clausura, clôture (pp. 138, 139, 140). * COGITATION —du lat. cogitatio, pensée (pp. 112, 263, etc.). COL — pour cou (p. 23). COLLOQUES — pour affections de l'âme pendant l'oraison (p. 388). * COMME — pour comment, de quelle manière (pp. i, ^6, 61, etc.), que (p. 367). COMME RIEN — pour presque pas (p. 148). CONCLURE A — pour donner une décision à (p. 2). * CONFUS — pour confondu, aban- donné à la confusion (p. 259). CONSTAMMENT — pour définitive- ment (p. 107). CONSULTÉ (une affaire) — consulté au sujet d'une affaire (p. 164). * CONTE, CONTER — pour compte, compter. •CONTEMPLATION (en cette) — en considération de cela (p. 174). CONTENTER (se) — pour être co7i- tent{p. 3). * CO^^TESTE — contestation (p. 306). CONTRAIRE (au)— qui vient à l'en- contre, qui s'oppose (p. 60). •CONTRESCHANGER — échanger, rendre (p. 89). •CONTRIBUER — pour ajouter (p. 183^ aider de, par y^. 262). CONVENT — du lat. conventum, couvent (pp. 182, 351). * CORDIAL — pour du cœur (p. a6i).  Glossaire  433  'CREANCE — pour croyance, assu- rance (p. 263). •CREUSEMENT — profondément (p. 271). 'DE — pour au sujet de (p. 28, lig. 21), les (p. 61, lig. 36), par {p. 330, lig. 3),/)o«r (p. 13, lig. 13). DEBIFFÉ — défait, en mauvais clat (p. 284). * DEÇA (de) — de ce côté-ci, dlci, ici, en ce pays, de ce pays (pp. 46, 65, 153, 174, etc.) * DEÇA LES — de ce côté-ci des (p. i 5 ',). DEC LOS — pour ouvert, décacheté (p. 284). * DEDANS — pour dans (pp. 226, 261, 271). * DEFLUXION — fluxion, catarrhe, p. 395)- * DELA (de) — de là-bas, de ce côté-là (P- 133)- , * DELAISSE — pour laissé (p. 169). *DELA LES — au-delà des (p. 391). *DEPORTEMENS — conduite, ma- nière de se comporter (p. 2), mœurs dissolues (p. 391). * DES — pour depuis (p, 326). DES IL Y A — depuis (p. 269). *DES LE — pour du (p. 175). * DESPECHE (un) —pour envoi, mes- sage (p. 98). *DESPESCHER — pour se dépécher, se hâter (p. 387). *DESPITER — pour se dépiter (p. 279)- DESPOUILLER (se) — pour se dévê- tir, se déshabiller (p. 369). * DEVANT — pour avant le (p. 20), avant (p. 302). * DEVERS - vers, du côté de (p. 80). * DEVIS — pour conversation, entre- tien (p. 336). DIGNE — poMX juste, légitime (p, 57). * DILATION — du lat. dilatio, ajour- nement, délai (pp. 50, 99). * DISCOURS — pour raisonnements (p. 387)- DISTINCTION — pour prononcia- tion distincte (p. 384), * DONT — pour c est pourquoi (p. 47), de ceux-là (p. 192). Lettres VU  • DORES EN AVANT — dorénavant (p. 100). *DOTE — dot[pp. 124, 144). DU — pour rt-M sujet du (p. 10, lig. 9), pour le, pour ce qui concerne le (p. 138, lig. 18). * DU TOUT — absolument , complète- ment , entièrement, tout à fait.  * EJECTION — du lat. ejectio, action de rejeter dehors, rejet (p. 21). *EMBARRASSEMENT - embarras (P- 3^)- EMINENT — pour imminent[p. 173). *EMMI — au milieu de, parmi (pp. 194, 206, 260). *EMPESCHÉ — pour embarrassé (P- 71). * EN — pour à (pp. 129, lig. 20; 162, lig. i; 223, lig. 12), pour (p. 359, lig- m). *EN LIEU — pour au lieu (pp. 14, 71, 192). *EN TANT QUE — pour autant que (p- 542). * ENTENDRE — pour sy entejidre (p- 170- * ENTRE CI ETLA— i'ïW/«(p.349). ENTRE] ETTER — faire vivement de fois à autre {pp. 214, 215). * ENTREPORTER — se porter mu- tuellement (p. 279). ENTRESUPPORTER - se supporter mutuellement (d. 279). •ENTRETENEMENT — entretien, frais d'entretien [pp. 154, 178, 197). ♦ENVIELLY — devenu vieux (p. 91, 187). ESMEU — pour soulevé (p. 50). ESPOUSER — pour marier [p. 64). * ESSAYER (s') — pour essayer (pp. 92, 102, 195, 388). * ESTONNER — pour effrayer (p. 72). *ESTONNER (s") — pour s'effrayer (p. 68), se troubler (p. 102), s'alar- mer (p. 142). * ETERNITE {^iXonie) — pe7îdant toute Véternité, éternellement (p. 226), *ET SI — pour aussi, et ainsi, et mê- me, toutefois, aussi bien, et en vérité (pp. 28, 62, 70, 99, 129, 219, etc.) 38  434  Lettres de saint François de Sales  EXERCICES — sous-entendu spiri- tuels (p. 336). * FAIRE — pour dire (p. i), pratiquer (p. 23), donner (pp. 81, 219). FAIRE ESTAT — pour projeter (p. 69). FANTASIER — imaginer, juger selon sa fantaisie (p. 107). * FERMEMENT — pour avec fermeté (P- 175). * FIANCE — confiance {^. 374). * FICHER —/x^r, arrêter (pp. 6, 72). FOL — fou (pp. 360.. 390). *FONDAMENT-/o«^^m^«/(p. 187). *FORCLORRE — ^xf/?oMrt'ozV(pp.84,229, 291, etc.)  PROU VOIR A — pour s'occuper de (p. 2). PROUVOIR (luy) — lui faire faire justice (p. 332). •PROVIDENCE - pom prévoyance, soin, sagesse (pp. 154, 299, 391). •Q.UANT ET QUAND -^« même temps (p. 269). •QUE —pour quelles {p. 205, lig. ii), dont (p. 236, lig. 3). QUE CE SERA — pour ce qu'il en sera (p. 343). •QUI — pour ce qui [pp. ir, lig. 9; 86, lig. 3; 67, lig. 2, etc.) •RAMENTEVOIR —faire ressouve- nir, rappeler (p. 178). ♦RAMENTEVOIR EN (se) — se rap- peler au souvenir de quelqu'un dans (p. 54), se rappeler à (p. 87). •RECHARGE — pour nouvelle ins- tance (p. 172). RECOMMANDATION (faire la) — faire une prière pour recommander (p. 143). • R ECO Y (a) — en tranquillité, en repos (p. 322). REDEVANCE — pour obligation (p. 330- REENTRER - rentrer (p. 31). REFECTIONNÉ — nourri, donné de la nourriture à (p. 369). • REGARD (pour ce) — pour ce sujet, sur ce sujet, à cet effet (pp. 21, 171, 332)- •REGARD (pour le) — au sujet de, pour ce qui concerne le (p. 384). REGARD (pour vostre) — à votre égard (p. 362). RELASCHER — poxxx faire avec moins de contention (p. 368). RELASCHER (se) — pour se donner la liberté de (p. 353V •RELEVÉ — pour élevé [p. 129). • RELIGION — pour Ordre religieux (pp. 58, 138. 260, etc.) •REMONSTRANCE — pour exposi- tion, explication (p, 379). •RENCONTRE (au premier) — à la première rencontre (p. 265).  436  Lettres de saint François de Sales  RENVOYES MOY — pour renvoye;;- moi r affaire (p. 229). REPRONONCER — prononcer de nouveau (p. 120). REPUGNANTE — pour qui a de la répugnance (p. 39). REPUTATION — du lat. reputatio, imputation d'une somme (p. 124). •RESALUER — pour sabier (pp. 14, 136). RESERVEMENT — avec réserve, dis- crètement (p. 594). RESIGNATIONS — pour actes de renoncement (p. 324). * RESOLUTION — pour décision (pp. 2, 316). * RESSENTIMENT — pour vive im- pression (p. 175). RESSERRÉ — pour séquestré (p. 51), réservé, restreint {^p. 371). REVENANTES — pour revenant, qui revenaient (p. 58).  * SEMONCE — pour invitation, com- mandement (p. 109). * SENTIMENT — pour ressentiment (p. 132), regret i,Y>. 336). ♦SERRER — pour étouffer (p. 369). SE VOULOIR L'UN L'AUTRE — pour s'eti vouloir Vun h Vautre (p. 137 . *SI — pour ainsi (pp. 207, lig. 15; 342. lig. 5). • SI EST CE QUE - cependant (p. 51), il nen est pas moins vrai que (pp. 15, 99, 372, etc.), toutefois (p. 89). *SI MOINS — pour 5i«o« (pp. 136, 211, etc ) • SI QUE — le sorte que (pp. 27, 138). SOIGNEUX — pour préoccupé, en souci (p. 360). SOUVIENNE VOUS — quil vous souvienne (p. 165). *SPELONQUE — du lat. spelunca, caverne, grotte (p. 118). 'SUCCES — pour issue {^. 401). De l'ital. succBSSo. ♦SUFFISANCE — du lat. sufficen- TiA, capacité, mérite (p. 380).  SUPERARBITRE — surarhitre (p. ni). * SUR — pour ^ (p. 81), au-dessus de (p. 60), au sujet de (p. 212), par, avec la pensée de [p. 374). SURADMIRABLE — admirable au plus haut degré (p. 112). *SUS — ci-dessus (p. 139).  *TANT— pour si {p. 268). *TANT MIEUX — pour d'autant mieux (p. 175). *TANT PLUS — d'autantplus(p. 150). * TENDRE — pour douillet, faible (p. 161), facile a recevoir (p. 193). * TENDRETÉ — te^idresse (p. 24), sen- sibilité (p. 368), attendrissement (p. 102), sentiments affectueux (p. 260). Du lat. TENERITAS. TESMOIGNÉ — pour reconnu (p. 387). *TIERCEMENT — troisièmement (p. 373). *TILTRE (en) — pour sous le titre (pp. 138, 349). * TIRER — pour attirer (p. 369). * TRAVAIL — pour souffrance (p. 193)- *TKkV KUm—ponr difficultés, peines, souffrances (pp. 22, 114). ♦TREILLE — ^W//^^^Ar (p. 61, 140). ♦TROP MIEUX — très bien (p. 391).  ♦VENANT, VENANTES — pour /«ro- chain(p. 186), qui viennent {p. 210). ♦VENIR — pour devenir (p. 225). VENIR PAR — pour en venir a un (P- 15). ♦VERS — pour a (p. 187). * VEUE — pour rencontre, entrevue (pp. 100, 227, 230, etc.) VEÛE (de ma) — pour de me voir (p. 3^). ♦VIANDE — pour aliment (p. 149), nourriture (p. 22a). VIOLENTE —ponr pressante {p. -^6%). VISTESSE — pour promptitude ip. 367).  INDEX DES CORRESPONDANTS ET DES PRINCIPALES NOTES BIOGRAPHIQUES ET HISTORIQUES DE CE VOLUME (0  Adrien des Echelles, Capucin Pages 38 AiAzzA Vespasien, Abbé commendataire d'Abon- dance » 38 Aix Louis de Seyssel (marquis d'). Voir Seyssel et Vellepesle » 361 Ambassadeurs. Voir Scaglia, Tresnel. Amédée IX (Bienheureux), duc de Savoie » 174 Amidoux Jean-Claude d' » 284 Angeville Claude d' » 76 Annecy. Voir Barnabites, Clarisses, Corde- liers, Rivière, Syndics, ViCTOR-AMÉDÉE, Vi- sitation . Annecy (Impôts et exemptions d'impôts pour) » 297, 334 Annecy (siège d'). Voir Nemours » 266 Audeyer ou Odeyer Marguerite de Fay et Fran- çoise de Bazemont (dames) » 3^9 AuxERRE Renée Trunel, dame d' (Marie-Renée, Religieuse de la Visitation) » 81 Avignon. Voir Collège de Savoie. Avignon (Vice-légat d'). Voir Guidi. Avise Gasparde d' (Marie-Gasparde, Religieuse de la Visitation) » 99 (i) Les pages des Lettres sont indiquées par des chiffres ordinaires; les caractères et les chiffres gras désignent les noms des correspondants et leurs notes biographiques. Quant aux autres notes, leurs titres sont donnés en caractères ordinaires. Les noms suivis d'un astérisque * indiquent les auteurs ou les destinataires des pièces qui figurent à l'Appendice. Dans cet Index, on a donné aux personnages la désignation que leur attribue le texte des Lettres. (Cf. tome XII, note (i), p. 491.)  438 Lettres de saint François de Sales Avise Prosper (d'). Voir Montmeilleur Pages 98 Bailly Françoise-Gabrielle, Religieuse de la Vi- sitation. Voir Visitation DE Moulins » 261, 261 Ballon Louise (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine » 220, 220 Barnabites. Voir Boerio, Chapitre général, Chioccari, Corona, Guérin » 74, 365 Barnabites à Thonon. Voir Contamine, Sainte- Maison, SCAGLIA » Barnabites d'Annecy. Voir Collège Chappuisien » Baro Lucrèce Berthier (dame) » Bassens (Bassin) » Beaufort Jeanne-Aimée de » Beauner. Voir Sens de Sainte-Catherine. ... » Bellarmin Robert *, Jésuite (Cardinal) » : 418 Bellegarde Roger de Saint-Lary (duc de). ... » BiLLOM (Congrégation de) » Blanieu Marguerite de Sassenage (dame de). . » Blonay Claude (de). Voir Sainte-Maison. .. . » Blonay Claudine (de), Abbesse de Sainte-Claire d'Evian » Blonay Marie d'Avisé (dame de) » Blonay Marie-Aimée (de), Religieuse de la Vi- sitation » 184, 205 Boerio Jérôme, Général des Barnabites » Boisy Jean-François de Sales (de). Voir Sales. BoNFiLs Horace » Borde (sieur de la) » Borromée Frédéric, Cardinal, Archevêque de Milan » BoschI Annibal » Boucard Claude *. Voir Grenoble » B0UQ.UER0M (Présidente de). Voir Gérard de Réautier » Bréchard Jeanne-Charlotte (de), Religieuse de la Visitation. Voir Visitation de Moulins. . . » 258, 277, 278, 287, 289, 347 Bressieu Charles Roero de » Bressieu Ennemonde de la Forest (dame Roero de). » 189, 189  46, '77 3,285, }y 377 98 268 39, »i3 238,238, 397. 