LLee ss M ddiixx M aatte aan err nss BBo ddee onn ii CC ll’’IInn oonn ssttiit ssiill tuutt iiii Anno XII - Semestre I n. 2 - Sped. abb. post. - (50 % - TO) - Tassa Riscossa, Taxe perçue - Torino CMP N. 40 Edition française - Janvier 1996 2 “Sodalitium” Périodique - Bulletin Officiel de l'Institut Mater Boni Consilii - Loc. Carbignano, 36 - 10020 VERRUA SAVOIA (TO) - Italie - Téléphone de l'Italie 0161-839.335; Fax 0161- 839.334 - Téléphone de France 19.39.161.839.335 - C/CP 24681108 - Directeur de la publication: M. l'abbé Francesco Ricossa Aut. Trib. n. 116 du 24-2-84 - Imprimé en Italie par l'Institut Mater Boni Consilii. Sommaire Editorial Islam et Judaïsme “Le Pape du Concile” (XVIIème partie) L’Infaillibilité de l’Eglise L’Osservatore Romano La voix du Pape La Sainte Vierge et son amour RECENSIONS: ...A propos de l’Opus Dei Le célibat ecclésiastique Un roman dangereux Entre ésotérisme et dévotion ou relations dangereuses de certains dévots... Vie de l’Institut Editorial D ix ans. Tout ce temps est passé depuis ce 18 décembre 1985, où est né, à Turin, l’Institut Mater Boni Consilii. En ce jour, quatre prêtres italiens quittaient les maisons de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, l’œuvre fondée par Mgr Lefebvre en 1970, et de Montalenghe, Albano Laziale et Paris, se retrouvèrent à Turin, hôtes précaires et provisoires d’autres personnes; nous pourrions dire: sans domicile fixe... Nous avions rejoint, dans les années 70 de notre jeunesse, Mgr Lefebvre avec enthousiasme, sûrs de suivre, en sa personne d’Evêque catholique fidèle à la Tradition de l’Eglise, l’Eglise elle-même. Notre confiance était si grande, combien fut plus grand encore notre désarroi, en nous rendant compte que la position de la Fraternité, pragmatique plus que doctrinale, de toute façon contradictoire, n’était pas en tous points celle de l’Eglise. Pouvions-nous ne pas nous cacher à nous-mêmes, et aux âmes qui nous faisaient confiance, que nous nous trouvions sur une mauvaise voie; mais où était la bonne voie? Où était la Vérité? p. 2 p. 4 p. 20 p. 36 p. 56 p. 65 p. 66 p. 69 p. 71 p. 72 p. 75 p. 78 “Dans les doutes, pense à Marie, invoque Marie”. Ces mots de St Bernard nous les avons vécus, nous mettant alors sous le patronage de la très Sainte Vierge, Mère du Bon Conseil... Cette bonne Mère nous conseillerait, nous protégerait. Le 24 septembre 1986, nous faisions connaissance à Raveau de Mgr Guérard des Lauriers, religieux dominicain, théologien, déjà Evêque à ces moment-la, qui comme nous, avant nous, avait dû, par amour de la Vérité, s’éloigner d’Ecône (après s’être éloigné aussi du Saulchoir et de l’Université du Latran). Sa position sur la situation de l’Autorité dans l’Eglise après Vatican II nous parut, nous paraît toujours, l’unique position pleinement conforme à l’enseignement de l’Eglise: le numéro 13 de Sodalitium diffusa en conséquence notre amende honorable publique pour les erreurs passées, et notre adhésion à la thèse théologique sur le Siège Apostolique formellement vacant, dite “Thèse de Cassiciacum”. C’est sur cette thèse que se fonde la légitimité de notre apostolat dans l’Eglise et pour l’Eglise, catholique, apostolique et romaine, dans l’attente que, dans la personne d’un légitime Successeur de Pierre, elle reconnaisse canoniquement notre petit Institut. Sur la couverture: L’image sacrée de Notre-Dame Mère du Bon Conseil, vénérée au sanctuaire de Genazzano et Patronne de notre Institut qui a fêté en 1995 son dizième anniversaire. 3 Durant ces dix années, si les épreuves ont été nombreuses (la plus grave de toutes: l’abandon d’un des quatre fondateurs, et notre premier supérieur), nombreuses aussi ont été les grâces. Si nous pensons à ces premiers temps, sans une maison, sans même une chaise... Aujourd’hui l’Institut a deux maisons, l’une à Verrua, en Italie, l’autre à Raveau, en France. Une autre dans l’attente d’être ouverte en Argentine. Au Séminaire Saint Pierre Martyr sept séminaristes étudient, tandis que deux ont déjà été ordonnés prêtres. La Croisade Eucharistique organise chaque été deux colonies, une pour les garçons, une pour les filles, et un camp pour les adolescents. L’Association Mater Boni Consilii est reconnue comme personne morale, et agit activement, en venant en aide aux personnes dans le besoin et aux familles nombreuses. Un livre a déjà été publié, un autre est en cours d’impression, par Sodalitium, et notre revue, dans l’édition italienne et française, est toujours plus diffusée et connue. Chaque année, les Exercices Spirituels sont prêchées à cinq reprises, chaque dimanche nos prêtres partent célébrer la Sainte Messe, rejoignant désormais, alternativement, 14 endroits différents. Pour la gloire de Dieu, et la sanctification des âmes, ont été construites et bénies, l’église des Saints Apôtres Pierre et Paul à Verrua, et la chapelle du Sacré-Cœur à Turin. Et cela n’est que l’aspect extérieur, puisque Dieu seul connaît le nombre (et surtout la valeur) des âmes qui sont venues à Lui, qui se sont sanctifiées, qui se sont sauvées, au moyen du petit instrument qu’est l’Institut. Malheureusement, il y a aussi nos péchés, nos erreurs... De tout cela, demandons pardon à Dieu, et à ceux que nous aurions éventuellement offensés, alors que nous remercions Dieu, la très Sainte Vierge, et tous nos bienfaiteurs, pour les grâces reçues et le bien que nous avons pu faire. L’Institut, ses 14 membres, ses si nombreux et très chers amis, certains de ceux qui nous ont précédés en quittant cette terre, se mettent à nouveau aujourd’hui, comme il y a dix ans, sous la protection de Notre-Dame du Bon Conseil. Qu’Elle nous guide toujours et nous conserve dans la fidélité à son divin Fils, Notre-Seigneur Jésus-Christ, et à Son Eglise. Nous sommes pleinement soumis à l’Eglise catholique, à son enseignement, à son Autorité, prêts à croire ce qu’elle nous propose de croire, à rejeter ce qu’elle veut que nous rejetions. Simple association de fidèles (selon le canon 707 du C.J.C.), l’Institut n’a pas d’autre ambition que celle de représenter, pour qui le désire, et à côté d’autres associations de fidèles, “en ces temps de désorientation, un instrument pour persévérer dans la fidélité absolue au dépôt de la foi révélé par Dieu et proposé par le Magistère infaillible de l’Eglise” et de tous ses Souverains Pontifes (Statuts, II, a). Avec le secours de la grâce de Dieu, sans laquelle nous sommes incapables de faire le moindre bien, nous sommes prêts à donner aussi notre vie pour Jésus-Christ et Son Eglise, que nous aimons du plus profond de notre cœur, unissant ainsi notre pauvre sacrifice à celui, oblation pure et sans tache, que Jésus offre à la Très Sainte Trinité, chaque jour sur l’autel, au moyen de nos mains sacerdotales. Le 18 décembre, donc, sera une grande fête pour nous tous. Confions notre passé à la miséricorde de Dieu, et notre futur à Sa Providence, avec un seul idéal et une seule intention: adveniat Regnum Tuum, fiat Voluntas Tua, sicut in cœlo et in terra: que soit faite, ô Seigneur, par nous et par toutes les âmes, Votre Volonté, que Votre Règne arrive, dans les cœurs, dans les familles, dans les sociétés et dans les états. Mater Boni Consilii, ora pro nobis! Par cette gravure représentant une séance du Concile de Trente, Sodalitium a souhaité - avec un léger retard commémorer le 450ème anniversaire du début de ce Concile. A l’issue de sa dernière séance, les Pères conciliaires votèrent par acclamation: “Anathema cunctis hæreticis” (Excommunication pour tous les hérétiques). 4 La question juive ISLAM ET JUDAISME Par M. l’abbé Curzio Nitoglia LA THESE DU PERE THERY E n 1955 le célèbre théologien dominicain, le Père Théry (1), sous le pseudonyme de Hanna Zakarias, publiait “De Moïse à Mohammed”, deux gros volumes réunis par la suite en un seul “Vrai Mohammed et faux Coran” (2), dans lequel il étudiait de manière approfondie la question des origines de l’Islam. Dans le présent article j’essayerai de résumer et d’illustrer les thèses contenues dans ses livres, les corroborant aussi par d’autres études sérieuses et en me renforçant de l’avis d’un célèbre orientaliste de l’Université de Turin. Les textes du Père Théry ne se trouvent plus dans le commerce, mais l’essentiel de sa thèse a été repris par l’abbé J. Bertuel, dont l’œuvre est encore disponible dans les librairies françaises (3). Bonnet-Eymard écrit du Père Théry qu’il «doit être considéré comme le fondateur de l’“exégèse scientifique” du Coran…, bien qu’il demeure… le grand absent de toutes les bibliographies. Il est certain que l’anonymat [ou le pseudonyme de H. Zakarias n.d.r.] et l’édition privée, voulus pour ne pas exposer à de terribles représailles les religieux et les prêtres travaillant en terre d’Islam, ont desservi son œuvre. Publié sous le vrai nom de son auteur, médiéviste honorablement connu dans le monde de la recherche scientifique, elle n’eût sans doute pas joui d’un accueil plus favorable de la part des islamisants, mais elle les eût forcés à controverser à visage découvert. Feignant d’ignorer l’identité de Hanna Zakarias qui, très rapidement, ne fut plus un secret pour personne, ils purent le présenter, sans risque, “de bouche à oreille, comme un bluffeur et un ignorant; le mépris de l’auteur rejaillissait évidemment sur son œuvre”» (4). Ce ne fut seulement qu’en 1960 (5), un an après sa mort, que la revue des dominicains de Rome Angelicum leva officiellement l’anonymat sur l’œuvre de Théry, en résumant de manière concise mais avec exactitu- de le contenu des deux premiers volumes (6). Les conclusions auxquelles parvient l’éminent théologien et historien dominicain peuvent être résumées ainsi: 1) L’Islam est seulement la religion juive postmessianique, expliquée aux arabes par un rabbin. 2) Mahomet n’a jamais été inspiré par Dieu. Il se convertit au Judaïsme talmudique, poussé par sa femme Khadidja, juive de naissance, et aidé par son maître, le rabbin de La Mecque, à réaliser son projet de judaïsation de l’Arabie. 3) Le Coran a été composé et rédigé par le rabbin de La Mecque et Mahomet était seulement un “prosélyte de la porte”. 4) Le Coran primitif (traduction et abrégé arabe du Pentateuque de Moïse) a été rédigé par un rabbin juif, mais après Mahomet fut perdu (VIIème s.). L’actuel Coran ne contient plus, comme le premier, la traduction et l’adaptation de l’histoire sacrée d’Israël; c’est seulement un livre d’anecdotes, d’histoires, presque une sorte de rapport dressé par l’auteur lui-même sur ses affaires apostoliques, qu’il aurait fallu appeler plus correctement “Les Actes de l’Islam”. Ces “Actes” constituent la seule source authentique qui nous permettent de connaître les origines de l’Islam, c’est-àdire en substance la judaïsation de l’Arabie, dont le rabbin de La Mecque, Mahomet et sa femme Khadidja furent les premiers auteurs. Seule l’étude critique des “Actes de l’Islam” (ou actuel Coran) peut nous fournir une base solide pour une reconstruction des origines de l’Islam, c’est-à-dire de la conversion de l’Arabie au Judaïsme talmudique. Les juifs étaient présents en Arabie et habitaient dans les différents oasis du désert arabique et dans les trois cités de Médine, La Mecque et Taif. Ils étaient particulièrement nombreux à Médine (plus de la moitié de la population). Les chrétiens étaient moins nombreux que les juifs, mais n’étaient pas des catholiques romains; ils appartenaient au contraire à des sectes hérétiques, telles que le Jacobisme et le Nestorianisme, et au Christianisme d’Abyssinie, fortement mélangé d’éléments juifs. 5) Les “Actes de l’Islam”, justement parce qu’écrits par un rabbin, sont essentiellement antichrétiens. Les musulmans ne sont rien d’autre que des arabes convertis au Judaïsme talmudique à partir du VIIème siècle. 5 La “Ka‘ba” d’après une ancienne miniature turque LA MECQUE Au VIème siècle La Mecque devint l’un des plus importants centres commerciaux de la péninsule arabe. Là, depuis le IIème siècle, selon le Père Théry, existait le temple de la “Ka’ba”, une sorte de caisse actuellement longue de 12 mètres, large de 10 et haute de 15, posée sur un piédestal de marbre de 25 cm et couverte d’un tapis noir changé chaque année. Dans la “Ka’ba” on trouve une pierre noire, visible encore aujourd’hui (7), dont on ignore la provenance et la datation; selon les musulmans elle fut portée directement par l’Archange Gabriel. Au VIème siècle la “Ka’ba” était aussi pleine de pierres grises récoltées dans les déserts d’Arabie, considérées comme divinités et adorées comme telles; la majeure partie des personnes qui la fréquentait était formée d’arabes polythéistes, qui vénéraient outre la pierre noire encastrée dans la “Ka’ba”, les pierres et les idoles qu’elle contenait (8). A La Mecque, selon la thèse du Père Théry, vivait aussi une communauté juive, dirigée par un rabbin très bien formé, fin connaisseur du Talmud, qui aurait conçu le projet de convertir les arabes polythéistes à la religion post-biblique. Pour atteindre son but il se serait servi d’un jeune arabe, Mahomet, marié à une jeune juive Khadidja; telle est en résumé selon le Père Théry, l’histoire des origines de l’Islam: la conversion des polythéistes arabes au Judaïsme talmudique. NAISSANCE ET MARIAGE DE MAHOMET On considère habituellement que Mahomet est né en 580, même si l’on a pas une documentation certaine. Sa famille était pauvre, comme l’atteste le rabbin de La Mecque dans les “Actes de l’Islam” (l’actuel Coran) (9), et, resté orphelin très vite, il paraît avoir été recueilli par son oncle Abu Tàlib, caravanier de La Mecque. C’était un enfant éveillé et intelligent, et son oncle l’emmenait souvent avec lui dans les caravanes qu’il conduisait à Gaza. Mahomet se maria avec Khadidja (10), une femme plus âgée que lui mais très riche, de caractère fort et entreprenant, s’il est vrai, comme l’affirme le Père Théry, que c’est elle qui prit l’initiative du mariage et par conséquent était volontaire et dominatrice d’un mari craintif de perdre sa position. “A l’âge de 25 ans Mahomet se maria” (11). Ce mariage avec une juive explique l’évolution du jeune arabe, puisque sa femme le poussera à abandonner les idoles de la “Ka’ba” pour adhérer à la religion judaïque post-biblique; après elle ce sera le rabbin de La Mecque qui le formera à la religion d’Israël et le lancera au milieu des arabes comme son porte-voix. LA CONVERSION DE MAHOMET AU JUDAISME Le culte des idoles est encore très répandu à La Mecque quand une voix commence à prêcher un message nouveau aux oreilles des polythéistes arabes. “Je le jure par Allah (lire: Yahwé), qui a créé le mâle et la femelle. Celui qui fait l’aumône et qui craint Dieu sera récompensé. Quant à celui qui est avare, empli de suffisance, il sera précipité dans l’abîme. A quoi lui servira sa fortune? Je vous avertis dès maintenant d’un feu qui flamboie, réservé pour celui qui ne craint pas ” (12). Comme il connaît bien l’Ancien Testament cet orateur de La Mecque, qui divise l’humanité en deux catégories: ceux qui craignent Dieu, ceux qui croient à la Résurrection, au Jugement, au Ciel et à l’Enfer et les infidèles, les avares, les orgueilleux! Dans ses prédications nous retrouvons des réminiscences vétérotestamentaires et talmudiques: “Je le jure par le figuier et l’olivier, je le jure par le Mont Sinaï …Ceux qui croient et font le bien recevront une rétribution” (13). Mais quel est ce prédicateur qui ridiculise les idoles de la “Ka’ba”, qui annonce l’existence d’un Dieu unique (“Yahwé” en hébreu, “Allah” en arabe), qui jure sur le figuier et sur l’olivier, les deux arbres de la félicité terrestre de l’Ancien Testament? C’est certainement quelqu’un qui 6 connaît et qui annonce la religion d’Israël. Si, ensuite, on applique la critique historique, on est obligé de conclure, selon le Père Théry, que ce prédicateur est un juif. C’est l’orateur même qui nous propose cette conclusion avec ses affirmations: “Tout ce que je vous annonce est contenu dans des feuilles vénérées” (14), “les feuilles de Moïse et d’Aaron” (15). “Mecquois idolâtres, vous ne savez donc pas que le Dieu Créateur a parlé? Oui, il a parlé ici, sur le Mont Sinaï, à Moïse! C’est Yahwé (le Dieu unique) qui a révélé à Moïse le “Coran hébreu”, le seul Coran (Livre Saint) qui ait jamais existé, le Coran glorieux du Mont Sinaï” (16). A partir de ce texte le rabbin de La Mecque donnera une traduction en arabe et sera le premier Coran arabe écrit, puis perdu et remplacé par l’actuel “Coran”, qui peutêtre serait appelé avec plus d’exactitude “Actes de l’Islam”. Les discours qu’on y trouve ne contiennent rien qui ne soit pas juif, ou mieux vétérotestamentaire, et corroborent la thèse que l’auteur est un juif qui connaît de manière approfondie l’Ancien Testament et le Talmud, c’est-à-dire le rabbin de La Mecque. L’auditoire du rabbin cependant ne veut pas renoncer à ses idoles ancestrales pour se convertir au Dieu unique “Yahwé”. Parmi les assistants il y a cependant un jeune arabe qui a épousé une juive: et le soir Mahomet, clandestinement, poussé par sa femme, va chez le rabbin pour connaître la nouvelle religion. Il apprend ainsi qu’il y a un seul Dieu, que ses paroles ont été recueillies par Moïse sur le Mont Sinaï et ont été écrites dans un Livre (le Pentateuque), en arabe appelé CORAN. Etant donné que Mahomet n’est pas en mesure de lire et de comprendre le Coran juif, ce sera au rabbin de lui lire et de lui expliquer oralement les histoires d’Abraham, Isaac, Jacob, Joseph, Moïse. Mahomet apprit aussi la nouvelle profession de foi enseignée par le rabbin: “Il est unique Yahwé; Yahwé, il est seul. IL N’A PAS ENGENDRE et n’a pas été engendré. PERSONNE N’EST EGAL A LUI” (17). Quelle belle profession de foi judaïcotalmudique et antichrétienne (le Père N’A PAS ENGENDRE le Fils; en Dieu il N’ y a PAS TROIS PERSONNES EGALES et distinctes)! Mahomet ne cache plus sa conversion, il l’a rend publique, rompt tous les liens avec l’idolâtrie de la “Ka’ba”. La Mecque est secouée: cet arabe marié à une juive ne risque peut-être t-il pas de ruiner le vieux Panthéon de la cité? La “Ka’ba” est l’un des sanctuaires les plus riches du pays, et Mahomet arrive pour le ruiner! Face à ces accusations que lui lançaient ses compatriotes il y avait la protection du rabbin sur son disciple: “Dis-leur, Mahomet: O Infidèles! Je n’adorerai pas ce que vous adorez. Et vous, vous n’adorez pas ce que j’adore. … A vous, votre religion. Moi, j’ai la mienne” (18). Selon le Père Théry, à côté de Mahomet il n’y a jamais eu d’“Allah” révélateur, mais seulement un juif, qui lui a raconté les histoires des Patriarches contenues dans le Pentateuque de Moïse. Le Père dominicain arrive à cette conclusion après avoir prouvé que la conversion de Mahomet au Judaïsme, a eu lieu sous la forte pression de sa femme, à la limite du chantage psychologique, conversion qui devait servir à la judaïsation de la race arabe, comme il était dans l’intention du rabbin de La Mecque. “Un seul fait est certain, qui ressort de la lecture... des “Actes de l’Islam”: un arabe, Mahomet, mari de Khadidja, après avoir suivi les leçons d’un rabbin, s’est converti au Judaïsme parmi les arabes. …Mahomet ne sera rien de plus que le porte-parole d’un juif, l’élève d’un rabbin, pour une entreprise strictement et absolument juive” (19). LA FORMATION RELIGIEUSE DE MAHOMET ET SON APOSTOLAT Mahomet désormais sait que les idoles de la “Ka’ba” sont muettes, que Dieu n’a pas parlé. “Oh! Quelle nuit solennelle que cette nuit de la Révélation!” (20). Elle advint sur le Mont Sinaï, Moïse était accompagné de tout le peuple élu au pied de la montagne, une voix l’appela et Dieu lui révéla la Loi, lui remit un Code, le Coran, qui est autant un livre religieux qu’un code législatif, en hébreu “Torah” (le message religieux de “Yahwé” et sa loi). Et le Coran juif ou “Torah” aurait dû diriger tous les hommes (21). En conclusion pour le Père Théry, ce n’est pas “Allah” qui a révélé à Mahomet l’histoire d’Israël, Mahomet n’est pas un prophète mais seulement l’élève dévot d’un rabbin, le mont Hirà, comme copie du Sinaï n’existe pas: Mahomet, en substance, est seulement le canal à travers lequel filtre l’enseignement rabbinique pour la judaïsation de l’Arabie. Les arabes qui ensuite ont suivi Mahomet ont graduellement mis de côté l’origine judaïco-rabbinique de 7 l’Islam, pour affirmer et marquer toujours plus la révélation d’“Allah” à Mahomet pour la gloire des arabes eux-mêmes, qui ont donc supplanté les juifs dans leur mission. LES ENSEIGNEMENTS DU RABBIN A MAHOMET Avec la conversion de Mahomet au Judaïsme, selon le Père Théry, le travail du rabbin n’est pas fini, puisque sa vraie fin était la conversion de tous les arabes à la Synagogue juive. Sa mission maintenant est de former l’esprit du néophyte, d’en faire un apôtre du Judaïsme parmi ses compatriotes; Mahomet sera ainsi instruit profondément sur l’histoire d’Israël, apprendra à prier comme les juifs, à se prosterner vers l’orient, à invoquer le nom du Dieu Unique (mais non en trois Personnes!). Parmi les connaissances religieuses, “Les Actes de l’Islam” n’apportent rien de nouveau à la littérature judaïco-talmudique et à l’histoire sacrée de l’Ancien Testament: un paradis terrestre, ou mieux charnel, est promis à ceux qui se soumettront au Dieu Unique d’Israël. L’apologétique utilisée pour la conversion des arabes se fonde non sur des motifs de crédibilité et sur des “preambula fidei”, mais sur les instincts plus élémentaires de l’homme, sur la promesse d’une vie future de plaisirs séduisants en échange de la conversion au Judaïsme (22). Poussé par sa femme, dressé par le rabbin, le jeune chamelier ne pouvait laisser échapper l’occasion qui se présentait à lui: il devint l’apôtre du Judaïsme parmi les arabes. REACTION DES HABITANTS DE LA MECQUE FACE A LA PREDICATION DE MAHOMET Face à la prédication de l’histoire sacrée d’Israël, les habitants de La Mecque répondent mal et avec animosité. Ils ne veulent pas suivre le jeune arabe qui s’est converti à la religion de sa femme. Même s’il est encouragé par le rabbin, Mahomet est découragé et est tenté de retourner à sa vieille idolâtrie. “Ils ont été sur le point de te séduire et de t’éloigner de ce que nous t’avons révélé” (23). LE CORAN ARABE: LE “CORABOR” ET LE “CORABECRIT” Selon le Père Théry l’objection des Mecquois, selon laquelle le Coran révélé par Dieu à Moïse est écrit en hébreu et que par conséquent ils ne peuvent ni le lire ni le comprendre, conduit le rabbin à le récrire en arabe. Dans la première phase de l’apostolat du rabbin on ne trouve pas trace d’un texte religieux pour les arabes; dans la seconde, au contraire, qui commence par la sourate LXXX, le rabbin raconte aux idolâtres qu’il existe un livre de Vérité et de direction, composé de feuillets très anciens, écrits par Abraham, Moïse, Aaron. Ces feuillets forment le Coran, c’est-à-dire un Livre ou livre de Moïse. Cependant quand le rabbin, dans la sourate LXXXV, 21, parle pour la première fois d’un Coran glorieux “sur une table gardée”, il se réfère encore au Coran de Moïse (ou Pentateuque) en langue hébraïque. Ce n’est seulement que dans les “Actes de l’Islam” qu’il sera fait allusion à un Coran en langue arabe (24): “Nous l’avons rendu facile pour ta langue”, et aussi “Nous l’avons révélé sous forme de révélation arabe” (25). En conclusion, le Coran en arabe apparaît comme l’œuvre d’un rabbin qui a traduit et adapté en langue arabe le Pentateuque mosaïque et ne contient aucun nouveau dogme, aucune originalité, aucune nouvelle Révélation. “Allah” n’est rien d’autre que la traduction arabe de “Jahwé” (le Dieu Unique). Le Coran a pour auteur “Jahwé”, qui l’a confié en langue hébraïque à Moïse en 1280 avant J.-C. et a été porté à la connaissance des arabes par une traduction du VIIème siècle après J.-C. Selon le Père Théry, Mahomet confiera le Coran arabe à ses compatriotes en deux moments successifs, d’abord oralement et dans un second temps par écrit. La première étape est celle du “CORABOR” (CORan AraBe ORal), la seconde celle du “CORABECRIT” (CORan AraBe ECRIT), traduction en arabe du Coran juif de Moïse. LA COMPOSITION DU CORAN ET L’ACTIVITE LITTERAIRE DU RABBIN DE LA MECQUE Récitons les versets 86-87 de la sourate XV: “En Vérité, ton Seigneur est le Créateur, l’Omniscient Nous t’avons déjà apporté SEPT (VERSETS) DE LA REPETITION et LE CORAN SUBLIME”. Ces deux versets sont adressés par le rabbin à Mahomet pour lui dire que son Seigneur est le Créateur, et non les idoles de la “Ka’ba”. Leur auteur est celui qui a déjà composé les sept versets de la Répétition et 8 le Coran sublime, c’est-à-dire le même rabbin qui a composé les “Actes de l’Islam” et le Corabécrit. 1) LA “PRIERE DES LAUDES” OU “LES SEPT VERSETS DE LA REPETITION”. L’auteur est évidemment un juif: “Ton Seigneur est l’Omniscient”, il ne s’agit donc pas des idoles de la “Ka’ba”. En affirmant ensuite avoir déjà “apporté les sept versets de la Répétition”, il rappelle à l’élève avoir déjà composé “sept versets” spéciaux avant le Corabécrit. Ces versets en effet sont bien différents de ceux contenus dans le Corabécrit, et forment un tout très net, concret, bref: ils sont destinés à une répétition fréquente; d’où le nom de “Versets de la Répétition”. Ils sont courts, récités fréquemment, par conséquent sont une prière; c’est la prière en sept versets dont les musulmans font précéder leur recueil des sourates. Pour arriver à cette conclusion le Père Théry se fonde sur l’exégèse du verset 87 de la Sourate XV des “Actes de l’Islam”, qui déclare: “Nous t’avons déjà apporté sept (versets) de la Répétition et le Coran sublime”. Il démontre que cette prière a été composée déjà à l’époque de la sourate XV et est postérieure au Corabor, que le rabbin racontait à Mahomet. Durant cette période il n’y a aucun écrit arabe du rabbin de La Mecque, qui se sert uniquement du “Coran” de Moïse (ou Pentateuque) en hébreu, pour faire le “catéchisme” à Mahomet en langue arabe, en le transformant ainsi en Corabor. En outre, le rabbin parle d’abord des “Sept Versets de la Répétition” et ensuite du “Coran Sublime”, donnant une priorité chronologique à la “prière des Laudes” par rapport au Corabécrit, rédigé dans un but apologétique comme concession aux arabes, hostiles à la prédication de Mahomet, de connaître directement d’un texte écrit la Révélation de Yahwé sur le Mont Sinaï. La “Prière des Laudes”, à l’inverse, contemporaine du “Corabécrit” n’est pas une œuvre apologétique, et, s’adressant aux arabes DEJA convertis au Judaïsme, suppose l’existence d’une communauté de musulmans désormais convertis au Dieu d’Israël, après avoir abandonné les idoles de la “Ka’ba”. 2) LE CORAN ARABE ECRIT (CORABECRIT). Alors qu’il composait la “Prière des Laudes”, le rabbin travaillait aussi à la traduction en arabe du Coran de Moïse, le Corabécrit ou Coran sublime dont parle la sourate XV, verset 87. Mais que signifie exactement Coran? C’est un écrit destiné à la récitation, un livre qu’on lit à haute voix et qu’on psalmodie, et c’est aussi un livre d’enseignements. En traduisant et en adaptant en arabe le Pentateuque mosaïque le rabbin avait comme but unique celui d’enseigner aux arabes la révélation sinaïtique; c’est pour cela que le Corabor et le Corabécrit ne sont rien d’autre qu’une répétition (orale et écrite) du Coran de Moïse. Dans les “Actes de l’Islam” (l’actuel Coran) on lit: “Le Livre de Moïse est un modèle (un guide) de la Miséricorde divine” (26). Dieu est l’auteur des vérités qu’il contient, les ayant révélées à Moïse en 1280 sur le Mont Sinaï, comme le confirment les sourates du Coran arabe: “Il (Coran) est la confirmation de ce qui était avant lui (Pentateuque). Il n’est que l’explication du Livre du Seigneur des Mondes” (27). “Avant celui-ci (le Coran arabe), il y avait le Livre de Moïse... Et c’est un livre confirmant l’autre, en langue arabe” (28). 3) LES ACTES DE L’ISLAM. Aujourd’hui nous connaissons un livre appelé improprement “Coran”, qui comprend 114 chapitres ou sourates et 6.226 versets. Il n’y a pas identité - affirme le Père Théry - entre le Coran arabe, composé par le rabbin de La Mecque au VIIème siècle, et le Coran officiel que nous possédons aujourd’hui (qu’il serait mieux de définir “Actes de l’Islam”); en définitive le “Coran” actuel n’est pas l’original. En effet aux versets 86-87 de la XVème sourate l’auteur rappelle à Mahomet qu’il a déjà composé deux œuvres, une “Prière des Laudes” et le “Coran Sublime”: cette affirmation montre qu’il est donc aussi l’auteur d’une TROISIEME ŒUVRE, l’actuel qui comprend la XVème sourate. C’est pourquoi nous nous trouvons en présence de trois œuvres distinctes: Le mariage de Mahomet avec Khadidja, représentée voilée et avec la flamme autour de la tête (Miniature turque du XVIème siècle) 9 1. La Prière des Laudes ou Sept versets. 2. Le Coran arabe (oral ou écrit) [perdu]. 3. Un troisième écrit (qui inclut la sourate XV, dans laquelle aux versets 86-87 il est question des deux œuvres précédentes). C’est seulement en lisant les versets 86-87 que l’on peut conclure que l’œuvre à laquelle ils appartiennent, appelée vulgairement ou de manière erronée Coran, est nettement différente du “Corabor” ou du “Corabécrit”, et devrait s’appeler Pseudo-Coran ou “Actes de l’Islam”. Les différences existantes entre les deux œuvres, le Coran arabe et le “Coran actuel” sont de trois types. 1° DIFFERENCE CHRONOLOGIQUE. A l’époque de la sourate XV, le “Corabor” et le “Corabécrit” sont déjà terminés: “Nous t’avons déjà apporté le Coran Sublime”. On peut donc affirmer que le “Corabécrit” ait été composé au début de la seconde période de La Mecque: “Nous l’avons rendu facile pour ta langue, c’est-à-dire nous avons adapté en arabe le Coran hébreu de Moïse”. L’adaptation du Coran de Moïse est désormais terminée quand le rabbin écrivait les “Actes de l’Islam” qui contiennent la sourate XV; mais le livre à laquelle elle appartient n’est pas encore achevé entièrement: commencé avec l’apostolat du rabbin, il en raconte les péripéties et le suit tant qu’il est en vie. Il sera terminé seulement avec la fin de l’apostolat du rabbin par la conversion de Mahomet et à travers lui de tout le peuple arabe. Par sa nature ce livre, qui est comme un journal de la vie apostolique du rabbin de La Mecque, et a des similitudes avec “Les Actes des Apôtres” des chrétiens, a été défini par le Père Théry les “Actes de l’Islam”, probablement terminé dans sa version définitive à Médine, même s’il a été commencé à La Mecque. 2° DIFFERENCE DE BUTS. Le Coran arabe est essentiellement: a) un livre de prières juives, destinées à faire prendre conscience de la Providence de Dieu aux arabes de La Mecque, à leur faire abandonner le polythéisme pour embrasser la foi en Yahwé. b) C’est aussi un livre liturgique: comme on récite la Torah (ou Coran juif) en hébreu dans les synagogues, ainsi les judéoarabes ou musulmans (soumis à Yahwé, Dieu Unique d’Israël) devront dans leurs assemblées réciter le Coran arabe, en langue arabe. Les Actes de l’Islam, au contraire, ne sont ni un livre de prières, ni un livre liturgique, mais la chronique du travail apostolique du rabbin de La Mecque et de Mahomet. 3° DIFFERENCES LITTERAIRES. - Le Coran arabe devait être essentiellement un livre dogmatique, d’enseignement, stable et immuable. - Les Actes de l’Islam nous racontent, au contraire, les mille péripéties de l’affirmation, à La Mecque, de la religion judéo-rabbinique et les violentes luttes de la période de Médine. C’est une vraie CHRONIQUE qui nous raconte les réactions des habitants de La Mecque qui ne voulurent pas renoncer à leurs idoles et aux gestes de Mahomet, sous l’influence de Khadidja et du rabbin. «Bref, – conclut le Père Théry – le livre des “Actes”, que tout le monde appelle aujourd’hui “le Coran”, n’est pas le Coran arabe, ou adaptation arabe du Coran de Moïse. Des trois œuvres composées en arabe par le rabbin de La Mecque, on a conservé, jusqu’à maintenant la “Prière des Laudes” et “Les Actes de l’Islam”» (29). LE SORT DU CORAN ARABE LE CORAN ARABE EST PERDU. Une question surgit spontanément: “Quelle fin a-t-il eu?” Il faudrait chercher dans la masse des manuscrits arabes pour voir s’il existe une version arabe du Pentateuque et une fois trouvée la confronter avec les courts récits de l’histoire sacrée de Moïse que nous trouvons dans les “Actes de l’Islam”. Le fait certain - selon le Père Théry - est que le vrai Coran arabe est perdu. Il n’était rien d’autre que l’explication des principales histoires de l’Ancien Testament écrites en hébreu. Aujourd’hui personne ne possède ce livre. Les musulmans contemporains de Mahomet et de son maître le possédaient; les musulmans actuels ne le possèdent plus. L’unique écrit du VIIème siècle encore en leur possession est la “Prière des Laudes ” ou les “Sept versets de la Répétition”, mis comme prologue à leurs “Actes”, eux aussi du VIIème siècle. Cependant dans les “Actes de l’Islam” on trouve des EXTRAITS (en plus de l’histoire de la judaïsation de l’Arabie) du vrai Coran arabe. Les “Actes” ont donc une énorme importance pour la connaissance de l’existence de la date de l’auteur du “Corabécrit” et, partiellement, de son contenu. C’est comme si, par absurde, on avait perdu les quatre Evangiles, mais qu’on ait conservé les “Actes des Apôtres”. Grâce aux “Actes de l’Islam” nous sommes en mesure de connaître quelque 10 chose sur l’origine de l’Islam: même les “Actes” sont un livre juif, mais d’un Judaïsme DILUE, pour ne pas heurter la susceptibilité des arabes idolâtres. Le rabbin, d’après le Père Théry, se contente de parler de l’existence d’un Dieu Unique, de sa bonté, de la Résurrection. Quant à l’histoire sacrée qui constituait l’essence du vrai Coran, dans les “Actes” il y est à peine fait allusion, puisque des personnages de l’Ancien Testament (Moïse, Abraham, Noé, etc.) y sont seulement mentionnés et vaguement rappelés. La perte du Coran est un fait grave, mais est atténuée par la présence des “Actes”, qui en permettent une reconstitution partielle. Quant ensuite aux conjonctures sur le sort du Coran arabe authentique, on peut penser qu’il a été détruit à Médine par Othmàn ou Abu-Bakr, ou qu’il a été perdu… mais on ne peut pas avoir de certitudes dans ce sens. mis à Dieu) s’appelle ISLAM et n’est rien d’autre que la religion de la Synagogue judaïco-talmudique exportée en Arabie: Islam signifie donc SOUMISSION TOTALE A LA VOLONTE DE DIEU. “Celui que Yahwé (ou Allah, en arabe) désire garder, Il étend son cœur jusqu’à l’Islam [à la soumission totale de sa volonté à Dieu]” (31). Viendra un temps où les arabes, voulant faire oublier leurs origines judaïques (quant à la religion qu’ils embrassèrent au VIIème siècle avec Mahomet), se déclarèrent les seuls et authentiques MUSULMANS et non plus les MUSULMANISES; les seuls représentants de l’ISLAM et non les ISLAMISES. Ce sera le début du grand bluff religieux du bassin méditerranéen ( 32), qui nous présentera “Allah” révélant à son prophète Mahomet le Coran, c’est-à-dire la religion musulmane ou islamique comme quelque chose de propre aux arabes, nouveau peuple élu de Dieu, totalement “soumis” à sa Volonté. LES PREMIERS MUSULMANS La première période de La Mecque est caractérisée par l’apostolat du rabbin et la conversion de Mahomet au Judaïsme; la seconde par la présence du Coran arabe oral par lequel Mahomet catéchisera ses compatriotes. Il fait désormais partie des “prosternés” (30), qui dans la littérature rabbinique sont les adorateurs de Yahwé, c’est-à-dire les juifs. Mahomet prie prosterné comme eux, fréquente la synagogue, a leur ’foi’. Il réunit les arabes pour les faire devenir eux aussi des prosternés. Il faut ici analyser une parole fondamentale, qui suffit à elle seule à nous faire comprendre l’essence de l’Islam. Les grands de l’Ancien Testament furent grands parce que SOUMIS A DIEU et le Coran arabe les présente comme des modèles à suivre: c’est pourquoi le musulman (ou l’arabe qui accepte le Coran arabe) est un SOUMIS à Dieu, un MUSLIM (ou musulman). Et les Patriarches furent soumis à la volonté de Dieu et donc “musulmans”. A l’époque du rabbin maître de Mahomet, les termes musulman et Islam ne représentent pas une nouvelle religion, mais la religion du passé par rapport au Christianisme, la religion judéo-talmudique qui refuse précisément la divinité du Christ. Les musulmans par excellence sont donc les juifs; les arabes devront les imiter, ils sont musulmans par participation. La religion des musulmans (ou des sou- DISPUTES ENTRE LES CHRETIENS DE LA MECQUE ET LE RABBIN Les chrétiens qui vivaient à La Mecque, selon le Père Théry, avaient mésestimé les débuts de la prédication du rabbin, mais commencèrent bien vite à s’inquiéter quand ils virent les progrès du Judaïsme parmi le peuple arabe. Mahomet avait déjà convaincu quelques-uns de ses compatriotes et le rabbin avait déjà traduit en arabe le Pentateuque et il y avait ajouté les intégrations talmudiques et antichrétiennes. Les chrétiens se décidèrent alors à entrer publiquement dans la dispute qui voyait s’opposer les idolâtres aux judaïsants. De même que le rabbin avait prêché à Mahomet les personnages de l’Ancien Testament, ainsi les chrétiens devront-ils prêcher leurs personnages du Nouveau Testament et spécialement St Jean-Baptiste, la Vierge Marie et Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous ne possédons pas naturellement le texte des prédications des chrétiens de La Mecque, mais dans les “Actes de l’Islam” nous lisons les réponses du rabbin, et à partir d’elles nous pouvons y remonter. Naturellement les chrétiens ne rejettent pas la révélation du Mont Sinaï. Comme aujourd’hui tout bon chrétien accepte l’Ancien Testament, perfectionné dans l’Evangile de Jésus-Christ; mais ils rejettent les fables talmudiques qui ont dénaturé la Révélation du Sinaï. Le point nodal 11 qui sépare le chrétien du juif (et donc du musulman) est le dogme de l’Unité et de la Trinité de Dieu et de l’Incarnation, de la Passion et de la Mort de Notre-Seigneur. Les chrétiens de La Mecque prêchaient la Très Sainte Trinité et l’Incarnation du Verbe éternel, Notre-Seigneur Jésus-Christ crucifié par les juifs, pour maintenir les arabes au Christianisme et les libérer du Talmudisme. La conversion de Mahomet au Judaïsme était très dangereuse pour le Christianisme, qui, en Arabie, avait déjà connu des moments de fortune et de succès. Sur la base des réponses fournies par le rabbin de La Mecque dans les “Actes de l’Islam”, on peut déduire que les chrétiens de La Mecque avaient centré leur prédication (pour convertir les idolâtres au Christ, maintenir chrétiens les arabes déjà convertis et empêcher que l’apostolat de Mahomet parmi ses compatriotes portât des fruits) sur trois thèmes principaux: St Jean-Baptiste, la Très Sainte Vierge Marie et Notre-Seigneur Jésus-Christ. Et ce sont justement ces trois thèmes que le rabbin reprend, en contre-attaquant, dans les “Actes de l’Islam” alors qu’il mêle à ses récits sur les Patriarches de l’Ancien Testament (qui sont les vrais muslim, c’est-à-dire soumis) des histoires du Nouveau Testament, vidées de toute saveur chrétienne, avec même un contenu essentiellement anti-chrétien. Les histoires du Baptiste, de Marie et de Jésus dans les “Actes de l’Islam”, sont seulement la réponse du Judaïsme à la prédication des chrétiens de La Mecque et avaient comme unique but celui de convertir les arabes au Judaïsme. Il n’est pas vrai que le Coran actuel ait des points de contact avec le Christianisme! Au contraire! Si le rabbin parle de Jésus c’est seulement pour dire qu’Il n’était pas Dieu, que c’était un grand homme, mais non Dieu et cela - évidemment - n’est pas un point de contact avec le Christianisme, mais un point de rupture. Les trois personnages de l’Evangile, le Précurseur de Jésus, la Mère de Jésus et Jésus Lui-même ne sont pas présentés comme objet de foi musulmane, mais sont réfutés, vidés de toute valeur chrétienne. En bref Jésus-Christ, dans les “Actes de l’Islam”, n’est pas le Christ de l’Evangile, la seconde Personne de la très Sainte Trinité qui s’est incarnée dans le sein de Marie, pour qui le Baptiste n’est pas le Précurseur du Messie ni Marie la Mère de Dieu. Ces figures ont perdu complètement dans l’actuel Coran tout sens chrétien, elles sont même l’opposé du Christianisme qui est la Religion de la divinité de Jésus-Christ. Si le rabbin a contre-attaqué, il l’a fait pour répondre aux objections émises à son apostolat par des chrétiens de La Mecque, qui annonçaient le Christ crucifié “folie pour les idolâtres et scandale pour les juifs”. C’est donc le moment de cesser de présenter l’actuel Coran, œcuméniquement, comme un livre respectueux du Christianisme! (Ces propositions ne viennent pas par “Allah” et par Mahomet son prophète, mais par le rabbin de La Mecque successeur de ceux qui ont crucifié Notre-Seigneur Jésus-Christ). Les “Actes de l’Islam” nous parlent du Baptiste ( 33), mais totalement séparé de Jésus-Christ (dont au contraire il est le Précurseur), comme l’un des nombreux miracles que Yahwé a fait à Israël: c’est une personne de l’Ancienne Alliance qui n’a rien affaire avec l’Alliance Nouvelle et Eternelle. La Très Sainte Vierge aussi dans les “Actes de l’Islam” (34) n’a rien de commun avec la Vierge Marie, Mère de Dieu. Comme il l’avait déjà fait pour le Baptiste, le rabbin place Marie dans l’Ancienne Alliance et ignore tout rapport de Marie avec la Nouvelle et Eternelle Alliance. Nonobstant cela on trouve toujours, malheureusement, des chrétiens malades de syncrétisme qui veulent à tout prix voir dans le “Coran” une considération et une dévotion mariale qui n’existent absolument pas sinon dans leur fantaisie. Par exemple selon le rabbin, la très Sainte Vierge est la sœur de Moïse et d’Aaron, qui vécut 1200 ans avant la Sainte Vierge (35): “O sœur d’Aaron, ton père n’était pas un père indigne, ni ta mère une prostituée”. Enfin ils en viennent à Jésus, “pierre d’angle et d’achoppement”. Le pseudo-Coran essayera de détruire sa Personne divine, qui fait subsister en Lui deux natures, la nature divine ab æterno et la nature humaine, prise dans le sein de la Bienheureuse Vierge Marie. Jésus, pour le rabbin, n’est qu’un Prophète juif et ce serait un blasphème de l’appeler Dieu… Mais quelqu’un, comme nous rapporte l’Evangile, avait déjà crié au blasphème quand il entendit Jésus Lui-même affirmer être Dieu: et il s’agissait de Caïphe, grand-prêtre de la religion juive! Et le pseudo-Coran met spécialement en garde contre cette, selon lui, dangereuse hérésie de présenter le Christ comme Dieu: “Yahwé a fait descendre sur Moïse l’Ecriture, pour avertir ceux qui disent: ’Dieu 12 a pris pour lui un fils’… Monstrueux est le mot qui sort de leurs bouches. Ils ne disent qu’un mensonge” (36); “En vérité Yahwé… n’a pris pour Lui ni compagne ni fils” (37). Pour le Coran actuel Jésus n’est qu’un serviteur de Yahwé, un bon prophète, mais n’est absolument pas le Fils de Dieu, consubstantiel au Père. AUTRES AUTORITES Il y a d’autres autorités, qui peuvent être citées comme contre-épreuve de la conclusion que rejoint le Père Théry. En voici quelques-unes. Selon Edouard Pertus, Mahomet aurait fréquenté à La Mecque des chrétiens-judaïsants, et cela expliquerait la fausse interprétation du Christianisme contenue dans le Coran, telle, par exemple, la négation de la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de la divine maternité de Marie, professée déjà par Nestorius (38). L’historien juif Bernard Lazare affirme également que “Mahomet fut nourri de l’esprit juif” (39). La position de l’un des plus célèbres islamologues actuels, Bernard Lewis (juif lui aussi) est la suivante: “Les juifs, y compris les ’convertis’ au Christianisme, restaient des orientaux; dans le conflit sur la question orientale, ils prenaient le parti de l’Asie contre l’Europe, du monde islamique contre le monde chrétien. L’AMITIE ENTRE JUIFS ET MUSULMANS ETAIT UN FAIT PREVISIBLE… Pendant plusieurs siècles, plus dans le passé que maintenant, évidemment [après la création de l’Etat d’Israël, n.d.r.], LA MAJORITE DE PEUPLE JUIF A MANIFESTE UNE VIVE SYMPATHIE POUR LES MUSULMANS. Un ennemi commun est un grand lien d’amitié et DU MOMENT QUE LES CHRETIENS ETAIENT ENNEMIS TANT DES MUSULMANS QUE DES JUIFS, CES DEUX PEUPLES ONT CONCLU UNE SORTE D’ALLIANCE ENTRE EUX. …Au temps des croisades les juifs furent les alliés qui aidèrent les musulmans à repousser le flot de l’invasion chrétienne… et en Espagne les juifs ont été les alliés et les amis fidèles des maures contre les habitants chrétiens du pays. …Les juifs avaient prospéré dans l’Espagne musulmane et avaient trouvé refuge dans la Turquie musulmane. …Rien dans l’Islam n’était comparable à cette haine spécifique… dirigée contre les juifs dans le monde chrétien. …On pourrait… parler d’une TRADITION JUDEO-ISLAMIQUE, étant donné que LA RELIGION MUSULMANE, …EST ETROITEMENT LIEE A SES ANCETRES JUIFS” (40). Pour quiconque lit le Coran l’influence du Judaïsme est évidente. Quant à l’interprétation de cette influence il existe différentes explications: il y en a qui, comme le Père Théry, voient dans le Judaïsme l’unique moteur de l’Islam, d’autres qui, comme Pertus, voient des influences juives et en même temps, même si elles sont moins fortes, nestoriennes ou chrétiennes-judaïsantes. Reste le fait acquis du rapport de cause à effet entre Judaïsme post-biblique et Islam, puisque les hérésies antitrinitaires ou négatrices de la divinité du Christ (comme le Nestorianisme) furent amplement fomentées par le Judaïsme (41). Le même Pertus reconnaît que “le Coran fut profondément imprégné, sinon inspiré par le Judaïsme” ( 42). Voilà pourquoi les mots d’Arafat (le chef de l’O.L.P.) ne doivent pas nous surprendre: “LE JUDAISME EST UNE PARTIE DE MA RELIGION” (43); “NOUS VOULONS LA PAIX AVEC NOS COUSINS JUIFS” (44). René Sirat, président des rabbins européens, a lui aussi confirmé le lien qui unit le Judaïsme à l’Islam et l’opposition qui règne, au contraire, entre Israël et l’Eglise catholique romaine. L’ex-grand rabbin de France et aujourd’hui président du conseil permanent de la Conférence des rabbins européens a déclaré à “30 JOURS”: “Je souhaite que la même qualité de dialogue soit possible avec les chrétiens de toutes les confessions et avec les musulmans. AVEC CES DERNIERS, NOUS N’AVONS, NOUS LES JUIFS, AUCUN CONTENTIEUX THEOLOGIQUE, CAR LES MUSULMANS NE SOUTIENNENT PAS QU’ILS SONT LE ’VRAI ISRAEL’ [comme les chrétiens]. Pour eux, nous sommes …le peuple du Livre. PAR CONSEQUENT, LE DIALOGUE AVEC EUX SERA BEAUCOUP PLUS FACILE” (45). «La polémique juive – écrit Messori (46) [est] convaincue que L’EVANGILE EN LUI-MEME (avec son affaire de Passion et de Mort de Jésus par responsabilité du Sanhédrin) constitue une source éternelle d’hostilité antijuive. Pour le dire avec la brute sincérité d’un auteur juif: ’Tant que quelqu’un prendra comme historique le récit évangélique de la passion de Jésus, ce sera dangereux pour nous’. 