Anno XIV n. 1 - Maggio 1998 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Torino - Organo ufficiale del Centro Librario Tassa Riscossa - Taxe Perçue. TORINO CPM N° 4 6 Edition française - Mai 1998 2 “Sodalitium” Périodique - Bulletin Officiel de l'Institut Mater Boni Consilii - Loc. Carbignano, 36 - 10020 VERRUA SAVOIA (TO) - Italie - Téléphone de France 00.39. 161.839.335; Fax 00.39. 161- 839.334 - C/CP 24681108 - Directeur de la publication: M. l'abbé Francesco Ricossa - Aut. Trib. n. 116 du 24-2-84 - Imprimé en Italie par l'Institut Mater Boni Consilii. INTERNET: www.plion.it/sodali - email: sodalitium@crescentino.alpcom.it Sommaire Editorial La voix du Pape “Je suis prêt à mourir pour la cause de Dieu et de son Eglise”. Vie de St Thomas Becket Aspects contemporains du Judaïsme: Mondialisme, Ploutocratie, Franc-Maçonnerie Alliance... maçonnique? ou la dérive de la TFP L’Osservatore Romano La Papauté matérielle RECENSIONS: La destruction du Temple chez M. Blondet Une insurrection catholique Traditionalisme Nous signalons… Vie de l’Institut Editorial L e prochain numéro de Sodalitium sera dédié, s’il plaît à Dieu, à la mémoire du Pape Pie XII, qu’on a voulu à nouveau mettre au banc des accusés pour les événements de la dernière guerre; déjà, vous pouvez lire (dans la rubrique L’Osservatore Romano), un commentaire du document du Vatican sur la “Shoah”, et vous pouvez commander à nos bureaux le supplément “La revue de presse de Sodalitium” qui rapporte, entre autres nouvelles intéressantes, une chronique des faits relatifs à ce grand Pape de notre siècle. C’est bien, encore une fois, la ligne de notre revue: fidélité absolue à l’Eglise fondée sur Pierre et ses successeurs dans le Primat. Le sang de St Thomas Becket, versé pour la défense des droits de Dieu et de Son Eglise, crie encore aujoud’hui vers nous, nous poussant à demeurer intégralement fidèles à ce même Dieu et à cette même Eglise. De même que le saint archevêque de Canterbury lutta, en son temps, contre les ennemis de l’Eglise, qui voulaient l’asservir au pouvoir laïc, de même nous luttons de nos jours p. 2 p. 3 p. 4 p. 24 p. 41 p. 54 p. 60 p. 70 p. 73 p. 74 p. 76 p. 79 pour la liberté et l’exaltation de cette Eglise, attaquée de toutes parts par l’ennemi que Mgr Jouin, approuvé par les Papes, appelait la “judéo-maçonnerie”. Dans ce but, nous avons réédité le livre d’Arthur Preuss Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine, traduit en son temps par la R.I.S.S., et nous nous employons à dénoncer “les infiltrations ennemies dans l’Eglise”, même si, pour cela, nous sommes contraints de mettre en garde contre des mouvements, tels que la T.F.P., qui, sur bien des sujets, ont été ou sont encore proches de notre bataille. La série d’articles de M. l’abbé Sanborn consacrés à la Thèse de Cassiciacum ne sortent pas de ce cadre “romain”. C’est par fidélité au magistère de l’Eglise que nous ne pouvons pas reconnaître à Jean-Paul II l’autorité pontificale: cela voudrait dire nier pratiquement l’infaillibilité du Pape et de l’Eglise (M. l’abbé Murro va répondre prochainement aux opinions extravagantes que Mgr Williamson a publiées, à ce propos, dans Le Sel de la terre, n° 23). Mais c’est aussi par fidélité à l’Eglise indéfectible qu’il faut tenir que les occupants des sièges épiscopaux (à Rome comme ailleurs) gardent une succession matérielle qui assure précisément, de ce point de vue, l’indispensable indéfectibilité et visibilité Sur la couverture: Le martyre de St Thomas Becket dans la cathédrale de Canterbury. Miniature du XIIIème siècle. (Voir article p. 4). 3 de l’Eglise. Non, l’Eglise n’est pas morte, elle ne peut pas mourir. Cette position, illustrée pour la première fois par le Père Guérard des Lauriers, nous permet d’éviter les écueils de Charybde et Scylla des erreurs opposées, sur lesquels beaucoup de “traditionalistes” ont fait naufrage, comme nous le montre l’histoire de ce mouvement dont nous parlons aussi dans les recensions. Le but du démon est précisément de nous faire croire que c’en est fini pour l’Eglise, alors que l’ancienne Synagogue - qui a refusé Jésus-Christ et sa divinité - s’efforce, 50 ans après la restauration de l’Etat Juif que les légions romaines avaient détruit totalement en l’année 70, de rebâtir le Temple qui avait péri dans les mêmes circonstances tragiques. Caïphe aurait-il eu raison? JésusChrist était-Il un “imposteur”? Voilà ce qu’on voudrait nous faire croire, dans les paroisses modernistes, dans les écoles républicaines ou “catholiques”, dans les tribunaux de la police de la pensée... Mais le Christ-Roi et Son Eglise sortiront victorieux comme au jour de la Résurrection, même de cette dernière terrible tentation. La voix du Pape CONTRE L’AMÉRICANISME L e principe des opinions nouvelles (...) peut se formuler à peu près en ces termes: pour ramener plus facilement les dissidents à la vérité catholique, il faut que l’Eglise s’adapte davantage à la civilisation d’un monde parvenu à l’âge d’homme et que, se relâchant de son ancienne rigueur, elle se montre favorable aux aspirations et aux théories des peuples modernes. Or, ce principe, beaucoup l’étendent non seulement à la discipline, mais encore aux doctrines qui constituent le dépôt de la foi. Ils soutiennent en effet qu’il est opportun, pour gagner les cœurs des égarés, de taire certains points de doctrine comme étant de moindre importance, ou de les atténuer au point de ne plus leur laisser le sens auquel l’Eglise s’est toujours tenue. Il n’est pas besoin de longs discours, cher Fils, pour montrer combien est condamnable la tendance de cette conception. (...) Qu’on se garde donc de rien retrancher de la doctrine reçue de Dieu ou d’en rien omettre, pour quelque motif que ce soit; car celui qui le ferait tendrait plutôt à séparer les catholiques de l’Eglise qu’à ramener à l’Eglise ceux qui en sont séparés. Qu’ils reviennent, rien, certes, ne Nous tient plus à cœur; qu’ils reviennent, tous ceux qui errent loin du bercail du Christ, mais non par une autre voie que celle que le Christ a lui-même montrée. (…) Le dessein des novateurs est encore plus dangereux et plus opposé à la doctrine et à la discipline catholiques. Ils pensent qu’il faut introduire une certaine liberté dans l’Eglise, afin que la puissance et la vigilance de l’autorité étant, jusqu’à un certain point, restreintes, il soit permis à chaque fidèle de développer plus librement son initiative et son activité. Ils affirment que c’est là une transformation nécessaire, comme cette liberté moderne qui constitue presque exclusivement à l’heure actuelle le droit et le fondement de la société civile. Il importe donc davantage de signaler une opinion dont on fait un argument en faveur de cette liberté qu’ils proposent aux catholiques. Ils disent à propos du magistère infaillible du Pontife romain que, après la définition solennelle qui en a été faite au Concile du Vatican, il n’y a plus d’inquiétude à avoir de ce côté, c’est pourquoi, ce magistère sauvegardé, chacun peut maintenant avoir plus libre champ pour penser et agir. Etrange manière, en vérité, de raisonner; s’il est, en effet, une conclusion à tirer du magistère de l’Eglise, c’est, à coup sûr, que nul ne doit chercher à s’en écarter et que, au contraire, tous doivent s’appliquer à s’en inspirer toujours et à s’y soumettre de manière à se préserver plus facilement de toute erreur de leur sens propre. Ajoutons que ceux qui raisonnent ainsi s’écartent tout à fait des sages desseins de la Providence divine, qui a voulu que l’autorité du Siège Apostolique et son magistère fussent affirmés par une définition très solennelle, et elle l’a voulu précisément afin de prémunir plus efficacement les intelligences chrétiennes contre les périls du temps présent. La licence confondue un peu partout avec la liberté, la manie de tout dire et de tout contredire, enfin la faculté de tout apprécier et de propager par la presse toutes les opinions, ont plongé les esprits dans des ténèbres si profondes que l’avantage et l’utilité de ce magistère sont plus grandes aujourd’hui qu’autrefois pour prémunir les fidèles contre les défaillances de la conscience et l’oubli du devoir. (…) Il n’y a qu’une Eglise, une par l’unité de la doctrine comme par l’unité du gouvernement, c’est l’Eglise catholique; et parce que Dieu a établi son centre et son fondement sur la chaire du bienheureux Pierre, elle est, à bon droit, appelée Romaine, car là où est Pierre, là est l’Eglise (St Ambroise, in ps. XI, 57). Léon XIII, “Testem benevolentiæ”, 22-1-1899 4 Hagiographie “J’accepte la mort au nom de Jésus et de l’Eglise”. Vie de SAINT THOMAS BECKET, ARCHEVEQUE DE CANTERBURY TROISIEME PARTIE: MARTYR DE LA LIBERTE DE L’EGLISE. Par M. l’abbé Ugolino Giugni L’assemblée du clergé à Westminster en 1163 L ’année 1163, comme nous l’avons vu dans la précédente partie de cette étude, se termina avec la consécration de deux évêques et fut la dernière année d’une certaine tranquillité pour Becket, puisque les signes de la bataille s’entrevoyaient désormais comme très proches. Mais les adversaires n’étaient plus les mêmes: “Deux années de pénitence et d’exercices de l’esprit, deux années d’abnégation et de mortification, deux années de vie sainte et exemplaire ornée de toutes les vertus du cloître et corroborée de tous les bénéfices des activités du travail et de la fatigue, avaient renforcé et revigoré Becket. Du vif chancelier il ne restait plus rien, l’ardeur du chevalier plein d’entrain, le luxe du splendide baron, tout avait disparu. La grâce avait changé entièrement cet homme; il avait tourné tout amour, toute force, toute pensée vers l’Eglise de Dieu, il avait recueilli toute affection en Jésus-Christ. Quand le roi Henri II osa faire revivre en lui-même Guillaume le Roux, il se trouva face à Anselme ressuscité dans la personne de Thomas qui soutint valeureusement la lutte” (1). Mais quelle était l’attitude de Thomas Becket et celle du roi Henri II? “En se référant au droit coutumier et à d’autres cas précédents (la common law), le roi voulait restaurer dans l’Eglise anglaise la domination de la couronne, limiter et tenir en échec la juridiction ecclésiastique, en l’assujettissant au tribunal royal, et tenir sous le contrôle du roi les appels adressés à la curie. L’archevêque au contraire n’hésita pas à soutenir les droits et les libertés ecclésiastiques, jusqu’alors obtenues ou conquises sous le roi Etienne, et à donner toujours plus de place au droit canonique général introduit aussi en Angleterre depuis le Décret de Gratien (1139-40). Alors que pour l’archevêque le droit canonique avait une part importante, pour le roi, qui suivait l’exemple de Frédérique Ier, le droit romain rénové était plus important, même si au dehors on voulait faire croire qu’il s’agissait seulement de restaurer les coutumes juridiques locales. Un choc frontal était donc inévitable et il devait être d’autant plus rude et dramatique dans la mesure où tous les deux, tant le roi que l’archevêque, se considéraient comme les défenseurs du droit juste et vrai, et que tous deux étaient prêts à employer pour leurs idéaux suprêmes leur vive intelligence respective, l’art diplomatique, une volonté tenace, combative même, en recourant à l’aide de tous les moyens intellectuels, matériels et personnels, que l’état et l’Eglise mettaient à leur disposition” (2). Une des premières étincelles qui alluma la querelle fut le cas d’un chanoine du nom de Philippe de Broc de Berford. Celui-ci était accusé de l’assassinat d’un soldat; jugé par le tribunal ecclésiastique compétent il fut absout, les preuves de sa culpabilité n’existant pas. Le juge royal du comté, par vieille rancune avec le chanoine en appela au roi. D’après le droit on ne peut être jugé Saint Thomas Becket 5 deux fois pour le même délit et de Broc, en tant que prêtre, se refusa à comparaître devant le juge laïc. Thomas Becket, avec tout le clergé qu’il représentait, soutint le prêtre en s’opposant à la prétention du roi. Henri II voulait que de cet événement résultât une prééminence du pouvoir civil sur le pouvoir spirituel. Le chanoine fut appelé à Canterbury: cependant il ne fut plus jugé pour l’homicide, mais dut s’excuser pour les injures que dans son indignation il avait adressées au juge du comté; il perdit en outre ses prébendes pour deux ans et fut condamné à s’exiler d’Angleterre. Le “cas de Broc” eut de longues séquelles d’ordre juridique concernant les compétences respectives. Il prépara les esprits à la discussion sur le droit et la liberté de l’Eglise qui s’ensuivit et qui éclata plus violemment à Westminster (1er octobre 1163) durant l’assemblée royale à laquelle Henri II convoqua tous les évêques du royaume (3). Le prince déplora la criminalité croissante du clergé et l’indulgence des tribunaux ecclésiastiques. Il prétendit que le for de l’Eglise soit mis entre les mains des officiers royaux et que, une fois jugé par le for ecclésiastique, le coupable soit à nouveau appelé en jugement face au tribunal civil et qu’un ministre du roi soit présent au tribunal ecclésiastique pour pouvoir s’emparer immédiatement de l’accusé sans que celui-ci réussisse à “échapper à sa justice”. Les évêques se réunirent pour délibérer sur la réponse à donner au roi. Celui qui conseillait modération et indulgence à cause de la “perversité des temps”, se heurta à la fermeté de l’archevêque de Canterbury qui, parlant au nom de tout le clergé qu’il représentait, rappela comment « la liberté ecclésiastique ne dut pas périr par la main même des évêques qui avaient le devoir de la garder et de la défendre et que “dans les jours de combat, dit St Jérôme, on doit rester ferme dans la foi sans s’inquiéter de la tempête. Tout pilote est capable de naviguer avec les vents favorables, mais le vrai pilote se voit dans les tempêtes, comme affirmait St Antoine”. Au souverain en outre il dit que puisque le sacerdoce constituait un peuple saint, séparé du peuple et consacré à Dieu, il devait être jugé avec les lois propres de l’Eglise qui savait bien récompenser les bons et punir les mauvais. Et puisque le roi du sacerdoce était Dieu, ainsi la loi et la peine étaient-elles spirituelles, c’est-à-dire ne portaient pas de mutilations ou démembrements ou marque de feu. (…) Il eut été honteux et déplacé de supporter que des mains à Dieu consacrées et qui peu auparavant serraient entre leurs doigts le Rédempteur et en bénissant représentaient le Sauveur du monde, maintenant liées représenteraient un abject brigand… Et serait-il convenable que la hache tranche ces mêmes mains qui peu de temps avant avaient béni le roi au nom de Dieu? On admettait que si quelqu’un dégradé et privé des privilèges sacerdotaux, pour un nouveau délit dut être puni, la cour laïque le jugerait, et c’est dans ce sens qu’on trouve dans le canon le tradendum curiæ, puisque dans ce cas-là, la peine infligée à celui-ci n’était pas infligée à un clerc mais à quelqu’un du peuple » (4). Henri avec ruse sembla donner raison à ses arguments mais demanda si les évêques étaient au moins disposés à promettre d’observer en tout les coutumes royales. La réponse quasi unanime fut qu’ils l’auraient promis mais avec la clause “salvo ordine nostro” (5). Le roi prétendit voir un piège dans cette réponse et se fâcha profondément; en proférant des menaces il quitta l’assemblée sans même saluer les évêques. Avant de partir le roi avait intimé à Thomas de « “renoncer aux châteaux et aux biens reçus quand il était chancelier”. Le saint ne se fit pas prier et renonça immédiatement, prouvant ainsi que seule la conscience le faisait résister aux prétentions royales contre l’Eglise, non l’intérêt ou sa propre utilité, qu’il perdait et cédait sans regret » (6). Le soir même Henri II rencontra Becket poussé par un reste de cette amitié qui les avait liés précédemment; ils chevauchèrent tous les deux côte à côte en parlant ensemble. Le roi traita l’archevêque d’ingrat et d’ennemi. Ce dernier se défendit en lui faisant remarquer que le devoir et la conscience l’obligeaient à obéir d’abord à Dieu plutôt qu’aux hommes: “Sire, vous savez combien je vous ai été fidèle, même si de vous je ne pouvais m’attendre qu’à une récompense terrestre; voyez donc comment avec combien plus de diligence je dois servir Dieu qui me donnera une récompense éternelle… vous êtes mon seigneur mais Il est mon Seigneur et le vôtre… Au jour du jugement nous serons jugés tous les deux comme serviteurs du Seigneur et l’un ne pourra pas répondre pour l’autre”. “Je n’ai pas besoin de sermons - répliqua le prince - et je ne suis pas venu ici pour les entendre de votre part. N’êtes-vous 6 pas le fils d’un de mes vassaux?”. “Oh! mon roi, c’est vrai que je ne suis pas issu de lignée royale; mais St Pierre à qui le Christ daigna donner les clefs du ciel et l’autorité sur toute l’Eglise n’était pas d’origine illustre” répondit humblement l’archevêque. “C’est bien vrai - répliqua Henri - mais il mourut pour son maître”. A ces mots toute la foi et la charité du saint s’enflammèrent et son âme s’élança dans l’avenir, et avec une phrase prophétique il dit: “Oh oui! Moi aussi quand sera venu le temps je mourrai pour mon maître”. Henri resta froid à cette profession d’espérance et de foi; au contraire il lui reprocha d’avoir trop confiance en lui-même. « Sire je n’ai pas d’autre confiance que dans le Seigneur, parce qu’il est écrit “malheur à l’homme qui se confie en l’homme”. Je suis prêt à présent, comme je fus toujours prêt, à faire toute chose pour votre honneur et selon votre désir, [étant] saufs toujours les droits de mon ordre » (7). Le roi resta ferme en voulant le serment sans la clause, chose à laquelle Thomas ne pouvait consentir; il s’en sépara donc toujours plus en colère. Les constitutions de Clarendon Après ces événements les esprits furent très troublés; on craignait la colère du prince et ses funestes conséquences. Certains évêques essayaient de convaincre Becket de conjurer, par sa prompte soumission la tempête qui se déchaînerait sur tout le clergé. Ils lui suggérèrent que la prudence est la voie la plus certaine pour la sécurité et que pour éviter un plus grand mal, on devait renoncer même aux droits les plus sacro-saints. Plusieurs s’éloignèrent de l’archevêque de Canterbury craignant pour eux-mêmes au cas où le roi les aurait vu traiter avec le Primat, d’autres comme Roger d’York et Arnaud de Lisieux pactisèrent avec le roi. Les esprits étaient donc divisés: et Becket se trouvait toujours plus seul, peu lui restèrent secrètement fidèles. « Le saint éprouvait de la douleur dans son âme du fait de tant de bassesse, il en avait une très grande douleur puisqu’il savait clairement qu’il y avait peu à espérer de ces mercenaires. Ce fut alors qu’il se mit à chercher du réconfort hors du royaume et qu’il écrivit au Pape Alexandre et à plusieurs prélats en racontant les douleurs de l’Eglise d’Angleterre et en les conjurant de l’aider et de le conseiller. (…) Le Pape Alexandre fut touché par le récit des “graves anxiétés et amertumes qui affligeaient l’archevêque”… et lui écrivit en employant tous les arguments possibles pour le réconforter» (8). A la pusillanimité des évêques s’ajouta la calomnie des seigneurs et des nobles déjà ennemis de Becket qui profitèrent de cette occasion pour aigrir l’âme du souverain envers son ancien chancelier. Un abbé, pour ébranler la fermeté de Becket, lui dit qu’il avait reçu ordre du Pape de faire tout son possible pour le convaincre de consentir aux désirs du roi, puisque le prince avait promis à certains cardinaux de n’avoir aucune intention de nuire aux intérêts de l’Eglise. Ce fut ainsi que “le primat, fatigué par les représentations de ses amis, et les menaces de ses ennemis, entraîné par un prétendu avis du Souverain Pontife, et par l’assurance que Henri se contenterait du seul honneur de la victoire, se rendit chez le roi à Woodstock, et lui offrit de faire la promesse d’observer les coutumes, en omettant la clause qui avait occasionné tant de débats” (9). D’après Balan Thomas Becket promit d’observer les coutumes royales de bonne foi (bona fide) et ajouta: “Qu’il serait luimême fidèle à la parole donnée”. “Becket s’imaginait sans doute que le monarque se serait contenté de la démarche généreuse qu’il venait de faire, et que, fort de la parole donnée du prélat, il pouvait se présenter devant les barons et les seigneurs, sans avoir à rougir du prétendu affront que lui, Henri II, croyait avoir reçu dans l’assemblée de Westminster; mais soit que ce prince fût mal conseillé par ses flatteurs, qui s’étaient déclarés les ennemis du primat, soit qu’il voulût humilier ce pontife, dont la fermeté était le principal obstacle à ses projets iniques d’envahissement et de domination, soit qu’il se plût à opprimer l’Eglise, et à fouler aux pieds ses immunités, ses intérêts et ses droits, toujours est-il que, mu par l’un de ces motifs ou par tous ensemble, il exigea une rétraction publique, de la part