129, 271 36 362. 362 73, 74, 290 56, 337 166 101, 105, 184, 381. 381 194, 267 , 269 274 156, , 156 309. , 309 415 389 41. 42 î, 65, 326  Index des correspondants ht des notes 439 Bressieu (fils de M'"« de) Pages 97 Bressieu Nicolas Roero de » 98  Capucins de La Roche (couvent des) » 183 Cardon Horace » 236 Carmel de Toulouse. Voir Tiercerettes » 36 Cerisier Françoise (de), Clarisse » 281, 281 Cerisier Jacques de » 149, 149 Cernex (cure et curés de) » 350 Chanal François » 378 Chanoines de la Collégiale de Sallanches. Voir Sallanches » 342 Chantal Françoise de Rabutin. Voir Rabutin. . » 124 Chantai Jeanne-Françoise Frémyot * (Sainte), Mère de » 6, 17, 19, 19, 22, 34, 38, 69, 70, 78, 92, 92, 95, 124, 127, 190, 210, 212, 213, 214, 216, 218, 219, 228, 229, 231, 270, 276, 282, 316, 317, 318, 322, 323, 324, 328, 337, 343, 356, 400, 408, 409, 409 Chapitre général des Barnabites » 364, 364 Charles-Emmanuel |e«, duc de Savoie. Voir Lesdiguières, Montferrat, Nemours » 26, 6}, 65, 83, 108, 153, 176, 185, 197, 275, 276, 295, 298. 334. 347' 392 Charmoisy Claude Vidomne de Chaumont (sei- gneur de) » 285 Charmoisy Henri de » 1 Charmoisy Louise du Chastel (dame de) » 133 Chasse Guillaume de Sautereau (seigneur de) » 333 Chastel Péronne-Marie (de), Religieuse de la Visitation » 125 Chateaufort (filles de M'"^ de) » 164 Chatelard Jacqueline de Chauvirey (dame de Seyssel, baronne du) » 99 Chatelard Pierre-François de Rossillon (sei- gneur du) » 83 Chevrier Etienne » 50 Chevrier Louis » 5^» 55 Chevron-Villette Françoise-Jéronyme (de), Religieuse de la Visitation » 159, 159 Chioccari Fulgence, Barnabite » 290  440  Lettres de saint François de Sales  Choisy Claude-Nicolas de Reydet (seigneur de), doyen de la Collégiale de Sallanches Pages Clarisses d'Annecy. Voir Cerisier, Ravoire.. » Clarisses d'Evian. Voir Blonay, Grilly » Cochet Antoine » Colin Isabeau Daniel, dame (Jacqueline-Elisa- beth), Religieuse de la Visitation » Collège Chappuisien. Voir Barnabites, Mar- Q.UEMONT » Collège de Genève » Collège de Savoie a Avignon » Collège de Savoie a Louvain (Président du). Voir Massen. Concours. Voir Cernex, Chatelard, Examina- teurs Contagion à Genève Contagion en Chablais et en Faucigny Contagion en Suisse Contamine (Procès au sujet de la commende de). Voir Scaglia et Sainte-Maison Cordeliers. Voir Garin, Richard. Saulnier. Cordeliers (Provincial des). Voir Richard. . . . Cordeliers d'Annecy (couvent des) Cordeliers d'Annecy (Gardien des). Voir Saul- nier Cornillon Melchior de Corona Tobie, Procureur général des Barnabites CoRsiER Jean-Gaspard de Prez (seigneur de). . . Costa Pierre-François *, Evèque de Savone, Nonce à Turin Coton Jeanne-Marie (dame d'Aix), Novice de la Visitation Cottin Isabeau Daspres, dame (Françoise-Elisa- beth, Religieuse de la Visitation) Cottin Marie (Marie-Aimée, Religieuse de la Visitation) CRÉaui Charles de Crespin Jean-Georges Croix Claude-Françoise de Maillard-Tournon (dame de Murât de la) Croix d'Autherin Charles-Sébastien de Pradel (seigneur de la)  342 35^, 339 227 226 3' 90 294  » 49' 53. 55 » 56, 204 » 47 )) 122  181, 354  » 281 » 310 » 281 » 254, 254 203 » 63 » 404 » 232, 232 » » » » 376, 376 377 352 390 94 14  Index dhs corrhsi'Ondants et des notes 441 Croix d'Autherin Jeanne-Antoine de Chapot (dame delà) Pages 12,14 Croix de Chevrières Claudine de Chissé (com- tesse de la) » 94 Croix de Chevrières Jean (de la), Evèque de Grenoble » 357 Croix de Fésigny Jeanne-Marie de Vincent (de la), Religieuse de la Visitation. Voir Visita- tion DE Moulins » 264, 264 Desplans Louis » 202 Destinataires inconnus. Voir Supérieur d'une Communauté » 162, 198, 300 Destinataires inconnues. Voir Religieuse.. » 166,428 Dominique de Chambéry, Capucin » 182, 182 Dunant Etienne, curé de Gex » 32 EcHEViNS de Moulins *. Voir Maire » 413 Empioz (Enpio) Claude » 265 Etienne Jeanne-Françoise, Religieuse de la Visi- tation » 359 Examinateurs pour les Concours » 53, 53 Fardel Claude-Simplicienne, Religieuse de la Visitation » 231 Faure François du . » 320 Favre Antoine » 378 Favre Marie-Jacqueline*, Religieuse de la Visi- tation » 67, 67, 72, 79, 93, 93, 100, 113, 117, 126, 134, 137, 150, 191, 222, 335, 348, 359, 420, 422, 423, 425 Favre Michel » 208, 208, 234 Fenouillet François (frères) » 77 Fenouiliet Pierre, Evêque de Montpellier. Voir Université de Montpellier. ... » 25, 31, 66, 76, 85, 131, 136, 283. 319 Feu (M'^e du) » 346 Feuillants (Général des). Voir Beauner et Sens de Sainte-Catherine. Feydeau Claude. Voir Visitation de Moulins » 255, 255, 257, 258, 258  442  Lettres de saint François de Sales  236 I 152 64, 69,  Fichet Alexandre, Jésuite Pages Fléchère Charles de la Fléchère Claude-François de la Fléchère Madeleine de la Forest (dame de la) » i, 9, 75,82, 97, m, 133, 135, 142. 144, 151, 163, 169, 179, 194, 196, 211, 223, 225, 227, 229, 266, 268, 285, 302, 307, 312, 393 Flocard Barthélémy » 303, 303 Foras Guillaume de Bernard (de) » 95, 120 Forest Charles (comte de la) » 142  Garin Jacquelin Garin (Garinus) Nicolas, Cordelier Gavens ou Gavant (famille) Gavens ou Gavant François Général des Barnabltes. Voir Boerio Genève. Voir Collège et Contagion. Gérard de Réautier Hélène (de). Voir Visita- tion DE Grenoble Goufflers Elisabeth Arnault (des). Voir Visita- tion DE Moulins 287, 345 Grandmalson Hélène de Longecombe de Pey- zieu (dame de) Grand-Saint-Bernard (Différend avec le Prévôt du). Voir MoNT-Joux Grand-Saint-Bernard (Prévôt du). Voir Viot. Granier Claude (de), Evêque de Genève. Voir Séminaire. Granier Denis (de) Granieu Laurence de Ferrus (dame de) Grenoble (cathédrale de) Grenoble (église des Récollets de) Grenoble (Saint François de Sales prêche l'A- vent et le Carême à). Voir Visitation de Grenoble 356 Greyfié Claude, François, Jean Grilly Béatrix du Nant (de), Clarisse . Gros de Saint-Joyre René * 417, 429  » 132 y> 57 » 10 » 4 » 381  » 388 » 278,280,286,  358 265  325, 325 395' 395 3.8 318  » 3 17. 344» 348, » 327 » 339 ))3i4» 314, 315,  Index dhs correspondants et des notes 443 Gruffy Claudin (de), seigneur de Barraux... Pages 86 Guérin Juste, Barnabite » 171, | 7 1 , 181 GuiDEBOis Jean-Jacques » 145 GuiDi Di Bagno Jean-François, vice-légat d'Avi- gnon » 294 Guillet Claire-Marie de Maillard-Tournon (da- me). Voir MoNTHOux » 64, 305, 305 Guillet Gabriel. Voir Monthoux » 64 Guillet Janus. Voir Monthoux » 306 Hayes Antoine des » 27 Humbert Marie-Avoye, Religieuse de la Visi- tation » 263 , 263 Impôt sur le clergé » 296, 300, 30 1 Infantes de Savoie. Voir Savoie. Isabeau (Mère). Voir Romillon. Jay Pierre-François » 54 Jésuites. Voir Bellarmin, Fichet, Moreau. JoLY DE LA Roche (filles de M.) » 329 Jost Hildebrand, Evêque de Sion » 121 Juge Maurice ... » 76 Lans Sigismond d'Est (marquis de) » 88, 107 Le Blanc de Mions Ennemonde Chausson (dame) » 22, 366, 366, 367, 386 Le Blanc de Mions Pierre » 349 Le Maistre, Lemaitre (MM.) » 376 Lesdiguières François de Bonne (duc de). Voir Grenoble et MoNTFER rat » 321,352,380 Lyon (Voyage de saint François de Sales à). Voir Visitation de Lyon » 1 3, 18, 22 Magnin Claude » 74 Maire de Moulins *. Voir Echevins » 413 Marcieu Guy-Balthazard de Montaynard (baron de) » 392 Marignier Etienne (de), curé de Mieussy » 50 Mapquemont Denis-Simon * (de). Archevêque de Lyon. Voir Visitation de Lyon » 16, 16, 90, 107, 403- 405^ 4'4  444 Lettres de saint François de Sales Martherey Jean-François du Pages 119, 119 Massen ou Massin Jean, Président du Collège de Savoie à Louvain » 313,313 Maurice de Savoie, Cardinal » 174 MÉDio Jacques de » 89 MÉNARD Nicolas, chanoine de Saint-Nizier. Voir Saint-Nizier » 1 03 Meschatin la Faye Thomas de » 209 MiEUDRY (enfants de M'^^ de) » 147 Mieudry Gasparde de Cerisier (dame de) » 147 MiEUDRY Sébastien Portier (seigneur de) » 147 MiEussY (Miouxi) curé et paroisse (de). Voir Marignier » 50» 5 1 IVIilletot Bénigne » 379 MoNTFALCON Adriane du Breuil (dame de) .... » 42 MoNTFALCON Pierre de » 51 MoNTFERRAT (Guerre du). Voir Charles-Emma- nuel et Lesdiguières » 25 , 26, 30, 3 1 , 352 IVIonthoux Claire-Marie de Maillard-Tournon (dame Guillet de). Voir Guillet » 64, 305, 305 MoNTHoux Claude de » 283 MoNTHOux Gabriel Guillet (seigneur de). Voir Guillet » 64 MoNTHoux Janus Guillet (seigneur de). Voir Guillet » 306 MoNTHoux Jeanne-Aimée de la Fléchère (dame Guillet de) » 306 MoNT-Joux. Voir Grand-Saint-Bernard et Viot. Montmeilleur Prosper d'Avisé (seigneur de). Voir Avise » 98 Montmorency Henri (duc de) » 320 Montpellier. Voir Université. Montregard (Monregard) François Cristan (sei- gneur de) » 195 MoNTROTTiER Charles et Claude-Amédée de Menthon (seigneurs de) » 124 MoREAU Aignan *, Jésuite » 287, 412  Nemours Henri de Savoie * (duc de Genevois et de). Voir Barnabites d'Annecy » 180, r 330, 330, 419  Index des correspondants et des notes 445 Nemours Henri de, duc de Genevois et de (Guerre entre Charles-Emmanuel I" et). Voir Annecy, Bonfils, Victor-Amédée Pages 266, 284 Perrone de San Martino César, Prieur com- mendataire de Talloires » 297 Peyssard Antoine » 28 Peyzieu (enfants de M"i« de) » 87 Peyzieu Françoise de Dizimieu (dame de). ... » 7, 44, 87 Prince de Piémont. Voir Victor-Amédée. Q.UESTAN Jean-Louis » 328 Quoex Philippe de » 143 Rabot d'Aurillac Jean. Voir Veyssilieu » 375 Rabot d'Aurillac Laurent. Voir Veyssilieu.. » 374 Rabutin Françoise (de). Voir Chantal » 124 Ra voire Charlotte (de la), Abbesse de Sainte- Claire d'Annecy » 282 Raymond Nicolas, aumônier de M^'"" Marquemont » 90 RÉAUTIER. Voir GÉRARD. Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine » 340 Rességuier (Ressiguier) Guillaume de » 35 Richard Didier, Provincial des Cordeliers. .. . » 281 Rivière Louis * (de la), Minime » 145, 427 RocHEFORT Charlotte de Migieu (dame de)... » 231 Romain Antoine » 3 Romillon Isabeau ou Elisabeth (de). Voir Tier- CERETTES » 34 Rosset Guichard » 164 RossET Jean-François » 2 Ruans Françoise de Simiane (dame de) » 1 1 , I I Saint-André Marguerite de Bellièvre (dame de Prunier) » 3^9 Saint-Augustin de Thonon (église de) » 47 Saint-Clair (prieuré de) » » 54 Saint-Dalmaze (San Daîmai^o) de Turin (église de) » »73 Saint-Damien (Saint Damian) Henri de Mail- lard-Tournon (marquis de) » 394 Sainte-Catherine (Religieuses de l'abbaye de). Voir Ballon, Religieuse, Vignod.  