13 L’Islamisme n’est pas au contraire considéré aussi dangereux par les juifs, et on tend à attribuer seulement aux DETAILS DES CIRCONSTANCES HISTORIQUES le conflit entre l’Etoile de David et le Croissant musulman. Par le passé même il y eut un lien étroit entre l’Islam et le judaïsme dans un but antichrétien: L’Islam se tint ici [en Israël] avec l’aide active et au milieu des cris d’exultation de ces mêmes juifs qui maintenant essayent… de le combattre avec les armes. Mahomet mourut en 632. Il suffit d’un peu plus de vingt années aux hordes arabes sorties du désert pour arriver en Occident. …Un blitz victorieux sans précédent et qui n’est explicable que si l’on pense au ROLE QU’Y EURENT AUSSI LES COMMUNAUTES JUIVES. Il est en effet historiquement établi que, par aversion pour le Christianisme, LES JUIFS JOUERENT LE ROLE DE ’CINQUIEME COLONNE’ EN FAVEUR DES MUSULMANS. Ce n’est pas une légende, mais la vérité qui se trouve aussi dans les chroniques arabes: on arrive à remettre aux assiégeants [musulmans] les clefs des villes et à dévoiler les points faibles de la défense. C’est un fait que l’arrivée de la cavalerie arabe fut saluée avec enthousiasme du côté juif. …Comme l’écrit … Daniel Rops: “Les juifs se firent, et avec joie, les fourriers des conquérants musulmans. …AU MOMENT DES INVASIONS, LES COMMUNAUTES JUIVES FURENT CONSTAMMENT AVEC LES ASSAILLANTS”» (47). Déjà en 1833 le chercheur juif Abraham Geiger publia le célèbre livre Was hat Mohammed aus dem Judenthume aufgenommen? (Qu’est-ce que Mahomet a assimilé de l’Hébraïsme?), dans lequel, étudiant l’influence de la religion juive postchrétienne sur la religion islamique, il mettait en évidence les éléments vétérotestamentaires et rabbiniques dans les premiers textes islamiques et arrivait à la conclusion qu’il s’agissait de CONTRIBUTIONS JUIVES A L’ISLAM (48). Cette première étude, qui précède celle du Père Théry de bien cent-trente ans, fut suivit ensuite par beaucoup d’autres. “Certains chercheurs arrivèrent jusqu’à émettre l’hypothèse que Mahomet avait eu des enseignants ou des éducateurs juifs qui lui avaient fourni les rudiments de sa religion” (49). Ces opinions furent même partagées par le célèbre arabisant écossais Richard Bell et par le grand chercheur suédois Tor Andrae, profes- seur de religions comparées. «Plus récemment de nouvelles approches sur le sujet des …influences juives ont vu le jour. Alors que l’origine juive de certains concepts islamiques a été mise en évidence initialement par des chercheurs juifs, pour la plupart rabbins... Très récemment l’ouvrage de deux jeunes chercheurs …a présenté la relation historique entre Judaïsme et Islam sous une lumière tout à fait nouvelle, dans laquelle le rôle dévolu à l’Hébraïsme dans l’Islam est décrit comme quelque chose de bien plus important qu’une simple ’contribution’ ou qu’une ’influence’. Ce travail qui dépeint L’ISLAM comme une espèce de DERIVE …du judaïsme (50) a suscité de violentes controverses» (51). Bernard Lewis, l’un des plus célèbres orientalistes contemporains (52), cite aussi Hanna Zakarias (pseudonyme du Père Théry), “chercheur dominicain connu” (53). Il est intéressant de retrouver dans le livre (54) de Lewis les analogies entre Judaïsme et Islam et une opposition entre Judaïsme et Christianisme beaucoup plus radicale que celle existant entre Judaïsme et Islam. En effet “alors que les juifs reconnaissaient l’Islam comme une religion strictement monothéiste du même type que la leur, ils avaient des doutes, partagés par les musulmans, à propos du Christianisme. …Il était moins grave de témoigner que Mahomet était le prophète de Dieu, plutôt que d’affirmer que Jésus était le Fils de Dieu… Concernant les règles alimentaires Judaïsme et Islam sont aussi très semblables entre eux et dissemblables du Christianisme» (55). Le problème des rapports entre Judaïsme et Islam a été également récemment traité par Shelom Goitein, professeur émérite de l’Université Hébraïque de Jérusalem et actuellement membre de l’Institute for Advanced Study de Princeton, lequel affirme: “La ville de Médine …hébergeait une population juive si grande que, à son exemple… elle fut en mesure de préparer ses voisins Arabes à accepter la religion monothéiste” (56). Médine, centre principal de l’activité de Mahomet, fut à l’origine une ville de Kohanim (prêtres) juifs. “Le témoignage le plus éloquent du caractère judaïque des communautés israélites d’Arabie …se trouve dans le Coran lui-même, qui continuellement fait référence à leurs rabbins. Le Coran fait allusion plusieurs fois au samedi comme à un jour de repos et au jeûne judaïque et aux autres lois… qui se rencontrent dans la lecture talmudique”(57). 14 Le Coran dit (58) que la Résurrection arrivera en un clin d’œil; et ce verset, fait remarquer le chercheur, est récité par les juifs trois fois par jour. “Enfin dans le Livre Sacré de l’Islam se sont trouvés les sans équivoque ’Midrashim’ juifs, qui jusqu’à maintenant n’ont pas été retrouvés dans la littérature juive. …C’est pourquoi, on trouve dans le Coran des inscriptions qui louent les juifs parce qu’ils observent le sabbat ou qui leur font des reproches parce qu’ils ne l’observent pas, ces légendes peuvent avoir leur origine seulement d’une source juive” (59). Goitein se demande alors de quelle religion s’est servi Mahomet comme son modèle immédiat ou quels ont été ses maîtres, étant donné que le Coran fait allusion plusieurs fois à des personnes qui instruisirent le Prophète. La réponse peut être triple. Une première thèse soutient que le Coran contient une grande quantité de matériaux qu’on peut faire remonter tant à des sources judaïques que chrétiennes. Mais (seconde thèse) ce que Mahomet dit concernant JésusChrist et le Christianisme ne peut s’appliquer à aucune des diverses confessions chrétiennes d’alors et donc la proposition chrétienne serait écartée. Enfin (troisième thèse) une troisième tradition de type gnostique ésotérique pourrait exister, qui pourrait avoir influencé Mahomet, une espèce de gnosticisme chrétien reconductible, comme antitradition parasitaire, à la Cabale impure judaïque. C’est en pratique la thèse de Harnack, selon laquelle “l’Islam est un remaniement de la religion juive sur le sol arabe, après que la même religion juive ait subi des modifications d’un christianisme gnostico-judaïque” (60). Mais, selon Goitein, cette thèse ne peut être soutenue, puisque la prédication de Mahomet ne contient aucune réelle idée gnostique et révélerait une position religieuse très différente de celle des cercles ésotériques. La seconde thèse, comme on l’a vu, semble s’exclure d’elle-même: il ne reste donc qu’à sonder la piste juive dans la formation de l’Islam. Goitein soutient que “dans la dernière période de son activité, à Médine, MAHOMET FUT INFLUENCE DE MANIERE CONSIDERABLE PAR LA PENSEE ET PAR LE MODE DE VIE DES JUIFS. …LA SPIRITUALITE DE MAHOMET, avec son irréductible monothéisme [interprété dans un but antitrinitaire, n.d.r.] EUT EN CELA BEAUCOUP DE L’ESPRIT DU JUDAISME. …l’hypothèse selon laquelle Mahomet, au début de son activité de prophète, fut principalement inspiré par des chrétiens …y compris les judéo-chrétiens, semble devoir être écartée d’une manière plus absolue par le simple fait qu’il n’y a aucune référence à la figure (même au nom) du Christ. …On a l’impression que Mahomet a fait une étude spécifique des …dogmes chrétiens uniquement dans une phase beaucoup plus tardive de son activité” (61). La figure dominante du Coran, d’autre part, est Moïse, cité plus de cent fois contre les quatre où est cité Jésus-Christ. En outre les histoires sur Moïse remplissent tout le Coran et ne sont pas limitées à certains chapitres spécifiques. Le groupe juif, qui influença Mahomet, n’était donc pas une secte judéo-chrétienne et ébionite, puisque le CORAN PRESENTE DES AFFINITES TRES ETROITES AVEC LA LITTERATURE TALMUDIQUE. C’est pourquoi la solution proposée par Goitein est celle de l’influence du Judaïsmetalmudique sur l’Islam. “La bataille que Mahomet a remportée si glorieusement et facilement sur les arabes compatriotes a été décidée plusieurs siècles avant sur les collines de la Judée. LES VALEURS réelles DE LA FOI EN UN SEUL DIEU… ARRIVERENT A MAHOMET, comme il ne cessa jamais de le mettre en évidence, d’ISRAEL” (62). L’Islam, comme le Judaïsme, est une religion de ’Halaka’, c’est-à-dire un précepte qui règle MINUTIEUSEMENT tous les aspects de la vie. “En face de ces considérations - conclut Goitein, confirmant la conclusion de Théry - on est amené à penser que L’INFLUENCE DU JUDAISME SUR L’ISLAM DES ORIGINES DOIT AVOIR ETE TRES CONSIDERABLE, SINON DECISIVE” (63). Un autre historien et journaliste connu, Paul Johnson, écrit très lucidement sur les rapports entre Islam et Judaïsme: “…l’Islam fut à l’origine un mouvement hétérodoxe à l’intérieur du Judaïsme, en divergeant au point de devenir une religion indépendante. … La présence juive en Arabie est très ancienne … Durant les premiers temps de l’ère chrétienne le Judaïsme se diffuse en Arabie septentrionale et certaines tribus devinrent entièrement juives. Ce sont des preuves que des poètes juifs ont fleuri dans la région de 15 Médine au VIIème siècle, et il est même possible qu’un état dominé par des juifs ait existé là à cette époque. Selon des sources arabes, environ vingt tribus à Médine et aux alentours étaient juives… L’influence du Christianisme, qui à ses yeux [de Mahomet, n.d.r.] ne pouvait pas apparaître strictement monothéiste, fut très faible… Il semble que l’objectif de Mahomet fut celui de détruire le paganisme polythéiste de la civilisation des oasis, en transmettant aux arabes le monothéisme éthique hébraïque en un langage qu’ils puissent comprendre et en des termes adaptés à leurs coutumes. Il accepta le Dieu des hébreux et leurs prophètes …le Coran étant le substitut arabe de la Bible. Le développement de la part de Mahomet d’une religion indépendante, commença quand il se rendit compte que les juifs de Médine n’étaient pas disposés à accepter sa version arabe arbitrairement élaborée du Judaïsme” (64). Lea Sestrieri est aussi substantiellement du même avis, concernant l’origine judaïque de l’Islam et la ’rupture’ qui a suivi: “En contact avec les juifs… les arabes avaient acquis une certaine familiarité avec l’idée monothéiste. Pas étonnant qu’à un moment déterminé l’un d’eux… ait senti l’appel du Dieu unique. …Il est très probable… que les arabes de religion essentiellement idolâtre, arrivèrent à l’horreur de l’idolâtrie à travers le contact permanent avec les juifs, qui depuis des siècles vivaient parmi eux. …L’essence de la doctrine de Mahomet peut être résumée dans ces points: croire en Dieu, aux Anges, aux Ecritures… A cela on peut ajouter: la prière, l’aumône, les jeûnes, les pèlerinages à La Mecque. Chacun de ces points se réfère à la foi et à la pratique juive, y compris l’idée du pèlerinage (pour lequel seule la ville change)” (65). Lea Sestrieri se demande comment s’est produite la rupture entre Judaïsme et Islam, qui aujourd’hui continuent à s’appeler cousins (cf. note n° 51) et répond: “La séparation entre Judaïsme et Christianisme fut déterminée … par le caractère christologique de Jésus [et par la divinité de Jésus, n.d.r.]… Mais dans la prédication de Mahomet il n’y a pas de doctrines qui constituent une séparation du judaïsme” (66). Voilà expliqué en bref ce qu’on cherche à prouver: entre Christianisme et Hébraïsme il y a une opposition de contradiction de caractère théologique: pour le Christianisme Jésus est Dieu; pour le Judaïsme Jésus n’est pas Dieu. Entre Islam et Judaïsme, au contraire, il n’y a aucune opposition de caractère théologique, alors qu’il y a une opposition de contradiction entre Christianisme et Islam au sujet des deux principaux Mystères de la Foi: Unité et Trinité de Dieu et Incarnation, Passion et Mort de JésusChrist, vrai Dieu et vrai Homme. Selon Lea Sestrieri la rupture entre Judaïsme et Islam se produisit pour des motifs de caractères ou de personnes; en effet “pour une personnalité comme celle de Mahomet la méfiance des juifs dictée par la supériorité et la tradition… furent plus que suffisantes pour produire la rupture… C’est pourquoi on pourrait conclure que la séparation Hébraïsme-Islamisme est seulement en partie religieuse; elle fut dictée essentiellement par le désir de suprématie de l’Islam” (67). Un autre éminent chercheur, Günter Stemberger, admet la dépendance de l’Islam du Judaïsme: “AU DEBUT L’HEBRAISME, …A FORTEMENT INFLUENCE L’ISLAM, même si par la suite il en subit l’influence féconde. …Précisément le milieu politico-culturel de l’Islam a contribué à la diffusion du Judaïsme rabbinique” ( 68); il entre ensuite dans des détails et confirme l’influence rabbinique sur Mahomet: “Déjà bien avant Mahomet existaient en Arabie des communautés juives: elles développèrent une intense activité missionnaire …MAHOMET eut ainsi l’opportunité de les rencontrer et de connaître leur tradition. …Il basa LARGEMENT SA DOCTRINE SUR LA TRADITION BIBLICO-HEBRAIQUE. …Il y a DE TRES NOMBREUX ELEMENTS QUI REUNISSENT clairement LE CORAN et la pensée islamique postérieure A LA TRADITION JUIVE” (69). Stemberger énumère ensuite les points de contact entre Islamisme et Judaïsme: la foi, la loi religieuse et les histoires racontées, que nous avons déjà vues dans le dernier article. Mais il lui paraît opportun de s’arrêter sur les prescriptions légales relatives aux aliments. Mahomet reprend substantiellement les interdictions déjà connues du Judaïsme, même s’il y a moins de prohibitions. Toutefois “on permet aux musulmans de manger la viande abattue par les juifs” (70). Verminjon répond à la question soulevée par Lea Sestrieri, sur la rupture entre Judaïsme et Islam, en faisant un parallèle avec Luther: «Luther… se rallia aux juifs et fut soutenu par eux; mais quand le feu de l’hérésie fut 16 allumé, eux, faisant machine arrière, se retirèrent. Pour cette volte-face Luther les attaqua par l’opuscule Les Juifs et leurs mensonges… Le rabbin Camerini reconnaît que la Réforme, en tenant occupés les chrétiens à lutter entre eux (comme c’était justement voulu par le Judaïsme), marqua une trêve aux persécutions antisémites. …Et on peut donc penser que l’intervention de la Synagogue n’a pas été étrangère à la source même du Mahométisme. Mahomet, au début, fut aidé des juifs par le conseil et par l’or. Mais UNE FOIS QUE CETTE RELIGION S’EST DIFFUSEE, ILS TROUVERENT LA MANIERE DE SE RETIRER EN CATIMINI. …Ce fut, en réalité, le fanatisme d’une poignée de juifs, parmi les plus réputés de la ville de Médine, qui jeta les fondements de la puissance politico-religieuse de l’Islam. Après quoi, plus facilement, on déduit combien le Judaïsme a intérêt à ce que les “goyim” luttent entre eux et soient au plus haut degré distraits de ces choses» (71). LES JUIFS A MEDINE «Quand les deux tribus arabes des Aus et des Khazradj s’étaient avancés vers l’oasis de Yathrib [vers 620 avant J.-C.] elles trouvèrent la ville déjà occupée par des tribus de juifs, et donc les arabes furent obligés de se mettre sous la protection des tribus juives... La tradition appelait les tribus juives de trois noms: Les ’Banu Qurayza’... La 2ème tribu des juifs était celle des ’Banu an-Nadir’... La 3ème tribu des juifs était celle des ’Banu Qaynuqa’... Si on considère aussi qu’à Médine il y avait un nombre considérable de juifs qui ne faisaient pas partie de ces trois tribus, on peut estimer que... la population hébraïque dans son ensemble était d’environ 10.000 personnes» (J. BOUMAN, Il Corano e gli Ebrei, Queriniana, Brescia 1992, pp. 73-74). MAHOMET SE RAPPROCHE DES JUIFS DE MEDINE Mahomet, toujours selon le professeur Johan BOUMAN (enseignant d’islamologie à Beyrouth et d’histoire des religions à Marburg), se rapprocha des juifs de Médine dans des buts précis. «Après environ 12 ans de prédication à La Mecque il s’était convaicu que son message n’était rien d’autre que celui des juifs... et qu’il avait été choisi par Dieu pour l’annoncer aux Arabes, dans une claire langue arabe». (Op. cit., p. 75). Mais, selon notre auteur, il y avait déjà une dichotomie cachée dans le rapport entre Mahomet et les juifs, qui portera, au fur et à mesure, vers la rupture et la tragédie... «D’un côté Mahomet avait besoin du soutien moral et religieux des juifs, pendant sa première année à Médine, de l’autre côté, cependant, il n’était pas très intéressé par les juifs mais surtout par les Arabes et la lutte contre l’idolâtrie et le polythéisme... Mahomet prit plusieurs pratiques religieuses juives, qui cependant n’éliminèrent pas l’ambivalence... La praxis de la prière des juifs... Le repos sabbatique qui commençait le vendredi soir... Mahomet, déjà bien avant l’Egire, s’était efforcé de former les pratiques de piété islamiques selon le modèle des juifs... Mais là aussi on se trouve face à des ambivalences: Mahomet a suivi en partie des traditions hébraïques; mais en partie aussi leur a donné un contenu nouveau en les adaptant... à la manière arabe d’appréhender les choses. (...) Mahomet, non seulement à La Mecque, mais aussi à Médine, considérait l’hébraïsme comme une religion étroitement liée à l’Islam, avec la conséquence que les Juifs de Médine devaient être des alliés sûrs dans sa lutte contre les polythéistes» (Op. cit., pp. 75-78). Mais Mahomet a gardé tout son ’être arabe’, ce qui a maintenu une certaine ambiguïté dans ses rapports avec le judaïsme, et qui peu à peu a porté vers la rupture. (Cf. op. cit., p. 80) à cause des motifs ethniques ou de nationalités et pas du tout religieux, comme, par exemple, les Eglises nationales (gallicane, anglicane...) qui se sont détachées de la Religion catholique, au début surtout pour des motifs de nationalisme ou de régalisme. VERS LA RUPTURE «Aujourd’hui il n’est plus possible d’établir pour quelles raisons exactes les Juifs se sont refusés à Mahomet. ...[Cependant] dans le Coran de la période de Médine, on peut trouver la réaction suivante de Mahomet au refus des Juifs...» (Op. cit., p. 84). En tout cas on peut affirmer que Mahomet a appris sa religion à l’école juive, qu’il a pensé se mettre avec les Juifs pour lutter contre les polythéistes, tout en gardant son ’être arabe’, et que face au refus des Juifs pour des motifs ethniques «qui n’ont pas voulu admettre que Mahomet était le prophète» (Op. cit., p. 85), il s’est révolté contre eux qui étaient ses maîtres à penser. En effet «un prophète arabe qui aidait les arabes à conquérir une grande puissance, n’était certainement pas une des attentes 17 Mahomet tel qu’il est représenté sur la couverture de l’ouvrage du P. Théry des Juifs vis-à-vis du Messie. Les buts ethniques de Mahomet n’étaient pas compatibles avec ceux des Juifs». MAHOMET CONTRE LES JUIFS Les musulmans gagnèrent la bataille de Badr (an II de l’Egire). Mahomet fut convaincu que Dieu était avec lui et son peuple, donc «il pensa qu’était arrivé le temps de se décharger du poids toujours plus lourd des Juifs» (Op. cit., p. 89). Il n’acceptait pas la MISSION DIVINE DES ARABES (en effet chacun est convaincu, hélas, qu’il y a une seule mission divine et que naturellement elle appartient à son peuple...). «Après sa rupture avec les Juifs, même le lien avec le Judaïsme se ralentit. Le centre de l’histoire de la Révélation se déplaça de Jérusalem à La Mecque. La période d’ARABISATION de l’Islam commençait donc... L’Islam trouva ainsi son centre géographique... au cœur de l’Arabie» (Op. cit., pp. 102-103). Le Professeur Sergio Noja, grand islamologue italien, écrit aussi à ce sujet: «L’attitude initiale de Mahomet vis-à-vis des Juifs a été empruntée à l’ouverture la plus large et candide; ceci explique l’amertume postérieure de Mahomet et sa réaction violente. En effet... il avait indiqué Jérusalem comme la direction vers laquelle prier, mais, au lieu de recevoir de la part des Juifs, des mots de sympathie et d’adhésion, il fut l’objet de moqueries fé- roces: “Mahomet et ses compagnons ne savaient pas où était la ’qiblah’ [direction de la prière], jusqu’au moment où nous les avons dirigés”... L’homme qui avait supporté pendant plusieurs années à La Mecque les moqueries qui étaient lancées tous les jours contre lui [par les Arabes] ne pouvait pas se résigner à ne pas être bien reçu par les Juifs. (...) Le signal de rupture fut le changement de la ’qiblah’; (...) Maintenant la nouvelle direction de la prière, était fixée vers la “Ka’ba”» (S. NOJA, Maometto profeta dell’Islam, Mondadori, Milan 1974, pp. 210-217). Il semble donc tout à fait permis d’affirmer que, si le Marxisme est une version laïcisée du Judaïsme talmudique, l’Islamisme est un Judaïsme simplifié et armé contre les chrétiens. C’est le propre de l’Islam de vouloir imposer son Croissant par l’épée, alors que l’Eglise admet le recours à la force uniquement pour empêcher à l’hérétique de répandre l’erreur dans la société (72) ou pour se défendre de l’attaque d’un agresseur injuste, fût-ce même un non-baptisé sur lequel elle n’a pas juridiction. “La guerre contre les infidèles est l’un des devoirs les plus sacrés recommandés par l’Islam. …la guerre sainte ne doit ni cesser ni être interrompue avant que le monde soit entièrement soumis à l’Islam” (73). Comment ne pas être préoccupés, alors, face au phénomène toujours plus envahissant de millions et de millions de musulmans qui se sont infiltrés en Europe (jadis) chrétienne pour vouloir l’islamiser? En 1981 le Dr Israël Shahak (président de la Ligue israélienne des droits de l’homme, professeur de chimie à l’Université hébraïque de Jérusalem) écrivait un appendice à un article intitulé: “La religion juive et ses attitudes face aux autres nations” (in Khamsin N° 9, 1981, Ithaca Press, Londres). Cet appendice a été traduit en français par Jacques Monnot, et reproduit comme postface au livre “L’Azyme de Sion” du général Moustafà Tlass (première édition française 1990, Damas, Syrie, pp. 303-365). Même le Dr Shahak admet, dans cet appendice, que “l’Islam est considéré [par le système juridique judaïque, n.d.a.] plus favorablement que le Christianisme” (op. cit., p. 328). «LE JUDAISME EST IMPREGNE - explique le Dr Shahak - D’UNE HAINE PROFONDE ENVERS LE CHRISTIANISME... Cette haine remonte à l’époque où le Christianisme était encore faible... Cette attitude... est fondée 18 sur deux éléments principaux: en premier lieu, sur la haine et les calomnies contre Jésus... En second lieu pour des raisons théologiques, ...selon lesquelles le Christianisme est placé (par l’enseignement rabbinique) parmi les religions idolâtres. Tout cela à cause de la doctrine chrétienne sur la très Sainte Trinité... Au contraire L’ATTITUDE DU JUDAISME ENVERS L’ISLAM EST RELATIVEMENT BIENVEILLANTE... Le Coran, à la différence du Nouveau Testament, n’est pas condamné à être brûlé. Il n’est pas honoré comme la loi islamique honore les rouleaux de la Torah, mais il est traité comme un livre normal. La majeure partie des autorités rabbiniques reconnaissent que l’Islam n’est pas idolâtre» (op. cit., pp. 362-365). Pour R.A. Rosemberg, «l’Islam, dans l’esprit, est plus proche du Judaïsme que du Christianisme classique. Il enseigne en effet un monothéisme sans compromis et rejette la présence des images, humaines ou animales, dans ses lieux de culte. Ses fidèles pratiquent la circoncision et ne mangent pas de porc. Ses autorités religieuses ne sont pas des prêtres qui accomplissent des rites sacrés, mais des chercheurs de la loi sacrée comme les rabbins. Mahomet fut extrêmement influencé par les juifs qu’il avait connus dans sa ville natale d’Arabie, La Mecque. Dans ses premiers enseignements il avait dit à ses disciples de se tourner vers Jérusalem au moment de la prière, comme font les juifs. Il voulait qu’ils observassent le septième jour du sabbat et le Jour du Repentir comme journée annuelle de jeûne et d’expiation. Mais il modifia ces pratiques le jour où les juifs, qu’il avait approchés, se refusèrent de le considérer comme le dernier prophète, le successeur des prophètes d’Israël et de Jésus, lesquels, à ses dires, lui avaient préparé la voie». (74). CONCLUSION: LES RAPPORTS ACTUELS ENTRE MONDE PALESTINIEN ET ETAT D’ISRAEL Dans cet article est traitée la question des origines historiques de l’Islam, sur la base d’études scientifiques sérieuses et documentées; en ce qui concerne au contraire les rapports actuels entre Palestine et Etat d’Israël le discours est différent. Il faut donc conclure qu’entre Judaïsme et Islam le rapport est SUBSTANTIELLEMENT de cause à effet. Cependant, ACCI- DENTELLEMENT (c’est-à-dire étant donné les circonstances historiques qui ont fait qu’Israël occupa par la force les territoires palestiniens), le monde arabe s’est trouvé dans une situation conflictuelle avec Israël. Ceci, toutefois, n’est pas dû à des causes religieuses (l’Islam étant une émanation du Judaïsme talmudique), mais seulement à des causes contingentes et accidentelles, d’ordre politicomilitaire (75). Il me semble qu’on ne peut pas nier cependant que la réaction du monde islamique à l’impérialisme juif (que réalise le Nouvel Ordre Mondial) soit à considérer comme quelque chose de positif, “per accidens et non per se” (diraient les scolastiques). Mais il ne faut pas exagérer et voir dans la réaction arabe à l’Etat d’Israël quelque chose de bon EN SOI ou SUBSTANTIELLEMENT, de manière à nous faire carrément embrasser la cause de l’Islam! Il s’agit en effet de la lutte de la Palestine contre l’Etat d’Israël et non de l’Islam contre le Judaïsme! Il serait fatal pour nous, chrétiens, d’oublier que (comme l’a déclaré Jocelyne Khoueiry, excommandant de la milice chrétienne libanaise) “le Liban [chrétien] a été sacrifié pour satisfaire la Syrie et Israël [musulmans et juifs]. … Sur le Liban… pesaient trois dangers. Le premier était la Syrie, avec ses visées… Le second est constitué par l’intégralisme… des nations islamiques, en particulier l’Iran et l’Arabie Saoudite. Enfin il y a la menace d’Israël, qui préférerait un Liban divisé en autant de petits états qu’il y a de religions. En outre il ne faut pas oublier que les USA et Israël avaient conclu un pacte international …dont le but était de résoudre la question palestinienne aux dépens des chrétiens libanais. Les palestiniens n’avaient pas de patrie? Le Liban deviendra leur patrie. Et les chrétiens? Ils pourront émigrer vers les USA…” (76). JUDAISME ET ISLAM SONT TOUJOURS PRETS (MEME MAINTENANT) A S’ALLIER, QUAND IL S’AGIT DE DETRUIRE LE CHRISTIANISME! C’est pourquoi l’infiltration judéo-maçonnique à l’intérieur de l’Eglise romaine et la judaïsation du milieu chrétien, ne doivent pas nous faire oublier, mais au contraire doivent nous renforcer toujours plus dans la conviction que L’UNIQUE VRAI ANTIDOTE AU JUDAISME TALMUDIQUE N’EST PAS LE CROISSANT DE LUNE (qui est précédé et s’entrecroise avec l’étoile de David) MAIS SEULE ET SEULEMENT LA CROIX DE JESUS! 19 Notes Les citations du Coran ont été tirées du volume du Père Théry: “Vrai Mohammed et faux Coran”. 1) 1891-1959. Il fut membre de l’Académie Pontificale, cofondateur avec Etienne Gilson des Archives doctrinales et littéraires du Moyen Age, fondateur de l’“Institut historique de Sainte Sabine” de Rome, professeur à l’Institut Catholique de Paris, membre de la section historique de la Sacrée Congrégation des Rites. 2) N.E.L., Paris 1960. 3) J. B ERTUEL , L’Islam: ses véritables origines, N.E.L., Paris 1983-84, 3 vol. 4) BRUNO BONNET-EYMARD fr., Le Coran, CRC éd., Saint-Parres-lès-Vaudes 1988, tome I, p. XIX. 5) L’édition précédente de De Moïse à Mohammed, sous le pseudonyme de H. ZAKARIAS, parut en 1955 “chez l’auteur”, suivi du IIIème tome posthume en 1963 aux éditions du Scorpion. Un IVème volume est resté à l’état de manuscrit. 6) Cf. Angelicum, fascic. 3-4, 1960. 7) Probablement un météorite. 8) A La Mecque se pratiquait soit le polythéisme, qui adorait une dizaine de divinités, parmi lesquelles une triade féminine, soit la litholâtrie: le culte des pierres sacrées. 9) Sourate XVIII, 8. 10) Probablement aux débuts du VIème siècle. 11) E. PERTUS, Connaissance élémentaire de l’Islam, Action familiale et scolaire, Paris 1991, suppl. au n° 65, p. 24. 12) Sourate XCII. 13) Sourate XCV. 14) Sourate LXXX, 13-16. 15) Sourate XXXVII, 114-120. 16) Sourate LXXXV, 21-22. 17) Sourate CXII. 18) Sourate CIX, 1-6. 19) H. ZAKARIAS, Vrai Mohammed et faux Coran, N.E.L., Paris 1960, p. 32. 20) Sourate LXXX 11-15, XCVII, LXXXVII, LXVIII 15-52, LVI 76-77. 21) “On reste frappé de la place que tiennent - dans le Coran - les préceptes, minutieusement détaillés, relatifs aux femmes; or ces mêmes préceptes occupent environ un septième du contenu du Talmud”. (E. PERTUS, op. cit., p. 41). 22) Sourates: LXXVII, 41-44; LXXXIII, 47; LXXVIII, 31; LII, 20; LVI, 22; LV, 72; XXXVII, 47; XLIV, 54; XVI, XXXVII, 47; LV, 47. 23) Sourate XVII, 75. 24) Sourate LIV, 17, 22, 32, 40. 25) Sourate XX, 112. 26) Sourate XI, 20. 27) Sourate X, 38. 28) Sourate XLVI, 11. 29) Op. cit. p. 112. 30) Sourate XXVI, 217-219. 31) Sourate VI, 125. 32) Op. cit., p. 129. 33) Sourate XIX, 1-15. 34) Sourate, XIX, 16-21. 35) Sourate XIX, 29. 36) Sourate XVIII, 3-4. 37) Sourate LXXII, 3. 38) Cf. E. PERTUS, Connaissance élémentaire de l’Islam, Action familiale et scolaire, Paris 1991, suppl. au n° 65. 39) B. LAZARE, L’antisémitisme, Documents et témoignages, 1969, p. 51. 40) B. LEWIS, La rinascita Islamica, Il Mulino, Bologne 1991, pp. 187-205. 41) Cf. J. MEINVIELLE, Dalla Cabala al progressismo, Rome 1989. 42) E. PERTUS, op. cit., p. 26. 43) Interview d’Arafat, LA STAMPA, 15/9/1993. 44) L’Osservatore Romano, 21/8/1994, p. 2. 45) 30 JOURS, février 1994, p. 10. 46) V. M ESSORI . Pensare la Storia, éd. Paoline, Milan 1992, p. 624. 47) Ibidem, pp. 117-118. 48) A. GEIGER, Was hat Mohammed aus dem Judenthume aufgenommen?, Bonn 1833, éd. Rivista, Leipzig 1902. 49) B. LEWIS, Gli Ebrei nel mondo Islamico, Sansoni, Florence 1991, p. 72. 50) P. CRONE-M. COOK, Magarism: the Making of the Islamic World, Cambridge, Angleterre, 1977. 51) B. LEWIS, op. cit., p. 73. 52) Il est professeur d’histoire du Moyen Orient à l’Université américaine de Princenton. 53) B. LEWIS, op. cit., p. 204. 54) Pp. 82-86. 55) Ibidem, pp. 87-88. Sur le sujet voir aussi: S. W. BARON, Social and Religious History of the Jesus, New York 1952. E. I. J. ROSENTHAL, Judaism and Islam, Londres 1961. A. I. KATSH, Judaism in Islam, New York 1962. S. D. GOITHEIN, Studies in Islamic History and Institutions, Leyde 1966. M. R. COHEN, The Jewish self-Government in Medieval Egipt, Princeton 1980. 56) S. D. GOITEIN, Ebrei e Arabi nella storia, Jouvence, Rome 1980, p. 59. 57) Ibidem, p. 63. 58) Sourate XVI, 77. 59) S. D. GOITEIN, op. cit., p. 65. 60) Dogmengeschichte, II, pp. 553-557. 61) S. D. GOITEIN, op. cit., pp. 68-69. 62) Ibidem. p. 74. 63) Ibidem, p. 76. 64) P. JOHNSON, Storia degli ebrei, Longanesi, Milan 1987, pp. 186-187. 65) L. SESTRIERI, Gli Ebrei nella storia di tre millenni, Carucci, Rome 1980, pp. 92-95. 66) Ibidem, p. 95. 67) Ibidem, pp. 94-95. 68) G. STEMBERGER, Il Giudaismo classico, Città nuova, Rome 1991, p. 288. 69) Ibidem, pp. 288-289. 70) Ibidem, p. 290. 71) VERMINJON, Le forze occulte che manovrano il mondo, Rome 1977, pp. 64-66. 72) En assassinant ainsi l’esprit, ce crime est bien plus grave que l’homicide [voir Sodalitium n° 5, pp. 1423 (éd. it.)]. 73) Ibidem, p. 94. Sur le sujet voir aussi R. BARKAI, Chrétiens, musulmans et juifs dans l’Espagne médiévale, éd. du Cerf, Paris 1994. 74) R.A. ROSEMBERG, L’Ebraismo, Storia, pratica, fede, Mondadori, Milan I995, pp. 84-85. 75) IL GIORNALE du 12/11/94 (p. 15) rapporte une interview de Mahmud El Adhar, l’un des chefs indiscutés du Hamas à Gaza, dans laquelle on lit: “POUR NOUS MUSULMANS LES JUIFS N’ONT JAMAIS CONSTITUE UN PROBLEME EN TANT QUE TELS. Nous les 20 avons accueillis chaque fois que vous Européens avez décidé de vous libérer d’eux. Nous avons commencé il y a cinq siècles quand les Espagnols commencèrent à les bouter hors de leur empire”. Arafat lui-même a récemment déclaré: “Nous voulons la paix avec NOS COUSINS JUIFS”; de L’OSSERVATORE ROMANO, 21 août 1994, p. 2. 76) J. KHOUEIRY, in Missioni della Consolata, août 1993, pp. 26-28. BIBLIOGRAPHIE ESSENTIELLE C. BAFFIONI, Storia della filosofia islamica, Mondadori, Milan 1991. A. BAUSANI, L’Islam, Garzanti, Milan 1987. J. B ERAUD -V ILLAS , Islam d’Hier et de Toujours, Arthaud, Paris 1969. A. F AHD , T OUFIC -B AUSANI , L’Islamismo, Laterza, Bari 1991. R. GARAUDY, Promesses de l’Islam, éd. du Seuil, Paris 1991. C. GASBARRI, Cattolicesimo e Islam oggi, Città Nuova, Rome 1972. H. LAMMENS, L’Islam, Croyances et institutions, Librairie orientale, Beyrouth 1943. B. LEWIS, Il linguaggio politico dell’Islam, Laterza, Rome-Bari 1991. H. C. PUECH , Islamismo, Laterza, RomeBari 1991. M. QUTUB, Equivoci sull’Islam, Sita, Ancône 1980. R. DA MONTECROCE, I Saraceni, Contra legem sarracenorum, Nardini, Florence 1992. E. VARRIALE, La legge sacra. 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Ce qu’affirme Silvio Ferrari, enseignant de droit ecclésiastique à l’Université de Turin, des relations entre l’état du Vatican et celui d’Israël vieux seulement de dix ans mais héritier du plus antique mouvement sioniste, on peut aussi le dire des religions qui animent les deux entités chrétienne et judaïque, l’Eglise et la Synagogue. Dans la préface d’un livre bien connu de Jules Isaac sur lequel nous reviendrons, Saul Israël expose ainsi le point de vue des juifs: “Isaac a depuis le début affronté le problème des origines des persécutions antijuives en mettant directement en cause l’antisémitisme chrétien qu’il a toujours considéré comme le lit dans lequel ont convergé durant presque deux mille ans toutes les formes de ressentiment et d’antipathie contre les Juifs. (...) Que l’antisémitis- 21 me que nous connaissons depuis environ vingt siècles soit religieux et en particulier chrétien est un fait d’une évidence indiscutable et si l’on voulait appuyer cette affirmation d’une documentation historique précise, on aurait que l’embarras du choix” (3). Vingt siècles (ou deux mille ans) d’hostilité chrétienne contre le judaïsme nous reportent, si je compte bien, à l’origine même du christianisme; cela revient à dire que Christianisme et Judaïsme ont toujours été ennemis et le sont encore. Pour s’en convaincre, il suffit de se reporter aux sources. Dans les années 52-53 Saint Paul, pharisien converti, parlant de ses anciens coreligionnaires, écrivait: ils sont “ceux qui ont mis à mort le Seigneur Jésus et les prophètes, nous ont persécutés, ne plaisent point à Dieu et sont ennemis du genre humain, nous empêchant de prêcher aux nations pour leur salut: de sorte qu’ils comblent sans cesse la mesure de leurs péchés. Mais la colère de Dieu est tombée sur eux pour y demeurer jusqu’à la fin” (1 Thess. II, 15-16). A la fin de l’âge apostolique la situation n’avait pas changé et l’apôtre et évangéliste Jean écrivait; ils “se disent juifs et ne le sont pas; ils sont la synagogue de Satan” (Ap. II, 9). Cependant dans l’autre camp Jésus était “désigné comme un certain individu, ou sous l’épithète de Balaam (l’antique devin des Nombres, 22) et sous les appellations de fou, de bâtard, et d’un terme bien plus ignominieux encore” (4). Deux mille ans d’histoire ne pouvaient changer cette situation originelle synthétiquement décrite ici (5), par le simple fait que la divergence ne se fonde pas sur des questions personnelles, mais sur des questions doctrinales et dogmatiques. Le Christanisme ne pourra jamais accepter le refus de la divinité de Jésus-Christ. Le Judaïsme ne pourra jamais accepter (sans disparaître par le fait même) que l’Eglise soit le nouvel Israël qui surpasse le précédent. Josué Jéhouda, parlant de l’expression “judéo-chrétienne” se référant à une civilisation ou à une religion, écrivait en 1958: “Elle réunit en une seule expression deux notions inconciliables; elle veut démontrer qu’il n’y a pas de différence entre le jour et la nuit, ou entre le chaud et le froid, entre le noir et le blanc” (6). Au dire des juifs euxmême, entre Christianisme et Judaïsme l’inconciliabilité est totale. Le rabbin Benamozegh écrivait en 1914: “La religion chrétienne est une fausse religion soit-disant divine. Pour elle et pour le monde il n’y a pas d’autre voie de salut que retourner à Israël”. Le juif Memmi ajoute: “Votre religion est pour les juifs un blasphème et une subversion. Pour nous votre Dieu est le diable, autrement dit la concentration du mal sur la terre”. Et Rabi en précise la raison: “elle est trahison et idolâtrie parce qu’elle implique le grand blasphème, la croyance en la divinité d’un homme” (7). Deux religions en guerre l’une contre l’autre: telle était précisemment la conviction générale à la mort de Pie XII. Une ère nouvelle A l’occasion d’une visite au cardinal Pappalardo, l’archevêque de Palerme, le rabbin-chef Toaff a déclaré aux journalistes qui l’interviewaient “il existe actuellement avec l’Eglise une entente qui n’a jamais été auparavant” et dont “le mérite revient à Jean XXIII” (8). L’historien (juif) de l’antisémitisme, Léon Poliakov, après avoir dépeint tout en noir l’attitude de Pie XII envers les Juifs, n’hésite donc pas à écrire qu’“en 1958, une ère nouvelle s’inaugure sous le pontificat de son successeur, Jean XXIII” (9). Dans un livre violemment antichrétien, Paul Giniewski écrit: “... un changement plus radical s’opéra en avril (sic) 1958: le cardinal Angello Roncalli fut élu pape. Les idées et les actes du nouveau Souverain Pontife, Jean XXIII, rendirent possible l’espoir d’une révolution des rapports entre l’Eglise et les Juifs” (10). Dans sa rancœur contre l’Eglise, Hans Küng n’épargne aucun membre de la hiérarchie, à l’exception justement de Jean XXIII: “que la situation pour la papauté romaine ne soit pas du tout déplorable - écrit le théologien suisse jamais excommunié en dépit de ses hérésies - l’Eglise le doit précisément à Jean XXIII, le premier pape romain à se comporter de manière différente jusques et y compris dans les rapports avec les juifs” (11). En substance, le jugement du père Schmidt, secrétaire et biographe du cardinal Béa, personnage plus “rassurant” n’est pas lui non plus si éloigné des précédents: “au début de cette entreprise si importante, de portée millénaire, il n’y a ni grandes organisations ni mouvements de masse; seulement trois vieillards: Jules Isaac, le pape Jean XXIII et le card. Béa” (12). Le lecteur connaît déjà, du moins en partie, le rôle de Béa; mais Jules Isaac, qui est-il? Avant de m’occuper de lui, permettez-moi de raconter la façon dont il entra dans la vie de Jean XXIII. 22 Dès son élection C’est dès l’élection de Roncalli à la papauté que débute l’ouverture aux juifs. Ferrari écrit: “L’élection de Jean XXIII au pontificat en 1958 fut accueillie positivement en Israël où les premières tentatives pour l’ouverture d’un dialogue religieux juif-chrétien prirent forme (...); plusieurs fois dans la presse israélienne, des jugements favorables sur le personnage et l’œuvre de Jean XXIII firent leur apparition” (13). Nous avons déjà vu (n° 34, p. 55) comment le rabbin-chef d’Israël, Isaac Herzog, envoya ses félicitations au nouvel élu; le rabbin écrivait: “Je nourris l’espoir confiant que les sentiments sincères et nobles envers les valeurs humaines les plus élevées que vous avez manifestés au cours des dures années d’atrocités nazies vous guideront dans votre nouvelle et importante position...” (14). De son côté Jean XXIII ne manqua pas de répondre aux félicitations du rabbin et du chef d’état israélien, “et l’ambassadeur d’Israël [en Italie, n.d.a.] fut invité à assister au couronnement du nouveau pontife” (15). Ces “ouvertures timides” comme l’écrit Ferrari, mais “premier vrai moment de détente dans les relations avec Israël” (15), ne sont rien encore comparées à la véritable révolution qui débutera quatre mois plus tard seulement avec le changement de la prière pour les juifs de la liturgie du Vendredi Saint... Confrontation des deux prières Avant de rappeler le fameux épisode, il me semble opportun de donner quelques précisions car le lecteur, influencé par trente ans de post-concile, peut ne pas se rendre compte de la gravité du sujet en question, ou même, par manque d’information, approuver le geste accompli alors par Jean XXIII... La foi s’exprime dans la prière (lex credendi, lex orandi), aussi trouverons-nous dans la prière juive et dans la prière chrétienne l’âme de chacune de ces religions, même pour ce qui regarde leurs rapports mutuels. “Dès l’an 80 après Jésus-Christ, tant pour les juifs convertis que pour les chrétiens, cette 19ème bénédiction fut carrément ajoutée - après la 11ème - aux 18 qui composaient la prière juive quotidienne: Que les apostats n’aient aucune espérance et que l’empire de l’orgueil soit déraciné promptement de nos jours; que les Nazaréens et les Minim périssent en un instant; qu’ils soient effacés du livre de vie et ne soient pas comptés parmi les justes” (16) La prière que, chaque Vendredi Saint, l’Eglise catholique élève vers Dieu pour la conversion des juifs est bien différente: Prions aussi pour les juifs perfides, afin que Dieu notre Seigneur ôte le voile de leurs cœurs et leur donne de connaître, eux aussi, Jésus-Christ notre Seigneur. Dieu tout-puissant et éternel, qui n’écartez point de votre miséricorde même les juifs perfides, écoutez les prières que nous vous adressons pour ce peuple aveuglé: donnezleur de connaître la lumière de votre vérité, qui est le Christ, afin qu’ils soient arrachés à leurs ténèbres. Le lecteur intelligent saisira immédiatement la différence essentielle entre les deux prières. Les juifs ne prient pas pour les chrétiens; ils demandent à Dieu de détruire les chrétiens, non seulement sur cette terre mais pour l’éternité. Les chrétiens au contraire, malgré l’hostilité théologique qui les sépare de la synagogue, prient pour la conversion des juifs, demandent à Dieu de leur manifester non sa justice mais sa miséricorde, afin qu’ils ne soient pas effacés “du Livre de la vie” mais, au contraire, qu’ils trouvent eux aussi la vraie vie, la vie éternelle qui est Jésus-Christ. Du reste, cette prière de l’Eglise exprime la foi de l’Eglise elle-même: elle en est l’écho fidèle et la meilleure illustration. Mais, comme je l’ai déjà dit, je crains que les 35 années écoulées depuis sa suppression n’aient aussi brouillé les idées des fidèles; il me semble donc nécessaire d’expliquer la valeur de cette prière solennelle modifiée par Jean XXIII, puis supprimée, et même inversée par Paul VI (17). Elle exprime simplement la foi de l’Eglise catholique, telle qu’elle Lui a été confiée par le Christ lui-même. L’aveuglement des juifs qui ont refusé le Messie est explicitement enseigné par Jésus (Mc III, 5; Mt. XV, 14) et par Saint Paul (Rom. XI, 7-10 et 25) qui cite Isaïe et se rappelle certainement la mystérieuse cécité qui le frappa lorsque, encore pharisien, il fut converti par le Christ sur le chemin de Damas, cécité qui ne disparut qu’avec le baptême. Que cette cécité soit due à un voile qui obscurcit la vue 23 des juifs, c’est encore Saint Paul qui l’affirme (2 Cor. III, 15). Et c’est en cette cécité que consiste précisément la “perfidie” de qui a refusé le Christ, préférant avoir “le diable pour père” (Jn VIII, 44) plutôt que Dieu: le terme “perfidie” se retrouve tel quel dans les Pères de l’Eglise, Saint Grégoire le Grand par exemple ou Saint Ambroise (18). Une fois rappelée la terrible responsabilité du peuple qui a renié le Christ (cfr. Daniel IX, 26), l’Eglise montre toute sa miséricorde en priant pour lui, demandant à Dieu le vrai bien des juifs qui consiste, comme pour nous tous, à croire en Jésus-Christ, l’unique Sauveur. Ces observations étaient à mon avis indispensables pour mieux comprendre l’importance du geste accompli par Jean XXIII ce Vendredi Saint 1959. Le Vendredi Saint 1959 «Tout commença le Vendredi Saint 1959. L’épisode est raconté par le card. Béa comme suit: “Ce jour-là, durant la liturgie solennelle, le pape Jean donna l’ordre ça et là d’omettre, dans la prière bien connue pour les juifs, l’adjectif déplaisant de “perfides” qui sonne si mal aujourd’hui, mais qui, dans le latin médiéval auquel il remonte signifiait simplement “non croyants”. Ce geste émut l’opinion publique juive et suscita de nombreux espoirs» (19). Ceux qui exaltent Jean XXIII, Zizola par exemple, ne se contentent pas toujours des termes un peu compassés de Béa, et se laissent aller aux invectives contre la prière de l’Eglise: “Au moment d’entonner la prière rituelle Oremus pro perfidis judœis [Jean XXIII] ne se sentit pas le courage de traiter les Juifs de cette façon et il omit l’adjectif outrageant. Les paroles juifs perfides revenant encore dans le texte, le pape les sauta de nouveau (...) Ce fut la dernière fois que Dieu dût entendre une insulte de ce genre, fourguée comme prière, en admettant que Dieu ait le temps de suivre les rites du Vatican. Il y en eut peu qui le comprirent sur le champ, mais ce qui commençait, ce 27 mars 1959, était une histoire d’amour, absolument nouvelle et inespérée entre l’Eglise et ses ancêtres les Juifs, après quelques millénaires de haine” (20). (J’aimerais le dire à Zizola, plus de deux millénaires, voilà qui est impossible! En effet la séparation avait été consacrée précisément à l’occasion du premier Vendredi Saint de l’histoire, celui où fut crucifié le Seigneur...) Or s’agit-il vraiment de “haine”? Et dans quel sens? Et de la part de qui? Comment se fait-il que Zizola ne fasse aucune allusion à la prière juive contre les chrétiens? Est-il possible que la liturgie de l’Eglise du Christ guidée par l’Esprit-Saint incite à la haine? Pour un catholique la réponse devrait être évidente: l’Eglise, infaillible, indéfectible, sainte Epouse du Christ, ne peut s’être trompée (et ce pendant deux mille ans!) dans sa doctrine et dans sa praxis concernant ce peuple qui ne reconnut (et ne reconnaît) pas le Messie. En fait son amour envers tous, même les juifs, se manifeste justement dans sa recherche de la conversion et du salut final de tous, conversion qui présuppose toujours la reconnaissance de notre propre péché, de notre propre “perfidie” envers Dieu. Jean XXIII ne l’entendait pas ainsi. Loin de là. Nous l’avons vu, “le premier vendredi saint qui suivit son élection au pontificat, le 27 mars 1959, il supprimait d’un trait de plume les termes incriminés, et il le faisait savoir aux paroisses par une circulaire du Vicariat de Rome, en date du 21 mars. (...) Cette mesure fut étendue à l’Eglise universelle par un décret de la Sacrée Congrégation des Rites du 5 juillet 1959 (21). Jean XXIII soulignait l’importance de cette décision à l’occasion d’un autre vendredi saint, celui de 1963. Au cours de la célébration, l’officiant prit par erreur (22) l’ancien texte. Le pape interrompit la cérémonie et donna l’ordre de reprendre les oraisons solennelles depuis le début en suivant le nouveau texte” ( 23). Giniewski commente: “Le pape adressait de cette façon à toute la chrétienté un message pascal rempli d’estime pour les Juifs et lourd de signification en un moment de l’année [Vendredi Saint!] qui avait vu le déchaînement de tant de violence antisémite au cours de l’histoire” (24). Cette décision de Jean XXIII touchant le “verset interdit” (ainsi que Giniewski nomme, très à propos, la locution supprimée de perfidis judœis) et marquant le début mais aussi la clôture de son pontificat, fut pour les puissantes associations juives qui n’attendaient que celà un signal clair de “voie libre”. Comme si ça n’était pas suffisant, quelques mois plus tard, le signal se répétait... L’acte de consécration au Sacré-Cœur Le 25 mai 1889, dans l’encyclique Annum Sacrum, le Pape Léon XIII désignait le Sacré-Cœur comme nouveau 24 labarum par le signe duquel serait obtenue la victoire, et il consacrait le genre humain à ce même Cœur de Jésus par une prière spécialement composée par lui en cette occasion (25). En 1925, avec l’encyclique Quas Primas, Pie XI instituait, “contre la peste du laïcisme”, la fête liturgique du Christ-Roi et ordonnait que l’acte de consécration au Sacré-Cœur de Jésus composé par son prédécesseur soit publiquement récité, chaque année, le jour de la fête du Christ-Roi, le dernier dimanche d’octobre. A cette occasion, le Pape Ratti modifia légèrement l’oraison de Léon XIII. Là où ce dernier faisait prier seulement pour la conversion des païens, Pie XI ajouta pour les musulmans et les juifs l’invocation que voici: Soyez le Roi de tous ceux qui sont encore égarés dans les ténèbres de l’idolâtrie ou de l’islamisme, et ne refusez pas de les attirer tous à la lumière de votre royaume. Regardez enfin avec miséricorde les enfants de ce peuple qui fut jadis votre préféré; que sur eux aussi descende, mais aujourd’hui en baptême de vie et de rédemption, le Sang qu’autrefois ils appelaient sur leurs têtes. Dans son livre contre “l’antisémitisme chrétien”, Jésus et Israël, Jules Isaac luimême présente cette prière de Pie XI comme un exemple de miséricorde envers les juifs. Mais Jean XXIII dépassera tous les espoirs de ces derniers et toutes leurs exigences explicites... Au mois de juillet (26) il supprimera purement et simplement les paroles que je viens de rapporter. “On se souvient qu’au mois de juin dernier - écrivait en cette occasion la Documentation catholique S.S. Jean XXIII a fait supprimer de la prière liturgique du Vendredi saint pour la conversion des juifs les mots perfides et perfidie. Dans le même esprit le passage suivant [déjà reporté ci-dessus, n.d.a.] a été supprimé dans l’acte de consécration du genre humain au Sacré-Cœur de Jésus” (27). Ces gestes de Jean XXIII montrent que l’heure était venue de viser au “sommet”, pour employer les mots même de Jules Isaac. «Lors d’une entrevue de 1962, il [Isaac] expliquait à quel point le geste de Jean XXIII avait suscité en lui l’espérance: “pour la première fois, contrairement à ce que j’avais pensé auparavant, je pris en considération l’idée d’une démarche au “sommet”» (28). Mais le moment est venu (enfin!) de présenter au lecteur le fameux Jules Isaac... Le “frère” Jules Marx Isaac Ci-dessous, une nouvelle que n’importe quel lecteur des quotidiens nationaux aurait pu lire le 17 janvier 1994: “Le 16 janvier 1994, la veille de la cinquième journée de dialogue avec les juifs, instituée par la Conférence épiscopale italienne (29) et fixée le jour précédant la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, un olivier a été planté à Rome en souvenir du Pape Jean XXIII et de l’historien Jules Isaac. C’est sous une pluie battante que le nouveau maire de Rome, Rutelli, a planté ce petit arbre dans un espace vert entre le Château Saint-Ange et l’extrémité de la via della Conciliazione, en présence du Président du Sénat Spadolini (30), du Cardinal Cassidy et de Mgr Riva (responsables du dialogue avec les juifs au niveau du Saint-Siège et du diocèse de Rome), du grand rabbin de Rome Elio Toaff, de la Présidente de l’Union des communautés juives d’Italie Tullia Zevi, et de bien d’autre personnes engagées dans le dialogue. Le petit olivier, apporté de Jérusalem, est comme la première annonce des 10 000 arbres qui seront plantés en Israël, au Néguef, en l’honneur de ces deux hommes dont la rencontre, le 13 juin 1960, a eu des conséquences plus importantes qu’on n’osait l’espérer” (31). Ce Jules Isaac doit être un grand personnage si tant de personnes se sont déplacées pour lui; et pourtant qui le connaît? Certainement pas le grand public qui chercherait d’ailleurs Jules Marx Isaac 25 en vain à s’informer en consultant ce qu’il y a de plus connu comme encyclopédies, histoires de l’Eglise, et même biographies de Jean XXIII (32). Et pourtant, nous l’avons vu, l’influence de cet homme sur les trente dernières années de l’Eglise, les années du Concile et du postconcile, est énorme. Pour celui qui ne me croirait pas, voici reproduit un texte officiel qui ne laisse place à aucun doute. Il s’agit d’une lettre du Cardinal Villot, secrétaire d’Etat de Paul VI, envoyée au cardinal Marty, archevêque de Paris, le 22 décembre 1977: Monsieur le Cardinal, Sa Sainteté le pape Paul VI, informé de l’intention qu’a l’Amitié judéo-chrétienne de France de commémorer, le 6 décembre prochain, en une séance solennelle le centenaire de la naissance de Jules Isaac, voudrait par votre intermédiaire exprimer aux organisateurs et aux participants de cette assemblée ses vœux et l’intérêt qu’il porte à cette commémoration. Le Saint-Père a en effet bien présents à la mémoire les rapports sincères et fructueux que son vénéré prédécesseur le pape Jean XXIII a entretenus avec Jules Isaac. Il apprécie également les heureuses conséquences que ces rapports ont entraînés pour l’orientation ultérieure des relations de l’Eglise catholique avec le judaïsme, relations qui ont trouvé une expression ecclésiale dans le n° 4 de la déclaration Nostra Aetate du deuxième Concile du Vatican, ainsi qu’en d’autres manifestations qui l’ont précédée ou suivie. Jules Isaac et son œuvre peuvent dès lors apparaître comme une source d’inspiration pour tous ceux qui veulent à bon droit s’employer à promouvoir le respect, l’estime et l’amitié réciproque entre juifs et chrétiens, et même la collaboration au profit des valeurs spirituelles et humaines, à la lumière de leur commun héritage religieux et au-delà de toute discrimination ou conflit, comme fils d’Abraham et croyants en la parole de Dieu. Aussi le Saint-Père vous confiet-il le soin de transmettre aux participants ses salutations et ses encouragements (33). C’est de façon encore plus explicite que s’exprime, dans sa présentation de l’édition italienne du livre de Jules Isaac, Gesù e Israele, le Père Pierre-Marie de Contenson o.p., Secrétaire de la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme (34). “Il a pu - écrit d’Isaac le père Contenson - tant par ses livres, par ses lettres, que par ses rencontres personnelles avec des hommes d’Eglise jusques et y compris le Souverain Pontife lui-même, jouer un rôle initiateur de premier ordre.