des évêques” (10). A ce propos le roi convoqua à Clarendon, bourg pas très éloigné de Salisbery où Henri possédait un palais, une assemblée du clergé et de la noblesse. Cette assemblée s’ouvrit le 25 janvier 1164. Thomas Becket dut vaincre sa répugnance pour s’y rendre puisqu’il craignait que le roi abuserait de la promesse faite à Woodstock, et proposerait à la signature des évêques des coutumes du royaume opposées aux intérêts de l’Eglise. Jean d’Oxford, cha- 7 pelain du roi et nommé président par lui, somma immédiatement, avec un air irrité, les évêques de remplir leur promesse. L’archevêque de Canterbury exprima le désir d’admettre la clause d’exception. L’indignation de Henri éclata au-dessus de toutes les bornes, il menaça le primat de l’exil et de la mort; les portes de la salle voisine s’ouvrirent et tout le monde put voir un corps de chevaliers avec leurs armes hautes et l’épée nue, prêts à exécuter les ordres extrêmes que le roi pourrait leur donner dans sa colère. Le prince sortit brusquement de l’assemblée laissant tous les membres livrés aux sentiments de la crainte et de l’angoisse. Les comtes de Cornwalt et de Leicester se jetèrent aux pieds de Becket pour le conjurer de prévenir par sa soumission le massacre des évêques présents qui autrement s’ensuivrait inévitablement. “Becket, sacrifiant sa propre pensée plutôt à leurs prières qu’à leurs arguments, promit, oralement, d’observer les coutumes du royaume de bonne foi, sans aucune addition; et tous les autres évêques firent la même promesse. Toutefois il demanda au roi de l’informer en quoi consistaient les coutumes du royaume” ( 11). En effet, chose inouïe, ces coutumes royales, cause de tant de débats étaient encore officiellement inconnues. Un comité de recherche fut immédiatement nommé et le lendemain furent présentés seize articles, qui furent appelés les constitutions de Clarendon. « Les seize articles du document de Clarendon, quoique dans les détails traitent de questions diverses, dans leur ensemble veulent annuler l’indépendance croissante de l’Eglise anglaise dans ses rapports avec la couronne. La dépendance féodale de l’épiscopat fut accentuée, les élections épiscopales doivent se dérouler sous le contrôle du roi, les élus doivent avant la consécration prêter serment de fidélité, leur droit de disposer des biens de l’Eglise est limité et dans les relations de la couronne ils sont eux aussi soumis aux mêmes services et aux mêmes prestations que les vassaux laïcs. Les tribunaux ecclésiastiques doivent se conformer à la procédure judiciaire de celle des tribunaux laïcs, leur compétence est considérablement limitée, tandis que celle des tribunaux laïcs est amplifiée et étendue aux questions des dettes, au parjure, aux controverses pour les prébendes, aux questions de propriété, aux cas criminels et aux affaires civiles des clercs. Les pouvoirs d’excommu- nication des évêques à l’égard des vassaux de la couronne, des membres de la cour royale et des tribunaux sont restreints. Tout appel des tribunaux anglais est sujet à l’examen et à l’approbation du roi, y compris pour les voyages des évêques à la curie ou aux conciles. Dans les détails tout ceci n’était pas nouveau, mais était maintenant exprimé pour la première fois par des formules juridiques et élevé à force de loi avec l’adhésion écrite de l’épiscopat » (12). Des bruits couraient aussi sur les desseins occultes du prince courroucé de se rapprocher de l’antipape schismatique Victor IV. Thomas Becket resta tout d’abord ferme sur les résolutions précédentes; ensuite, poussé surtout par les prières de ses amis, par la crainte des autres évêques et par l’indulgence qu’Alexandre III conseillerait d’employer, par charité envers l’Eglise et le prochain, il consentit de renouveler les promesses mais seulement oralement refusant d’y apposer son sceau, chose qu’au contraire firent les autres prélats. “Il pouvait en effet, comme cela se faisait aussi à la curie, dissimuler quelque règle, mais non approuver avec signature et sceau des dispositions qui contrastaient ouvertement avec le droit canonique en vigueur. (…) Contre la limitation de la juridiction ecclésiastique et de la liberté des évêques Thomas Becket fit entendre sa protestation, en appelant aux principes juridiques exprimés dans le décret de Gratien. Dans les constitution de Clarendon Thomas craignait une complète féodalisation de l’Eglise anglaise, laquelle risquait de perdre peu à peu ses privilèges essentiels (fori et canonis), d’être exclue du domaine juridictionnel de l’Eglise universelle et d’éloigner ainsi le lien avec sa foi et son chef” (12). En outre ces constitutions, telles qu’elles étaient présentées dans les seize articles, n’étaient pas les “anciennes coutumes du royaume” mais contenaient beaucoup d’innovations et de lois qui allaient contre les usages et les lois de l’Eglise universelle telles qu’elles étaient appliquées et permises dans tous les états catholiques. D’une façon particulière les restrictions du for ecclésiastique et l’imposition du tribunal laïc pour la plupart des causes des clercs, et l’interdiction d’excommunication et d’appel à Rome sans le consentement du roi. Mgr Umberto Benigni fait remarquer comment la politique de Henri II fut la même que celle de Philippe le Bel: c’est-àdire qu’il imposa à l’Eglise le droit commun 8 bonne foi les coutumes du royaume et je te l’assure en parole et en vérité” (13). Après l’archevêque de Canterbury les autres jurèrent aussi sans proférer les paroles: salvo ordine nostro. En tout cas Becket ne signa pas et ne scella pas les iniques constitutions, il en accepta seulement la copie qui, selon l’usage, lui fut apportée. “Non possumus”. Le jugement à Northampton Le martyre de Saint Thomas Becket (fresque se trouvant sur le mur de la cathédrale de Canterbury, à l’endroit où le saint a été tué) qui “était la subversion radicale non seulement du droit ecclésiastique, mais aussi de toute l’armature politico-sociale de l’époque. Le droit commun pour l’Eglise a toujours été le moyen de son amoindrissement moral et matériel, social et spirituel; c’était alors l’écroulement d’une colonne qui soutenait l’édifice social”. Les paroles de Becket au roi furent les suivantes: “Si le désaccord était pour mes droits propres, certainement j’aurais tout de suite cédé à ta volonté; mais s’agissant d’affaires ecclésiastiques que Dieu me confia, cela ne doit te paraître ni indigne ni étonnant si j’ai été plus ferme, puisque tu sais combien je dois rendre raison à Dieu qui m’en demandera compte. Maintenant ayant conçu plus d’espérance dans ta prudence et dans ta bonté et ayant confiance, je consens à ton désir, je promets que j’observerai de « Sorti du concile Becket prit la route de Winchester pensif et mélancolique. A quelques pas de lui chevauchait son portecroix Alexandre Llevellen qui retenant mal sa douleur à cause des usurpations tentées par le prince, se lamentait tout haut: “Il n’y a plus de salut pour les amis de la vérité… Hélas! Cette tempête a frappé le pasteur, a dispersé les brebis. Maintenant que le chef est perdu qui se lèvera pour défendre l’Eglise? Et que reste-t-il donc à qui a perdu l’honneur et la conscience?”. Thomas lui demanda à qui s’adressaient ces paroles. “A vous - répondit le clerc - qui avez perdu honneur et conscience, donnant ainsi à vos descendants un exemple que Dieu déteste et que la conscience réprouve, quand vous étendez les mains consacrées à Dieu pour jurer l’observance de lois iniques, vous unissant aux ministres de Satan pour renverser la liberté de l’Eglise” (14). L’archevêque fut touché par ces paroles qui blesseraient quiconque n’aurait pas eu sa profonde humilité et sa vertu consommée. Il rentra en lui-même, dans son cœur se réveilla l’amour pour l’Epouse de Jésus dont les droits lui avaient été confiés pour les protéger et les garder. Il se reprocha d’avoir été trop téméraire en acceptant la charge de primat et trop faible puisqu’à cause de ses péchés l’Eglise d’Angleterre perdait la liberté et le peuple était scandalisé. L’esprit de Becket fut dans un véritable état d’agonie et il était inconsolable même de la part de ses plus chers collaborateurs. Mais puisque St Paul dit: “diligentibus Deum omnia cooperantur in bonum” (Rom. VIII, 28), même les péchés quand ils viennent plus de la fragilité humaine que d’une malice consommée sont pour les âmes qui aiment Dieu un éperon au bien et un aiguillon à la sainteté. “De toute manière l’erreur de Thomas ne vient ni de la malice ni de la pusillanimité; elle fut l’effet de la compassion, elle fut la conséquence de trompe- 9 ries. Si le Pape Alexandre conseillait vraiment de céder [ce qui n’était pas vrai du tout; il s’agissait plutôt, comme nous l’avons vu, d’une contrefaçon, n.d.a.] et d’être plus indulgent, pourquoi l’archevêque devrait-il agir contre ce conseil? (…) Son humilité même l’aurait présenté comme coupable de ne pas écouter les conseils d’Alexandre. En somme l’erreur de Becket fut l’imprudence et rien d’autre; même s’il y avait eu faute, le martyre généreux la lava dans son sang” (15). Pour l’historien Mgr Benigni, Thomas s’était soumis dans un moment de découragement mais sa conscience prit sa revanche quand “je déclarai au roi le non possumus, refusant de ratifier la constitution” (16). Arrivé à Canterbury, pour mieux condamner sa faiblesse il redoubla ses pénitences et austérités; il écrivit au Pape Alexandre en lui racontant par le menu ce qui s’était passé, se déclarant coupable de ses manquements et lui demandant son absolution et son pardon. Il s’interdit luimême l’exercice de ses fonctions, s’appliquant les peines canoniques prévues en s’abstenant de la célébration de la sainte Messe jusqu’à ce qu’il eût reçu la réponse avec l’absolution du Pape. En même temps il écrivit à Henri en rétractant son serment. « La réponse d’Alexandre ne se fit point attendre; comme il vit que la faute de Becket devait être attribuée aux fâcheuses circonstances dans lesquelles il avait été placé, plutôt qu’à la perversité et à la malice de son cœur, il consola l’archevêque, en lui mandant que le moyen le plus efficace et le plus prompt de réparer cette faute, consistait à combattre de nouveau, avec un courage d’Apôtre, contre tous ceux qui useraient d’artifice pour le surprendre, et qu’ainsi serait réparé le scandale qu’il croyait avoir donné à l’Eglise de Dieu. Le Pape ajoutait qu’il ne lui conseillait point de demeurer plus longtemps séparé du saint Autel, à raison du rang élevé qu’il occupait parmi les fidèles, et que, bien que sa conscience ne fût point liée par un serment qui avait été fait au détriment de l’Eglise, il lui donnait toutefois l’absolution de la faute qu’il croyait avoir commise, afin de dissiper ses angoisses, et lui rendre le calme et la paix du cœur » (17). Henri s’emporta toujours plus, menaça de mort son ancien ami: “Inutile de me parler de paix, tant que je vivrai on ne l’aura jamais si l’archevêque n’obtient pas du pontife l’approbation des lois de mon royaume”. Le Pontife Alexandre au contraire, après avoir reçu les lettres de Becket, dans une épître qu’il envoya à tous les évêques anglais, condamna ces lois, en les exhortant: “Si l’illustre roi des Anglais vous demandait… une chose nuisible à la liberté de l’Eglise, ne vous appliquez pas à la faire ni ne vous obligez pas en quoique ce soit à lui, surtout si c’est une chose contraire à l’Eglise Romaine. Et que si ensuite vous vous croyez obligés envers le roi en quelque chose, n’observez pas ce que vous avez promis, mais employez-vous plutôt à révoquer la promesse, et faites en sorte de vous faire pardonner par Dieu et par l’Eglise les promesses illicites” (18). Dans les mois qui suivirent, l’archevêque, comme c’était son devoir, agissait comme si les coutumes iniques n’existaient pas; avec des menaces d’interdit (19) et d’excommunication, fort des lois de l’Eglise qui pour les crimes ecclésiastiques voulaient jugement ecclésiastique, il lui rappelait le jugement interdisant aux clercs de comparaître devant les tribunaux laïcs, essayant ainsi de réparer au moins en partie l’erreur commise à Clarendon. De son côté au contraire le roi agissait de manière opposée; en appelant en justice devant les tribunaux laïcs des clercs: ils étaient mis en prison, punis, condamnés à mort avec une grande infamie pour le sacerdoce et pour l’Eglise. “S’ils étaient coupables et méritaient punition, l’archevêque était prompt à l’infliger en les privant de l’honneur et des droits sacerdotaux, et les ayant rendus infâmes, les abandonner au cas où ils feraient à nouveau un crime, au pouvoir des tribunaux du roi qui les punirait selon leur volonté” (20). Mais en octobre de cette même année, Henri II se prévalant de l’article neuf des constitutions de Clarendon cita Thomas Becket à comparaître à Northampton devant les évêques et les nobles du royaume (21), pour rendre raison de son changement et pour être jugé, également sur certaines questions secondaires concernant des sommes d’argent que les vexations de ses ennemis et du roi lui enjoignaient de payer et qui étaient utilisées, comme le firent déjà les juifs au procès de Notre-Seigneur Jésus-Christ, comme prétexte pour persécuter l’archevêque. Thomas y alla, se présenta à l’assemblée, et parla ainsi: « “J’ai cru à tort, en jurant, éviter de plus grands maux à l’Eglise: mais maintenant que Dieu, par son infinie miséricorde, illumine mon esprit, je vous ré- 10 pète ce que j’ai déjà fait savoir au roi, que je me repens de ma grave faute, je rétracte mon serment”. Alors d’une seule voix tous les évêques courtisans et vilement liés au roi déclarèrent Thomas parjure et rebelle. Il répliqua immédiatement: “Vous obéissez donc aux commandements d’un roi terrestre plutôt qu’à ceux du roi céleste et immortel? Vous comme moi devez bien savoir que le roi n’a aucun pouvoir dans l’Eglise de Dieu; et que dans les choses spirituelles ce n’est pas lui qui doit commander à celle-ci, mais celleci qui doit lui commander. En tant qu’évêque je n’entends donc pas me soumettre à la juridiction du roi, mais uniquement à celle du Pontife Romain qui seul peut me juger. J’en appelle à lui; et c’est sous sa protection que je place l’Eglise de Canterbury et ma dignité épiscopale” (22). Becket s’était présenté à la lecture de la sentence contre lui revêtu des habits pontificaux et portant lui-même sa croix accompagné du petit nombre qui lui était resté fidèle; la Sainte Croix de Jésus était l’arme qu’il opposait à l’épée et à la prévarication de l’injustice portée contre lui. Après de longs et tumultueux colloques, durant lesquels Thomas attendait, seul avec ses clercs dans une autre salle du château royal le résultat de la sentence, les nobles du royaume et les évêques se présentèrent pour la lui notifier. Le comte Robert de Leicester, ami de Becket, avec les larmes aux yeux et un profond embarras, en qualité de doyen devait en donner lecture. Il commença: « “Le roi t’enjoint de venir rendre compte de ton œuvre. Si tu te refusais, comme tu l’as promis, à écouter la sentence…”. L’archevêque qui avait écouté assis jusqu’à ce moment (puisqu’en tant que Primat d’Angleterre et donc père spirituel de tous les Anglais il ne devait pas se lever devant ses fils) se leva et l’interrompit immédiatement: « Sentence? O comte mon fils écoute-la toi-même. Tu sais bien combien j’ai été proche de mon prince et combien fidèle selon l’estime du monde… et comment dans ma promotion à l’archiépiscopat je montais sur le siège “libre et délié de tout lien séculier” comme on me dit en présence du fils du roi. Ainsi maintenant délié et libre ni je ne dois ni je ne veux répondre davantage à des choses dont on promit de ne plus me demander compte [en effet il avait été accusé sous un faux prétexte et condamné à payer des amendes au sujet de faits antérieurs à son élévation à Canterbury]. (…) Je ne tiens rien du roi comme fief ou ba- ronnie, et tout ce que tient l’Eglise, je le possède en liberté perpétuelle, non en hommage ou sujétion à une seigneurie terrestre. Ce que les rois anciens et modernes donnèrent à l’Eglise, ce fut à titre de perpétuelle aumône, libre et exempte du pouvoir séculier comme l’a confirmé et déclaré dans ses privilèges le roi lui-même. C’est pourquoi au nom de cette autorité paternelle qu’au-dessus de vous me confère la consécration archiépiscopale, je défends que vous prononciez un jugement au-dessus de nous”. “Jamais je ne désobéirai contre mon âme à un commandement d’une telle autorité, au contraire je me tais et pour ma part, je te laisse libre” répondit Robert qui pria Thomas d’attendre afin que l’on portât au roi sa réponse. “Suis-je donc prisonnier?” demanda Becket “Non! par saint Lazare” répondit le comte de Leicester. “Dans la mesure où l’âme est plus noble que le corps - reprit le saint - combien es-tu à plus forte raison tenu d’obéir à Dieu et à moi plus qu’au roi. Ni lois ni raison ne permettent que les fils jugent et condamnent leur père” » (23). Après avoir rappelé qu’il en appelait au Pape et qu’il mettait sous sa protection l’Eglise de Canterbury, Thomas Becket d’un pas décidé se dirigea vers la sortie du château au milieu des hurlements et des insultes des courtisans qui déchaînaient ainsi leur servilité. Arrivé à la porte principale il la trouva fermée. Un clerc qui l’accompagnait vit un trousseau de clefs à proximité, le saisit et la première clef introduite ouvrit la porte, ce qui apparut comme un miracle de la protection divine puisque parmi tant de clefs l’unique essayée fut la bonne. S’il avait attendu encore un moment devant cette porte les soldats l’auraient probablement tué. A l’extérieur du château royal le peuple l’attendait pour savoir le résultat de la sentence; quand il sortit il fut porté comme en triomphe jusqu’à son logement dans le monastère de saint André. Ainsi l’archevêque avait refusé la sentence; l’épiscopat s’était éloigné de lui en lui demandant de donner sa démission. Le souverain furieux décréta que lui seraient confisqués tous ses biens et le condamna à mort. L’exil en France Cette même nuit St Thomas quitta Northampton, et avec l’aide des chanoines réguliers de Sempringham, il s’enfuit vers la côte, passa la Manche et vint en France où il devait 11 La ville de Canterbury d’après un manuscrit médiéval rester en exil pendant six longues années. Sous un faux nom, pour ne pas être reconnu des sicaires de Henri II, le primat d’Angleterre rejoignit Sens où se trouvait le Pape Alexandre III pour l’entretenir de son cas. Le roi anglais avait envoyé des ambassadeurs au roi de France pour demander la vengeance et l’arrestation du fugitif; mais Louis VII au contraire prit avec joie Becket sous sa protection. Les légats eux-mêmes, parmi lesquels les évêques de Londres, d’York et de Chichester, se rendirent chez le Pape à Sens. Ils accusèrent Becket de s’être comporté imprudemment en causant par sa faute la division dans l’Eglise d’Angleterre, ils demandèrent à Alexandre III d’ordonner au primat de retourner en Angleterre et d’envoyer avec lui un légat revêtu de tous les pouvoirs pour juger du différend. Roger d’York l’accusa d’être obstinément attaché à ses idées et à ses résolutions. Le Pape se trouva dans l’incertitude de la décision: d’une part il craignait qu’en se prononçant contre Henri ce dernier ne se ralliât aux schismatiques, et d’autre part s’il ordonnait au primat de retourner dans son pays il le jetterait sans défense aux mains de ses ennemis. Alexandre dit donc qu’il ne se prononcerait pas sans avoir d’abord écouté l’archevêque de Canterbury lui-même. Après avoir rencontré le roi de France à Soissons, Thomas Becket arriva chez le Souverain Pontife, quand les ambassadeurs de Henri étaient déjà repartis. “A Sens, il exposa son cas au Pape et aux cardinaux et donna lecture des constitutions de Clarendon, dont Alexandre condamna presque les deux tiers (les nn° 1, 3, 4, 5, 8, 9, 10, 12, 15). Le Pape le délia de la promesse de les observer, qu’il avait faite en son temps oralement, repoussa aussi son offre de déposer sa charge, le confirma même dans sa dignité en reconnaissant en même temps la position primatiale de Canterbury. « Plusieurs ont remarqué que la Curie Romaine ne fut pas à la hauteur de la situation, en ne prenant pas parti de manière précise pour celui qui en Angleterre menait le même combat qu’Alexandre menait à Rome contre Frédéric. C’est l’occasion d’appliquer le “comprendre c’est pardonner”. Précisément parce que Becket menait la même lutte, il arrivait à un mauvais moment… Comme déjà Grégoire VII, ainsi Alexandre mesurait ses forces et celles des siens, et il ne les trouvait pas telles en ce dur moment de manière à pouvoir se mettre sur le dos une autre puissance ennemie et de l’associer aux représailles du César, ennemi central » (24). “Thomas Becket - par ordre du Pape résida à l’abbaye cistercienne de Pontigny, près d’Auxerre, non loin de Sens (fin novembre 1164 - novembre 1166). Vêtu comme un cistercien, il s’adonna à la prière, aux études de théologie et de droit canonique. Entre-temps Henri II séquestra les possessions ecclésiastiques de Canterbury, expulsa du pays la famille de l’archevêque, les clercs qui lui étaient restés fidèles et leurs parents” (25); il interdit à quiconque, dans son royaume, d’aider financièrement ou autrement le primat ou ceux qui lui étaient restés fidèles, établissant des peines très sévères, entre autres la prison, pour les transgresseurs. Le roi anglais écrivit plusieurs fois au Pape en essayant de faire condamner et destituer Becket, mais sans résultat. Il arriva même à menacer de soustraire lui-même et son peuple à l’obéissance à l’égard du Souverain Pontife et de passer au parti de l’antipape; à ce propos il envoya des légats à Würzburg auprès du schismatique Pascal III qui était protégé par l’empereur Frédéric Ier. L’unique concession que Henri avait pu obtenir d’Alexandre III fut de faire nommer Roger d’York légat du Saint-Siège, mais de sa juridiction fut excepté l’archidiocèse de Canterbury et toutes ses possessions. 