446 Lettres de saint François de Sales Sainte-Maison de Thonon. Voir Barnabites à Thonon, Blonay, Contamine Pages 46, 291 Saint-Géran Jean-François de la Guiche * (ma- réchal de) » 411 Saint-Jeoire Melchior de Mouxy (baron de). . . » 170 Saint-Nizier (M. de). Voir Ménard » 103 SALES FRANÇOIS * de (Saint). Voir Bellarmin, Favre (Michel), Granier (Denis), Granieu, Grenoble, Gros de Saint-Joyre, Guérin, Le Blanc, Lesdiguières, Lyon, Rosset (Gui- chard), Séminaire, Travernay » 57, 83, 146, 210, 267, 290, 296, 3 12 Sales Françoise-Agathe (de), Religieuse de la Visitation » 237 Sales Jean-François (de). Voir Boisy » 48, 48, 52, ■54, 330 Sales Jeanne-Françoise (de), Religieuse de la Visitation » 237 Sallanches (Collégiale de). Voir Chanoines et Choisy » 342 Sallier Philibert, curé de Monthoux » 307 Saluces de la Mente Sylvestre, Abbé commen- dataire d'Hautecombe » 390 San Seconde Bonne de Challant (comtesse de) » 383,333 Saulnier Claude, Gardien des Cordeliers d'An- necy » 281 Sautereau François de » 308 Sautereau Guillaume (de). Voir Chasse. Savoie Françoise-Catherine et Marie (Infantes de) , » 385 ScAGLiA Alexandre, ambassadeur de Savoie à Rome. Voir Contamine » 197 ScAGLiA Philibert-Gérard. Voir Verrua » 181 Scotto Laurent » 292, 292 Séminaire pour le diocèse de Genève (Projet de fondation d'un) » 397 Sens de Sainte-Catherine, Général des Feuil- lants. Voir Beauner » 39, i 1 3 Sevelinges Claude (de), aumônier de Belleville et de la Visitation de Lyon » 335 Seyssel Louis (de), baron du Châtelard » 30 Seyssel Louis (de), marquis d'Aix. Voir Aix. . . » 361  Index des correspondants et des notes 447 SiLLiNGY (Silingic) prieure de Pages 1 54 Supérieur d'une Communauté » 20 Syndics d'Annecy. Voir Nemours et Visitation d'Annecy » 282  Talloires (Prieur commendataire de). Voir Perrone de San Martino. Tamié (abbaye de) » 351 Termes Catherine Cliabot (baronne de) et ses enfants » 273 Termes César-Auguste de Saint-Lary (baron de) » 130 Thomas de Savoie » 26 Thonon. Voir Barnabites, Saint-Augustin, Sainte-Maison . Tiercerettes de Toulouse. Voir Rességuier, RoMiLLON » 34 Toulouse. VoîtCarmel, Tiercerettes, Univer- sité, Visitation. Tournon Prosper-Marc de Maillard (comte de) » 5, 152, 19 1 Traité de l'Amour de Dieu » 209, 235 Travernay Péronne de Montfalcon (dame de) » 23, 29 Tresnel François-Juvénal des Ursins (marquis de), ambassadeur de France à Rome » 246 Université de Montpellier » 77 Université de Toulouse ... » 283 Vallon Claude-François de » i Vellepesie de Villeneuve Renée Le Valois (dame de). Voir Aix et Seyssel » 361, 361 Verrua (Verrue) Philibert-Gérard Scaglia (com- te de). Voir Scaglia » 181 Veyssilieu Jean Rabot d'Aurillac (seigneur de). Voir Rabot » 375 Veyssilieu Laurent Rabot d'Aurillac (seigneur de). Voir Rabot » 374 Veyssilieu (yiciUieu) Marguerite de la Croix de Chevrières (dame Rabot d'Aurillac de). . . » 371,371,375 VIbod Claude-Amédée » no, | 10, 186. 294, 299  448  Lettres de saint François de Sales  Victor-Amédée de Savoie, prince de Pié- mont. Voir Nemours 178, 268, 273, 274, 290, 296, 308, 311, 332, 353. 354' 355, 39^ Vignod Bernarde (de), Religieuse de l'abbaye de Sainte-Catherine ViLLARS Jérôme (de), Archevêque de Vienne. . . Ville Jean-Claude de Villette Françoise-Jéronyme (de), Religieuse de la Visitation. Voir Chevron-Villette . VIot Roland, Prévôt du Grand-Saint-Bernard. . Virieu Gasparde de Prunier-Saint-André (dame de) Visitation (Coutumes et Règles de la) 138, 324, 349 — Projets de fondations 346, 385 Visitation d'Annecy (Affaire des jardins) — Affaires diverses — Eglise et monastère de la — Religieuses de la. Voir Avise, Bailly, Blonay, Bréchard, Chantal, Chastel, Croix de Fésigny, Far- del, Favre, Humbert, Sales. Visitation de Grenoble. Voir Le Blanc de MiONs et Veyssilieu Visitation de Lyon. Voir Sevelinges 425 — Religieuses de la. Voir Auxerre, Chevron-Villette, Colin, Coton, CoTTiN, Etienne Visitation de Moulins (Fondation et fonda- trices de la). Voir Bailly, Bréchard, Croix de FÉSIGNY, Feydeau, Gouffiers, Humbert. . . . Visitation de Riom Visitation de Toulouse ViTOz (Vitto{) Gaspard  Pages 26, 45? ^5,  »»5 237 90, 209  »  265, 265  » 389 » 43, 104, 107, » 1 01, 141, 163, )) 41 » 74, 328, 329 » 282, 316  » 343, 348 » ï»7' 349,378,  4,426  » 256, 258, 278 » 163, 287 » 162 )) 350  TABLE DE CORRESPONDANCE  DE CETTE NOUVELLE EDITION AVEC LES PRECEDENTES  ET INDICATION DE LA PROVENANCE DES MANUSCRITS  NOUVELLE EDITION MLXXXVI  MLXXXVII  MLXXXVI II  MLXXXIX MXC  MXCI... MXCII.. MXCIII MXCIV MXCV., MXCVI  PROVENANCE DES MSS. Turin. Archiv. del'Etat (Copie Oxford (Angleterre). M. Hartwell D. Gris- sell  Turin. Archiv. del'Etat (Copie) ViTORiA (Espagne). Vi- sitation Annecy. Visitation (Co- pie)  Idem.  Nancy. Visitation.... Annecy. Missionnaires de S'-François de Sa- les  PREMIÈRE PUBLICATION (l) ÉDITIONS MODERNES Migne VI, col. 981 Inédite Epistres spirituelles, t Vives x, p. 368 1626, 1. VI f Mig. V, col. 1425 \ Viv. XII, p. 46 Ibid., 1. m \ , ,. [ Mig. V, col. 1547 Mig. VI, col. 984 Ibid., col. 983 Epistres spirituelles, ( Viv. x, p. 482 1626, 1. II \ Mig. V, col. 915 Ibid.. 1. iii \ ... ' ^ ' { Mig. V, col. 1306 Œuvres deSte J,.F. de Chantai, X. II (2), p. 186 Tj. ■ , \ Viv. XI, p. 400 tierissant, v, p. 100,. i ,^ • , ( ^tg. V, col. 1434 Inédite  (i) Les indications qui figurent dans cette colonne sont données sous toutes réserves, et pour des raisons déjà exposées dans LAvant-Propos du tome XI. La numérotation des pièces étant souvent très inexacte dans les éditions du xvii« siècle, quand nous remontons à celles-ci, au lieu de citer le numéro d'ordre des Lettres, nous luui- quons seulement la série, soit le Livre dans lequel elles sont insérées, (2) Sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantai, sa Vie et ses Œuvres, Paris, Pion, 1875. Lettres VII  450  NOUVELLE EDITION  PROVENANCE DES MSS.  PP.EMIÈRE PUBLICATION ÉDITIONS MODERNES  MXCVII Poitiers. Visitation. . . Hérissant, v, p. 102  MXCVIII  MXCIX  Viv. XI, p. 401 Mig. V, col. 1435 et IX, col. 112 Œuvres, 1641, t. II, ^ Viv. vu, p. 368 epist. XXVI ( ^^g' V, col. 1123 Epistres spirituelles, l Viv. vu, p. 280 1626, 1. V ( Mig. V, col, 973  MC Montpellier. Visita- tion (Copie)  MCI  Hérissant, IV, p. 60.  Opuscules.  MCII Amiens. Visitation. . . . MCIII Montpellier. Visita- tion (Copie)  MCIV. Reims. Visitation,  Biaise, Nouvelles iné- dites (1833), p. 54...  MC V Milan. Archives Bor- romeo MCVI Venise. Visitation,... MC VII Annecy. Visit. (Copie) f Beaufort (Maine-et- j ) Loire). Sœurs hospita- [ Hérissant, v, p. 244, ( li^  MCVIII  .oirci. oœuib uubpiia- v ières de S'-Joseph. . )  MCIX MCX.. M CXI .  Inédite Viv. VII, p. 277 Mig. V, col. 972 Inédite Inédite Viv. IX, p. 467 Mig. VI, col. 883 Inédite Mig. VI, col. 980 Inédite Viv. XI, p. 435 Mig. V, col. 1477 ( Viv. XII, p. 45  Ebistres spirituelles 1626, 1. III { Mig. V, col, 1547 Viv. VI, p. 343  Ibid.. 1. I.  MCXIII.  Hérissant, m, p. 5:  Mig. V, col. 979 Inédite (Cf. Mig. VI, 1081) Inédite Viv. VI, p. 346 Mior. V, col. 981 VI.  \ Avignon. Noviciat des ) \ RR.PP.Jésuites;i8g6) i MCXII... Annecy. Visitation... Turin. Bibliothèque Civica !pp. 56-61 (11. ) l Epistres spirituelles, \ Viv. vi, p. 348 1-29^ \ \ 1629, 1. H \ Mig. v, col. 982 suite Turin. Visit. (Copie). . Ibid Ibid. ( Viv. IX. p. 468 MCXV Turin. Archiv.de l'Etat Datta, u, p. n'^ } Mia y'i col MCX VI Idem. (Copie) 3ii^. vi, col. 986 MCXVII Turin. Archiv.de l'Etat Datta, u, p. 126 jv. ix, p. 4 9 ' ' ^ { Mig. VI, col. 705 Lettres inédites et Fleurs choisies de St Fr.de Sales (iS66){î), p. 273 Epistres spirituelles, \ Viv. vu, p. 283 1626, 1. VI ( Mig. V, col. 987  l Turin. Archiv. de l'Etat MCXVIII I et Montpellier, Visi- I tation (Copies)  MCXIX  MCXX Madrid. Visitation (2'^ Monastère)  Inédite  ( I ) Lettres inédites et Fleurs choisies de saint François de Sales, avec une Préface et des Notes dogmatiques et historiques par un Directeur de S'minaire. Avignon, Amédée Cbaillot, 1866.  45  PROVENANCE DES MSS. GuiNGAMP (Côtes-du- Nord). Filles de la Croix Madrid. Visitation (1'='^ Monastère) Idem Lyon. M"^* Richard- Cottin Turin. Archiv. del'Etat (Copie) Montpellier. Visita- tion (Copie) San Remo (Italie). Vi- sitation Turin. Archiv. de l'Etat (Copie) Turin. Archiv. deTEtat Montpellier. M*"* La- mothe-Tenet Château de la Roche- Mailly (Sarthe). M'«« de Mailly Annecy. Visitation..,. Turin. Visitation Annecy. Visitation fVzV ) ms^'de la Mère Favre) S Idem j Paris. Visit. (l'^'-Mtère) Rouen. Visitation (2'' \ Monastère) / Turin. Archiv. de l'Etat (Copie) Chambéry. Visitation Annecy. Visitation (Hist.de la Fondafion)  PPEMikRE PL'BLICATION ÉDITIONS MODERNES Lettres inédites et Fleurs choisies (1866), p. 82 Epistres spirituelles, C Viv. x, p. 521 1626, 1. IV \ Mig. V, col. 988 Inédit Inédite Mig. IX, col. 85 Inédite Inédite Epistres spirituelles, l Viv. x, p. 524 1626, 1. VI \ Mig. V, col. 991 Mig. VI, col. 986 (Voirnote(i),p.83) r> ij I ^'î'- ÏX, p. 470 Datta, II, p. 127 V c ( Mig. VI, col. 706 Inédite Inédite Ff> du Saint, par Char- i Viv. vu, p. 286 les-Aug., liv. VIII.. \ Mig. v, col. 989 Inédite Inédite Inédit Vie de la Mère M.-J. i Mig. vi, col. 978 Favre{i6^())^i),ch.xxvi \ ( Voir note (2), p. 94) Inédite Hérissant, Opuscules, \ Viv. x, p. 533 ïv, p. 12 ^ Mig. V, col. 1000 ^^^'ir- VI, col. 103 1 Epistres spirituelles, 1626, 1. VI zj' ■ . S V'V- VII. p. ;8o Hérissant, m, p. 205. . l .. . ^ ' f Mtg. v, col. 995 Epistres spirituelles, ^ Viv. xi. p. 439 1626, 1. VI i Mig. V, col. 1478 Inédite  ( I ) Les Vies de IV des premières Mères de l'Ordre de la Visitation Sainte Marie. . . par la Révérende Mère Françoise Madelene de Chaugy, Supérieure du premier Monastère de cet Ordre. A Annessy, par Jacques Clerc, mdclix.  452 NOUVELLE ÉDITION MCXLII  PROVENANCE DES MSS. PREMIÈRE PUBLICATION EDITIONS MODERNES Turin. Archiv. deTEtat Datta, ir, p. 140. , .  MCXLIII MCXLIV.  MCXLV ^fragmeot). MCXLVI  Turin. Biblioth. Civica Ibid., p. 139 Turin. Archiv. del'Etat (Copie) Annecy. Visitation (Tz,? ( Vie de la Mère M.-J. msie de la M. Favre) I Favre (1659% ch. vu. . Epistres spirituelles^ 1626, 1. VI  MCXLVII . MCXLVIII, MCXLIX... MCL MCLI  ,11. 1-4,  suite  Datta, II, p. 358.  Epistres spir., 1626, 1. VII, et Datta, ibid. Epistres spirituelles, 1626, 1. II  Hérissant, \, p. 29 . . . Rouen. Visitation (2'^ ^ Hérissant, Opuscules,  MCLII,  MCLIII MCLIV (fragment). MCLV  Monastère) ( iv, p. 13 Milan. Archives du prince Trivulzio Château de Saint-Sei- ne (Côte-d'Or).Vic'«s« de Saint-Seine  Datta. Il, p. 362 Annecy. Visitation (^FfV \ Vie de la Mère M.-J. ms^^ de la M. Favre) ( Favre (1659), ch. xxvi Epistres spirituelles,  1626, 1. vu.  MCLVI . . MCLVII . MCL VIII.  MCLIX  Saint-Céré. Visitation Montpellier. Visita- tion (Copie) Turin. Archiv. de TEtat (Copie)  MCLX. MCLXI  fragments Ides pp. 138 MCLXII.( 139 texte au- thentique .  Lyon-Fourvière. Visi- tation  Œuvres, 1641, t. II, epist. XXV Biaise, Nouvelles iné- dites (1833), p. 19. . . . Hérissant, m, p. 220. , . Œuvres, 1641, t. II, epist. xLviii (fragm'«). Voir notes ( 2 ), p. 138, et (l). {3), p. 139...  