Note sur la valeur des principes de l'inertie et de la conservation de l'énergie

Reginald Garrigou-Lagrange, O.P.
&
Pierre Maurice Marie Duhem

Dieu, son existence et sa nature p. 759 à 763

Nous avons parlé à plusieurs reprises (p. 239, 249-256, 260) de ces deux principes et du problème de leur conciliation avec le principe de causalité.

Selon le principe de causalité, il n'y a pas de changements sans cause; dès lors une cause est requise aussi bien pour le changement qui a lieu au cours du mouvement que pour le passage du repos au mouvement lui-même. S'il en était autrement une impulsion finie et minima pourrait produire dans le vide un mouvement perpétuel, dans lequel il y aurait toujours du nouveau, un perpétuel passage de la puissance à l'acte; une chiquenaude donnée il y a dix mille ans produirait encore aujourd'hui son effet et le produirait toujours, éternellement. Ce mouvement qui n'aurait pas besoin d'être entretenu, n'aurait pas de terme, ni de fin au sens métaphysique du mot; comment ne serait-il pas contraire aux principes de causalité et de finalité?

Le principe de l'inertie s'énonce pourtant: la matière ne peut d'elle-même ni se mettre en mouvement, ni modifier son état de mouvement; un corps en mouvement, si aucune cause extérieure n'agit sur lui, conserve indéfiniment un mouvement rectiligne et uniforme.

Si l'on objecte que les faits semblent être en contradiction avec le principe de l'inertie, qu'une bille lancée sure un plan horizontal bien poli, s'arrête au bout d'un certain temps, qu'un train ayant acquis sa vitesse normale s'arrête si l'on ne fait pas agir la vapeur sur le pistons; le physicien répond: cet arrêt est dû au frottement de la bille sur le plan, ou à celui des roues sur les rails et aussi à la résistance de l'air.

Est-il démontré que ce frottement et cette résistance sont l'unique cause de l'arrêt? est-il scientifiquement prouvé que le mouvement donné ne se ralentit pas aussi de lui-même? «A-t-on jamais expérimenté sur des corps soustraits à l'action de toute force, demande H. Poincaré [Le Science et l'Hypothèse, p. 112 à 119], et si on l'a fait, comment a-t-on su que ces corps n'étaient soumis à aucune force?» Comment, sans sortir des limites de sa science, le physicien pourrait-il soutenir que la motion divine n'est pas nécessaire pour qu'un corps lancé dans le vide se meuve éternellement?

Le principe de la conservation de l'énergie s'énonce: «L'énergie totale (actuelle et potentielle) d'un système de corps soustrait á toute action extérieure demeure constante.» Ce principe est nécessairement lié au précédent, il revient à dire: il est impossible que le mouvement cesse jamais, s'il disparaît sous une forme il reparaît sous une autre, ainsi le mouvement d'un projectile ne cesse qu'en engendrant de la chaleur, et la chaleur elle-même produit du mouvement local. L'équivalence est constatée, avec le correctif apporté par la loi de la dégradation de l'énergie.

Est-ce à dire qu'une chiquenaude donnée il y a dix mille ans a encore son effet aujourd'hui par suite des transformations de l'énergie, et qu'elle l'aura toujours, sans que l'énergie ait besoin d'être renouvelée? Suffit-il d'admettre que cette énergie est conservée par Dieu, comme le veut Descartes, et que la motion divine s'est seulement exercée dans le passé à l'origine du monde? Comment, sans sortir des limites de sa science, le physicien pourrait-il affirmer que la motion divine n'est pas nécessaire pour que l'énergie ne reste pas individuellement la même, ce n'est pas le même mouvement, parce qu'il est le mouvement de ce corps. De même l'activité humaine est relativement constante à la surface de la terre, et pourtant elle ne reste pas individuellement la même, elle est renouvelée, puisque les hommes naissent et meurent. Aristote disait déjà: corruptio unius est generatio alterius, la matière ne perd une forme qu'en en recevant une autre; ce qui peut se traduire en termes modernes relativement à l'énergie: une forme de l'énergie ne disparaît pas sans qu'une autre apparaisse. Est-ce à dire que la forme qui disparaît est cause première et toute suffisante de celle que la suit? Nullement: la science expérimentale qui étudie seulement les rapports constants des phénomènes entre eux ne peut se prononcer ni pour ni contre la nécessité de l'intervention d'une Cause première invisible pour la transformation de l'énergie. Mais du point de vue métaphysique, un mouvement ne donne naissance à un autre mouvement qu'avec le concours invisible de l'Être premier, cause de tout être en tant qu'être, du Premier moteur, cause suprême de l'activité des causes secondes. De même, du point de vue métaphysique, un mouvement local ne peut se perpétuer dans le vide, ne peut être un perpétuel passage de la puissance à l'acte, sans l'intervention invisible de l'Acte pur, cause suprême de toute actualisation. Pour soutenir avec Descartes qu'il suffit que Dieu conserve le mouvement, il faut entendre par cette expression que Dieu continue à mouvoir.