(...) En ce qui concerne l’efficacité et la véridicité de la cause défendue avec fougue et mesure par l’auteur, il suffit de comparer ses conclusions avec les enseignements de Nostra Ætate et des Orientamenti pour constater à quel point Jules Isaac avait vu juste et quelle influence il a de fait exercée: ce qu’il proposait [à Jean XXIII] en 1959 a été repris dans ses parties essentielles, proclamé et proposé comme norme en 1965 [par Vatican II] et en 1974 [par la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme] de la part des autorités centrales de l’Eglise catholique à l’attention de tous les fidèles”. Mais qui était donc ce Jules Isaac? Jules Isaac, en fait Jules Marx Isaac comme nous l’apprend l’Encyclopédie Juive (35), nait à Rennes, en France, en 1877. Son deuxième nom, Marx, en dit long sur les sympathies politiques de papa Isaac, officier dans l’armée de Napoléon III malgré ses idées républicaines (36). Le fils suit les ornières paternelles, non pas dans la carrière militaire, mais pour ce qui regarde les convictions politiques et religieuses. D’origine juive, Jules Isaac n’a cependant aucune religion. Dans la préface à la première édition de son livre Jésus et Israël il écrit de lui-même: “Sans doute se demandera-ton à quelle confession appartient l’auteur. La réponse est facile: il n’appartient à aucune”. Son interprétation de la Bible est totalement rationaliste, comme celle de Wellhausen et de Loisy (37). Cette incroyance ne l’empêche pas cependant d’appartenir à plein titre à la grande famille juive, comme l’explique le rabbin Toaff (38) et comme le démontre la façon dont il s’emploie, quasi religieusement, à modifier la théologie catholique sur les juifs. A partir de 1902, Isaac est enseignant d’histoire, spécialisé dans “le problème des origines des superstitions et des préjudices populaires” (35). Il est l’“ami intime et le collaborateur de Charles Péguy depuis le procès Dreyfus” (39), affaire qui, de 1894 à 1906, divise la société française en deux partis et qui provoquera la naissance du sionisme. Les écoliers français des années 30 se le rappellent surtout en tant que co-auteur, avec Malet, d’un manuel d’histoire très diffusé, le “Malet et Isaac” précisemment. Mais c’est en 26 1936 qu’Isaac, nommé par Jean Zay (40) parvient au sommet de sa carrière comme inspecteur général de l’Instruction publique “et haut fonctionnaire d’Etat dans le gouvernement de Blum” (41). Le secrétaire du cardinal Béa écrit: “En 1943 il avait perdu sa femme et sa fille dans les camps de concentration. Dès lors il s’était consacré au combat contre l’antisémitisme et, comme professeur d’histoire, il s’était rendu compte du fait que l’enseignement de la doctrine chrétienne donnait souvent lieu à une certaine hostilité vis à vis du peuple juif. D’où son livre intitulé L’enseignement du mépris. Ayant l’intention de jouer un rôle positif, il était devenu l’un des présidents honoraires de l’Association Amitiés judéo-chrétiennes” (42). La tragédie familiale qui frappa le professeur Isaac est certainement émouvante, mais la version que présentent Isaac et, à son tour le père Schmidt paraît contestable. Isaac était engagé sur le front de la lutte politique et religieuse en faveur de son peuple et contre l’“antisémitisme” depuis sa prime jeunesse, comprenonsle bien (43). Quoiqu’il en soit, en 1941, il commençait ses études spécifiques sur l’ “antisémitisme” chrétien qui, à ses dires, “a été beaucoup plus nocif et de plus longue durée” que l’antisémitisme païen, sous le régime duquel “les persécutions n’ont été qu’épisodiques” et même alors “bien souvent les juifs ont bénéficié de la bienveillance des puissants” (44). Cette année là, Isaac écrivait sa première étude, Quelques considérations basées sur la lecture des Evangiles, rédigée en collaboration avec des rabbins et des membres du B’naï B’rith” (45). Oui, car, ce que personne ne dit, c’est qu’il était membre de la maçonnerie juive connue précisemment sous le nom de B’naï B’rith (46). C’est ce que nous a révélé publiquement Marc Aron, à l’époque président du B’naï B’rith français, dans le discours du 16 novembre 1991 prononcé à l’occasion de la remise de prix (“pour l’action humanitaire”) du cardinal Decourtray: “Vient ensuite Jules Isaac déclara en cette occasion Marc Aron -, un B’naï B’rith” (47). Isaac n’était donc pas le chevalier romantique qui, seul contre tous, combat pour une noble cause et la fait triompher. Toute son action est au contraire à interpréter à la lumière d’un fait: son affiliation à la loge des B’naï B’rith. Pour la réalisation de sa mission, il se présentait avec une carte de visite fascinante: “Je fais connaître Israël aux chrétiens - disait-il - et Jésus à Israël” (48). La réalité était bien différente; sa tâche consistait à “démontrer” que les Evangiles sont historiquement des faux, les Pères de l’Eglise des calomniateurs, et à obtenir que cette “doctrine” soit sanctionnée par l’Eglise. La trilogie du “frère” Isaac Isaac a écrit à cette fin plusieurs œuvres fondamentales. La plus connue est Jésus et Israël (49), commencée en 1943, et achevée en 1946, puis publiée en première édition en 1948 et en seconde édition en 1959 (50). C’est de ce livre que l’écrivain juif affirme: il est “l’arme de guerre la plus réussie contre un enseignement chrétien particulièrement nocif” (51). A cette arme de guerre d’importance fondamentale firent suite de nombreux articles, conférences, opuscules et surtout deux autres textes essentiels: Genèse de l’antisémitisme en 1956 (52) et L’enseignement du mépris en 1962 (53). Le lecteur notera que de ces trois œuvres, deux ont été imprimées sous le pontificat de Jean XXIII et une, la première, réimprimée précisément lorsque Roncalli modifia à l’improviste (?) l’oraison solennelle du Vendredi Saint. Quelle est la thèse de ses livres? Jésus et Israël attaque directement l’historicité des quatre évangélistes. Le livre est composé de 21 arguments, ou thèses, que l’auteur s’efforce de démontrer. Or le dix-neuvième dit explicitement: “Pour établir la responsabilité du peuple juif (...) il faut attribuer à certains textes évangéliques une valeur historique qui est dans ce cas particulièrement contestable; il faut survoler leurs divergences, leurs invraisemblances; il faut donner à ces textes une interprétation qui, tout en étant traditionnelle, n’en est pas moins pour cela moins tendancieuse et arbitraire” (p. 309). Notamment: “le Pilate de la tradition évangélique, si curieusement différent du Pilate de l’histoire, est un personnage légendaire, tout aussi légendaire que le cri du peuple juif: que son sang retombe sur nous et sur nos enfants” (p. 397). Quant aux Actes des Apôtres, écrit-il, citant Puech: “A l’heure actuelle on est presque d’accord que ces discours ont été librement compilés par Luc”. Et dans quel but Luc aurait-il inventé des faits qui ne se sont jamais produits? Avec “le souci manifeste de décharger l’autorité romaine et d’attribuer aux Juifs les épreuves les plus importantes subies par le christianisme. De ce point de vue, il n’y a 27 aucune distinction à faire entre les Actes et les Evangiles” (p. 359). Selon Isaac, Jésus n’aurait été qu’un simple homme, de religion juive, tué par les romains pour cause de subversion. Les Evangélistes, les Apôtres et, après eux, les Pères de l’Eglise auraient porté contre les juifs des “témoignages factieux” par dépit, à cause de la non conversion des juifs au christianisme, et pour gagner les bonnes grâces des romains. La négation de l’historicité des Evangiles (ou, pour parler plus crûment, l’affirmation que les Evangiles mentent) est en effet un élément essentiel à la position actuelle du judaïsme. (Le rabbin Henry Siegman nous en donne le pourquoi lorsqu’à propos des relations judéo-chrétiennes, et s’adressant entre autres à des chrétiens, il dit (tenez-vous bien!): “il n’en demeure pas moins évident que l’Eglise a encore devant elle une tâche redoutable, car les mythes qu’elle draine sont jusqu’à ce jour inextricablement liés à la connaissance d’un peuple qui a refusé Jésus et continue à le refuser. Et on a beau tourner et retourner la question, les évangiles demeurent une source importante d’antisémitisme”) (54). Dans Genèse de l’antisémitisme, Jules Isaac soutient la thèse suivante: l’antisémitisme nazi est le fruit de l’antisémitisme chrétien, des Pères de l’Eglise, en particulier de saint Jean Chrysostome, de saint Agobard, de saint Grégoire le Grand, et de saint Augustin (55). Enfin, dans L’enseignement du mépris (dans l’édition italienne:Verità e Mito ) synthèse des deux œuvres précédentes, il identifie l’antijudaïsme chrétien exprimé dans un enseignement du mépris séculaire, (56) avec l’ennemi à abattre. Toutes thèses concevables dans un écrivain juif, et de surcroît athée, comme l’était Isaac. L’inconcevable est que Jean XXIII et ses successeurs aient prêté foi à cet homme et à ses thèses! Comment est-ce arrivé? Les écrits d’Isaac n’étaient pas des fins en soi, ils étaient bien plutôt orientés vers l’action. Examinons donc cette action d’Isaac pour faire accepter ses thèses, acceptation qui obtint la promesse de Jean XXIII lors de la rencontre de 1960. La manœuvre conjuguée d’Isaac et des B’naï B’rith Le travail commencé par Jules Isaac en 1941 se concrétisa, nous l’avons vu, sous la forme du livre Jésus et Israël déjà achevé en 1946, sinon publié. Les 21 arguments, ou thèses, de l’œuvre sont à la base de tous les développements qui se succéderont jusqu’à nos jours ( 57 ). “En 1947, bénéficiant de l’appui de personnalités philosémites telles que le père Daniélou ( 58), Henri Marrou, l’abbé Viellard, secrétaire de l’épiscopat etc., Jules Isaac rédigea un mémorial en 18 points sur la “réforme nécessaire de l’enseignement chrétien” (59) car “seul l’enseignement est en mesure de défaire ce qu’il a fait et continue de faire” (57). C’est ainsi qu’une Conférence internationale extraordinaire pour combattre l’antisémitisme fut réunie du 30 juillet au 5 août 1947 à Seelisberg, en Suisse, par l’International Council of Christians and Jews (60). “Les 18 points préparés par Isaac furent présentés à la Conférence” qui “réunit une centaines de délégués catholiques, protestants et juifs provenant de 19 pays. La troisième commission (il y en eut cinq), composée exclusivement de chrétiens examina ces points et les discuta ensuite l’un après l’autre avec la délégation juive. Le résultat fut la déclaration dénommée Les dix points de Seelisberg. Cette Conférence marque aussi le début de l’Association internationale des Amitiés judéo-chrétiennes qui prit comme base les Dix points” (61) et qui eut pour fondateurs, avec Jules Isaac qui en devint président honoraire, le Grand Rabbin de France (également affilié aux B’naï B’rith) Jacob Kaplan (62), les israélites Fleg (63) et Algazi, les catholiques Madaule, Marrou et Nantet, les protestants Martin et Lovsky (64). Le cardinal Liénart devint le protecteur officiel de l’Amitié, en mémoire sans doute de la condamnation de l’association analogue Amis d’Israël décrétée par le Saint-Office le 25 mars 1928 (65). En pratique, le travail d’infiltration interrompu par le décret de 1928, recommence avec l’espoir de trouver meilleur accueil. Dès 1949 un gros coup est tenté: obtenir l’appui de Pie XII. “Grâce à l’aide du B’naï B’rith, de Vincent Auriol et de Cletta Mayer”, Jules Isaac aurait été reçu en audience privée par le Pape le 1er octobre, à Castelgandolfo (66), il lui aurait remis les Dix points de Seelisberg et aurait “attiré l’attention du pape” sur la question de la prière du Vendredi Saint. En fait déjà «le 10 juin 1948, la Sacrée Congrégation des Rites, interrogée sur le sens à attribuer aux mots latins perfidis et perfidia avait déclaré que dans les versions en langue vulgaire la traduction de ces deux termes par infidèles et infidélité en matière de foi “n’était pas à rejeter”» (67). “Infidélité sonnait mieux en effet 28 que “perfidie”. Mais ça ne leur suffit pas. Isaac fit remarquer à Pie XII “que l’omission de la génuflexion était peut-être plus grave que la traduction erronée (sic) du mot “perfidis” (65). Il se référait à la rubrique liturgique selon laquelle on doit omettre la génuflexion et la prière silencieuse prescrite pour les autres oraisons, lorsque vient le tour de l’oraison pour les juifs. Voici comment Dom Guéranger explique le motif de cette omission: “Aujourd’hui la Saint Eglise prie même pour les fils des bourreaux de son divin Epoux, mais étant donné que la génuflexion fut utilisée par eux comme signe de dérision envers Lui, à l’heure même d’aujourd’hui elle craint, en renouvelant le geste de l’adoration à propos des juifs, de rappeler le souvenir de cette indignité” (68). Mais Pie XII n’était pas Jean XXIII; sur le moment Isaac s’en revint les mains vides. Mais sa demande concernant le flectamus genua à l’oraison du Vendredi Saint sera acceptée en 1955 avec le décret de réforme de toute la Semaine Sainte, Maxima Redemptionis. Le rôle joué à ce propos, souvent à l’insu de la Congrégation des Rites, par la Commission pour la réforme liturgique mettant à profit la maladie du Pape, Mgr. Bugnini lui-même l’a admis (69). Enfin nous voici en 1958; c’est l’élection de Roncalli, suivie, en janvier 1959, de l’annonce du Concile et, en mars, de la suppression, spontanée, de l’expression “juifs perfides”. Isaac comprend que le moment propice est venu. “En 1959, Isaac est en relations suivies avec divers prélats de la Curie romaine, notamment le cardinal Tisserand, le cardinal Ottaviani et surtout le cardinal Béa” ( 64). A la Sorbonne, le 15 décembre, il dévoile publiquement son objectif: “L’enseignement du mépris a trop duré et il a fait trop de mal; il n’a donc plus droit à l’existence. Que Dieu veuille qu’il fasse l’objet d’une condamnation solennelle et qu’il soit non seulement condamné mais totalement éliminé, aboli, proscrit, et qu’il disparaisse pour toujours des livres qui se disent chrétiens, des lèvres qui se disent chrétiennes” (70). L’appel est adressé “aux plus hautes autorités chrétiennes” (68). Restait à se faire écouter... Qui a préparé l’audience à Jules Isaac? L’entrevue historique de Jules Isaac et de Jean XXIII demeura secrète à la plupart pendant plusieurs années. En effet, si je ne me trompe, il n’y a trace de l’audience privée concédée à Jules Isaac ni dans l’Osservatore Romano ni dans la Documentation catholique de cette période. L’événement devint du domaine publique en 1962, lors d’une interview de Jules Isaac en personne avec la revue israélite l’Arche et l’écrivain Jean Toulat (71). Puis en 1968 la revue “judéo-chrétienne” SIDIC publia un rapport inédit préparé par Jules Isaac lui-même après l’audience que lui avait concédée, Jean XXIII (72). Sait-on tout désormais sur cette audience? Pas à proprement parler. C’est à Emmanuel Ratier, par exemple, que nous devons la reconstitution du rôle joué par les B’naï B’rith en cette circonstance. Voici, par exemple, comment, se fondant sur les déclarations mêmes d’Isaac, le secrétaire du cardinal Béa reconstitue les événements qui amenèrent à l’entrevue: «Lors d’une entrevue de 1962, il [Jules Isaac] expliquait comment le geste du pape Jean XXIII [le Vendredi Saint 1959, n.d.a.] avait suscité en lui l’espérance: “Pour la première fois, contrairement à ce que j’avais pensé auparavant, j’envisageai une démarche au sommet”. Le professeur, qui vivait à Aix-en-Provence, reçut à ce propos un encouragement de l’évêque du lieu, Mgr de Provenchères. En haut fonctionnaire d’Etat expert, il se prépara de façon très méthodique à cette démarche: “Dès 1959, lors d’une conférence tenue à la Sorbonne, j’adressai un appel au Pape [il s’agit du terrible diktat reporté ci-dessus, n.d.a.]. Les amis me demandèrent de me rendre à Rome en qualité de président honoraire de l’“Amitié judéo-chrétienne”. Je répondis: “Oui, mais je veux avoir la certitude d’être reçu en audience”. La certitude une fois acquise, on m’assura le financement nécessaire. Je préparai textes et documents. Je préparai une documentation et un pro-mémoire. Le tout fut imprimé en français et en italien. Le voyage fut organisé méthodiquement. L’objectif précis était “la révision de l’enseignement chrétien concernant les juifs” » (42). Attention, Isaac ne ment pas. Il omet seulement de dire toute la vérité. Qui étaient les “amis” qui lui donnèrent l’assurance d’une audience, qui lui en procurèrent le “financement” et l’envoyèrent en reconnaissance comme président honoraire des judéo-chrétiens? Ses frères de la Loge franc-maçonne juive des B’naï B’rith” avec l’appui des politiciens socialo-communistes amis de Roncalli. Qu’on lise Ratier, il documente toutes ses af- 29 firmations: «“Lorsque nous conçûmes, avec Cletta Mayer (épouse de Daniel Mayer) (73), l’idée d’une rencontre Jules Isaac-Jean XXIII - écrit Jean-Pierre Bloch, ex-président de la L.I.C.R.A. et du B’naï B’rith (74) - nous fîmes part de notre projet à Vincent Auriol (75). Lui seul était capable de préparer cet entretien historique. Au cours d’une visite, après lui avoir montré l’intérêt de la visite de Jules Isaac, Vincent Auriol, qui avait gardé des relations suivies avec le nonce du pape, Roncalli devenu Jean XXIII, n’hésita pas, et dans une longue lettre au Saint-Père lui expliqua les raisons de cette demande d’audience. Nous connaissons la suite: Jules Isaac fut longuement reçu par Jean XXIII. Et, après les décisions du Concile qui ont lavé le peuple juif de l’accusation absurde de déicide, si l’on doit souligner l’action de Jules Isaac, il faut rappeler aussi que c’est Vincent Auriol qui prépara le voyage historique de Rome”. “La collecte des fonds nécessaires au voyage d’Isaac et à l’établissement du dossier à donner au pape fut organisée par Marcel Bleustein-Blanchet (76), président de Publicis et membre de la L.I.C.R.A. [Ligue contre le racisme et l’antisémitisme, n.d.a.] et du B’naï B’rith”. Isaac fut accompagné par Gaston Kahn, président honoraire de la Loge France” et par “Georges Jacob (...), les responsables français du B’naï B’rith”, “afin de mieux préparer l’entretien historique. La réussite à l’issue du voyage fut telle que ce voyage représente pour PierreBloch la plus grande fierté de sa vie. Isaac était clairement mandaté par le B’naï B’rith, comme l’a reconnu le Dr Ernst Ludwig Ehrlich, directeur du district 19 du B’naï B’rith, insistant sur le fait que son organisation souhaitait peser et a pesé de tout son poids sur le déroulement du Concile...» (77). Ernst Ehrlich pouvait crier victoire lorsqu’il faisait ces aveux en 1966, à concile conclu; mais les choses n’étaient pas encore aussi évidentes en 1960, juste avant que Jules Isaac soit reçu au Vatican. Lisons le père Schmidt: «Le professeur [Isaac] était cependant parfaitement conscient de la difficulté de l’entreprise. Il écrit: “Il faut comprendre à quel point l’entreprise était difficile et audacieuse. Le problème de l’enseignement catholique était infiniment plus complexe que celui de la liturgie. Considéré sous cet aspect particulier (Israël), il touchait - sinon les données mêmes de la foi et du dogme - au moins une tradition séculaire, millénaire même, remontant aux Pères de l’Eglise, à saint Jean Chrysostome et à saint Augustin ( 78). D’où la nécessité, dans ces conversations romaines, d’unir le maximum de prudence avec le maximum de franchise. Mais je ne me cachais pas qu’il s’agissait là d’une véritable épreuve de force et que j’aurais, à certains moments, à sauter un abîme”» (79). Isaac reçu par Jean XXIII (13 juin 1960) Et nous voici arrivés enfin à la célèbre audience. Je rapporte, pour le lecteur de Sodalitium, le récit qu’en a fait Isaac lui-même: «Enfin vers 13h15 mon tour arrive. Le pape nous reçoit debout devant la porte qui s’ouvre. M. de Warren (80) fléchit le genou, je m’incline et Jean XXIII me donne tout bonnement la main. Je me présente comme non chrétien, promoteur des Amitiés judéo-chrétiennes en France, et comme un vieil homme très sourd. Nous nous installons à côté du bureau de travail sur trois fauteuils tout proches l’un de l’autre. Je suis à côté du pape qui est vraiment la simplicité même, et cette simplicité fait un contraste saisissant avec le faste du décor et du cérémonial qui précède. Il ne paraît pas si fatigué. C’est un bonhomme tout rond, assez gros, visage aux traits forts et rustiques. Un gros nez, très souriant, volontiers riant, avec un regard clair, un peu malicieux, mais où il y a une évidente bonté qui inspire confiance. Comme prévu, c’est lui qui engage la conversation, vivement, parlant de son culte pour l’Ancien Testament, les Psaumes, les Prophètes, le livre de la Sagesse. Il parle de son nom qu’il a choisi en pensant à la France; me demande où je suis né, dans quelle région de la France. Et moi je cherche la transition pour l’amener sur le terrain voulu: je lui dis le grand espoir que les mesures prises par lui, si spontanément, ont éveillé dans le cœur du peuple de l’Ancien Testament; si nous attendons de lui davantage encore, n’est-ce pas lui-même qui en est responsable par sa grande bonté? Ce qui le fait rire. Alors j’expose ma requête concernant l’enseignement, et d’abord sa base historique. Mais comment, en quelques minutes, faire comprendre ce qu’a été ce ghetto spirituel dans lequel l’Eglise progressivement a fini par enfermer le vieil Israël - en même temps que dans un ghetto matériel -? Je dois me borner à un raccourci, aussi bref et frappant que possible. Je montre aux deux extrémités de l’ère chrétienne d’une part un antisémitisme païen, inconsistant et absurde dans ses accusations, 30 d’autre part l’antisémitisme raciste hitlérien le plus virulent, de nos jours non moins inconsistant et absurde. Mais entre les deux, le seul qui ait de la consistance et sur lequel on ait prise, c’est celui qu’a engendré une certaine théologie chrétienne, sous la pression des circonstances, parce que la négation juive était le principal obstacle à la propagande chrétienne dans le monde païen». J’interromps un instant le récit. A ce moment déjà, Jean XXIII aurait dû mettre l’émissaire des Loges à la porte. D’abord parce que les “Amitiés judéochrétiennes” auraient dû être condamnées au même titre que leur sœur jumelle, la société des “Amis d’Israël”. Ensuite, parce que les juifs actuels ne sont plus le peuple de l’Ancien Testament, ne serait-ce que parce que l’Ancien Testament a été abrogé par le Nouveau. Ensuite un Pape ne peut pas écouter sans frémir les accusations injustes qu’Isaac portait contre ses prédécesseurs et contre l’Eglise toute entière. Mais surtout, les dernières paroles du vieux socialiste étaient inacceptables pour un vrai Vicaire du Christ. Elles se réfèrent, nous l’avons démontré précédemment, aux Evangiles, aux Actes des Apôtres, aux Pères de l’Eglise dont la “propagande” (!) auprès des païens devait (aux dires d’Isaac) se servir de la calomnie contre les juifs pour gagner les bonnes grâces de ces peuples et pour leur expliquer dans le même temps comment il se faisait que les juifs n’aient pas écouté le Messie. Devant cette insulte au Saint-Esprit, véritable auteur des Saintes Ecritures et guide infaillible de l’Eglise à travers les siècles, Angelo Roncalli aurait dû réagir... Au contraire il laisse Isaac poursuivre: «Ainsi s’est formé ce que j’ai appelé “l’enseignement du mépris” et, comme il s’est exercé pendant des siècles et des siècles, la mentalité chrétienne en a été profondément imprégnée. Il existe aujourd’hui heureusement un contre-courant, purificateur, qui se renforce de jour en jour. Cependant des enquêtes récentes ont montré que “l’enseignement du mépris subsiste toujours. Entre ces deux tendances contraires, l’opinion catholique est divisée, reste flottante. Voilà pourquoi il est nécessaire qu’une voix s’élève d’en haut, du plus haut, du “sommet” - la voix du chef de l’Eglise - pour indiquer à tous le bon chemin et condamner solennellement cet “enseignement du mépris”, en son essence antichrétien. Pratiquement, comment s’y prendre? Je présente alors ma note conclusive et la suggestion de créer une Sous-Commission annexe chargée d’étudier la question». L’audace de notre maçon est à son comble! C’est lui, un athée de surcroît, qui établit que ce qu’a dit et fait l’Eglise pendant des siècles et des siècles, formant ainsi la mentalité chrétienne... est essentiellement anti-chrétien! Et le Chef des chrétiens doit donc “condamner solennellement” non pas les ennemis de l’Eglise mais... ce que l’Eglise a fait durant “des siècles et des siècles”, ainsi que ces catholiques qui de nos jours n’ont pas encore suivi les modernistes dans l’abjuration de “siècles et de siècles” de christianisme. C’est Isaac qui enjoint à Jean XXIII de prendre position: de quel côté êtes-vous? Avec les siècles de christianisme, ou bien avec mes nouveaux chrétiens des “amitiés judéochrétiennes”? Formez une commission et chargez-la de condamner les récalcitrants! Que lui répond Jean XXIII? Isaac nous le raconte lui-même: «Le pape réagit aussitôt en disant: “J’y ai pensé dès le début de l’entretien”. A plusieurs reprises au cours de mon bref exposé, il avait manifesté sa compréhension et sa sympathie. (...) Mais l’entretien touche à sa fin, plus de vingt minutes sont passées. Heureusement il y a le Mémoire, le dos- Ce Vendredi-Saint ne fut pas un Vendredi-Saint comme les autres: ces bandes dessinées en sont elles aussi un témoignage. 31 sier, la Note conclusive [mise au point la nuit précédente, n.d.a.], que je remets et que le pape promet de lire. En disant toute ma gratitude pour l’accueil reçu, je demande si je puis emporter quelque parcelle d’espoir. Il se récrie: “Vous avez droit à plus que de l’espoir”. Il ajoute en souriant: “Je suis le Chef, mais il me faut aussi consulter, faire étudier par les bureaux les questions soulevées, ce n’est pas ici la monarchie absolue”. Et nous nous quittons sur une nouvelle et bonne poignée de mains» (81). Lorsque Théodore Herzl, reçu en audience par saint Pie X, lui avait demandé l’appui du Pape pour la constitution d’un état juif (pas nécessairement en Palestine), il s’était heurté à un refus net du Pape avec ces mots: “Il n’est pas possible d’aider un Etat juif. Les juifs n’ont pas reconnu le Christ, nous ne pouvons pas reconnaître Israël” (82). Le vieil Herzl demandait beaucoup, beaucoup moins cependant que Jules Isaac à Jean XXIII. Pourtant la réponse de Roncalli que je viens de rapporter fut à l’opposé de celle de saint Pie X. “Compréhension, sympathie”; pour Isaac c’était “plus qu’un espoir”: en vingt minutes, Roncalli reniait deux mille ans de tradition catholique... Qu’on ne s’y trompe pas: sa répartie sur l’Eglise qui ne serait pas une monarchie absolue n’était pas une façon de s’esquiver pour refuser ensuite gentilment ce que lui demandait le maçon français. Car les “autres” à consulter, les “bureaux chargés d’étudier les questions” ne pouvaient qu’être agréables à Jules Isaac et aux B’naï B’rith... Ite ad Bea En effet en cette tragique circonstance, on touche du doigt toute la gravité de l’institution, par Jean XXIII, du Secrétariat pour l’Union des Chrétiens (83). Je rappelle que le 14 mars 1960 Roncalli avait pris la décision de créer cet organisme pour l’œcuménisme, dirigé par le card. Béa, et que le Secrétariat ne fut officiellement constitué que le 5 juin suivant, avec le Motu Proprio Superno Dei Nutu. Une semaine était à peine passée qu’arrivait au Vatican le délégué des B’naï B’rith, Jules Isaac. En temps normal, il aurait été adressé au Saint-Office qui avait la compétence de toutes les questions concernant la foi. Mais depuis une semaine il n’en était plus ainsi: il fallait compter avec le Secrétariat de Béa qui, selon une expression de Mgr Capovilla, avait “la confiance et la confidence de Jean XXIII” (84). Isaac à peine parti, Béa se rendit chez son secrétaire, le Père Schmidt, et lui dit, partagé entre la joie et l’émerveillement: “Figure-toi que le SaintPère a dit à Jules Isaac de s’adresser à moi”» (84). Isaac ne perdit pas de temps: le 15 juin, il avait un entretien de plus d’une heure avec Béa. Isaac raconta ensuite à Toulat: «... il s’est montré parfaitement au courant des problèmes affrontés. Il est en relation avec les catholiques allemands qui font le même travail que nos groupes de l’“Amitié judéochrétienne”. J’ai trouvé en lui une aide providentielle».(84). Après les vacances d’été, le 14 septembre, le cardinal Béa écrivait à Jean XXIII pour lui exprimer son «désir de traiter “de vive voix” de certaines questions regardant le Secrétariat pour l’unité des chrétiens, dont Votre Sainteté a daigné me confier la présidence. Je désirerais, en particulier, soumettre aussi à Votre Sainteté la question de la compétence en ce qui regarde les relations entre juifs et catholiques, relations au sujet desquelles je suis fréquemment interpellé”. Et il fut effectivement reçu en audience le 18 septembre; en cette occasion, le Pape lui confia formellement la charge concernant les relations avec le peuple élu de l’Ancien Testament» (85). “ Le cardinal fit alors un second pas en avant. Vu que les membres et les consulteurs du Secrétariat avaient été nommés avant la création de la charge regardant les juifs, on procéda à des nominations supplémentaires de spécialistes pour ce secteur” (86). Je ne sais pas quelles furent les nouvelles nominations. Ce qui est certain c’est que dans l’organe de 1961 il y avait deux experts, d’autant plus experts qu’ils étaient juifs d’origine: le père Tommaso Strasky C.S.P. et le père Gregory Baum, augustinien, auxquels fut adjoint Mgr John Oesterreicher (87). Giniewsky rapporte par exemple, tout à l’honneur de Jean XXIII, qu’ «il fit publier par Mgr Oesterreicher, directeur de l’Institut d’Etudes Judéo-chrétiennes (un des rares prélats allemands à avoir défendu les juifs dans l’Allemagne nazi, et réfugié aux EtatsUnis en 1938) un texte dans lequel était approuvé “le changement d’attitude, le changement dans la façon d’aborder le problème, le changement d’esprit” de l’Eglise envers les fils d’Israël, et dans lequel on mettait en garde contre une lecture des Evangiles qui conduit au mépris des juifs» (88). Giniewsky oublie de dire à ses lecteurs que l’Institut pour les Etudes Judéo-chrétiennes situé à Seton-Hall, South Orange (U.S.A.) et dirigé 32 par Oesterreicher, est une émanation de l’A.D.L., Ligue Anti-diffamation... de nos B’naï B’rith bien connus! (89). Autre “découverte” du cardinal Béa: le père Gregory Baum; Hebblethwaite écrit à son sujet: “Béa découvre, par exemple, l’augustinien canadien Gregory Baum dont la thèse à Fribourg, Suisse, en 1956, Que tous soient un [Ut unum sint], avait été suivie d’un travail sur l’antisémitisme des Evangiles“ (90). Selon certains auteurs, Oesterreicher et Baum (allemand émigré au Canada) étaient tous deux non seulement d’origine juive, mais juifs de naissance, convertis par la suite, conversion dont il serait licite de douter étant donnés les faits qui ont suivi ( 91 ). Voilà quels sont les hommes qui prépareront Nostræ Ætate, le document conciliaire sur les juifs. le point de départ d’un continuel crescendo de concessions et de mea culpa de la part de ceux qui occupent de fait les hautes charges de l’Eglise, concessions - et même reniements - qui ne suffisent jamais à ceux qui les réclament ou les exigent. Depuis ce 13 juin, la situation n’a fait qu’empirer. Dans le prochain numéro, nous suivrons le déroulement des événements relatifs aux rapports entre christianisme et judaïsme jusqu’à la mort de Jean XXIII; certains de ces événements sont connus, d’autres par contre sont encore secrets et enveloppés d’épaisses ténèbres. Prions Dieu que se fasse la lumière dans toutes les intelligences, que tous comprennent par qui Vatican II nous a été imposé; prions Dieu pour obtenir la force de volonté qui nous permette de demeurer fidèles à l’enseignement millénaire de l’Eglise catholique. Point d’aboutissement, point de départ L’entrevue Jules Isaac - Jean XXIII fut un point d’aboutissement, mais aussi un point de départ. Un aboutissement, disais-je. Sans remonter très loin dans les siècles (et à ce propos je renvoie le lecteur aux articles de l’abbé Nitoglia publiés dans notre revue) il suffit de rappeler encore une fois l’histoire de l’Association Amis d’Israël. «Fondée en 1926, l’association se proposait la modification de la prière Pro Perfidis Judæis du Vendredi saint, le rejet de l’accusation de “déicide” et la suppression des cérémonies liturgiques relatives aux accusations d’homicides rituels perpétrés par les juifs. Nonobstant le développement rapide de l’association, à laquelle adhérèrent des personnalités de l’Eglise et de la culture, elle fut supprimée par un décret du Saint-Office le 25 mars 1928, parce qu’elle n’était pas en accord avec la tradition de l’Eglise, avec la pensée des Pères et la praxis liturgique» (92). Qui ne voit que les Associations judéo-chrétiennes fondées en 1948 n’étaient rien d’autre que la réédition, avec les mêmes fins, de l’Association Amis d’Israël fondée en 1926? Une seule différence: en 1928, Pie XI condamne comme contraire à la tradition de l’Eglise et à la pensée des Pères ce qu’à l’inverse, en 1960, Jean XXIII approuve et bénit. La manœuvre avait pleinement abouti, avec la satisfaction accordée à la demande. Mais ça n’était pas suffisant. La “bonté” de Jean XXIII encourageait les associations juives à demander toujours davantage... Jules Isaac lui-même ne l’a-t-il pas déclaré? L’audience du 13 juin 1960 fut donc aussi Notes 1) ROSARIO ESPOSITO S.S.P., Le grandi concordanze tra Chiesa e Massoneria, Nardi ed., Firenze, 1987, p. 397, qui cite La Civiltà Cattolica, 3-V-86, 371. 2) SILVIO FERRARI, Vaticano e Israele, Sansoni ed., Firenze, 1991, p. 97. 3) Cf. JULES ISAAC, Verità e mito, (titre de l’édition italienne de L’enseignement du mépris ) Carraba ed., Roma, 1965, p. 12. Saul Israël précise: “Cet antisémitisme n’est cependant pas raciste car le juif qui se convertit est considéré absolument comme les autres chrétiens. Le racisme est la négation la plus flagrante de l’apostolat chrétien. Le Christianisme s’est appliqué seulement à éliminer le Judaïsme et non les Juifs de race sémite; les persécutions furent toutes dirigées contre ceux qui persévéraient dans des positions religieuses considérées non seulement comme dépassées mais comme un véritable défi au Christianisme” (ibidem, p. 13). 4) GIUSEPPE RICCIOTTI, Vità di Gesù Cristo, Mondadori ed., [194] 1974, p. 88. 5) A celui qui désire en savoir davantage, je conseillerais la lecture des articles de Sodalitium que l’abbé Nitoglia a consacrés à la question juive à partir du numéro 27. 6) JOSUE JEHOUDA . L’Antisémitisme, miroir du monde, éd. Synthésis, Genève, 1958. Cité par: LEON DE PONCINS, Il problema dei Giudei in Concilio. Casa ed. The Britons, Londres (mais imprimé à Rome), sine data (mais de 1965), p. 22. L’opuscule de de Poncins a été inséré ensuite avec quelques mises au points et quelques ajouts comme chapitre VI (Le problème juif devant le Concile) dans AA.VV. (par les soins d’Henri Coston), Infiltrations ennemies dans l’Eglise, Documents et Témoignages, La Librairie française, Paris, 1977; il a aussi été réimprimé en italien: Il problema degli Ebrei al Concilio, par les soins du Comitato per la difesa della Civiltà Cristiana Carlo Magno. C.P.62-44043 Mirabello (FE). 7) ELIA BENAMOZEGH, Israël et l’humanité., Albin Michel, Paris, 1961 (19147); A. MEMMI, Portrait d’un juif, Gallimard, Paris, 1962; RABI, Anatomie du judaïsme français, Editions de Minuit, Paris 1962. Les citations se trouvent dans DE PONCINS, op. cit., p. 24. 8) Cf. La Repubblica, 4 novembre 1994, p. 14. 33 9) AA.VV. sous la direction de LEON POLIAKOV, Histoire de l’Antisémitisme, 1945-1993. Seuil, Paris, 1994, p. 327. 10) PAUL GINIEWSKI, La Croix des Juifs, MJR éd., Genève, 1994, p. 329. Préface de Léon Poliakov et du père Jean Dujardin, secrétaire du Comité épiscopal français pour les Relations avec le Judaïsme. Le livre est dédié “à la mémoire de Jules Isaac et de Jean XXIII”. 11) HANS KUNG, Ebraïsmo. Rizzoli, Milano, 1993, p. 294. 12) STJEPAN SCHMIDT S.J., Agostino Bea. Il Cardinale dell’unità. Città Nuova ed., Roma, 1987, p. 351. L’affirmation est absolument inacceptable. Derrière ces trois hommes il n’y avait pas de mouvements de masse, mais une puissante organisation, le B’naï B’rith... comme nous allons le voir. 13) SILVIO FERRARI, op. cit., pp. 96 et 265, note 238. 14) PAOLO TANZELLA S.C.J., Papa Giovanni, éd. Dehoniane, Napoli-Roma-Andria, 1973, p. 245. Roncalli et Herzog avaient fait connaissance personnellement en 1944 (cf. Sodalitium n° 26, p. 30). Giniewski affirme que Roncalli avait tenté d’obtenir pour le grand rabbin de Jérusalem, Isaac Halevi Herzog, une entrevue avec Pie XII, mais sans succès (op. cit., p. 329). 15) S . FERRARI , op. cit., p. 99. L’auteur ajoute: “quatre ans plus tard, un fonctionnaire du ministère des Affaires religieuses d’Israël participera aux cérémonies inaugurales de Vatican II”. 16) PADRE LAGRANGE O.P., Le messianisme chez les juifs, 1909, p. 294; cité par don Nitoglia, Monseigneur Pranaïtis. Le Christ et les chrétiens dans le Talmud, dans Sodalitium, n° 36, pp. 5 et 6. Sur l’évolution de la prière contre les chrétiens, cfr. l’article du Dr ISRAEL SHAHAK, Lois talmudiques et rabbiniques contre les Nations, traduit de l’anglais par Jacques Monod et repris dans le livre du général MOUSTAFA TLASS, L’Azyme de Sion, Dar Tlass éd., Damasco, 1990, pp. 353-354. 17) En 1966, après Vatican II, une nouvelle formule fut adoptée: “Prions aussi pour les juifs. Que le Seigneur, Notre Dieu, fasse resplendir sur eux son visage afin qu’ils reconnaissent eux aussi le Rédempteur de tous les hommes, Jésus-Christ, notre Seigneur”. “Dieu éternel et tout-puissant, toi qui fis alliance avec Abraham et sa descendance, écoute avec bonté les prières de ton Eglise. Que le peuple racheté en premier puisse parvenir à la plénitude de la rédemption”. Avec l’introduction du nouveau missel en 1969, la prière fut de nouveau modifiée: “Prions pour les juifs à qui Dieu a parlé en premier: qu’ils progressent dans l’amour de son Nom et dans la fidélité de son Alliance”. “Dieu éternel et tout-puissant, toi qui a choisi Abraham et sa descendance pour en faire les fils de ta promesse, conduis à la plénitude de la rédemption le premier peuple de l’Alliance, comme ton Eglise t’en supplie”. Cf. Les Eglises devant le judaïsme. Documents officiels 1918-1978. par les soins de MARIE-THERESE HOCH et BERNARD DUPUIS. Ed. du Cerf. Paris, 1980, pp. 350-352. Voici ce qu’écrit a ce propos Mgr Ugnini, l’auteur de toute la réforme liturgique: “Dans le climat œcuménique du Concile certaines expressions des Orationes Solemnes du vendredi saint sonnaient plutôt mal désormais. Aussi, pour certaines phrases, la possibilité d’une atténuation futelle demandée avec insistance. Il est toujours ennuyeux de devoir toucher à des textes vénérables qui ont, durant des siècles et avec tant d’efficacité, alimenté la piété chrétienne, des textes qui ont le parfum spirituel des âges héroïques de l’Eglise à ses débuts; il est malvenu surtout de retoucher des chef-d’œuvres littéraires d’une forme et d’une conception inégalables. Ceci étant, il fut considéré comme un devoir d’affronter cette tâche de façon à ce que dans la prière de l’Eglise personne ne trouve motif de malaise spirituel. (...) L’oraison 8, pour les juifs (autrefois pour la conversion des juifs) fut entièrement remaniée”. [Cf. ANNIBALE BUGNINI, La Riforma Liturgica (1948-1975). CLV Edizioni liturgiche, Roma, 1983, p. 127]. Si l’adage selon lequel on prie comme on croit est vrai, il faut en conclure que la prière radicalement changée par Vatican II est l’expression d’une “foi” elle aussi radicalement altérée. 18) “Quia autem gentilitas colligenda erat, et Judæa pro culpa perfidiæ dispergenda, ipsa quoque descriptio terreni principatus ostendit: quoniam et in romana republica unus præfuisse describitur, et in judææ regno per quartam partem plurimi principabantur” (Saint Grégoire, Homilia 20 in Evang.), cfr. Breviarum Romanum, Pars Hiémalis, Sabbato Quattuor Temporum, lectio prima. “Judæi (...) perfidiam suam prodeunt” (Saint Ambroise, Liber 5 in Cap. 5), cfr. Breviarum Romanum, Pars Verna, Feria VI, Quattuor Temporum Pentecostes, lectio prima; cfr. également l’Hymne de Pentecôte à Matines: “Falsum profari perfidos”. 19) STJEPAN SCHMIDT, op. cit., pp. 351-352. 20) GIANCARLO ZIZOLA, Jean XXIII. La fede e la politica. Laterza ed., Roma-Bari, 1988, p. 212. En réalité Jean XXIII ne célèbrait pas le rite, il y assistait seulement, dans la Basilique de Sainte Croix de Jérusalem à Rome (cf. Documentation catholique, n° 1307, 5 juillet 1959, col. 843). 21) En réalité la date du 5 juillet proposée par Hoch et Dupuy (op. cit.) est fausse. En effet le 5 juillet n’est que la date à laquelle fut publié le n° 1307 de la Documentation Catholique rapportant aux colonnes 842 à 844 le texte du décret de la Sainte Congrégation des Rites. Le décret est du mois de juin. De même, la date du 21 mars proposée pour la circulaire du Vicariat de Rome est probablement inexacte, étant donné que le geste de Jean XXIII, accompli le 27 mars, était inattendu. 22) Giniewski émet l’hypothèse que l’erreur du célébrant, corrigée par Jean XXIII n’était pas involontaire. Quelques jours plus tard l’Osservatore Romano aurait démenti l’événement, “malgré le témoignage concordant de milliers de fidèles et de journalistes” (op. cit., pp. 330331). Le caractère incongru du geste de Jean XXIII n’avait probablement pas échappé à la Curie qui avait cherché, comme en d’autres occasions, à minimiser... 23) Les Eglises devant le Judaïsme, op. cit., pp. 351352 et note 31. Cf. également S. FERRARI, p. 98 qui cite (mais je n’ai pas pu le consulter) ENZO BIANCHI, Israele e la chiesa, dans Cristianesimo nella storia, fév. 1989, pp. 82-83. Enzo Bianchi est président du SIDIC (Service International de Documentation judéo-chrétienne) association fondée en 1965 par des Pères conciliaires pour l’actualisation de la déclaration Nostra Ætate; et il est aussi collaborateur du quotidien Avvenire. 24) GINIEWSKI, op. cit., p. 330. 25) Cf. par ex. P . LUDOVIC MARIE BARRIELLE , C.P.C.R., Le Sacré-Cœur; notre nouveau labarum, [éd. Saint-Gabriel, Martigny], dans lequel est également reproduite l’encyclique de Pie XI Miserentissimus Redemptor qui se réfère explicitement à Annum Sacrum. 26) 18 juillet 1959, A.A.S. 22 août 1959, p. 543. 27) Documentation catholique, n° 1314, 18 octobre 1959, colonne 1293. 28) SCHMIDT, op. cit., p. 352, qui cite l’article Le Vatican et nous publié par L’Arche, n° 69 octobre 1962, pp. 26-31. 29) Vous ne le saviez pas? Voilà cinq ans que la C.E.I. dédie officiellement une journée à la judaïsation des catholiques italiens; en effet, en cette occasion et là où 34 c’est possible, un rabbin prêche le judaïsme aux fidèles réunis à la paroisse pour assister à la “messe” dominicale... 30) L’année 1994 n’a pourtant pas porté chance au sénateur Spadolini: il perd d’abord, à son grand regret, cette charge prestigieuse, puis il meurt peu de temps après. Paix à son âme. De tous les politiciens italiens, Spadolini, le “pape du laïcisme”, était le plus proche d’Israël, peut-être pour se faire pardonner ses erreurs racistes du temps où il était collaborateur de la revue fasciste La difesa della razza. Quel scandale que les funérailles religieuses de ce vieil anticlérical impénitent, dont un “cardinal”! a fait l’éloge, nous le présentant comme un homme ayant réalisé les paroles de Jésus: “Quiconque est de la vérité, écoute mes paroles”! Enfin on peut se demander comment un tel homme, plus proche de la maçonnerie que de l’Eglise, a pu savoir à l’avance qu’au conclave de 1963 c’est G.B. Montini qui serait élu, et qu’il prendrait le nom de Paul VI (Cf. SI SI NO NO, 31 octobre 1994, n° 18, p. 4). 31) SIDIC, via del Plebiscito 112, Roma, mai 1994, vol. XXVII, n° 1, Edition française p. 22. 32) Nulle part on ne parle de Jules Isaac. Pas même dans la biographie de Jean XXIII ... 33) Les Eglises devant le Judaïsme, op. cit., pp. 181-182. 34) JULES ISAAC, Gesù e Israele, Nardini ed., Firenze, 1976, pp. 7 à 10. Le volume a été traduit et publié par les soins de l’Amitié judéo-chrétienne de Florence et édité par Nardini, maison d’édition qui, tout en arborant comme symbole un Saint George tuant le dragon, n’en est pas moins notoirement proche de la Franc-maçonnerie. 35) L. LAZARE, article Isaac Jules Marx, dans l’Encyclopædia Judaica, IX, col. 10, Jérusalem, 1971. 36) Cf. EMMANUEL RATIER, Mystères et secrets du B’naï B’rith, éd. Facta, Paris, 1993, p. 114. Traduction italienne en préparation par les soins de la Coop. ed. Sodalitium. 37) Cf. JULES ISAAC, Gesù e Israel, op. cit., p. 22. Julius Wellhausen (1844-1918), historien et philosophe protestant, soutint en exégèse la “théorie des sources”, théorie de caractère rationaliste. Alfred Loisy (1857-1940), prêtre et exégète moderniste, appliqua à l’exégèse biblique les méthodes de ladite “critique historique”. C’est pour cela qu’il fut excommunié par saint Pie X en 1908. 