Viv. VII, p. 293 Mig. VI, col. 715 Viv. VII, p. 293 Mig. VI, col. 713 Mig. VI, col. 987 Ibid., col. 987 Viv. X, p. 527 Mig. V, col. 996 Viv. XII, p. 199 Mig. V, col, 1659, et VI, col. 838 Viv. ibid. Mig. ibid. Viv. X, p. 531 Mig. V, 999 Viv. XI, p. 379 Mig. V, col. 14 12 Viv. X, p. 534 Mig. V, col. 141 2 Mig. VI, col. 988 (traduction) Inédite { Viv. XII, p. 189 f Mig. VI, col. 839 I Mig. VI, col. 978 Viv. XII, p. 208 Mig. V, col. 1666 Mig. VI, col. 1353 Inédite Inédite Viv. XI, p. 419 Mig. V, col. 1456, et VI, col. 1013 Viv. VII, p. 300 Mig. VI, col. 864 Viv. VII, p. 301 Mig. V, col. 1002 Viv. VII, p. 344 Mig. V, col. 1072 Mig. VI, p. 992 (Voirnot.(i),p.i4i)  NOUVELLE ÉDITION  PROVENAN'CE DES MSS-  PREMIERE PUBLICATION  MCLXIII Turin. Archiv.delEtat (Copie) / Annecy. Visitation (^ VîV / Vie de la Sœur Made-  MCLXIV (fragment),  manuscrite de la Sœur de la For est de la Flé- l chère) MCLXV Turin. Archiv. del'Etat (Copie) MCLXVI Idem MCLXVII Metz (Annecy). C"^»'-^ d'Asnières de Sales.. Annecy. Visitation  leine de la For est de la Flechere (1659) ( i ),  45^ ÉDITIONS MODERNES Mig. VI, col. 995 Viv. X, p. 210 Mig. V, col, 615, et  h. m VT. col. 995  Mig. VI, col. 996 Ibid., col. 997  MCLXVIII (frag'^j.  ^ Œui  Inédite 164 1, t. II, t Viv. VII, p. 343  MCLXIX RioM. Visitation, MCLXX Bourg-en-Bresse. sitation  (Hist.de la Fondation) \ epist. xlvmi { Mig. v, col. 1072  Vi-  MCLXXI Turin. Visit. (Copie).. Datta, u, p.  M-  Inédite Inédite Viv. VI, p. 355 Mior. VI, col. 716  'i  M/^TYVTT ( Milan. Bibliothèque / tu- j \ j^ • ' f^" -" MCLXXII \ ... ^ j Ibid., p. 144 ^ A/î^. VI, col. 71761  Ambrosienne.  MCLXXIII MCLXXIV (fragment)  (865 (trad. latine) ( Epistres spirituelles, C Viv. xi, p. 444 f 1626, 1. IV \ Mig. V, col. 1482 Annecy. Visitation(Ms. ( Mémoires, parla Mère \ original de la Mère de < de Chausy (Paris, > " ' '^' '^^ ^, , / o r, '^ TT , \ Mio'. V, col. 1002 Chaugy) ( 1874, Partie II, ch. x) ) •=» ' pp. 163-165 t Turin. Archiv. del'Etat (11. 1-18) \ (Copie)  Mia. VI. col. 1000  MCLXXV.  11. 19-21  fin.  Idem. Idem.  MCLXXVI MCLXXVII Turin. Archiv. de l'Etat (Copie)  j Bouchage (1880) (2), • P- 47 Ibid Ibid. Epistres spirituelles, i. Viv. x, p. 538 1626, 1. Il f Mig. V, col. 100 j  MCLXXVIII  Château de Monpont MCLXXIX >f 1 Paris. M. AlexisVollon  Itexte mutilé Uhectique . .  Hérissant, v, p. 99. . . i j Epistres spirituelles, ^ \ )  i 1626, 1. II,  Albens (Savoie). M'"-' ) Boissat \ ^''^^^. ">P- ^36 ;  Viv. VI, p. 363 Mi£^. VI, col. 721 Mig. VI, col. loor Inédite Inédite  Mig, VI, col. 991 Viv. VI, p. 364 Mig. VI, col. 721 Viv. VI, p. 365 Mig. VI, col. 722 Viv. VII, p. 308 Mig. V, col. loii Inédite Viv. XI, p. 399 Mig. V, col. 1434 Mig. V, col. loil Viv. X, p. 541 Mig. VI, col. 724  MCXCIII MCXCI V. MCXCV . MCXCVI. MCXCVIJ  Turin. Archiv. delEtat (Copie) Idem  MCXCVIII.  MCXCIX.  MCC. MCCI.  Turin. Archiv. de l'Etat Datta, 11, p. 155 I^"" Procès de Canonis Bourg-en-Bresse. Visi- tation (Ancien Ms.). . Annecy. Visitation (An- cien Ms. de V Année Sainte) Thorens-Sales (Anne- cy). C'^ de Roussy de Sales Turin. Archiv. de l'Etat (Copie) Montréal (Canada). Grand-Séminaire. . . .  Mig. VI, col. 1001 Ibid., col. 1002 \ Viv. VI, p. 367 \ Mig. VI, col. 723 Inédite Epistres spirituelles, V Viv. xi, p. 440 . \ Mig. V, col. 1479  1626, 1. m Année Sainte de la Vi- sitation (1868), t. V; p. 464 Mugnier, S. Fr. de S Docteur endroit, etc (Chambéry, 1885)  MCCII.  i^"" alinéa.  MCCII^2^ f, 4' ali- néas idernier al, . ,  Annecy. Visitation (An- cien Ms.)  Vie du Saint, par le P. \ de la Rivière (1625), [ liv. IV, chap. VI. . . J Epistres spirituelles, ( 1626, 1. IV f  Ibid. Ibid.  Mig. VI, col. 1003 (Voirnot.'i). p. 211) Inédite Viv. X, p. 537 Mig. V, col. looi Viv. XI, p. 105 Mig. V, col. 1153 Ibid. Ibid.  455  NOUVELLE EDITION MCCIV.... MCCV iU. 1-6 MCCVI suite MCCVII.. MCCVIII. MCCIX... MCCX.... MCCXI... MCCXII.. MCCXIII . MCCXIV.. MCCXV... MCCX VI.. MCCXVII MCCXVIII pp. 238-242 (11. 1-7) , 11. 8-18 MCCXIX ' jpp. 243-245 [suite autre mi nute MCCXX li^"" alinéa MCCXXI suite  PROVENANCE DES MSS. Annecy. Visitation . . . Annecy. Visit. (Copie) Turin. Archiv. de l'Etat (Copie) Chambéry. Ch"^ Col- longes Turin. Visit. (Copie). . Saint-Vit (Doubs). Ab- bé Sérioh Alzano (Italie). Visita- tion Annecy. Visitation . . . Nice. Visitation Venise. Visitation .... Chambéry. Ch"* Col- longes Chambéry. Ch°^ Col- ) longes \ Orléans. Visitation Idem  PREMIÈRE PUIil.lCATION EDITIONS MODERNKS ^ Eptstres spirituelles, ( Viv. xi, p. 108 \ 1(326, 1. IV / Af;V. V, col. II55 t Viv. XI, p. 114 Ibid < Mig. V, col. 1160 ( (Voirnote(2),p.2i8) ÎViv. XI, p. 113 Mig. V, col. 115g (Voirnote(2),p.2i9) Ibid Im"'"'^,'" ( Mtg. V, col. II 59 ( Viv. XII, p. 222 Ibid., 1. VII I iyf , ^ /• ( Mtg. V, col. 1676 ,, . , , \ y^v- XI, p. 432 Ibid.. 1. VI I x^- , { Mtg. V, col. 1475 Mig. VI. col. 1005 Ibid., col. 1002 Inédite Inédite Inédite Datta, II, p. 542 \ yj- ,0 \ » ' ^ ;>'* ^ }4ig^ yi^ col. 831 \ Viv. VII, p. 259 Ibid., p. 107 ] -KA- 1 ^ ^ ' ( Mig. VI, col. 695 Inédite Vie dit P. Co/o« (1688) I Viv. xii, p. 141 ( I ), p. 292 \ Mig. V, col. 1698 Inédite E bistres spirituelles, \ ..,. / V tV VI D ■'7'* 1626 (texte français), .' ,..' ' t^*^/' / /^ 4. 1 4- N 1 \ Mtg. V, col. 1015 1629 (texte latin), 1. i ) « ' -> Ibid Ibid. Ibid Ibid. Inédite Epistres spirituelles, f Viv. x, p. 54s 1626, 1. V / Mig. V. col. 1021 Viv. XII. p. 244 Mig. V, col. 1692 et VI. col. 1006 Viv. XII, p. 244 Mig. V, col. 1692  ( I ) Za Vie du Père Pierre Coton, de la Compagnie de Jésus, confesseur des Roys Henri IV et Louis XIII. Par le Père Pierre Joseph d'Orléans, de la mesme Compagnie . A Paris, chez Estienne Michallet, premier Imprimeur du Roy, rue saint Jacques, à l'Image saint Paul, prés la Fontaine saint Severin. m.dc.lxxxviii,  456 NOUVELLE ÉDITION PROVENANCE DES MSS. PKEMiÈ»E PUBLICATION ÉDITIONS MODERNES MCCXXII (fragment) j ^^ ^^^^^ ^^ ^^^^^^.^^ . ^ Mig. y,^ col. 1006  Viv. VII, p. 395, et XI, p. 425 Mig, V, col. 1470 MCCXXIV Rome. Visit. (Copie) Inédite  MCCXXIII i ^P'^f"-'' spirituelles, 1626. 1. VI  MCCXXV Nbvbrs. Visitation .  ( Viv. XI, p. 324 ) yiig. V, col. 1351 \ Viv. X, p. 546 i Mia. V, col. 102 1 --_^__^,,_- ( Grand-Saint Bernard. I Mémoires àeV kcaàèm. MCCXaVU 1 Tj • ^ n 1' . o ( Hospice \ Sales., t.xvii(i894) MCCXXVIII Turin. C'e^-^ Balbo A/;^. vi. col. 1059 ^ i Viv. vu, p. 511 MCCXXIX Annecy. Visitation .. . Datta. w, p. idi , . . , ^ [ Mig. VI, col. 727 Epistres spirituelles, '. Viv. xi, p. 557 1626. 1. VII f Mi(r. V, col. t688  MCCXXVI Hérissant, m, p. 263 . . ( Grand-Saint Bernard. I Mémoires àeV kcaàêm  MCCXXX  ( EviAN.Missionnairesde ^ ( Viv. x, p. 547 MCCXXXI ) et Tî..^„„^;„ ^„ c 1 i Hérissant, m, r,. 26^. . \ ,^. , ( b'-irançois de Sales ) > > r ^ ( Mig. v. col. 1022 t Viv. IX. p. 48 ; MCCXXXII Turin. Arciiiv.de l'Etat Z)a//^, 11, p. 163 ] j^. ^ ,0 ' ' ^ ^ ( Mig. VI, col. 728 l Viv. IX. p. a8j MCCXXXIII Idem Ibid., p. 164 , . . ' »" '^ ^ ^ ( Mig. VI, col. 729 MCCXXXIV Ibid., p. 168 i X^"^' ''''^" ] ' ' f Mig. VI, col. 751 MCCXXXV (frag«) \ ^^/^f " ^Z^-^'^-^^"' S Vj^- -^ P- / ( 1626, liv. VII f Mig. V, col. 1025 Mccxxxvi !^^/''T 'p^''^'"-'^^''' \ y;"^' ^' p- 49' , f 1629, 1. IV ( Mig. V, col. 946 MCCXXXVII S Epistres spirituelles, ( F/u. vii, p. 313 f 1626, 1. IV \ Mig. V, col. 1025 MCCXXXVIII Dole. Visitation ! w ""''"' ^"/^ ^ ( cdip'. V, col. 1026 MCCXXXIX Lyon. Abbé Routier, curé de Saint-Nizier Inédite MCCXL Montpellier, Visita- tion (Copie) Inédite MCCXLI TuRiN.Archiv. de l'Etat (Copie) ^ig- "VI, col. 1007 MCCXLII Reims. Visitation \ ^';-- ^"' P; 3i4 ( Mig. y, col. 1026 MrrYTTTT i Epistres spirituelles, ( Viv. xi, p. 7  1626, 1. VI f Mig. V, col. 1028 ( Rome. Archives des ] MCCXLIV j RR. PP. Barnabites [ Inédite ( (Copiée ) MCCXL V Turin. Visit. (Copie) Inédite MCrxrVT t/ • . j Wr. vii,p. 316 mK^i^2^L\L Ht-rissant.in, p. 2-:-i. . { ,,. . ' ' Mig. V, col. I02J MCCXL VII Turin. Archiv. de lEtat Datta, lu v. no \ ,^/^- ^'' P' 3^  •tat Datta, 11, p. /70 J ' "' ^' ^^ { Mig. VI, col. 732  457  NOUVELLE EDITION MCCXLVIII MCCXLIX  MCCL MCCLI Lyon-Fourvièrb. Visi- tation MCCLII MCCLIII ALASSio(Nice). Collège municipal  l'ROVRNANCE DES MSS. PHEMifcKE PUULICATION Turin. Archiv. de lEtat Datia, p. 171 Ibid., p 172 Ibid., p. 169  MCCLIV MCCLV. MCCLVI  ) 1626, 1. m Annecy. Visitation ... Datta, 11, p. 180 .. \ Turin. Bibliothèque^  ÉDITIONS MODERNES \ Viv. VI, p. 386 f Micr. VI, col. 73 î f Viv. VI. p. 587 I Ml'■>' ( Mig. vi, col. 836 MCCLXIII Cracovie. Visitation Inédite Château de Schaloen » (Limbourg Hollande). / C'^ de Villers-Mas- i bourg ) MCCLXV Montpellier. Visita- tion (Copie) MCCLXVI Annecy. Visitation (Ancien Ms.) MCCLX VII (frag')... Salo (Italie). Visitation MCCLXVIII  Inédite  Inédite Inédite Inédit  Inédite  Epistres spirituelles, 1626, 1. V MCCLXIX Marseille. Visitation (2-^ Mtère) / Château de Monpont j MCCLXX j (Annecy). M"^ Hélène ( Mig. vi, col. 1093 ( de ThioUaz ) (i) Notes et Documents pour servir à l'histoire de Lyon sous le règne de Louis XIII, 1610-164J, P^>' Antoine Péricaud, aîné. Bibliothécaire de la ville de Lyon, des Académies de Lyon, Turin, etc. (Lyon, Mongin-Rusand, 1846), pp. 75, 76.  458  NOUVELLE ÉDITION MCCLXXI  MCCLXXII  PROVENANCE DES MSS. MoNFORT (Gers). M'"^ veuve de Marcassus Paris. Religieuses de TAdoration répara- trice  MCCLXXIII Turin. Archiv. de l'Etat  MCCLXXIV.  MCCLXXV  MCCLXXVI  MCCLXXVII  MCCLXXVIII,  Annecy. Visitation (An- cien M s. de V Année Sainte) Paris. M. Levesque, bibliothécaire du Sé- naire de S'-Sulpice. .  \ Annecy. Archives de \ la Haute-Savoie d  MCCLXXIX i^.r''* ^''1'''^°'' ^' [ Monastère) MCCLXXX Moulins. Visitation..  MCCLXXXI,  MCCLXXXII Turin. Archiv. de l'Etat MCCLXXXIII MCCLXXXIV Besançon. Bibliothè- que MCCLXXXV Turin. Archiv. de l'Etat  MCCLXXXVI Idem.  MCCLXXXVII Idei  ! Annecy. Visitation (An- cien Ms. de V Année Sainte) MCCLXXXIX  MCCXC.  Château de Mon- MCCXCI ] THBARD (Sarthe). M">e Daniel de Vauguyon MCCXCII Lyon. Abbé Longin. . .  MCCXCIII.  Rome. Archives des RR. PP. Barnabites..  PREMIERE PUBLICATION EDITIONS MODERNES Inédite lDattn,u,p.^Sx ( W.. ix, p. 485 ) ( ^iig- VI, col. 737 X, , ^ \ ^'^- VI, p. 594 Ibid., p. 183 ] ^. ' ^ ^^'^ ' ^ -> { Mig. VI, col. 739 TT> ■ ni Viv. VII, p. 518 Hérissant, in, p. 20?.. i ,,. , ' ^ ■' { M.ig. V, col. 1033 Année Sainte de la \ Visitation {1680). t. I. ['''■ ""' P- ^'^'l p. 87 ..........) ^^.^- V'' ^°l-695 Inédite Epistres spirituelles, \ Viv. xi, p. 480 1626, 1. V \ Mig. V, col. 1508 Annales Salésiennes, juillet 1908 Hérissant, Opuscules, \ Viv. vu, p. 324 IV, p. 16 \ Mig. V, col. 1037 Inédite Epistres spirituelles, '\ Viv. xi, p. 450 1626, 1. V f Mig. V, col. i486 ^ ^ Viv. VI, p. 59, Datta,n, p. 184 , . . ' ^^ ''^' ' ' *^ ^ f Mig. VI, 739 Ibid., col. loio Inédite T^ ul O ( ^'^- VII, p. 325 ^•■"''' "• p- ■*' U,^.v,L:;4o Ibid., p. ,88 j l"--''e-f ( Mig. VI, col. 741 TU • , o \ ^^"O- VI, p. 396 Ibid., p. 187 ] ' '^ ^/ ( Mig. VI, col. 740 Année Sainte de la ) ir- •.. j- / ^O \ * T f ^^'°' VII, p. 326 Visitation (iSSq), t. 1,} ... , \ Mig. VI, col. 742 P-309 ) ^ ^^ Œuvres, 164 1, t. II, L Viv. xii, p. 109 epist. XXXVIII î Mig. v, col. 1597 Epistres spirituelles, i Viv. xi, p. 429 1626, liv. VI ( Mig. V, col. 1473 TT' ■ , i ^*^- "^"> P- 327 Hérissant, m, p. 292 ..),.. .0 ( Mtg. V, col. 1038 Epistres spirituelles, l Viv. xi, p. 490 1626, liv. IV ( Mig. V, col. 1515 l Viv. VI, p. 399 Datfa, II, p. 190 < 3ix]^. VI, col. 741, et ( loii (traduction)  459 NOUVELLE ÉDITION PROVENANCE DES MSS. HREMIÈI'E FCBLICATION ÉDITIONS MODERNES l Epistres spirituelles, ( Viv. xii, p. 73 MCCXCIV j j^^^^ j jj ^ y^^^ ^^ ^^j j.