12 Mais à peine Alexandre III fut-il de retour à Rome, voyant que les ennemis de l’Eglise au lieu d’abandonner leurs prétentions semblaient vouloir prolonger sans fin le débat entre le monarque anglais et l’archevêque, il “fit un acte qui donnait à Thomas la reconnaissance solennelle de sa droiture, et montrait solennellement la confiance de Rome en lui: le Pape nomma Thomas légat papal dans les terres de la couronne anglaise [l’ôtant à l’archevêque d’York, n.d.a.]. A cette époque les légats avaient de très grands pouvoirs; et on le vit dans le légat de Canterbury” (26). En même temps le Pape ordonna au clergé de la province du Kent d’obéir au saint pontife comme à son légat, et ordonna à tous ceux qui avaient usurpé, par ordre du roi, les terres et les rentes de l’archevêque de les restituer dans les deux mois. Becket, de son côté, notifia sa nomination aux évêques de Hereford et de Worchester en disant qu’ils en feraient part à leurs confrères. Malgré toutes les précautions prises par Henri la bulle de légation pénétra dans le royaume et fut remise à Gilbert évêque de Londres. En 1166, comme il sut que Henri II se trouvait sur ses terres en Normandie, Thomas sortit de l’abbaye de Pontigny pour se rendre à Vézelay. Là en présence d’un grand concours de peuple, le jour de la Pentecôte, il fulmina l’excommunication contre les défenseurs des constitutions de Clarendon, les détenteurs des biens séquestrés à l’Eglise de Canterbury et tous ceux qui retenaient en prison quelqu’un, clerc ou laïc, à cause de sa fidélité à l’archevêque de Canterbury. Il délia, en outre, les évêques du serment de fidélité au roi. Certaines personnes furent excommuniées nominalement pour avoir adhéré au schisme. En apprenant cette nouvelle le roi fut pris d’une furieuse attaque de colère qui le poussa à déchirer ses vêtements et à se rouler par terre. “Ce monarque altier, souverain de tant de nations, affectait de mépriser, mais redoutait en effet les armes spirituelles de sa victime. Il avait donné les ordres les plus positifs de fouiller tous ceux qui passaient la mer, de saisir toutes les lettres du Pape ou de l’archevêque, et d’infliger aux porteurs les châtiments les plus cruels et les plus ignominieux; il voulut aussi que tous les hommes libres jurassent de ne point obéir aux censures publiées par l’autorité ecclésiastique contre le roi et son royaume. Mais ses possessions continentales lui inspirèrent les plus vives alarmes. Tous les grands barons, qui haïssaient son gouvernement, se trouvaient fort disposés à saisir cette occasion de révolte, et le roi de France, son antagoniste naturel, leur eût volontiers prêté main forte contre l’ennemi de l’Eglise. Aussi, pendant quelques années, le principal objet de sa politique fut de détourner ou, au moins, de retarder le coup qu’il redoutait” (27). Ensuite Henri écrivit à tous les supérieurs cisterciens qui s’étaient réunis en chapitre général d’éloigner de Pontigny son adversaire en les menaçant que s’ils ne le faisaient pas il détruirait toutes leurs maisons et abbayes qui se trouvaient sur ses terres des deux côtés de la mer. Comme Becket eut connaissance de cette menace, pour sortir d’embarras ses hôtes, il quitta lui-même Pontigny et s’établit à Sens au monastère de Ste Colombe, menant là aussi la vie d’un religieux observant. Si St Thomas n’excommunia pas, à cette occasion, le roi lui-même, ce fut uniquement parce que c’est ce que lui inspirait sa prudence: ç’aurait été fournir à ses adversaires et au prince, si cruel et vindicatif, un prétexte à de nouveaux excès et à de nouvelles violences. Il fulmina au contraire l’excommunication à son ancien ami et protecteur Gilbert Foliot évêque de Londres (28) puisqu’il vit que justement celuici était un des plus ardents à paralyser son œuvre apostolique, et craignait qu’il puisse être cause de grand préjudice à l’Eglise: il lui ordonna de s’abstenir de la communion avec les fidèles pour ne pas infecter le troupeau du Christ. Cette excommunication eut un bon effet sur les autres évêques, dont certains rentrèrent en eux-mêmes et, conscients de leur devoir, refusèrent la communion avec les excommuniés, ordonnant au peuple d’éviter les révoltés. Avec ces évêques qui lui étaient redevenus fidèles Becket se comporta avec la tendre sollicitude du bon pasteur et du père, leur écrivant des lettres pleines de consolation et d’encouragement. Le saint archevêque de Canterbury savait montrer, selon les circonstances, la tendresse d’un père pour conserver les évêques fidèles dans l’unité de vues et de sentiments, ou bien il armait sa main des censures ecclésiastiques, pour chasser de la maison de Dieu les faux pasteurs et les mercenaires qui saccageaient les choses saintes ou les profanaient indignement. Tentatives de réconciliation entre Thomas Becket et Henri II Durant les années d’exil eurent lieu plusieurs tentatives de réconciliation entre l’archevêque et le souverain d’Angleterre. 13 Après les excommunications fulminées par Becket et bien que cela fût “interdit” en toute rigueur par les néfastes constitutions de Clarendon, Henri II permit aux évêques de faire recours même en son nom à Rome. Ce fait montre combien il était sans scrupules et utilisait tous les moyens dont il disposait (violant aussi les lois iniques qu’il avait établies lui-même et qui étaient la cause du différend) pour atteindre le but qu’il se proposait. Ce recours à l’autorité du Souverain Pontife était en effet un moyen astucieux pour diminuer l’autorité de Becket sur l’Angleterre; de fait elle fut provisoirement suspendue dans la mesure où Alexandre accepta le recours et nomma deux cardinaux légats a latere. De son côté Henri promit des aides et prodigua de l’argent à droite et à gauche pour gagner l’appui des autres états dans les tractations, afin d’obtenir du Pape la destitution de Becket ou au moins sa translation à un siège moins important. Une première rencontre entre Thomas et Henri eut lieu à Montmirail (6 janvier 1169), sous la protection du roi de France; mais elle n’aboutit à rien. Thomas, après avoir été présenté à Henri II par le roi Louis, parla ainsi à son prince: “Seigneur, je viens implorer votre clémence pour l’Eglise d’Angleterre; et je me soumets à votre arbitrage, [étant] sauf l’honneur de Dieu sur tout ce qui concerne la cause qui nous intéresse”. A ces paroles le roi bouillit de colère et lançant un œil de travers à Thomas, le couvrit d’injures en lui reprochant âprement son ingratitude, le traitant d’orgueilleux et de parjure. Puis se tournant vers le roi de France il dit: “Seigneur, observez son astuce: tout ce qui le contrariera, il le déclarera contraire au service de Dieu de manière à légitimer toutes ses usurpations. Mais pour vous convaincre que l’honneur de Dieu m’est tout aussi cher qu’à lui-même, voici l’offre que je lui fais: ce que le plus saint de ses prédécesseurs sur le siège de Canterbury fit au moindre de mes prédécesseurs sur le trône d’Angleterre, qu’il le fasse, et cela me suffit”. Il s’agissait d’une proposition astucieuse, captieuse et vague dans la bouche de ce roi. Plusieurs s’écrièrent alors que le roi s’abaissait trop, que la paix était à la portée de Thomas s’il la voulait; le roi Louis lui-même le poussait fortement à accepter. Becket qui connaissait la fausseté de Henri resta silencieux, puis dit que, certainement moins saint que ses prédécesseurs, il voulait les imiter non dans la faiblesse qu’ils pouvaient avoir eue, comme quand St Pierre renia le Christ, mais plutôt dans la fermeté, et qu’il n’y avait ni exemple ni raison qui doive le conduire à sacrifier la gloire de Dieu pour retrouver la grâce d’un homme. Henri pendant ce temps continuait à exiger l’omission de cette formule “sauf l’honneur de Dieu et le nôtre” que Thomas, comme nous l’avons vu, ne pouvait autoriser. Enfin le roi se retira irrité. Même les amis de l’archevêque furent déçus et pareillement le roi français; tous s’en repartirent en le laissant seul et sans le saluer. Tous les courtisans désapprouvaient l’archevêque et en le rencontrant lui reprochaient d’être cause des maux de l’Eglise: ils le disaient orgueilleux, obstiné, fou et têtu. De son côté, Henri au retour, en montrant sa satisfaction avait laissé échapper cette phrase: “Aujourd’hui je me suis vengé de ce traître”. Seul le peuple acclamait à son passage Becket en l’indiquant comme “celui que l’amour de deux rois n’avait pu faire renoncer à Dieu”. Cet enthousiasme populaire fit réfléchir Louis VII, qui rentré en lui-même, quelques jours après fit appeler Thomas et lui dit: “vous seul avez l’esprit de Dieu, Père, et vous seul avez vu juste. Nous avons tous été aveugles puisque nous Vous avons conseillé de sacrifier l’amour de Dieu à la volonté d’un homme. Je m’en repens, et très amèrement. Pardonnezmoi et absolvez-moi de ma faute. A Dieu et à vous j’offre mon royaume et promets qu’à compter de ce moment rien ne vous manquera jamais à vous-même et aux vôtres, tant que Dieu me laissera en cette vie”. En effet à partir de ce moment, le roi d’Angleterre eut beau implorer et menacer, la protection de Louis à l’archevêque fut inviolable. Une autre rencontre entre les deux adversaires eut lieu en novembre de cette même année (1169) à Montmartre. Elle avait été préparée par la mission de deux nouveaux légats, envoyés par le Pape auprès de Henri II avec la demande explicite de rétablir l’archevêque de Canterbury dans son Eglise, lui rendre sincèrement sa faveur, rétablir le clergé dans ses droits, honneurs et privilèges. Alexandre avait donné aux légats Gratien, neveu d’Eugène III, et Vivien archidiacre d’Orvieto, la formule exacte de la paix, leur avait fait jurer de ne pas aller audelà des termes par lui fixés et de ne pas accepter de dons du roi, et de ne pas séjourner chez lui. Dans la conférence, qui eut lieu à Domfront, Henri qui voulait toujours humilier son adversaire, exigeait que les nonces 14 rendent nulles toutes les sentences d’excommunication prononcées par le Primat tant contre les officiers du roi que contre les membres du clergé. Les légats répondirent que leur pouvoir n’allait pas jusqu’à condamner l’œuvre de l’archevêque. Le souverain anglais éclata dans ses habituels accès de colère proférant ces paroles: “Par les yeux de Dieu, je ferai autre chose”. A quoi Gratien répliqua avec dignité: “Seigneur, gardezvous bien de nous faire des menaces, nous ne les craignons point; nous sommes les envoyés du chef de l’Eglise, lequel a l’habitude de commander aux puissants et aux monarques eux-mêmes” (29). « Le prince dans la formule de réconciliation de l’archevêque, exigeait que l’on insérât cette clause: “Sauf l’honneur de sa couronne et la dignité de son royaume” et s’opposait à celle qu’au contraire réclamait le saint archevêque: “sauf l’honneur de Dieu et de l’Eglise”. Il est facile de voir quelle dut être la réponse des légats: en admettant les propositions du monarque, n’auraient-ils pas sanctionné son prétendu droit d’opprimer le clergé et même d’asservir toute l’Eglise d’Angleterre? » (30). Henri faisait toujours des promesses de paix qu’il ne maintenait pas ensuite ou qu’il reniait dans des moments de colère. Etant donné les prémisses la rencontre qui s’ensuivit entre Thomas et Henri fut tout à fait inutile: ce dernier se refusa de donner le baiser de paix à l’archevêque. Ils se quittèrent donc aussi à cette occasion sans s’être “réconciliés”. Ouvrons ici une parenthèse dans la suite des événements pour voir comment vivait en exil le saint archevêque. Au milieu de toutes les afflictions de la vie, exilé de sa patrie, avec peu de moyens de subsistance à sa disposition, lui habitué à tant de magnificence, n’avait en rien omis son austérité habituelle; ni l’espérance d’une paix, qui à peine se montrait disparaissait, n’affaiblissait son esprit. L’amour de la mortification grandissait en lui avec l’accroissement des maux qui l’opprimaient. Jamais un jour on ne le vit se reposer; la nuit il dormait rarement dans un lit (seulement à l’approche de quelques infirmités). A peine levé il allait à l’église pour assister aux offices divins et célébrer avec piété la Sainte Messe. Après les heures canoniques il entrait dans son oratoire et là il priait longuement; ses familiers entendaient les gémissements et les soupirs avec lesquels il s’offrait lui-même à Dieu comme victime pour la liberté de l’Eglise. Il mangeait tous les aliments si grossiers fussent-ils, bien qu’il fût habitué à des mets délicats. Il lisait beaucoup et instruisait ses domestiques. La nuit, quand on pensait qu’il se reposait, il veillait en priant et en se donnant la discipline; parfois il se faisait flageller par son chapelain Robert qui y était obligé par obéissance. Durant le temps de l’exil plusieurs fois dans la prière il eut la révélation de ce que serait sa fin; même un saint ermite qui vivait dans une grotte en Angleterre lui avait prophétisé qu’il verserait son sang pour la Sainte Eglise. Une “réconciliation” officielle mais fictive… Entre-temps Henri semblait tout faire pour aggraver ses torts et rendre plus difficile la réconciliation avec le saint archevêque de Canterbury. Il voulait faire couronner son fils, mais ce droit appartenait à l’archevêque de Canterbury. Thomas possédait aussi une lettre explicite du Pape Alexandre qui interdisait à tout évêque anglais d’usurper cette prérogative du siège primatial; mais étant donné les lois promulguées par le prince anglais il lui était impossible de la faire parvenir officiellement en Angleterre (en réalité Le Pape Alexandre III 15 les destinataires des lettres étaient au courant de leur contenu et pour ne pas aller contre la loi ils n’avaient pas voulu les recevoir). Mais les adversaires de Becket pour plaire au souverain et enlever les scrupules aux évêques fabriquèrent une fausse lettre du Pape qui autorisait l’archevêque d’York à couronner le prince. Cette cérémonie eut lieu le 14 juin 1170. Le Pape Alexandre avant même d’apprendre la réconciliation, arrivée en juillet, estimant fini le temps de la prudence et de la modération se décida à employer la rigueur de sa puissance spirituelle: il envoya à Becket les lettres de suspension ou d’excommunication contre les évêques qui avaient officié à ce couronnement. Il renouvela ensuite ces lettres (16 septembre) contre Roger d’York, Gilbert de Londres, Jocelin de Salisbury, puisque à leur mauvaise foi et aux faux rapports rédigés par eux on attribuait les retards continuels de la part du roi à accomplir les promesses faites. « Dès le début de l’année 1170 Henri isola complètement l’Angleterre du continent, spécialement de la curie. Les constitutions de Clarendon furent rigoureusement appliquées (…). [Le couronnement du prince, fils du roi] avait été un clair affront que le roi faisait aux interdictions réitérées que le Pape encore peu de temps avant avait renouvelées, et une violation ouverte des droits de l’antique siège métropolitain de Canterbury. Henri II qui devait craindre que Thomas ferait usage de son droit de prononcer l’interdit sur l’Angleterre ou sur une partie du royaume vint sur le continent pour traiter personnellement avec l’archevêque » (31). Cette rencontre aussi, comme les précédentes avait été préparée par une mission de légats papaux (l’archevêque de Rouen et l’évêque de Nevers), mais cette fois avait été ajoutée la menace que si la pacification n’arrivait pas à bonne fin, s’ensuivraient les probables censures d’excommunication pour le roi et d’interdit pour tout son royaume. “Le roi d’Angleterre, qui présageait les suites terribles d’un interdit prononcé contre son royaume, qui de plus avait aggravé ses torts à l’égard de Becket, en faisant sacrer son fils par l’archevêque d’York, contre le droit constant de l’Eglise de Canterbury, qui enfin avait insulté le roi de France, en négligeant de faire couronner la fille de ce prince, fiancée au jeune Henri… n’eut d’autre moyen de sortir de tant d’embarras que de faire diligence pour suivre le plan d’accommodement proposé par le Pape Alexandre” (32). Selon l’historien Fitz Stephen, quelqu’un dut conseiller à Henri de faire rentrer l’archevêque dans son royaume puisqu’il “sera plus facile de le tenir dedans que dehors”, c’est-àdire qu’il serait un adversaire que l’on pourrait plus facilement freiner et qui serait moins dangereux s’il demeurait dans le royaume. C’étaient donc, encore une fois, des motifs de convenance et de tromperie plus qu’un sincère repentir qui poussèrent finalement ce souverain à se réconcilier avec l’archevêque, comme le montrera la fin de cette histoire. Thomas Becket et Henri II se rencontrèrent à Fréteval-en-Dunois (Orléanais) le 22 juillet 1170 dans une vaste prairie aux confins de la Touraine. Le roi alla à la rencontre du primat et le salua le premier; ils parlèrent tous les deux avec cette familiarité qui avait caractérisé leurs rapports d’autrefois. “Thomas blâma modérément Henri de la voie dans laquelle il s’était engagé et lui montra les dangers qui en conséquence menaçaient sa tête de tout côté; il l’exhorta au repentir, à la réparation du mal fait et à retrouver la renommée de bon prince chrétien, lui fit connaître combien était mal ce que lui avaient conseillé ses courtisans et lui indiqua de quel côté était vraiment la justice. Henri écouta tout, montrant non seulement de la patience mais de la bienveillance; il promit de se corriger et dit vouloir réparer le mal. Alors l’archevêque lui parla du grave tort et de l’offense faite à l’Eglise de Canterbury par le couronnement de son fils dans lequel l’archevêque d’York s’était usurpé un droit qui ne lui appartenait pas, et avait agi contre la coutume et l’interdiction du Pape et qui plus est dans un autre diocèse” (33). Becket présenta donc sa demande au roi en le priant de le recevoir dans sa grâce, de lui accorder la protection royale ainsi qu’aux siens, de restituer les biens du siège de Canterbury, et de vouloir dans sa clémence réparer l’injure faite à cette Eglise à l’occasion du couronnement de son fils. En réponse il promettait son affection, respect, et tous les services qu’un archevêque pouvait accorder en Dieu à son souverain. Henri consentit à ces requêtes, ils parlèrent encore un peu ensemble et convinrent que Thomas rentrerait en Angleterre après avoir arrangé ses affaires en France. “Il pouvait sembler qu’ils se séparèrent réconciliés. Mais le roi n’avait pas donné de garanties et l’accomplissement des différentes promesses semblait presque im- 16 possible surtout parce que les évêques, après le couronnement, firent tout pour empêcher une réhabilitation de l’archevêque. Avant de retourner en Angleterre, Thomas se fit donner par Alexandre les plus vastes pouvoirs (34); mais il infligea l’excommunication aux évêques avant de se mettre en route, parce qu’il prévoyait que les autorités lui séquestreraient les documents au moment d’entrer dans le royaume britannique [chose qui d’ailleurs se produisit, n.d.a.]” (35). Le retour de l’exil de l’archevêque de Canterbury: “Mais qui donc me libérera de ce prêtre qui me donne plus de peine que le reste de mes sujets?” Avant de rentrer sur l’île Becket avait envoyé des messagers pour préparer sa venue et assister à la restitution des biens usurpés à son Eglise. Ils trouvèrent ça et là de très mauvais indices, et nombreuses étaient les choses qui faisaient présager le pire. Les fonctionnaires royaux maltraitèrent les envoyés de Thomas. L’archevêque ne se faisait pas d’illusions, il savait aller à la rencontre de mille difficultés et probablement même à la mort. Quand il salua et remercia chaleureusement de son hospitalité le roi de France il lui dit clairement: “Je vais mourir en Angleterre”. Louis VII répondit qu’il pensait lui aussi la même chose et l’invita à rester en France, où rien ne lui manquerait tant qu’il serait en vie; mais le saint évêque répondit que l’on devait accomplir la volonté de Dieu et que sept années d’absence de son Siège étaient trop pour le troupeau et pour le pasteur. Pour maintenir la paix Thomas Becket avait tout d’abord pensé ne pas publier les lettres d’excommunication des évêques, mais les trois prélats en question “sachant qu’il les portait sur lui, s’étaient assemblés à Canterbury, et avaient envoyé sur la côte Ranulf de Broc (administrateur des biens ecclésiastiques séquestrés à Canterbury, mais surtout usufruitier de ces biens…), avec un corps de soldats pour le chercher dans ses terres, et les lui arracher. Le primat en fut informé à Wissant (encore sur la côte française); et dans un moment d’irritation, il les envoya devant lui par un messager de confiance qui les fit publiquement délivrer aux évêques, en présence de leur suite” (36). Ce fut durant le mois de novembre que le saint archevêque, après avoir demandé en prêt une somme d’argent à l’évêque de Boulogne puisque celle que lui avait promise le roi n’était jamais arrivée, passa la Manche pour débarquer en Angleterre à Sandwich, port le plus proche de Canterbury. Là vinrent à sa rencontre avec les épées dégainées les chevaliers qui l’attendaient sur la côte, et ce fut seulement la présence de Jean d’Oxford, ennemi du primat mais que Henri lui avait donné comme “garde”, qui évita le pire; il apostropha ces hommes en disant: “Que faites-vous donc! Remettez vos épées dans leur fourreau; voulez-vous que le roi passe pour un traître?”