38) «Les actes, les œuvres, ont plus de valeur que la foi; si la foi les accompagne, tant mieux (...). Nous, nous disons: “L’homme se sauve par les œuvres; s’il y a la foi cela vaut mieux, mais s’il n’y a pas la foi et si l’individu se comporte bien, il se sauve également». Cfr. TOAFF-A. ELKANN, Essere ebreo, Bompiani ed., Milano, 1994, p. 87. 39) G. ZIZOLA, op. cit., p. 215. Péguy est l’un des maîtres à penser de notre Communion et Libération, mais aussi, ce que je n’arrive pas à comprendre, des “traditionalistes” comme on les appelle communément. Même après sa conversion au catholicisme (qui cependant ne déboucha pas sur la pratique des sacrements), Peguy soutenait des thèses inconciliables avec la foi, (entre autres - lui aussi! - celle du salut de tous les hommes). Un “maître” à éviter soigneusement... 40) Jean-Elie Zay, d’origine juive, “avocat et homme politique. Né à Orléans en 1904. Assassiné par ses adversaires durant l’occupation (1944). Fut député radical-socialiste du Loiret (élu en 1932, réélu en 1936), ministre de l’éducation nationale, rédacteur de la France du Centre”, Cf. GYGES, Les Juifs dans la France d’aujourd’hui, Documents et témoignages, Paris, 1985, pp. 243-244 (voir aussi p. 64). 41) Cf. E. RATIER, op. cit. p. 114 et le Père S. SCHMIDT s.j., op. cit., p. 352. Léon Blum (1878-1950), homme politique socialiste d’origine juive. En 1934 il accepta le pacte d’unité d’action avec le Parti communiste et se trouva à la tête du gouvernement de front populaire (1936-37). Il soutint le gouvernement républicain communiste dans la guerre d’Espagne, et fut responsable du massacre de milliers de prêtres, de religieuses et de simples fidèles, tués uniquement parce qu’ils étaient chrétiens. Jules Isaac ne semble avoir versé aucune larme sur leur sort. 42) S. SCHMIDT, op. cit., p. 352. Notez bien que le père Schmidt, quoique parfaitement documenté, cache au lecteur la vérité sur Jules Isaac, édulcorant au maximum les accusations de ce dernier contre le christianisme. 43) Ratier (l.c.) nous rapporte cependant un fait curieux: le Maréchal Pétain choisit Isaac, en 1939, “pour être son biographe”. 44) JULES ISAAC, Verità e mito, ed. Carabba, Roma, 1965, pp. 36 et 34. L’Encyclopædia Judaica (l.c.) résume ainsi l’enseignement de Jules Isaac à ce propos: “Dans le même temps il arriva à la conclusion qu’il n’y avait aucune raison de penser que l’antisémitisme est aussi vieux que le judaïsme lui-même. Au contraire, il démontra que l’Eglise promut un système de dégradation écrasant graduellement les juifs sous une longue série de restrictions, exclusions et humiliations qui furent décrétées par le pouvoir civil soumis à l’influence ecclésiastique. Ce système était basé sur l’enseignement du mépris qui fut l’œuvre essentiellement des Pères de l’Eglise du IVème siècle de l’ère chrétienne...” 45) E. RATIER, op. cit., p. 115. 46) Sur cette association, outre le livre de Ratier cité ci-dessus, voir: Sodalitium, n° 9 [n° 2, mai-juillet 1985] éd it. (il n’existe pas encore d’édition française), pp. 5 à 21; n° 33, pp. 20 à 22; n° 35, pp. 46 à 51. Voir également The Ugly Truth About the Anti-Difamation League par les soins des éditeurs de l’EIR (Executive Intelligence Review), Ben Franklin Booksellers, Leesburg, Virginia, USA, 1992. 47) Les discours du cardinal, du grand rabbin Sirat et de Marc Aron sont rapportés par Ratier, op. cit., pp. 371 à 381 (cf. aussi p. 114). Le cardinal Decourtray, archevêque de Lyon est décédé en 1994. Ses funérailles ont été célébrées avec le concours de nombreux évêques, d’un rabbin et d’un religieux musulman, dans le rite des trois religions! 48) G. ZIZOLA, op. cit., p. 215. 49) Fasquelle éditeurs, Paris, nouvelle édition 1970. 50) L’édition italienne, sous le titre Gesù e Israele, est seulement de 1976 (Nardini editore, Firenze). Toutes les citations extraites de cette œuvre le sont de l’édition italienne. 51) RABI, Anatomie du judaïsme français, Edition de Minuit, Paris, 1962, cité par L. DE PONCINS, op. cit., p. 25. 52) Edition Calmann-Lévy, Paris. 53) Fasquelle Editeur, Paris. L’édition italienne, sous le titre de Verità e Mito, est de 1965 (Carabba ed., Roma), à la veille de l’approbation du document conciliaire sur les juifs Nosta Ætate. 54) Rabbin Henry Siegman, Dix années de relations judéo-chrétiennes, rapport présenté à la Vème rencontre annuelle, (Jérusalem 1-3 mars 1976) dans Les Eglises devant le judaïsme, op. cit. p. 408. 55) Nombreuses citations dans DE PONCINS, op. cit., pp. 12 à 19. 56) Les trois piliers de l’“enseignement du mépris” seraient les thèses chrétiennes traditionnelles “sur la dispersion d’Israël” en tant que “châtiment de la Providence”, “sur le judaïsme dégénéré au temps de Jésus” et sur les juifs comme “peuple déicide”. 57) Les 21 arguments se trouvent dans Jésus et Is- 35 raël, op. cit., pp. 457 à 461, et dans Vérité et mythe, op. cit., pp. 167 à 172. 58) Jésuite né en 1905 et décédé dans les circonstances scabreuses bien connues en 1974. Son frère Alain est un ésotériste notoire (cf. MAURICE BLONDET, Gli “Adelphi della Dissoluzione. Ares, Milano, 1994, p. 81). Jean Daniélou, lui, fut impliqué dans les vicissitudes de la “nouvelle théologie” condamnée par Pie XII. Après Vatican II, Paul VI en 1969 le créa cardinal. Il devint par la suite, avec Maritain et d’autres, l’un des représentants du courant modéré” qui se plaignaient des excès post-conciliaires. L’habituel pompier-pyromane... 59) Les 18 points se trouvent dans Gesù e Israele, op. cit., pp. 401 à 404. 60) Les Eglises devant le Judaïsme, op. cit., p. 19. Les 10 points de Seelisberg sont publiés de la page 19 à la page 22. En italien, ils ont été publiés dans Gesù e Israele, op. cit. pp. 407-408. 61) Cfr. Gesù e Israele, op. cit., p. 407. 62) Voici, à titre d’exemple, une déclaration du rabbin Kaplan datant de juin 1953, déclaration qui manifeste amplement son “amitié” judéo-chrétienne: “J’attire l’attention des parents israélites sur le danger auquel sont exposés leurs enfants; aucun enfant juif n’est à l’abri d’un baptême administré en secret; aucun enfant juif, même baptisé indûment, n’est plus protégé contre le zèle fanatique des prêtres qui l’enlèvent à sa famille pour le conserver dans la foi catholique” (Cf. P. GINIEWSKI, op. cit., p. 186). 63) Edmond Flegenheimer changea son nom en Fleg. Né en 1874, naturalisé français en 1922, il fut membre du C.C. de l’Alliance Israélite Universelle, Président des Scouts israélites de France et Président du Congrès Mondial Juif (Cf. GYGES, op. cit., p. 187). Il est intéressant de noter que le 4 mars 1940 un livre de cet Edmond Fleg fut mis à l’index des livres interdits; il s’agit de L’Enfant prophète; Jésus raconté par le juif errant. Les thèses de Fleg et celles d’Isaac sont substantiellement les mêmes. Mais en 1940 Pie XII le condamna; tandis qu’en 1960 Jean XXIII l’encouragea. 64) Cf. RATIER, op. cit., p. 120. Le professeur Lovsky, cité par Ratier, est sans doute le spécialiste bien connu de l’antisémitisme, Fadiey (François) Lovsky qui, à en croire ses écrits, semble plus juif que protestant... 65) Cf. DON C. NITOGLIA, Le complot judaïco-maconnique contre l’Eglise Romaine, dans Sodalitium n° 37, p. 36. Voici le texte de la condamnation: «La nature et la fin de l’Association appelée “Amis d’Israël” ayant été soumises au jugement de la Suprême Congrégation du Saint-Office, ainsi qu’un opuscule ayant pour titre Pax super Israël édité il y a peu de temps par les dirigeants de l’Association et répandu abondamment pour mieux en faire comprendre les caractères et la méthode, les Eminentissimes Pères préposés à la garde de la foi et des mœurs ont d’abord reconnu le côté louable de cette Association, qui est d’exhorter les fidèles à prier Dieu et à travailler pour la conversion des Israélites au règne du Christ. Il n’est pas étonnant qu’à ses débuts, cette Association n’ayant en vue que cette fin unique, non seulement beaucoup de fidèles et de prêtres, mais encore bon nombre d’évêques et de cardinaux y aient adhéré. L’Eglise catholique, en effet, a toujours eu coutume de prier pour le peuple juif, qui fut le dépositaire des promesses divines jusqu’à Jésus-Christ, malgré l’aveuglement continuel de ce peuple, bien plus à cause même de cet aveuglement. Avec quelle charité le Siège Apostolique n’a-t-il pas protégé le même peuple contre les vexations injustes! Parce qu’il réprouve toutes les haines et les animosités entre les peuples, il condamne au plus haut point la haine contre le peuple autrefois choisi par Dieu, cette haine qu’aujourd’hui l’on a coutume de désigner communément par le mot d’“antisémitisme”. Toutefois, remarquant et considérant que cette Association des “Amis d’Israël” a adopté ensuite une manière d’agir et de penser contraire au sens et à l’esprit de l’Eglise, à la pensée des Saints Pères et à la Liturgie, les Eminentissimes Pères, après avoir recueilli le vote des consulteurs de l’assemblée plénière du 21 mars 1928, ont décrété que l’Association des “Amis d’Israël” devait être supprimée. Ils l’ont déclarée abolie de fait et ont prescrit que nul, à l’avenir, ne se permette d’écrire ou d’éditer des livres ou des opuscules de nature à favoriser de quelque façon que ce soit pareilles initiatives erronées. Le jeudi suivant, 22 du même mois et de la même année, en l’audience accordée à l’assesseur du Saint-Office, le Très Saint-Père Pie XI, Pape par la Divine Providence, a approuvé la décision des Très Eminents Pères et en a ordonné la publication. Donné à Rome, au Palais du Saint-Office, le 25 mars 1928.» 66) Le fait de l’audience paraît vérifié (cf. RATIER, op. cit., p. 120; Les Eglises devant le judaïsme, op. cit., p. 351; ZIZOLA, op. cit., p. 216; BERNARD DUPUY, Augustin Béa, cardinal de l’Eglise catholique et ami du peuple juif dans Rencontres, n° 10, 1969, p. 33, cité par GINIOWSKI, op. cit., p. 329); même si, comme nous l’avons vu, Isaac a déclaré en 1962 que c’est lorsque Jean XXIII changea l’oraison du Vendredi Saint que la pensée lui vint “pour la première fois” de s’adresser au “sommet”. Les circonstances (intervention des B’naï B’rith, d’Auriol et de Mayer) sont signalées par LAZARE LANDAU dans Tribune juive (17-23 janvier 1986), cité par JEAN MADIRAN, L’accord secret de Rome avec les dirigeants juifs, dans Itinéraires, n° III, septembre 1990, p. 3, note 2. Cependant il est possible que sur ce point Landau confonde avec la visite d’Isaac à Jean XXIII. 67) Les Eglises devant le judaïsme, op. cit., p. 351, et note 30. Cfr. Documentation Catholique, n° 1047 du 17 juillet, col. 937 et n° 1037 du 5 juillet 1959, col. 842. Giniewski (op. cit. p. 329) affirme que la décision de la Congrégation des Rites fut obtenue par Jules Isaac après son entrevue avec Pie XII en 1949. C’est faux de toute évidence puisque le décret date de 1948! Cependant on ne peut exclure que la Sacrée Congrégation des Rites ait effectivement cédé à des requêtes provenant de personnages de l’entourage de Jules Isaac; des ecclésiastiques qui leur étaient favorables auraient servi d’intermédiaire posant à Rome la question de la signification du terme “perfides”. 68) DOM PROSPER GUÉRANGER, L’année liturgique, La Passion et la semaine sainte, Oudin éd., Paris-Poitiers, 1876, p. 553. 69) “Durant ses douze ans d’existence (28 juin 1948/8 juillet 1960), la Commission (...) travailla dans le secret le plus absolu. A tel point que la publication, au début de mars 1951, de l’Ordo Sabbati Sancti instaurati prit au dépourvu les officiels de la Congrégation des Rites eux-mêmes. La commission jouissait de la pleine confiance du Pape, qui était tenu au courant par Mgr Montini et, plus encore et de façon hebdomadaire par le P. Béa, confesseur de Pie XII. Grâce à cet intermédiaire on put parvenir à des résultats notables dans les périodes mêmes où la maladie du Pape empêchait quiconque de l’approcher” (A. BUGNINI, op. cit., p. 22). 70) J. ISAAC, Verità e mito, op. cit., p. 38. 71) JEAN TOULAT, Juifs mes frères, éd. Guy Victor, 1962; nouvelle édition: Fayard, Paris, 1972. Traduction 36 italienne: Una visita a Jules Isaac, dans Rassegna mensile di Israele, nov.-dic. 1972, pp. 3 à 13. 72) SIDIC, (Service International de documentation Judéo-chrétienne), n° 3, 1968, pp. 10 à 12; cf. aussi n° 1, 1994, p. 23. 73) Daniel Mayer, journaliste, député au Parlement français, secrétaire général du Parti Socialiste clandestin (1943-1944), ministre du Travail et de la Santé, membre du Comité d’honneur du Centre de documentation juive contemporaine, président de la Ligue des Droits de l’Homme, cf. GYGES, op. cit., pp. 79 à 214. 74) Jean Bloch, dit Pierre Bloch, député, maire de Lyon, vice-président du Comité d’Action de la Résistance, membre de la Commission pour la Médaille de la Résistance et de l’Alliance Israélite Universelle, haut magistrat. Cfr. GYGES, op. cit., p. 223. 75) Auriol, athée et socialiste, ministre dans le Gouvernement Bloch, puis président de la République Française, devint ami personnel de Jean XXIII alors Nonce à Paris (Cf. Sodalitium n° 27, p. 16 et n° 28, p. 27). 76) Marcel Bleustein (qui par la suite ajouta à son nom celui de Blanchet), directeur général de Publicis et de Régie-Presse (qui regroupe 40 journaux), administrateur de la Telma, conseiller pour le Commerce Extérieur, directeur général pour la publicité du Figaro, fondateur de Radio-Cité, membre du Comité du Fond Social Juif Unifié, membre du Haut Comité d’Etudes et d’Information sur l’alcoolisme. Cf. GYGES, op. cit., p. 169. 77) E. RATIER, op. cit., pp. 120-121. 78) Isaac n’exclue donc pas que sa proposition touche à la foi et au dogme chrétien. En fait, les thèses de Jules Isaac, substantiellement acceptées par Vatican II et par les documents post-conciliaires, sont contraires à la foi catholique. Avant tout parce qu’elles nient l’historicité des Evangiles, ce qui a été implicitement accepté: «Les Evangiles sont le fruit d’un travail rédactionnel long et compliqué (...). Il n’est donc pas exclu que certaines références hostiles ou peu favorables aux juifs aient comme contexte historique les conflits entre l’Eglise naissante et la communauté juive. Certaines polémiques sont le reflet des conditions de rapports entre juifs et chrétiens bien postérieures à Jésus. Cette constatation reste capitale si l’on veut dégager le sens de certains textes des Evangiles pour les chrétiens d’aujourd’hui» (Extrait de: Catholiques et juifs: un nouveau regard. Notes de la Commission du Saint-Siège pour les relations avec le judaïsme. Sous le titre original: Notes pour une correcte présentation des juifs et du judaïsme dans la prédication et la catéchèse de l’Eglise catholique. par les soins de la Commission du Saint-Siège, n° 21 A, du 24 juin 1985. Cf. Documentation Catholique n° 1900 [14], 21 juillet 1985, p. 736). Ensuite, et Jules Isaac l’admet explicitement, parce que ses thèses nient l’interprétation qu’ont donnée de la Sainte Ecriture les Pères de l’Eglise (entre autres et surtout, les deux principaux: saint Augustin, pour l’Eglise latine, et saint Jean Chrysostome pour l’Eglise grecque). Or, selon les paroles mêmes de Pie XII (enc. Haurietis aquas), les Pères de l’Eglise sont “ les textes véridiques de la doctrine divinement révélée”. Dans l’interprétation de l’Ecriture, le consensus des Pères est, pour l’Eglise catholique, une garantie de doctrine infaillible, divinement révélée. Donc, même si Isaac s’était limité à (faire) condamner la doctrine des Pères de l’Eglise (et il ne s’est pas borné à cela, bien au contraire) il aurait déjà condamné (et fait condamner) le dogme catholique. 79) S. SCHMIDT S.J., op. cit., p. 353. 80) Le comte Lionel de Warren était Premier Se- crétaire de l’ambassade de France auprès du SaintSiège (cf. Annuario Pontificio, année 1961, p. 1000). 81) Cf. SIDIC, vol. 27, n° 1, 1994, p. 23. 82) Cf. Sodalitium, n° 25, p. 13, qui rapporte une citation d’André Chouraki. 83) Cf. Sodalitium, n° 39, pp. 19 à 32. 84) Cf. S. SCHMIDT, op. cit., p. 354. 85) S. SCHMIDT, op. cit., p. 355. 86) S. SCHMIDT, op. cit., p. 356. 87) Cf. Annuario Pontificio, ed 1961, p. 1126, ed. 963, p. 1074. 88) P. GINIEWSKY, op. cit., p. 330. 89) Cf. E. RATIER, op. cit., p. 125. 90) PETER HEBBLETHWAITE, Jean XXIII. Le pape du Concile. Ed. Le Centurion, 1988, p. 415. Le livre s’intitule Les juifs et l’Evangile. 91) Cf. E. RATIER, op. cit., pp. 125-126; LÉON DE PONCINS, dans AA.VV., Infiltrations ennemies dans l’Eglise, op. cit., pp. 79-80; AA.VV., L’azione giudaico-massonica nel Concilio. Texte réservé exclusivement aux Très Révérends Pères Conciliaires, sine loco et data, pp. 2-3 et 11 à 13; P. MARCEL MAUCLAIR, Le déicide est le peuple juif, sine loco et data, p. 3. Sur le problème des Marranes” ou crypto-juifs, cf. DON CURZIO NITOGLIA, Le problème des Marranes, dans Sodalitium, n° 39, pp. 4 à 19. 92) MGR PIETRO ROSSANO , I Papi, la Chiesa e il mondo delle religioni, dans AA.VV., Chiesa e papato nel mondo contemporaneo, par les soins de G. ALBERIGO et de A. RICCARDI, ed. Laterza, Rome-Bari, 1990, p. 500. 36 72) SIDIC, (Service International de documentation Judéo-chrétienne), n° 3, 1968, pp. 10 à 12; cf. aussi n° 1, 1994, p. 23. 73) Daniel Mayer, journaliste, député au Parlement français, secrétaire général du Parti Socialiste clandestin (1943-1944), ministre du Travail et de la Santé, membre du Comité d’honneur du Centre de documentation juive contemporaine, président de la Ligue des Droits de l’Homme, cf. GYGES, op. cit., pp. 79 à 214. 74) Jean Bloch, dit Pierre Bloch, député, maire de Lyon, vice-président du Comité d’Action de la Résistance, membre de la Commission pour la Médaille de la Résistance et de l’Alliance Israélite Universelle, haut magistrat. Cf. GYGES, op. cit., p. 223. 75) Auriol, athée et socialiste, ministre dans le Gouvernement Bloch, puis président de la République Française, devint ami personnel de Jean XXIII alors Nonce à Paris (Cf. Sodalitium n° 27, p. 16 et n° 28, p. 27). 76) Marcel Bleustein (qui par la suite ajouta à son nom celui de Blanchet), directeur général de Publicis et de Régie-Presse (qui regroupe 40 journaux), administrateur de la Telma, conseiller pour le Commerce Extérieur, directeur général pour la publicité du Figaro, fondateur de Radio-Cité, membre du Comité du Fond Social Juif Unifié, membre du Haut Comité d’Etudes et d’Information sur l’alcoolisme. Cf. GYGES, op. cit., p. 169. 77) E. RATIER, op. cit., pp. 120-121. 78) Isaac n’exclue donc pas que sa proposition touche à la foi et au dogme chrétien. En fait, les thèses de Jules Isaac, substantiellement acceptées par Vatican II et par les documents post-conciliaires, sont contraires à la foi catholique. Avant tout parce qu’elles nient l’historicité des Evangiles, ce qui a été implicitement accepté: «Les Evangiles sont le fruit d’un travail rédactionnel long et compliqué (...). Il n’est donc pas exclu que certaines références hostiles ou peu favorables aux juifs aient comme contexte historique les conflits entre l’Eglise naissante et la communauté juive. Certaines polémiques sont le reflet des conditions de rapports entre juifs et chrétiens bien postérieures à Jésus. Cette constatation reste capitale si l’on veut dégager le sens de certains textes des Evangiles pour les chrétiens d’aujourd’hui» (Extrait de: Catholiques et juifs: un nouveau regard. Notes de la Commission du Saint-Siège pour les relations avec le judaïsme. Sous le titre original: Notes pour une correcte présentation des juifs et du judaïsme dans la prédication et la catéchèse de l’Eglise catholique, par les soins de la Commission du Saint-Siège, n° 21 A, du 24 juin 1985. Cf. Documentation Catholique n° 1900 [14], 21 juillet 1985, p. 736). Ensuite, et Jules Isaac l’admet explicitement, parce que ses thèses nient l’interprétation qu’ont donnée de la Sainte Ecriture les Pères de l’Eglise (entre autres et surtout, les deux principaux: saint Augustin, pour l’Eglise latine, et saint Jean Chrysostome pour l’Eglise grecque). Or, selon les paroles mêmes de Pie XII (enc. Haurietis aquas), les Pères de l’Eglise sont “ les textes véridiques de la doctrine divinement révélée”. Dans l’interprétation de l’Ecriture, le consensus des Pères est, pour l’Eglise catholique, une garantie de doctrine infaillible, divinement révélée. Donc, même si Isaac s’était limité à (faire) condamner la doctrine des Pères de l’Eglise (et il ne s’est pas borné à cela, bien au contraire) il aurait déjà condamné (et fait condamner) le dogme catholique. 79) S. SCHMIDT S.J., op. cit., p. 353. 80) Le comte Lionel de Warren était Premier Secrétaire de l’ambassade de France auprès du SaintSiège (cf. Annuario Pontificio, année 1961, p. 1000). 81) Cf. SIDIC, vol. 27, n° 1, 1994, p. 23. 82) Cf. Sodalitium, n° 25, p. 13, qui rapporte une citation d’André Chouraki. 83) Cf. Sodalitium, n° 39, pp. 19 à 32. 84) Cf. S. SCHMIDT, op. cit., p. 354. 85) S. SCHMIDT, op. cit., p. 355. 86) S. SCHMIDT, op. cit., p. 356. 87) Cf. Annuario Pontificio, ed 1961, p. 1126, ed. 1963, p. 1074. 88) P. GINIEWSKY, op. cit., p. 330. 89) Cf. E. RATIER, op. cit., p. 125. 90) PETER HEBBLETHWAITE, Jean XXIII. Le pape du Concile. Ed. Le Centurion, 1988, p. 415. Le livre s’intitule Les juifs et l’Evangile. 91) Cf. E. RATIER, op. cit., pp. 125-126; LÉON DE PONCINS, in AA.VV., Infiltrations ennemies dans l’Eglise, op. cit., pp. 79-80; AA.VV., L’azione giudaico-massonica nel Concilio. Texte réservé exclusivement aux Très Révérends Pères Conciliaires, sine loco et data, pp. 2-3 et 11 à 13; P. MARCEL MAUCLAIR, Le déicide est le peuple juif, sine loco et data, p. 3. Sur le problème des “Marranes” ou crypto-juifs, cf. DON CURZIO NITOGLIA, Le problème des Marranes, in Sodalitium, n° 39, pp. 4 à 19. 92) MGR PIETRO ROSSANO , I Papi, la Chiesa e il mondo delle religioni, in AA.VV., Chiesa e papato nel mondo contemporaneo, par les soins de G. ALBERIGO et de A. RICCARDI, ed. Laterza, Rome-Bari, 1990, p. 500. Doctrine L’INFAILLIBILITE DE L’EGLISE Par M. l’abbé Giuseppe Murro N ous croyons que Notre-Seigneur JésusChrist est le Messie attendu, venu pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres, consoler les affligés, annoncer la liberté aux prisonniers, rendre la liberté aux opprimés (Luc IV, 18): qui croit en Lui connaîtra la vérité qui donne la vraie liberté (Jn VIII, 31-32), mais qui ne croira pas sera condamné (1). Voilà en résumé la mission que Notre-Seigneur avait reçue du Père (2), et à plusieurs reprises, Il exigera la foi en Son enseignement (3). C’est pourquoi Il a accepté d’être appelé Maître (4), et Il a même souligné qu’Il est le seul vrai Maître (5) qui non seulement enseigne la vérité mais est la Vérité (Jn XIV, 6). Les autres enseignants méritent le titre de maître dans la mesure où ils participent à Sa vérité: Notre-Seigneur, au contraire, enseigne comme celui qui a l’autorité (Mc I, 22). La mission que Notre-Seigneur a exercée, Il l’a communiquée entièrement à ses Apôtres. 37 Il a institué Lui-même le Collège des Apôtres: après avoir passé une nuit en prières, Il choisit les Douze et leur donna le nom d’“Apôtres” (c’est-à-dire envoyés). Pendant toute Sa vie publique, Il les a instruits et préparés à la mission qu’ils devaient recevoir. Enfin Il leur confia la même mission qu’Il avait exercée sur la terre: “Comme vous m’avez envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde” (6). “Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie” (7). “Qui vous reçoit, me reçoit: et qui me reçoit, reçoit Celui qui m’a envoyé”. “Qui vous écoute, m’écoute: et qui vous méprise, me méprise. Qui me méprise, méprise Celui qui m’a envoyé” (8). Les Apôtres constituaient la même personne morale que NotreSeigneur, ils avaient une charge et un pouvoir égal au Sien en plénitude et en étendue (9). Cette identité de mission est une vérité de foi divine parce que contenue dans la Ste Ecriture, et c’est la doctrine catholique enseignée par le Concile du Vatican (DS 3050) (10), par Léon XIII dans “Satis Cognitum” et par Pie XII dans “Mystici Corporis” (11). Ainsi, Notre-Seigneur a donné aux Apôtres et à leurs successeurs la charge de continuer sa mission de Maître infaillible, c’est-à-dire le pouvoir d’enseigner infailliblement. Comme nous l’avons déjà vu (8), Il exige une obéissance absolue à ce Magistère, à tel point que “qui ne croira pas sera condamné” (Mc XVI, 16). Cette menace serait absurde s’il n’y avait pas harmonie entre Son Magistère et celui des Apôtres et de leurs successeurs. Ceux-ci en effet auront l’assistance de l’Esprit de vérité, ils constitueront une seule chose avec Notre-Seigneur, ils seront les témoins et les interprètes authentiques de Sa doctrine: “Je prierai le Père et Il vous donnera un autre Paraclet qui restera toujours avec vous, l’Esprit de vérité...” “Quand sera venu l’Esprit de vérité, Il vous enseignera toute la vérité” (12). Le magistère infaillible demeurera toujours dans l’Eglise: “Allez donc, enseignez toutes les nations... leur apprenant à garder tout ce que je vous ai ordonné. Et voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde” (13). Il a fait à St Pierre une promesse particulière: Matth. XVI, 19: “Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre Elle. Je te donnerai les clés du Royaume des cieux, et tout ce que tu lieras sur la terre, sera lié dans le ciel, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans le ciel”. De cette promesse on peut déduire que Notre-Seigneur a donné à St Pierre et à ses successeurs la même mission et les mêmes privilèges que ceux donnés à l’Eglise (DS 3058, 3074). Les Apôtres furent conscients de leur infaillibilité (14) et transmirent leurs pouvoirs à leurs successeurs ( 15). Les Pères les plus proches des Apôtres ont répété le même enseignement. St Ignace d’Antioche († 107) affirme que comme Jésus est le Verbe du Père, ainsi les évêques constituent la doctrine du Christ et les fidèles doivent y adhérer. Pour St Irénée, la doctrine apostolique, qui nous parvient par la succession des évêques, est le critère pour discerner la vérité de l’hérésie. “Là où est l’Eglise, là est l’Esprit de Dieu, là où est l’Esprit de Dieu là est aussi l’Eglise” (16). Cette doctrine, enseignée toujours par toute l’Eglise, a été niée par les gnostiques, les protestants, les rationalistes, les modernistes. Notions Quand nous cherchons à connaître une vérité, il faut avant tout se reporter au Magistère de l’Eglise, qui est la règle de la foi. Si la doctrine exposée par le Magistère n’est pas claire, il convient de se reporter à d’autres documents où le Magistère s’est exprimé sur cette question. Si on veut arriver à une plus grande clarté, il faudra aussi chercher les textes qui ont préparé la déclaration du Magistère: pour cela nous nous reportons à certaines explications des Pères du Concile du Vatican. Enfin, il faudra se référer aux théologiens, et là où ils ne sont pas d’accord, il faudra suivre de préférence la doctrine tenue pour unanime par les théologiens ou la thèse considérée comme la plus probable. Le Magistère est une institution destinée à instruire des personnes: à l’école, à l’Université, dans des cours de formation, dans des séminaires, partout où il y a quelqu’un qui enseigne et des auditeurs qui sont là pour être instruits, il y a un magistère. Le Maître par excellence est Notre-Seigneur qui possède la vérité et l’enseigne avec autorité. Le Magistère authentique (du grec “αυ− τεντια” = autorité) est le devoir qu’a l’autorité légitime de transmettre la doctrine, auquel correspond pour le disciple, l’obligation et le droit de recevoir l’instruction. Il se subdivise en: - sens large: il n’a pas de lui-même la force d’exiger du disciple l’assentiment de l’intelligence (un professeur qui enseigne une théorie personnelle). 38 - sens strict: il a la force d’imposer la doctrine de telle manière que les disciples sont tenus de donner l’assentiment de leur intelligence à cause de l’autorité du maître qui est le représentant de Dieu. L’autorité du Magistère de l’Eglise est fondée sur la mission qu’elle a reçue de Dieu. Le Magistère infaillible: il a le degré suprême de l’autorité. On distingue: - l’infaillibilité de fait: c’est la pure inerrance, simplement l’absence d’erreur (en disant n’importe quelle vérité, on ne se trompe pas même s’il ne s’agit ni de foi ni de morale: 2+2=4); - l’infaillibilité de droit: c’est l’impossibilité de se tromper par principe: l’infaillibilité de l’Eglise vient de l’assistance du SaintEsprit et donc ne peut pas se tromper. Le Magistère se subdivise en: a) écrit: même après la mort de l’auteur il est exercé par ses écrits (par exemple Aristote). b) vivant: il est exercé par des hommes vivants et peut être: - traditionnel: il doit seulement garder, déclarer, expliquer, défendre le dépôt. - inventif: il ajoute objectivement de nouvelles vérités. Définition L’infaillibilité est ce don par lequel l’Eglise jouit d’un privilège tel que, grâce à l’assistance du Saint-Esprit elle ne peut errer en ce qui concerne la foi et la morale, soit dans ce qu’elle enseigne soit dans ce qu’elle croit (17). - Don: l’Eglise est infaillible non ex natura sua (par nature), mais parce qu’elle participe à l’infaillibilité de Notre-Seigneur qui est le Chef de l’Eglise. - Assistance du Saint-Esprit: l’EspritSaint n’habite pas dans l’âme d’une façon spéciale mais il y a une opération de Dieu attribuée à l’Esprit-Saint. C’est une aide spéciale et efficace de Dieu, qui gouverne l’esprit de celui qui enseigne de telle manière que celui-ci quand il propose une doctrine est toujours préservé de l’erreur. Cela n’exclut pas la recherche humaine qui est même indispensable: l’assistance suppose la coopération. - Foi et Morale: l’objet de l’infaillibilité est constitué par les vérités de foi et de morale ainsi que par celles qui lui sont connexes. - Soit dans les vérités à enseigner, soit dans les vérités à croire: on distingue une Le Pape Pie IX double infaillibilité, active et passive. L’active (in docendo) concerne l’Eglise enseignante, le corps des pasteurs qui ne peut errer lorsqu’il transmet une doctrine de foi ou de morale. La passive (in credendo) concerne l’ensemble des fidèles (Ecclesia discens), en tant que soumis aux pasteurs dans la mesure où leur consentement unanime ne peut errer en ce qui concerne la foi ou la morale. L’infaillibilité passive ne peut exister qu’en union et soumission aux pasteurs légitimes. - Ne peut errer: l’infaillibilité non seulement signifie l’immunité d’erreur de fait, appelée plutôt inerrance mais comporte de plus l’impossibilité de se tromper; comme dit Groot: “l’Eglise non seulement ne se trompe pas, ce qui est un fait, mais ne peut se tromper non plus, ce qui lui revient de droit” (18). De même Billot: “L’infaillibilité est nécessaire à l’acte de foi et au salut: en effet la Ste Ecriture est insuffisante comme critère”. Infaillibilité positive et négative Dans l’infaillibilité nous pouvons distinguer deux aspects: un que nous pourrions appeler positif quand le Magistère affirme positivement une vérité qui jusqu’alors n’était qu’affaire d’opinion (ex. Léon XIII établit que les ordinations anglicanes sont invalides) ou bien quand il donne une définition solennelle d’une vérité (qui n’était pas encore ou était déjà de foi). Ces décisions sont irréformables. L’aspect que nous appelons négatif consiste simplement dans la non-existence d’erreur ou de nocivité vis-à-vis de la Foi et de la morale, dans tout ce que l’Eglise enseigne comme 39 étant révélé ou connexe à la Révélation: ex., quand Pie XI a promulgué la Messe et l’Office du Sacré-Cœur, tous les catholiques ont été sûrs qu’en célébrant cette Messe et en récitant cet Office, ils ne courraient aucun risque d’erreur contraire à la foi ou à la morale, ou qu’il n’y avait rien de nuisible au salut éternel. Ces décisions ne sont pas irréformables; pour cette raison, le même Pontife ou un autre peut changer ou annuler la Messe et/ou l’Office: de même ce changement serait infaillible dans un sens négatif, c’est-à-dire qu’il n’y aurait aucune erreur contre la Foi ou la morale ou aucun danger pour le salut éternel. Le Cardinal Franzelin en parle à propos de l’infaillibilité du Magistère de l’Eglise quand il donne la note dogmatique d’une proposition comme “sûre” et “pas sûre” (19). Ainsi quand l’Eglise a déclaré qu’en morale on peut suivre en toute sécurité les opinions de St Alphonse, cela ne veut pas dire que tout le monde est obligé de suivre St Alphonse, mais que dans ses œuvres il ne se trouve rien de contraire à la doctrine de l’Eglise (20). Thèse: Notre-Seigneur a institué chez les Apôtres un Magistère authentique et infaillible, vivant et traditionnel, afin qu’il dure à perpétuité (21). Grâce aux documents suivants, nous disons que cette thèse a été au moins implicitement définie par un jugement solennel au Concile du Vatican. Le Concile du Vatican a défini (10): 1) Le Magistère a été institué par Dieu sur les Apôtres: “Dieu a institué l’Eglise... afin qu’Elle puisse être connue de tous comme gardienne et maîtresse de la Révélation” DS 3012. “L’Eglise... en plus de la charge apostolique d’enseigner a reçu la mission de conserver le dépôt de la foi” DS 3018. 2) Le Magistère est authentique et a autorité: - pour interpréter la Ste Ecriture: DS 3007; - pour proposer aux fidèles les vérités à croire de foi divine et catholique: DS 3011; - pour juger des vérités scientifiques et philosophiques qui sont connexes au dépôt révélé: DS 3017-8. 3) Le Magistère institué par NotreSeigneur est perpétuel: DS 3050; 3071. 4) Il est infaillible: DS 3020; 3074. 5) Il est traditionnel: il a été institué non pour enseigner des choses nouvelles mais pour garder, défendre et proclamer le dépôt reçu: DS 3070. N.B.: Parmi les schémas préparatoires du Concile du Vatican (interrompu par la prise de Rome), avaient été préparés les canons suivants, que le Concile auraient dû définir: I sch. can. 7: Si quelqu’un dit que l’Eglise du Christ peut être envahie par les ténèbres ou pénétrée par les méchants de façon qu’elle s’éloigne de la vérité salvatrice de la foi et de la morale: qu’il soit anathème. I sch. can. 9: Si quelqu’un dit que l’infaillibilité de l’Eglise doit se réduire seulement aux choses qui sont contenues dans la Révélation...: qu’il soit anathème. Léon XIII: Satis Cognitum: “... JésusChrist a institué dans l’Eglise un Magistère vivant, authentique, et en outre perpétuel, qu’Il a investi de sa propre autorité, a revêtu de l’esprit de vérité, a confirmé par des miracles, et Il a voulu et très sévèrement ordonné que les enseignements doctrinaux de ce magistère soient reçus comme les siens propres”. Voir aussi: Léon XIII: Sapientiæ Christianæ: D 1936c. Pie XII: Divini illius Magistri: D 2204 ( 22 ); Mystici Corporis; Humani Generis. Sujet du Magistère Le sujet de ce Magistère infaillible, c’està-dire la personne morale ou physique qui possède cette fonction d’enseigner est: - le Pontife Romain, en tant que Successeur formel de St Pierre dans sa primauté sur l’Eglise ou en tant que Vicaire de Notre-Seigneur; - le Corps des Evêques en soumission au Souverain Pontife. Les Evêques peuvent être réunis en Concile ou bien dispersés dans le monde. Dans le premier cas on parle de Magistère Pontifical; dans le second de Magistère universel. L’infaillibilité du Souverain Pontife est une vérité de foi divine définie. Elle est contenue dans la Révélation (23), a toujours été enseignée, crue, pratiquée par l’Eglise (24). Le Souverain Pontife jouit de la même infaillibilité que l’Eglise (DS 3074). Quand le Souverain Pontife parle non en tant que Pape, mais comme docteur privé, il ne jouit pas de l’infaillibilité (25). L’infaillibilité des évêques unis et soumis au Pape est une vérité de foi implicitement 40 définie au Concile du Vatican (DS 3011), et se fonde sur les documents de l’Ecriture Sainte cités au début de cet article. Nous ne nous arrêterons plus sur ce point qui ne semble pas être un objet de discussion parmi les catholiques. Objet du Magistère Est appelé objet du Magistère, l’ensemble des propositions sur lesquelles celuici peut porter un jugement positif ou négatif, selon que de telles propositions sont vraies ou fausses. Il s’agit de vérités liées à la Révélation (puisque le Magistère infaillible a été donné afin de garder, défendre et expliciter le dépôt de la Révélation) et qui sont indiquées normalement par la phrase: “doctrine regardant la foi et la morale”. Tous les théologiens divisent en deux classes ces vérités de foi ou de morale: primaire ou directe, secondaire ou indirecte. St Thomas ( 26): Une proposition peut être de foi pour deux raisons: en premier lieu et principalement, comme les articles de foi, ou indirectement et secondairement comme les propositions dont la négation entraîne l’altération de quelque article de foi”. Objet primaire du Magistère La première classe est constituée par les propositions qui sont contenues formellement dans la Révélation, explicitement, ou implicitement; ex.: “Jésus est Dieu”. On les appelle vérités révélées par elles-mêmes et elles constituent l’objet primaire ou direct du Magistère. Voyons l’enseignement de l’Eglise à ce sujet. Concile du Vatican: “Est à croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu ou écrite ou transmise, et que l’Eglise, soit par un jugement solennel, soit par son Magistère ordinaire et universel, propose à croire comme divinement révélé” DS 3011. “La doctrine de la foi, que Dieu a révélée... transmise à l’Epouse du Christ comme dépôt divin, doit être gardée fidèlement et déclarée infailliblement” DS 3020. «L’Esprit-Saint n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils révèlent une nouvelle doctrine, mais pour que, avec son assistance ils gardent saintement, et exposent fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi. Tous les vénérables Pères ont accepté et les saints docteurs catholiques ont vénéré et suivi la doctrine apostolique en sachant très bien que la chaire de St Pierre restait pure de toute erreur, selon la promesse de NotreSeigneur faite au prince des Apôtres: “J’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille point: et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères” Lc XXII, 32» DS 3070. Léon XIII, Sapientiæ Christianæ ( 27): “Parmi les choses qui sont contenues dans la révélation divine, les unes se rapportent à Dieu, et les autres à l’homme et aux moyens nécessaires au salut éternel de l’homme. Il appartient de droit divin à l’Eglise, et, dans l’Eglise, au Pontife Romain, de déterminer dans ces deux ordres ce qu’il faut croire et ce qu’il faut faire. Voilà pourquoi le Pontife doit pouvoir juger avec autorité de ce que renferme la parole de Dieu [la Révélation], décider quelles doctrines concordent avec elle et quelles doctrines y contredisent. De même, dans la sphère de la morale, c’est à lui de déterminer ce qui est bien, ce qui est mal, ce qui est nécessaire d’accomplir et d’éviter si l’on veut parvenir au salut éternel; autrement, il ne pourrait être ni l’interprète infaillible de la parole de Dieu, ni le guide sûr de la vie humaine”. Avec les mots croire et faire il est évident qu’il s’agit de foi et de morale. Pie XII, Humani generis ( 28): “Et bien que ce Magistère sacré doive être pour tout théologien, en matière de foi et de mœurs, la règle prochaine et universelle de vérité, puisque c’est à lui que le Christ NotreSeigneur a confié tout le dépôt de la foi, Ecriture Sainte et Tradition, à garder, à défendre et à interpréter... Dieu, en effet, a donné à Son Eglise, avec ces sources que nous avons dites, un Magistère vivant pour éclairer et dégager ce qui n’était contenu dans le dépôt de la Foi que d’une manière obscure et pour ainsi dire implicite. Ce dépôt, ce n’est pas à chacun des fidèles, ni aux théologiens eux-mêmes que notre divin Rédempteur en a confié l’interprétation authentique, mais au seul Magistère de l’Eglise... Il lui revient de par l’institution divine... de garder et d’interpréter le dépôt des vérités divinement révélées”. La valeur dogmatique de ces propositions à partir des textes cités est la suivante: c’est une vérité de foi définie que l’objet de l’infaillibilité est constitué des vérités formellement révélées (Concile du Vatican, DS 3011, 3020, 3069-70). 41 La thèse selon laquelle la doctrine sur la foi et la morale constitue l’objet direct et primaire de l’infaillibilité est contenue implicitement dans la définition de l’infaillibilité du Pontife: en effet on dit que son objet est “la doctrine sur la foi ou la morale” DS 3074 (29). L’objet secondaire La seconde classe est constituée des propositions qui sont connexes (liées) d’une manière nécessaire à la Révélation, qui sont utiles à la réception, à la conservation, et à la communication du dépôt révélé. En effet, comme l’enseigne Mgr Gasser, il existe de nombreuses vérités qui “bien qu’elles ne soient pas en elles-mêmes révélées, sont cependant requises pour garder intègre le dépôt de la Révélation lui-même, pour l’expliquer comme il convient, et le définir efficacement” (30). Absolument tous les théologiens catholiques, conclut Mgr Gasser, s’accordent à reconnaître que ces vérités, qui ne sont pas révélées par elles-mêmes mais qui appartiennent à la garde du dépôt de la foi, sont infaillibles. Il est appelé objet secondaire parce qu’il dérive du primaire; il est dit objet indirect de l’infaillibilité, parce que l’infaillibilité ne le touche pas lui-même, mais à cause de l’objet primaire. Il inclut les propositions tirées formellement de celles qui sont révélées par le biais d’une déduction légitime; il inclut aussi les vérités nécessaires pour garder intègre le dépôt de la Révélation (lequel, sans elles, serait corrompu) pour l’expliquer et le définir davantage (31). On a l’habitude de le diviser en plusieurs groupes: 1) Les vérités spéculatives: si on les nie, on nie une vérité de foi: - præsuppositivæ: les preambula fidei (32), Jansénius ce sont les premiers principes de la raison: par ex. si je nie l’immortalité de l’âme ou la possibilité de la connaissance intellectuelle, je nie la Révélation. - consecutivæ: c’est une conclusion métaphysiquement nécessaire, déduite d’une prémisse révélée: Jésus pouvait rire (parce que vrai homme). 2) Les faits dogmatiques: ce sont ceux connexes à la Révélation: - simpliciter: ex: la légitimité du Concile de Trente. - doctrinaux: le sens orthodoxe d’un livre (ex: l’Augustinus de Jansénius). 3) Les décrets disciplinaires sont connexes à la Révélation quant à leur fin (le salut de l’âme). Il s’agit de lois ecclésiastiques non divines; directement, elles appartiennent au pouvoir de gouvernement de l’Eglise, dont le propre est de légiférer (condere leges). Indirectement elles touchent au Magistère, dans la mesure où les principes doctrinaux à l’origine des décrets ou des lois sont conformes à la fin dernière (le salut de l’âme) et où leur objet est la foi ou la morale. Ces décrets peuvent être subdivisés en juridiques et liturgiques. 4) La Canonisation des Saints. 5) L’approbation des ordres religieux. 6) Les notes théologiques. La valeur dogmatique. L’infaillibilité de ces vérités est au moins théologiquement certaine et proche de la définition, telle que le Concile du Vatican l’a définie. Concile du Vatican: “L’Eglise qui avec la charge apostolique d’enseigner a reçu l’ordre de garder le dépôt, a aussi de la part de Dieu le droit et la charge de proscrire la fausse science (I Tim. VI, 20), afin que personne ne soit trompé par une philosophie ou par une fable sans fondement. Pour cette raison, tous les fidèles chrétiens ont non seulement l’interdiction de défendre comme conclusions légitimes ces opinions qu’ils savent être contraires à la doctrine de la foi, spécialement si elles sont condamnées par l’Eglise, mais ils doivent plutôt les considérer comme des erreurs qui se présentent sous l’aspect de la vérité” DS 3018. “Si quelqu’un dit que les disciplines humaines doivent être traitées avec une liberté telle que leurs assertions, même si elles sont contraires à la doctrine révélée, peuvent être considérées comme vraies et que l’Eglise n’a pas le droit de les proscrire, an. sit” DS 3042. Le théologien du Concile, le Père Kleutgen, s’exprime ainsi à propos de ces 42 deux textes: “Il a été défini dans la première Constitution de Fide que c’est un droit et un devoir de l’Eglise de juger les conclusions de la Philosophie et des autres disciplines” (33). N.B.: Comme nous l’avons déjà dit, parmi les schémas préparatoires, était prévu le canon suivant que le Concile du Vatican aurait dû définir: I schéma can. 9: “Si quelqu’un dit que l’infaillibilité de l’Eglise doit se limiter seulement aux vérités contenues dans la Révélation divine et ne doit pas s’étendre aux autres vérités requises nécessairement pour garder intègre le dépôt de la Révélation: an. sit” (34). Pie XII, Humani generis: “Il lui revient [au Magistère de l’Eglise], de par l’institution divine, non seulement de garder et d’interpréter le dépôt des vérités divinement révélées, mais de veiller encore sur les sciences philosophiques, afin que les dogmes catholiques ne souffrent aucune atteinte des fausses doctrines” (E. P. 1283). Infaillibilité de l’objet secondaire en particulier Nous considérons chacun de ces groupes séparément et dans chacun d’eux nous verrons pour quel motif l’Eglise est infaillible et comment l’Eglise en a revendiqué l’infaillibilité de façon tant théorique que pratique. 1) Les vérités spéculatives 1°) Argument de raison Le Magistère requiert de pouvoir déclarer infailliblement tout ce qui est nécessaire pour garder le dépôt de la foi. Or l’infaillibilité est nécessaire pour les preambula fidei et pour les conclusions théologiques; en effet, si on les nie ou si on les met en doute on peut alors logiquement et nécessairement mettre en doute et nier les vérités révélées. A propos de la définition des conclusions théologiques, Marin-Sola explique que «ce travail de l’Eglise est précisément la célèbre explicatio fidei de la théologie traditionnelle. Que l’Eglise jouisse d’une assistance et soit investie d’une mission divine non seulement pour conserver religieusement, mais encore pour exposer fidèlement et avec une autorité dogmatique le dépôt révélé, sans nouvelles révélations et sans accroître objectivement ce dépôt, tous les théologiens l’admettent et le Concile du Vatican l’a défini (...) DS 3070. Les définitions dogmatiques ne sont donc pas des définitions de réalités ou de doctrines nouvelles, mais des explications ou expositions authentiquement divines de ce qu’il y a d’implicite dans le dépôt révélé. “Et voilà la raison pour laquelle il a été nécessaire de publier davantage de symboles (articles de foi) qui ne se différencient en rien les uns des autres si ce n’est que dans l’un est expliqué plus en détail ce qui est contenu implicitement dans un autre” (S. Th. II, II, q. 1, a. 9)» (35). Personne n’a jamais mis en doute l’infaillibilité de l’Eglise quand elle définit certaines conclusions théologiques, comme par exemple l’intelligence ou la volonté de Notre-Seigneur, la Maternité Divine de la Sainte Vierge (36). 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité théoriquement: Pie IX, Gravissimas inter, 11/12/1862, contre Froschammer, qui affirmait l’indépendance de la philosophie vis-à-vis de la foi: DS 2858-61. Concile du Vatican, Constitution Dei Filius, 24/4/1870, contre le rationalisme et le semi-rationalisme: DS 3018; 3042. St Pie X, Lamentabili, 3/7/1907: DS 3405, 3407, 3424 (37). Pie XII, Humani Generis, 12/8/1950, DS 3893; D 2325 (22). 3°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité pratiquement: Vème Concile de Latran, Apostolici regiminis, 19/12/1513, contre les averroïstes qui niaient les propriétés de l’âme: “Nous définissons que toute assertion contraire à la vérité illuminée par la Foi est absolument fausse” DS 1441. Cette définition a été répétée par le Concile du Vatican DS 3017. Le Concile de Vienne 6/5/1312, De Summa Trinitate et fide catholica, condamna les erreurs de Pierre-Jean Olivi, 1311-2, D 481 (37). Clément VII condamne Nicolas d’Autrecourt, 25/11/1347, DS 1028. 2) Infaillibilité des faits dogmatiques Il y a 3 sortes de faits: a) les faits explicitement révélés; b) les faits purement particuliers; c) les faits dogmatiques. a) Les faits expressément révélés sont ceux contenus dans la Révélation, qui s’est achevée avec la mort des Apôtres: ex.: NotreSeigneur est né à Bethléem; Il est ressuscité, Il est monté au ciel; Jean-Baptiste a été décapité en prison, etc. Tous les théologiens sont d’accord pour dire qu’ils constituent non seulement l’objet de l’infaillibilité mais aussi de la foi divine et - si l’Eglise les définit - ils sont même de foi divine et catholique. 