Ainsi seulement se peuvent concilier les principes mécaniques de l'inertie et de la conservation de l'énergie avec le principe métaphysique de causalité. Toute autre conciliation que rejette la nécessité de l'intervention de la cause première reste illusoire [Il y aurait à étudier du même point de vue la conciliation du principe de l'inertie avec la loi de l'attraction universelle.].

Le physicien n'a pas à résoudre ce problème, il ne peut se prononcer positivement sure la valeur de la solution qu'en donne la métaphysique traditionnelle, il doit seulement reconnaître que cette solution ne s'oppose en rien à ce que la physique est en droit d'affirmer sur la valeur de ses propres principes, dans l'ordre phénoménal.

Sur ce dernier point, nous sommes heureux de reproduire une lettre de M. Pierre Duhem, de l'Académie des Sciences, où il a bien voulu résumer pour nous les idées maîtresses de son bel ouvrage la Théorie physique. Nous le prions d'agréer avec nos remerciements, l'expression de notre respectueuse reconnaissance.


Mon Père,

Je vous dois quelques explications pour certains termes ambigus de ma précédente lettre et en particulier pour le nom d'axiome ou soi-disant axiome que j'ai donné au principe de l'inertie.

Je commence par préciser que je prendrai les mots Mathématique, Physique, Métaphysique dans le sens où les entendent, en général, nos contemporains, non dans le sens d'Aristote et des Scolastiques.

Dans ces conditions, la loi d'inertie n'existe pas pour le mathématicien; les principes de la Science des nombres et de la Géométrie sont les seuls qu'il ait à admettre; il ne s'occupe pas des principes de la Mécanique et de la Physique; s'il lui arrive d'étudier les problèmes que lui posent le mécanicien et le physicien, c'est sans se soucier de la voie par laquelle ils ont été conduit à formuler ces problèmes.

Je ne considère donc le principe de l'inertie que tel qu'il est pour le physicien.

On en peut dire alors ce qu'on peut dire de tous les principes des théories mécaniques et physiques.

Ces principes fondamentaux ou hypothèses (au sens étymologique du mot) ne sont pas des axiomes, c'est-à-dire des vérités évidentes de soi.

Ce ne sont pas davantage des lois, c'est-à-dire des propositions générales que l'induction ait tirées directement des enseignements de l'expérience.

Il se peut que certaines vraisemblances rationnelles ou certains faits d'expérience nous les suggèrent; elle ne leur confère, par elle-même, aucune certitude. Au point de vue de la pure Logique, les principes fondamentaux des théories mécaniques et physiques ne peuvent être regardés que comme des postulats librement posés par l'esprit.

De l'ensemble de ces postulats, le raisonnement déductif tire un ensemble de conséquences plus ou moins éloignées qui s'accordent avec les phénomènes observés; cet accord est tout ce que le physicien attend des principes qu'il a postulés.

Cet accord confère aux principes fondamentaux de la théorie une certaine vraisemblance. Mais il ne peut jamais leur conférer la certitude, car on ne peut jamais démontrer que, d'autres postulats pris comme principes, on ne déduirait pas des conséquences qui s'accorderaient aussi bien avec les faits.

En outre, on ne peut jamais affirmer qu'on ne découvrira pas un jour des faits nouveaux qui ne s'accorderont plus avec les conséquences des postulats qu'on avait posés au fondement de la théorie; faits nouveaux qui obligeront à déduire, de nouveaux postulats, une théorie nouvelle.

Ce changement de postulats s'est produit maintes fois au cours du développement de la Science.