. « Le jour suivant Becket partit de Sandwich pour aller à Canterbury, qui n’en est guère éloignée. Il fut reçu par tous les peuples de ce pays comme l’étaient autrefois ces grands évêques des premiers siècles, lorsqu’après avoir longtemps souffert pour toute l’Eglise un rude exil, et s’être rendu victorieux du monde et du démon par leur patience, ils s’en retournaient à leur siège chargés de mérites. Dans tous les lieux par où il passait, les pauvres, les riches, les enfants, les vieillards et toutes sortes de personnes se prosternaient à ses pieds pour recevoir sa bénédiction, chantant tous ensemble: “Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur”. L’on eût dit que c’eût été JésusChrist même qui fût venu une seconde fois, comme en triomphe, non pas à Jérusalem, mais à Canterbury, afin de mourir pour cette Eglise particulière en la personne de saint Thomas, comme il est mort véritablement une fois pour toute l’Eglise » ( 37). Arrivé à grand peine dans la cathédrale, à cause de la grande foule, après avoir prié devant le Très Saint-Sacrement, il embrassa ses chanoines avec une grande tendresse les uns après les autres, et ne put même s’empêcher de verser quelques larmes. « Il fit ensuite un beau sermon sur ces paroles de saint Paul “non habemus hic manentem civitatem”… nous n’avons point ici-bas une ville qui soit permanente, et nous cherchons celle qui doit durer éternellement. Car il était tout plein de l’éternité, et il ne pensait plus à toutes les choses de la terre, que pour en faire un sacrifice à Dieu, en les quittant pour son amour et pour celui de son Eglise » (37). Depuis que Thomas était de retour sur l’île, il avait vu se multiplier autour de lui la haine de ses ennemis, qui par des injustices et des mesquineries continuelles lui rendaient la vie amère. Ses possessions avaient 17 été à nouveau usurpées par des favoris du roi. Des méchancetés continuelles étaient commises à l’encontre des serviteurs de l’archevêque et de ceux qui travaillaient sur ses terres. Un de ses bateaux fut volé et son équipage emprisonné par de Broc. Les chars qui des camps portaient la marchandise à Canterbury étaient renversés, ses adversaires franchissaient les limites et chassaient impunément sur ses terres sans son accord, tout scélérat qui avait eu une quelconque charge à la cour s’estimait en droit de maltraiter l’archevêque ou les siens et il était désormais clair que même sa vie n’était plus en sécurité; et de cette manière toute vexation semblait être permise à l’égard de celui qui était montré comme “ennemi du roi”. Le jeune roi Henri [qui fut éduqué par Becket quand il était encore chancelier…], qui régnait sur l’île à la place de son père qui était en Normandie, refusa de recevoir Thomas Becket qui s’était rendu jusqu’à Londres pour lui rendre hommage; même ses courtisans, craignant l’influence que Becket pourrait exercer sur son ancien pupille lui enjoignirent de retourner à Canterbury l’empêchant de sortir du territoire de son diocèse. Si Thomas traversait les terres de son diocèse accompagné de cinq chevaliers pour sa sécurité personnelle il se trouvait des calomniateurs qui le rapportait à Henri qui réunissait ses armées pour lui usurper le pouvoir. “Becket voyait que désormais il ne lui restait plus beaucoup à vivre et que très vite ses ennemis se maculeraient de son sang, il se donna donc avec encore plus d’ardeur aux œuvres de piété et au soin de son troupeau. Tout son temps était divisé entre les choses de l’épiscopat, l’oraison, la lecture et la méditation; ses aumônes étaient encore plus larges que celles de ses jours tranquilles; il parcourait le diocèse prêchant, administrant la Confirmation, réconfortant. Et Dieu voulut le glorifier, puisque les lieux où il s’arrêtait pour imposer les mains aux enfants furent illustrés par des prodiges et des guérisons miraculeuses” (38). « De retour dans sa patrie, Thomas trouva [donc] que le roi “réconcilié” était plus irréconciliable que jamais. Les biens qu’il avait volés à Canterbury restaient aux mains de ses complices. (…) En somme la plus exécrable mauvaise foi avait maintenu et maintenait tous les abus par lesquels était né le conflit. L’Eglise d’Angleterre courrait les plus graves dangers dans sa vie religieuse et sociale. (…) En somme tout était à refaire. Henri dans sa luciférienne insolence, se considéra outragé par l’intrépide primat. Mais le tyran comprenait que si Thomas retournait en exil et allait à Rome, celle-ci ne se contenterait plus de promesses qui se tournaient en dérision » (39). Le lendemain (4 décembre) quelques officiers du roi arrivèrent, accompagnés des clercs des prélats excommuniés, pour demander l’absolution de leurs maîtres. Le primat leur répondit avec une grande douceur, qu’il n’était point en sa puissance de lever les censures imposées par le Souverain Pontife (il avait seulement promulgué les excommunications prescrites par le Pape); du reste il ajouta que, si les évêques excommuniés observaient ce que les canons prescrivaient en pareille circonstance, il ferait certainement tout ce qui dépendrait de lui pour obtenir d’Alexandre III leur absolution. Si les évêques de Londres et de Salisbury étaient prêts à se soumettre, l’évêque d’York refusa et prenant la tête de la révolte leur conseilla de se rendre en Normandie auprès de Henri II pour se plaindre de la conduite “despotique” du primat. « Le monarque, qui n’avait permis à Becket de retourner à son église que mû par la seule crainte de voir lancer contre son royaume un arrêt d’interdit, crut sans peine aux nouvelles calomnies articulées contre l’archevêque; et dans une grande irritation qu’avait produite la représentation des trois évêques, il s’écria et même répéta à plusieurs reprises: “Qu’il maudissait tous ceux qu’il avait honorés de son amitié, et qu’il avait comblés de biens; puisqu’aucun d’eux n’avait le courage de le défaire d’un prêtre qui lui donnait plus de peine que le reste de ses sujets! Puisque par un seul prêtre la paix n’existe plus dans mon royaume” » (40). Pour ces barons rudes et sanguinaires cette critique fut un point d’honneur, et sensibles à elle plus qu’à un ordre explicite, il s’en trouvèrent quatre qui passèrent la mer pour accomplir la volonté du roi. Ce furent Regnault Fitzurse, Guillaume de Tracy, Hugues de Morville et Richard le Breton. “J’accepte la mort au nom de Jésus et de l’Eglise” Le jour de Noël Thomas monta en chaire et son sermon se fit remarquer par l’ardeur et l’enthousiasme avec lesquels il parla. 18 En terminant il annonça que ceux qui avaient soif de son sang seraient bientôt satisfaits et il excommunia Renouf et Robert de Broc pour les outrages faits à son Eglise puisqu’au lieu d’administrer les biens ils les usurpaient, s’enrichissant depuis sept années et qu’ils injuriaient son clergé et ses moines. Cependant, les paroles prononcées par Henri en Normandie, avaient été comme une sentence de mort, et les quatre chevaliers, bien qu’ils eussent abordé à différents ports, se retrouvèrent le jour des Saints Innocents au château de Saltwood, résidence de la famille de Broc pour mettre à exécution les pensées de meurtre qu’ils avaient conçues contre le saint archevêque. Le 29 décembre Thomas s’était montré plus gai que d’habitude, et à tous ceux qui lui en demandaient la raison il avait répondu que “c’est ce qui convenait à quelqu’un qui se tenait prêt pour partir à la rencontre de son Seigneur”. Des habitants de la ville lui avaient signalé la présence dans les parages d’hommes du roi, ses ennemis, et il avait répondu: “Je me trouverai prêt à mourir; qu’ils fassent ce qu’ils veulent, je sais que je mourrai de mort violente, mais nulle part ailleurs que dans mon église”. Vers les deux heures de l’après-midi, l’archevêque ayant fini son repas s’était retiré avec certains de ses clercs dans ses appartements pour traiter les affaires ecclésiastiques quand arrivèrent les quatre chevaliers demandant de parler avec lui de la part du roi. On les fit passer et ils entrèrent dans la chambre de l’évêque et s’assirent sans saluer, en attendant que Thomas ait fini de parler avec un moine; Becket, donc, après les avoir fixés attentivement, les salua le premier. Le plus féroce des quatre, Regnault Fitzurse, parla pour les autres et prétendant en avoir eu commission de la part de Henri ordonna à Thomas d’absoudre les prélats excommuniés et d’aller rendre l’hommage de fidélité et soumission dû au fils du roi à Londres (en réalité Becket, comme nous l’avons vu, s’y était déjà rendu, mais le jeune Henri avait refusé de le recevoir). “Pour ma part - dit Thomas - quant aux évêques de Londres et de Salisbury je leur ai déjà offert l’absolution pourvu qu’ils jurent de se soumettre au jugement de l’Eglise; ils ont refusé. Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait avec la permission du roi!” (41). Il fit ensuite remarquer que le cas de l’archevêque d’York était réservé au Souverain Pontife puisque c’est lui qui avait excommunié les évêques et qu’ils devaient donc traiter avec lui. Il se montra enfin surpris que ces hommes vinssent le menacer dans sa propre maison puisque justement trois d’entre eux lui avaient spontanément juré fidélité dans ses jours de puissance. Alors Regnault Fitzurse en le menaçant lui intima de quitter ses terres avec tous les siens puisqu’il perturbait la paix. “Menace encore! Que ce soit la fin une fois pour toutes! - s’écria le saint - Je suis venu ici avec la permission et le bon plaisir du roi, il ne s’est pas passé une journée sans que résonnent autour de moi des injures et des menaces… chaque jour on m’offense dans ma réputation, dans mes hommes, dans mes possessions. Mais cela n’a pas d’importance, mon espérance repose dans le roi du ciel. Désormais je ne traverserai plus la mer, entre moi et mon Eglise il n’y aura plus de distance. Le crucifix me donnera la force. Je ne suis pas venu comme un voleur, et c’est là que me trouvera quiconque viendra à ma recherche. S’ils me veulent hors de mon église ils seront obligés de me traîner par les pieds”. Après avoir encore menacé l’archevêque de mort et l’avoir traité de traître les quatre furibonds sortirent de la pièce en criant “aux armes! aux armes!” (en effet ils avaient laissé leurs armes à l’entrée de la maison). Peu de temps après, s’étant armés de pied en cap, les chevaliers aidés d’autres soldats qu’ils avaient appelés en renfort, firent à nouveau irruption dans le palais épiscopal en hurlant: “Soldats du roi! Soldats du roi!” qui était leur cri de ralliement. Thomas se trouvait encore avec des clercs dans ses appartements: “Seigneur, seigneur, ils s’arment!” s’écria l’un d’eux: “Pourquoi une telle peur? Qu’ils s’arment donc!” répondit l’archevêque tranquillement. Les serviteurs de Becket eurent juste le temps de fermer les portes d’accès aux appartements du primat, mais ces furies avec des haches et l’aide de Robert de Broc (excommunié le jour de Noël), qui connaissait le palais, réussirent à entrer. Les cris, les pas des troupes, les hurlements des blessés, se faisaient désormais proches, les quelques moines restés avec Becket réussirent à le persuader de passer à l’église où les moines étaient déjà réunis pour chanter les Vêpres. Mais maintenant la cour, le chœur, le jardin et les couloirs étaient aux mains des ennemis. On décida donc d’utiliser un passage secret pour rejoindre la cathédrale; Thomas en dernier comme un pasteur qui ne 19 La cathédrale de Canterbury de nos jours veut pas perdre une seule brebis, presque en résistant à ses familiers qui le conduisaient, entra dans ce passage qui fut barré tant bien que mal derrière lui et parvint à l’église. Là les chanoines qui avaient déjà commencé à chanter l’office divin allèrent à sa rencontre et l’un d’eux dit: “Père viens, reste avec nous, pour qu’au moins nous puissions souffrir avec toi: nous étions inquiets de ton absence, maintenant ta présence nous réconforte”. Les personnes qui se trouvaient dans l’Eglise étaient tremblantes et terrifiées parce que dehors on entendait les cris des chevaliers; Thomas s’écria: “Je vais à leur rencontre” et à ceux qui voulaient barricader la porte de l’église il dit en les grondant: “Allez-vous-en pusillanimes, laissez… apprenez qu’il ne convient pas de transformer l’église en un château”, et voyant qu’ils hésitaient il continua: “Je vous le commande en vertu de la sainte obéissance” et il alla ouvrir lui-même en disant qu’ils laissent Dieu disposer de lui selon Sa volonté. Les chevaliers entrèrent dans l’église en brandissant leurs épées dégainées et en criant: “Où est le traître?”. Pas de réponse. Alors: “Où est l’archevêque?”. Une voix ferme, majestueuse et assurée répondit: “Me voilà, je suis l’archevêque et non le traître”. « C’était la voix de Thomas qui à l’arrivée des ennemis monta les premiers degrés de l’autel et maintenant redescendait d’un pas tranquille, sans vaciller, allant à la rencontre de ses bourreaux. Ceux-ci étaient couverts de leurs cuirasses, avec des visières basses de sorte que l’on voyait tout juste leurs yeux scintillants. En les voyant les moines s’étaient réfugiés dans le chœur; l’archevêque au contraire, poursuivant son chemin, se plaça près d’une colonne entre l’autel de la Très Sainte Vierge d’un côté et l’autel de saint Benoît de l’autre » (42). Les chevaliers vinrent à sa rencontre et le premier d’entre eux en le frappant du plat de son épée entre les épaules lui cria: “Fuis donc, ou tu es mort”. “Jamais, jamais” répéta l’intrépide prélat, qui s’il avait voulu aurait pu encore se mettre à l’abri dans la crypte qui offrait plusieurs cachettes. L’éclair de son regard en prononçant ces paroles et la majesté de l’aspect de l’archevêque furent tels que les bourreaux se retirèrent et restèrent immobiles quelques instants. “Que voulez-vous?” demanda-t-il. “Que tu meures - répondit l’un des plus féroces - tu ne peux ni ne dois vivre plus longtemps”. Impossible de décrire la sainte et joyeuse résignation avec laquelle Becket continua: “Je suis prêt à mourir au nom de JésusChrist, je recommande mon âme et la cause de l’Eglise à Dieu, à la Sainte Vierge, et aux saints patrons de ce lieu”. Et comme le Bon Pasteur il ajouta: “Au nom du Dieu toutpuissant, je te défends de toucher à aucun des membres de mon peuple, clerc ou laïc!”. Alors ils le prirent par le manteau et par les bras, essayant de le traîner hors de l’Eglise, mais inutilement puisque, aidé des quelques-uns qui étaient restés à ses côtés, il opposa une résistance invincible: “Ici faites ce que vous voulez faire” dit l’archevêque et foudroyant du regard Regnault Fitzurse: “Eloigne-toi, tu ne dois pas me toucher, puisque tu es mon homme, je t’ai tant fait de bien et c’est de cette manière que tu me récompenses?”. Celui-ci fou de rage, l’épée levée, abaissa un terrible fendant sur la tête de Thomas qui trancha presque le bras du clerc Edouard Grimm, qui étreignait le prélat, et qui était levé pour le défendre: mais le coup blessa quand-même Becket sur la tonsure. Thomas restant immobile et inclinant la tête pour l’offrir à ses bourreaux dit: “J’accepte la mort au nom de Jésus et de l’Eglise”. Un second coup qui blessa gravement Thomas à la tête, le faisant tomber sur les genoux, fut porté par Guillaume de Tracy. 20 Richard le Breton frappa le saint évêque pour la troisième fois si violemment qu’il lui trancha presque la tête, et Thomas tomba sur le degré de l’autel de saint Benoît; Hugues Mauclerc enfin avec la pointe de l’épée fit jaillir la cervelle du martyr sur le pavé en disant : “Il est mort, il ne ressuscitera plus!”. Hugues de Morville était resté à la porte de l’église pour tenir éloigné le peuple. Après avoir accompli ce crime exécrable, les chevaliers sortirent en criant “à nous soldats du roi!” et conduits par de Broc se mirent à piller les appartements du primat, volant des vases d’or et d’argent, des monnaies, des vêtements, des chapes, des livres, des ornements d’église, et tout ce qu’ils pouvaient trouver de précieux. Ils prirent même les bulles et les lettres du Pape et les écrits qu’ils trouvèrent pour les envoyer à Henri en Normandie, afin qu’il mutilât ou cachât ceux qui pouvaient s’opposer aux coutumes du royaume. Il était presque nuit quand les assassins partirent. Alors les clercs et les moines vinrent à l’endroit où gisait le corps du martyr et agenouillés fondirent en larmes; le peuple aussi, informé de la tragique nouvelle et transpercé par l’angoisse, muet, entourait, cet endroit. “L’archevêque gisait encore comme il était tombé et à part les blessures de la tête, tout entier, les yeux doucement fermés, la bouche semblant sourire… et sans l’absence de la partie supérieure du front on aurait cru qu’il se reposait durant son sommeil; le sang s’était coagulé autour du front formant comme une couronne… Les moines recueillaient dévotement ce sang. Et ils le mettaient dans un vase, se coupaient des bandes de vêtements pour les tremper dans ce qu’ils estimaient une précieuse relique” (43). Puis le vénérable corps du martyr fut mis dans le cercueil et à portes closes on célébra l’office funèbre pendant toute la nuit, par crainte que les assassins vinssent en profaner les restes. A l’aube St Thomas Becket fut enseveli avec honneur dans la crypte de la cathédrale de Canterbury où il avait couronné sa vie par le martyre (44). Epilogue Les assassins du primat de Canterbury furent très rapidement poursuivis par la vengeance céleste en mourant dans les trois ans qui suivirent leur crime. N’osant plus se présenter à la cour d’où ils étaient partis, ils se retirèrent aux frontières occidentales du royaume d’Angleterre; le déshonneur qui pesait sur leur tête faisait horreur aux gens, personne ne voulait manger ou parler avec eux. Devenus insupportables y compris à eux-mêmes ils allèrent se mettre à la merci du Pape qui leur imposa comme pénitence le pèlerinage à Jérusalem. Le voyage étant entrepris, Guillaume de Tracy mourut à Cosence d’une horrible maladie en invoquant le nouveau martyr Thomas. Les trois autres, une fois arrivés dans la cité sainte, s’enfermèrent dans une espèce de prison sur la Montagne-Noire et quand ils moururent, sur leur tombeau commun fut placée une pierre avec cette inscription: “Ici gisent les misérables qui ont martyrisé le bienheureux Thomas, archevêque de Canterbury”. “Très vite la chrétienté sut ce qui était arrivé à Canterbury, partout tout le monde fut terrifié, tandis qu’on fit remonter la responsabilité de l’assassinat au roi anglais, à l’archevêque d’York et à l’évêque de Londres, Gilbert Foliot. Le 25 janvier 1171 l’archevêque de Sens, en sa qualité de légat papal, prononça l’interdit sur les possessions de la couronne sur le continent. Henri II personnellement ébranlé par les conséquences de ses paroles de colère (et mû par le remords) envoya à Rome une délégation, qui réussit à empêcher un interdit sur l’Angleterre, mais ne put éviter que le Pape lance l’excommunication contre tous ceux qui directement ou indirectement avaient coopéré à l’assassinat de Thomas Becket. Alexandre III confirma la sentence de l’archevêque de Sens et frappa Henri d’un interdit personnel, dont il ne pourrait être absout que par des légats expressément nommés à cet effet (…). Après son retour (d’une expédition en Irlande) Henri au printemps de 1172 rencontra en Normandie les légats Pontificaux. Le 21 mai avec les évêques accusés, il prêta serment de purification, en déclarant ne pas avoir ordonné ni voulu la mort de l’archevêque de Canterbury. Pendant une année il devrait