43 b) Les faits particuliers: non seulement ils ne sont pas contenus dans la Révélation mais en plus ils n’ont aucun rapport nécessaire avec celle-ci ni avec la doctrine. Ils ont une certaine relation avec la foi ou la morale seulement parce qu’ils se rapportent à des personnes particulières et non à toute l’Eglise. Ils ne sont donc pas absolument nécessaires pour conserver ou expliquer le dépôt de la Révélation. Exemples: les faits exclusivement profanes; la validité de tel mariage; la culpabilité de telle personne; la justice de telle excommunication; la possession légitime d’un bien par telle personne... Tous les théologiens sont d’accord pour dire qu’ils ne sont pas objet de foi divine ni d’infaillibilité: “Dans d’autres jugements au contraire, qui regardent des faits particuliers, comme quand il s’agit de propriété ou de crimes, ou de choses de ce genre, il est possible que le jugement de l’Eglise soit erroné” (St Thomas, Quodlibet IX a. 16). c) Entre ces deux groupes extrêmes, il y a les faits dogmatiques, ainsi appelés après la polémique avec le Jansénisme. Ils ne semblent pas être contenus expressément dans le dépôt de la Révélation mais ont une relation nécessaire avec la conservation et l’explication de la doctrine révélée, relation qui intéresse l’Eglise universelle. Ainsi de l’orthodoxie ou de l’hétérodoxie de certains textes ou de certains livres, ou de savoir si le livre de Jansénius contient ou non les cinq célèbres propositions hérétiques. De même aussi c’est un fait dogmatique que de savoir si le Concile de Trente est une règle infaillible de la foi, si la Vulgate est authentique en matière de Foi ou de Morale, si Pie XII est vraiment Pape. de la même manière, que Jean-Paul II soit oui ou non Pape, c’est une question qui engage la Foi, et ce n’est pas un simple sujet d’opinion. Tous les théologiens sont d’accord pour dire qu’ils peuvent être définis infailliblement par l’Eglise. Pour ce qui concerne la légitimité d’un Pape ou d’un Concile, tous les théologiens modernes (à partir du XVIIème siècle) disent qu’il est infaillible de foi divine. Pour les erreurs contenues dans un livre, les mêmes théologiens se partagent comme suit: pour les uns c’est de foi divine, pour les autres de foi ecclésiastique (38). 1°) Argument de raison. La fin du Magistère infaillible exige qu’il y ait l’infaillibilité dans les choses nécessaires pour diriger les fidèles en toute sécu- rité dans la droite profession de la foi et éviter les erreurs qui lui sont contraires. Pour réaliser cette fin, l’infaillibilité est nécessaire dans la définition du sens orthodoxe ou hétérodoxe d’un texte et de son auteur. Si l’Eglise ne pouvait pas définir cela, alors personne ne pourrait faire obligation de professer la foi de façon exacte. Personne ne pourrait éviter efficacement l’introduction et la diffusion d’erreurs contre la foi. Si donc l’Eglise pouvait se tromper en cela, alors on pourrait penser que la condamnation portée par l’Eglise sur une doctrine n’est pas vraie ou bien que des catholiques pourraient professer un article de foi contenant des erreurs. 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité théoriquement: Voyons l’histoire de l’“Augustinus” de Jansénius. Urbain VIII interdit le livre en 1642. Suivent de nombreuses controverses avec les Jansénistes. En 1653, Innocent X déclara hérétiques cinq propositions tirées du livre: DS 2001-7. Les Jansénistes marquèrent leur opposition en disant qu’il était juste de condamner ces 5 propositions mais que Jansénius ne voulait pas donner ce sens aux phrases de son livre. Alexandre VII en 1656 déclara et définit que ces propositions étaient condamnées même dans le sens entendu par Jansénius dans son livre: DS 2012. Mais les Jansénistes ne voulurent pas se soumettre, disant que le Pape se trompait, qu’il n’y a pas d’infaillibilité pour l’interprétation du sens d’un livre et que donc, il ne pouvait pas exiger l’obéissance. En 1665 Alexandre VII imposa aux Jansénistes de signer à ce sujet une formule de serment: DS 2020. Mais ceux-ci trouvèrent une échappatoire en disant que la condamnation de Jansénius ne requérait pas l’assentiment interne mais seulement le silence respectueux. Enfin Clément IX en 1705 imposa l’obligation de l’assentiment interne “ore et corde”: DS 2390. Dans cette longue polémique, l’Eglise a donc revendiqué l’infaillibilité dans le jugement d’un livre et de son interprétation (toujours en rapport avec la Foi ou la Morale). 3°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité pratiquement. Le IIème Concile de Constantinople en 553 condamne “l’impie Théodore et ses écrits impies” DS 435, approuvé par le Pape St Grégoire en 592: DS 472. 44 Innocent II en 421 condamne Pierre Abélard “avec l’autorité des saints canons Nous condamnons les articles et tous les dogmes de ce même Pierre (Abélard) ainsi que son auteur comme hérétique” D 387 (39). Le Concile de Constance en 1418 fait demander aux disciples de Wyclef et Huss “s’ils croyaient que les condamnations contre les personnes de J. Wyclef, J. Huss et Jérôme de Prague, de leurs livres et de leurs documents... ont été portées rite et juste, et si elles doivent être tenues pour telles et affirmées avec fermeté par tout catholique”; et encore à leur sujet “s’ils croyaient qu’ils étaient hérétiques et donc à considérer et à nommer comme hérétiques et que leurs livres et doctrines étaient et sont perverses” (40). Pie IX, Gravissimas inter, en 1862 condamne la doctrine de Froschammer exposée dans trois livres comme “fausse et erronée (...) étrangère à la doctrine catholique (...) à rejeter, à réprouver et à condamner” (41). Léon XIII en 1887 approuve (D 1930a in fine) (22) la condamnation du Saint-Office des propositions de Rosmini, tirées de ses huit livres, dans le sens compris par l’auteur: DS 3201-41. Clément VIII contre Vasquez et les théologiens d’Alcalà: ils affirmaient que l’on peut nier spéculativement que le Pape régnant soit Pape, c’est-à-dire comme s’il s’agissait d’une thèse licite in abstracto. Clément VIII les fit emprisonner. 3) Infaillibilité des décrets disciplinaires Il s’agit ici de lois universelles et non particulières qui sont connexes nécessairement, en raison de leur fin, à la Révélation: le Code de Droit Canon et le rite latin sont considérés comme universels. Leur infaillibilité ne veut pas dire qu’elles soient les uniques possibles, ou les plus parfaites (il peut y avoir plusieurs degrés de perfection), ou qu’elles contiennent toute la doctrine du sujet qu’elles traitent: c’est pourquoi elles peuvent être changées par l’autorité. L’infaillibilité concerne la doctrine spéculative et/ou morale contenue explicitement ou implicitement dans de tels décrets; elle ne garantit pas qu’ils soient opportuns ou qu’ils soient prudents. Elle garantit la non-existence d’une erreur quelconque contre la foi et la morale. Pour les décrets liturgiques, qui constituent une partie des décrets doctrinaux, les mêmes arguments sont valables. Leur infaillibilité ne concerne pas les faits historiques du Bréviaire ou du Martyrologe. 1°) Arguments de raison La fin du Magistère infaillible exige que la vie des fidèles soit ordonnée sans erreur ou dommage à la fin de l’Eglise: la vie éternelle. Donc l’infaillibilité des décrets disciplinaires est nécessaire pour que l’Eglise puisse diriger les fidèles sans erreur vers leur fin. En effet si l’Eglise pouvait imposer ou permettre aux fidèles des actions contraires à la foi ou à la morale elle ne serait plus un instrument de salut: l’Eglise serait alors faillible et porteuse d’erreurs (42). L’Eglise est Sainte: il n’est donc pas possible qu’elle fasse des lois disciplinaires contraire à ses principes. L’Eglise est infaillible non seulement dans l’interprétation dogmatique de la Révélation, mais aussi dans l’interprétation pratique (apprenez-leur à garder tout ce que je vous ai enseigné... Matth. XXVIII, 20). Cela ne serait pas vrai si l’Eglise pouvait promulguer des lois qui éloignent les fidèles de la rectitude des lois évangéliques. Matth. XVI, 19: Dieu ne pourrait pas lier ou délier tout ce que l’Eglise lie ou délie sur la terre, si l’Eglise n’était pas préservée d’erreur. Ceci vaut aussi pour les us et coutumes de l’Eglise: St Augustin dit que de l’usage du Baptême on pourrait déduire le dogme du péché originel. St Thomas (43): “La coutume de l’Eglise a une très grande autorité et doit toujours être suivie en toute chose”. Pour cette raison dans le Sed Contra de ses articles, qui correspond à l’argument d’autorité, il cite souvent l’usage de l’Eglise: par exemple, à propos du Sacrement de Confirmation (III, q. 72 a. 12), il en donne même le motif: “Il faut tenir avec fermeté que les prescriptions de l’Eglise sont faites selon la sagesse du Christ. Et c’est pourquoi on doit être certain que les rites que l’Eglise observe dans ce sacrement et dans les autres, sont convenables”. 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité théoriquement Pie VI, Auctorem fidei, 1794, condamne la 78ème proposition du Synode de Pistoia, selon laquelle en ce qui regarde la discipline de l’Eglise il peut y avoir des choses inutiles et même des choses dangereuses et nocives, comme “fausse, téméraire, scandaleuse, pernicieuse, offensante pour les oreilles pieuses, injurieuse pour l’Eglise et l’Esprit de Dieu qui la dirige, pour le moins erronée” DS 2378 (44). Concile de Trente, 1547, Décret sur les Sacrements, can. 13: “Si quelqu’un dit que les rites reçus et approuvés par l’Eglise ca- 45 tholique qui sont utilisés dans l’administration solennelle des sacrements, peuvent ou être méprisés ou être omis sans péché par les ministres à leur guise, ou être changés avec de nouveaux par n’importe quel pasteur des églises: an. sit” DS 1613. 3°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité pratiquement Concile de Constance, 1415, Décret sur la Communion sous la seule espèce du pain, confirmé et répété par Martin V en 1425, DS 1198-1200. Concile de Trente: Décret sur la Très Sainte Eucharistie, sur l’usage de la conserver et de la porter aux malades, DS 1645, 1657. Doctrine sur la communion sous les deux espèces et aux enfants, et les canons qui s’y rapportent: DS 1727-34. Doctrine sur le Saint Sacrifice de la Messe: sur le canon, sur les cérémonies, sur la Messe où seul communie le prêtre, sur l’eau ajoutée au vin, sur l’emploi de la langue vulgaire, et les canons DS 1745-59. Léon XIII, Apostolicæ Curæ, 1896, sur l’invalidité des ordinations anglicanes, DS 3315-9. Note Sur l’infaillibilité des décrets disciplinaires et des lois liturgiques, il y a eu beaucoup de confusion surtout après l’apparition du Novus Ordo Missæ en 1969. Arnaldo X. Da Silveira dans “La nouvelle messe de Paul VI: qu’en penser?” (45) après avoir cité des textes en faveur de l’infaillibilité des lois liturgiques, finit par la restreindre. L’auteur ne parvient pas à distinguer à ce sujet les deux aspects de l’infaillibilité cités d’abord: l’infaillibilité purement négative, qui comporte la validité, la non nocivité, la non-existence d’erreurs contre la Foi et la morale dans les rites et lois liturgiques, de l’infaillibilité positive d’une vérité dogmatique à partir des textes liturgiques (46). Pour cette dernière infaillibilité, si l’Eglise pour faire connaître un dogme veut utiliser la liturgie plutôt que d’en donner une définition, il faut qu’elle fasse connaître explicitement sa volonté de vouloir obliger à croire la vérité doctrinale signifiée par la liturgie. Pour la première infaillibilité au contraire (non-existence d’erreurs) aucun acte particulier de l’Autorité n’est nécessaire: celle-ci est inhérente à la loi elle-même à peine est-elle promulguée, comme on l’a vu à propos de l’infaillibilité de l’objet secondaire. Avec cette distinction on répond aussi aux cas d’erreur apparente dans l’infaillibilité en matière de liturgie cités par Da Silveira. 4) Canonisation solennelle des Saints Par Canonisation solennelle on entend le jugement ultime et définitif de l’Eglise par lequel on déclare qu’un défunt a atteint la sainteté et est ainsi parvenu à la gloire céleste; il peut donc être invoqué et vénéré par les fidèles comme patron et modèle. Il s’agit d’un jugement universel et obligatoire qui conclut le procès des vertus héroïques ajouté aux preuves des miracles comme c’est l’usage dans l’Eglise catholique depuis le Xème siècle. 1°) Argument de raison La fin du Magistère infaillible exige l’infaillibilité dans les choses nécessaires pour diriger les fidèles sans erreur vers le salut, par le moyen d’un vrai culte et par l’imitation des exemples des vertus chrétiennes du fait du pouvoir de sanctification qu’a l’Eglise. Donc en vue d’y parvenir, l’infaillibilité est indispensable pour les décrets de Canonisation des Saints, vu que par ceux-ci l’Eglise non seulement permet mais ordonne et recommande à tous les fidèles de vénérer certains Saints et les propose comme exemples de vertu. Une seule possibilité d’erreur dans un tel jugement solennel signifierait que l’Eglise propose à la vénération et à l’imitation des fidèles des hommes mauvais ou damnés; le culte des Saints serait privé de son fondement; les fidèles n’auraient plus confiance en l’Eglise. 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité L’Eglise revendique l’infaillibilité des décrets définis avec un jugement solennel (DS 3011; CJC 1323, § 2). Or l’Eglise définit par un jugement solennel les décrets de Canonisation des Saints. Ceci résulte de la lecture des décrets eux-mêmes: Benoît XIII, 1726, pour la canonisation de St Jean de la Croix, de St Louis de Gonzague et de St Stanislas Kostka. Pie XI: “Nous, Chef Suprême de l’Eglise catholique, par ces mots nous prononçons un jugement infaillible: En l’honneur, etc.”. “Nous, ex Cathedra divi Petri, comme Chef suprême de l’Eglise universelle du Christ, nous prononçons solennellement par ces mots un jugement infaillible: “En l’honneur, etc.”. Pie XII: “Nous, en tant que Chef suprême de l’Eglise universelle, sur l’unique Chaire fondée sur Pierre par la parole du Seigneur, nous prononçons solennellement ce jugement qui ne connaît pas d’erreur, par ces mots: En l’honneur, etc.”(47). mode de vie stable comme moyen sûr pour acquérir la perfection évangélique. A cause de l’infaillibilité de la Morale de l’Eglise, il paraît inconcevable que le Souverain Pontife puisse proposer définitivement à l’Eglise universelle comme moyen sûr pour obtenir la perfection quelque chose d’inutile ou de contraire à la perfection évangélique. 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité théoriquement. Pie VI, Auctorem fidei, 1794, contre le Synode de Pistoia, DS 2682, 2692. Pie IX, Quanta Cura, 1864, D 1692 (22). 3°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité pratiquement. On le remarque dans le jugement solennel utilisé pour l’approbation des Ordres Religieux (48). Le Pape St Pie X L’infaillibilité de l’Eglise dans la Canonisation des Saints, considérée comme théologiquement certaine, après les déclarations de Pie XI et de Pie XII, est considérée comme implicitement définie. 5) Approbation des Ordres Religieux L’Ordre religieux est une société ou une congrégation, approuvée par l’Eglise, d’individus qui tendent à la perfection au moyen des trois vœux d’obéissance, de chasteté, de pauvreté, suivant une règle de vie donnée par le fondateur. L’approbation de l’Eglise porte sur l’association elle-même, son but, sa règle, ses lois; elle considère seulement le côté doctrinal de ceux-ci, c’est-à-dire que le type de vie proposé soit apte à l’acquisition de la perfection évangélique. L’infaillibilité ne concerne pas le jugement prudentiel, c’est-à-dire si cette approbation est opportune et prudente et ne regarde que l’approbation définitive ou solennelle. 1°) Argument de raison La fin du Magistère infaillible exige l’infaillibilité dans les choses qui sont nécessaires pour diriger les fidèles sans erreur vers leur salut, au moyen de la perfection évangélique: c’est la fin de la Morale de l’Eglise, à laquelle s’étend le Magistère infaillible. Or dans ce but, l’infaillibilité des décrets qui approuvent solennellement les ordres religieux est indispensable. En effet ceux-ci proposent à l’Eglise universelle un 6) Les notes théologiques L’Eglise dans l’exercice de ses fonctions approuve la vraie doctrine et condamne la fausse. La note théologique (ou valeur dogmatique) d’une proposition indique positivement le degré de certitude qui lui convient face aux sources de la Révélation et du Magistère. La censure (ou proposition condamnée) est le jugement qui exprime négativement le degré de fausseté de la proposition face aux sources de la Révélation et du Magistère. Nous considérerons ici les notes et censures émises par l’Eglise et non celles des théologiens (49). Rappelons ce que nous avons déjà dit à propos de l’infaillibilité positive et négative. Quand l’Eglise affirme qu’une doctrine est de foi, celle-ci est de foi et donc est irréformable. Si au contraire l’Eglise donne une note inférieure à celle de foi, alors celle-ci sera infailliblement vraie mas pas toujours irréformable. Par exemple, si la proposition est jugée “non sûre”, cela veut dire infailliblement que maintenant elle n’est “pas sûre” mais cela ne veut pas dire qu’elle est fausse: un jour, l’Eglise pourra la déclarer fausse ou erronée, ou au contraire pourra reconnaître qu’elle est vraie; mais pour le moment je dois croire qu’elle n’est pas sûre, sous peine de péché mortel (50). Quand elle dit qu’elle est certaine, cela ne veut pas dire qu’elle est de foi, mais seulement qu’elle est certaine et ainsi de suite. Ceci est bien expliqué par Billot (51). 1°) Argument de raison Le Concile du Vatican, à propos de l’infaillibilité pontificale, a défini que l’assistance de l’Esprit-Saint a été promise pour gar- 47 der le dépôt de la foi. Pour ce faire, l’Eglise se doit d’énumérer et de définir les erreurs. 2°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité théoriquement. Concile du Vatican, Constitution Dei Filius, “L’Eglise qui a reçu, en même temps que la charge apostolique d’enseigner, le commandement de garder le dépôt de la foi a, de par Dieu, le droit et le devoir de proscrire la fausse science (I Tim. VI, 20), pour que nul ne soit la proie d’une tromperie... C’est pourquoi tous les chrétiens fidèles non seulement n’ont pas le droit de défendre comme de légitimes conclusions de la science les opinions reconnues contraires à la doctrine de la foi, surtout quand l’Eglise les a réprouvées, mais ils sont absolument tenus de les considérer plutôt comme des erreurs parées de quelque trompeuse apparence de vérité” DS 3018. CJC, can. 1324: “Il ne suffit pas d’éviter la nocivité de l’hérésie mais il faut aussi fuir avec empressement ces erreurs qui plus ou moins s’en approchent; c’est pourquoi tous doivent observer de même les institutions et les décrets pour lesquels de telles opinions mauvaises ont été condamnées et interdites par le Saint Siège”. Concile de Constance, Session XV 6/7/1415, confirmée par le Pape le 22/2/1418: DS 1214, 1219, 1225. 3°) L’Eglise revendique une telle infaillibilité pratiquement. L’Eglise a toujours défini certaines doctrines et en a condamné d’autres. Unité du Magistère de l’Eglise et de son objet Les divisions vues jusqu’à maintenant ne diminuent pas l’unité de l’objet du Magistère. Qu’il s’agisse d’objet direct ou indirect il est toujours un et son unité repose sur la Révélation de Dieu; même si ces vérités sont incluses dans la Révélation ou connexes à elle, le Magistère déclare toujours leur relation avec le dépôt révélé. Le Magistère parle toujours du point de vue de la Révélation divine, et ne considère pas les choses qui sont en dehors de la foi et de la morale. “Toute vérité virtuellement révélée appartient donc directement, quoique médiatement, au Magistère infaillible. Les deux ordres de vérités, formellement et virtuellement révélées, forment un corps unique de la doctrine du salut, en vue de laquelle le Sauveur a direc- tement institué le magistère apostolique. On ne peut séparer ces deux ordres sans les détruire tous deux, puisqu’ils se tiennent par une absolue nécessité logique, puisque, sous peine de contradiction, l’esprit est obligé de les admettre ou de les rejeter tous deux” (52). C’est pourquoi le Vème Concile de Latran a donné cette définition: “Toute assertion contraire à la vérité illuminée par la Foi est absolument fausse” DS 1441. Si l’Eglise dans quelques objets ou dans quelques modes d’exercices (voir paragraphe suivant) ne pouvait pas se réclamer de l’infaillibilité, il y aurait dans l’Eglise, une et sainte, deux Magistères spécifiquement distincts: ce qui est absurde. Au fond cette unité de l’objet du Magistère repose sur l’unité du Magistère lui-même: quelque soit le sujet (Pape ou Eglise universelle) ou l’objet ou le mode d’exercice, c’est toujours la voix de Notre-Seigneur: “Qui vous écoute, m’écoute” (53). Le mode d’exercice du Magistère Bien que le Magistère soit un parce que spécifié par un seul objet (la relation à la Révélation) il a deux modes d’exercice: l’enseignement ordinaire et le jugement solennel. “L’Eglise est infaillible dans son magistère ordinaire, qui s’exerce quotidiennement, par le Pape principalement et par les évêques qui adhèrent à lui, et qui donc sont infaillibles ensemble de l’infaillibilité de l’Eglise que le Saint-Esprit assiste tous les jours” (54). Le jugement solennel “peut être prononcé soit par un Concile œcuménique, soit par le Pape romain parlant ex cathedra” CJC, c. 1323, § 2. Cette distinction de mode ne touche pas la substance du Magistère, ni l’objet qu’il définit. Il s’agit seulement d’une qualification de l’acte par lequel l’Eglise exerce sa fonction d’enseignement. Ce mode de l’acte est un qualificatif accidentel et ne change pas la spécificité de la fonction. En d’autres termes, un acte infaillible du Magistère ordinaire n’est pas moins infaillible et ne demande pas un assentiment inférieur à celui d’un jugement solennel. Les textes du Concile du Vatican (10) Pendant le Concile du Vatican, le 20/6/1870 au nom de la Députation de la Foi, Mgr d’Avanzo déclarait: «... Permettez moi de rappeler comment l’infaillibilité s’exerce dans l’Eglise. De fait, nous avons deux témoignages de l’Ecriture sur l’infaillibilité dans 48 l’Eglise du Christ, Luc XXII: J’ai prié pour toi, etc., paroles qui concernent Pierre sans les autres; et la finale de Matthieu: Allez, enseignez, etc., paroles qui sont dites aux Apôtres mais non sans Pierre... Il y a donc un double mode d’infaillibilité dans l’Eglise; le premier est exercé par le magistère ordinaire de l’Eglise: Allez, enseignez… C’est pourquoi, de même que l’Esprit-Saint, l’esprit de vérité, demeure dans l’Eglise tous les jours; de même tous les jours l’Eglise enseigne les vérités de foi avec l’assistance du Saint-Esprit. Elle enseigne toutes ces choses qui sont soit déjà définies, soit contenues explicitement dans le trésor de la révélation mais non définies, soit enfin qui sont crues implicitement: toutes ces vérités, l’Eglise les enseigne quotidiennement, tant par le pape principalement que par chacun des évêques adhérant au pape. Tous, et le pape et les évêques sont infaillibles dans ce magistère ordinaire, de l’infaillibilité même de l’Eglise: ils diffèrent seulement en ceci que les évêques ne sont pas infaillibles par euxmêmes, mais ont besoin de la communion avec le pape, par qui ils sont confirmés; le pape, lui, n’a besoin que de l’assistance du Saint-Esprit à lui promise (...)». Ce magistère ordinaire infaillible ne supprime pas la nécessité du jugement solennel «Même avec l’existence de ce magistère ordinaire, il arrive parfois soit que les vérités enseignées par ce magistère ordinaire et déjà définies soient combattues par un retour à l’hérésie, soit que des vérités non encore définies, mais tenues implicitement ou explicitement, doivent être définies; et alors se présente l’occasion d’une définition dogmatique». Dans ce cas, les évêques recourent au Pape, qui alors remplit la fonction de confirmer ses frères et peut promulguer une condamnation ou une définition solennelle, soit par lui-même, soit en réunissant un concile œcuménique (55). C’est pourquoi le Concile du Vatican a défini avec solennité la proposition suivante (56): “Est à croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu ou écrite ou transmise, et que l’Eglise, soit par un jugement solennel, soit par son magistère ordinaire et universel, propose à croire comme divinement révélé”: DS 3011. Ce texte fut inspiré par la Lettre Apostolique de Pie IX à l’Archevêque de Munich en 1863 contre certains philosophes et théologiens allemands dans laquelle il rappelait qu’il ne faut pas être soumis seulement au magistère solennel mais aussi au magistère ordinaire: DS 2875-80. Mgr Martin, au nom de la Députation de la Foi l’a déclaré explicitement: «La Députation de la Foi a tiré sa pensée de la Lettre Apostolique du Souverain Pontife Pie IX à l’Archevêque de Munich (...) de 1863, où ceci est écrit: “Car même s’il s’agissait de cette soumission à accorder par un acte de foi divine, il ne faudrait pourtant pas la limiter aux vérités définies par des décrets exprès des conciles œcuméniques ou des pontifes romains... mais il faudrait aussi l’étendre à ce qui est transmis comme divinement révélé par le magistère ordinaire de toute l’Eglise dispersée sur la terre”. Ce sont ces paroles que la Députation a eues devant les yeux quand elle a défini quel est l’objet matériel de la foi» (57). Nous ne reproduisons pas ici la lettre, Tuas libenter, vu que l’essentiel se trouve dans le texte de Mgr Martin. Cette doctrine a été solennellement confirmée par Pie XII à propos de la définition du dogme de l’Assomption. Le Pape affirme qu’avant la promulgation, cette doctrine était déjà de foi, grâce au magistère ordinaire de l’Eglise; en effet, le Pape avait adressé aux Evêques du monde entier deux questions: «Et ceux que “l’Esprit-Saint a établis évêques pour gouverner l’Eglise de Dieu”, donnèrent à l’une et à l’autre question une réponse presque unanimement affirmative. Cet “accord remarquable des évêques et des fidèles catholiques”, qui estiment que l’Assomption corporelle au Ciel de la Mère de Dieu peut être définie comme un dogme de foi, comme il Nous offre l’accord de l’enseignement du Magistère ordinaire de l’Eglise et de la foi concordante du peuple chrétien que le même magistère soutient et dirige manifeste donc par lui-même, et d’une façon tout à fait certaine et exempte de toute erreur, que ce privilège est une vérité révélée par Dieu et contenue dans le dépôt divin, confié par le Christ à son Epouse, pour qu’Elle le garde fidèlement et le fasse connaître d’une façon infaillible. Le Magistère de l’Eglise, non point certes par des moyens purement humains, mais avec l’assistance de l’Esprit de Vérité, et à cause de cela sans commettre absolument aucune erreur, remplit la mission qui lui a été confiée de conserver à travers tous les siècles dans leur pureté et leur intégrité les vérités révélées; c’est pourquoi il les transmet, sans altération, sans y rien ajouter, sans y rien supprimer. “En effet, comme l’enseigne le Concile 49 du Vatican, le Saint-Esprit ne fut pas promis aux successeurs de Pierre pour que, Luimême révélant, ils enseignent une doctrine nouvelle, mais pour que, avec son assistance, ils gardent religieusement et exposent fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi”. C’est pourquoi, de l’accord universel du Magistère ordinaire de l’Eglise, on tire un argument certain et solide, servant à établir que l’Assomption corporelle au ciel de la bienheureuse Vierge Marie - laquelle, en ce qui concerne la “glorification” céleste du corps virginal de la Mère de Dieu, ne pouvait être connue par les forces naturelles d’aucune faculté de l’âme humaine - est une vérité révélée par Dieu, et par conséquent, elle doit être crue fermement et fidèlement par tous les enfants de l’Eglise». Pie XII, Humani Generis, (58): « Il ne faut pas estimer non plus que ce qui est proposé dans les Encycliques ne demande pas de soi l’assentiment, les Papes n’y exerçant pas le pouvoir suprême de leur Magistère. Cet enseignement est celui du Magistère ordinaire auquel s’applique aussi la parole: “Qui vous écoute, m’écoute” (Luc X, 16); et le plus souvent ce qui est proposé et rappelé dans les encycliques appartient déjà par ailleurs à la doctrine catholique. Que si les Souverains Pontifes portent expressément dans leurs actes un jugement sur une matière jusqu’alors controversée, il est évident pour tous que cette matière, cesse par là même, suivant la pensée et la volonté de ces mêmes Pontifes, d’appartenir au domaine des questions librement discutées entre théologiens». Le Saint-Office le 20-12-1949 (59) s’adressait ainsi aux Evêques: «Ils écarteront aussi cette manière dangereuse de s’exprimer qui donnerait naissance à des opinions erronées ou à des espoirs fallacieux qui ne pourront jamais se réaliser, en disant par exemple que l’enseignement des Souverains Pontifes, dans les encycliques… ne doit pas être tellement pris en considération puisque tout n’est pas de foi». Le Code de Droit Canon a repris le texte du Concile pour définir ce qu’est l’infaillibilité de l’Eglise: can. 1323. L’obligation de croire Certains pensent que lorsque le Magistère définit, il doit ajouter l’obligation de croire. Mais ce n’est pas vrai comme on le voit dans la définition citée plus haut: “Est à croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu ou écrite ou transmise, et que l’Eglise, soit par un jugement solennel, soit par son magistère ordinaire et universel, propose à croire comme divinement révélé” DS 3011. Dans le texte, la phrase principale est “omnia credenda sunt”: doivent être crues, on doit croire, il faut croire. Le Concile enseigne l’existence de l’obligation de croire, obligation fondée sur “ces choses qui sont contenues dans la parole de Dieu”: puisqu’elles sont révélées, elles doivent être crues. Donc c’est le caractère de révélé qui est à la base de l’acte de foi. Le Concile avait également défini: “Puisque l’homme dépend totalement de Dieu comme son Créateur et Seigneur et que la raison créée est complètement soumise à la Vérité incréée, nous sommes tenus, quand Dieu se révèle de lui présenter par la Foi la soumission pleine et entière de notre intelligence et de notre volonté” DS 3008. C’est pourquoi la source, le motif formel de cette obligation est la véracité de Dieu ou l’autorité de Dieu qui se révèle, qui ne peut pas nous tromper, et ne peut pas se tromper. L’intervention infaillible de l’Eglise a le rôle de déterminer avec précision l’objet matériel de la foi: c’est-à-dire de faire savoir avec certitude quelles sont les vérités révélées. Donc le rôle propre du Magistère de l’Eglise n’est pas d’obliger à croire mais de certifier que cette proposition appartient au dépôt de la révélation. Le Magistère en tant que tel n’oblige pas à croire mais propose à croire ce qui doit être cru comme divinement révélé. C’est pourquoi l’acte de l’Eglise est d’affirmer le caractère révélé d’une proposition et alors, ipso facto, l’obligation lie le croyant: il faut croire. Ce n’est pas parce que l’Eglise crée une obligation mais parce que le fidèle connaît, au moyen d’une définition infaillible, que telle proposition est révélée, qu’il est donc lié par l’obligation générale de croire qui s’applique à ce cas particulier. Il est vrai que souvent l’Eglise associe le pouvoir de juridiction à celui du Magistère en frappant de peines ecclésiastiques celui qui réfute son enseignement. Mais l’acte de juridiction est formellement distinct de celui du Magistère. “On doit la soumission de l’esprit à l’Eglise qui définit, même si elle n’ajoute aucun précepte. Puisqu’en effet Dieu nous a donné l’Eglise comme Mère et Maîtresse pour tout ce qui concerne la religion et la 50 piété, nous sommes tenus de l’écouter quand elle enseigne. C’est pourquoi, si la pensée et la doctrine de toute l’Eglise apparaît, nous sommes tenus d’y adhérer, même s’il n’y a pas de définition: combien plus donc si cette pensée et cette doctrine nous apparaissent par une définition publique?” (60). Donc l’interdiction ou le commandement ou les peines ecclésiastiques peuvent être le signe de l’acte infaillible mais n’en sont pas l’élément constitutif. Pie IX, Tuas libenter, 21/12/1863: “Même s’il s’agissait de cette soumission qui doit s’accorder par un acte de foi divine... il faudrait aussi l’étendre aux vérités qui sont transmises comme divinement révélées par le magistère ordinaire de toute l’Eglise dispersée sur la terre” DS 2879. Considérations actuelles Beaucoup de théories sont répandues aujourd’hui à propos du Magistère infaillible. Certains disent que l’Eglise est infaillible seulement dans son Magistère solennel; d’autres affirment que pour qu’il y ait Magistère solennel, il y faut des conditions; selon certains, l’Eglise n’est infaillible que lorsqu’elle ne fait que répéter ce qui a été déjà défini; pour d’autres encore, l’Eglise ne peut qu’avec son Magistère solennel trancher sur des questions débattues; le Magistère ordinaire ne serait infaillible que lorsqu’il répète la même vérité de façon ininterrompue. Pour d’autres encore: le Magistère solennel serait utilisé pour les vérités révélées, l’ordinaire pour les vérités qui appartiennent à l’objet secondaire (61). En théologie positive, pour arrêter définitivement n’importe quelle doctrine, il faut se fonder sur les déclarations et l’usage de l’Eglise. Nous avons vu au contraire que l’Eglise a défini avec son Magistère solennel des vérités qui font partie de l’objet secondaire; en outre elle a défini qu’elle est infaillible avec son magistère ordinaire et que le Pape a la même infaillibilité que l’Eglise (62). Pie XII, dans la définition de l’Assomption, enseigne que le Magistère ordinaire peut de lui-même manifester de manière infaillible la vérité révélée. Léon XIII avec le Magistère ordinaire a résolu le problème, qui était encore alors objet de discussion, de la validité des ordinations anglicanes; et il l’a fait sans aucune répétition ininterrompue. Quant aux autres conditions, on dit que le Magistère serait infaillible seulement quand il s’agit de vérités liées à la Révélation; mais on a vu que ce qui ne fait pas partie de cette matière ne rentre pas dans l’objet du Magistère de l’Eglise. On dit encore que ce doit être un document adressé à toute l’Eglise mais même ce critère est difficile à préciser: un discours de Pie XII aux sages-femmes (20/10/51) est considéré par tous les moralistes comme un jugement infaillible sur l’usage des soi-disant “méthodes naturelles”. Pour ce qui regarde la volonté d’obliger, on a déjà observé que l’intervention de l’Eglise comporte en elle-même la nécessité de croire: en outre pour l’infaillibilité négative, aucun acte particulier ou explication de l’Autorité n’est nécessaire. Une autre erreur répandue est la confusion entre la règle prochaine et la règle éloignée de la foi: l’Ecriture et la Tradition sont la règle éloignée de la foi, le Magistère est la règle prochaine. Le dépôt de la Révélation se trouve intégralement dans l’Ecriture et la Tradition; il a été confié non pas aux fidèles et aux théologiens mais seulement au Magistère de l’Eglise, lequel est la règle prochaine et universelle des vérités de foi. Ce sont les paroles de Pie XII dans Humani generis, texte déjà cité à propos de l’objet du Magistère. Cette distinction est classique dans la théologie catholique. Il suffit de voir l’Index analytique du Tractatus de auctoritate Summis Pontificis, de J EAN DE S T THOMAS O.P.: il faut distinguer dans la règle de foi ce qu’elle est en elle-même et ce qu’elle est pour nous. Pour nous, il y a deux règles inanimées ou éloignées, l’Ecriture Sainte et la Tradition et deux animées ou prochaines, le Concile œcuménique et le Pape. La règle prochaine n’est pas un jugement privé; ce n’est pas l’Ecriture et la Tradition, comme disaient les hérétiques; elle est visible et extérieure pour tous les fidèles, c’est une règle vivante et humaine; elle requiert un jugement animé; quand il s’agit de cette règle on parle de toute la religion catholique. Elle est raison par ellemême; elle doit résider dans le chef suprême, l’Evêque de Rome. En d’autres termes, l’Ecriture et la Tradition constituent la source première de la Révélation: c’est là que le Magistère puise avant de se prononcer. Mais quand il s’est prononcé, il faut croire à ce qu’il dit, parce qu’il est pour nous la règle prochaine de la foi: c’est lui qui dit ce que nous devons croire 51 ou tenir pour vrai et c’est lui qui explique ce qui est révélé. Il n’y a pas une règle autre ou supérieure à celle-ci. On ne peut pas faire le contraire: juger le Magistère à partir de la Révélation, en croyant que la règle prochaine soit la Révélation ou mieux qu’elle soit notre jugement propre ou celui d’une personne en qui on a confiance, sur ce qui nous semble révélé; ce serait perdre la règle prochaine, ce serait ne plus avoir l’esprit catholique mais une mentalité hétérodoxe. De cette confusion naît l’erreur de croire que le magistère ordinaire, pour être infaillible, doit répéter ce qui est contenu dans la Révélation, et qu’autrement il est faillible: c’est ce qu’a affirmé récemment Hirpinus (63) qui pensait pouvoir appuyer sa thèse sur l’article de DTC Infaillibilité du Pape, col. 1705. Or dans le DTC nous trouvons exactement notre thèse: “Pour qu’il y ait infaillibilité, il est donc requis que la vérité enseignée soit proposée comme ayant été définie précédemment, ou comme ayant toujours été crue ou admise dans l’Eglise, ou comme étant attestée, par le consentement unanime et constant des théologiens, comme vérité catholique”. En d’autres termes l’obligation de croire doit être signifiée par le Magistère d’une de ces manières: ou en disant que la vérité proposée a déjà été définie, ou qu’elle est contenue dans la Révélation ou qu’elle est de doctrine catholique... Mais l’auteur de l’article du DTC ne dit pas que l’obligation de croire existe si la doctrine catholique est jugée par les fidèles conforme à la Tradition, et ce n’est pas non plus sa pensée (col. 1703): en effet il invite à se reporter à son autre article sur l’infaillibilité du magistère ordinaire de l’Eglise (64): “le magistère ordinaire et universel peut encore s’exercer par l’enseignement implicite manifestement contenu... dans la discipline et dans la pratique générale de l’Eglise, du moins en tout ce qui est vraiment commandé, approuvé ou autorisé par l’Eglise universelle; car dans cet enseignement, dès lors qu’il existe véritablement, l’Eglise n’est pas moins infaillible que dans les définitions solennelles des Conciles” (col. 2194). En d’autres termes, dès que l’Eglise parle par ce mode de Magistère, elle est ipso facto infaillible, sans que soit nécessaire une répétition de cet enseignement. Nous soulignons encore une fois que l’objet du Magistère est constitué par les vérités révélées, en dehors de toute autre vérité: aucune autorité ne propose quelque chose qui n’est pas lié à la Révélation. Et dès qu’elle le promulgue, nous devons le croire, en raison du dogme de l’infaillibilité: si au contraire nous devions contrôler sa conformité à la Tradition, le Magistère ne serait plus la règle prochaine des vérités de foi, il ne serait plus infaillible par lui-même mais par le fait que nous contrôlerions sa conformité avec la Tradition! Une telle position provient, comme disait Pie XII de «l’orgueil du “libre examen”, qui relève de la mentalité hétérodoxe plus que de l’esprit catholique, et selon lequel les individus n’hésitent pas à peser au poids de leur jugement propre même ce qui vient du Siège Apostolique» (65). C’est de cette erreur de base qu’est née la thèse selon laquelle le magistère ordinaire et universel serait infaillible seulement lorsque sa conformité avec la Tradition serait exprimée dans les termes du Canon de St Vincent de Lérins: c’est-à-dire quand il est conforme à ce qui a été cru par tous, toujours et partout. Cette thèse déjà réfutée dans Sodalitium n° 39 (cf. Vie de l’Institut) a été soutenue par les anti-infaillibilistes au Concile du Vatican; le Cardinal Franzelin leur répondit que ce canon se rapporte à la norme objective de la foi (règle éloignée) mais non à la norme directive (règle prochaine): «On pervertit le canon de V. de Lérins en y cherchant à la fois la norme objective et la norme directive, comme si l’unique norme infaillible de la Foi catholique se trouvait dans l’accord constant et universel de l’Eglise; alors, en matière de foi, seul ce qui aurait été cru par un accord constant serait absolument certain et infaillible, et personne ne pourrait croire quoi que ce soit, de cette foi divine qui est absolument et infailliblement certaine, sans qu’il voie lui-même cet accord constant et universel de l’Eglise (...). [Le canon] est certes très vrai, si on le comprend au sens positif, savoir: ce qui a été cru toujours, partout et par tous est divinement révélé, et donc doit être tenu; mais [ce canon] serait faux si on l’entendait au sens négatif. [De même comprendre que] rien ne pourrait être divinement révélé et donc à croire, sans que les trois notes d’antiquité, d’universalité et d’accord ne militent ensemble et simultanément [serait faux]. Qu’il puisse arriver, en effet, et que cela se soit produit de fait, qu’une doctrine ait toujours été crue, depuis l’origine, et donc soit divinement révélée, sans avoir été crue ni partout, ni par tous, St Vincent lui même 52 l’enseigne» (66). Confirmations Léon XIII, Satis Cognitum: «... JésusChrist a institué dans l’Eglise un magistère vivant, authentique et, de plus, perpétuel, qu’Il a investi de sa propre autorité, revêtu de l’esprit de vérité, confirmé par des miracles, et Il a voulu et très sévèrement ordonné que les enseignements doctrinaux de ce magistère fussent reçus comme les siens propres. Toutes les fois donc que la parole de ce magistère déclare que telle ou telle vérité fait partie de l’ensemble de la doctrine divinement révélée, chacun doit croire avec certitude que cela est vrai; car si cela pouvait en quelque manière être faux, il s’ensuivrait, ce qui est évidemment absurde, que Dieu lui-même serait l’auteur de l’erreur des hommes... Les Pères du Concile du Vatican n’ont donc rien édicté de nouveau, mais ils n’ont fait que se conformer à l’institution divine, à l’antique et constante doctrine de l’Eglise et à la nature même de la foi, quand ils ont formulé ce décret: “On doit croire de foi divine et catholique...” [suit la citation du ch. 3 de Dei Filius DS 3011, n.d.a.] (67)». Pie XII: Dans Munificentissimus Deus, rappelle que l’accord universel des évêques est un argument sûr pour définir que l’Assomption est “une vérité révélée par Dieu” et il inclut qu’elle doit être crue fermement et fidèlement par tous les enfants de l’Eglise”. Après la définition ex cathedra de cette vérité, Pie XII ajoute, dans un autre paragraphe: “Par conséquent, si quelqu’un, ce qu’à Dieu ne plaise, osait volontairement nier ou mettre en doute ce que Nous avons défini, qu’il sache qu’il a totalement abandonné la foi divine et catholique”. Ce paragraphe vient après la définition, le Pape ne met pas de censure mais se borne à énoncer un fait qui provient de la définition infaillible: qui la nie ou la met en doute ne peut conserver la foi. Pie IX, Inter gravissimas, 28/10/1870: “Comme tous les fauteurs d’hérésie et de schisme, ils se vantent faussement d’avoir conservé l’ancienne foi catholique, alors qu’ils renversent le principal fondement même de la foi et de la doctrine catholique. Ils reconnaissent bien dans l’Ecriture et la Tradition la source de la Révélation divine; mais ils refusent d’écouter le Magistère toujours vivant de l’Eglise, bien que ressortant clairement de l’Ecriture et de la Tradition, et institué par Dieu comme un gardien perpétuel de l’exposition et de l’explication infaillibles des dogmes transmis par ces deux sources. Par suite, avec leur science fausse et bornée, indépendamment et même à l’encontre de l’autorité de ce magistère divinement institué, ils s’établissent eux-mêmes juges des dogmes contenus dans ces sources de la Révélation. Car font-ils autre chose, lorsqu’à propos d’un dogme de foi défini par Nous, avec l’approbation du Saint Concile, ils nient que ce soit une vérité révélée par Dieu et exigeant un assentiment de foi catholique, tout simplement parce qu’à leur avis ce dogme ne se trouve pas dans l’Ecriture et la Tradition? Comme s’il n’y avait pas un ordre dans la foi, institué par notre Rédempteur dans son Eglise et toujours conservé, selon lequel la définition même d’un dogme doit être tenue à elle seule pour une démonstration suffisante, très sûre et adaptée à tous les fidèles, que la doctrine définie est contenue dans le double dépôt de la révélation, écrit et oral. C’est d’ailleurs pourquoi de telles définitions dogmatiques ont toujours été et sont nécessairement une règle immuable pour la foi comme Le Pape Pie XII 53 pour la théologie catholique, à laquelle revient la très noble mission de montrer comment la doctrine, au sens même de la définition, est contenue dans le dépôt révélé”. Conclusion L’étude de l’infaillibilité nous conduit à une constatation: de nombreux actes, décrets, rites, lois des trente dernières années ont été promulgués comme infaillibles et donc le fidèle devrait être tenu de croire le contenu de cet enseignement. Toutefois notre intelligence ne peut concevoir la contradiction et objectivement le contenu de cet enseignement est contradictoire avec l’enseignement déjà infailliblement défini par l’Eglise. En effet ce que l’Eglise a déjà défini est infailliblement vrai (68). Comment expliquer que l’Autorité enseigne désormais “infailliblement” une erreur? Alors, au lieu de diminuer l’infaillibilité du Pape et de l’Eglise, il faut résoudre le problème principal: celui qui a promulgué un tel enseignement a-t-il vraiment l’Autorité dans l’Eglise, est-il vraiment le Vicaire de JésusChrist, le doux représentant du Christ sur la terre? Remplit-il son devoir de défendre et de garder le dépôt de la Foi? Peut-il se tromper lui qui est le fondement, le “Clavigère”, le Pasteur universel? St Léon-le-Grand répond à la question: «La solidité de ce fondement sur lequel est construite toute l’Eglise dans toute sa hauteur, n’est jamais secouée quelle que soit l’importance du temple qui la surmonte. La solidité de cette foi louée dans le Prince des Apôtres est perpétuelle; et comme demeure pour toujours ce que Pierre a cru dans le Christ, ainsi demeure pour toujours ce que le Christ a établi dans Pierre... En effet “Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant” c’est ce que Pierre dit chaque jour dans toute l’Eglise, et toute langue qui loue le Seigneur a été formée par le Magistère de cette voix. Cette foi triomphe du diable et délie les chaînes de ses prisonniers. Elle arrache du monde et fait habiter dans le ciel, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle: elle a été divinement dotée d’une telle solidité que jamais la folie des hérétiques ne pourra la corrompre, ni la perfidie des païens la dominer» (69). BIBLIOGRAPHIE Enciclopedia Cattolica, article Infallibilità, col. 1920-4. S ALAVERRI , Sacræ Theologiæ Summa, Teologia Fundamentalis, T. III De Ecclesia Christi, B.A.C., Madrid 1962. V. ZUBIZARRETA O.C.D., Theologia dogmatico-scholastica ad mentem S. Thomæ Aquinatis, vol I, Theologia Fundamentalis, Bilbao 1948. F. MARIN-SOLA O.P., L’Evolution homogène du Dogme catholique, 2ème éd. Fribourg (CH) 1924. SISTO CARTECHINI S.J., Dall’opinione al domma, ed. La Civilità Cattolica, Rome 1953. L. M. DE BLIGNIERES, A propos de l’objet du Magistère ordinaire et universel, suppl. doctrinal à Sedes Sapientiæ, Société St Thomas d’Aquin, octobre 1985. ABBÉ BERNARD LUCIEN, L’infaillibilité du Magistère ordinaire et universel de l’Eglise, Documents de Catholicité, Bruxelles 1984. De ces ouvrages on a pris librement quelques passages. Autres textes utilisés E. P. = Les Enseignements Pontificaux L’Eglise, Desclées, 1959. DS = Denzinger-Schönmetzer, Enchridion Symbolorum definitionum et declarationum, XXXVI éd., Herder, 1976. D = Denzinger-Umberg, c’est le même texte que DS, dans une édition antérieure, éd. 18-20, Herder, 1930. DTC = Dictionnaire de Théologie Catholique, articles “Infaillibilité du Pape” et “Eglise”. Notes 1) Matth. X, 33; Mc XVI, 16. 2) Matth. X, 40. Lc IV, 43. Jn III, 17; VI, 40; VIII, 29. 