De ces observations, deux conséquences:

D'aucun des principes de la théorie mécanique et physique, on n'a et on n'aura jamais le droit d'affirmer catégoriquement qu'il est vrai.

D'aucun des principes sur lesquels repose la théorie mécanique et physique, il n'est permis d'affirmer qu'il est faux, tant qu'on n'a pas découvert des phénomènes en désaccord avec les conséquences de la déduction dont ce principe est une des prémisses.

Ce que je viens de dire s'applique, en particulier, au principe de l'inertie. Le physicien n'a pas le droit de dire qu'il est certainement vrai; mais encore moins a-t-il le droit de dire qu'il est faux, puisqu'aucun phénomène ne nous a jusqu'ici, (si l'on fait abstraction des circonstances où intervient le libre arbitre de l'homme) contraint de construire une théorie physique d'où ce principe serait exclu.

Tout ceci est dit en demeurant dans le domaine du physicien, pour qui les principes ne sont pas les affirmations de propriétés réelles des corps, mais le prémisses de déductions dont les conséquences doivent s'accorder avec les phénomènes toutes les fois qu'une volonté libre n'intervient pas pour déranger le déterminisme de ceux-ci.

A ces principes de Physique, peut-on et doit-on faire correspondre certaines propositions qui affirmeraient certaines propriétés réelles des corps? — A la loi de l'inertie, par exemple, doit-on faire correspondre l'affirmation qu'il existe, dans tout corps en mouvement, une certaine réalité, l'impetus, douée de tels ou tels caractères? — Ces propositions s'étendent-elles ou ne s'étendent-elles pas aux êtres doués de volonté libre? Ce sont problèmes que la méthode due physicien est inhabile à traiter et qu'il laisse à la libre discussion des métaphysiciens.

A cette liberté du métaphysicien, le physicien ne serait amené à s'opposer que dans un seul cas: Celui où le métaphysicien formulerait une proposition que contredirait directement aux phénomènes ou qui, introduite à titre de principe dans la théorie physique, conduirait à des conséquences en contradiction avec les phénomènes. Dans ce cas, il serait légitimement fondé à dénier au métaphysicien le droit de formuler une telle proposition.

Voilà, mon Père, le résumée de ce que je dirais si j'écrivais jamais, sur le principe de l'inertie, l'article que vous avez la bonté de souhaiter…

P. Duhem


N. B. — Des conclusions assez semblables à celle de M. Duhem sont exprimées par M. E. Meyerson, Identité et Réalité, (Paris, Alcan, 1908) qui examine au point de vue de l'expérience et au point de vue de la raison philosophique la valeur des principes d'inertie et de la conservation de l'énergie. L'auteur va jusqu'à dire, ce qui nous semble fort juste: «le principe d'inertie exige que nous concevions le mouvement comme un état, si le mouvement est un état il doit se maintenir comme tout état… Le principe d'inertie exige que nous concevions la vitesse comme une substance. Or, c'est une conception entièrement paradoxale pour l'entendement immédiat…» p. 132 et 134.

Le Prof. Dott. Gustavo Pécsi, dans son livre Crisi della Fisica Moderna, traduit de l'allemand, Rome, Desclée 1910, va plus loin encore et croit pouvoir établir rigoureusement la fausseté du principe de l'inertie, qui aboutirait à cette contradiction: le mouvement est essentiellement immobile, il n'y a en lui rien de nouveau (p. 201).


Cf. aussi «Le physicien et le métaphysicien» de Stanley L. Jaki.

Note on the Validity of the Principles of Inertia and Conservation of Energy

Reginald Garrigou-Lagrange, O.P.
&
Pierre Maurice Marie Duhem

God, His Existence & His Nature p. 447 to 452

We have spoken on several occasions (Vol. I, pp. 259-260; 270-278; 282) of these two principles and of the problem of their reconciliation with the principle of causality.

According to the principle of causality, there is no change without a cause; hence a cause is required as much for the change which takes place in the course of motion as for the transition from rest to motion itself. If it were otherwise, a finite and minimum impulsion could produce in the void a perpetual motion in which there would always be something new, a perpetual transition from potentiality to act; a finite power could forever be in motion, a snap of the finger ten thousand years ago would still produce its effect today, and would produce it always, eternally. This motion, which would have no need of being kept up, would have neither end nor beginning in the metaphysical sense of the terms. Would it not be contrary to the principles of causality and finality?