^^ / Viv. XI, p. 13, et t Ibid., 1. V, p. 605, et m, ' xii, p. 144 MCCXCV ' '^ ' ' »^ 1 ,.,« ( p. 223 j Mi^. V, col. 1039 ( et 1624 MCCXCVI Laval. Dames du Sa- cré-Cœur Inédite MCCXCVII Chambéry. Chn«= Col- longes Inédite . Rouen. Visitation (2^ ( Hérissant, Opuscules, ( Viv. vu, p. 528  Monatère) \ iv, p. 10 ( Micr . v, col. 1041 v*r-/-v/-TY i TuRiN.Archiv.del'Etat J ( Viv. vu, p. 329 MCCXCIX ] /^ • X [ Ddtta. H, p. 193 \ x^ 1 f (Copie) ) ' t- -'^ f Af/^. VI, col. 744 /pp. 383-385 1 C V7-t). vu, p. 330 \ ,,, .. \ PiGNEROL. V isitation . . Ibid., p. 104 i w 1 MCCC) ^ ^ '^^ ' ( Mior. vu co\. -] 4^ ) . l Viv. XI, p. 78 f post-script. . . Idem Ibid., p. 566 i x,. ' ,0 \^ '^ » K p I Mfg- VI, col. 842 /pp. 586-389 J ^ ,,. . . \ Epistres spirituelles, \ Viv. xi, p. 17 i /,! Ni Chambéry. Visitation.. ] . . , ^ ] xj- 1 Mcrn ) ^ ^'^'^^ ■ ^°' ' " -'^^'^- "^' '^°^' ^°42 ] T , T^ i ^'^- XI. P- 20 f suite Idem Datta, 11, p. 201 i w- , ( ' ' r ( -A/'^. V, col. 1045 MCCCII Londres. M^^Morrison Ibid., p. 196 ^,^.' ^"' ^' ^^' . MCCCIII Ib,J.,p. =03 i '';••■ -.Pf7 ^ f ^^^i^- VI, col. 747 MCCCIV Turin. Archiv.de l'Etat (Copie) ^I^S^- VI. col. loia MCrrV '\ ^P^^^^^^ spirituelles, j Viv. xii, p. 128 ( 1626, 1. IV i Mig. V, col. 16 10 MCCCVI AuTUN. Visitation Inédite MCCCVII (fragments) Lyon. M. Gonthier Inédits  APPENDICE  A IP Procès de Canoni- sation Inédite !Thorens-Sales (An- 1 necy) . C'^ de Roussy / Inédite de Sales ) C Annecy. Visitation A//^. ix, col.  460  NOUVELLE ÉDITION PROVENANCE DES MSS. D. - I Idem  II  III  Annecy. Visitation (Hist. de la Fondation de la Visitation de Moulins) Idem  G Idem H Idem I Annecy. Visitation. . . , Lyon, Bibliothèque (Imprimé)  Ide  II  L Annecy. Visitation M. — I Idem ^p. 422 (11 1-22). . . 11. 23-33) ]p. 423 (11. ( Idem 1-4) ....) ^fin Idem lîl (fragments) Idem IV Idem l Idem. (Vie manuscrite N (fragment) J ^^ ^^ ^.^^ ^^^^^^_ ^  PREMIÈRE PUBLICATION ÉDITIONS MODERNES Lettres de Ste J .^F. de Chantai {iSjj), vol. I, p. 109 Epistres spirituelles de la Mère de Chantai [i) (1644), 1. I, epist. VIII  Ibid., epist. xii.  La Mire de Vie, etc . . . Epistres spirituelles, i626(traduction\ 1629 (texte latin), 1. i  Vie de la Mère M.-J . Favre (1659), ch. viii  Vie de la Mère M.-J. Favre (1639), ch. vu Talon, Vie du B.-H. Fr. de Sales, ch. xi (éd. 1641)  Viv. XI, p. 107 Mig, V, col. II 55 Viv. XI, p. iio Mig. V, col. Il 57 Mig. IX, col. 90 Ibid., col. 91 Inédite Mig. IX, col. 92 Inédite (Voir ci-dessus, p. 457) Viv. VI, p. 391 Mig. V, col. 1029 Mig. VI, col. loio Inédite Inédites Viv. X, p. 536 Mig. V, col. looi Inédite Mig. IX, col. 92 Inédite  Mig. V, col. I 363  Appendice II  Lyon. Bibliothèque (Imprimé)  La Mire de vie, etc..  (Voir ci-dessus, p. 457)  ( I ) Les Epistres spirituelles de la Mère Jeanne Françoise Fremiot, Baronne de Chantai, Fondatrice et première Supérieure de VOrdre de la Visitation Saincte Marie, fidellement re- cueillies par les Religieuses du premier Monastère d'Annessy. A Lyon, pour Vincent de Coeur- sillys, rue Tupin, à la Fleur de Lys. Avec Privilège du Rov. 16^^.'  TABLE DES MATIERES  Avant-Propos v Avis au Lecteur xviii  ANNÉE 1615 (Suite) Lettre MLXXXVI — A M'"« de la FlÉCHÈRE. — Le Saint n'agrée pas que ses amis se déchargent sur lui d'une responsabilité qui leur incombe. — Un précepteur difficile à trouver même chez les rois. — Qu'on s'abstienne d'accabler de devoirs les élèves. — Défense d'un professeur. — Que faire quand le corps et l'esprit sont languissants I MLXXXVII — Au Comte de Tournon (Inédite). — Une absolu- tion que l'Evêque de Genève attend de la courtoisie de son desti- nataire. — Remerciements pour communication de manuscrits. 5 MLXXXVIII - A LA MÈRE DE ChANTAL. — L'anniversaire d'une vocation. — Une race spirituelle que le Saint demande à Dieu de multiplier. — Actions de grâces à la divine Trinité 6 MLXXXIX— A M""« DE PeyzIEU. — Ce qu'il faut éviter et répri- mer dans les curiosités d'outre-tombe, à propos de nos parents défunts. — Pourquoi les chrétiens doivent modérer leurs regrets. 7 MXC — A M"^^ DE LA FlÉCHÈRE. — La lassitude du corps et les passions de l'âme. — Dans quel cas s'asseoir au temps de la prière. — Les distractions et l'oraison. — La vie en dehors de Dieu est une mort. — C'est au Saint-Esprit de pousser les âmes comme il lui plaît 9 MXCI — A M'"® DE RUANS. — Les visites du Saint-Esprit parmi les tribulations. — Exhortation à l'amour de la Croix II MXCII — A M'"^ DE LA Croix d'AutHERIN. — Dans la correction des défauts, ne pas séparer la pratique de l'humilité de la fidélité envers Dieu. — En quel cas le Bienheureux ne juge pas mauvais qu'on soit un peu privé de la sainte Communion. — Utilité des confessions fréquentes. — Annonce d'un voyage à Lyon et en Chablais. — La lecture spirituelle 12  462 Lettres de saint François de Sales MXCIII — A LA MÊME. — Vengeances et réparations. — Quelle doit être l'attitude d'une personne honorable en face des diffamations, et le meilleur moyen de répondre aux chansonneurs. — Dieu protège l'honneur des gens de bien 14 MXCIV — A M^' DE MARaUEMONT. — L'intention de saint François de Sales en fondant un nouvel Ordre de Religieuses. — Quelle doit être leur unique prétention 16 MXCV — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — Le gouverneur de Lyon, commensal et ami du Saint. — L'union des âmes les rend pré- sentes l'une à l'autre. — Annonce d'un sermon d'amour ly MXCVI — A LA MÊME (Billet inédit). — Mémoire et visite pour une affaire I o MXCVII — A LA MÊME. — Annonce d'un départ et û"une visite.. 19 MXCVIII — Au Supérieur d'une communauté. — Charité com- patissante du Saint en faveur d'un Religieux expulsé de son Ordre 20 MXCIX — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — Le retour de l'Evêque de Genève à Annecy; la présidente Le Blanc l'accompagne à Saint- Priest. — M""^ de Travernay à l'article de la mort; une petite histoire villageoise 22 MC — A M^*" FeNOUILLET (Inédite). — L'importunité des grandes villes. — La paix après la guerre ; courage militaire des princes de Savoie et de la noblesse savoyarde; force veuves et orphelins. 25 MCI — A M. DES HaYES. — Pourquoi le jeune des Hâves a fini par se ranger à la discipline . — Ce qu'il faudra faire s"il ne persévère pas. — Tendresse et sollicitudes du Saint pour le fils de son ami. — Eloge du prince de Piémont 27 MCII — A M*"® DE Travernay (Inédite). — Paternel intérêt pour une jeune veuve malade, nièce de la destinataire 20 MCIII — A M^*" FenOUILLET (Inédite). — Les suites de la guerre pour les deux partis. — « La terre des tranchées » et « celle des tombeaux. » 3 I MCIV — A M. DunaNT. — Recommandation en faveur d'un catho- lique. — Les mariages que l'Evêque de Genève ne voulait pas autoriser 32 MCV — A LA MÈRE DE ChaNTAL (Inédite). — Des Tiercelines de Toulouse en quête d'une direction ; difficulté pour la Visitation de l'accepter. — Expédient proposé pour contenter les dames de Billom. — Il vaut mieux refuser que d'entreprendre témérai- rement 34 MCVI — A LA même. — Affaires variées. — Une mortification pour M'"* de Charmoisy. — Salutations particulières du Saint à ses  Table des Matières 463 chères Filles. — Souvenir de sa première rencontre avec Marie- Ainiée de Blonay 38 MCVII — A LA Sœur de BrÉCHARD (Inédite). — Une afîaire très heureusement engagée par le Saint. — Dieu fait son bon plaisir malgré les petitesses et l'amour-propre des hommes, — Deux aspirantes à la Visitation ^I MCVlll — A LA MÊME. — Liberté de conscience laissée aux Reli- gieuses de la Visitation. — D'où dépend véritablement la ferveur. 42 MCIX — A M'"« DE Peyzieu. — Charitable sollicitude pour la santé de la destinataire. — Conseils appropriés aux besoins de son âme. 44 MCX — Au Prince de Piémont. — On peut attendre de grands fruits de l'établissement des PP. Barnabites à Thonon et de la restauration du culte qui sera faite par eux dans l'église de Saint- Augustin. — L'Evèque recommande au prince les affaires de la religion catholique 4^ MCXI — Au Chanoine de Sales, sq-^ frère (Inédite). — Instruc- tions particulières pour assurer la régularité d'un concours. — La science seule ne suffit pas à l'exercice du ministère pastoral. — Nouvelles de la peste. — Le Saint accepte de séjourner aux portes d'Annecy à son retour du Chablais. — Salutations et messages. 48 MCXII — A MM. les Examinateurs pour les concours (Iné- dite). — Rappel d'une décision prise pour assurer un revenu au pénitencier de la cathédrale. — Recommandation en faveur d'un concurrent c 3 MCXIII — Au Chanoine de Sales, son frère. — Regrets du Saint sur la mort de son vicaire général, Jean Favre. — Jean-François de Sales désigné pour lui succéder; motif de ce choix. — La contagion à Genève ca MCXIV — A l'Abbesse de Sainte-Claire d'Evian, — Trois moyens de perfection pour une Communauté religieuse. — Le mien et le tien : deux mots qui ruinent la charité. — Danger de la liberté de propriété et avantage de la liberté des communications spiri- tuelles c;5 MCXV — Au Duc de Savoie. — Recommandation en faveur d'un converti qui se destine à l'état ecclésiastique. — Eloge de sa piété et de sa constance dans la foi 63 MCXVI — A M""^ DE la FlÉCHÈrE. — Nouvelles diverses. — Une fille spirituelle du Saint qui donne espérance de bien servir Dieu. — Maladie de la Sœur de Bréchard 64 MCXVII — Au Duc DE Savoie. — L'introduction de '< l'art de la soye » avantageuse aux intérêts spirituels et temporels du peuple. — Requête pour obtenir à cette industrie la protection du prince. 65 MCXVIII — A M»'" FenouILLET. — « Sans guerre, sans nouvelles. »  464 Lettres de saint François de Sales — Fureur de la peste à Genève. — Souhait apostolique du saint Evêque 66 MCXIX — A LA MÈRE FavrE. — Dieu porte avec nous les charges imposées par robéissance. — Assurance paternelle de prières.. 67 MCXX — A M"'^ DE LA FlÉCHÈre (Inédite). — Actions de grâces pour la guérison de Charles de la Fléchère. — Prochain retour de la Mère de Chantai et quelques nouvelles. — Une question théologique 69 MCXXI — A LA MÈRE DE ChANTAL. — Convalescence de la Sœur de Bréchard. — Le Général des Feuillants en visite chez le Saint. — Appréhensions au sujet d'une personne dont les voies sem- blaient extraordinaires yo MCXXII — A LA MÈRE FaVRE. — Affectueuse sollicitude du Saint pour le cœur de sa chère Fille. — Les choses vont d'autant mieux qu'elles sont plus au goût de Dieu et moins à notre gré. — Ce qu'il faut faire parmi les difficultés. — Messages paternels..,. 