3) Quelques exemples: Mc IX, 22-23; XVI, 14; Jn XI, 26; Matth. XV, 28. 4) Matth. VIII, 19; Jn III, 2. 5) “Pour vous ne vous faites pas appeler Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ” (Matth. XXIII, 8-10). 6) Jn XVII, 6; XIV, 17 (prières après la Dernière Cène). 7) Jn XX, 21 (après la Résurrection). 8) Matth. X, 40; Lc X, 16. 9) Cf.: I Cor. I, 17; II Cor. V, 20; X, 4; I Tim I, 19; I Jn II, 24; II Jn I, 10. 10) Dans cet article sous le nom du Concile du Vatican nous indiquons celui réuni au Vatican du 8/12/1869 au 20/10/1870 communément appelé 1er Concile du Vatican. 11) SALAVERRI, op. cit., l. 1, c. 1, a. 2, n. 97, pp. 518-29. 12) Jn XIV, 16; XVI, 14. Cf. aussi Lc XXIV, 48-49; Jn XVII, 17; Actes I, 8; II, 4. 13) Matth. XXVIII, 18-20. Quand dans l’Ecriture Sainte Dieu fait à quelqu’un une promesse solennelle pour remplir une mission, Il donne alors l’aide efficace pour obtenir l’effet requis (voir à titre d’exemple: Ex. III, 11-17; Josué I, 5-9). 54 14) Actes des Apôtres V, 32; XV, 28. 15) I Tim. IV, 11-16; II Tim. II, 2; Tit. I, 5. 16) St Ignace d’Antioche, Ephésiens III, 2. Philadelp. III, 2. St Irénée, Adv. hær., I, 10, 1; III, 3, 1; III, 4, 1; III, 24. Enciclopedia Cattolica, op. cit. 17) V. ZUBIZARETTA O.C.D., op. cit., Q. XIX. De potestate Ecclesiæ a. 2, Bilbao 1948, n. 453 ss. 18) Summa Apolog. q. 8 a. 3. Il faut ici signaler l’erreur de beaucoup qui affirment que l’Eglise est infaillible quand elle dit la vérité ou quand elle ne profère pas d’erreur. Ceci est la simple inerrance que tous, hérétiques compris, peuvent avoir: Arius, Luther, Calvin ont affirmé aussi des choses conformes à la Révélation et au Magistère qui les a précédés. Ce qui par contre est propre à l’infaillibilité de l’Eglise est l’impossibilité de droit d’être dans l’erreur, par laquelle elle ne peut jamais se tromper. Ceci la distingue de l’inerrance de n’importe quelle personne ou société humaine. 19) FRANZELIN, De Traditione, T. XII, Schol. 1. Cité par L. BILLOT, De Ecclesia Christi, T. I, P. II, c. II, q. X pp. 444-5. “Le Saint-Siège Apostolique, auquel a été confié par Dieu la garde du dépôt et imposés la charge et le devoir (munus et officium) de paître toute l’Eglise pour le salut des âmes, peut prescrire afin qu’elles soient suivies, ou proscrire afin qu’elles ne soient pas suivies, les sentences théologiques ou connexes aux choses théologiques, non pas uniquement avec l’intention de décider infailliblement d’un avis définitif, la vérité [cela correspond à ce que nous appelons infaillibilité positive, n.d.a.]... Dans de telles déclarations... il y a toutefois une infaillible sécurité dans la mesure où il est sûr qu’elle peut être acceptée par tous et on ne peut pas refuser de l’adopter sans violation de la soumission due au Magistère constitué par Dieu [cela correspond à ce que nous appelons infaillibilité négative, n.d.a.]. Pourtant l’autorité du Magistère constituée par le Christ dans l’Eglise, en ce qui nous concerne, peut être considérée sous deux aspects. Premièrement, en ce qui concerne chacun des actes elle est sous l’assistance du Saint-Esprit pour la définition de la vérité ou en tant qu’elle est l’autorité d’infaillibilité. Deuxièmement ou extensive dans la mesure où le magistère lui-même agit avec l’autorité de gouverner les choses que Dieu lui a confiées; toutefois, ni avec toute son intensité, si l’on peut dire, ni pour définir une fois pour toutes une vérité, mais pour autant que cela est apparu nécessaire ou opportun et suffisant pour la sûreté de la doctrine; et cette autorité nous pouvons l’appeler autorité de providence doctrinale. L’autorité infaillible ne peut pas être communiquée par le Pontife à ses autres ministres qui agissent en son nom. Mais l’autorité inférieure de providence doctrinale, comme nous l’avons appelée, non pas indépendante mais sous la dépendance du Pontife lui-même est communiquée avec plus ou moins d’extension à certaines Sacrées Congrégations... Nous estimons que de tels jugements, même inférieurs à la définition ex cathedra, peuvent être émis de telle sorte qu’ils requièrent l’obéissance qui inclut la soumission de l’intelligence: non pour que soit crue une doctrine infailliblement vraie ou fausse mais pour que l’on juge que la doctrine contenue dans un tel jugement est sûre et que nous devons l’adopter et rejeter son contraire en raison de la sainte autorité dont la charge est sans aucun doute de veiller à la sécurité de la doctrine, à adopter avec la soumission de l’intelligence”. Cet enseignement est donné également par Zubizarreta, op. cit., n° 474, au sujet des Décrets doctrinaux: il donne comme exemple la lettre de Pie IX à l’Archevêque du Münich du 21/12/1863, citée p. 48. 20) DS 2725. CARTECHINI, op. cit., Parte Prima, ch. XI, p. 155. 21) Cette Thèse est tirée de SALAVERRI, op. cit., T. III, 1. II ch. I, nn. 501-580, pp. 654-665. 22) Supprimés dans l’édition de DenzingerSchönmetzer. 23) Matth. XVI, 18: Notre-Seigneur en promettant la Primauté à St Pierre affirme qu’il sera le fondement de son Eglise et que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre elle. Jn XXI, 15-17: Notre-Seigneur donne réellement à St Pierre le pouvoir qu’Il lui a promis. Le Pape est donc le Fondement, le “Clavigère”, le Pasteur Universel. Luc XXII, 32: le Concile du Vatican, sans vouloir déclarer authentiquement le sens de ce passage, fonde le dogme de l’infaillibilité sur la prière de Notre-Seigneur pour St Pierre où Il demande que sa foi ne défaille point. 24) SALAVERRI, op. cit., T. III, l. II ch. 2, a. 2 nn. 610636: sont énumérés ici les documents des Papes, des Conciles, des Pères à partir de l’an 107 après Jésus-Christ. 25) L’exemple classique est celui de Jean XXII, qui publia un ouvrage contenant une erreur sur la vision béatifique, œuvre qu’il rejeta lui-même solennellement avant de mourir (DS 990). 26) S. Th. II, II, q. 11, a. 2. 27) Lettres Apostoliques de Léon XIII (10 janvier 1890), tome II, p. 281. 28) E. P., vol. 2 (12 août 1950) nn. 1278, 1281, 1283. 29) “Le Pontife Romain, quand il parle ex cathedra, c’est-à-dire quand il définit une doctrine de foi ou de morale qui doit être tenue par toute l’Eglise... jouit de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu munir son Eglise quand il définit une doctrine sur la foi ou la morale...”. 30) Mgr Gasser, rapporteur au Concile du Vatican pour la Députation de la Foi, Mansi 52, 1226 s. cité par DE BLIGNIERES, op. cit., pp. 4-5. 31) «Dans l’objet secondaire sont regroupées les vérités qu’on appelle d’un terme générique “vérités connexes”. Celles-ci ne se trouvent pas formellement dans la Révélation, mais sont étroitement liées à celleci, et l’on peut dire qu’elles y sont virtuellement contenues. L’erreur à propos de ces applications du principe révélé ébranlerait les bases mêmes sur lesquelles elles s’appuient et mettrait la foi en danger. Les vérités connexes doivent donc être considérées comme étant présentes dans l’esprit du Divin Maître dans l’acte de communiquer sa Révélation, comme sont logiquement présentes dans tout être intelligent les conséquences les plus immédiates de ses affirmations» ENCICLOPEDIA CATTOLICA op. cit., col. 1923. 32) Ce sont des vérités non pas de foi mais nécessaires pour faire l’acte de Foi. 33) J. KLEUTGEN, Annotationes ad schema II de Ecclesia: Mansi 53, 325; in SALAVERRI op. cit., T. III, 1 2, c. 3, a. 2, n. 710, p. 725. 34) Ce canon se retrouvait dans le schéma transformé de cette façon: “Si quelqu’un dit que l’Eglise du Christ puisse manquer à la vraie foi, ou que dans aucune autre chose elle est certainement exempte d’erreur si ce n’est en ce qui de soi est contenu dans la parole de Dieu: an. sit”. 35) F. MARIN-SOLA O.P., op. cit., T. I c. II, section II, n. 134, p. 198. 36) Nous rapportons à titre d’exemple la définition de la consubstantialité du Père avec le Fils. «La Sainte Ecriture nous enseigne explicitement que Jésus-Christ est Fils unique du Père, vrai Fils de Dieu, vrai Dieu comme 55 le Père; mais elle n’enseigne pas explicitement qu’Il soit “consubstantiel”... L’Eglise enseignante se réunit donc en Concile à Nicée et, se basant, comme toujours, sur les données de l’Ecriture Sainte et de la Tradition, elle définit explicitement la consubstantialité du Verbe et ajouta au Credo traditionnel la célèbre formule consubstantialem Patri» (MARIN-SOLA, op. cit., n. 202, p. 300). 37) Nous rapportons à titre d’exemple la proposition 5 condamnée par St Pie X, DS 3405: “Le dépôt de la foi ne contenant que des vérités révélées, il n’appartient sous aucun rapport à l’Eglise de porter un jugement sur les assertions des sciences humaines” (Trad. E. P. vol. I, n° 689). 38) MARIN-SOLA, op. cit., n. 253-5, pp. 454-7. Par foi ecclésiastique on désigne un acte de foi basé sur l’autorité infaillible de l’Eglise, même s’il ne s’agit pas encore d’un dogme de foi. Cf. S. CARTECHINI op. cit., pp. 50-65. V. ZUBIZARRETA O.C.D., op. cit., n. 480-3, pp. 412-5. 39) L’édition Denzinger-Schönmetzer résume le texte dans l’appendice à la condamnation de P. Abélard (DS 721). 40) Prop. 7, 8 et 9, DS 1249-50-51. 41) D 1669, 73, 75 supprimé dans DS [DS 2851, 57]. 42) “Si dans ses lois, l’Eglise faisait entrer le péché mortel, elle obligerait les hommes à perdre la vie éternelle” CARTECHINI, op. cit., ch. II, p. 48. 43) S. Th. II, II, q. 10 a 12 in c. 44) Comment ne pas remarquer l’affinité de cette proposition des Jansénistes avec les arguments avancés par tant de traditionalistes qui veulent résister aux réformes nouvelles sans aborder le problème de l’autorité. Cette condamnation les place devant un choix: ou accepter lesdites réformes ou les réfuter avec l’esprit janséniste ou bien prendre position sur l’autorité qui a légiféré. 45) Diffusion de la Pensée Française 1975, pp. 161-211. 46) L’Eglise pourrait affirmer un dogme nouveau (par exemple, la Médiation universelle de Marie) en instituant une nouvelle fête pour l’Eglise universelle. St Robert Bellarmin a parlé ainsi au Pape à propos du dogme de l’Immaculée Conception, qui n’était pas encore défini de son temps: “Si une définition formelle n’est pas donnée maintenant, on devrait au moins prescrire alors à tous les ecclésiastiques séculiers et réguliers de réciter l’office de l’Immaculée Conception, comme le fait l’Eglise: ainsi, sans aucune définition, on obtiendrait ce que nous désirons” cité par D A SILVEIRA, op. cit., p. 170. 47) Textes cités par SALAVERRI, op. cit., n. 725, pp. 732-3. 48) Textes cités par SALAVERRI, op. cit., n. 729, p. 734. 49) Quelques exemples. Notes: de foi, proche de foi, doctrine catholique, théologiquement certaine, sûre. Censure: hérétique, erreur, proche de l’hérésie, de l’erreur, suspecte ou ayant une apparence d’hérésie, erreur en théologie, téméraire, fausse, offensant le sens chrétien, scandaleuse, pas sûre. 50) Il pourra y avoir péché mortel indirectement contre la foi envers une proposition déclarée avec la note “théologiquement certaine” ou “doctrine catholique”; péché mortel par témérité envers une proposition déclarée “certaine”; péché mortel par désobéissance envers une proposition déclarée “sûre”. CARTECHINI, op. cit., schéma au début de l’œuvre. Voir aussi Parte Prima, c. XI, pp. 154-8. 51) B ILLOT , op. cit., pp. 445-6 affirme à propos d’une proposition déclarée sûre: “une doctrine pour laquelle il existe une forte probabilité qu’elle ne s’oppose pas à la règle de la foi, sera peut-être déclarée fausse, spéculativement parlant, c’est-à-dire si elle est considérée selon sa relation à la règle de la foi considérée objectivement en elle-même. Mais en ce qui concerne la licéité de croire à ladite doctrine en tant qu’opinion, elle est très certainement sûre, et on peut l’adopter en toute sécurité puisqu’il n’y a pas d’opposition, du moins quelque peu digne de foi, avec cette règle [la foi] contre laquelle il n’est pas licite d’avoir une opinion contraire”; si au contraire une doctrine a été déclarée non sûre, même seulement de façon probable, on ne peut pas la suivre. 52) GOUPIL, S.J., La règle de la foi, n. 31 cité par DE BLIGNIERES, op. cit., p. 6. 53) L. M. DE BLIGNIERES, op. cit., pp. 6-8. 54) Mgr d’Avanzo, rapporteur pour la Députation de la Foi au 1er Concile du Vatican, Mansi, 52, 1193. Citation de L. M. DE BLIGNIERES, op. cit., p. 8. Cf.: SALAVERRI, op. cit., n. 666; n. 645-9, pp. 700-1. 55) Mansi 52, 763-4 et 52, 764 C 1-7: cité par l’Abbé Bernard LUCIEN, op. cit., pp. 21-3. 56) Constitution dogmatique Dei Filius, ch. III: De Fide 24/4/1870. 57) Mansi 51, 224 C12-225 A5: cités par B. LUCIEN, op. cit., p. 39. 58) 12-8-1950 (E. P. 1280). 59) Instruction Ecclesia Catholica à l’Episcopat catholique, E. P. vol. II, n° 1269. 60) P. KLEUTGEN, dans l’exposé théologique sur le schéma sur l’Eglise, au Concile, Mansi 53, 330 B: cité par B. LUCIEN, op. cit., p. 135. 61) Voir par exemple les articles d’Arnaldo Vidigal Xavier Da Silveira parus sur Cristianità nn. 9, 10 et 13 de 1975; 40-41 de 1978. Ces articles dus à l’intention louable de prouver que l’on peut refuser les nouvelles réformes sans perdre la foi catholique, contiennent cependant beaucoup d’erreurs, d’imprécisions et de contradictions. 62) Une autre erreur affirme que l’Eglise, puisqu’elle est infaillible per se, peut être faillible per accidens. Or l’Eglise est infaillible per se en opposition à per alium: du moment qu’elle est infaillible par ellemême, elle n’a pas besoin d’un autre moyen humain pour atteindre à l’infaillibilité. 63) H IRPINUS , Vers l’Apostasie par la voie de l’«obéissance», Courrier de Rome, année XXVII n° 170 (360), juillet-août 1995, pp. 2 et 3. Traduction de Si Si No No, Année XXI n° 9, 15 Mai 1995 pp. 2 et 3. 64) DTC, Eglise, col. 2193 ss. 65) Pie XII, Vos omnes, 10/9/1957, E. P. n. 1483. 66) Mansi 52, 26-27: citation de B. L UCIEN , Le canon de St Vincent de Lérins, in Cahiers de Cassiciacum, n° 6, pp. 83-95. 67) E. P., L’Eglise, vol. I, n. 571-2. 68) ABBÉ H. BELMONT, L’Exercice quotidien de la Foi dans la crise de l’Eglise, en dépôt chez l’auteur. 56 L’OSSERVATORE ROMANO 69) ST LEON-LE-GRAND, Sermons, 3, 1-4. D ans le précédent Sodalitium (n° 36, p. 69) nous vous avions fait part de notre intention d’examiner les deux dernières “encycliques” de Jean-Paul II, Evangelium vitæ et Ut unum sint; la première a réjoui les “conservateurs”, la seconde les “progressistes”, mais, hélas, aucune des deux n’a été un sujet de joie pour les catholiques. Pour des raisons de temps et d’espace, nous nous limiterons, dans ce numéro, à un commentaire d’“Evangelium vitæ”. Les chiffres donnés pour les citations indiquent le numéro de l’“encyclique” ellemême, et la page (en chiffres romains) de l’édition française de L’Osservatore Romano, n° 14 du 4 avril 1995 dédié à Evangelium vitæ. En cette période Jean-Paul II s’est attaché tout spécialement à développer les trois thèmes suivants de son “Magistère”: la demande renouvelée de pardon pour les “fautes” de l’Eglise, un commentaire aux documents conciliaires pour le XXXème anniversaire de Vatican II, et de nombreux discours sur la question féminine et... féministe pour l’année de la femme. De ces documents ainsi que de l’“encyclique” Ut unum sint, nous parlerons dans le prochain numéro si Dieu le veut. EVANGELIUM VITÆ “L’Evangile de la vie se trouve au cœur du message de Jésus” (n° 1, p. I). C’est sur ces mots, très importants, que commence l’“encyclique” de Jean-Paul II, “réaffirmation de la valeur de la vie humaine et de son inviolabilité” (n° 1, p. 1 de la présentation de l’“encyclique”). Mais l’Evangile que nous prêche Jean-Paul II est-il vraiment, intégralement celui de Jésus-Christ, Notre Seigneur? L’encyclique nous impose de le croire. C’est avec vigueur que Jean-Paul II rappelle qu’aux Evêques est “confié le devoir de veiller sur la transmission intègre et fidèle de l’enseignement repris dans cette Encyclique et de prendre les mesures les plus opportunes pour que les fidèles soient préservés de toute doctrine qui lui serait contraire” ammonissant les pasteurs et les théologiens à ne jamais prendre “la grave responsabilité de trahir la vérité (...) en exposant des idées personnelles contraires à l’Evangile de la vie tel que le Magistère”le repropose et l’interprète fidèlement” (82, p. XV). Il s’agit donc de “Magistère”, et de “Magistère” collégial, selon l’ecclésiologie de Vatican II; Evangelium vitæ est le “fruit de la collaboration de l’Episcopat du monde entier” (n° 5, p. II). Jean-Paul II reprend quelques vérités catholiques Certes le fidèle n’éprouve aucune difficulté à adhérer aux condamnations de l’homicide volontaire de l’innocent (n° 57, p. XI), de l’avortement (62, XII) et de l’euthanasie (65, XII), pour lesquels est invoqué le Magistère universel de l’Eglise. L’“encyclique” reprend également la condamnation de la contraception (cfr. n° 13 ), des techniques de reproduction artificielle et, quoiqu’avec des distinguo, des diagnostics prénataux (n° 14 ), de l’expérimentation sur les embryons (63, XII)... Jean-Paul II déplore que des “crimes” soient reconnus comme des droits” (11, III), que “des choix considérés jadis par tous comme criminels et refusés par le sens moral commun deviennent peu à peu socialement respectables” (4, II), et il rappelle que “Dieu ne peut laisser le crime impuni” (8 et 9, II). Il réaffirme le lien entre liberté et vérité objective (19, IV) et il en déduit par conséquent, “en continuité avec toute la tradition de l’Eglise (...) la doctrine sur la nécessaire conformité de la loi civile avec la loi morale” (72, XIV); dans le cas contraire la loi civile est “inique” et “dépourvue de toute valeur juridique” (71, XIV), ce pour quoi “l’autorité cesse d’être elle-même et dégénère en oppression” (72, XIV). Des lois comme celles sur l’avortement et sur l’euthanasie, “non seulement ne créent aucune obligation pour la conscience, mais elles entraînent une obligation grave et précise de s’y opposer par l’objection de conscience” (73, XIV)? Les catholiques doivent s’opposer à une “objective conjuration contre la vie dans laquelle on voit aussi impliquées des institutions internationales attachées à encourager et programmer de véritables campagnes pour diffuser la contraception, la stérilisation et l’avortement” (17, IV) qui transforment la démocracie en un “totalitarisme caractérisé” (20, IV). Cependant, avoir rappelé les points de “L’Evangile de la Vie” en conformité avec la doctrine de l’Eglise ne nous dispense pas 57 de signaler, maintenant, les points ambigüs ou contraires à cette même doctrine... L’Evangile de la dignité de la personne L’“encyclique” du 25 mars 1995 se veut un complément de la “Lettre aux Familles” du 2 février de l’année précédente (cfr. 6, II) qu’elle cite abondamment (43, VIII). Dans le commentaire de cette Lettre paru dans Sodalitium (nn° 36, pp. 63 à 66; 37, pp. 55 à 64; 42, pp. 42 à 56) nous démontrions comment la doctrine de Wojtyla sur ce thème doit tant au gnosticisme et au cabalisme qu’au personnalisme des écrits de Krempel et de Doms, condamné par le Saint-Office. Pour pénétrer pleinement certains thèmes d’Evangelium Vitæ le lecteur doit donc se référer à la Lettre aux Familles (et à notre commentaire). Un des thèmes communs à l’“encyclique” et à la “Lettre” (comme à toute la pensée wojtylienne) est celui de la dignité humaine. “L’Evangile de l’amour de Dieu pour l’homme, l’Evangile de la dignité de la personne et l’Evangile de la vie sont un Evangile unique et indivisible (2, I). Que prêche cet Evangile? La dignité de la personne humaine: “toute personne” doit être “reconnue et respectée pour elle-même” (88, XVI), pour le seul fait d’être une personne. La personne humaine a, en effet, une dignité “incommensurable” (80, XV), “incomparable” (2, I), “quasi divine” (25, V; 84, XVI). Ceci vaut pour tous les hommes (25, V; 70, XIII). Le péché ne fait pas déchoir l’homme de sa dignité “quasi divine”: “Même meurtrier, il garde sa dignité personnelle” (9, III), qui existe malgré le péché originel, dont il n’est pas fait mention, dans “l’enfant à naître” (44, IX) auquel est appliqué ce qui vaut pour le prophète Jérémie purifié du péché dans le sein maternel (Jér. 1, 5; Evangelium vitæ 44, IX), pour Jean-Baptiste (purifié comme Jérémie) et pour Jésus (sans péché) (cfr. Evangelium vitæ 45, IX). On va jusqu’à dire à propos de l’avortement provoqué que “celui qui est supprimé est un être humain qui commence à vivre, c’est à dire l’être qui est, dans l’absolu, le plus innocent qu’on puisse imaginer” (58, XI). Une telle affirmation est une négation implicite du dogme du péché originel; il est bien vrai qu’un enfant dans le sein maternel est innocent (de tout péché personnel) et qu’il ne peut être considéré comme injuste agresseur de la mère, mais il n’est pas, dans l’absolu, le plus innocent qu’on puisse imaginer: après le bap- tême, ce même enfant est sans aucun doute plus innocent qu’auparavant! La dignité quasi divine de tout homme postule non seulement “le respect de toutes les personnes” (98, XVIII) mais aussi le fait de redevenir en mesure, “l’âme saisie d’un religieux émerveillement, (...) d’honorer et de vénérer tout homme, comme Paul VI nous invitait à le faire dans un de ses messages de Noël” (83, XV); il faut vénérer toute personne: 41, VIII; vénérer la vie humaine: 51, X. A vrai dire , à la clôture du Concile, Paul VI avait parlé explicitement de “culte de l’homme”, expression reprise par JeanPaul II. De cette dignité découle “la proclamation que l’homme est un être “indisponible” ou le fait que “l’homme (...) ne peut être soumis à la domination de personne” (19, IV). Même celle du Seigneur? Nous avons là un principe parallèle au principe kantien repris par Wojtyla selon lequel la personne humaine doit être toujours et pour tous (même pour Dieu) une fin et jamais un moyen (cfr. Sodalitium, n° 37, p. 61-62). Ce principe est le fondement de la “théorie des droits humains” (19, IV), une “noble proclamation” consistant à “reconnaître la valeur et la dignité de tout être humain en tant que tel, sans aucune distinction de race, de nationalité, de religion, d’opinion politique ou de classe sociale” (18, IV). Si nous cherchons alors la base scripturaire et traditionnelle de cet “Evangile de la dignité humaine”, Jean-Paul II nous répond avec le livre de la Genèse (les deux premiers chapitres), certains psaumes (spécialement le huitième: 35, VII), saint Irénée (“la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant”) (34, VII) et l’interprétation que Vatican II donne de l’Incarnation dans Gaudium et spes n° 22: “Par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme”, “merveilleuse vérité” qui est bien citée deux fois naturellement (2, I et 104, XIX) aussi dans ce document. “L’homme, l’homme vivant, constitue la route première et fondamentale de l’Eglise” (2, I; tiré de Redemptor hominis, nn° 14 et 285). Mais ces sujets ayant déjà fait l’objet d’une étude sur Sodalitium (n° 20, pp. 11-12; et n° 37, pp. 6061) nous ne pouvons qu’y renvoyer le lecteur. Rappelons seulement synthétiquement que toute la dignité de la personne humaine consiste dans l’être humain doté d’intellect et de volonté, et appelé ensuite gratuitement par Dieu à la vie surnaturelle: rien de 58 moins, mais aussi rien de plus. Or sans perdre pour autant la nature humaine, et donc radicalement sa dignité, l’homme peut,malheureusement perdre sa dignité en acte: “Si l’intelligence adhère à des opinions fausses, si la volonté choisit le mal et s’y attache, ni l’une ni l’autre n’atteint sa perfection, toutes deux déchoient de leur dignité native et se corrompent” (Léon XIII, encyclique Immortale Dei, 1/XI/1885). Et immédiatement, par voie de conséquence, en découle la négation de la liberté religieuse: “ Il n’est donc pas permis de mettre au jour et d’exposer aux yeux des hommes ce qui est contraire à la vertu et à la vérité, et bien moins encore de placer cette licence sous la tutelle et la protection des lois” (ibidem). Il suffit de ces simples considérations pour que s’écroule et tombe en poussière tout l’édifice construit par Vatican II et Jean-Paul II sur le fondement d’une fausse conception de la dignité de la personne humaine. L’Evangile de quelle vie? L’Evangile de la dignité humaine est l’Evangile de la vie. “II est vrai que l’expression “Evangile de la vie’ ne se trouve pas telle quelle dans l’Ecriture sainte” est-il admis à vrai dire dans une note (2, I). Il s’agit donc d’un néologisme et la prudence est de rigueur. Le terme “vie”, rapporté à l’homme, peut indiquer des choses bien diverses: la vie naturelle, commune à tous les hommes, la vie de la grâce, surnaturelle, propre à chacun, et enfin la vie de la gloire, la vie éternelle, au Paradis. Bien entendu, la première est condition de la seconde, et la seconde de la troisième (après la perte de la première, attention!); certes toutes ont une grande valeur, mais pas une égale valeur entre elles! L’“encyclique” parle de ces diverses acceptions du terme mais, en de nombreux cas, ne précise pas de quelle vie on entend parler, créant ainsi de déplorables équivoques. Et ce d’autant plus que le thème propre du document concerne la défense de la vie humaine naturelle à laquelle vont être alors faussement attribuées des considérations valables seulement pour la vie surnaturelle. Le processus de la vie naturelle “est éclairé par la promesse de la vie divine et renouvelé par le don de cette vie divine; il atteindra son plein épanouissement dans l’éternité” (2, I). Certes la “promesse” de la vie divine est pour tous; mais le don “don de la vie divine”, non. L’“encyclique” n’éclaircit pas, Le Logo de “l’encyclique” Evangelium vitæ dans L’Osservatore Romano elle confond même les idées lorsqu’elle parle un peu plus loin de la “valeur incomparable de toute personne humaine” étant donné que “par son Incarnation le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme” (2, I): même avec le “don de la vie divine”? “En vertu du mystère du Verbe de Dieu qui s’est fait chair (Jn 1, 14)- poursuit l’“encyclique” tout homme est confié à la sollicitude maternelle de l’Eglise (3, I). Certes l’Eglise se doit de prêcher l’Evangile à tous les hommes, mais tous les hommes ne sont pas les fils de l’Eglise, les baptisés seulement le sont. “L’égale dignité personnelle” commune à tous les hommes est appelée “parenté spirituelle” (8, II) alors que ce terme n’a de sens que pour la vie spirituelle, propre uniquement à celui qui se trouve en grâce de Dieu. Selon JeanPaul II “l’homme tend naturellement vers Dieu” qui serait la“fin ultime qui comble toute personne” (35, VII) tandis que “l’amour de tout être humain pour la vie (...) se développe dans la conscience joyeuse de pouvoir faire de son existence le ‘lieu’ de la manifestation de Dieu, de la rencontre et de la communion avec lui” (38, VIII). Or Dieu devrait être mais n’est pas la fin ultime de tout le monde. Malheureusement, beaucoup vivent sans avoir aucunement la “conscience joyeuse” du fait que dans la vie ils peuvent entrer en communion avec Dieu. Et il faut distinguer soigneusement (mais l’“encyclique” ne le fait pas) entre le désir naturel et inefficace de la béatitude (qu’ont tous les hommes) et une tendance naturelle que tous les hommes auraient envers Dieu (en tant qu’auteur de la grâce ou de la nature?). Mais pour Jean-Paul II l’Esprit non seulement souffle où il veut, mais il “rejoint” et même “entraîne tout homme qui vit en ce monde” (77, XV). Entraîne-t-il aussi celui qui pèche contre le Saint-Esprit? Les enfants avortés sont au Paradis Donc, une fois de plus, Jean-Paul II laisse 59 entendre, sans le dire explicitement, que tous les hommes sont, en quelque sorte, unis à Dieu, obtenant par le fait même la vie éternelle. Le passage le plus clair à cet égard concerne le sort éternel des pauvres enfants victimes de l’avortement provoqué. S’adressant, plein de tristesse, aux mères de ces enfants, Jean-Paul II leur dit, les invitant à la repentance: “Vous vous rendrez compte que rien n’est perdu et vous pourrez aussi demander pardon à votre enfant qui vit désormais dans le Seigneur” (99, XVIII). Comment peut-on justifier une semblable affirmation sans nier le péché originel et la nécessité du baptême pour le salut? A moins de considérer, sans le dire et sans aucune preuve, que tout avortement est un martyre, un baptême de sang. Paradoxalement, c’est précisemment dans une “encyclique” contre l’avortement qu’est niée la conséquence la plus tragique de l’avortement même, c’est à dire la privation de la vision béatifique pour les victimes de ce grave péché. L’enfer, cet inconnu Le “cardinal” Von Balthasar assurait que Jean-Paul II partageait son opinion néo-origéniste selon laquelle tous se sauvent et l’enfer est vide. Quoiqu’il en soit, dans cette “encyclique” non plus il n’est fait aucune allusion à l’enfer et encore moins aux damnés. Après avoir évoqué la parabole du riche infatué qui meurt dans la nuit, le commentaire de Jean-Paul II se limite à considérer que ce riche perd la vie “sans être parvenu à en percevoir le sens véritable” (32, VII). Et les conséquences de l’éloignement de la vérité sur la vie sont décrites au n° 48 (p. IX): “S’en écarter équivaut à se condamner soimême au non-sens et au malheur, avec pour conséquence de pouvoir devenir aussi une menace pour l’existence d’autrui...” Rien d’autre? Si, au n° 52, p. X il est dit que “l’homme doit rendre compte à son Seigneur” de la vie qu’il a reçue, mais là non plus il n’est pas dit comment. Au n° 53 (p. X), Satan entre en scène, mais pas l’enfer: “... Dieu montre aussi qu’il ne prend pas plaisir à la perte des vivants (cfr. Sg. 1, 13). Seul Satan peut s’en réjouir (...): en trompant l’homme, il le conduit jusqu’au péché et à la mort, présentés comme des fins et des fruits de vie”. De quelle mort parle -t-on? De l’éternelle ou seulement de la mort temporelle? L’“encyclique” ne donne la réponse qu’à la fin lorsqu’il est dit que “la condam- nation définitive et éternelle a été épargnée à la vie de l’homme” (n° 102, p. XIX). La vie de tous les hommes soustraite à la vie éternelle? Ou bien, génériquement, est-ce l’homme qui peut se soustraire à la mort éternelle (mais les hommes n’y parviennent pas toujours)? Ce n’est pas à Evangelium vitæ que vous pouvez demandez la solution de ce doute, c’est elle-même qui l’a insinué! Choix criminels, généreuses circonstances atténuantes Si Evangelium vitæ ne parle pas d’enfer (et moins que jamais de damnation), elle ne manque pas cependant de condamner les péchés qui y conduisent..., du moins en théorie. Oui, parce qu’en pratique, des circonstances atténuantes sont concédées facilement et généreusement. On lit, par exemple, à propos de l’avortement: “Les choix contre la vie sont parfois suggérés par des situtions difficiles ou même dramatiques de souffrance profonde, de solitude, d’impossibilité d’espérer une amélioration économique, de dépression et d’angoisse pour l’avenir. De telles circonstances peuvent atténuer, même considérablement, la responsabilité personnelle et la culpabilité qui en résulte chez ceux qui accomplissent ces choix en eux-mêmes criminels” (18, IV). Personne ne nie l’existence possible de circonstances atténuantes, mais l’“encyclique” ne précise pas si ces circonstances (dans la liste desquelles ne figure pas la perte de la raison) peuvent faire de l’avortement un simple péché véniel, elle laisse même entendre qu’il ne s’agirait plus d’un péché grave. Le laxisme est encore plus explicite pour ce qui regarde le suicide, pour lequel on invoque “certains conditionnements psychologiques, culturels et sociaux” qui ,on seulement atténueraient mais iraient jusqu’à annuler (et ici non plus on ne parle pas de cas de folie) “la responsabilité personnelle” (66, XIII). Les transplantations d’organes ne sont-elles pas un attentat à la vie humaine? Dans une “encyclique” dédiée à la défense de la vie humaine, la déclaration de la licéité des transplantations d’organes est étonnante. Le “don d’organes” est qualifié de geste qu’“il faut particulièrement apprécier” (86, XVI) du moment qu’il est “accompli sous une forme éthiquement acceptable ” (ibidem). 60 Les formes éthiquement non-acceptables de “don” d’organes sont signalées et condamnées [extraction “sans respecter les critères objectifs appropriés pour vérifier la mort du donneur” (15, IV); exploitation d’embryons et de fœtus humains fournissant tissus et organes (63, XII); euthanasie provoquée “pour rendre disponibles des organes en vue de leur transplantation” (64, XII), tandis que l’on oublie de mentionner le simple commerce d’organes]. Reste cependant la louange des transplantations accomplies “sous une forme éthiquement acceptable”. Or, il n’existe pas de formes éthiquement acceptables d’extraction et de transplantation d’organes! Pas en cas d’organes vitaux (cœur, poumons, foie etc.) d’autant plus que Pie XII a déclaré que le patient, même maintenu artificiellement en vie et justement pour cela, est encore présumé vivant (et l’“extraction” le tuerait) .Même dans le cas, pourtant moins grave, d’organe double (comme les reins), car il s’agit de la mutilation d’un corps sain, illicite même pour une bonne fin (cfr. Sodalitium, éd. it. seulement, n° 12, p. 22). Dans ce cas l’“encyclique” ne défend donc pas l’“évangile de la vie”. Et quand elle le défend, les motivations ne sont pas celles de la morale traditionnelle... Un nouveau fondement personnaliste à la morale catholique Dans le commentaire de la Lettre aux familles (Sodalitium n° 38, p. 42 à 51) nous avions souligné la façon dont Wojtyla revoyait toute la morale catholique à la lumière nouvelle du personalisme, pour arriver à une nouvelle définition de la famille, du mariage et de ses finalités. C’est ainsi que l’“encyclique” condamne la contraception, mais plus tant parce qu’elle implique une violation de la nature, mais parce qu’“elle contredit la vérité intégrale le l’acte sexuel comme expression propre de l’amour conjugal” (13, III). De même, les techniques de reproduction artificielle ne violent pas tant la nature que “le contexte intégralement humain de l’acte conjugal” (14, III). L’avortement lui-même est “une menace directe envers toute la culture des droits de l’homme” (18, IV). “La sexualité”, qui est entrée triomphalement grâce à JeanPaul II dans le “Magistère” n’est plus tant une faculté naturellement et prosaïquement ordonnée à la procréation, mais elle est devenue, quasi mystiquement, “signe, lieu et langage de l’amour, c’est à dire du don de soi et de l’accueil de l’autre dans toute la richesse de la personne” (23, V); cfr. aussi 81, XV). Exaltation excessive du mariage Comme toujours, et c’est la conséquence logique de son personalisme (et cabalisme!) (cfr. Sodalitium, n° 36, p. 64 à 66 et n° 37, p. 63) Wojtyla exalte démesurément l’union conjugale. Il existe, de fait une “vocation première à l’amour qui est celle de tout homme” (25, V). Quelle est-elle? L’“encyclique” donne deux références bibliques pour illustrer cette vocation à l’amour de tout homme: Genèse 1, 27 (“il les créa mâle et femelle”) et Genèse 2, 18 à 24 (la création d’Eve). A ce sujet Jean-Paul II ajoute: “seule l’apparition de la femme (...) peut satisfaire l’exigence d’un dialogue interpersonnel, qui est vital pour l’existence humaine” (35, VII). “Lorsque le mâle est séparé de la femelle, malheur au monde”, commenterait le Zòhar, principal livre cabalistique des juifs (cfr. Rosenberg, L’Ebraismo, Mondadori, p. 128). Par conséquent le mariage est “au-dessus de tout don terrestre” (43, IX), la génération de l’enfant est un événement “hautement religieux” (43, VIII) et à propos de cette génération il est précisé que “la vie humaine est un don reçu pour être à son tour donné” (92, XVII); voilà un principe qui, entendu sans restriction, aurait pour conséquence l’obligation pour tous de se marier! D’ailleurs “la sexualité” n’est-elle pas “richesse de toute la personne” (97, XVIII)? L’Etat personaliste: la démocratie et les droits de l’homme “Si l’on observe aujourd’hui un consensus presque universel sur la valeur de la démocratie, il faut considérer cela comme un ‘signe des temps’ positif, ainsi que le Magistère de l’Eglise l’a plusieurs fois souligné” (70, XIII). Le “Magistère” (de JeanPaul II, pas celui de l’Eglise) a donc fait un choix préférentiel en faveur de la démocratie en tant que la meilleure sinon l’unique forme légitime de gouvernement [qui, soit dit en passant, inclue pour Jean-Paul II et à l’encontre du magistère de Grégoire XVI, la “liberté d’information” (98, XVIII)]. Mais la démocratie que Jean-Paul II veut défendre est une “saine démocratie” (71, XIV), dans laquelle la majorité n’est pas toujours et nécessairement source de vérité: “lorsque, à cause d’un tragique obscurcissement de la 61 conscience collective, le septicisme en viendrait à mettre en doute jusqu’aux principes fondamentaux de la loi morale, c’est le système démocratique qui serait ébranlé dans ses fondements, réduit à un simple mécanisme de régulation empirique d’intérêts divers et opposés” (70, XIII); pour Jean-Paul II par conséquent, “la valeur de la démocratie se maintient ou disparaît en fonction des valeurs qu’elle incarne et promeut” 70, XIII), et donc, nous l’avons déjà noté, une “loi” inique bien que votée par la majorité, n’est pas une véritable loi [et pourtant, de façon contradictoire, est déclaré licite le vote d’une loi inique qui permet l’avortement, si elle est plus restrictive que la précédente, comme si le moindre mal n’était pas toujours un mal (73, XIV). Qu’en pensent les professeurs Sanfratello et De Mattei qui, en leur temps, se battirent contre le “miniavortement” proposé par le Mouvement pour la vie?]. Jusqu’ici les critiques émises par Jean-Paul II au système démocratique concrètement existant sont pertinentes, même s’il oublie de dire que, sans la grâce et la foi, “le tragique obscurcissement de la conscience collective”, étant donné l’existence du péché originel, n’est pas l’exception mais la règle! Mais la position de l’“encyclique” devient insoutenable lorsqu’il énumère les valeurs d’une “saine démocratie”: “sont certainement fondamentaux et indispensables la dignité de toute personne humaine, le respect de ses droits intangibles et inaliénables, ainsi que la reconnaissance du ‘bien commun’ comme fin et comme critère de la vie politique” (70, XIII). Compte tenu que le bien commun lui-même ne consisterait en rien d’autre que dans la tutelle “des droits et des devoirs de la personne” (71, XIV, que cite Jean XXIII) il s’en suit que l’unique valeur à ne pas violer est, une fois de plus, celle de la dignité de la personne interprétée dans le cadre de la philosophie personaliste de Wojtyla. Le concept est ensuite continuellement repris: “dans le respect de tous et selon la logique de la vie sociale démocratique” il faut contribuer “à édifier une société dans laquelle la dignité de chaque personne soit reconnue et protégée...” par “les responsables de la vie publique” qui sont “appelés à servir l’homme” (90, XVII). L’Eglise “désire seulement promouvoir un Etat humain [et donc pas chrétien]. Un Etat qui reconnaisse que son premier devoir est la défense des droits fondamentaux de la per- sonne humaine. (...) Seul le respect de la vie peut fonder et garantir les biens les plus précieux et les plus nécessaires de la société, comme la démocratie et la paix” et il n’y a pas de vrai démocratie “si l’on ne reconnaît pas la dignité de toute personne et si l’on n’en respecte pas les droits”, ni véritable paix, selon Paul VI, sans les “droits de l’homme” (101, XIX). Certes l’Etat doit défendre les droits de la personne humaine (que peut cependant perdre le pécheur), mais pas seulement. Pie IX nous le rappelle (Enc. Quo pluribus, 9, XI, 1846; Enc. Quanta cura, 8 déc. 1864; la phrase est tirée de Saint Léon, Epître 166): “Le pouvoir royal n’a pas été conféré pour le gouvernement du monde mais surtout afin qu’il défende l’Eglise”. Et Léon XIII confirme: “Les chefs d’Etat doivent donc tenir pour saint le nom de Dieu et mettre au nombre de leurs principaux devoirs celui de favoriser la religion [“non pas celle que chacun préfère, mais celle que Dieu a prescrite et que des preuves certaines et indubitables établissent comme la seule vraie entre toutes”], de la protéger de leur bienveillance, de la couvrir de l’autorité tutélaire des lois, et ne rien statuer ou décider qui soit contraire à son intégrité” (Encyclique Immortale Dei, 1, XI, 1885). Les “signes d’espérance”: pacifisme, nonviolence, écologisme et bioéthique. Le problème de la peine de mort. Tout en dénonçant les attentats à la vie et à la dignité de l’homme, Evangelium vitæ ne perd pas l’optimisme de fond dont est imprégné son modèle, le document conciliaire Gaudium et spes. Sont des “signes positifs” (d’ordre naturel): les “centres d’aide à la vie”, les “groupes de bénévoles” et autres organismes philantropiques (n° 26), les mouvements pro-life non violents (n° 27, VI). Ecologisme et bioéthique sont loués sans restriction (10, III; 27, VI; 42, VIII). Les femmes sont invitées à promouvoir “un nouveau féminisme (...) en “travaillant à dépasser toute forme de discrimination, de violence, d’exploitation” (99, XVIII ). “Parmi les signes d’espérance, il faut aussi inscrire (...) le développement d’une sensibilité nouvelle toujours plus opposée au recours à la guerre (...) et toujours plus orientée vers la recherche de moyens efficaces mais ‘non violents’ pour arrêter l’agresseur armé” (27, VI). Comment il serait possible de bloquer l’agresseur armé sans l’usage 62 de la force à moins d’un miracle, on ne le comprend pas... “Dans le même ordre d’idées se range aussi l’aversion toujours plus répandue de l’opinion publique [!?] envers la peine de mort, même si on la considère seulement comme un moyen de ‘légitime défense’” (27, VI). Le thème est repris au n° 56 (p. XI). Sur “la question de la peine de mort (...) on enregistre, dans l’Eglise comme dans la société civile, une tendance croissante à en réclamer une application très limitée voire même une totale abolition”. Mais cette tendance est-elle juste oui ou non? Quel en serait le fondement? “Il faut replacer ce problème dans le cadre d’une justice pénale qui soit toujours plus conforme à la dignité de l’homme et donc, en dernière analyse, au dessein de Dieu sur l’homme et sur la société”. En somme, la peine de mort serait non conforme, ou moins conforme, à la dignité de l’homme telle qu’elle a été révélée par Dieu. Ceci est complètement faux (cfr. saint Thomas, II-II, q. 64, a. 2) étant donné que par le péché l’homme” déchoit de la dignité humaine” et se rend “plus nuisible qu’une bête”. Pour Jean-Paul II (et le Nouveau Catéchisme n° 2267) en aucun cas, la peine de mort ne peut être légitimement une peine à caractère vindicatif, pour punir (et expier) le mal fait; il y aurait alors contraste avec un concept (faux) de la dignité humaine et “la possibilité de se racheter” (27, VI; 56, XI) serait définitivement enlevée au coupable; ça ne serait licite qu’en cas de “légitime défense” de la société et seulement s’il est impossible de faire autrement, cas pratiquement toujours évitable. L’“encyclique” oublie que la peine de mort peut justement être un moyen pour le coupable, qui l’accepte, de se racheter et de gagner la vie éternelle, et que de toutes façons, refuser la peine de mort comme peine à caractère vindicatif équivaut, à plus forte raison, à nier ne serait-ce qu’implicitement la peine de l’enfer, peine bien plus grave, à caractère purement vindicatif, et sans aucune possibilité de rachat du condamné. Mais l’enfer est-il lui aussi moins conforme à la dignité inamissible de la personne humaine? Si la peine de mort est presque toujours illicite, “tout ce qui viole l’intégrité de la personne humaine, comme les mutilations, les tortures infligées aux corps et à l’esprit (...) insulte “gravement à l’honneur du Créateur” (3, II, qui cite Gaudium et spes 27). Sans vouloir faire l’apologie de la torture (comme peine ou comme moyen de preuve judiciaire) qui ne voit qu’étant admise la peine de mort, on ne peut pas ne pas admettre, au moins en théorie et dans certains cas, la licéité de la torture? Qui peut le plus (la peine de mort) peut le moins (mutilation ou torture); c’est ce qu’a admis l’Eglise, sans faux sentimentalisme, et ce qu’ont admis tous les meilleurs théologiens moralistes (entre autres saint Alfonse de Liguori), et si Vatican II et Evangelium vitæ (sans parler du nouveau Catéchisme) peuvent blâmer les abus en la matière ou promouvoir l’abolition de la torture, ils ne peuvent certes pas en déclarer (comme ils le font) l’illicéité morale absolue. Démographie, justice et charité Si nous poursuivons l’examen de l’“encyclique” sur le plan social, nous nous heurtons à la question démographique et économique. L’“encyclique” dénonce, à juste titre, la responsabilité des Gouvernements et des institutions internationales dans la promotion d’une campagne démographique fondée sur “la contraception, la stérilisation et l’avortement” (91, XVII). Mais quelles en sont les causes et quels sont les remèdes proposés? Malheureusement, il ne s’agit jamais de remèdes surnaturels, rien que des remèdes naturels pour des causes naturelles (cfr. par exemple 11, III). La panacée universelle serait la “procréation responsable”, avec la promotion des “méthodes naturelles” (88, XVI; 97, XVIII) qui, bien que licites dans les limites fermes et rigoureuses fixées par Pie XII, peuvent faire croire aux époux, comme l’écrit de fait l’“encyclique”, qu’ils ont le droit “de faire leur choix dans le domaine de la procréation en toute liberté” (91, XVII): pleine liberté vis à vis de l’Etat, bien sûr, mais certes pas du point de vue de la loi naturelle et divine! Autre remède proposé par l’“encyclique”: l’instauration d’“une véritable économie de communion et de participation aux biens, tant dans l’ordre international que national” en distribuant “avec une plus grande justice les richesses” (91, XVII) et “les ressources médicales” (26, VI). En effet de nombreux attentats à la vie seraient la conséquence d’“une distribution injuste des richesses entre les peuples et entre les classes sociales” (10, III), comme si l’avortement et la contraception étaient une plaie qui frappe seulement les pauvres et les pays sous-développés, et non, surtout, les riches et les sociétés opulentes. L’affirmation, si générique, 63 d’une distribution inique des richesses ne peut qu’alimenter la haine “entre les peuples et entre les classes sociales”, entre les “pays riches qui refusent aux pays pauvres l’accès au développement” et les “pays pauvres” qui le seraient uniquement à cause de “l’égoïsme” des autres (18, IV). Bien sûr il y a des injustices, bien sûr il y a l’usure qui existe aussi au niveau des rapports entre Etats, sans parler des spéculations iniques du capitalisme sauvage. Mais l’“encyclique” ne précise pas les raisons et les torts, attribue toutes les fautes aux uns, tous les droits aux autres, elle confond les obligations de charité avec ceux de justice, elle oublie que la pauvreté de certains peut parfois aussi, être par leur propre faute, et que les pauvres existeront toujours parmi nous. Une richesse volée doit évidemment être restituée en justice à celui qui a été spolié; mais une richesse légitimement acquise, par un individu comme par une Nation, ne doit pas obligatoirement être “équitablement distribuée” entre tous pour en arriver à la “communion des biens”; postuler en ce cas une obligation en justice n’est pas conforme à la doctrine sociale catholique, mais à la doctrine sociale communiste. Œcuménisme antiabortif Comme tous les autres documents postconciliaires, Evangelium vitæ est entachée d’erreur œcuméniste. Elle s’adresse, comme Pacem in terris, “à toutes les personnes de bonne volonté” (Titre p. 1), mots qui désignent dorénavant et de façon tout à fait abusive, les non-croyants. L’Evangile de la vie serait aussi un point précieux “de rencontre et de dialogue avec les non-croyants” (82, XV; cfr. également 95, XVIII) il serait même “pour tous” (101, XIX). Certes le caractère immoral de l’avortement est connaissable par la seule raison, mais la triste histoire de l’humanité de l’antiquité jusqu’à nos jours montre comment le “noncroyant”, blessé par le péché originel, s’éloigne de fait constamment de la loi morale même naturelle! Et puis, l’Evangile de la vie n’inclue-t-il pas aussi pour Jean-Paul II la “vie surnaturelle”? On constate encore une fois que le néologisme Evangile de la vie constitue une expression ambiguë et polyvalente. C’est ainsi qu’à la “journée du malade” (97, XVIII) et à celle “de la jeunesse” (17, IV) s’ajoutera la “journée pour la vie” (85, XVI): une “fête” de plus à un calendrier humanistico-maçonnique qui rappelle étrangement la religion de l’homme inventée par le positiviste français Auguste Comte! Dernière ambiguïté: appeler le peuple des Juifs le “peuple de l’Alliance” (49, IX; 54, X), le “peuple élu” (53, X) qui s’est préparé à la “grande déclaration de Jésus” (54, X) sans préciser si, vus les résultats de cette préparation, il demeure encore le peuple élu de l’Alliance ou non. La Sainte Ecriture dans Evangelium vitæ Avant de conclure cette analyse d’Evangelium vitæ, il nous reste à faire une observation sur le style littéraire de l’“encyclique” qui, comme tous les textes postconciliaires, met mal à l’aise le lecteur catholique, non seulement du fait de sa prolixité mais aussi parce qu’il ressemble davantage à un écrit philosophique personnel qu’à un texte de ce Magistère ecclésiastique auquel il prétend appartenir et qui devrait être entièrement fondé sur l’Ecriture et sur la Tradition. En ce qui concerne l’Ecriture Sainte, les citations ne manquent pas mais elles étonnent par la liberté avec laquelle l’auteur les emploie (jusqu’à interpoler, comme nous l’avons vu dans Sodalitium (n° 37, p. 55). La chose ne doit pas nous étonner étant donné que Wojtyla ne cache pas son adhésion personnelle (qu’il veut faire passer pour une adhésion du Magistère) au rationalisme de Wellhausen († 1918). Encore une fois, en effet, il écrit à propos de la Genèse 2, 7: “Le récit yahviste des origines exprime la même conviction...” (35, VII). Ceci, nonobstant l’avis de la Commission Biblique (27 juin 1906) sur l’authenticité mosaïque du Pentateuque, mais aussi et surtout nonobstant ce que dit la Révélation puisque Jésus (cfr. Mc 12, 26; Mt. 8, 4; Mt. 19, 8; Jn 5, 46); les Apôtres (Actes 3, 22); Saint Paul: Rom. (10, 5 et 19; 1 Cor. 9, 9) et l’unanimité des Pères attribuent la Genèse à Moïse et non à d’anonymes et tardifs rédacteurs yahvistes et elohistes. Nous savons bien que de nombreux exégètes modernes cherchent à accommoder le rationalisme de Wellhausen avec la Révélation, mais doit-on justement dans un document conciliaire du “Magistère” parler de “récit yahviste”? Ne soyons donc pas étonnés des libertés que prend Wojtyla avec la Parole de Dieu, dont il ne cesse de faire la louange! ... Voici quelques exemples. L’“encyclique” dit (32, 64 VII) “Comme déjà le Dieu ‘ami de la vie’ (Sg. 11, 26)...”