tenir à disposition 200 chevaliers pour la défense de la Terre Sainte, pendant trois années il devrait prendre la croix à Noël, l’été suivant prendre part personnellement à la croisade et se tenir en tout cas à la disposition du Pape. (…) De plus [et surtout] il laisserait libre cours aux appels adressés à Rome par des tribunaux ecclésiastiques, révoquerait les droits coutumiers hostiles à l’Eglise remis en vigueur sous son règne [pratiquement toutes les constitutions de 21 Clarendon déjà condamnées par Alexandre III, n.d.a.], restituerait à l’Eglise de Canterbury toutes ses possessions et enfin accueillerait avec des sentiments de paix les ecclésiastiques et les laïcs restés fidèles à Thomas Becket en leur restituant leurs biens. Ce n’est qu’après que Henri et son fils eurent juré ces promesses que le souverain fut absout et réconcilié avec l’Eglise. (…) Le Pape envoya en Angleterre le cardinal légat Ugo Pierleoni qui non seulement pourvut à l’occupation de plusieurs sièges épiscopaux vacants, mais arriva aussi à un compromis avec le roi sur la question controversée de la juridiction ecclésiastique. Dans le futur seules les affaires féodales et les violations forestières de la part des ecclésiastiques seraient traitées devant le juge laïc. Ce n’est donc pas le cas de trop sous-estimer le résultat global de la longue querelle; la mort de l’archevêque n’avait pas été vaine” (45). Les années suivantes de la vie de Henri II furent assombries par des guerres et des révoltes au sein de sa famille elle-même; la justice divine l’avait frappé durement. Ses fils et leur mère Eléonore se révoltèrent contre lui; le roi de France et le comte de Flandre attaquèrent ses provinces au-delà de la mer, pénétrant jusqu’en Normandie pour assiéger sa capitale. Le roi d’Ecosse avec les révoltés d’Angleterre avait envahi et saccagé le Northumberland. Henri, pour apaiser la colère de Dieu sur sa tête, se décida alors à faire en 1174 (10 juillet) un pèlerinage à Canterbury sur la tombe du martyr Thomas pour demander pardon. Vêtu de l’habit de pénitence et après avoir passé une nuit en prière, il demanda pardon à tout le chapitre de la cathédrale réuni, et reçut cinq coups de fouet de chaque moine présent (environ 80). Après cette solennelle humiliation le roi retourna à Londres et ses affaires allèrent un peu mieux. Les miracles qui eurent lieu par l’intercession de Thomas Becket étaient déjà nombreux et le peuple accourrait nombreux sur sa tombe; le roi de France lui-même avait fait un pèlerinage à Canterbury pour demander la guérison de son fils, gravement malade, et l’obtint. Le clergé anglais et beaucoup d’autres personnes qui l’avaient connu demandaient instamment au Pape que Thomas fût élevé aux honneurs des autels. Alexandre III se trouvant à Segni, le 21 février 1175 canonisa solennellement St Thomas Becket archevêque de Canterbury; très peu d’années donc après son martyre. La gloire de St Thomas n’a point cessé de croître d’âge en âge, et de croître toujours, jusqu’à l’époque où le royaume d’Angleterre arbora l’étendard de la révolte, présenté par les mains impures d’un Henri VIII (digne descendant de Henri II…) et d’un Thomas Cranmer, cet indigne successeur de si saints et si illustres Pontifes, sur le siège primatial de Canterbury. En 1537, Henri VIII, trois ans après avoir consommé le schisme avec la Rome catholique, et s’être établi, de sa propre autorité, le chef suprême de l’Eglise anglicane, en aversion pour St Thomas, qui par sa fermeté était la vive censure de son comportement, fit le procès à sa mémoire, le condamnant comme un traître et comme coupable de lèse-majesté. Il ordonna que son nom fût rayé du catalogue des Saints conservé dans l’“Eglise établie par la loi” (!?), défendit de célébrer sa fête et en fit brûler les reliques qui étaient conservées dans l’église de Canterbury. Mais les délires d’un tyran couronné, hérétique et schismatique, n’enlevèront rien à la gloire et à l’affection que l’Eglise et les fidèles catholiques nourrissaient et nourrissent aujourd’hui encore pour le saint archevêque Becket. Saint Thomas Becket, martyr de la liberté de l’Eglise Rien n’est petit au regard de Dieu, encore moins le martyre de Saint Thomas Becket, qui avec sa fête du 29 décembre brille comme une étoile avec Saint Etienne, près du berceau du divin Enfant Jésus. Mais écoutons l’illustre abbé de Solesmes dom Guéranger qui pour Becket nourrit, comme nous, une profonde et sincère admiration. « Un nouveau Martyr vient réclamer sa place auprès du berceau de l’Enfant-Dieu. Il n’appartient point au premier âge de l’Eglise; son nom n’est point écrit dans les livres du Nouveau Testament, comme ceux d’Etienne, de Jean, et des enfants de Bethléem. Néanmoins, il occupe un des premiers rangs dans cette légion de Martyrs qui n’a cessé de se recruter à chaque siècle, et qui atteste la fécondité de l’Eglise et la force immortelle dont l’a douée son divin auteur. Ce glorieux Martyr n’a pas versé son sang pour la foi; il n’a point été amené devant les païens, ou les hérétiques, pour confesser les dogmes révélés par Jésus-Christ et proclamés par l’Eglise. Des mains chrétiennes 22 l’ont immolé; un roi catholique a prononcé son arrêt de mort; il a été abandonné et maudit par le grand nombre de ses frères, dans son propre pays: comment donc est-il Martyr? Comment a-t-il mérité la palme d’Etienne? C’est qu’il a été le Martyr de la Liberté de l’Eglise. En effet, tous les fidèles de Jésus-Christ sont appelés à l’honneur du martyre, pour confesser les dogmes dont ils ont reçu l’initiation au Baptême. Les droits du Christ qui les a adoptés pour ses frères s’étendent jusque-là. Ce témoignage n’est pas exigé de tous; mais tous doivent être prêts à le rendre, sous peine de la mort éternelle dont la grâce du Sauveur les a rachetés. Un tel devoir est, à plus forte raison, imposé aux pasteurs de l’Eglise; il est la garantie de l’enseignement qu’ils donnent à leur troupeau. (…) Les pasteurs ont un devoir de plus à remplir, le devoir de confesser la Liberté de l’Eglise. Ce mot de Liberté de l’Eglise sonne mal aux oreilles des politiques. Ils y voient tout aussitôt l’annonce d’une conspiration; le monde, de son côté, y trouve un sujet de scandale, et répète les grands mots d’ambition sacerdotale; les gens timides commencent à trembler, et vous disent que tant que la foi n’est pas attaquée, rien n’est en péril. Malgré tout cela, Lieu du martyre de Becket à l’intérieur de la cathédrale de Canterbury l’Eglise place sur ses autels et associe à saint Etienne, à saint Jean, aux saints Innocents, cet archevêque anglais du XIIème siècle, égorgé dans sa Cathédrale pour la défense des droits extérieurs du sacerdoce. Elle chérit la belle maxime de saint Anselme, l’un des prédécesseurs de saint Thomas, que Dieu n’aime rien tant en ce monde que la Liberté de son Eglise; et au XIXème siècle, comme au XIIème, le Siège Apostolique s’écrie, par la bouche de Pie VIII: C’est par l’institution même de Dieu que l’Eglise, épouse sans tache de l’Agneau immaculé Jésus-Christ, est libre, et qu’elle n’est soumise à aucune puissance terrestre (46). Or, cette Liberté sacrée consiste en la complète indépendance de l’Eglise à l’égard de toute puissance séculière, dans le ministère de la Parole, qu’elle doit pouvoir prêcher, comme parle l’Apôtre, à temps et à contre-temps, à toute espèce de personnes, sans distinction de nations, de races, d’âge, ni de sexe; dans l’administration de ses Sacrements, auxquels elle doit appeler tous les hommes sans exception, pour les sauver tous; dans la pratique, sans contrôle étranger, des conseils aussi bien que des préceptes évangéliques; dans les relations, dégagées de toute entrave, entre les divers degrés de sa divine hiérarchie; dans la publication et l’application des ordonnances de sa discipline; dans le maintien et le développement des institutions qu’elle a créées; dans la conservation et l’administration de son patrimoine temporel; enfin dans la défense des privilèges que l’autorité séculière ellemême lui a reconnus, pour assurer l’aisance et la considération de son ministère de paix et de charité sur les peuples. Telle est la Liberté de l’Eglise: et qui ne voit qu’elle est le boulevard du sanctuaire lui-même; que toute atteinte qui lui serait portée peut mettre à découvert la hiérarchie, et jusqu’au dogme lui-même? Le Pasteur doit donc la défendre d’office, cette sainte Liberté: il ne doit ni fuir, comme le mercenaire; ni se taire, comme ces chiens muets qui ne savent pas aboyer, dont parle Isaïe (LVI, 10). Il est la sentinelle d’Israël; il ne doit pas attendre que l’ennemi soit entré dans la place pour jeter le cri d’alarme, et pour offrir ses mains aux chaînes, et sa tête au glaive. Le devoir de donner sa vie pour son troupeau commence pour lui du moment où l’ennemi assiège ces postes avancés, dont la franchise assure le repos de la 23 cité tout entière » (47). Citant Bossuet dom Guéranger poursuit: « “C’est une loi établie que l’Eglise ne peut jouir d’aucun avantage qui ne lui coûte la mort de ses enfants, et que, pour affermir ses droits, il faut qu’elle répande du sang. Son Epoux l’a rachetée par le sang qu’il a versé pour elle, et il veut qu’elle achète par un prix semblable les grâces qu’il lui accorde. C’est par le sang des Martyrs qu’elle a étendu ses conquêtes bien loin au-delà de l’Empire Romain; son sang lui a procuré et la paix dont elle a joui sous les empereurs chrétiens, et la victoire qu’elle a remportée sur les empereurs infidèles. Il paraît donc qu’elle devait du sang à l’affermissement de son autorité, comme elle en avait donné à l’établissement de sa doctrine; et ainsi la discipline, aussi bien que la foi de l’Eglise, a dû avoir ses Martyrs. (…) Thomas ne cède pas à l’iniquité, sous prétexte qu’elle est armée et soutenue d’une main royale; au contraire, lui voyant prendre son cours d’un lieu éminent, d’où elle peut se répandre avec plus de force, il se croit plus obligé de s’élever contre, comme une digue que l’on élève à mesure que l’on voit les ondes enflées”. Mais, dans cette lutte, le Pasteur périra peut-être? Et, sans doute, il pourra obtenir cet insigne honneur. Dans sa lutte contre le monde, dans cette victoire que le Christ a remportée pour nous, il a versé son sang, il est mort sur une croix; et les Martyrs sont morts aussi; mais l’Eglise, arrosée du sang de Jésus-Christ, cimentée par le sang des Martyrs, peut-elle se passer toujours de ce bain salutaire qui ranime sa vigueur, et forme sa pourpre royale? (…) » (47). Et l’évêque de Meaux continue: “Chrétiens, soyez attentifs: s’il y eut jamais un martyre qui ressemblât parfaitement à un sacrifice, c’est celui de Thomas Becket. L’Evêque est à l’église avec son clergé… il ne faut pas chercher bien loin la victime: le saint Pontife est préparé, et c’est la victime que Dieu a choisie. Ainsi tout est prêt pour le sacrifice, et je vois entrer dans l’église ceux qui doivent donner le coup. Le saint homme va au-devant d’eux, à l’imitation de Jésus-Christ; et pour imiter en tout ce divin modèle, il défend à son clergé toute résistance, et se contente de demander sûreté pour les siens. Si c’est moi que vous cherchez, laissez, dit Jésus, retirer ceux-ci. Ces choses étant accomplies, et l’heure du sacrifice étant arrivée, voyez comme saint Thomas en commence la cérémonie. Victime et Pontife tout ensemble, il présente sa tête et fait sa prière. Voici les vœux solennels et les paroles mystiques de ce sacrifice: Et ego pro Deo mori paratus sum, et pro assertione justitiæ, et pro Ecclesiæ libertate; dummodo effusione sanguinis mei pacem et libertatem consequatur. Je suis prêt à mourir, dit-il, pour la cause de Dieu et de son Eglise; et toute la grâce que je demande, c’est que mon sang lui rende la paix et la liberté qu’on veut lui ravir” (48). Cette paix et cette liberté pour l’Eglise, Saint Thomas Becket l’a obtenue pour son temps par son sacrifice. Notes 1) ABBE PIETRO BALAN, Storia di San Tommaso di Cantorbery e dei suoi tempi, Tip. Dell’Imm. Concezione, Modena 1867, vol. I pp. 141-142. 2) H UBERT J EDIN , Storia della Chiesa, vol. V/1 Civitas medievale, Jaca Book, 1975, pp. 99-100. 3) A cette occasion Roger d’York dressa le roi contre St Thomas Becket en lui suggérant de “rappeler à la vie les droits antiques, de remettre en vigueur les coutumes des ancêtres et en lui suggérant qu’il enlèverait ainsi à l’archevêque tout moyen d’indulgence envers ses offenseurs; que ce serait imprudent de leur laisser la puissance, et que la monarchie ne serait pas entièrement en sécurité, puisque l’archevêque espérait faire périr la puissance royale; le roi penserait à ses fils; s’il laissait faire, après sa mort ce ne serait pas le jeune roi Henri qui lui succèderait, mais celui que le clergé voudrait élire; lui-même ne règnerait que quand cela plaîrait à Thomas” (BALAN, op. cit., p. 159). Paroles prononcées hélas par un membre influent du clergé qui se rangeait du mauvais côté poussé par l’envie et par l’ambition. 4) BALAN, op. cit., pp. 163-164. 5) La clausule [étant] sauf notre ordre était la coutume antique des évêques qui avaient toujours juré fidélité au roi sous cette forme; elle indiquait la fidélité dans les choses temporelles mais l’autonomie dans les choses spirituelles. Dans ces dernières le prince n’avait pas le droit de s’ingérer et le clergé ne pouvait jurer quelque chose qui serait allé contre la foi ou les droits de l’Eglise, qui, en tant que société parfaite dans l’ordre spirituel, est supérieure à l’état. 6) BALAN, op. cit., p. 167. 7) Cf. BALAN, op. cit., pp. 166-169. 8) BALAN, op. cit., p. 171. 9) ABBÉ ROBERT, Histoire de Saint Thomas Becket archevêque de Cantorbéry et martyr, Bardou frères, Limoges 1844, p. 150. D’après Balan cette rencontre eut lieu à Oxford; c’est Roger de Pontigny qui parle de Woodstock. 10) Ibidem. 11) Ibidem, pp. 152-153. 12) HUBERT JEDIN, op. cit., p. 101. 13) BALAN, op. cit., p. 185. 14) Ibidem, pp. 190-191. 15) Ibidem, p. 192. 16) MGR UMBERTO BENIGNI, Storia sociale della Chiesa, vol. V, La crisi medievale, Francesco Vallardi, Milano 1933, p. 236. 17) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 166-167. 18) Epître CCXXXIX du Pape Alexandre, citée 24 par BALAN, op. cit., pp. 194-195. 19) L’interdit est une censure ecclésiastique qui consiste en la privation de certains sacrements pour tous les fidèles, ou bien par laquelle on interdit dans un territoire déterminé la célébration de tout rite. 20) BALAN, op. cit., p. 211. 21) Avant de l’appeler en jugement à Northampton Henri avait cité Becket à comparaître dans son palais. L’archevêque ne se laissa pas intimider et envoya une personne de sa confiance répondre à sa place puisqu’il ne voulait pas donner scandale en acceptant de comparaître devant des juges laïcs. C’était l’un des principaux points de la querelle. 22) F EDERICO B ALSIMELLI , Compendio di storia della Chiesa, Società di S. Giovanni, Desclée, Lefebvre e C, Roma 1900. 23) BALAN, op. cit., pp. 253-257. 24) MGR U. BENIGNI, op. cit., p. 236. 25) HUBERT JEDIN, op. cit., p. 102. Il y eut environ quatre cents personnes chassées du royaume sans égard à l’âge, au sexe ou à la condition. A ces pauvres gens on fit aussi jurer d’aller chez l’archevêque et de lui raconter leurs souffrances. C’est ainsi que sa cellule à Pontigny était tous les jours assiégée par ces proscrits et l’âme noble de Becket était affligée de leurs peines. La charité du roi de France, du Pape et de la reine de Sicile vint en aide à ces personnes. Inutile de dire que toutes ces personnes exilées sur les terres de France constituaient la preuve la plus évidente du déshonneur et de la cruauté du roi Henri et donnaient raison à Thomas qui lui résistait. 26) MGR U. BENIGNI, op. cit., pp. 236-237. 27) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 259. 28) Rappelons-nous que c’était justement Becket qui l’avait choisi et proposé comme évêque de Londres et confesseur du roi. Un contemporain de Becket, l’évêque d’Auxerre, Guillaume, avait écrit au Pape en l’invitant à confirmer l’excommunication de Gilbert Foliot en le définissant: “Auteur de la division, cause de la discorde, cause du scandale, loup jusqu’alors caché”. Voir la partie précédente de cet article in Sodalitium n° 45 p. 71. 29) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 292 et ss. BALAN, op. cit., Vol. II pp. 204-205. 30) ABBÉ ROBERT, op. cit., p. 293. 31) HUBERT JEDIN, op. cit., p. 103. Au début de cette année Henri promulgua une loi très injuste qui ordonnait que les ports fussent gardés afin qu’en aucune manière des lettres d’interdit ne puissent être portées. Des peines très sévères devaient s’appliquer aux porteurs (amputation des pieds, perte des yeux pour un frère ou un clerc, pendaison pour un laïc). Les Anglais qui pour des motifs d’étude étaient hors de l’île devaient rentrer au plus vite, sous peine de la perte des bénéfices ou de l’exil perpétuel. En outre il contraignit tous les Anglais, de plus de quinze ans à jurer qu’ils ne recevraient pas de lettres du Pape ni de l’archevêque et qu’ils n’obéiraient pas à leurs messagers. On dit qu’en cette occasion de très nombreux sujets laïcs et même des évêques refusèrent de prêter ce serment, ce qui prouve que la longue résistance de Thomas Becket n’avait pas été vaine mais avait donné du courage à plus d’un qui n’en pouvait plus de la cruauté du souverain. (Cf. BALAN, op. cit., vol. II p. 212). 32) ABBÉ ROBERT, op. cit., p. 304. 33) BALAN, op. cit., vol. II pp. 262-263. 34) Ces vastes pouvoirs comprenaient de plus vastes possibilités de prescrire les excommunications et l’interdit pour le primat d’Angleterre et la soumission du siège d’York à celui de Canterbury pour éviter de nouvelles usurpations de la part de Roger. 35) HUBERT JEDIN, op. cit., pp. 103-104. 36) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 307-308. 37) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 312-313. 38) BALAN, op. cit., vol. II p. 297. 39) MGR U. BENIGNI, op. cit., p. 237. 40) ABBÉ ROBERT, op. cit., pp. 314-315. 41) Pour tout ce qui concerne le martyre de Becket cf. ABBÉ ROBERT, op. cit., 316 et ss., et BALAN, op. cit., vol. II p. 303 et ss. 42) BALAN, op. cit., vol. II p. 312. 43) BALAN, op. cit., vol. II pp. 315-316. 44) Quand les moines préparèrent le corps du saint pour la sépulture ils furent surpris de trouver sous les livrées de l’archevêque le froc monacal de saint Benoît et sur la peau nue le très rêche cilice que Becket portait depuis son ordination épiscopale. 45) HUBERT JEDIN, op. cit., pp. 105-106. 46) PIE VIII, Litteræ Apostolicæ ad episcopos provinciæ Rhenanæ, citée par dom Guéranger. 47) D OM G UÉRANGER , L’année Liturgique, Le temps de Noël, tome I, Oudin, Paris 1929, pp. 389-392. 48) Panégyrique de saint Thomas Becket prononcé par Bossuet et cité par DOM GUÉRANGER, op. cit., pp. 392-396. La question juive ASPECTS CONTEMPORAINS DU JUDAISME: MONDIALISME, PLOUTOCRATIE, FRANC-MAÇONNERIE Par M. l’abbé Curzio Nitoglia Le Judaïsme antichrétien: cause première des maux d’aujourd’hui C omme l’a magistralement compris le professeur Andrea Dalle Donne: «…l’alternative de fond est… celle entre le thomisme originaire et l’humanisme gnostico-immanentiste. Mais ce combat est spirituellement participant de celui qui se révèle vraiment le dernier: c’est-à-dire celui entre l’unique christianisme de toujours et l’antichristianisme plus radical» (1). Panthéisme juif contre créationnisme chrétien Edmondo Fleg résume bien la conception juive de Dieu et du cosmos: «Je suis juif parce que pour Israël le monde n’est pas fini, ce sont les hommes qui le finissent; je suis juif parce que pour Israël l’homme n’est pas créé, ce sont les hommes qui le créent» (2). Cette déclaration n’est cependant pas une opinion personnelle de Fleg, mais met en cause le Judaïsme antichrétien dans son ensemble, puisque «la spiritualité juive …est au fond une condition de l’être dans lequel… entre la communion avec Dieu et la communion avec le monde la seconde est préférée. Mais… qu’est-ce que la communion avec le monde sinon la communion avec Dieu?» (3). L’Absolu et le monde font, pour le Judaïsme, une seule chose; le Judaïsme nie l’authentique création en tant qu’elle refuse précisément l’unique vrai Dieu, personnel, distinct du monde et transcendant. L’Ancien Testament vit dans l’adoration de “Celui qui est”, l’Etre lui-même subsistant. Les citations ci-dessus rapportées offrent la preuve évidente et apodictique que le Judaïsme antichrétien ou talmudique a rompu avec l’Ancien Testament, pour imposer à sa place le pharisaïsme gnostico-panthéiste de la Cabale impure et du Talmud, déformation ésotérique de la dogmatique et de la morale. Déjà le prophète Jérémie s’exclamait: «Comment dites-vous: “Nous sommes sages et la loi de Dieu est avec nous?” Il a vraiment gravé le mensonge, le style menteur des scribes» (4). Si pour Orio Nardi la Cabale impure est “l’aberration de la vraie doctrine biblique” (5), pour Eugenio Zolli, l’ex-grand rabbin de Rome converti au Catholicisme, «l’opposition entre juifs et chrétiens se réduit à une interprétation différente de la Bible» (6). Israël, comme on peut le lire dans les Livres saints, tendait à se former un «Dieu» à son image et à sa ressemblance, reniant le Dieu personnel et transcendant, distinct du monde, se façonnait une morale utile (talmudique) et une vérité contingente (cabalistique): «Notre bouche et notre cœur ne se mirent jamais d’accord pour adorer le même Dieu: celle-là applaudit toujours au Ciel, celuici fut toujours idolâtre de l’or et de l’usure» (7). «Le Judaïsme n’est pas ce que la Torah a promulgué, …même si c’est ce que le peuple juif aujourd’hui pense de la Torah… Le système judaïque s’identifie au pharisaïsme… Dans le judaïsme il n’est rien resté de la prédication des Prophètes; y domine incontestée, au contraire, l’orientation créée par les pharisiens» (8). Jésus et le judaïsme pharisaïque Notre-Seigneur Jésus-Christ, la Bonté Affiche répréhensible antijuive. (Tirée de Elena Romero Castello, “Gli ebrei e l’Europa, 2000 anni di storia”, Fenice 2000, p. 100) infinie, a accusé les juifs antichrétiens en les appelant fils de l’enfer (9), et en leur disant qu’ils avaient comme père le diable (10). Les Apôtres de leur côté s’expriment de manière analogue. St Paul soutient que les Juifs «ont tué le Seigneur Jésus et les Prophètes», qu’ils «ne plaisent point à Dieu et qu’ils sont devenus les ennemis de tous les hommes» (11), St Pierre les accuse (tous, chefs et peuple, excepté les rares qui ont accepté le Christ) d’avoir crucifié Jésus (12) et St Jean condamne les juifs antichrétiens comme la “Synagogue de Satan” (13). Contre quiconque soutient que le Judaïsme actuel est fils de l’Ancien Testament, il est facile de démontrer le contraire, en citant justement l’Ancien Testament, à commencer par Moïse et les Prophètes (14) jusqu’à Osée (15), où le Seigneur accuse de méchanceté extrême la majorité du peuple juif plusieurs siècles avant l’avènement du Christ. NotreSeigneur Lui-même dit aux pharisiens: «Ne pensez pas que ce soit moi qui doive vous accuser devant le Père: celui qui vous accuse, c’est Moïse.