72 MCXXIII — A M. DE BlONAY (Inédite). — Pourquoi les Pères Barnabites ne peuvent pas encore s'installer à Thonon. — Affaire du prieuré de Contamine 73 MCXXIV — A M'"^ DE LA Fléchère. — Les dîmes et la volonté de Dieu. — Mort d'un religieux Feuillant. — Arrivée très prochaine de la Mère de Chantai et de M'"^ de Charmoisy 75 MCXXV — A M^'" FeNOUILLET (Inédite). — Recommandation en faveur d'un futur étudiant en médecine. — Bruits de guerre en France 7^ MCXXVI — A LA MÈRE DE Chantal (Billet inédit). — Charité attentive du Saint pour la Mère de Chantal 78 MCXXVII — A LA MÈRE FavRE. — Béatitude du dépouillement intérieur. — Le courage des filles du monde et celui des filles de Dieu. — Promesse d'union et de prières. — Il ne faut point permettre « aux appréhensions d'appréhender » notre cœur. — Recours aux saints Anges. — Sœur Marie-Renée ; souvenir con- solant de sa confession générale 7^ MCXXVIIl — A M""^ DE LA Fléchère. — La comtesse deTournon malade; son mari « un petit fasché » contre le Saint. — Gracieuse humilité de François de Sales qui s'entend peu aux compliments et marche « a la bonne foy ». — Nouvelles et messages 82 MCXXIX — Au Duc DE Savoie. — L'Evêque de Genève s'excuse de n'avoir pu conférer un bénéfice à un candidat recommandé par Son Altesse 83 MCXXX — A M°'' FenOUILLET (Inédite). — Saint François de Sales se porte garant du repentir d'un coupable. — Souvenirs du séjour de M»'"de Marquemont à Annecy. — Genève décimée parla peste. 85  Table des Matières 465 MCXXXI — A M'"° DE PeyzIEU (Inédite). — Protestations de res- pectueuse affection pour la destinataire et ses enfants 87 MCXXXII — Au Marquis de LaNS. — Justification loyale et ferme du Saint au sujet des soupçons éveillés par la visite de TArche- vêque de Lyon. — Il proteste de son attachement inviolable à son légitime souverain 88 MCXXXIII — A LA MÈRE DE ChanTAL (Billet inédit). — Le Saint promet à la Mère de Chantai d'aller le lendemain recevoir sa confession annuelle 92 MCXXXIV — A LA MÊME (Inédite). — Question d"argent à traiter avec le cousin de la Sœur de Monthoux (^2 MCXXXV — A LA MÈRE FaVRE. — Tristesse témoignée par la Mère Favre à une amie ; encouragements paternels. — La « grande Fille » particulièrement chérie des deux Fondateurs 93 MCXXXVI — A LA Mere de Cha^t al (Billet inédit). — Le Saint empêché d'écrire une lettre par un appointement et un souper. c)^ MCXXXVII — A M. DE Foras. — Témoignages de très affectueuse amitié au destinataire à son retour de Lorette 9^ MCXXXVIII — A M"'° DE LA FlÉCHÈrE. — Affaires épineuses que François de Sales voudrait arranger à la consolation de M™^ de Bressieu. — Une tempête prévue au sujet de l'entrée de deux postulantes à la Visitation. — Haine mortelle du Saint pour le monde ennemi de l'esprit de Dieu. — Les projets de M. de Rességuier oy MCXXXIX — A LA MÈRE FaVRE. — Aimable entente pour l'échange des lettres. — La Visitation féconde dès sa naissance. — Les lis entre les épines et les roses auprès des aulx. — Conduite à tenir dans une tentation. — Pour agréer à Nôtre-Seigneur, le soin doit être humble, doux et tranquille. — Dévotion généreuse que le Fondateur désire de ses Filles. — Affectueux messages. — Re- nouvellement des vœux le jour de la Présentation 100 MCXL — A LA Sœur de BlONAY. — Céleste nourriture des enfants de Dieu. — Agir par obéissance, gage du secours d'En-haut. — Quel labeur il ne faut jamais fuir 105 MCXLI — Au Marquis de LaNS (Inédite). — Discours de capitaines et discours de Pasteurs de l'Eglise. — Quelle « affaire d'Estat » s'est traitée entre Me^ de Marquemont et l'Evêque de Genève. 107 MCXLII — Au Duc DE Savoie. — Sur l'ordre de son prince, François de Sales explique le sujet du voyage en Savoie de l'Archevêque de Lyon. — Eloge de ce Prélat. — Appel respec- tueux à la justice de Charles-Emmanuel I08 MCXLIII — A M. ViBOD. — Envoi d'une lettre pour le duc Char- les-Emmanuel I 10 Lettres VU 30  466 Lettres de saint François de Sales MCXLIV — A M""^ DE la FlÉCHÈRE. — Vigilance du saint Evêque pour le maintien de la justice et de la charité. — Encore l'af- faire de M"^"^ de Bressieu. — Tapage mondain autour de deux vocations • III MCXLV — Au GÉNÉRAL DES FEUILLANTS. — Consolation donnée au Saint par la sage conduite de la Mère Favre I I 3 MCXLVI — A LA MÈRE FaVRE. — Couronnes des épouses et soucis des mères. ^— La Visitation est « une fontaine sacrée. » — Sou- haits du Fondateur à ses Filles 1 I 3 MCXLVII — A M"^« DE ViGNOD. — De grandes fêtes qui, d'elles- mêmes, parlent divinement. — Le silence de Jésus et de sa Mère ; qu'il dit au Saint de grandes choses ! — Contemplation. — La crèche et Tautel. — Saint Bernard et la Nativité I I 5 MCXLVIII — A LA MÈRE FavrE. — Artifice du démon dans une tentation de joie. — Les Anges venant chercher le Ciel dans « la petite spelonque de Bethlehem. » — S'humilier profondément pour voir de plus près le Sauveur « abismé dans le fin fond de l'humilité. » I 1 7 MCXLIX — A M. DU MarTHEREY. — Une affaire qui s'achèvera à la satisfaction du destinataire. — Jeunesse et oisiveté : deux mauvaises compagnes. — Puissance de la « hantise >». — Réponse au sujet d'un mariage 1 19 MCL — A M. DE Foras. — Un pacte d'amitié 120 MCLI — A M»"" JOST. — Un désir de TEvèque de Sion difficile à satisfaire. — Quel prédicateur il faut aux Valaisans. — Persé- vérance d'un converti. — La peste à Saint-Maurice. — Envoi d'un aspersoir et de lettres testimoniales 121 MCLII — - A LA MÈRE DE Chant AL (Inédite). — Compte-rendu d'un entretien avec un prétendant de M'"^ de Chantai 124 MCLIII — A LA Sœur de ChASTEL. — Constance des saintes affec- tions. — Parmi les sécheresses, attendre en paix la rosée céleste. — « Rien au monde pour nostre cœur que Dieu, ni pour Dieu que nostre cœur » 1 2 5 MCLIV — A LA MÈRE Favre. — Le rang de la Mère Favre dans le cœur du Saint et dans l'Institut 1 26  ANNÉE 1616 MGLV — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — Souhaits de nouvel an pour la destinataire et la Congrégation. — Effusions d'amour à Jésus- Christ Notre-Seigneur. — Le chercher uniquement et tout faire pour lui 127  Tadlr des Matières 467 MCLVl — Au Duc DE BhlLEGARDE. — Vicissitude des années et permanence des affections formées par Dieu. — Les enfants pen- sent souvent à leurs pères; les pères pensent toujours à leurs enfants. — L'alcyon sur les ondes 129 MCLVII — A M-'" FenouiLLET (Inédite). — Efforts du Saint pour amener une réconciliation. — La peste, messagère de la miséri- corde divine 13 I MCLVIII — A M"'^ DE LA FlÉCHÈRE (Inédite). — En route pour Samoëns ; une semaine d'hiver I 3 3 MCLIX — A LA MÈRE FaVRE. — Ce que Dieu fera pour la Visita- tion, et ce qu'il fera pour la Mère Favre. — Souffrir en Dieu rend la souffrance heureuse. — Manifestations extérieures du zèle... 134 MCLX — A M™° DE LA FlÉCHÈRE. — Un voyage arrêté par les neiges. — M"'= de Charmoisy hors de danger. — Pourquoi le Saint ne trouvait pas facilement un prédicateur pour Rumilly. . . 13 5 MCLXI — A M""" FenOUILLET. — Une amitié toujours heureuse de s'exprimer. — Malades qui refusent les ordonnances du médecin 1 36 MCLXII — A LA MÈRE Favre. — Une réponse à ce que Ms"- de Marquemont allègue contre la Visitation. — Pourquoi le Fon- dateur eût préféré le titre de simple Congrégation; raisons de sa condescendance à faire de l'Institut naissant un Ordre reli- gieux. — « Suavité nompareille » en son acquiescement. — Ses réserves. — Une fondation est désirée à Chambéry 1 37 MCLXIII — A M'"'' DE LA FlÉCHÈRE. — Promesse d'une visite au retour de Mionnas. — François de Sales va dire la sainte Messe à la Visitation pour M. de la Fléchère malade 142 MCLXIV — A M. DE QUOEX. — Veuvage de M"^'^ de la Fléchère. — Eloge de cette « parfaite brebis » d'un bercail affligé 143 MCLXV — A M'^^ DE LA Fléchère. — Affaires de tutelle. — Pru- dence et sainte indépendance en face du monde. — Les préten- tions et les plaintes de M. Guidebois. — Un prédicateur de Carême. — Prochains arrangements à la cure de Rumilly 144 MCLXVl — A M"^° DE MiEUDRY. — Etre ce que Dieu veut : faibles de corps, mais siens de cœur. — Nouvelles difficultés dans le service paroissial de Rumilly. — L'Evêque se justifie humblement, sans blâmer ses détracteurs. — Les « caprices des hommes. » — Soyons « vaysseaux bien profons » pour recevoir les grâces de Dieu 147 MCLXVIl — A M. DE Cerisier {Billet inédit). — Dispenses pour le Carême en faveur d'un malade 149 MCLXVUI — A LA mère Favre. — Humbles réponses qu'il faudra faire à l'Archevêque de Lyon. — « L'esprit parfait et apostolique, »  468 Lettres de saint François de Sales propre esprit de la Visitation. — Quel amour peut vivre sans anxiété I 50 MCLXIX — A M"'^ de la Fléchère (Inédite). — Où croissent les lis agréables à l'Epoux céleste. — L'ouvrage le plus doux, l'ou- vrage le meilleur. — Députer Charles de la Fléchère vers le gouverneur de Savoie , 15' MCLXX — Au Comte de Tournon (Inédite). — Un prétendant au sacerdoce qui a besoin d'étudier davantage I 5 2 MCLXXI — Au Duc de Savoie. — Reconnaissance de la province envers Son Altesse pour rétablissement des Barnabites à Annecy. — Celui qui a planté un arbre le doit arroser. — Deux prieurés en ruine spirituelle et matérielle. — Le collège d'Annecy anta- goniste de celui de Genève I 53 MCLXXII — Au Cardinal BoRROMÉE. — Remerciements pour un envoi de reliques de saint Charles. — Le culte du glorieux Car- dinal s'accroît en France et en Savoie I 56 MCLXXIII — A LA Sœur de ChEVRON-VilLETTE. — Des racines qu'on ne peut arracher, mais qui ne doivent pas produire de fruits. — Combattre sur terre, se reposer au Ciel, — N'être ni « pleu- reuse ni plaignante ». — Remède à la colère 159 MCLXXIV — A une personne inconnue. — Moissons et mois- sonneuses 1 62 MCLXXV — A M"^^ de la Fléchère.