. Les paroles sont rapportées entre guillemets alors qu’en réalité elles ne sont qu’une mauvaise paraphrase de Sg. 11, 24-25 et qu’il n’est pas écrit que Dieu est “ami de la vie”. “Même l’ennemi cesse d’être un ennemi pour celui qui est tenu de l’aimer” lit-on au n° 41, VIII. Et pour une affirmation aussi farfelue on cite les Evangiles de Saint Matthieu (5, 38 à 48) et de Saint Luc (6, 27 à 35). Naturellement Jésus ne dit pas que l’ennemi n’est pas ennemi. Lorsqu’il dit “aimez vos ennemis” (Mt. 5, 44) ceci présuppose justement qu’ils sont “ennemis” mais qu’il faut les aimer en tant que créatures de Dieu encore capables de conversion, et non en tant qu’ennemis (cfr. Saint Augustin, De Doctrina Christiana, l. 1, c. 27: “tout pécheur, en tant que pécheur, ne doit pas être aimé, et tout homme en tant qu’homme doit être aimé par amour de Dieu”. Saint Thomas IIII, 25, 8). Au n° 42 (p. VIII), on découvre avec stupeur que Dieu s’occupait de la “question écologique” déjà dans le livre de la Génèse, et qu’avec l’interdiction de “manger le fruit de l’arbre” (Gen. 2, 16-17) le Seigneur entendait réaliser la “préservation de l’‘habitat’ naturel des diverses espèces animales et des diverses formes de vie...”. Voilà que nous découvrons maintenant que le péché originel fut un péché écologique! Mais nous passons du ridicule au tragique avec la nouvelle interprétation des paroles de Saint Luc selon lesquelles, à la mort de Jésus, “le voile du temple se déchira par le milieu”. Pour les Pères et toute l’Eglise, le voile du temple de Jérusalem se déchira pour signifier la fin de l’Ancienne Alliance et de ses sacrifices et l’abandon par Dieu du temple désormais inutile et profané. Mais étant donné que JeanPaul II considère l’Ancienne Alliance comme étant encore en vigueur (Doc. cath., 3/05/1981, n° 1807, p. 427) l’événement du vendredi saint signifierait seulement “une lutte effroyable entre les forces du bien et du mal, entre la vie et la mort (...) entre la ‘culture de mort’ et la ‘culture de vie’” (50, X). La véritable signification de l’Evangile est ainsi gravement déformée. Inédite ensuite (dans le sens de jamais entendue) est l’interprétation de ‘il rendit l’esprit’. “...Et baissant la tête il rendit l’esprit (Jn 19, 30). (...) Le ‘il rendit l’esprit’ décrit la mort de Jésus (...) mais elle semble faire également allusion au ‘don de l’Esprit’ par lequel il nous rachète de la mort et nous ouvre à une vie nouvelle” (51, X). Peut-être... mais nous n’arrivons pas à découvrir sur quoi se fonde cette interprétation, d’autant plus que l’Esprit Saint est envoyé par le Fils non au moment de Sa mort, mais à Son ascension au Ciel à la Pentecôte. “Dieu montre aussi qu’‘il ne prend pas plaisir à la perte des vivants’” lit-on enfin dans la version française de l’“encyclique’ (53, X) qui nous renvoie à Sap. 1, 13. Si l’on va rechercher soi-même la citation on s’aperçoit qu’elle est en fait plus forte car elle ne parle pas de “perte” mais de “perdition”. Encore une censure à l’idée de damnation? De toutes façons, le livre de la Sagesse entendait dire que Dieu n’a pas créé la mort (temporelle et éternelle) pour elle-même, mais seulement per accidens, comme peine du péché. Dernière remarque. Nous avons déjà signalé dans cet article à quel point est malsonnante (et c’est le moins qu’on en puisse dire) l’affirmation wojtylienne selon laquelle tout homme aurait une dignité quasi divine (25, V; 84, XVI) qui de plus est “inaliénable” [en enfer aussi?]. Mais Jean-Paul II prétend se fonder sur la Sainte Ecriture! «Face à l’immensité de l’univers, il est une bien petite chose; mais c’est précisemment ce contraste qui fait ressortir sa grandeur: “Tu l’as créé un peu moindre que les anges (mais on pourrait traduire aussi: ‘un peu moindre que Dieu’), le couronnant de gloire et d’honneur” (Sal. 8, 6)» (35, VII). Le système a déjà fait ses preuves (cfr. Sodalitium n° 37, p. 55): après avoir signalé les deux versions possibles, l’originale et l’adultère, Jean-Paul II cite seulement cette dernière, comme il le fait au n° 84, p. XVI. Version adultère? Certainement. La Parole de Dieu dit en effet “tu l’as créé un peu moindre que les anges” et non “un peu moindre que Dieu”! Saint Robert Bellarmin explique (Explanatio in Psalmos, Ps 6, 8): “...lorsque le psalmiste dit: tu l’as créé un peu moindre que les anges,” dans le texte hébreu Jean-Paul II 65 on ne trouve pas le terme anges que les juifs appellent malachim., mais celui d’Elohim qui peut se traduire par ‘Dieu’ ou ‘dieux’; mais étant donné que dans la Sainte Ecriture ce terme est souvent attribué aux anges et même aux hommes qui commandent les autres, avec raison, considérant la signification que voulait exprimer le Prophète, les Septantes ont traduit [en grec] ‘des anges’, traduction qu’approuve l’Apôtre [Saint Paul] dans l’épître aux Hébreux 2, 7”. Le texte hébreu pourrait donc en théorie être entendu dans le sens que lui donne Wojtyla, mais tant la version des Septantes que Saint Paul, surtout, rejettent cette interprétation. Etant donné que la Lettre aux Hébreux est divinement inspirée, comment Jean-Paul II peut-il aller contre la Révélation et choisir une traduction écartée par le Saint-Esprit? Et pourtant le désir de Wojtyla d’attribuer une dignité quasi divine à l’homme est tel qu’il pense pouvoir ne tenir aucun compte de l’Esprit Saint. Conclusion Comme nous l’avons vu au début de notre analyse, Evangelium vitæ prétend pour son enseignement l’assentiment dû au Magistère de l’Eglise. Ce serait un devoir. Mais c’est impossible; ce document, qui n’est pourtant pas le plus mauvais de Wojtyla, contient, nous l’avons vu, des ambiguïtés et des erreurs incompatibles avec un document promulgué par une véritable et légitime autorité de l’Eglise. La conclusion est grave, La voix du Pape Eglise catholique et haute finance «C e qui à notre époque frappe tout d’abord le regard, ce n’est pas seulement la concentration des richesses, mais encore l’accumulation d’une énorme puissance, d’un pouvoir économique discrétionnaire, aux mains d’un petit nombre d’hommes qui d’ordinaire ne sont pas les propriétaires, mais les simples dépositaires et gérants du capital qu’ils administrent à leur gré. Ce pouvoir est surtout considérable chez ceux qui, détenteurs et maîtres absolus de l’argent, gouvernent le crédit et le dispensent selon leur bon plaisir. Par là, ils distribuent en quelque sorte le sang à l’organisme économique dont ils tiennent la vie entre leurs mains, si bien que sans leur consentement nul ne peut plus respirer. Cette concentration du pouvoir et des ressources, qui est comme le trait distinctif de l’économie contemporaine, est le fruit naturel d’une concurrence dont la liberté ne connaît pas de limites; ceux-là seuls restent debout, qui sont les plus forts, ce qui souvent revient à dire, qui luttent avec plus de violence, qui sont le moins gênés par les scrupules de conscience. A son tour cette accumulation de forces et de ressources amène à lutter pour s’emparer de la Puissance, et ceci de trois façons: on combat d’abord pour la maîtrise économique; on se dispute ensuite le pouvoir politique dont on exploitera les ressources et la puissance dans la lutte économique; le conflit se porte enfin sur le terrain international, soit que les divers Etats mettent leurs forces et leur puissance politique au service des intérêts économiques de leurs ressortissants, soit qu’ils se prévalent de leurs forces et de leur puissance économiques pour trancher leurs différends politiques. Ce sont là les dernières conséquences de l’esprit individualiste dans la vie économique, conséquences que vous-mêmes, Vénérables Frères et très chers Fils, connaissez parfaitement et déplorez: la libre concurrence s’est détruite elle-même; à la liberté du marché a succédé une dictature économique. L’appétit du gain a fait place à une ambition effrénée de dominer. Toute la vie économique est devenue horriblement dure, implacable, cruelle. A tout cela viennent s’ajouter les graves dommages qui résultent d’une fâcheuse confusion entre les fonctions et devoirs d’ordre politique et ceux d’ordre économique: telle, pour n’en citer qu’un d’une extrême importance, la déchéance du pouvoir: lui qui devrait gouverner de haut, comme souverain et suprême arbitre, en toute impartialité et dans le seul intérêt du bien commun et de la justice, il est tombé au rang d’esclave et devenu le docile instrument de toutes les passions et de toutes les ambitions de l’intérêt. Dans l’ordre des relations internationales, de la même source sortent deux courants divers: c’est d’une part le nationalisme ou même l’impérialisme économique, de l’autre, non moins funeste et détestable, l’internationalisme ou impérialisme international de l’argent, pour lequel là où est l’avantage, là est la patrie». Pie XI, Encyclique “Quadragesimo anno”, 15 mai 1931. 66 Vie Spirituelle LA SAINTE VIERGE ET SON AMOUR Par M. l’abbé Giuseppe Murro L a Sainte Vierge est la Mère de Dieu, elle est l’Immaculée Conception, elle est la Corédemptrice et la Médiatrice entre les hommes et Dieu, elle est la Reine du Ciel et de la terre. Elle est unie à chacune des Personnes de la Trinité comme aucune autre créature. L’Eglise, les Saints, les Docteurs, les Théologiens, les prédicateurs, les auteurs ecclésiastiques, ont attribué des louanges innombrables à la Sainte Vierge. Que reste-t-il encore à dire? Tant et tant de choses. Parce que, comme dit St Alphonse qui fait siennes les paroles de l’abbé Francon, “l’éloge de Marie est une fontaine inépuisable; plus elle s’étend, plus elle se remplit; et plus elle se remplit, plus elle s’élargit encore. Ce qui revient à dire que cette bienheureuse Vierge est tellement grande et sublime, que plus on lui décerne de louanges, plus il en reste à lui décerner” (1). En outre il faut constater avec regret que la très Sainte Vierge n’est pas vraiment connue telle qu’elle est, même des catholiques. Même en vivant à une époque où tous sont instruits, il y a, en réalité, beaucoup d’ignorance au sujet de la Sainte Vierge, au point que les mots de St Louis Grignon de Montfort, écrits il y a presque trois siècles, sont malheureusement encore d’actualité: “…Marie a été inconnue jusques ici, et c’est une des raisons pourquoi Jésus-Christ n’est point connu comme Il doit être. Si donc, comme il est certain, la connaissance et le règne de Jésus-Christ arrivent dans le monde, ce ne sera qu’une suite nécessaire de la connaissance et du règne de la très Sainte Vierge Marie, qui l’a mis au monde la première fois, et le fera éclater la seconde” (2). Si nous voulons que Notre-Seigneur règne dans les cœurs et dans les institutions, commençons par connaître et par aimer la Sainte Vierge. Pourquoi Marie nous aime Nous savons que la Sainte Vierge est la Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Peut- être ignorons-nous qu’elle en est plus proche que tout autre créature. Elle l’était quand elle vivait sur la terre, elle l’est à plus forte raison maintenant, qu’ils sont ensemble au Paradis. Cela veut dire que personne comme elle ne reflète les pensées, les sentiments, les désirs de Jésus. NotreSeigneur est venu sur terre par amour pour nous, a souffert et est mort pour mériter notre salut; la Sainte Vierge nous aime elle aussi et a souffert des douleurs atroces afin que nous ne nous ne soyons pas perdus. Pourquoi la Sainte Vierge a-t-elle fait et continue-t-elle à faire cela pour nous? Certes elle n’a pas la mentalité égoïste de l’homme moderne, qui devant une épreuve quelconque se dit souvent à lui-même: “mais qu’est-ce que ça me rapportera”? Non, la Sainte Vierge a compris que la créature trouve sa perfection en imitant le Créateur: le Seigneur est essentiellement Charité, et charité veut dire vouloir le bien des autres et non seulement le sien, même quand cela comporte un sacrifice. Et puisque cette vertu consiste dans le fait d’aimer Dieu par dessus toute chose et le prochain comme soi-même, personne comme la Sainte Vierge n’a su réaliser ces deux préceptes. Elle a aimé tous les hommes quand elle vivait sur terre, et elle continue à les aimer même maintenant qu’elle est au Ciel. En effet tous ceux qui aiment Dieu, ne peuvent pas ne pas aimer le prochain: qui dit aimer Dieu et non le prochain, en réalité n’aime pas non plus Dieu (3). Que Notre-Seigneur n’a t-Il pas fait par amour du prochain? Sa vie et sa Passion sont un enseignement éloquent. Qu’ont fait les Saints? A commencer par les Apôtres qui ont parcouru le monde entier pour porter la bonne nouvelle à tous les peuples, sans hésiter pas même devant le danger de mort. St Camille de Lellis n’épargnait pas les fatigues pour les malades, même pour ceux rejetés par les autres; St Vincent de Paul ne pouvait rester indifférent en voyant toutes sortes de misères, matérielles et spirituelles; St François de Sales chaque jour risquait sa vie en marchant à quatre pattes sur une poutre gelée pour traverser un fleuve, en allant prêcher aux hérétiques; St Joseph Cottolengo ne se laissait pas arrêter par les dettes, pourvu qu’il puisse procurer le nécessaire aux incurables. Et si chaque Saint a brillé par une vertu en particulier, tous ont pratiqué la charité jusqu’à l’héroïsme. 67 A plus forte raison la très Sainte Vierge a eu et a encore un amour très grand envers les hommes comme aucun autre saint. Si nous considérons l’amour d’une mère envers ses enfants, d’une épouse ou d’un époux envers son conjoint, ce n’est qu’une pâle idée de celui qu’elle a pour nous: parce qu’en elle l’amour est mû par la charité envers Dieu, charité qui dépasse celle de toutes les créatures, même de celles qui sur la terre nous sont le plus proche. En second lieu, la Ste Vierge nous aime parce que nous lui avons coûté une si grande douleur, comme les mères aiment plus les enfants pour lesquels elles ont beaucoup souffert. Nous sommes comme des enfants pour lesquels Marie, pour obtenir la vie de la grâce, a dû souffrir des peines comme aucune autre créature, durant toute la vie et en particulier durant la Passion de Jésus. A Ste Brigitte fut révélé que comme la rose croît parmi les épines, ainsi la Mère de Dieu à mesure qu’elle avançait dans la vie, était de plus en plus déchirée par les épines de ses afflictions (4). Elle arriva au point d’offrir la vie de son Fils, qu’elle aimait plus qu’elle-même, jusqu’à Le voir mourir sous ses yeux au milieu des souffrances et des tourments, pour nous mériter le salut. Ainsi dit St Bonaventure, paraphrasant St Jean ( 5): Marie nous a tant aimés qu’elle nous a donné son Fils unique. Elle nous L’a donné quand elle consentit à Sa venue sur terre, mais surtout quand Il commença Sa Passion: à ce moment elle aurait pu intervenir, implorer la pitié de Pilate, proclamer l’innocence de Jésus. Facilement elle aurait pu plier par sa charité et sa douceur les cœurs de ceux qui voulaient Le condamner. Au contraire elle ne voulut même pas prononcer une parole en faveur de son Fils, afin de ne pas s’opposer à Sa mort d’où dépendait notre salut (6). La Sainte Vierge nous a aimés particulièrement à chaque instant des trois heures durant lesquelles Notre-Seigneur fut suspendu à la Croix. Sur le Calvaire elle ne fit que sacrifier pour nous la vie de son Fils, “et, disent St Anselme et St Antonin, telle était sa magnanimité que, si les bourreaux avaient fait défaut, elle eût elle-même attaché Son Fils à la croix, pour obéir à la volonté du Père qui exigeait cette mort pour notre rédemption. Cette force d’âme, d’être disposé à sacrifier un fils de ses propres mains, Abraham en donna bien l’exemple; nous devons croire que Marie l’aurait donné aussi, et avec plus de générosité encore, elle si supérieure à Abraham en sainteté et en obéissance” (7). La Sainte Vierge nous aime non seulement parce que nous lui avons coûté une si grande douleur, mais aussi parce que nous avons coûté autant à Notre-Seigneur. Si une mère voit avec tant de peine que son fils a souffert pour sauver un ami, n’aura-t-elle peut-être pas elle aussi amour et affection envers cet ami? Notre-Seigneur est venu sur la terre pour nous, afin que d’ennemis que nous étions de Dieu nous retrouvions la grâce et devenions ses amis et ses frères. Si Jésus nous a tant estimés jusqu’à souffrir et mourir pour nous, Sa Mère aussi nous aime profondément: personne comme Elle n’a compris l’amour et la souffrance subie par Jésus. Enfin la Tradition nous rapporte que Marie dès l’enfance fut consacrée par ses parents à Dieu et vécut au Temple de Jérusalem: “Il fut révélé à Ste Elisabeth, religieuse, que la Sainte Vierge, dès son entrée au temple, faisait sa grande occupation de prier pour nous, pressant le Seigneur d’envoyer Son Fils sauver le monde” (8). Même si elle ne savait pas encore tout ce qui arriverait, depuis son âge le plus tendre elle était remplie d’amour pour les hommes. Peut-être que tout cela nous étonne. Et pourtant la raison profonde de cette charité de la Sainte Vierge envers nous est simple: elle avait été remplie de grâce depuis sa conception, elle n’avait jamais commis aucun péché et donc l’amour envers Dieu et envers le prochain ne fit qu’augmenter chaque jour de sa vie. En désirant le bien du prochain, elle voyait que la chose la plus importante pour les hommes est le salut de leur âme: leur âme perdue, toute leur vie est perdue. Alors la Sainte Vierge ne recula devant aucun sacrifice pour nous éviter l’Enfer: qui jamais nous a aimés avec autant de constance et aussi profondément qu’elle, à l’exception de Dieu? Tous les hommes sont aimés de Marie. St Jean voit dans l’Apocalypse la Sainte Vierge revêtue du soleil (9): en effet comme personne sur la terre ne peut se cacher à la lumière du soleil, ainsi sur la terre il n’y a personne qui soit privé de l’amour de la Sainte Vierge. Une femme qui habitait aux environs de Paris, le jour de la Nativité de la Sainte Vierge se mit à carder de la laine. Une de ses voisines lui en fit des reproches, mais ajoutant faute sur faute, elle répondit: “Quel mal 68 ai-je fait? Marie n’était-elle pas aussi une femme qui travaillait comme moi”? A peine eût-elle fini de prononcer ces paroles, que le peigne qu’elle tenait à la main s’y attacha de telle manière qu’il ne fut plus possible de le détacher, de sorte qu’elle portait nuit et jour la marque et la peine de son péché. Lorsque arriva la fête de Ste Geneviève, protectrice de Paris, cette malheureuse se rendit à son église et supplia la Sainte de lui obtenir de Marie le pardon de son péché. Tandis qu’elle priait, le peigne se détacha spontanément de sa main et tomba à terre: on le suspendit au mur de l’église pour conserver la mémoire de ce prodigieux événement afin que tous ceux qui étaient présents fussent instruits et du châtiment miraculeux et de la prompte miséricorde de Marie (10). Notre amour envers la très Sainte Vierge Si la Sainte Vierge est aussi bonne avec tous, même avec ceux qui sont ingrats et négligents, combien plus le sera-t-elle avec ceux qui l’aiment. “Sans doute, notre très aimante Souveraine embrasse dans son affection toute l’humanité dont elle est la Mère; cependant, remarque St Bernard, elle sait discerner et préférer une âme qui la chérit plus tendrement et lui répondre par sa prédilection. Heureuses ces âmes… la divine Mère les assure non seulement de son amour, mais aussi de ses services” ( 11 ). En effet si quelqu’un est paresseux ou sourd aux inspirations de Marie, elle ne pourra pas l’aider comme elle voudrait, au contraire son action sera entravée justement par celui qu’elle veut secourir. Quand au contraire nous l’aimons, la Sainte Vierge pour ainsi dire rivalise d’efforts avec nous dans l’amour. St Louis de Montfort applique à la Sainte Vierge les paroles de la Sagesse: “J’aime ceux qui m’aiment” (Prov., VIII, 17) et explique qu’elle “aime toujours ceux qui l’aiment, non seulement d’un amour affectif, mais d’un amour effectif et efficace, en les empêchant… de reculer dans la vertu ou de tomber dans le chemin, en perdant la grâce de son Fils” (12). Une fois Ste Gertrude demanda à la Sainte Vierge, qui lui était apparue, d’intercéder auprès du Seigneur en faveur de sa Communauté; et tout de suite après la Sainte entendit Jésus dire: “Je suis prêt à exaucer tous vos désirs” (13). Nous ne devons pas craindre de l’aimer: elle-même nous prépare toutes sortes de L'Immaculée (Le Guerchin) biens, plus que nous ne l’imaginons. St Jean Berchmans devint saint après cinq années seulement de vie religieuse renouvelant chaque jour ce propos: “Je veux aimer Marie”. En effet, disait-il, si j’aime Marie je suis sûr de la persévérance, et j’obtiendrai de Dieu ce que je veux, et la dernière recommandation qu’il donna avant de mourir fut la dévotion à la Sainte Vierge ( 14 ). Beaucoup en voyant la bonté de Marie et en reconnaissant d’un autre côté leurs fautes, prient le Seigneur de leur accorder les grâces qu’Elle demande pour eux. C’est ce qu’implora le frère jésuite Nicolas Ratkai à St Jean Berchmans, sur le point de mourir: qu’il lui obtînt de la Sainte Vierge les grâces qui lui étaient nécessaires. Enfin Marie ne se laisse pas vaincre en générosité. On arrivera jamais à aimer Marie autant qu’elle nous aime: “Je sais, ô NotreDame, - dit St Pierre Damien - que vous êtes souverainement bonne, et que vous nous aimez d’un amour qui ne se laisse point vaincre” (15). “Pour peu qu’on lui donne, elle donne beaucoup de ce qu’elle a reçu de Dieu. Et, par conséquent, si une âme se donne à elle sans réserve, elle se donne à cette âme sans réserve, si on met toute sa confiance en elle sans présomption” (16). Le Bienheureux Marien, abbé, dévot de la 69 Sainte Vierge dont il portait le nom, composait des œuvres en son honneur. Une fois qu’il écrivait pendant la nuit, la lampe se consuma par négligence du domestique. Mais Marien ne suspendit point pour cela son travail: le ciel lui envoya une lumière miraculeuse, Dieu permit que trois doigts de sa main droite devinssent si resplendissants de sorte qu’il put continuer à écrire. Cependant le domestique se ressouvint qu’il n’avait pas fourni à Marien la lumière nécessaire: il se leva aussitôt, alla doucement à la cellule de l’abbé, et, par la fente de la porte, regarda s’il travaillait encore. Quel ne fut pas son étonnement de voir que les trois doigts de l’abbé illuminaient comme trois flambeaux! Saisi de frayeur, il retourna à sa chambre. Le bruit de cette merveille se répandit ensuite parmi le peuple et le clergé de Ratisbonne, où elle fit augmenter la réputation du Saint et la dévotion envers Marie (17). Aimons donc Marie: parmi les créatures, elle est celle qui nous aime le plus et celle que nous devons aimer plus qu’aucune autre. “Je ne laisserai pas de paix à mon âme, tant que je n’aurai pas la certitude d’avoir obtenu l’amour, mais un amour tendre et constant, envers vous, ô ma Mère, qui m’avez poursuivi de votre tendresse, alors que je n’avais pour vous que de l’ingratitude. Ah! qu’en serait-il de moi aujourd’hui, si vous, ô Marie, ne m’aviez pas aimé et comblé de miséricordes! Mais si vous m’avez tant aimé alors que je ne vous aimais pas, que ne dois-je pas attendre de votre bonté, maintenant que je vous aime? Car je vous aime, ô ma Mère, et je voudrais avoir un cœur qui vous aimât pour tous les malheureux qui ne vous aiment pas… Je vous aime donc, mais, en même temps, je crains de ne pas vous aimer, car j’entends dire que l’amour nous trouve ou nous rend semblable à la personne aimée. Puis donc que je me vois si différent de vous, serait-ce un signe que je ne vous aime pas? Vous si pure, et moi si souillé! Vous si humble, et moi si orgueilleux! Vous si sainte, et moi si mauvais! Mais voici précisément ce que vous avez à faire, ô Marie: puisque vous m’aimez, rendez-moi semblable à vous. Vous possédez tout pouvoir pour changer les cœurs: prenez donc le mien, et changez-le. Montrez au monde de quoi vous êtes capable en faveur de ceux que vous aimez. Rendez-moi saint, rendez-moi votre digne enfant. Telle est mon espérance. Ainsi soit-il” (18). Notes 1) ST ALPHONSE MARIE DE LIGUORI, Les gloires de Marie, Ed. St Paul 1987, Ière partie, Introduction, p. XI. 2) ST LOUIS GRIGNON DE MONTFORT, Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, Pères Montfortains, Louvain 196O, n° 13, p. 21. 3) C’est l’enseignement de Dieu Lui-même: «Celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas? De plus nous avons ce commandement de Dieu “que celui qui aime Dieu, aime aussi son frère”». I Jn IV, 20-21. 4) ST ALPHONSE op. cit., IIème partie, disc. IX p. 330. 5) Jn III, 16: Dieu a tellement aimé le monde qu’Il a donné Son fils unique. 6) ST ALPHONSE, op. cit., vol. I, p. 23. 7) ST ALPHONSE, op. cit., p. 23. 8) ST ALPHONSE, op. cit., p. 24. 9) Apoc. XII, 1. 10) MUZZARELLI, L’année consacrée à Marie, T. I, Avignon 1845: 3 janvier, p. 17. 11) ST ALPHONSE, op. cit., p. 25. 12) MONTFORT, op. cit., n° 175, p. 168. 13) S TE G ERTRUDE , Le rivelazioni, Cantagalli, Sienne 1979, l. IV, c. 51, p. 194. 14) P. CEPARI, S.J, St Jean Berchmans, Desclée, Lille 1893, pp. 108, 109, 129. 15) ST ALPHONSE, op. cit., p. 28. 16) MONTFORT, op. cit., n° 181, p. 172. 17) MUZZARELLI, op. cit., 9 février, pp. 77-78. 18) ST ALPHONSE, op. cit., pp. 30-31. Recensions ...A PROPOS DE L’OPUS DEI F ondé en 1928, en Espagne, par don Escrivà de Balaguer, l’Opus Dei est, si l’on en croit les APPARENCES, une œuvre excellente, sérieuse, conservatrice et même, sous certains aspects, traditionnelle; toutefois LA REALITE paraît en désaccord avec ces apparences. Pour les quelques notes qui suivent, je me base sur un livre récent (1) d’Arnaud de Lassus qui, laissant de côté tous les autres témoignages, étudie uniquement les textes: Constitutions, Statuts de l’Opus Dei, livres et opuscules que ce dernier recommande, ainsi que les Documents romains sur l’Œuvre. Les critiques faites à l’Opus Dei dans l’étude en question sont variées, mais il en est trois qui émergent plus particulièrement: premièrement la “REALITE PROFONDE de l’Œuvre, cachée par le secret, serait très différente de son APPARENCE”, deuxièmement “... sa doctrine sociale serait en partie 70 libérale”, et enfin “l’Œuvre professerait une doctrine contestable sur le travail” (2). La première critique émise concerne le secret: “Il semble donc bien que, jusqu’en 1989, ces statuts aient été tenus dans un certain secret” (3). L’article 189 des Constitutions, (antérieures à 1982) dit en effet: “...Institutum, uti tale OCCULTUM VIVERE VULT (L’Institut en tant qu’institut veut vivre caché)... Data indole Instituti, quod externe, uti societas, apparere non expedit (Etant donnée la nature de l’Institut à qui il ne convient pas d’apparaître à l’extérieur comme une société)”. Et l’article 190 ajoute: “Consequenter, vel ipsa aggregatio Instituto nullam externam manifestationem patitur; extraneis celatur numerus sociorum: immo de his extraneis nostrine colloquantur (Le fait même d’être membre de l’Institut ne permet aucune manifestation extérieure; et l’on cachera aux gens de l’extérieur le nombre des membres de l’Institut; bien plus, nos membres n’en parleront pas aux gens de l’extérieur)”. Aussi l’auteur en conclue-t-il que l’Opus Dei est “une œuvre dont les statuts n’ont été divulgués qu’en 1989 (soit, plus de soixante ans après sa fondation) et qui a toujours poussé très loin le souci du secret” (4). Un second point reproché à l’Opus Dei: sa doctrine sociale est libérale et donc non conforme au Magistère traditionnel de l’Eglise. Selon Mgr de Balaguer il faut “éviter cet abus... à créer des sortes de dogmes doctrinaux temporels” (5) et dans divers documents on retrouve cette pensée du fondateur: “Nous admettons le plus grand pluralisme dans tout ce qui est temporel” (6); “il n’arrive jamais à ce chrétien [le membre de l’Opus Dei] de croire ou de dire qu’il descend du temple vers le monde pour y représenter l’Eglise, ni que les solutions qu’il donne à ces problèmes [temporels] sont les solutions catholiques. Non... cela n’est pas possible! Ce serait du cléricalisme” (7)... Et encore: “Je ne parle jamais de politique. Je ne pense pas que la mission des chrétiens sur la terre soit de donner naissance à un courant politico-religieux (ce serait une folie)” (8). Comme nous sommes loins de l’enseignement de saint Pie X: “Nous ne pouvons pas ne pas faire de politique”, et de celui de Pie XII: “De la forme donnée à la société dépend le salut ou la perte d’un grand nombre d’âmes”! Et on peut même trouver dans les œuvres de Mgr Escrivà (9) une déclaration ouverte en faveur de l’introduction en Espagne de la liberté du culte des fausses religions; d’ailleurs la chose ne doit pas nous étonner particulièrement si l’on considère que “[l’Opus] est la première organisation catholique qui... admette à titre de coopérateurs les non-catholiques, chrétiens ou non” (10). Dans le livre du père Thierry recommandé par ce même Opus, on lit encore: “Les associés de l’Opus Dei sont convaincus qu’en tout ce qui est humain, politique, culture, économie,... il n’y a pas de dogme... Liberté dans tout ce qui est choix d’ordre temporel, voilà le reflet social de l’union dans la foi au Christ.” ( 11); on comprend donc l’exclamation de Mgr Escrivà: “les enseignements qu’a promulgués le Concile à ce sujet [la liberté religieuse] ne peuvent que me réjouir” (12). La troisième remarque critique faite à l’Opus Dei concerne le culte du travail comme fin ultime de l’homme, qui, pour son fondateur, a été créé - comme le dit la Genèse II, 15 - “ut operaretur”. Pour soutenir sa thèse, Mgr Escrivà n’hésite pas à forcer le sens de la citation de Job “homo nascitur ad laborem, et avis ad volandum”, traduisant laborem par “travail”, déformant le sens latin éthymologique du terme qui signifie fatigue, peine, et altérant ainsi la signification de la phrase qui est communément traduite comme suit par les éxégètes: “l’homme naît pour souffrir, peiner, fatiguer...” [et certes pas pour “travailler”]. Comme l’enseigne saint Ignace, la fin de l’homme est de connaître, aimer et servir Dieu et par ce moyen, sauver son âme. En revanche toutes les créatures sont des moyens pour atteindre cette fin et doivent être utilisée autant qu’elles nous aident à atteindre cette fin, ni plus ni moins (y compris par conséquent le travail). En outre, la spiritualité catholique a toujours enseigné que la vie contemplative est supérieure à la vie active, qu’elle est plus noble. Saint Benoît disait: “ora et labora”, c’est à dire prie d’abord, travaille ensuite; Mgr Escrivà enseigne au contraire que “la famille, le travail, l’amitié mènent TOUT AUTANT à Dieu que la solitude ou la retraite” (13), réalisant ainsi une sorte de retournement de la devise bénédictine (14). Comme on voit, il ne s’agit pas là d’observations sans poids. Le livre de De Lassus devrait donc poser de sérieux problèmes aux nombreux catholiques qui cherchent dans l’Opus Dei un point de référence sûr dans la 71 situation actuelle de désagrégation de nombreuses institutions ecclésiastiques; sont-ils vraiment sûrs d’y trouver ce qu’ils cherchent? Par M. l’abbé Curzio Nitoglia Notes 1) A. DE LASSUS, L’Opus Dei, Textes et Documents, Action familiale et scolaire, Paris 1993. 2) op. cit., p. 5. 3) Ibidem, p. 28. 4) Ibidem, p. 33. 5) Lettre du 9 janvier 1932, citée par J.J. THIERRY, L’Opus Dei, mythe et réalité, ed. Hachette Paris 1973, p. 115. 6) MGR ESCRIVÀ, Entretiens, n° 30. 7) Ibidem, n° 116-117. 8) Homélie, n° 3, p. 26. 9) Entretiens, n° 29. 10) Ibidem, n° 44. 11) THIERRY, op. cit., p. 122. 12) Entretiens, n° 44. 13) J.J. THIERRY, op. cit. p. 60. 14) Celui qui désire appronfondir le sujet peut consulter: G. ROCCA, L’Opus Dei. Appunti e documenti per una storia, ed. Paoline, Roma 1985. D. LE TOURNEAU , L’Opus Dei, collection Que sais-je?, Presses Universitaires de France, 1991. K. STEIGLEDER, L’Opus Dei vista dall’interno, ed. Claudiana, Torino 1986. RODRIGUEZ, OCARIZ, ILLANES, L’Opus Dei nella Chiesa, ed. Piemme, Casale Monferrato 1993. V . MESSORI , L’Opus Dei, Mondadori, Milano, 1994. LE CELIBAT ECCLESIASTIQUE S odalitium avait déjà signalé à ses lecteurs l’excellent article du salésien Alphonse Marie Stickler sur le célibat ecclésiastique, paru en espagnol dans la revue de l’Université de Navarra, Scripta Theologica. Le lecteur italien peut désormais s’informer plus facilement sur les thèses du canoniste autrichien (malgré le boycottage pratiqué par quelques librairies comme celle des Paoline) en lisant le précieux opuscule (69 pages seulement) intitulé Le célibat ecclésiastique. Son histoire et ses fondements théologiques. A notre connaissance il n’existe pas d’édition française, ce qui serait pourtant souhaitable. Personne n’ignore que durant l’aprèsVatican II le célibat ecclésiastique a été remis en question; récemment encore le cardinal Martini a laissé entendre que la loi interdisant le mariage aux prêtres de rite latin pourrait (devrait?) être abrogée dans l’avenir. En attendant cette décision, de nombreux prêtres ont d’eux-mêmes abandonné le ministère et convolé en injustes noces. Mais, peu de gens le savent, dans les manuels même les plus traditionalistes les idées sont plutôt confuses. Le célibat ecclésiastique est-il d’origine apostolique, fondé sur la Révélation, ou bien n’est-il qu’une loi ecclésiastique occidentale introduite localement au IVème siècle et rendue obligatoire pour tous seulement au moyen-âge avec le IIème Concile du Latran (1139), loi vénérable et respectable, certes, mais pas absolument irréformable? Sans vouloir le moins du monde plaider pour la suppression du célibat, des manuels de théologie morale même extrêmement sérieux tels que celui de Prümmer, tels que le Dictionnaire de Théologie Catholique (article Célibat de Vacandard) et le Dictionnaire d’Archéologie Chrétienne et de Liturgie (article Célibat de Lequercq) suivirent sans discuter la thèse de Funk lequel, contrairement à Bickell, niait l’origine apostolique de l’obligation du célibat ecclésiastique (la polémique entre ces deux derniers dura de 1878 à 1880). Comme il est bien connu, c’est... dans les dictionnaires que les paresseux font de la théologie: dans ce cas précis l’influence néfaste du DTC fut considérable. Stickler remet les choses au clair en démontrant de façon lumineuse l’origine apostolique du célibat ecclésiastique (ou plutôt de la continence des ecclésiastiques), non seulement en Occident, mais aussi en Orient, et il en donne enfin les fondements théologiques. Il suffit de préciser une seule chose et toutes les difficultés fondent: ce que les Apôtres prêchaient, et que le Concile d’Elvire (Espagne) dans la première décennie du IVème siècle (avant Constantin) ou le Concile Africain de l’an 390 réaffirmèrent solennellement, ce n’était pas tant le célibat pour les diacres, prêtres ou évêques (et même sous-diacres, à partir de saint Grégoire le Grand) que la continence. En d’autres termes l’Eglise primitive connaissait, c’est vrai, la pratique de l’ordination de personnes mariées (une seule fois cependant et avec une vierge), comme le montrent les épîtres de saint Paul (1 Tm 3, 2 et 12; Tite 1, 6; 1 Cor 7, 9) mais Elle obligeait ces personnes, avec la permission des épouses, à ne plus user du mariage contracté, à se séparer d’elles et à vivre dans la chasteté exactement comme le firent les Apôtres (Lc 18, 28-30; Mt 10, 20-21; Mc 10, 20-21). Cette discipline, commune à 72 l’Orient et à l’Occident, connue des Pères de l’Eglise, consacrée par les décisions des Pères et des Pontifes, rencontrait et rencontre encore un unique obstacle: la faiblesse humaine et elle ne se maintient qu’avec la grâce et la véritable foi: là où se perd la foi, fait remarquer Stickler, l’obligation à la chasteté pour les ministres sacrés est aussitôt supprimée. Dans l’Eglise catholique ces faiblesses furent vaincues après quelques périodes de crise grâce à la vigilance constante des Papes, comme le démontrent la réforme grégorienne du Moyen-Age et plus tard la contre-réforme. C’est avec le Concile de Trente et la constitution des séminaires que s’imposa la discipline actuelle qui interdit, sauf exceptions rarissimes, l’ordination d’hommes mariés (lesquels doivent toujours et de toute façon se séparer de leur conjointe). L’opportunité de cette décision n’est que trop évidente. Il n’en fut pas ainsi en Orient. Chez les orientaux seuls les évêques sont obligés au célibat; les diacres et les prêtres ne peuvent pas se marier après leur ordination, mais s’ils le sont déjà au moment de l’ordination, ils peuvent non seulement être ordonnés sans se séparer de leurs femmes mais aussi user normalement du mariage et engendrer des enfants. Cette discipline comme on le voit, s’éloigne de la pratique apostolique; elle remonte au IIème Concile in Trullo de l’an 691, convoqué par l’empereur Justinien II. Ce Concile local de l’Eglise Byzantine, ratifiant des dispositions impériales parmi les plus anciennes du Code de Justinien Ier (534), rompt, dans le canon 13, non seulement avec la tradition latine mais avec la tradition orientale même, plus ancienne, ainsi qu’avec la tradition apostolique, pour retourner à cette continence épisodique, (continence avant l’offrande du sacrifice seulement), demandée aux prêtres de l’Ancien Testament. Les Byzantins prétendirent, à tord, qu’ils s’appuyaient sur la tradition apostolique: Stickler démontre dans son livre qu’ils eurent l’impudence et la témérité de falsifier les actes du Concile Africain tenu à Cathage en 419 pour lui faire dire exactement l’inverse de ce qu’il affirmait! Autre fasification signalée par Stickler: la légende de l’ermite Paphnuce qui serait intervenu au Concile de Nicée (325) pour convaincre les Pères de ne pas introduire l’obligation du célibat; l’épisode est historiquement infondé. Là où l’auteur se montre moins convainquant, c’est dans la dernière partie du livre où il expose les principes théologiques sur lesquels est fondée l’obligation du célibat ecclésiastique. Stickler est plus canoniste que théologien et de plus, même s’il demeure attaché à la Messe Romaine, il a été créé cardinal par Jean-Paul II. Aussi, après avoir défendu de main de maître la tradition des Apôtres, élude-il le problème du diaconat permanent instauré par Vatican II en rupture totale avec celle-ci puisque les diacres permanents peuvent continuer l’usage du mariage. Nous n’avons donc aucune envie de suivre l’auteur jusque là en appuyant la théologie du célibat sur l’autorité du “Concile” et celle de Jean-Paul II, ce theilardien qui préconise, loue, nous rebat les oreilles “de l’importance de la femme dans la vie du prêtre!” Compte tenu de cette réserve (et elle est de poids), la lecture d’ Il celibato ecclesiastico de Stickler est indispensable aux prêtres, utile également aux fidèles qui ont besoin de clarifier leurs idées ou celles des autres sur ce joyau du sacerdoce catholique menacé de nos jours par l’esprit du Monde. Par M. l’abbé Francesco Ricossa ALFONS M. STICKLER Il celibato ecclesiastico. La sua storia e i suoi fondamenti teologici. Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano, 1994. Lire 9000. UN ROMAN DANGEREUX 1378 : Mort de Grégoire XI, le dernier des papes d’Avignon, revenu depuis peu à Rome à la demande de saint Catherine de Sienne, après un exil des Pontifes de plus de soixante-dix ans. Le peuple romain demande aux cardinaux réunis en conclave un pape romain ou du moins italien; les cardinaux, intimidés, élisent alors l’évêque de Bari, Barthélemy de Prignano, qui prend le nom d’Urbain VI, après quoi, à Fondi, ils déclarent nulle la précédente élection et élisent le cardinal Roberto des Comtes de Genève, qui prend le nom de Clément VII et retourne au siège d’Avignon. C’est ainsi que naît le “Grand 73 Schisme d’Occident”, compliqué ultérieurement par le concile de Pise qui dépose les deux rivaux, le romain et l’avignonais, pour en élire un troisième, un pisan. L’histoire de l’Eglise nous dit que le schisme ne fut résolu qu’en 1414 avec le Concile de Constance et l’accord de toute la chrétienté sur le nom d’Ottone Colonna, le pape Martin V. Jusqu’ici, c’est de l’histoire connue de tous, mais présentée de manière captivante par la plume séduisante de Jean Raspail, écrivain français proche du traditionalisme catholique (qui a l’un de ses fils au monastère bénédictin du Barroux, dont l’Abbé, Dom Gérard Calvet, s’est réconcilié avec Jean-Paul II après les consécrations épiscopales accomplies parMgr Lefebvre en 1988). Jean Raspail n’est pas sans laisser entendre que, pour lui, le pape légitime était celui d’Avignon, Clément VII d’abord, puis son successeur Pedro de Luna (Benoît XIII). Toutefois l’auteur ne s’arrête pas au Concile de Constance. Passant continuellement du rôle d’historien (partisan) à celui de romancier (fantaisiste) et vice versa, Raspail décrit les vicissitudes des successeurs de Pedro de Luna réfugiés dans le sud de la France, tous papes sous le nom de Benoît; mais le lecteur ne comprend pas très bien où finit l’histoire et où commence le roman. Réduit au rôle de clochard (mystique et saint, cependant), le dernier des Benoîts, demeuré seul héritier de l’antique tradition avignonaise, meurt entre les bras d’un émissaire de Jean-Paul II; on l’enterre dans les grottes vaticanes, aux côtés de ces papes romains qui furent les anciens persécuteurs des héritiers obscurs de Pedro de Luna. Si telle est la trame du roman, quelle en est la signification? De nombreux catholiques “traditionalistes” se sont identifiés aux héritiers de Benoît XIII dans leurs vicissitudes et leurs souffrances. Persécutés par Rome, par une Rome corrompue et indigne, fondamentalement illégitime... Contraints à célébrer de nuit, en cachette, leur antique liturgie latine, dans les églises en ruine ou dans les cathédrales occupées par les “romains”... Réduits désormais à une poignée de fidèles gardiens d’une ancienne et glorieuse tradition papale, maintenant pauvre et spirituelle (sainte même), face à un monde moderne indifférent et à une église “officielle” longtemps hostile... Accueillis presque toujours avec mépris, vraiment comme des parias, et bien rarement avec charité, comme dans le mystérieux monastère bénédictin proche d’Avignon que décrit Raspail et qui ressemble singulièrement au Barroux... Les péripéties des “avignonais” ne présentent-elles pas une ressemblance étrange avec celles des “traditionalistes”? Le roman tout entier ne serait-il pas au fond une grande allégorie du drame des “traditionalistes”, jusqu’à hier persécutés par l’Eglise romaine, et aujourd’hui admis à “mourir” doucement entre les bras de Jean-Paul II qui les accueille à nouveau et devient héritier de leur spiritualité, de leur sainteté, de leur tradition? L’identification est si facile que certains lecteurs “traditionalistes” moins avertis se demandent si réellement le véritable Pape ne pourrait pas être le clochard avignonais inventé par la plume de Jean Raspail! En effet le roman s’adresse certainement (aussi) aux “traditionalistes, pour leur faire croire qu’avec Jean-Paul II, le Pape de la Tradition et de l’Indult, on peut conclure le schisme entre les catholiques consécutif à Vatican II. Mais le but du livre est beaucoup plus néfaste. En effet le roman de Raspail opère un dénigrement subtil de l’Eglise catholique romaine et parallèlement une exaltation de toutes les hérésies. L’esprit antiromain est évident; là où Avignon est présentée comme un paradis, Rome figure comme un enfer, égout de tous les vices et de tous les crimes, aux mains de violents caprioni (sic pour caporioni! En fr. chefs de bande). Pour Raspail, la “captivité avignonaise” fut une période heureuse pour la papauté (il serait intéressant de savoir s’il prend parti pour Boniface VIII ou pour Philippe le Bel), et le retour des papes à Rome, un acte de folie. Quant à sainte Catherine de Sienne (sans parler de sainte Brigitte), dont le rôle providentiel consista justement à ramener le Pape à Rome, elle est dépeinte comme une folle, une visionnaire exaltée, et saint Vincent Ferrier qui abandonna la cause de Pedro de Luna comme un traître. Les antipapes Clément VII et Benoît XIII apparaissent comme de nobles personnages; le Pape Urbain VI, au contraire comme un assassin sadique, et ses successeurs comme d’insignifiants guignols. Le Concile de Constance qui rendit la paix à l’Eglise semble une farce et non le légitime Concile œcuménique de l’Eglise qu’il fut sans aucun doute malgré ses péripéties. Quant à Martin V, le Pape élu à Constance, c’aurait été un corrupteur, capable seulement de lâcher l’Inquisition aux trousses des catholiques restés 74 fidèles à Pedro de Luna et à ses successeurs, pour les faire mourir sur le bûcher. Ensuite là où l’auteur dévoile sans équivoque ses propres idées c’est dans la sympathie d’abord à peine dévoilée, puis ouvertement déclarée qu’il montre envers les hérétiques. Les exploits de ses héros persécutés se déroulent dans les lieux même où, au moyen-âge, combattirent les cathares (et au XVIIIème siècle, les protestants rebelles à Louis XIV). Pure coïncidence géographique? Certainement pas, puisqu’à la fin Raspail revendique explicitement l’exemple des cathares, des petits frères, d’un saint François qu’il fait passer pour hérétique, de Joachim de Flore, et l’exemple de tous les hérétiques moyenâgeux. Wiclef et Hus, précurseurs de Luther, condamnés au Concile de Constance, semblent eux aussi réhabilités et l’un des papes Benoît mis en scène par Raspail va symboliquement réconforter un Evêque janséniste (encore un hérétique) exilé par le Roi. Un même fil conducteur, celui de l’hérétique persécuté par l’Eglise, par l’Inquisition, par le Roi, relie donc les manichéens cathares aux jansénistes, en passant par les protestants: tel est le véritable visage qui se cache derrière le masque de la succession “avignonaise” proposée par Raspail à l’admiration du lecteur ingénu! On me reprochera peut-être de prendre trop au sérieux ce qui n’est qu’un roman. Je me permets de rappeler que saint Pie X fit mettre à l’index Le Saint de Fogazzaro, un simple roman, mais qui exposait pourtant le programme des modernistes en le rendant accessible au commun des lecteurs. Et puis, DISPONIBLE AUPRES DE NOTRE REDACTION Le livre de l’abbé ANTHONY CEKADA “On ne prie plus comme autrefois... Les prières de la Nouvelle Messe. Les problèmes qu’elles posent aux catholiques” ON NE PRIE PLUS COMME AUTREFOIS... Les prières de la Nouvelle Messe. Les problèmes qu’elles posent aux catholiques u éternel z oi: Die hrist-R issant qui ave Sig ma et tout-pu tou tes cho ses èle de imé , réu nir ain t Fid u qui avez daibie n-a vou lu Die t et re Fils accordez, u qui ringen: l'ar den lait dan s vot ivers, trude: Die gni fier brû de l'un à la gran ainte Ger s pré par é une Roi gné ma amour dont té, r e bon le s, déue èle pou vou s ête douce dans dans votr des nat ion angéliq reux Fid vraie foi, du très ille heu re use e ssu fam ure ble de le bien ation de la demeur la bie nhe e du par la à son gne z, mettre chi rée la propag nant la palm acœu r de trud e, dai mir de se sou ignité. Lui don con Ger re des péché, en lui vier ge re bon té, en e. n de bén et cles, et la gloi joug plei Dieu, vit et règn dan s vot de ses mérites les martyre t r on qui, étan sidérati sion, lave Pâinterces re cœur et apr ès de son not anc he res de par l'aè Dim souillu Die u qui re Fils que s: de vot me nt abattu, de bai sse une vé le mon avez rele à vos fidè les ès ez qu' apr acc ord s fin, afin pér il joie san arra ché s au vou s ir les avo rt éte rne lle, heur mo d'u ne r du bon iez joui ais. les fass cesse jam ne qui tous lez que vou ent ieu qui me s soi les homvien nen t à la enet par la vérité, sau vés ance de rier s dan s connais des ouv don nez voy ez n et isso ole mo votre par vot re ran noncer leur d'an confiante assu e se avec une votre doctrin hon que en afin ce, lle soit e, qu'e s les peuple répand tou s, l que neur, et nai ssen t, vou qu i vou s con Dieu, et celu i not seul vra z env oyé , vou s aveJésus-Christ r Seigneu Da mi t Pie rre ,D ez-nous Accord de su issa nt, ABBÉ ANTHONY CEKADA nts e tou t-pu eign eme les ens du bie nhe u l s S S C Edité par notre Coopérative d’Edition. (64 pages). Prix: 50 F + port. Pour le commander, écrire ou téléphoner à: COOPERATIVA EDITRICE SODALITIUM 2 D S Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano 36 10020 Verrua Savoia (TO) Italie Tel. (de France): 19. 