… Car si vous croyiez à Moïse, vous croiriez sans doute à moi aussi, parce que c’est de moi qu’il a écrit» (16). Moïse, donc, (comme Adam et les Patriarches) était chrétien puisqu’il croyait au Messie à venir, tandis que le Judaïsme ac- 26 tuel est antichrétien puisqu’il nie la divinité du Christ. Le juif Pergola, converti au Christianisme, a écrit admirablement: «Il faut… distinguer entre le Judaïsme prophétique qui servit de préparation au Christianisme et le Judaïsme pharisaïque, professé toujours par les juifs, qui peut se dire Judaïsme en tant qu’il peut tirer son nom du traître Judas Iscariote» (17). Le drame du peuple élu par Dieu pour accueillir le Messie et pour le faire connaître et aimer du monde entier, est celui d’avoir substitué la foi en Dieu à la foi dans le monde, d’avoir préféré le veau d’or à l’Agneau sans tache, le “dieu argent” au Dieu Trine. Les frères les plus séparés et la radicalité de l’antichristianisme judaïque Il faut préciser, comme fait le professeur Dalle Donne, qu’il est préférable d’appeler le Judaïsme actuel un système plutôt qu’une religion, dans la mesure où il s’est établi dans l’histoire au moyen d’une fausse tradition (ou contre-tradition) gnostique panthéistico-cabalistique, tendant à étouffer l’unique vraie Tradition divine (Ancien et Nouveau Testament), et en se présentant comme son alternative ésotérico-initiatique. Ce système a pour objectif de corrompre la droite Tradition ou religion, par une tradition impure ou “gnose”, transmise par une voie secrète et réservée aux seuls initiés. «Cette “tradition” très ancienne, débouche même dans les antiques mystères du paganisme, infectée de mythes, magie, fantaisies et pesantes aberrations morales… qui en révèlent l’origine… satanique» (18). La connaissance alternative à la Révélation divine (ou gnose) s’est développée de manière parasitaire au sein du peuple élu et a explosé à l’avènement du Messie quand il en a décidé le meurtre. Jésus prêchait la distinction entre Créateur et créature, le Royaume des Cieux à obtenir par la foi et les bonnes œuvres, la conversion du péché, l’ascèse et la pratique des vertus; la «gnose», au contraire, prêche l’identité entre Dieu et le monde, le paradis dans l’homme lui-même, le salut au moyen de la seule connaissance. Le Judaïsme antichrétien est donc la somme la plus raffinée et la plus complète de la gnose impure, qui tend à déformer la Révélation. C’est une contre-religion et comme nous le disions plus haut, il est définissable comme un systè- me plutôt que comme une Religion (qui a la tâche de réunir, «religare» l’homme à Dieu). Il est bon à ce point d’ajouter plus d’éclaircissements sur l’intensité de la haine avec laquelle le système judaïque antichrétien persécute Jésus et Sa Sainte Eglise (19). «Celui qui… ne joue pas au Christianisme, dans la mesure où il y croit sérieusement, est théologiquement obligé de reconnaître et de dénoncer… que les juifs antichrétiens, c’est-àdire la majorité, sont nos frères les plus séparés: séparés de Dieu le Père, de Dieu le Fils, de Dieu le Saint-Esprit» (20). La séparation et l’inimitié en arrivent à mériter l’accusation de fond: «Préférant le Veau d’or à Yahvé, Barabbas au Christ… et en pervertissant dans un sens matérialiste sa très haute vocation spirituelle, l’Israël matérialiste s’obstine dans un péché immense qui lui est encore aujourd’hui reproché par le Très Haut: “Mon peuple a fait deux maux: ils M’ont abandonné, moi, source d’eau vive et ils se sont creusé des citernes… qui ne peuvent retenir les eaux” (21)» (22). Et contre les Juifs, définis par Mariani “fils du diable” (23), terrible est l’accusation de St Justin Martyr: «Maintenant encore, en vérité, votre main est levée pour le mal; car après avoir tué le Christ, vous n’en avez même pas le repentir; mais vous nous haïssez et vous nous mettez à mort chaque fois que vous en obtenez le pouvoir...» (24). La Tradition authentique et la contre-tradition impure Dieu parlait à Adam comme il parlait avec les anges, et il lui révélait les mystères de sa vie intime, spécialement l’Unité et la Trinité de Dieu et l’Incarnation du Verbe (25). Lucifer, par envie et jalousie, fit tomber Adam et Eve dans le péché, et ils perdirent ainsi la grâce sanctifiante et les dons préternaturels. Mais Dieu, dans son infinie bonté, accepta leur pénitence et pardonna leur péché. Et voici qu’Adam transmit oralement à ses fils la Révélation reçue de Dieu, ou tradition orale vraie, parvenue ainsi jusqu’aux Patriarches (1900 av. J.-C.) et à Moïse, qui reçut à son tour une Révélation qu’il mit par écrit dans le Pentateuque (tradition écrite). Moïse consigna cette Révélation écrite et orale à Josué et aux soixante-dix sages, qu’il s’était associés dans le gouvernement et ce fut ainsi jusqu’aux aux Prophètes et à la venue du Verbe. A partir de ce moment Notre-Seigneur Jésus-Christ confia la tradi- 27 tion orale vraie à ses Apôtres et spécialement à leur chef Pierre, et il en sera ainsi jusqu’à la fin du monde par le moyen du Pape (successeur de Pierre) et des Evêques (successeurs des Apôtres), unis à lui. Jésus, par le moyen du Saint-Esprit, confia aussi une Révélation qui, mise par écrit dans le Nouveau Testament, nous a été consignée et transmise par le Magistère de l’Eglise romaine (tradition écrite). Le diable a toujours tenté de faire surgir entre les hommes une connaissance impure ou «gnose», qui est une fausse tradition ou contre-tradition, pour tenter de corrompre la droite ou vraie tradition. Celle que Dieu nous a transmise par Adam jusqu’à aujourd’hui, au moyen de la vraie Synagogue mosaïque de l’Ancien Testament d’abord, et de l’Eglise romaine de la Nouvelle et Eternelle Alliance, ensuite. Nous avons donc une gnose juive, opposée au Mosaïsme, et une gnose soi-disant “chrétienne” qui s’oppose à la prédication ou Tradition apostolique et au Magistère de l’Eglise. Cette gnose soi-disant «chrétienne», mais en réalité antichrétienne et antichristique, n’est rien d’autre qu’une tradition impure et mensongère, alternative à la révélation divine, une tradition hétérodoxe qui tend à pervertir la Révélation divine avec des suppositions d’ésotérisme, magie, symbolisme, initiations… La gnose hébraïque, pénétra au sein de la vraie Synagogue mosaïque la transformant en Synagogue talmudique et la gnose soi-disant “chrétienne” a toujours essayé de s’infiltrer au sein de l’Eglise, avec la vaine et orgueilleuse prétention d’être une “révélation” secrète, ésotérique, réservée aux esprits plus élevés (ou plus gonflés d’orgueil). Elle prétend carrément être plus parfaite que celle qui nous est transmise par la prédication apostolique! La réaction de l’Eglise à la “gnose” fut immédiate; nous connaissons l’affaire de Simon le Magicien, contemporain de St Pierre (26). La gnose soi-disant “chrétienne” n’est donc rien d’autre qu’une secte cancéreuse, qui essaye de s’infiltrer au cœur du Christianisme, pour le renverser diaboliquement. Les francsmaçons et les modernistes (fils du Judaïsme antichrétien) sont les actuels initiés ou “gnostiques” qui essayent de s’insinuer à l’intérieur de l’Eglise et de la judaïser par l’intermédiaire de la Cabale et de l’ésotérisme. Psychologie juive «Rentre dans la psychologie juive… le fait de tirer avantage de n’importe quelle situation» (27). La génialité juive est capable talmudiquement - de construire un “ennemi utile” (28) pour s’ériger en victime et obtenir ainsi d’énormes avantages, quitte ensuite à abattre le faux ennemi suscité “ad hoc”, une fois terminée la fonction qui lui avait été assignée, c’est-à-dire celle de support au succès mondial du peuple “persécuté”. La tactique enseignée par le Talmud au juif est celle d’agir avec prudence et circonspection, s’érigeant toujours en victime innocente pour susciter sympathie et commisération, et pour s’emparer ainsi des leviers de commande de la société, et pouvoir ensuite la gouverner derrière les coulisses. On peut dire que par certains côtés le Judaïsme antichrétien se sert, en fait de morale (29), de la doctrine et surtout de la pratique de la double vérité, pour des buts tactiques précis, pragmatico-utilitaristes. Le Judaïsme, au moyen de la Maçonnerie, prêche pour les goyim la démocratie, l’égalité, la liberté, la fraternité, le pluralisme, le non-exclusivisme, tandis qu’il s’applique à lui bien d’autres principes: l’exclusivisme racial et raciste, l’impérialisme affamé de domination universelle, l’isolement jaloux à l’intérieur des états. Mais quelle est la fin tactique de cette duplicité talmudico-pharisaïque? Simplement la domination d’Israël sur le monde entier. En effet, alors que la “morale interne” du Judaïsme est destinée à renforcer et à maintenir intègre et solide le Judaïsme, l’autre “morale”, la morale “externe” (ou pour les goyim), a comme fin d’aplanir la voie à la domination juive du monde. La philosophie humaniste, illuministe et idéaliste (de dérivation gnostique, en tant que doctrine philosophique ésotérique dérivée de la philosophie ésotérique et occulte: la gnose justement) est l’antécédent du Nouvel Ordre Mondial. Israël s’est servi des concepts de «liberté, égalité, fraternité» pour arriver lentement à l’hégémonie sur les peuples chrétiens qui, à partir de l’Humanisme néopaïen, avaient commencé un processus de déchristianisation. Cette hégémonie, dans nos bien tristes temps, est arrivée à appliquer la psychanalyse freudienne, de dérivation cabalistique (30), dans le domaine juridico-pénal, pour enlever à l’Etat, autrefois chrétien, même le droit à la légitime défense. Les théories psychanalytiques en effet, ont imprégné l’école, la musique, la littérature, les mass media (et parmi eux, en parti- 28 culier, la télévision, souvent instrument de véritable lavage de cerveau, surtout pour les jeunes), ont rendu les personnes hypersensibles, émotives, irrationnelles, incapables de dominer les instincts et par conséquent toujours prêtes à justifier le coupable, et tout à fait incapables d’assumer leurs propres responsabilités (31). Le droit de l’individu, des parents, de l’Etat à se défendre a été piétiné à l’époque actuelle. Le Judaïsme en effet sait que tant que l’homme, la famille, la cité conserveront, ne serait-ce qu’une ombre, d’ordre (qui autrefois existait dans les Etats traditionnels et chrétiens, spécialement dans la Chrétienté médiévale) il n’y aura aucune certitude de victoire pour la Révolution. En effet elle est la destruction de l’ordre, c’est-à-dire de la soumission de l’intelligence à la Vérité, de la volonté au Bien, des sens à l’intelligence et à la volonté. Si l’homme est ordonné à Dieu, et à Sa Loi immuable, la Révolution ne pourra porter le désordre permanent et constant dans la société, mais sera écrasée par celui qui, maître de lui-même parce qu’il s’est fait esclave de Dieu (32), n’admet aucun désordre ou passion déréglée tendant à l’éloigner de Lui. Mais Dieu seul sait combien notre époque, désormais presque définitivement cabalisée, est dominée par le désordre, par l’hégémonie des passions et des instincts sur l’intelligence et la volonté, par le plaisir sur la patience dans la douleur, par la richesse désordonnée sur l’amour de la frugalité, de l’orgueil sur le mépris réaliste d’eux-mêmes. Eh bien à la source de ce désordre nous retrouvons les théories qui dans le cours des siècles naquirent de la «gnose», ou fausse tradition parasitaire, laquelle a toujours visé à se substituer à la vraie Religion, tout comme Satan, son inspirateur direct, a toujours cherché à se faire adorer comme Dieu. Le diable, inspirateur du Judaïsme antichrétien, selon les paroles de Jésus-Christ, a réussi à faire pénétrer dans nos familles et dans la société la plus pernicieuse corruption spirituelle et morale, jusqu’à endormir le sens éthique de l’homme moderne, rendu engourdi et incapable d’une réaction saine et équilibrée au mal qui l’assaille. Celui qui face à une telle dégradation penserait ensuite que la situation actuelle puisse être assainie par la victoire d’une fausse droite politique, se trompe et prend ses désirs pour la réalité. La «polis» est formée des familles et des individus et tant que l’individu n’aura pas retrouvé l’ordre avec Dieu et avec lui-même, la «polis» sera en désordre ou sens dessus dessous: révolutionnée et révolutionnaire. Il est vrai que Pie XII a enseigné que «de la forme donnée à la société… dépend et s’infiltre le bien ou le mal des âmes (33)», mais Pie XII savait aussi que pour mettre l’ordre dans la société, pour donner une bonne forme à la société, composée d’individus qui s’associent en vue d’un bien commun, il faut avant tout que l’individu soit en ordre et puisse ainsi porter cet ordre dans la société elle-même (“nemo dat quod non habet”). L’éthique naturelle et chrétienne, ou saine philosophie morale, enseigne que l’individu vient d’abord et ensuite la société, c’est pourquoi l’affirmation “politique d’abord” est très ambiguë et dangereuse, comme il est tout aussi dangereux d’affirmer que le chrétien ne doit pas s’occuper de politique (traditionnellement entendue comme science morale appliquée à la société). La politique jusqu’à Machiavel était une science pratique qui se servait de la connaissance pour agir droitement, c’est-à-dire qui avait comme principes la loi naturelle et la loi divine; principes qu’elle appliquait ensuite aux familles et à la cité, puisque chacun pouvait obtenir un certain bien-être temporel, subordonné toujours au spirituel. Dieu en effet a voulu créer l’homme et l’élever à l’ordre surnaturel, sans le laisser dans l’état de pure nature. St Pie X, dont la devise était “Instaurare omnia in Christo” disait «Nous [le Pape et l’Eglise] ne pouvons faire de politique» et il écrivait: « L’action catholique... se proposant de restaurer toutes choses dans le Christ, constitue un véritable apostolat à l’honneur et à la gloire du Christ Lui-même. Pour bien l’accomplir, il nous faut la grâce divine, et l’apôtre ne la reçoit point s’il n’est uni au Christ. C’est seulement quand nous aurons formé Jésus-Christ en nous que nous pourrons plus facilement Le rendre aux familles, à la société» ( 34 ). Donc “sanctification d’abord et ensuite politique”! Dom Chautard se demandait: «D’où viendra le salut de la société?…Quand sera-ce à l’Eglise de triompher à son tour? Avec le Maître, il nous est aisé de répondre: “Hoc autem genus [dæmonorum] non ejicitur nisi per orationem et jejunium” (Matth. XVII, 20). Quand des rangs du sacerdoce… sortira une pléiade d’hommes mortifiés faisant resplendir à travers les peuples le mystère de la Croix, ces peuples contemplant dans le prêtre… mortifié les réparations pour les péchés du monde, com- 29 prendront la Rédemption par le Sang de Jésus-Christ» (35). Même aux laïcs appartient le devoir d’apostolat; comme disait St Pie X à un groupe de cardinaux français: «Qu’y a-t-il… de plus nécessaire aujourd’hui pour le salut de la société?… C’est d’avoir dans chaque paroisse un groupe de laïcs très vertueux… et vraiment apôtres» (36). C’est donc la sainteté personnelle, des prêtres in primis et des laïcs ensuite, qui sauvera la société et aidera les hommes à vivre mieux ordonnés à leur fin dernière: ce serait donc une dangereuse erreur, surtout aujourd’hui, de vouloir inverser l’ordre et de commencer par la politique (c’est-à-dire par la société) en faisant abstraction de la sanctification personnelle de l’individu. La politique, ou mieux la politique des partis politiques, moderne est fondée sur les idées révolutionnaires forgées par la “gnose” pour détruire la société chrétienne et l’Eglise (si toutefois c’était possible). Spécialement la démocratie, qui pour Aristote et St Thomas est une dégénerescence de la “politia” ou forme de gouvernement dans laquelle la multitude [à ne pas confondre avec la masse indéterminée] la “sanior pars” du peuple (37) choisit le chef à qui Dieu donne le pouvoir. Ce dernier subsiste en lui habituellement, à travers la multitude qui en est l’instrument ou le canal, mais dans laquelle le pouvoir ne reste pas; et dans cette forme de gouvernement chacun, pourvu qu’il soit capable, peut être choisi pour régner. Eh bien, la démocratie moderne dit que le pouvoir ou l’autorité dérive de la masse, du bas, des hommes et ne vient pas de Dieu; elle dit que le chef de la société est seulement un député qui représente la masse qui gouverne; elle dit que la vérité consiste dans la majorité, quelque soit la délibération qu’elle prenne (38). La démocratie est voulue en vue de la “massification juive moniste, laquelle, contre le Christianisme… feint démagogiquement de valoriser la personne, pour l’asservir au totalitarisme sans égal qui est… celui de l’unité” (39). Le Talmud décrète: «Il faut suivre la majorité. Quand la majorité déclare qu’une chose est permise, elle l’est; et quand la majorité la déclare défendue, elle est défendue» (40). Cette tactique talmudique est voulue en vue de la domination universelle d’Israël sur le monde entier, rendu, grâce à la démocratie, une masse informe et amorphe; la même “tactique démo- cratique” fut utilisée par Caïphe pour faire crucifier Jésus quand il dit qu’un seul homme devait mourir (Notre-Seigneur Jésus-Christ) pour le peuple (41). Et Pilate, en bon démagogue «voulant contenter le peuple [et conserver son fauteuil, n.d.r.] remit… en liberté Barabbas et livra Jésus» (42). «Mais quand Dieu approuva-t-Il la majorité en tant que telle?… la majorité… du peuple juif… aurait eu raison, en tant que majorité, contre Jésus qui était seul» (43). Mais la vérité n’est pas démocratique, ne dépend pas de la majorité! Mais d’où vient cette “haine des sommets” (comme l’appelait Giuliotti) typiquement démocratique? «De la foi dans le monde, pour qui la seule humanité ose se dresser… comme “causa sui”, en déifiant ce que l’on peut imaginer de plus vaste» (44). Même actuellement le Judaïsme reprend la maxime talmudique selon laquelle la majorité a toujours raison, même contre le vouloir de Dieu, parce que l’homme (le juif) étant le complément de Dieu, Dieu Luimême doit prendre des leçons de lui. L’explication que Shalom donne d’une parabole est intéressante sur l’éthique et la résolution des problèmes actuels: «Un rabbin (Eliezer) pour démontrer la justesse de son opinion demanda à un arbre de caroube de se déplacer. Le caroube se déplaça et beaucoup d’autres prodiges se produisirent ensuite. … Mais rien de cela ne fut accepté comme preuve de sa raison. Rabbin Eliezer ne se tint pas pour vaincu [et dit] “si la règle suit mon opinion, que le ciel le démontre”. On entendit une voix céleste qui disait: “Qu’avez-vous à dire contre Rabbin Eliezer? La norme est toujours établie d’après son opinion!” Alors Rabbin Jehoshwa se leva et dit: “La Thora n’est pas au ciel!”