The principle of inertia is expressed as follows: of itself matter cannot set itself in motion or modify the motion that it has; a body in motion, if no external cause acts upon in, retains a rectilinear uniform motion indefinitely.

If anyone objects that the facts seem to contradict the principle of inertia—v.g., that a billiard ball, shot on a very smooth plane, stops at the end of a certain time; that a train, after acquiring its normal speed, stops if the steam is not made to act on the pistons—the physicist replies that this stopping is due to the friction of the billiard ball on the plane, or to that of the wheels on the rails, and also to the resistance of the air.

Is it a demonstrated fact that this friction and this resistance are the only causes of the stopping? Is it scientifically proved that the given motion does not slow down also of itself? "Has it ever been proved from experiments with bodies removed from the influence of all external force," asks H. Poincaré [Le Science et l'Hypothèse, pp. 112-119] "that these bodies are not influenced by any force?" How, without exceeding the limits of his science, can the physicist maintain that the divine motion is not necessary for a body hurled into a void to move eternally?

The principle of the conservation of energy is expressed as follows: "In a system of bodies removed from all external influence, the total energy (actual and potential) of this system remains constant." This principle is necessarily connected with the preceding, and it is tantamount to saying that it is impossible for motion ever to cease; if it disappears under one form it reappears under another; thus the motion of a projectile ceases only in generating heat, and heat itself produces local motion. The equivalence is established by reason of the corrective administered to it by the law of the diminution of energy.

Does it follow that a given snap of the finger made a thousand years ago has still its effect today because of the transformations of energy, and that it will always be so, without any need for the energy to be renewed? Is it enough to admit that this energy is conserved by God, as Descartes says, and that the divine motion was only exerted in the past, in the beginning of the world? How, without exceeding the limits of his science, can the physicist declare that the divine motion is not necessary for the perpetual transformation of energy? It is clear that energy is not individually the same; it is not the same motion that passes from one body into another, for it is this motion, because it is the motion of this body. Likewise, human activity is relatively constant on the surface of the earth, and yet it is not individually the same; it is renewed, since human beings are born and die. Long ago Aristotle said: The corruption of one is the generation of another; matter loses one form only to receive another; and this can be expressed in modern terms with regard to energy by saying that a form of energy does not disappear without another appearing. Does it follow that the form which disappears is the first and all-sufficient cause of the one succeeding it? By no means; experimental science, which studies only the constant relations between phenomena, cannot declare itself either for or against the necessity for the intervention of a first invisible Cause for the transformation of energy. But, from the metaphysical point of view, one motion does not give rise to another except with the invisible concurrence of the First Being, which is the cause of all being as such, of the Prime Mover who is the supreme cause of the activity of secondary causes. Likewise, from the metaphysical point of view, a local motion cannot be perpetuated in a void, cannot be a perpetual transition from potency to act, without the invisible intervention of the pure Act, the supreme cause of all actualization. To maintain with Descartes that for this, it is sufficient that God conserve the motion, we must understand by this expression that God continues to move.

Thus only can the mechanical principles of inertia and conservation of energy be reconciled with the metaphysical principle of causality. Every other reconciliation, which rejects the necessity of the intervention of the first cause, is illusive. [The reconciliation of the principle of inertia with the law of universal attraction would have to be studied from the same point of view.]

It is not for the physicist to solve this problem; he cannot pronounce finally on the validity of the solution given by the metaphysics of the Schools; he must merely recognize that this solution is in no way opposed to what physics has the right to affirm about the validity of its principles in the phenomenal order.

On this point it gives us pleasure to publish a letter from Pierre Duhem, of the Academy of Sciences, in which he gives us a summary of the main ideas of his fine work, La Théorie physique [La Théorie physique, son object et sa structure].

The letter reads as follows:


"Dear Father: I owe you some explanations for certain ambiguous terms in my previous letter and especially for the name 'axiom' or 'so-called axiom' which I gave to the principle of inertia.