— La succession de M. de la Fléchère. — Au milieu des ennuis, s'attacher, esclave d'amour, au pied de la Croix 163 MCLXXVI — A une dame. — La meilleure saison pour la culture du cœur. — Gardons nos résolutions en cette vie mortelle, et elles nous conserveront en l'éternelle. — Conseils pratiques sur la fréquentation des Sacrements et les exercices de piété. — Faire l'aumône de sa propre main. — Conduite à tenir avec « ceux du logis » 1 66 MCLXXVII — A M"^ DE LA Fléchère. — Divers conseils pour l'administration des biens laissés par M. de la Fléchère — Pater- nels avis pour la vente de ses chevaux 169 MCLXXVIII — AdOnGuÉrIN. — Nouvelles démarches auprès de la cour de Savoie pour l'établissement des PP. Barnabites à Thonon l y I MCLXXIX — Au Prince Cardinal de Savoie. — Souhaits de l'Evêque de Genève pour la canonisation du bienheureux Amé- dée. — Confiance des peuples en l'intercession de ce glorieux Prince. — Les Barnabites à Thonon, moyen de donner un nouvel essor à la piété populaire I ^4  Table des Matières 469 MCLXXX— Au Duc de Savoie (Inédite). — Double droit de Son Altesse sur Thonon. — Difficultés pour la remise du prieuré de Contamine aux PP. Barnabites 170 MCLXXXI — Au Prince de Piémont. — Encore Contamine et les PP. Barnabites de Thonon I 78 MCLXXXII — A M°'*' DE LA FlÉCHÈRE. — Solution d'un cas de conscience I 79 MCLXXXIII — Au Duc DE Nemours f/«rJ//^j. — Hommage d'obéis- sance et souhaits de prospérité à l'occasion des fêtes pascales. . . . loO MCLXXXIV — A DON GuÉRIN (Inédite). — Des lettres pour les Princes et une mission auprès du comte de Verrua confiées au destinataire loi MCLXXXV — Au PÈRE Dominique de Chambéry. — Démarches pour l'établissement des PP. Capucins à La Roche 182 MCLXXXVI — A LA Sœur de BlONAY. — La Visitation d'Annecy « racine petite, basse et profonde » 1 84 MCLXXXVII — Au Duc de Savoie. — Remerciements au souve- rain, bienfaiteur de son peuple 1 05 MCLXXXVlll — A M. ViBOD. — Le Duc autorise François de Sales à prêcher à Grenoble. — Nouvelles explications au sujet des vi- sites de prélats français à Annecy 186 MCLXXXIX — Au Duc de Nemours. — Demande d'une faveur pour un gentilhomme loo MCXC — A M"^« DE BressiEU (Inédite). — Une affaire sur le point de se terminer. — Céder aux conseils des amis 189 MCXCl — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — (Quelles amitiés sont indé- pendantes des distances et des séparations 190 MCXCII— A LA MÈRE FaVRE. — Retour d'un voyage en Chablais. — Mort du comte de Tournon. — Deux sortes de bons désirs : ceux qui sanctifient l'âme et ceux qui remplissent l'enfer; comment les distinguer. — Méthode très simple pour la méditation des mystères de la Vie de Notre-Seigneur. — Salutations affectueuses . 1 9 1 MCXCIII — A M'"° DE LA FlÉCHÈRE. — Affaires et nouvelles di- verses. — Réclamations de créanciers; comment les supporter. — Quel ordre suivre dans le paiement des dettes. — Projet de séjour à Annecy pour M"""^ de la Fléchère 194 MCXCIV — A LA même. — Etre douce et civile envers les sollici- teurs. — M. Guidebois et ses Bulles 196 MCXCV — Au Duc DE Savoie. — Requête contre Scaglia, le pré- tendant de Contamine I 97 MCXCVI — A UN GENTILHOMME (Minute inédite). — Un Mémoire dont on doit ignorer l'auteur. — La vie toute sainte et édifiante des Religieuses de la Visitation. — Pourquoi François de Sales  470 Lettres de saint François de Sales n'a pas publié les Indulgences déjà obtenues en leur faveur; celles qu'il désire. — La pension de M. Desplans. — Réveil de la contagion à Genève 1 û3 MCXGVII — A LA Sœur de BlONAY, — Parallèle entre la vie selon l'esprit et la vie selon le sens humain 205 MCXGVIII — A M. Favre. — L'auteur du Traitté de l'Amour de Dieu réclame humblement l'examen de son ouvrage 208 MCXGIX — A LA MÈRE de ChanTAL. — Un malade qui suivra les ordonnances de la Mère de Chantai 2 10 JVICC — A M'"^ DE LA FlÉCHÈRE. — Un paiement à obtenir. — Comment aider une âme tentée contre sa vocation 211 MCCI — A LA MÈRE DE Chantal (Inédite), — Le saint Evêque rassure sa fille spirituelle au sujet de sa santé 2 12 MCCII — A LA MEME. — L'amour vrai, indépendant de toutes cir- constances et manifestations extérieures. — Regarder et aimer le prochain dans la poitrine du Sauveur 2 1 3 MCCIII — A LA MÊME. — Dépouillement intérieur auquel le Saiiît exhorte la Mère de Chantal. — Admirables renoncements 2 14 MCCIV — A LA MÊME. — Bonheur de la possession de Jésus seul par le dénuement total du créé 2l6 MCCV — A LA MÊME. — Vouloir les vertus selon que Dieu les veut de nous. — Se reposer en Notre-Seigneur ; en lui, oublier toutes choses. — L'intime du cœur du saint Evêque 2 18 MCCVl - — A LA MÊME. — Les enfants portés entre les bras de Dieu. — Souverain degré de la pureté de l'amour 2 19 MCCVII — A M"^^ DE Ballon. — Pourquoi Dieu nous fait attendre la délivrance de nos imperfections. — Petit exposé doctrinal sur l'Eucharistie. — Les Anges et le Saint-Sacrement 220 MCCVIII — A LA MÈRE Favre. — Tendre au même but, sans vou- loir « faire tout ce que les autres font. « -~ Se conduire selon la Règle, la grâce, l'obéissance 222 MCCIX — A M™^ DE LA FlÉCHÈRE. — Multiples démarches du Saint pour les affaires de sa fille spirituelle. — Encore M"^= du Châtelard et sa vocation. — Paternelles excuses 223 MCCX — A LA MÊME. — L'esprit humain en face de la tentation. — Danger de retarder l'exécution des bons désirs. — Compassion affectueuse de François de Sales pour un courage défaillant; ses espérances 225 MCCXI — A M""® Colin (Inédite). — Remerciements pour un beau présent 226 MCCXll — A W^ DE LA FlÉCHÈRE (Inédite). — - Une rencontre qui ne serait pas à propos. — Différentes nouvelles 227  Taule des Matières 471 MCCXllI — A LA MÈRE DE Chantal (Billet incdit). — Envoi de la Préface et de l'Oraisou dédicatoire du Traitté de V Amour dç Dieu 228 MCCXIV — A LA MÊME. — Un aumônier qui sera « bravement » remplacé par « un pauvre Evesque »> 229 MCCXV — A M'«" DE LA FlÉCHÈRE. — Affaires et nouvelles. ^ Une prétendante pour le monde et une prétendante pour le cloître 229 MCCXVI — A LA MÈRE DE Chantai (Inédite). — Le « petit em- pressement » de M'"'^ de la Fléchère. — Une visiteuse qu'il fau- dra bien accueillir 23 I MCCXVII — A LA Sœur Coton. — Désirer l'amour infiniment désirable. — La contrition doit toujours être accompagnée de confiance 232 MCCXVllI — A M. Favre (Inédite). — Les retards d'un voiturin. — Deux fautes notables à corriger au Traitté de V Amour de Dieu. -^ Pourquoi le Saint redoute les excès de courtoisie de M. Rigaud. — Messages et commissions. — Envoyer un exem- plaire de l'ouvrage à l'Archevêque de Vienne. , . . . , 234 MCCXIX — Au Cardinal BellaRMIN. — Elogedesdeux premières Communautés de la Visitation. — Un mot de saint Grégoire. — Chant doux et grave des Soeurs. — L'avis de l'Archevêque de Lyon ; condescendance du Fondateur. — Trois particularités qu'il faudrait faire approuver par le Saint-Siège. — Raisons de ces demandes .,.,... 238 Autre minute de la Lettre précédente (Fragment inédit)., . . 248 MCCXX — A M. de Cornillon, son beau-frère. — « La plus favorable condition » que nous puissions attendre de la mort. — Remercier Dieu quand il nous laisse ceux que nous aimons; acquiescer à sa volonté lorsqu'il nous les ôte 254 MCCXXI — A M. FeydeaU. — Remerciements à un protecteur du futur monastère de la Visitation de Moulins, auteur de « belles oraysons » 255 MCCXXII — Au même. — Le Saint recommande ses Filles au délé- gué de l'Archevêque de Lyon 2^8 MCCXXIII — A LA MÈRE DE BrÉCHARD. — Un service apostolique. — Quand est bonne la défiance de soi ; quand redoutable. — Dieu ne laisse jamais succomber ceux qui se confient en lui. — Accord de l'humilité, de l'obéissance et de la simplicité. — Avantages des infirmités corporelles. — Quelle est la plus rare vertu. — Sur quoi doit se fonder la charité envers le prochain. — Béné- diction paternelle 258  472 Lettres de saint François de Sales MCCXXIV — A la Sœur Bailly (Inédite). — Bonheur, qualités et vertus d'une fondatrice d'une Maison religieuse 20 l MCCXXV — A LA Sœur HumbERT. — Assurance et remède con- tre les tentations. — Ne pas s'affliger de ce qui ne peut séparer de Notre-Seigneur. — Souhaits et bénédictions 263 MCCXXVI — A LA Sœur de la Croix. — Pourquoi la destina- taire a été choisie pour une fondation, malgré sa jeunesse 264 MCCXXVII — Au Chanoine VioT. — Un accommodement dont le Saint espère bientôt la conclusion 265 MCCXXVIII — A M"'^ DE la FlÉCHÈRE. — Troubles à Annecy. — Arrivée de Bonfils. — Nouvelles de la Visitation 266 MCCXXIX — A LA MÊME. — Le prince héritier de la couronne de Savoie. — Deux visiteuses attendues au monastère d'Annecy. — Une heureuse novice. — Arrestation de Bonfils; souhaits du Saint pour le prisonnier 268 MCCXXX — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — Oraison du Saint la veille de l'Assomption. — Marie, morte d'amour, nous fasse vivre en l'amour! — Glorieuse date de la naissance de François de Sales. — Le rameau de la colombe au milieu du déluge 2yO MCCXXXI — Au Duc de BellEGARDE. — L'amour parfait exclut les défiances. — La « coustume des pères. » — Un livre qui sup- pléera à la rareté des lettres. — Eloge du prince de Piémont. ... 27 I MCCXXXII — Au Prince de Piémont. — Un dessein sur Genève. 274 MCCXXXIII — Au Duc de Savoie. — L'avis du Saint sur un projet au sujet de Genève. — Témoignage en faveur de son auteur... 275 MCCXXXIV — Au MÊME. — François de Sales offre à son prince le Traitté de l'Amour de Dieu 276 MCCXXXV — A LA MÈRE DE ChANTAL. — Une des joies du Saint dans le Ciel, — Fleurs à jeter sur le berceau de Marie 276 MCCXXXVI — A LA MÈRE DE BrÉCHARD. — Les débuts de la fon- dation du monastère de Moulins. — Quels sont les signes de la bonté d'une œuvre. — La tentation des « anges terrestres. » — Encouragements à la générosité et à la confiance 277 MCCXXXVII — A M""^ DES GOUFFIERS. — L'union, condition de la force. — Les renardeaux dans les vignes. — Se garder de la prudence humaine 280 MCCXXXVllI — A LA Sœur de Cerisier. — Charitable intervention du Saint dans une affaire 28 l MCCXXXIX — A LA MÈRE DE ChanTAL (Billet inédit). — Démar- che du Fondateur auprès des syndics pour garantir les matériaux de l'église de la Visitation 282 MCCXL — A M^'ï" ??.^0\j\LLET (Inédite ) . — La fidélité d'un porteur de lettres qui ne doit pas être suspectée. — Nouvelles de guerre. 283  Table des Matières 473 MGCXLI ■— A M'"* DE LA FlÉCHÈRE. — Départ du prince de Pié- mont. — Condition pour obtenir un bénéfice. — Nouvelles dif- férées 285 MCCXLII — A M"^® DES GOUFFIERS. — Difficultés et épreuves da la Visitation de Moulins. — La présence de la Mère de Chantai indispensable à Annecy. — Que M""* des Gouffiers supporte courageusement le fardeau que sa bonne volonté lui a fait désirer. — Pourquoi le Fondateur ne veut pas multiplier les Maisons de sa Congrégation 286 MCCXLIII — A LA MÈRE DE BrÉCHARD. — La « plus excellente leçon de la doctrine des Saintz. >> — Souhaits de François de Sales à une fille de son cœur 289 MCCXLIV — A M. DE ^LO^AY (Inédite). — Résolution prise dans une assemblée présidée par le prince de Piémont. — La com- muniquer au Conseil de la Sainte-Maison de Thonon 2Q0 MCCXLV — A M. SCOTTO (Inédite). — Pouvoirs spirituels donnés au destinataire 292 MCCXLVl — A M. ViBOD. — Le Saint réclame une lettre écrite par Charles-Emmanuel au Vice-légat d'Avignon au sujet des étudiants au collège de Savoie 294 MCCXLVII — Au Duc de Savoie. — Contribution payée à Son Altesse par le clergé du diocèse de Genève 295 MCCXLVIII — Au Prince de Piémont. — Un fermier qui promet ce qui n'est pas à lui. — Supplique des Religieux de Talloires. 