39. 161. 83.93.35 Fax (de France): 19. 39. 161. 83.93.34 comme par hasard, le Pape Santo inventé par Fogazzaro, héritier lui aussi d’une tradition spirituelle franciscaine mal comprise, symbole de l’Eglise “spirituelle”, “pauvre” et “persécutée”, opposée à l’Eglise “officielle”, s’appelle lui aussi... Benoît! La légende (qui n’est peut-être pas sans aucun fondement historique) d’une succession mystérieuse et inconnue jusqu’à nos jours de “Papes avignonais” héritiers de saints médiévaux persécutés par Rome, ne rappelle pas seulement le roman de Fogazzaro, mais également le mythe des Templiers “trahis” par le Pape et par le Roi, mythe repris par les francs-maçons de toutes latitudes et de toutes obédiences. On trouve d’ailleurs dans le roman de Raspail des allusions aux Templiers, allusions discrètes qui n’échappent pas cependant au lecteur un peu attentif. L’histoire du Grand Schisme est incontestablement actuelle et mérite d’être étudiée; si le roman de Raspail obtient cet effet, il n’y aura pas à s’en plaindre. Toutefois un catholique ne peut pas accepter les thèses qu’insinue l’auteur sous le manteau d’un roman captivant. Injurieux envers les saints et l’Eglise, favorable à l’hérésie, Raspail, s’il est pris au sérieux (et certains l’ont fait) met en doute la légitimité indiscutable des Papes et des Conciles qui sont la règle prochaine et vivante de notre foi. Sodalitium se devait de mettre en garde ses propres lecteurs... Une dernière question demeure; le monastère du Barroux a-t-il collaboré en quelque manière à l’Anneau du Pêcheur de Jean Raspail? Nous aimerions bien avoir une réponse de Dom Gérard. Par M. l’abbé Francesco Ricossa JEAN RASPAIL L’Anneau du Pêcheur Albin Michel éd., Paris, 1995. NOUS AVONS REÇU: RAMA COOMARASWAMY, Les problèmes de la nouvelle messe, L’âge d’homme, Lausanne, 1995. FRANCISCO PARADELA CASTRO El Talmud - codigo sagrado y secreto Editorial Moret. En langue espagnole. A commander chez l’auteur (Alcade Lens, 17-3° drcha E 15010 La Coruña). Nous espérons bien publier la recension de ces œuvres dans un prochain numéro de Sodalitium. 75 ENTRE ESOTERISME ET DEVOTION ou RELATIONS DANGEREUSES DE CERTAINS DEVOTS... par le Père Torquemada D ans le dernier numéro de Cristianità (n° 247-248, nov. - déc. 1995), organe officiel de Alleanza Cattolica, on peut lire en entrefilet une transmission de la Radio suisse italienne. Le thème? Tra esoterismo e devozione. Pubblicate in italiano le opere di Louis Charbonneau-Lassay (Entre ésotérisme et dévotion. Les œuvres de Charbonneau-Lassay publiées en italien). Durant cette transmission ont été interviewés Alfredo Cattabiani (1) et “Pierluigi Zoccatelli, de Alleanza Cattolica, responsable des éditions italiennes de Il Bestiario di Cristo. La misteriosa emblematica di Gesù Cristo e Il giardino del Cristo ferito. Il Vulnerario e il Florario del Cristo, œuvres de l’expert en emblématique religieuse Louis Charbonneau-Lassay (1871-1946), publiées par Arkeios” (p. 28 de Cristianità). J’avais déjà lu dans Il Giornale la recension enthousiaste faite par Cattabiani lors de la réédition des œuvres de Chabonneau-Lassay, mais une autre, tout aussi élogieuse, m’avait échappée: la recension faite par Cardini, médiéviste bien connu très proche de Mme Irène Pivetti, très proche également de la revue maçonnique Ars Regia publiée par le quotidien “des Evêques italiens”, Avvenire. Il y avait là de quoi piquer la curiosité (dans ma longue vie il m’a été donné aussi de faire la connaissance de Cardini et de Zoccatelli); je me suis donc procuré le catalogue des éditions Arkeios (vous pouvez faire de même en écrivant viale Margherita 244, 00198 Roma). Les éditions Arkeios La couverture, déjà, présente un aspect étrange avec son logo Edizioni Arkeios écrit à la fois en caractères blancs droits, et en caractères rouges inversés, ce qui pour des spécialistes du symbolisme aura une signification... Il suffit de feuilleter rapidement le catalogue pour se rendre compte que nous nous trouvons, encore une fois, immergés dans le traditionalisme... ésotérique. Dans le tract publicitaire de Arkeios intitulé La voie des symboles, on parle de CharbonneauLassay de la façon suivante: “Profondément catholique, il noua de solides liens avec la hiérarchie ecclésiastique parisienne, mais il fut aussi l’ami de savants comme René Guénon et Paul le Cour, et l’ami de représentants d’autres religions comme le prince Sai-Taki-Novi”. Ce pour quoi, lorsque cet écrivain est qualifié de “flamme ardente du traditionalisme”, tout lecteur attentif comprend de lui-même à quelle “tradition” (en hébreu: cabale) on se réfère. Naturellement notre homme était “hermétiste chrétien”: deux termes qui ne sont conciliables que dans le système guénonien où le “chrétien” représente la façade extérieure, ésotérique, tandis que l’“hermétique” nous introduit et nous initie à la réalité ésotérique de l’auteur... lequel s’occupait bien entendu aussi d’“iconographie des templiers”. Inéluctables templiers! Est-ce là ce qui attire Cardini? Les autres œuvres éditées par Arkeios confirment la première impression. Ce sont des livres d’Alchimie (l’Ars Regia!), de symbolisme, d’astrologie, de théologie sophianique (voilà de quoi plaire à Wojtyla, le plus fameux représentant de ce courant sans aucun doute), de yoga tantrique hindo-tibétain, de cabalisme “chrétien” et de traditions initiatiques... Nous sommes en plein ésotérisme, en pleine maçonnerie symbolique! La présence, dans le catalogue des œuvres, manifestement apocryphes, de saint Thomas d’Aquin... sur la pierre philosophale et sur l’art de l’alchimie (!), n’est pas faite pour nous rassurer; sans parler de celles du “cardinal” Jean Daniélou, représentant de la Nouvelle Théologie condamnée par l’Encyclique Humani generis de Pie XII avant d’être triomphante au Concile, mais aussi spécialiste, avec son frère, de sujets ésotériques et habitué de ces mêmes milieux (tout le monde connaît l’histoire de la mort, tantrique?, du prélat...). Peut-être la clef se trouve-t-elle dans un autre livre édité par Arkeios: Parole d’Evangelo, memoriale d’Israele, dans lequel l’auteur, Alexandre Abraham Winogradsky, nous invite, je cite, “à découvrir les racines bibliques et judaïques de l’Evangile”, un livre dans lequel “le recours à l’Ancien Testament et à la tradition juive est présenté de façon nouvelle et singulière”, une œuvre donc qui “nous aide à mieux connaître nos ‘frères aînés’ et à comprendre que l’espérance de l’Eglise dans la venue du Règne est fondée sur un souvenir: celui de la fidélité d’Israël”. Voilà qui est clair, non? 76 Alleanza Cattolica, Massoneria oggi Souvenirs... Si les tendances des éditions Arkeios sont claires, le lecteur ingénu aura du mal à comprendre ce que fabrique dans ce cercle, un militant de la contre-réformiste Alleanza Cattolica (passée avec armes et bagages à Vatican II). Et pourtant ce n’est pas la première fois que se rencontrent de telles contradictions. Nous avons déjà parlé, dans Sodalitium, de l’action du sectologue-toutologue Maxime Introvigne, de l’Alleanza Cattolica (cf. Sodalitium nn° 34, pp. 58 à 64; 37, pp. 51 à 55; 38, pp. 19 à 29 et 84). Membre, comme Cardini, du comité scientifique d’Ars Regia, habitué des “messes noires” et des Loges maçonniques (il en aurait même fondé), ami des Mormons, il ne trouve rien de mal à se faire interviewer par la revue du Grand-Orient, Massoneria oggi. Si Introvigne s’exprime dans les colonnes de Massoneria oggi, pourquoi Valter Maccantelli, dirigeant national d’Alleanza Cattolica et bras droit d’Introvigne ne le ferait-il pas? C’est ainsi que le numéro 2 (mars-avril 1995, pp. 47 à 49) de la revue maçonnique publie une interview de Walter Grandis interrogé par Valter Maccantelli sur Massoneria e movimenti cattolici (Maçonnerie et mouvements catholiques). Notre homme se fait l’écho des thèses d’Introvigne. Pour résumer (et par conséquent simplifier): les origines de la maçonnerie? Plus ou moins un instrument des “monarchies du nord, Angleterre et Allemagne”. Les juifs n’ont rien à y voir [même si on en parle; ceux de la R.I.S.S. (Revue internationale des sociétés secrètes) étaient-ils des visionnaires?] et le diable encore moins: “l’accusation de satanisme dont fait l’objet la Maçonnerie me semble aujourd’hui insoutenable...”. Voilà qui n’était l’opinion ni de Pie IX ni de Léon XIII (2). Les rapports avec la Maçonnerie? Non à la “double appartenance” mais oui au, dialogue: “si l’on s’en tient au dialogue je retiens que l’Eglise Catholique est favorable (...). En réalité, il y a eu et il y a encore dialogue entre l’Eglise catholique et la Maçonnerie (...)”. Les francs-maçons ne demandent rien d’autre... Enfin, pour Maccantelli avec le nouveau Code de 1983, l’excommunication des francs-maçons demeure, à preuve la fameuse déclaration de Ratzinger. Je suis désolé de contredire Maccantelli sur ce point également: Ratzinger parle d’exclusion des sacrements et non d’excommunication: ça n’est pas du tout la même chose! Alors, perplexe, évoquant le passé, je me demande: mais Alleanza Cattolica a-t-elle toujours été ainsi ou bien le “dialogue” avec la Maçonnerie est-il le fruit de l’abandon de Mgr Lefebvre et de la nouvelle politique de l’“entrisme” inaugurée avec Jean-Paul II? Certes, qui aurait jamais pensé que les disciples de Giovanni Cantoni (3) et de Plinio Correa de Oliveira (4) (requiescat in pace) finiraient dans la revue Massoneria oggi. Mais... si je laisse errer ma mémoire aux alentours des années soixante-soixante-dix, certaines choses me reviennent à l’esprit. Qui donc nous parlait de Mordini ( 5)? Qui traduisait les œuvres de Mircea Eliade (6), ami du chef du modernisme italien Buonaiuti comme nous l’apprend Cattabiani? [Cf. “A la ricerca del dio perduto” (A la recherche du dieu perdu), Il Giornale, 13 avril 1995, p. 17]. Qui publiait aux éditions Borla La leggenda del Graal et chez Rusconi les livres du guénonien Servier ( 7)? Mais alors... serait-il vrai, comme il m’a été dit, que Guénon et Evola sont considérés comme des naturaliter christiani par Alleanza Cattolica et que les militants de l’Alleanza font des séminaires sur le Sacré et sur Guénon, ce qui se concilie très bien avec l’exaltation de la nouvelle ligne de A.N. (8) [sans parler des rencontres avec le B’naï B’rith et la loge des ‘Figli d’Italia’ (des Fils d’Italie)?] qui serait pour M. Fini (8), Cantoni dixit, “un signe de prédestination” [sans oublier le C.C.D. (9) de Vietti (10)]. Gustavo Selva (11) qui fréquente assidûment les conférences de l’Alleanza n’y serait pas gêné... L’équinoxe d’automne Mais d’aucuns diront: comment se fait-il que vous vous préoccupiez tant de Maçonnerie, une association folklorique et dépassée? Il n’y a que des “maniaques du complot” comme vous à croire encore à la “puissance” des Fils de la Veuve. Peut-être. Mais, à en juger par les personnalités qui, chaque année, font acte de présence ou envoient des messages de vœux à la cérémonie de l’“équinoxe d’automne” avec laquelle la Maçonnerie commence ses travaux, il semblerait que les “frères” aient encore une certaine importance. Pour la cérémonie du 24 septembre 1994: Massoneria oggi (n° 3 novembre 1994, pp. 9 à 11) nous informe sur les noms des personalités présentes à la cérémo- 77 nie maçonnique, ou de celles qui envoyèrent des messages de vœux. Parmi les présents, au premier rang, le Sénateur Giulio Maceratini, Président du Groupe A.N./M.S.I. [n.b.: nous sommes en 1994] au Sénat (vous le trouverez également à la Messe traditionnelle célébrée à Rome le 11/XI par le “cardinal” Stickler à l’intention de Plinio Corrêa de Oliveira, cf. Corrispondenza Romana 18/11/95, n° 460/1). Parmi les membres du gouvernement d’alors, gouvernement Berlusconi, ou bien du parlement, on compte: le sénateur Brigandì, le sous-secrétaire au Ministère des Finances, le Chef du Bureau Législatif du Ministère de l’Environnement, l’attaché de presse du sénateur Bosco. Parmi les diplomates, les représentants de la République tchèque, de l’Ukraine, du Bengladesh, de l’Argentine, de la Slovaquie, de la Yougoslavie, de la Hongrie, des Philippines, de l’Inde, du Yemen, du Pakistan et de la République de Salvador. Les “messages de vœux et les salutations” offrent plus d’intérêt encore. La Maçonnerie les reçut de Silvio Berlusconi, alors Chef du Gouvernement, des ministres Vito Gnutti (de l’Industrie), Antonio Martino (des Affaires Etrangères), Sergio Berlinguer (des italiens émigrés), Giorgio Bernini (Commerce Extérieur), Roberto M. Radice (Travaux Publiques), Adriana Poli Bortone (Agriculture; proche d’Alleanza Cattolica) et Publio Fiori (Transports et Navigation); des sous-secrétaires à l’Agriculture, aux Finances, aux Affaires Etrangères (sénateur Livio Caputo), à l’Intérieur (le député Marianna Li Calzi), du Président de la Cour des Comptes (Carbone), du Vicaire Chef de la Police (Serra), de l’ex-Chef (Parisi) et du Chef actuel de la Police (Masone), ainsi que des chefs d’Etat-major de la Défense et de la Marine; des Recteurs de l’Université de Trieste, Messine, de la Bocconi (Milan), de la D’Annunzio di Chieti et de la LUISS; du Directeur Général de la RAI; des ambassadeurs de Suisse, Bolivie, Panama, Finlande, Brésil, Monaco, Malte, Norvège, Autriche, Danemark, Canada et Côte d’Ivoire; du directeur du quotidien Il Messagero; du Président du Tribunal de Rome etc... etc... Pas mal pour une société qui ne compte pour rien du tout... d’autant plus que j’ai oublié le message de vœux le plus important, celui de la détentrice de la troisième charge de l’Etat, Mme Irène Pivetti, Présidente de la Chambre des Députés, ex-fleuron des prêtres de la Fraternité Saint Pie X. Un peu étrange, il faut le reconnaître, ce message de vœux à la Maçonnerie de la part d’une personnalité politique notoirement catholique, qui s’est distinguée pour avoir récité le rosaire réparateur organisé par le Centre Culturel Lépante (anciennement de l’Alleanza Cattolica, liés à la T.F.P.) lors de la construction de la mosquée à Rome; qui s’est distinguée aussi par son amitié avec les ‘lefebvristes’. Cependant, le 24 septembre 1995, l’équinoxe de septembre n’a pas été célébrée seulement dans l’intimité de la Villa del Vascello. Le nouveau style du Grand Maître Gaito a fait descendre les Maçons sur la place pour fêter les 190 ans de la Maçonnerie italienne et le centenaire de la statue de Garibaldi sur le Janicule. En cette occasion Irène Pivetti, dit la Maçonnerie, “n’a pas répondu à notre invitation” (Corriere della Sera, 24 septembre 1995, p. 10). Repentir ou prudence? Repentir, espérons-le. Quoiqu’il en soit, si le gouvernement et l’orientation politique (du centre-droit au centre-gauche) ont changé, les messages de vœux, eux, ne changent pas: de ceux du Président du Sénat Scognamiglio à ceux du Chef de Gouvernement, Dini; de ceux du Chef de la Police, Masone, à ceux du commandant des Carabiniers, Federici. Parmi les présents: le sénateur P.D.S. [Parti démocrate de la gauche, ex P.C.] Di Biella, le sénateur Righetti (C.C.D.), Mezzaroma (FI = Forza Italia), M. Brugger (S.V.P.= Südtiroler Volkspartei), le conseiller communal vert de Rome, Emanuele Montini (nom fatidique!). Jamais de si importantes personalités n’envoient de messages de vœux aux congrès organisés par mes amis de Sodalitium ... Mais, on le sait, seuls les “maniaques du complot” croient à la puissance de la Maçonnerie: veuillez nous pardonner cette innocente manie! Notes 1) Cattabiani, écrivain et journaliste, a fait éditer plusieurs lives ésotéristes par les éditions Rusconi, année 70. En ce qui concerne ses rapports avec la Maçonnerie, un article de lui très révélateur et intitulé Nuove pietre per liberi muratori (Nouvelles pierres pour les franç-maçons) a été publié dans le quotidien Il Giornale (17 déc. 1995, p. 19). Dans cet article Cattabiani fait une recension favorable de l’œuvre du maçon Alberto Cesare Ambesi, I maestri del Tempio (Les maîtres du Temple) (Terziaria, Via San Simplicino, 2 Milano), publié avec une préface de l’historien, (et “frère”), bien connu Aldo Alessandro Mola. Cattabiani prend ses précautions et se déclare “profane” (c’est à dire non initié à la 78 Maçonnerie) ce qui ne devrait rien avoir d’extraordinaire pour un auteur réputé catholique, et même “traditionaliste”. Mais, comme l’écrit Cattabiani, il y a eu justement dans la Maçonnerie “des écrivains d’inspiration traditionaliste, par exemple Joseph de Maistre et, au XXème siècle, René Guénon”. C’est pourquoi Cattabiani approuve le projet d’Ambesi: que la Maçonnerie abandonne le vieil anticléricalisme, les “spéculations éthiques génériques” les “sentiments vagues de fraternité” pour devenir (ou redevenir) “une confraternité initiatique” aux courants divers: “juif-alexandrin”, “pythagoricien-païen” et “christiano-chevaleresque”. Cattabiani l’écrit, une tentative de transformation de la Maçonnerie est entreprise par une “loge turinoise” qui publia dans les années soixante l’Opera Omnia (Les Œuvres Complètes) de René Guénon “sous le sigle des Edizioni di Studi Tradizionali”. Ce sont là les “nouvelles pierres”, “les éléments de vérité qui affleurent dans les diverses loges maçonniques” que les “maçons libres” doivent apporter à la construction du Temple, selon l’avis autorisé de ce “catholique” qu’est Cattabiani. 2) “Il serait intéressant - écrit à ce propos le Père Esposito - de mener une étude sur l’interprétation sataniste donnée par les documents anti-maçons du SaintSiège et, par voie de conséquence, par tout l’épiscopat et par l’apologétique catholique”. Suivent dans le livre du religieux paulinien (Saints et Maçons au service de l’homme, Bastoggi Foggia 1992, pp. 168 à 172), d’innombrables citations de ces Souverains Pontifes selon lesquels les maçons et la maçonnerie sont déclarés respectivement “apôtres de Satan” et “digne fille de Satan”, sinon explicitement satanistes. Thèse un peu plus forte que celle de Maccantelli. 3) Cantoni: fondateur de l’Alleanza Cattolica en 1968. 4) Plinio Correa de Oliveira: fondateur de la T.F.P. (Trdition Famille Propriété). 5) Mordini: auteur italien dans la ligne de l’ésotérisme chrétien. 6) Eliade: célèbre historien roumain des religions. 7) Servier, auteur de “L’homme et l’invisible”. 8) Alliance Nationale: parti politique de droite qui a remplacé le Mouvement Social Italien; il est dirigé par M. Fini. 9) Centre Démocrate Chrétien, l’un des partis nés de la dissolution de la Démocratie Chrétienne (D.C.). 10) M. Vietti, ancien dirigeant de l’A.C., est un membre influent du C.C.D. (Centre Chrétien Démocrate). 11) G. Selva: ancien député de la Démocratie Chrétienne; actuellement député de l’A.N. Il a été mêlé à l’affaire de la loge maçonnique P2. Vie de l’Institut L es dix ans de l’Institut. Comme il l’a été rappelé dans l’Editorial de ce numéro, l’Institut Mater Boni Consilii fête son dixième anniversaire. Ce sera une grande fête à Verrua le 18 décembre. Nous en reparlerons. Apostolat. En ce qui concerne l’année qui vient de s’écouler, l’apostolat estival de l’Institut s’est intensifié. Le nombre de sessions des Exercices Spirituels de Saint Ignace prêchés pour les fidèles n’a pas changé et reste au nombre de quatre, deux à Raveau, en France (du 31 juillet au 5 août et du 7 au 12 août) et deux à Verrua (du 21 au 26 août et du 28 août au 2 septembre). En revanche, le nombre des participants a augmenté. Comme l’an dernier, du 10 au 25 juillet, a eu lieu à Raveau la Colonie Saint Louis de Gonzague dans le cadre de la Croisade Eucharistique, dirigée par l’abbé Giugni. Là aussi le nombre des participants s’est accru tant italiens que français. Le 24 juillet, pour la clôture du Camp, les enfants ont interprété deux pièces de théâtre, en italien et en français, et les séminaristes nous ont offert un concert de guitare de musique latino-américaine, en présence de Mgr Dolan et de l’abbé Sanborn, nos hôtes au terme de leur voyage en France. Pour la première fois, par contre, nous nous sommes lancés dans une Colonie (sous le patronage de la Bienheureuse Imelda Lambertini) qui réunit à Verrua Savoia, du 16 au 22 juillet, les fillettes italiennes, jusqu’alors injustement laissées de côté. L’abbé Murro, efficacement secondé par des dames et des jeunes filles, pour la cuisine, les jeux et le catéchisme, a réussi à tenir en respect les enfants et... les moustiques de Verrua! L’abbé Cazalas n’a pas voulu non plus être en reste, et a pensé aux adolescents, trop grands maintenant pour la Colonie de Raveau. Rendez-vous donc à Manigod, dans les Alpes savoyardes, pour excursions en montagne, prières et conférences, du 18 au 25 août! Une expérience à renouveler... Séminaire Saint Pierre Martyr. Le 15 septembre les cours ont repris dans notre “séminaire”. Nous devons signaler une triste et une heureuse nouvelle: l’abandon d’un séminariste, l’américain Joseph Hoffman, pour raison de santé, et l’entrée au séminaire, après une longue attente, d’un italien, romain qui plus est! Les étudiants, donc, restent au nombre de six, ce qui est trop peu pour le travail qui nous assaille et les demandes d’aide qui nous arrivent de toutes parts. 79 Conférences. L’abbé Nitoglia a tenu de nombreuses conférences et réunions durant ces derniers mois; à Frascati (13 octobre) et à Rome (3 novembre) sur le Mondialisme, à Teramo (17 novembre) sur la Philosophie de la Maçonnerie, à Chieti le 24 novembre sur Noël et le 1er décembre sur l’Immaculée Conception, et enfin à Alexandrie, sur le Néothomisme, le 12 décembre. En outre, il faut signaler les Cours de Philosophie thomiste qu’il donne le jeudi à Turin tous les quinze jours depuis le 19 octobre; sujet traité en ce moment: les XXIV Thèses de la philosophie de St Thomas. De son côté, l’abbé Ricossa a tenu une conférence publique à Bologne le 14 octobre, pour présenter le livre de l’abbé Cekada, On ne prie plus comme autrefois... Il est intervenu dans le débat de clôture du colloque sur la Maçonnerie organisé à Ferrare par le Studio Bibliografico La Cattedrale (17 septembre). Il s’est entretenu le 16 octobre avec un groupe de jeunes de Ceccano présentés par Stefano Gizzi. Il a présenté à Turin, le 17 novembre, avec d’autres rapporteurs, le livre de Pino Tosca, Il cammino della Tradizione. Il tradizionalismo italiano, 19201990, et a participé, le 16 novembre, à une réunion privée de l’association Inter multiplices una vox et de la Lega contro la predazione degli organi, pour préparer une éventuelle action commune contre les transplantations d’organes. Nous ne pouvons pas non plus ne pas parler du très important Congrès “Cattolico Tradizionalista Estense” sur le Concile Vatican II, 89 de l’Eglise, qui a eu lieu à Ferrare à “l’Hôtel de la Ville” le 26 novembre, organisé par le Comitato per la difesa della Civiltà Cristiana “Carlo Magno”. Le n° 40 de l’hebdomadaire diocésain La Voce di Ferrara-Comacchio (18-XI-1995, p. 5) a publié un article sur le Congrès par Mgr Giovanni Marinelli, intitulé Grazie dell’invito, ma sono contrario (Merci de l’invitation, mais je suis contre). Un communiqué du Comité Carlo Magno, a répondu à cet article en précisant que l’actuel “traditionalisme” catholique n’a rien à voir avec celui du siècle dernier condamné par l’Eglise, alors que les positions sur les rapports entre Etat et Eglise exposées par le Concile et réaffirmées par Mgr Marinelli se ramènent au libéralisme catholique, également condamné par l’Eglise. Face à de nombreux participants (parmi lesquels plusieurs lecteurs de Sodalitium que nous avons eu le plaisir de connaître personnellement) Paolo Baroni a dirigé le Congrès. L’abbé Ricossa, directeur de Sodalitium, a parlé du “cadre historico-religieux de la prise de Porta Pia au Concile Vatican II; libéralisme, modernisme et néomodernisme”, c’est-àdire de la tradition culturelle qui, comme l’avouent les partisans du Concile, a préparé intellectuellement Vatican II. Raimondo Gatto s’est intéressé à l’“autre face du Concile”, autrement dit aux manœuvres des épiscopats français, allemand et hollandais pour diriger le Concile dans la direction antiromaine qu’ils voulaient. L’abbé Nitoglia a magistralement commenté le document conciliaire Nostra Ætate, en analysant toutes les nuances, et les points sur lesquels il s’oppose à la Révélation divine. Maurizio Ruggiero, de Vérone, a conclu les travaux avant le repas en commentant un autre document conciliaire, Gaudium et spes, sur les rapports entre l’Eglise et le monde contemporain, également à la lumière de la récente interprétation faite par Jean-Paul II. Dans l’après-midi, Siro Mazza, d’Alexandrie, a révélé les insoupçonnables rapports existant entre certains protagonistes du Concile et l’ésotérisme, s’arrêtant particulièrement sur la figure du “Cardinal” Jean Daniélou. L’abbé Ricossa, en soirée, a tiré les conclusions: s’il existe une contradiction entre la doctrine de l’Eglise et celle du Concile, se pose alors immédiatement le problème de la légitimité des “autorités” qui ont promulgué Vatican II. “Obéissance, autorité et conservation de la foi”: c’est le thème de la dernière conférence, au cours de laquelle l’abbé Ricossa a exposé le problème de l’obéissance au Pape et à son magistère, en résolvant ce dilemme, déformé ou passé sous silence par tant de personnes, au moyen de la Thèse de Cassiciacum élaborée par le théologien dominicain M.L. Guérard des Lauriers. En même temps, ont été exposées et critiquées les autres solutions possibles: l’acceptation du Concile, la doctrine de la désobéissance de Mgr Lefebvre et le Sédévacantisme total des autres. La Sainte Messe a clôturé le Congrès. Dernier rendez-vous notable, la conférence de Paolo Baroni, du Centre Culturel San Giorgio, tenue à Turin, dans la salle de conférences de la Galerie d’art moderne et contemporain, sur le thème: Approfondissement sur l’ésotérisme et la musique rock. Le conférencier a été présenté par les organisateurs de la soirée, Vittorio Bichiri, représentant le Cercle Famiglia Cattolica, et l’abbé Ricossa, au nom de l’Associazione Soda- Photo de groupe au camp St Louis de Gonzague litium. Etant donné le grand succès remporté auprès du public, nous estimons opportun de redonner la conférence. Bien sûr, la collaboration avec le Centre San Giorgio se poursuivra pour des initiatives similaires. Bonne presse. La Cooperativa editrice Sodalitium a été mise en liquidation le 21 novembre: trop de frais de gestion, insupportables pour nos maigres moyens! De ses cendres, cependant, est née, l’Association Centro Culturale Librario Sodalitium. En limitant nos prétentions (et nos dépenses) nous pourrons poursuivre nos activités culturelles (conférences, livres, opuscules). Le 6 décembre, en effet, a été porté chez l’imprimeur la traduction italienne du livre Mystères et secrets du B’naï B’rith d’Emmanuel Ratier, avec un appendice sur le B’naï B’rith en Italie, rédigé par Sodalitium. Ils parlent de nous... L’existence de Sodalitium a été signalée par le Bulletin Paroissial de Domqueur de l’abbé Philippe Sulmont (n° 2, février 1995). De même, le mensuel Linea (Corso Vittorio Emanuele II, Rome) a publié l’avis publicitaire de Sodalitium (nov. 95, p. 14). Saka Informationen de Bâle (Suisse) a publié en allemand, dans le n° 5/6 de mai/juin 1995, l’article de l’abbé Nitoglia Judaïsme et Maçonnerie. La revue argentine Pugna a poursuivi la traduction et la diffusion de l’article de l’abbé Nitoglia sur l’homicide rituel malgré la dénonciation intervenue contre la revue d’après une “loi FabiusGayssot” locale. Lectures Françaises (n° 462, oct. 1995, p. 32), dirigée par Henri Coston, a signalé l’article de l’abbé Nitoglia sur les Marranes, en se référant à l’édition française de Sodalitium. La nouvelle revue argentine Firmes en la Fe (Pringles 1363, 7600 Mar del Plata, Province de Buenos Aires) publie un extrait de notre rubrique, l’Osservatore Romano, concernant l’accord de Jean-Paul II avec les nestoriens (cf. Sodalitium, n° 40, pp. 47-48). La revue argentine, qui partage le sédévacantisme de l’abbé Zins et du professeur Corbi, précise de ne pas suivre nos positions sur la Thèse de Cassiciacum et sur les consécrations épiscopales, mais recommande également la lecture de Sodalitium. Cet exemple de Firmes en la Fe montre que l’on peut sans amalgamer des positions différentes discuter sans animosité et passion sur ce qui nous divise, et attaquer l’ennemi commun. Un autre exemple vient de l’autre côté de la barricade, c’est-à-dire de la revue Inter multiplices una vox, organe de l’association homonyme de Turin, qui s’est séparée de Una Voce. A la p. 15 du numéro de septembre (chez G.L. Gremo, Via Battisti 2, 10023 Turin) on peut lire une belle recension du livre de l’abbé Cekada, On ne prie plus comme autrefois..., édité par notre Coopérative d’édition Sodalitium. Même une revue qui “se situe dans la ligne (...) de S.E. Mgr Lefebvre”, Le sel de la terre (La Haye-aux-Bonshommes, 49240 Avrillé, France) a signalé, avec discrétion, le livre de l’abbé Cekada. Une autre recension favorable (et très détaillée) du livre de l’abbé Cekada a été faite par la revue française Introibo, organe de l’Association Noël Pinot, qui réunit de nombreux prêtres du monde entier. Malheureusement (par oubli ou par crainte de faire connaître notre existence) l’adresse où se procurer le livre n’a pas été indiquée! Autre recension du livre de l’abbé Cekada: celle publiée par le mensuel Chiesa Viva (décembre 1995) dirigé par l’abbé Luigi Villa. La Sentinella d’Italia (Via Buonarroti 4, 34074 Monfalcone, Gorizia) signale au contraire que “le méritant Institut Mater Boni Consilii de Verrua Savoia a en cours de publication l’édition italienne” du livre de Ratier sur le B’naï B’rith. Merci! L’Institute of Jewish Affairs et The American Jewish Commitee incluent Sodalitium et l’Institut dans l’Antisemitism World Report 1994 et 1995. La presse a déjà parlé, quand en certaines occasions furent impliqués des politiques, du “Rapport mondial 81 sur l’antisémitisme” que l’Institute of Jewish Affairs publie et diffuse annuellement. Dans les deux dernières éditions, celle de 1994 et celle de 1995, en ce qui concerne l’Italie et sous la rubrique “Religion”, le Rapport s’est occupé de nous. Pour l’information des lecteurs nous rapportons les paroles textuelles du Rapport (traduites de l’anglais). Dans l’édition de 1994, encore peu au courant, il se limite à écrire: “Le mensuel Chiesa viva, publié à Brescia par la maison d’édition Civiltà et dirigé par Luigi Villa, est considéré en marge de l’organisation ecclésiale. En janvier il a publié un article qui se réfère aux libelles sanguinaires imprimés au siècle dernier contre les Juifs. Les numéros de mai, juin et août ont traité, en trois parties, de la responsabilité des Juifs dans le déicide. Tous les articles étaient écrits par Curzio Nicotra (sic)”. Entre-temps l’Institute of Jewish Affairs s’est mieux informé. Dans l’édition de 1995, il écrit: “La crise socio-politique en Italie a favorisé la résurgence des idées antérieures à Vatican II et proposé des solutions aux maux qui affligent le pays, (maux) qui peuvent être attribués aux Juifs. Pour les nombreuses petites organisations de franges du fondamentalisme Catholique, le consumisme et le matérialisme modernes sont considérés comme la cause de la désagrégation de la morale et l’église est critiquée pour avoir sacrifié les valeurs traditionnelles Catholiques au profit de la modernité par l’intermédiaire des changements d’orientation suivis au Concile Vatican II. Ces groupes de franges citent le Concile de Trente (1542) et les enseignements de St Pie V, et sont marginaux dans l’église. Dans ce contexte existe une opposition à l’‘ouverture’ de l’église Catholique vis-à-vis des Juifs, (ouverture) qui aurait permis, suivant leur opinion, que l’église soit contrôlée par les Juifs et par les Francs-Maçons. Les vieux mythes et stéréotypes antisémites, comme l’accusation de déicide et d’homicide rituel, ont été exhumés. Des articles sur ces thèmes ont été publiés dans la presse fondamentaliste Catholique. L’hebdomadaire (sic) Sodalitium, d’une vaste portée culturelle, est publié par l’Institut Mater Boni Consilii de Verrua Savoia, et le directeur en est l’abbé Francesco Ricossa. La tendance du journal est le fondamentalisme Catholique, proche des opinions archi-traditionalistes de Monseigneur Lefebvre, mais plus critique dans les rapports de l’église Catholique Romaine (sic) et du Concile Vatican II et s’oppose durement à l’ouverture de l’église aux Juifs. Toutefois, le journal a une petite diffusion et une petite influence à l’intérieur de l’église Catholique. Les numéros publiés en 1994 comprennent: un long article fortement critique du Concile Vatican II, du Cardinal Bea et du Pape Jean XXIII; un article sur l’infiltration ‘judéo-maçonnique’ dans l’Eglise, une recension du livre d’Emmanuel Ratier intitulé Mystères et secrets du B’nai B’rith. La plus importante organisation juive internationale; un article de l’abbé Curzio Nitoglia sur les Marranes (cryptojuifs): “Ce MONDE SECRET qui s’est perpétué jusqu’à nos jours, ne peut pas ne pas nous surprendre et nous remplir d’une crainte fondée; il constitue la confirmation de tant d’informations qu’on lit dans les livres (…) comme si elles étaient des légendes ou des exagérations, comme le mystère du sang ou l’homicide rituel, transmis oralement de père en fils, et perpétré dans le secret des caves”. Après avoir brièvement signalé d’autres publications (Sì sì no no, Identità, les opuscules du Centro Culturale San Giorgio, mentionnant les contacts de ces derniers avec Sodalitium) le Rapport poursuit: “Un autre épisode concerne une messe célébrée par l’abbé Curzio Nitoglia de l’Institut Mater Boni Consilii, qui publie Sodalitium et a un séminaire pour la formation des prêtres. En janvier l’abbé Nitoglia célébra une messe au siège du MSI via Acca Larenzia à Rome, l’un des courants du MSI les plus proches de l’extrême droite skinhead. Durant le sermon il déclara, entre autre, que le communisme est un produit du Judaïsme et que: ‘nous avons le droit de la légitime défense pour nous-mêmes et pour la vraie Eglise Catholique contre le communisme, la maçonnerie et les lobbies juifs’”. HeureuL’abbé Nitoglia au Congrès “Cattolico Tradizionalista Estense” sur le Concile Vatican II, 89 de l’Eglise. 82 sement, dans la rubrique “Contre l’antisémitisme”, le Rapport peut se consoler: “Dans les discours du Pape Jean-Paul II et de certains évêques, en particulier le Cardinal Maria (sic) Martini de Milan on trouve la condamnation de l’antisémitisme passé et présent”. Amis et adversaires ont donc été clairement identifiés. Voyages apostoliques. L’abbé Murro s’est rendu à nouveau dans l’Italie méridionale, pour y rencontrer des amis et des sympathisants. L’abbé Giugni va de temps en temps à Rovereto, pour assister des fidèles privés d’une Messe régulière. L’abbé Ricossa s’est à nouveau rendu en Argentine du 25 octobre au 9 novembre, visitant de nombreux fidèles et prêtres à Cordoba, Mendoza, Rosario et Buenos Aires. Travaux. A Raveau, grâce au travail de la famille Langlet et de quelques séminaristes, nous avons complètement refait le toit d’un bâtiment. Ces travaux font suite à la réfection des toits et du ravalement du château; beaucoup reste encore à faire, si bien que les voleurs qui ont visité notre maison n’ont rien trouvé à voler! A Verrua, les toits ont été refaits, les fenêtres du grenier fermées et la cuisine restructurée. Restent à faire les travaux d’assainissement de l’église (trop humide). A Turin, l’église est enfin dotée de la table de communion. Les dépenses de tous ces travaux, naturellement, sont considérables. Vœux. Le 29 juin l’abbé Gustave Delmasure a fêté à Cannes ses soixante ans de sacerdoce. L’abbé Nitoglia au nom de tout l’Institut s’est rendu dans cette ville pour s’unir à la joie de notre confrère que nous assurons du soutien de nos prières. Tous nos vœux également à l’abbé Alfredo Medina, confrère et ami qui accomplit son ministère sacerdotal à Bruxelles. Le 2 décembre il a fêté, avec une messe solennelle, ses dix ans de sacerdoce; le séminariste belge Geert Stuyver était présent pour représenter l’Institut. Baptême (et première communion). Un seul, mais important et émouvant! Une jeune fille de 26 ans, née dans la religion musulmane, a reçu le baptême à Verrua Savoia, le 7 octobre, choisissant le nom de Marie. Après l’impressionnant rite du baptême des adultes, elle a assisté à la Sainte Messe et reçu, pour la première fois, son Seigneur et son Dieu, Jésus-Christ, dans la Sainte Communion. Nous avons tous été touchés de la foi et de la ferveur de cette nouvelle fille de Dieu. Quelle joie de pouvoir encore assister, en nos si tristes jours, à ces miracles de la grâce! Premières communions. A l’issue de la Colonie Saint Louis de Gonzague, le 25 juillet, Carlo Romano Trinca a reçu la Première Communion des mains de Mgr Daniel Dolan; sa sœur Ginevra et une amie, Valentina Bracaglia, toutes deux ayant participé à la Colonie de Verrua Savoia, ont reçu à leur tour Jésus pour la première fois à la chapelle Saint Thomas d’Aquin, dans le château où le Saint fut emprisonné, à Monte San Giovanni Campano (Frosinone), le 16 octobre. La Messe a été célébrée par l’abbé Ricossa. Celui-ci avait également donné la Première Communion, le 24 septembre, près de Ferrare, à Massimiliano et Margherita Baroni qui, eux aussi, s’étaient préparés à ce grand événement de la vie chrétienne durant les colonies estivales organisées par l’Institut. Mariage. A Ferrare, le 25 novembre, l’abbé Ricossa a béni l’union des époux Cesari. Le 1er juillet, une centaine de personnes assistait à la bénédiction du Saint-Sacrement suivie du Te Deum en action de grâces pour le mariage de Luca et Nadia Ricossa. Défunts. L’affection et la reconnaissance de l’Institut et de tous ses membres pour la famille Senni Buratti sont telles qu’ils font leur le deuil qui a frappé Madame Adriana Senni Buratti à l’occasion de la mort de ses frères Luciano Guglielmo et Gualtiero Nicoletti. L’abbé Ricossa a pu administrer à ce dernier, qui vivait à Bologne, les derniers sacrements. L’abbé Nitoglia a donné les saints sacrements à sa chère tante et marraine, Nina Scafi, décédée le 2 octobre. Le 13 novembre, à St Jean de Niost, l’abbé Murro a célébré les funérailles de Madame Thérèse Joséphine Nême, veuve Bozon, décédée munie des sacrements le 9 du même mois. L’abbé Murro et l’abbé Giugni étaient souvent ses hôtes durant leurs voyages apostoliques en France. A Raveau est décédé Monsieur Fabien Favret, qui habitait avec sa famille dans un bâtiment à l’intérieur de notre propriété. Soldat de la Marine militaire, il se trouvait à Madagascar quand il eut une maladie qui l’obligea à quitter l’Armée. Sa conversion avait été profonde: même en vivant dans la gêne, il n’hésitait pas à faire des sacrifices pour observer les Commandements de Dieu, pour éviter ce qui y est contraire. D’une grande générosité, il était toujours prêt à aider le prochain, et même quand les moyens lui manquaient il avait toujours une solution à propo- 83 ser. Sa préoccupation était d’enseigner à ses sept enfants les principes de la foi, ainsi que la rectitude morale. Il y a quatre ans la maison où il demeurait ayant été vendue, il avait reçu son avis d’expulsion; c’est la raison pour laquelle il se trouva brusquement dans la nécessité avec une famille déjà nombreuse; nous n’avions pu lui offrir que ce bâtiment qui, loin d’être parfait, pouvait au moins le tirer d’embarras. Monsieur Favret, dans la mesure où sa santé lui permettait, aidé par son épouse, a fait de nombreux travaux pour remettre en état la maison, et il y a seulement un mois, en en reparlant, il était peiné de n’avoir pu faire tout ce qu’il espérait. Dès que son état de santé commença à devenir sérieux, il formula sa pleine soumission à la Volonté de Dieu: durant toute sa maladie, même dans les moments les plus douloureux, il conserva toujours le calme intérieur qui provient de la totale acceptation des vouloirs célestes. Au mois de novembre dernier l’abbé Thomas Cazalas, qui se trouvait à Raveau, lui apporta tous les jours la Sainte Communion. Après avoir reçu tous les sacrements, il s’est éteint sereinement le 14 décembre; ses funérailles ont été célébrées par l’abbé Murro à Crézan le 18 décembre. Nous le recommandons à vos prières, particulièrement ceux qui l’ont connu. Nous devons malheureusement signaler à nouveau la mort de prêtres âgés, qui ne célébraient pas la Sainte Messe una cum Joanne Paulo. Le 4 novembre, est décédé l’abbé Rémy Micoud, curé de St Albin de Vaulserre (Isère), à l’âge de 92 ans. Il fut toujours accueillant pour les séminaristes de l’Institut qui lui rendaient visite. Le 29 novembre est mort l’abbé Henri Mouraux, de Nancy (Lorraine), à l’âge de 87 ans. Il a reçu les derniers sacrements du curé de Steffeshausen, Paul Schoonbroodt. Récemment, à cause de son grand âge (qui l’avait contraint à cesser les publications du bulletin Bonum Certamen), l’abbé Mouraux avait demandé à l’Institut l’aide d’un de nos prêtres, et dans ce but avait rencontré l’abbé Murro. Au cours de l’été, il avait accueilli avec de grands honneurs Mgr Dolan et l’abbé Sanborn. Hélas, dans les deux cas, les soldats tombés ne seront pas remplacés: la paroisse de l’abbé Micoud retourne au Novus Ordo, l’église de l’abbé Mouraux sera desservie par la Fraternité St Pie X, qui se déclare en communion avec le même Novus Ordo. Il est particulièrement triste de penser que tant de prêtres, qui n’ont pas reconnu la légitimité de Jean-Paul II, comme l’abbé Coache ou l’abbé Mouraux, après avoir laissé leurs œuvres dans les mains de la Fraternité, sont critiqués publiquement par des membres de la même Fraternité. Dans une conférence contre le ‘sédévacantisme’ tenue à Nantes en juin 1995, l’abbé Didier Bonneterre, prieur de Nantes (et actuel supérieur de l’abbé Paladino), a déclaré (entre autres énormités): “Et puis en plus, vous avez des prêtres... il est mort, je peux le nommer: l’abbé Coache. M. l’abbé Coache, prêtre respectable, bien sûr, mais qui avait l’art de considérer, à tort - mais Mgr Lefebvre le lui reprochait passablement de considérer que la question du sédévacantisme ou du vrai Pape, même s’il erre, était simplement une question d’opinion. Vous voyez, on pouvait, pour l’abbé Coache, penser que Jean-Paul II n’était pas Pape, ou penser que Jean-Paul II était Pape... C’était pour lui une question d’opinion. Il faut le savoir... Ça vous permet de comprendre pourquoi le brave abbé recevait l’abbé Guépin et autres confrères de ce genre [c’est-à-dire ‘sédévacantistes’ ou partisans de la ‘Thèse de Cassiciacum’, n.d.r.], très facilement. C’était normal, parce que pour lui, ils avaient fait un choix d’opinion. Alors, est-il possible d’avoir cette opinion? Moi, je ne pense pas, vous voyez. C’est pas possible. Mgr Lefebvre le pensait encore moins. Puisque, ces confrères, il les a exclus de la Fraternité. (...) Eh bien, non. C’est pas une question d’opinion. C’est une question grave qui, comment dire, qui atteint l’essence même du fait d’être catholique. Pourquoi? Parce que le catholique, il appartient à l’Eglise catholique qui a un Chef visible, hein?”. Que dirait l’abbé Bonneterre, aujourd’hui, de l’abbé Mouraux? Que lui aussi n’était pas catholique, puisque, encore plus clairement que l’abbé Coache, il était ‘sédévacantiste’, mais que les œuvres, l’église et les fidèles de l’abbé Mouraux... ne sont pas à mépriser (comme héritage!). Espérons que les autres prêtres non una cum s’aperçoivent à temps qu’ils ne peuvent faire confiance à ceux qui, privés d’équilibre et de charité fraternelle, prononcent de telles épitaphes funèbres... Quant à nous, nous recommandons les âmes de tous ces défunts à votre charité et à vos prières: Requiescant in pace. CENTRES DE MESSES ITALIE Verrua Savoia (TO): Istituto Mater Boni Consilii - Località Carbignano, 36. Tél. de l'Italie: (0161) 83.93.35 - Ste Messe: en semaine à 7 h 30. Salut du Saint-Sacrement: tous les vendredis à 21 h. Heure Sainte: le premier vendredi du mois à 21 h. Turin: Oratoire du Sacré-Cœur, via Thesauro 3/D. Dimanches: Confessions à 8 h 30. Messe chantée à 9 h. Messe basse à 11h 15. Tous les jeudis et les premiers vendredis du mois: Messe basse à 18 h 15. Confessions à 17 h 30. Valmadrera (Como): via Concordia, 21. Tél. de l'Italie (0341) 58.04.86. Ste Messe les 1ers et 3èmes dimanches du mois à 10 h. Confessions à 9 h 30 Marano Vicentino (Thiene-Vicenza): via Vittorio Veneto, 48 chez M. Parolin. Ste Messe les 2èmes et 4èmes dimanches du mois. Pour toute information, s'adresser à Verrua Savoia Maranello (Modena): Villa Senni. Strada per Fogliano. Tél. de l'Italie: (0536) 94.12.52. Ste Messe tous les dimanches à 11 h Bologne: Ste Messe le dernier dimanche du mois. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia Florence: via Ciuto Brandini 30, chez Mlle Liliana Balotta. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia. Ste Messe les 1ers et 3èmes dimanches du mois à 18 h 15. Confessions à 17 h 30 Rome: Ste Messe le 1er vendredi et le 1er samedi du mois à 17 h 30. Le 1er dimanche du mois, à 11 h. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia FRANCE Annecy: 11, avenue de la Mavéria. Tél. 50.57.88.25. Ste Messe les 2èmes et 4èmes dimanches du mois à 10 h. Confessions à 9 h Lyon: 36, rue A. Comte (69002). Tél. 78.42.14.79 Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois, à 17h. Confessions à partir de 16h30 Cannes: 4, rue Fellegara. Ste Messe tous les dimanches à 10h15. Tél.: 93.68.10.85. Tours: 29 rue d’Amboise. Ste Messe tous les dimanches à 10h30. Tél.: 47.39.53.73. ESPAGNE Arenas de Iguña: 37450 Carrettera general, n. 90, chez Mme Maria Pilar Alejos. Tél. 19 34 (9) 42.82.66.57. COMMENT NOUS AIDER - Il n'y a pas d'abonnement à “Sodalitium”. Ce périodique est envoyé gratuitement à tous ceux qui désirent le recevoir. Nous demandons aux personnes qui pour un motif quelconque, ne désirent pas le recevoir, de bien nous le faire savoir. - L'Institut Mater Boni Consilii et son périodique “Sodalitium” n'ont pas d'autres ressources que vos offrandes sans lesquelles ils ne peuvent vivre. Pour vos dons, libeller: • ASSOCIATION MATER BONI CONSILII - Mouchy - Raveau 58400 - LA CHARITE SUR LOIRE. CCP n° 2670 37 W DIJON • ASSOCIATION MATER BONI CONSILII - Mouchy - Raveau 58400 - LA CHARITE SUR LOIRE. Compte CREDIT LYONNAIS n° 790 74 U - Rib 78 - code bancaire 30002 EN CAS DE NON-LIVRAISON, VEUILLEZ RENVOYER A L’EXPEDITEUR: “Sodalitium” Periodico Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) presso CPM TORINO NORD DESTINATARIO - Destinataire: SCONOSCIUTO - Inconnu TRASFERITO - Transféré DECEDUTO - Décédé INDIRIZZO - Adresse: INSUFFICENTE - Insuffisante INESATTO - Inexacte OGGETTO - Object: Rifiutato - Refusé