"I begin by stating precisely that I shall take the words mathematics, physics, and metaphysics according to the meaning generally given them by our contemporaries, not according to the meaning given them by Aristotle and the Scholastics

"In these circumstances, the law of inertia does not exist for the mathematician; the principles of the science of numbers and of geometry are the only ones that he has to admit; he is not concerned with the principles of mechanics and physics; if he happens to study the problems presented to him by the mechanist and physicist, he does so regardless of the way by which they have been led to formulate these problems.

"I consider, therefore, the principle of inertia only as it is for the physicist.

"One may say of it, then what may be said of all principles of mechanical and physical theories. These fundamental principles of hypotheses (in the etymological sense of the word) are not axioms, self-evident truths. Nor are they laws, that is, general propositions reached directly by induction from the teachings of experience.

"It may be that certain rational probabilities or certain facts of experience suggest them to us; but this suggestion is in no way a demonstration; it does not confer on them, of itself, any certitude. From the point of view of pure logic, the fundamental principles of the theories of mechanics and physics can be looked upon only as postulates freely posited by the mind.

"From the ensemble of these postulates, deductive reasoning deduces an ensemble of more or less remote consequences which agree with the perceived phenomena; this agreement is all that the physicist expects from his postulated principles.

"This agreement confers a certain probability upon the fundamental principles of the theory. But it can never confer certitude on them, for it can never be demonstrated that, if other postulates were taken as principles, consequences would not be deduced which would agree just as well with the facts.

"Besides, it can never be affirmed that some day new facts will not be discovered which no longer agree with the consequences of the postulates that had been posited as being at the basis of the theory: new facts compelling us to deduce a new theory from new postulates. This change of postulates has been effected many a time in the course of the development of science.

"From these considerations two consequences follow: (1) We shall never have the right to affirm categorically of any one of the principles of the mechanical and physical theory, that it is true. (2) We are not allowed to affirm of any one of the principles on which the mechanical and physical theory rests, that it is false, so long as there has been no discover of phenomena that disagree with the consequences of the deduction of which this principle constitutes on of the premises.

"What I have just said applies particularly to the principle of inertia. The physicist has not the right no say it is certainly true; but still less has he the right to say it is false, since we have so far met with no phenomenon (if we leave out of consideration the circumstances in which the free will of man intervenes) that compels us to construe a physical theory from which this principle would be excluded.

"All this is said without going beyond the domain of the physicist, for whom the principles are not affirmations of real properties of the bodies, but premises of deductions the consequences of which must be in agreement with the phenomena every time that a free will does not intervene to disarrange the determinism of the latter.

"To these principles of physics, can we and must we make certain propositions correspond which would affirm certain real properties of bodies/ To the law of inertia, for instance, must we make the affirmation correspond that there is, in every body in motion, a certain reality, an impetus, endowed with such or such characteristics? Do these propositions apply or not to other beings endowed with free will? These are problems that the method of the physicist is incapable of grappling with and it leaves them to the free discussion of the metaphysicians.

"There is only one case which would induce the physicist to be opposed to this liberty of the metaphysician. It is that in which the metaphysician would formulate a proposition directly contradicting the phenomena or a proposition which, introduced in virtue of a principle in the physical theory, would lead to consequences in contradiction to the phenomena. In this case, there would be just grounds for denying the metaphysician the right to formulate such a proposition.

"Now you have, Reverend Father, the summary of what I would say if I were ever to write, concerning the principle of inertia, the article that you so kindly wish me to write

P. Duhem


N.B. Conclusions more or less like those of Duhem are expressed by E. Meyerson. In his Identité et Réalité (1908), he examines, from the point of view of experience and of philosophic reason, the validity of the principles of inertia and of conservation of energy. The author goes so far as to say, what seems to us quite right, that "the principle of inertia demands that we view motion as a state; if motion is a state, it must maintain itself like every state. … The principle of inertia demands that we view speed as a substance. Now this is an entirely paradoxical concept for the immediate understanding" (pp. 132, 134).

Professor Gustavo Pécsi, in his Crisi degli assiomi della Fisica Moderna, translated from the German (1910), goes further still and believes he can prove absolutely the falsity of the principle of inertia which would end in this contradiction: that motion is essentially motionless, that there is nothing new in it (p. 201).


Cf. also Stanley L. Jaki's "The Physicist and the Metaphysician."

S'il vous plaît écrivez-moi avec des erreurs que vous pourriez trouver ou questions que vous pourriez avoir.

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