296 MCCXLIX — Au Duc de Savoie. — Requête en faveur des étu- diants savoyards au collège d'Avignon 298 MCCL — A M. VibOD. — L'affaire du collège de Savoie à Avignon portée en Cour de Rome. — Message pour M. Boschi 299 MCCLI — A UN GENTILHOMME. — L'Evêque de Genève expose ses motifs d'accéder aux volontés de Son Altesse au sujet de l'impôt sur le clergé 3OO MCCLII — A M°^^ DE LA FlÉCHÈRE. — Aimable invitation de Fran- çois de Sales à la destinataire 302 MCCLIII — A M. FlOCARD. — Préliminaires de la paix. — Pro- chain départ du Saint pour Grenoble 503 MCCLIV — A M""® GuiLLET de MonTHOUX. — Remplir son devoir de bon cœur, par amour, mais sans empressement. — Grand prix de îa paix dans une famille. — Faire ce que l'on peut, et laisser le reste à Dieu 205 MCCLV — A M"^^ de LA FlÉCHERE. — Une lettre écrite à Tim- proviste. — Comment la Mère de Chantai désignait M'"'^ de la Fléchère. — « Tout pour Dieu : l'amour et le cœur qui avme. » 307  474 Lettres de saint François de Sales MCCLVI — Au Prince de Piémont. — Entremise de l'Evêque de Genève en faveur d'un ami 308 MCCLVII — A M. BOSCHI. -^ Aumônes du prince de Piémont aux Clarisses et aux Cordeliers d'Annecy. — Un galérien qui doit payer sa grâce par des œuvres pies ^00 MCCLVllI — Au Prince de Piémont. — La reconnaissance du Saint s'unit à celle des Pères Barnabites 311 MCCLIX — . A M"^^ DE LA FlÉCHÈRE. — Une quittance à retrou^ ver. — Visite de 'M."'- de Blonay , 312 MCCLX — A M. MasSEN (Inédite). — Recommandation en faveur d'un étudiant en théologie 3 l 3 MCCLXI — A M. Gros de SaiNT-Joyre. — Remerciements et féli- citations pour la communication d'un ouvrage. — La « tare » que la modestie du Saint y découvre 3 1 4 MCCLXII — A LA MÈRE DE ChaNTAL. — Comment procéder pour Tachât de maisons nécessaires à l'agrandissement du monastère delà Visitation 3 1 6 MCCLXIII — A LA MÊME (Inédite). — Débuts de TAvent à Gre- noble. — Messages d'un père pour ses filles 317 MCCLXI V — A LA MÊME (Inédite). — Une lettre faite entre deux sermons. — Les fruits spirituels qui se préparent pour le prochain Carême. — Salutations et souhaits affectueux 318 MCCLXV -^ A Mg"" FeNOUILLET (Inédite). — Le duc de Montmo- rency gagné par M^"" Fenouillet à l'estime de l'Evêque de Genève. — Témoignages qu'il en donne. — Déplaisir du Saint de n'avoir pu, à son gré, le payer de retour. ^ Lesdiguières en route pour le Piémont 319 MCCLXVI — A LA MÈRE DE Chantal (Inédite). — Que doit faire une âme continuellement attirée par Dieu à se reposer dans le sein de sa Providence. — Le fondement de la joie paisible et dévote 322 MCCLXVII — A LA MÊME (Fragment inédit) 323 ANNÉE 161 7 MCCLXVIII — A LA MÈRE DE Chantal. — Le premier acte d'une journée fait selon l'inclination du Saint 324 MCCLXIX — Au Chanoine de Granier (Inédite). — Le destina- taire est prié de vouloir bien résigner sa place de chanoine en faveur d'un digne ecclésiastique 325 MCCLXX — A LA MÈRE DE Chantal. — Affaires à régler entre les deux Fondateurs de la Visitation 328 MCCLXXI — Au Duc de Nemours (Inédite). — Regrets de  Table des Matières 475 l'Evêque de Genève d'avoir quitté Annecy avant l'arrivée du prince. — Le duc de Nemours, futur fondateur de l'église des Barnabites, — Dieu « donne séjour dans son temple aeternel a ceux qui luy en font icy bas des temporelz. » — Reconnaissance des Religieux et du peuple 33^ MCCLXXII — Au Prince DE Piémont. — L'imprudence d'un jeune homme. — Avis du Saint sur cette affaire ^)2 MCCLXXIII — Au Duc de Savoie. — Des sujets fidèles méritent les faveurs de leur Prince 334 MCCLXXIV '— A LA mère Favre. — Changement de confesseur au monastère de Lyon. — Trois retraitantes en celui d'Annecy, — Rapide passage en ce monde d'une petite nièce du Saint 335 MCCLXXV — A LA MÈRE de ChaNTAL. — Un souhait de Job et celui de François de Sales, à propos d'un anniversaire 337 MCCLXXVI — A l'Abbesse de Sainte-Claire d'Evian (Inédite). — Le saint Evêque s'excuse aimablement de son retard à écrire. — Il promet de s'employer auprès du prince de Piémont pour les Clarisses. — Raisons divines des maladies et des guérisons. — Salutations affectueuses 337 MCCLXXVII — A UNE Religieuse de l'Abbaye de Sainte- Catherine. — En échange d'un bouquet. — Une prière que le Saint ne ferait pas. — Le choix de sainte Catherine de Sienne. — Chant du rossignol dans son buisson. — Envoi du Traitté de l'Amour de Dieu. — Sentir des répugnances à la vertu n'est pas manquer d'amour 340 MCCLXXVIII — Aux Chanoines de la Collégiale de Sallan- CHES. — L'Evêque promet aux Chanoines de tenir leur doyen en son devoir 342 MCCLXXIX — A LA MÈRE DE ChanTAL. — On parle à Grenoble de l'établissement d'un monastère de la Visitation. — François de Sales a commencé « heureusement » ses prédications. — Les désirs de son cœur. — Messages paternels 243 MCCLXXX — A M"^« DES GouFFIERS^/wM/^J. — Les vertus qui doivent accompagner le zèle, — Fermeté et délicatesse du saint Directeur. — Raisons de sa persistance à ne pas multiplier les Maisons de sa Congrégation 34c MCCLXXXI — A LA MÈRE DE BrÉCHARD. — Le vrai chemin du Ciel. 347 MCCLXXXII — Au Duc de Savoie. — L'Evêque de Genève de- mande à son prince l'autorisation de revenir prêcher le Carême suivant à Grenoble 347 MCCLXXXIIl — A LA MÈRE Favre. — Prétendantes grenobloises pour la Visitation. — Le saint Fondateur attend les nouvelles de  47^ Lettres de saint François de Sales Rome avant de leur donner une réponse. — M.""*^ Le Blanc et sa famille 348 MCCLXXXIV — Au Chanoine de Sales, son frère (Inédite). — Affaires ecclésiastiques du diocèse de Genève. — Au sujet d'une excommunication. — Les armes du duc de Savoie victorieuses.. 350 MCCLXXXV — Au Prince de Piémont. — L'Evêque de Genève sollicite la confirmation de M. de Charmoisy dans une charge. 353 MCCLXXXVI — Au MÊME. — Le sieur Gillette en Piémont. — Prière au prince de lui accorder sa protection 354 MCCLXXXVII — Au MÊME. — Un ecclésiastique qui porte les armes et extorque des lettres de faveur au duc de Savoie. — Comment faire cesser un pareil abus 5ct: MCCLXXXVIII — A LA MÈRE de ChANTAL. ■ — Eloge du peuple de Grenoble. — La part que les hommes laissent aux femmes. — Projet d'établissement d'une Maison de la Visitation; sentiment du Saint à cet égard 3C6 MCCLXXXIX — A M""® de GrANDMAISON. — Remplacer le jeûne corporel par la mortification du cœur. — Moisson de belles âmes. 358 MCCXC — A LA MÈRE Favre. — Grande erreur de croire que l'oraison perfectionne sans l'obéissance. — Suivre Notre-Seigneur crucifié, et non son humeur et sa présomption. — Sentence de saint Bernard. — Que faire des gens qui veulent se gouverner à leur guise. — La sainte imprévoyance de la vraie servante de Dieu 359 MCCXCI — A M""^ DE Vellepesle de Villeneuve. — Le Saint promet de s'entremettre entre le marquis d'Aix et la destinataire. 36 I MCCXCII — A M"'^ DE BlaNIEU. — Se préparer à rendre compte à Notre-Seigneur. — Comment guider sa barque au milieu des vents 362 MCCXCIII — Aux Pères Barnabites réunis en Chapitre gé- néral A Milan. — Le Saint présente aux Pères capitulaires un Mémoire concernant l'extension des Barnabites en Savoie.. 364 MCCXCIV — A LA Présidente Le Blanc de Mions. — Conseils pour l'oraison. — Comment « accommoder cet exercice » avec la promptitude de l'esprit. — Les larmes de dévotion et l'usage qu'il en faut faire. — La douceur et la tranquillité n'empêchent pas l'action, mais la font réussir. — Contre les tentations au sujet de l'état de vie où l'on est embarqué. — L'extérieur d'une fille de Dieu 366 MCCXCV — A M'"« de VeYSSILIEU. — La crainte excessive de la mort empêche l'âme de s'unir à Dieu par amour. — Dix remèdes indiqués pour s'en affranchir 3y l  Table des Matières  477  MCCXCVl — A M"'<^ Co-X-Xm (Inédite). — Assurance de paternelle affection. — « Se mortifier et faire toutes choses selon la volonté de Dieu » 3-75 MCCXCVII — Au Président (Favre Inédite). — Une aspirante à la Visitation. — Mortalité à Chambéry 5^8 MCCXCVIII — A M. MiLLETOT. — Le Saint prie son ami d'ap- puyer une requête fondée « sur la pieté et la justice. » — M. de Charuioisy grand maître de l'artillerie. — Engagement pour le prochain Carême à Grenoble 3-n MCCXCIX — Au GÉNÉRAL DES BarNABITES. — Prière ins- tante de renvoyer le P. Fulgence Chioccari en Savoie 38 I MCCC — A LA Comtesse de San Secondo. — A quelles âmes François de Sales dédiait volontiers son service. — Envoi des Règles de la Visitation, — Une instance en Cour de Rome. — Assurance de prières pour la Maison de Savoie , , . . 383 MCCCI — A LA Présidente Le Blanc de Mions. — Agir et parler sans regard sur le qu'en dir?-t-on. — Est-ce hypocrisie « de ne pas faire si bien que l'on parle ? » — Marcher « par le milieu des belles vertus, » et non « par les extrémités » des subtilités. — Différents conseils sur quelques points particuliers et sur l'oraison. — La vocation de M"® de Gérard. — Pourquoi les livres du Saint « ont treuvé de l'accès » en l'esprit de la Présidente. — Salutations à plusieurs dames de Grenoble. — Une triste affaire. — Folie des enfants du monde 386 MGCCII — Au Prince de Piémont. — Nouvelles plaintes au sujet du doyen de Sallanches 391 MCCCIII — Au Duc DE Savoie. — Indifférence de l'Evéque de Ge- nève pour le choix de la ville où il doit prêcher. — Le bon plaisir de son souverain décidera entre Paris et Grenoble 392 MCCCIV — A M'"^ DE LA FlÉCHÈRE. — La grâce d'un trépas. — Difficultés au sujet d'un mariage. — Une pénitente du Saint. — Messages et nouvelles 395 MCCGV — A M""^ DE Granieu. — Ce que François de Sales aimait « passionnément » dans l'âme de la destinataire. — Une vérité connue des enfants de Dieu avant la dernière heure. — Le repos dans la patrie anç MGGGVI — Au Gardinal Bellarmin (Minute inédite). — Désirs et démarches du saint Evêque pour l'érection d'un Séminaire. 307 MGGGVII — A la Mère de Ghantal (Fragments inédits) 400  478 Lettres de saint François de Sales APPENDICE I lettres adressées a saint FRANÇOIS DE SALES PAR QUELQUES CORRESPONDANTS A LETTRE DE MGR DENIS-SiMON DE MARQUEMONT, ARCHEVÊQUE DE LYON 403 B — LETTRE DE M^R PIERRE-FRANÇOIS COSTA, NONCE APOSTOLIQUE A TURIN 404 C LETTRE DE M^R DÉNIS-SIMON DE MARQUEMONT, ARCHEVÊQUE DE LYON 405 D LETTRES DE LA MÈRE DE CHANTAL I 408 II ..*...., 409 III 409 E LETTRE DU MARÉCHAL DE SAÎNT-GÉRAN 4 I I F LETTRE DU PÈRE AIGNAN MOREAU, DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS 412 G LETTRE DU MAIRE ET DES ÉCHËVINS DE MOULINS 4I 3 H — LETTRE DE M^R DENIS-SIMON DE MARQUEMONT, ARCHEVÊQUE DE LYON 414 1 LETTRE DE M. CLAUDE BOUCARD » » 4' 5 J LETTRE DE M. RENÉ GROS DE SAINT-JOYRÉ 4' 7 K LETTRE DU CARDINAL ROBERT BELLARMIN 418 L LETTRE DE HENRI DE SAVOIE, DUC DE NEMOURS 4'9 M — LETTRES DE LA MÈRE FAVRE SUPÉRIEURE DE LA VISITATION DE LYON I 420 II 422 III 423 IV 425 N LETTRE DU P. LOUIS DE LA RIVIÈRE, MINIME • • • 4^7 G LETTRE D'UNE DAME * 4^8 II RENÉ GROS DE SAINT-JOYRE AUX AMANS DE L'AMOUR PARFAICT. . . . 429  Tablr des Matières 479 Glossaire des locutions et des mots surannés 431 Index des correspondants et des principales notes biographi- ques et historiques de ce volume 437 Table de correspondance de cette nouvelle Edition avec les précédentes et indication de la provenance des Manuscrits. 449  185014  Annecy, imprimé par J . AfcRï. 1481  |BX 1750 .F7 1892 v.l7 SMC f: rancis. Oeuvres de saint François de Sale?, eveque de Genève et d tdition complète d'aores le<; i autographes et. les éditions oriQinales enrichie de nnrrtir