… [cette parabole du Talmud, Bava’ Mezia’ 49b, signifie que, n.d.r.] aucun individu (pas même Dieu) ne peut imposer son opinion. Etablir les normes revient à la majorité» (45). Cependant, par la loi de la double vérité que nous avons vu plus haut, ce principe vaut seulement pour les païens, pour pouvoir mieux les corrompre également à travers une forme de gouvernement dans laquelle la raison revient toujours à la majorité, même contre Dieu (c’est ce qui est arrivé avec les lois sur le divorce et sur l’avortement). La situation pour Israël est différente, où c’est le rabbin qui impose à la majorité ses vues, 30 même en lui donnant l’illusion que c’est elle qui décide, comme cela se produisit pour la condamnation à mort de Jésus, quand le peuple “librement” choisit de… faire ce que Caïphe et le Sanhédrin avaient déjà depuis longtemps décrété. A quoi devons-nous nous attendre? Selon Andrea Dalle Donne: «Puisque la majeure partie de l’humanité d’aujourd’hui se fait toujours plus esclave… de ces intrus, destructeurs et révolutionnaires, il n’y a rien d’autre à attendre qu’un châtiment de gravité et de proportions effroyables. Les croyants… se plaignent des différentes hallucinations autour d’un redressement de la situation politique actuelle tant mondiale que nationale. Aux rêves… ces croyants substituent la prière afin que la punition planétaire, inévitable et désormais presque imminente, soit utilisée par Dieu pour la conversion de la majeure partie des pécheurs. C’est tout le contraire du troisième millénaire!» (46). Derniers développements de la révolution gnostique: judaïsme, haute finance et mondialisme Le 29 mai 1453, sous la pression des Turcs (musulmans), tomba l’Empire Byzantin ou ex-Empire Romain d’Orient. A Byzance, quelques années après, à la suite de l’expulsion d’Espagne (1492) se réfugiaient les juifs qui n’hésitèrent pas à donner «un fort essor à la Marine turque contre l’Occident chrétien, jusqu’à la bataille de Lépante (1571). De Byzance [et aussi de Venise] les Juifs développaient leurs opérations commerciales en Europe, faisant d’Amsterdam (Pays Bas) leur principale place financière. De Byzance… ils influencèrent les académies de la Renaissance d’inspiration antichrétienne, en répandant à la fin de 1400 des doctrines ésotériques (Cabale) qui alimentèrent les clans rosicruciens… En 1655 Marrassch ben Israël, grand banquier d’Amsterdam, obtint du dictateur Olivier Cromwell que les juifs, expulsés trois siècles avant soient réadmis à Londres, engageant la haute finance… d’Amsterdam à encourager l’économie et la politique anglaise. Grâce à l’appui juif, le hollandais Guillaume III d’Orange conquit la couronne anglaise… La Maçonnerie anglaise naquit à Londres (1688) comme instrument d’expansion mondiale de l’impérialisme anglo-juif» (47). Les liens entre judaïsme et Islam dans un but antichrétien et ceux entre haute finance et néopaganisme de la Renaissance se révèlent donc clairement. Déterminante fut l’influence du Judaïsme sur la haute finance des Pays Bas, qui se servirent de la Maçonnerie pour accroître et consolider la puissance anglaise en Europe, en opposition à la puissance de la catholique Espagne, et pour servir au Judaïsme comme instrument d’expansion mondiale et de cabalisation des pays chrétiens. «Londres éclipsa Amsterdam et s’achemina vers son destin de centre de la haute finance mondiale. (…) L’Angleterre devait rester fermement attachée à Israël. Cette union même prendrait des dimensions mondialistes, avec l’alliance anglo-américaine de notre siècle» (48). La Maçonnerie anglaise joua un rôle de premier plan dans la formation et l’affirmation de l’illuminisme maçonnique français, qui fut un des principaux moteurs de la Révolution de 1789, une des grandes étapes de la judaïsation de l’Europe chrétienne. Le vingtième siècle marque ensuite le déplacement de l’épicentre de la haute finance d’Amsterdam-Londres à Wall Street (New York), avec l’appui duquel Lénine put réaliser la Révolution bolchevique (1917). La première et la seconde guerre mondiale «créent les conditions pour de nouvelles concentrations de pouvoir, et se dessinent des organismes supranationaux de pression idéologique et sociale mondialiste» (49): il suffit de penser au Bilderberg Club (1954) et à la Trilateral Commission (1975), mouvements plus ou moins occultes, liés étroitement à la haute finance dont le but caché est la formation d’une société multiethnique, politiquement unie et religieusement œcuménique (50), c’està-dire le Nouvel Ordre Mondial qui nous rappelle le Règne de l’Antéchrist. «L’union anglo-juive fait de Londres non seulement le centre du [super]-capitalisme international, mais aussi la loge mère de la maçonnerie, destinée à propager l’idéal… de la plouto-démocratie moderne» (51). Les hautes sphères du mondialisme: a) le Bilderberg Club En 1954 ont commencé en Hollande les conférences du Bilderberg Club, ainsi appelé du nom de l’hôtel où elles se réunirent la première fois. La presse en parla, cependant il est im- 31 possible de connaître l’objet de ces discussions, qui peuvent donc être appelées secrètes. Parfois on connaît aussi les noms des participants (52), qui varient chaque année, alors qu’immanquablement y paraissent les représentants des célèbres sommets économiques (Rockefeller, Ford, Rothschild…). b) la Trilateral Commission Déjà en 1970 Brzezinski «ébauchait les grandes lignes d’une communauté des nations occidentales évoluées, fondée sur le triangle [d’où le nom de trilatérale, n.d.r.] Amérique du Nord, Europe occidentale, Japon» (53). En novembre 1972 après une réunion entre David Rockefeller, Max Konhstan et George Franklin, le programme définitif de la Trilateral fut mis au point. Le 23 octobre 1973, à Tokyo, elle tint sa première réunion. La Trilatérale, dont parmi les principaux artisans se trouve l’ex-Président français Giscard d’Estaing, organise des rencontres habituelles et régulières entre les dirigeants des principales puissances d’Europe, du Japon et d’Amérique. Au sein de la Trilatérale sont représentées les plus puissantes organisations et pour l’Italie on peut citer La Stampa, la Fiat, La Rinascente; les grands noms de la Trilatérale sont David Rockefeller, Henry Kissinger, Zbigniev Brzezinski, Edmond de Rothschild, Olivier Giscard d’Estaing (frère de l’ex-Président français), et parmi les italiens les plus connus sont: Giovanni Agnelli, Guido Carli, Umberto Colombo, Giorgio La Malfa, Arrigo Levi. La revue de la Trilateral s’appelle Trialogue. c) le R.I.I.A. The Royal Institute of International Affairs naquit à Londres en 1919, et est connu aussi comme Chatham House; la branche américaine du même institut anglais, prit le nom de Council of Foreign Relations (C.F.R.). Ces institutions, très influentes sur la politique angloaméricaine, sont au centre de différents courants, tels la “maçonnerie écossaise”, la “haute finance mondialiste” et la “société théosophique” d’Annie Besant et de Mme Blavansky. D’après Nardi «la Chatham House est le pivot de la politique anglaise» (54). Le Royal Institute of International Affairs a ses différents départements; en Italie il s’appelle I.A.I. (Istituto Affari Internazionali) et I.S.P.I. (Istituto per gli Studi di Politica Internazionale). L’I.A.I fut créé en 1965 par la fondation Olivetti, par l’Association de culture politique “Il Mulino” et par le Centro Studi “Nord-Sud”, sur proposition du député Altiero Spinelli (député P.C.I.), mais son premier patron est Gianni Agnelli; Guido Carli et Arrigo Levi y exercèrent aussi leur influence. La Loge P2 La Loge P2 fut fondée par le Grand Maître du Grand Orient d’Italie Adriano Lemmi en 1875. Depuis le début elle eut pour but d’occulter l’affiliation maçonnique de ses membres (aujourd’hui on dirait une loge couverte); de 1961 à 1970 le Grand Maître Gamberini délégua Ascarelli comme Grand Maître adjoint qui devait procéder à l’admission des membres de la Loge P2. En 1967 Gamberini en personne établit que Licio Gelli (55) passerait de la Loge Romagnosi à la Propaganda 2 dont, en 1975, il fut nommé vénérable. « On ne peut… absolument pas soutenir que la Loge P2 fût seulement une “soi-disant” loge maçonique. Elle avait toutes les caractéristiques nécessaires des 496 autres loges du Grand Orient en Italie, et en outre avait aussi un lien tout particulier avec le Grand Maître, qui depuis plus de cent ans a été en même temps vénérable de cette loge» (56). En mars 1981 deux juges de Milan perquisitionnèrent (durant une enquête sur le cas Sindona) la villa de Lucio Gelli, dans les environs d’Arezzo, où ils découvrirent une partie des listes des affiliés à la P2 (57). Licio Gelli était un directeur général de la Permaflex. Le 29 mars 1965 fut inauguré à Frosinone le nouveau complexe industriel de la Permaflex; le député Andreotti, le Cesare Romiti, Giovanni Agnelli avec le grand rabbin de Rome Elio Toaff 32 maire et Licio Gelli étaient présents. Le “père spirituel” de Gelli était un certain Frank Gigliotti, à qui avait été confiée par la Maçonnerie américaine la charge de recoudre l’accroc qui s’était produit dans la Maçonnerie italienne entre le courant de droite et le courant démocratique. Gigliotti était un féroce anticommuniste et Gelli, excombattant de la R.S.I. frappa justement à sa porte, se prévalant de l’amitié avec Andreotti et avec certains prélats postconciliaires. A mesure que Gigliotti vieillissait et touchait à sa fin, se levait l’astre de Gelli, qui pourra ainsi continuer la carrière de son parrain, en entretenant des liens avec la “droite” américaine, comme le confirme sa présence à l’intronisation de Ronald Reagan (58). Dans les états imprimés découverts le 17 mars 1981 à Castiglion Fibocchi se trouvent les noms de 950 inscrits à la P2, mais pas tous… évidemment. Parmi les 950 figurent 52 hauts officiers des carabinieri, 50 de l’armée, 37 des douanes, 29 de la Marine, 11 préfets de police, 5 préfets, 2 ex-ministres, 38 députés, 14 magistrats. «Mais les plus inquiétants des noms publiés dans les listes sont ceux que nous ne connaissons pas: d’après la Commission parlementaire d’enquête la liste complète des inscrits à la P2 contenait environ 2500 noms, il en manquent donc 1650» (59). En relisant le projet politique de la P2, le soi-disant “Plan de renaissance démocratique” on a l’impression que plusieurs de ses points se sont réalisés dernièrement. Le projet de Licio Gelli prévoyait la création d’un état “autoritaire” du type république présidentielle, l’assujettissement de la magistrature (qui pourtant rechigne) au pouvoir politique, l’utilisation d’instruments financiers pour la naissance de deux mouvements, l’un de gauche ou progressiste et l’autre démocratico-libéral, penchant un peu à “droite”. «Ces mouvements auraient dû être fondés par des clubs… promoteurs composés d’hommes politiques et représentants de la société civile [les techniciens], en proportion d’un à trois. Tous les promoteurs doivent être fondamentalement disponibles pour une action politique pragmatique avec renonciation aux habituels et rebattus points de vue idéologiques» (60). Dans un second temps il faudra acquérir ou faire naître des hebdomadaires de bataille… enfin les circonstances devront permettre de compter sur l’ascèse au gouvernement d’un homme “politique” déjà en synthonie avec l’esprit du club [ou de la loge, n.d.r.]. Si l’on voulait donner une image sensible de cette situation «nous pouvons penser à une pyramide dont le sommet est constitué par Licio Gelli… [puis il faut] admettre l’existence au-dessus d’elle d’une autre pyramide qui, retournée, voit son sommet inférieur dans le visage de Licio Gelli. Celui-ci en effet est le point de jonction entre les forces et les groupes qui dans la pyramide supérieure identifient les finalités ultimes et dans la pyramide inférieure, où elles trouvent leur réalisation pratique» (61). Il est bon de rappeler que de l’intersection des deux pyramides ou triangles, naît l’étoile de David. Pier Carpi raconte, dans une interview accordée à Antonio Socci, que «…en 1977 Gelli crée l’Ompam (Organizzazione mondiale per l’assistenza massonica), qui est une des causes de l’attaque de la P2. (...) L’organisation… est reconnue par l’Unesco, par le FAO et l’ONU envoie des observateurs au premier congrès… [L’Ompam] a des positions nettement anticommunistes… [Il y a] un protocole secret, de guerre au communisme, approuvé à ce premier congrès de 77 au Brésil… [il] finit entre les mains du KGB qui donne des dispositions de détruire cette redoutable organisation qui pouvait disposer de moyens énormes, la P2 et la Maçonnerie. Se déchaîne ainsi une guerre souterraine internationale» (62). Influence mondialiste du Judaïsme antichrétien «Dans la dispersion, qui est la faiblesse de notre race - les juifs ont raison de le dire nous avons trouvé notre force, qui nous a portés au seuil de la domination mondiale» ( 63). Les juifs ne sont pas réticents à admettre leur énorme influence sur le mouvement synarchique mondialiste, qui prépare le Nouvel Ordre Mondial et la Nouvelle Maison Européenne. Déjà au XVIIème siècle Jan Amos Kominsky (1592-1670) théorisait une nouvelle société multiethnique, raciale, politique, religieuse, tendant à dépasser le Christianisme dans l’ésotérisme. Ses théories alimentèrent le Sionisme, conduisant ainsi à l’“Alliance Israélite Universelle”. Le grand Maître de la Maçonnerie Crémieux (juif) soutenait que «cette alliance ne s’attaque pas seulement à notre culte mais à tous les cultes. Elle veut pénétrer toutes les reli- 33 gions… [elle a comme but de] faire tomber les barrières qui séparent ce qui doit se réunir un jour» (64). Crémieux encore affirme que «…Une Jérusalem du Nouvel Ordre… doit se substituer à la double cité des Césars et des Papes. L’Alliance Israélite Universelle commence à peine, et déjà son influence se fait sentir loin» ( 65). Dans le même sens Baruch Levi à Marx: «le peuple juif (…) sera lui-même son propre Messie. Sa domination sur le monde sera atteinte au moyen de l’unification des autres races humaines, l’élimination des frontières et des monarchies… et au moyen de l’institution d’une république mondiale» (66). Isidoro Loeb, secrétaire de l’Alliance Israélite Universelle admettait lui aussi que «… ce qui est certain, c’est que, avec ou sans Messie personnel, les juifs constitueront le centre de l’humanité, autour duquel les non juifs se grouperont après leur conversion. Les Nations se réuniront pour aller porter leurs hommages au peuple de Dieu» ( 67). Très réaliste est Zur Beer quand il soutient que «sans avoir été absorbé, aujourd’hui l’esprit juif domine là où avant il était tout juste supporté… Nous contrôlons le marché de l’or… l’esprit juif a conquis le monde» (68). Jacob de Haas, parlant de la Révolution russe de 1917 affirme qu’elle est une révolution juive (69). J. Bidegain s’exprime très ouvertement concernant la Maçonnerie. «…La Franc-Maçonnerie, qui est incontestablement d’origine juive, est, pour les israélites, un instrument d’action et de combat dont ils se servent secrètement... Les juifs ont créé la Maçonnerie dans le but d’y enrôler les hommes qui n’appartiennent pas à leur race… Les juifs... qui n’ont pas perdu leur foi en la reconstruction du Temple, cachent, sous cette parole symbolique... la volonté, de faire, du monde entier, un temple gigantesque où les enfants d’Israël soient prêtres et rois, et où tous les hommes... réduits à la servitude par l’organisation capitaliste, travailleront à la gloire de Jahvé» (70). Sans commentaire pour leur prégnance sont les mots d’un auteur juif: «Il n’existe qu’un seul problème sur la terre, et c’est le problème d’Israël» (71). Dangers D’après ce qui est exposé jusque-là, il est évident que l’humanité court un grave danger: il est donc de notre devoir de lancer un cri d’alarme. Avec les dernières lois approuvées presque partout, quiconque ose montrer la perfidie de la religion talmudique est immédiatement accusé d’antisémitisme et condamné. Si les fautes imputées au Judaïsme se révélaient des calomnies, cette attitude vexatoire serait juste, mais si on réussit à démontrer que la “perfidie” (au sens théologique) de la religion juive postbiblique est réelle, ces condamnations devraient inspirer de la crainte seulement aux nigauds ou aux lâches. En 1970 Umberto Greco (sous le pseudonyme de Verminjon) écrivait: «Je me propose de dévoiler les coulisses que nous ne voyons pas. L’humanité se trouve déjà au bord d’un abîme, à cause du Judaïsme manœuvrant dans l’ombre, qui, comme un marionnettiste, nous agite» (72). Le danger judéo-massonique Le Judaïsme est une idéologie animée par le désir de vengeance. Le grand rabbin de Rome Elio Toaff déclarait en 1994 à un journaliste qui lui demandait s’il n’y avait pas une limite de temps à la rancœur: «La limite de la rancœur est la vie humaine» (73). Cette rancœur que les juifs nourrissent envers tout “goy” (non juif) et spécialement envers les chrétiens (74) les porte à les brimer avec toute sorte d’injustices. Marcus Eli Ravage écrivait: «Nous avons été la cause première non seulement de la dernière guerre, mais presque de toutes vos guerres» (75). Historia magistra vitæ Avant l’avènement de Jésus-Christ les Israélites étaient le peuple élu de Dieu, mais ils se montraient déjà (sauf les rares exceptions des Patriarches et des Prophètes) un “peuple à la tête dure”, avide d’argent jusqu’à adorer le veau d’or. Eh bien, depuis l’Ancienne Alliance ils avaient la caractéristique - qui s’est aggravée avec le déicide - de “mettre à côté des personnes qui ont des fonctions hautement directives, des femmes de race juive” (76). Sous les Romains, l’empereur Tibère appela la communauté juive romaine “un péril pour Rome” (77). L’empereur Claude les expulsa de Rome. Sénèque prononça la phrase historique: “judei victoribus victi legem dederunt” (les juifs même s’ils sont vaincus dicteront la loi aux vainqueurs) (78). Dioclétien promulgua des lois restrictives contre eux. Cicéron, dans Oratio 34 pro Flacco, prétend craindre la cohésion juive. Poppée, par exemple, la femme de Néron était une convertie au Judaïsme et prosélyte de la porte (79). Voici que, de derrière les coulisses, on aperçoit l’ombre de celle qui dressait Rome à persécuter les Chrétiens; Tertullien confirme «Sinagogæ Judeorum fontes persecutionum» (80). «L’influence juive parmi les Romains devint, à un moment donné, si prépondérante que l’on voit pour la première fois, monter sur le trône des Césars un empereur d’origine juive… Septime Sévère l’Africain… ayant mis à mort ses ennemis introduisit une dangereuse innovation: le service militaire obligatoire dans tout l’empire à l’exception des italiens, à qui au contraire il était interdit. Désormais ils étaient à la merci des légions étrangères… le terrain étant préparé comme on voulait, commença… une période d’anarchie et de désastres; Rome ne tarda pas à être envahie par des barbares et… anéantie. S’accomplissait ainsi la vengeance de la Synagogue pour la destruction de Jérusalem opérée par Titus. Aujourd’hui nous voyons encore trôner au Forum romain l’un contre l’autre deux seuls arcs de triomphe: celui de Titus et celui de Septime Sévère… Que la postérité tienne compte que si Rome a vaincu Israël, Israël a détruit Rome» (81). Il n’y a pas eu de peuple dans le passé auprès duquel les juifs n’aient pas réussi à s’infiltrer, et qui n’ait pas ressenti à un certain point la nécessité de se libérer et de se défendre d’eux. L’unanimité de réaction, comme remarque aussi Bernard Lazare (82), provient du fait que la religion talmudique est tellement malveillante et encline au crime que les autres peuples ont été contraints d’en refuser l’oppression, y compris par la force. Judaïsme, bolchevisme et ploutocratie Comme nous l’avons vu plus haut le Judaïsme a fondé la Maçonnerie pour imposer son “credo” au monde entier, celui des ‘goyim’ (83), en commençant sa pénétration à travers les classes haut placées, et en séduisant les classes pauvres par le marxisme et le bolchevisme. Communisme et supercapitalisme ne sont donc pas essentiellement ennemis, même s’ils semblent l’être ou le deviennent accidentellement dans certaines circonstances. En réalité ce sont des tentacules de la même pieuvre, qui au moyen de la haine des classes suscitée entre pauvres et riches, détiennent un pouvoir de fer sur tous, pourvu qu’ils soient goyim. L’origine juive de Marx, Trotski et Lénine est connue, et celle des femmes de Staline, et de Molotov, qui précisément en vertu de sa parenté avec la puissante famille des Karp, put maintenir de bons rapports avec cette dynastie de la haute finance judéo-américaine (84). Bolchevisme et ploutocratie sont unis au sommet du Judaïsme: la contradiction n’est qu’apparente, puisque la dictature communiste en dépouillant les goyim de la propriété privée, la rend à l’Etat, unique supercapitaliste ou ploutocrate. Les masses prolétaires sont utilisées à des fins antibourgeoises; souvent elles se font l’illusion d’instaurer un régime dans lequel figure la justice distributive, alors qu’elles seront dépouillées de la liberté et des biens et ensuite brimées par une dictature ou tyrannie, celle de l’Etat-patron (et supercapitaliste). A sa tête, même si cachés derrière de tierces personnes (il suffit de penser au multimilliardaire américain Hamer), il y a souvent les juifs qui, dans le transfert général des propriétés, s’emparent ipso facto de tous les biens des non juifs. Difficultés Cependant à la réalisation de ce plan diabolique s’oppose l’intelligence des goyim: c’est alors que la Synagogue talmudique essayera par tous les moyens d’abaisser le niveau intellectuel des peuples et, avec lui, la capacité de discernement du danger imminent; tout devient instrument dans ce but, de la diffusion de l’immoralité qui abaisse l’homme au niveau de la brute, à la presse; des spectacles impudiques et obscènes à la drogue; en somme tout vice est utile pour enlever aux peuples la faculté de raisonner. USA et judéo-maçonnerie Benjamin Franklin (qui était pourtant franc-maçon) disait aux Américains à la Convention Constitutionnelle de Boston de 1789: «Si les juifs ne sont pas exclus des Etats-Unis… d’ici moins de cent ans ils nous gouverneront et nous détruiront… je vous avertis… si vous n’éliminez pas les juifs… vos fils et vos petits-fils vous maudiront dans vos tombes. Les idées des juifs ne sont pas celles des américains» (85). Et quand on parle des Américains il ne faut 35 pas confondre le peuple américain, première victime de la judéo-maçonnerie, avec les gouvernants, pour la plupart juifs et francs-maçons. Le problème américain Il faut cependant savoir qu’en Amérique existe un vrai problème: le culte de la liberté. La liberté, entendue non comme faculté avec laquelle on choisit le moyen le meilleur pour faire le bien, mais comme “licence” ou libertinage: vouloir faire tout ce qui plaît, même le mal; la liberté de religion, de culte ou d’expression. «L’attachement à la liberté [écrit un prêtre américain, n.d.r.] représente... l’essence de la culture américaine» (86). Cette idolâtrie n’est pas seulement américaine; malheureusement aujourd’hui toutes les démocraties européennes sacralisent la liberté. Le culte de la liberté est étroitement lié à la Maçonnerie (même la Maçonnerie américaine), qui tend à libérer l’homme de la “tyrannie” de l’Eglise catholique et de Jésus-Christ! La culture américaine a été imprégnée de principes contraires à la Foi catholique, grâce à l’influence qu’ont eue en Amérique la Judéo-maçonnerie et le Protestantisme, avant que le Catholicisme puisse s’y implanter et prospérer. Même le clergé américain n’a pas été épargné par cette influence. Au XIXème siècle le clergé était divisé en deux tendances: les catholiques-libéraux et les anti-libéraux. Les premiers faisaient leur le culte de la liberté (ou mieux de la “licence”); alors que les anti-libéraux le réfutaient puisqu’il affaiblissait la pureté de la Foi. Ce furent malheureusement les catholiques-libéraux qui prévalurent. Donc le Catholicisme qui s’est développé en Amérique a fait abstraction (dans la plupart des cas, sauf les exceptions valables) du principe catholique de la soumission de l’Etat à l’unique vraie Eglise, celle fondée par JésusChrist, l’Eglise catholique apostolique et romaine. Elle seule a droit à la liberté (puisque seule la vérité a des droits, non l’erreur); les autres confessions peuvent être tolérées pour empêcher un dommage plus grand, mais ne sont pas sujet de droit. Jésus est Roi, non seulement du fidèle pris individuellement, mais de la société dont il reçoit un culte publique, et ce culte est uniquement celui qu’il a institué: le culte catholique-romain. En Amérique au contraire, le droit à la liberté d’action pour toutes les écoles de pensée et les différentes confessions religieuses est considéré comme sacro-saint même par une grande partie du clergé (déjà avant le Concile Vatican II). Malheureusement aussi les catholiques en Amérique ont accepté la culture protestante et maçonnique préexistante aux U.S.A. et y sont tenacement attachés. Ils ont ainsi uni ce que Dieu avait divisé: la Foi catholique avec le culte de la liberté absolue. Révéler ces vérités signifie peut-être dénigrer l’Amérique? Je laisse la parole à l’abbé Sanborn (prêtre américain): «Il y a dans le système américain quelque chose de très imparfait en ce sens que c’est un Pays qui ne professe publiquement et officiellement aucune religion... Il n’est en aucune façon contraire à la justice de son propre pays, de signaler ses erreurs, en particulier ses erreurs systématiques... Personne ne me convaincra jamais que l’indifférence du gouvernement américain vis-à-vis de Dieu est une chose qui Lui agrée» (87). Que nous sommes loin de certains “catholiques” italo-brésiliens qui bien que se faisant passer pour “intégristes” nous proposent comme modèle l’Amérique, le libéralisme conservateur américain; l’un d’eux est même arrivé à mieux apprécier la Maçonnerie américaine puisque tolérante en matière religieuse et, naturellement, anticommuniste et philo-latifundiste! Qui gouverne l’Amérique? En vérité la nation la plus fortement soumise aux intérêts juifs est aujourd’hui l’Amérique, où ce ne sont pas tant en réalité les Présidents américains qui gouvernent qu’au contraire le Gouvernement central juif ou ‘Kahal’, qui à son tour dirige les gouvernements régionaux ou ‘Kehillah’, les loges et les gouvernements. Paul Finley a écrit: «Le premier ministre d’Israël a beaucoup plus d’influence sur la politique étrangère des EtatsUnis au Moyen Orient, que dans son Pays» (88). Alain Cotta: «Aux Etats-Unis, où vivent six millions de juifs, leur voix, peut être déterminante puisque la majorité électorale... peut être atteinte grâce à un écart de 3 ou 4%... En 1988 les élections américaines pour le Sénat exigeaient un effort publicitaire de 500 millions de dollars» (89). Wrofsky affirme: «Le lobby le plus puissant officiellement accrédité au Capitole est l’American Israel Public Affairs Comitee» (90). L’ex-premier ministre anglais Clement Attlee fit en son temps cette déclaration: «La politique des Etats-Unis en Palestine était modelée par le vote des juifs et par les subventions des plus grandes firmes juives» (91). John F. Kennedy, lors de sa première rencontre avec Ben Gourion lui dit: «Je 36 Tombe du P. Tomaso da Sardegna à Damas sais que j’ai été élu grâce au vote des juifs américains: je leur dois mon élection. Ditesmoi ce que je dois faire pour le peuple juif» (92). Après Kennedy, Lyndon Johnson alla encore plus loin. Un diplomate israélien écrivit: «[avec la mort de Kennedy, n.d.r.] nous avons perdu un grand ami, mais nous en avons trouvé un meilleur... Johnson est le meilleur ami que l’Etat juif ait eu à la Maison Blanche» (93). En effet Johnson appuya largement la guerre des six jours. A ce moment-là 99% des juifs américains défendait le Sionisme: «Etre juifs aujourd’hui signifie être liés à Israël» (94). Carter aussi continua dans la même voie et déclara à la synagogue d’Elisabeth: «J’honore le même Dieu que vous. Nous (baptistes) étudions la même Bible que vous... La survivance d’Israël... est un devoir moral» ( 95). Paul Finley, dans son livre They dare to speak out, publié en 1985, a décrit le fonctionnement actuel du lobby sioniste et son pouvoir. Cette véritable «succursale du gouvernement israélien» contrôle le Congrès et le Sénat, la Présidence de la République, le département d’Etat et le Pentagone, tout comme les media, et exerce son influence tant dans les Universités que dans les Eglises. Aucune décision concernant Israël ne peut être prise, au niveau exécutif, sans qu’elle soit immédiatement connue du gouvernement israélien. Georges Virebeau a écrit un intéressant ouvrage intitulé: Mais qui gouverne l’Amérique? On peut y lire: «L’Amérique veut domi- ner le monde!... La vérité est différente: ce ne sont pas les Américains, le peuple américain, qui veut dominer la planète, mais les forces qui régentent l’Amérique» (96). L’auteur démontre avec de nombreuses citations que la haute finance contrôle le Parti Démocrate et le Parti Républicain, et par conséquent la politique américaine. Les représentants de la haute finance sont: Lehman, Baruch, Rosenwald, Guggenheim, Rockefeller, Lewinsohn... «Bernard Baruch, du B’naï B’rith, était le numéro un du brain trust du Président Roosvelt, qui comptait une demi-douzaine de ses amis, eux aussi étroitement unis au célèbre Ordre international maçonnique» (97). «Le Président Gerald Ford, francmaçon, avait atteint le 33° degré lorsqu’il succéda à Nixon. Carter accéda à la Maison Blanche en 1977... Il avait été choisi et propulsé par la Trilatérale... En 1978, Jimmy Carter appela auprès de lui un nouveau conseiller, Edward Sanders, qui quitta la présidence de l’American Israel Public Affairs Comittee, une organisation contrôlée par le B’naï B’rith, pour devenir officiellement le conseiller du Président» (98). Quand Ronald Reagan arriva à la Maison Blanche, bien que n’étant pas affilié à la Trilateral, ou au C. F. R., ou au Bilderberg ou au B’naï B’rith et pas non plus à la Maçonnerie, il ne rompit pas avec les habitudes prises par ses prédécesseurs: en effet son Vice-Président George Bush, était membre du C. F. R. et de la Trilateral; son Secrétaire d’Etat, le général Haig, était un adepte du C. F. R., comme son secrétaire au Trésor, Donald T. Regan; son secrétaire à la Défense, Weinberger, était de la Trilateral. Pour ce qui est de Clinton le 16 septembre 1992 le Jewish Post écrivait: «Sur sept conseillers de Clinton cinq sont juifs». En 1995 les conseillers juifs sont neuf sur dix. En décembre 1996 Clinton change de secrétaire d’Etat et choisit Madeleine Albright, juive née en Tchécoslovaquie (99). Evidemment les Présidents passent, les Sociétés secrètes restent... «Il y a à Washington, une force plus discrète, mais étrangement plus puissante que le Président de la République: ce sont les Sociétés secrètes, qui ont infiltré le Gouvernement, le Parlement et qui dictent littéralement leur loi aux représentants du peuple américain» (100). L’anticléricalisme L’Eglise catholique est le principal enne- 37 mi de la judéo-maçonnerie dont le projet spécifique est de «…travailler sans trêve pour [en] diminuer l’influence. Il convient donc d’imprimer dans l’esprit de ceux qui professent la Religion chrétienne les idées de libre pensée, de scepticisme, de schisme et provoquer des querelles religieuses. Logiquement il convient de commencer par mépriser les ministres de cette religion… en provoquant des soupçons sur leur dévotion, sur leur conduite privée» (101). C’est le propre de la Synagogue juive de voir dans le clergé son ennemi, comme l’affirme déjà St Jean Chrysostome ( 102); son but, d’après l’un des plus grands spécialistes du rabbinisme, est d’«abattre la Religion chrétienne» (103). C’est pourquoi Verminjon, se référant à l’œuvre du juif converti Pèrgola (104), soutient que le Judaïsme n’est pas une religion mais une école d’impiété. Le remède Face a une conjuration d’une telle ampleur, le salut dépend avant tout de l’intervention de Dieu et aussi de notre conduite. Ce n’est que si les hommes, coopérant avec Dieu, essayent de réagir en se vainquant eux-mêmes et en luttant contre la triple concupiscence, le monde et le démon, qu’ils pourront changer substantiellement les choses. Il faut comprendre qu’à partir du déicide le Judaïsme est mû, dans sa haine du Christ, par l’envie et par l’orgueil, comme l’affirmait déjà St Thomas (105), et qu’actuellement aussi il exerce le rôle de tentateur des âmes, quand ce n’est pas celui de fouet. Et nous, que faisons-nous alors que le Sanctuaire brûle? Nous nous occupons hélas d’une myriade de choses contingentes, et peut-être même importantes, mais nous ne pensons pas à nous sauver en éteignant le feu. «Ah! permettez-moi - écrivait St Louis Marie de Monfort - de crier partout: Au feu, au feu! A l’aide, à l’aide! Au feu dans la maison de Dieu, au feu jusque dans le Sanctuaire! A l’aide de notre frère qu’on assassine, à l’aide de nos enfants qu’on égorge, à l’aide de notre bon père qu’on poignarde!… Exsurge, Domine, quare obdormis? Exsurge… Seigneur, levez-vous!… pour vous former une compagnie choisie de garde-corps, pour garder votre maison, pour défendre votre gloire et sauver vos âmes, afin qu’il n’y ait qu’un bercail et qu’un pasteur… Amen!» (106). Verminjon écrivait: «Mais je crains fort que prétendre à l’intelligence et à la réaction de nos jours, ne soit complètement impossible, étant déjà peut-être, réellement, plus temps. Et ce à cause de la dégradation morale à laquelle nous sommes arrivés, qui a fait précipiter le niveau de l’intelligence humaine… par terre… Comment sortir de ces ténèbres? Il n’y aurait rien d’autre à faire qu’à élever à nouveau le niveau de la moralité et de l’intelligence, mais de cela, aïe! combien nous sommes éloignés. Combien de difficultés s’y opposent! Que Dieu nous aide!… [Hélas] nous avons subi un tel lavage de cerveau que nous ne sommes plus capables d’entendre des choses sérieuses,… seule une force surhumaine pourrait encore nous ouvrir les yeux… Ou nous crions aujourd’hui à haute voix ou notre bouche restera fermée pour toujours» (107). Certainement il faut avoir courage et force pour ne pas se laisser intimider par les systèmes employés par l’ennemi. Par exemple d’après Verminjon, souvent ce sont les juifs qui orchestrent une campagne artificielle d’antisémitisme pour localiser la plus forte réaction au Judaïsme et pour obtenir des gouvernements des lois en leur faveur et pour réduire au silence quiconque ose combattre le Judaïsme, en mobilisant gouvernements, institutions et opinion publique. (Et ici il faut rappeler que l’antijudaïsme n’a rien de commun avec l’antisémitisme et le préjugé raciste). Il ne faut cependant pas se laisser intimider par ces manœuvres mais continuer à proclamer la vérité, fût-ce même usque ad effusionem sanguinis, se rappelant que, même si aujourd’hui on semble perdants et vaincus, la victoire à la fin ne fera pas défaut, puisqu’elle a été prophétisée par Notre-Seigneur Jésus-Christ, la Vérité infaillible: «Portæ inferi non prævalebunt». Un patron dans la bataille contre la Judéomaçonnerie: le Père Kolbe «Maintenant que la lumière est faite et que le secret est évident, il est temps d’ouvrir les yeux sur l’ampleur du péril et de rassembler les forces du Christianisme en vue de la défense commune. C’est une question de vie ou de mort… Que les orateurs et la presse qui ne sont pas liés au maçonnisme juif parlent clairement et fulminent pour illuminer ceux qui ne voient pas la machination dénoncée… ne signifie pas offenser ou manquer à la charité… mais est légitime défense non seulement pour les corps mais plus encore pour les âmes. C’est suivre 38 l’exemple du Christ, qui a eu des paroles de feu contre les dirigeants d’Israël. Ce qui serait un manque de charité… serait au contraire de maintenir un silence glacial sur l’action de perversion des ennemis du Christ et de la société» (108). Face à l’objection répandue et stupide selon laquelle Jésus-Christ aussi était de race juive et que par conséquent il faut vénérer le Judaïsme et considérer les juifs comme des frères aînés, on doit répondre avec St Thomas que l’on ne doit pas vénérer les anges rebelles, en haine de Dieu le Père, par le seul fait qu’ils furent des anges. Il faut au contraire, dans la charité, mettre en garde contre les risques du philo-judaïsme régnant; suivons en cela les traces du Père Kolbe (109), qui fut infatigable à dénoncer le danger maçonnique et le danger juif et à attirer tout le monde à la vraie foi en NotreSeigneur Jésus-Christ; «…dans ce but il conçut la résolution de se livrer de toutes ses forces à faire barrage contre ces mouvements… [et] dans cette perspective… fonda la Milice de l’Immaculée» (110). Le religieux franciscain nous a laissé un enseignement lumineux concernant le danger judéo-maçonnique: «Dans les années précédant la guerre... à Rome, la mafia maçonnique... faisait la loi. (...) Elle ne renonça pas... à déployer à travers les rues de la ville... un étendard... à l’effigie de St Michel Archange sous les pieds de Lucifer! (...) et même à écrire: “Satan doit régner au Vatican”» (111). Et il s’adressa encore aux francs-maçons et aux juifs: «Messieurs les maçons... réfléchissez... s’il n’est pas mieux de servir le Créateur... plutôt que d’obéir aux ordres de la cruelle clique juive, mystérieuse, rusée, méconnue et qui vous hait? Et à vous, petite poignée de juifs... qui cachés... avez provoqué consciemment déjà tant de malheurs et êtes en train d’en préparer encore plus (...): quel avantage en recevez-vous? ...Ne serait-il pas mieux si vous aussi, maçons... dupés par un groupe de juifs, et vous chefs juifs, qui vous êtes laissés séduire par Satan... reconnaissiez le Sauveur Jésus-Christ...?» (112). Que le Père Kolbe nous serve d’exemple et intercède pour nous en nous obtenant la lumière nécessaire pour voir le danger imminent sur la Chrétienté et la force pour agere contra per diametrum, usque ad mortem. Conclusion. Christianisme ou Judaïsme: telle est la suprême alternative! Le P. Maximilien Kolbe à l’âge de 19 ans Le Christianisme est bien plus en opposition avec le Judaïsme qu’avec le paganisme ou avec n’importe quelle autre fausse “religion”. En effet le Judaïsme par l’intermédiaire de la Cabale impure et du Talmud a essayé d’ensevelir la Bible et a mis en croix Notre-Seigneur Jésus-Christ. Le Christianisme est la religion qui affirme la divinité du Christ, le Judaïsme est le système qui la nie le plus radicalement et la crucifie: c’est pourquoi l’opposition entre Christianisme et Judaïsme n’est pas seulement de contrariété mais de contradiction. De là naît la suprême alternative pour les individus comme pour les nations: ou sainteté chrétienne ou gnose juive. Je termine par la citation d’une oraison du IIIème Dimanche de Carême tirée du rite ambrosien: «Oh combien perfide, pertinace, l’inique peuple juif, qui ne veut pas reconnaître le Père céleste et se glorifie dans sa descendance... ô peuple ingrat! …nous au contraire… nous avons pris la place et le royaume des juifs. Par le Christ NotreSeigneur» (113). Notes 1) A. DALLE DONNE, Valenze etico-speculative del realismo metafisico, Marzorati, Settimo Milanese 1993, p. 253. 2) A. C AQUOT - E. G UGENHEIM - L. S ESTRIERI , Storia dell’Ebraismo, édité par H.C. PUECH, Laterza, Roma - Bari 1985, p. 264. 3) A. CAQUOT- E. GUGENHEIM - L. SESTRIERI, op. 39 cit., pp. 242-271 passim. 4) Jér. VIII, 8. 5) O RIO N ARDI , Il vitello d’oro, Linea diretta, Milano 1989, p. 53. 6) S ANTANGELO , L’ultima battaglia, Adrano (Catania) 1985, p. 27. 7) F. G. DE QUEVEDO, Obras completas, Madrid 1945, cité par GIOVANNI VANNONI, Le società segrete dal ‘6oo al ‘900, Sansoni, Firenze 1985, pp. 44-365. 8) A. ROMEO, Il Giudaismo, in Il presente e il futuro della Rivelazione biblica, Roma-Parigi-Tournai-NewYork 1964, pp. 204-242. 9) Matth. XXIII, 15 et 33. 10) Jn VIII, 44. 11) I Thess. II, 15. 12) Actes II, 14-40. 13) Ap. II, 9 - III, 9. 14) Deut. XXXII, 1-33; Is. I, 21; X, 5-11; Jér. VI, 8–19; XVIII, 13-17; Ez. IX, 9-22. 15) Os. X, 15. 16) Jn V, 45. 17) D. P ERGOLA , L’antisemitismo e i torti degli ebrei, Torino 1889, p. 4. 18) O. NARDI, Gnosi e Rivoluzione, Grafiche Pavoniane, Milano 1991, p. 13. 19) Cf. Sodalitium n° 36, pp. 4-11. 20) A. DALLE DONNE, op. cit., pp. 285-6. 21) Jér. II, 13. 22) O. NARDI, Il Vitello d’oro, p. 250. 23) B. MARIANI, L’ateismo degli Angeli, in AA.VV. Ateismo e Bibbia, Assisi 1988, p. 220. 24) ST JUSTIN, Dialogue avec Tryphon, 133, 6, trad. di G. Visonà, Milano-Torino 1988, p. 370. 25) Cf. ST THOMAS, Somme Théologique, Ia q. 94 a. 1- 2a 2æ q. 2 a7. 26) Actes VIII, 18 ss. 27) P. C. LANDUCCI, Cento problemi di fede, Assisi 1962, p. 238. 28) Comme il l’avait déjà fait avec Voltaire, par exemple. 29) Sur la morale talmudique voir les citations de Mgr Pranaitis in Sodalitium n° 36, pp. 4-11. 30) Selon Freud il faut se débarrasser de toute contrainte religieuse, en particulier de la «Thora». Ici on distingue le caractère anti-vétérotestamentaire du Judaïsme postchrétien, qui a rompu non seulement avec le Christ, mais aussi avec Moïse (comme Jésus l’enseigna dans l’Evangile). 31) Combien de suicides de pauvres garçons très jeunes, désormais incapables de supporter un reproche de leurs parents ou une mauvaise note à l’école! 32) “Cui servire regnare est”. 33) Pie XII, Pour l’anniversaire de Rerum Novarum, juin 1941. 34) ST PIE X, Encyclique aux Evêques d’Italie, 11 juin 1905. 35) DOM CHAUTARD, L’âme de tout apostolat, Abbaye de Sept-Fons, Dompierre-sur-Besbre 1934, p. 147. 36) Ibid. p. 168. 37) Du sanscrit “pr-nâm”: plénitude, multitude. 38) Si nous sommes dix sur la coupole de SaintPierre et que six décident que nous devons nous jeter en bas, je dois le faire moi aussi, malgré moi, d’après le principe selon lequel la majorité a toujours raison. 39) A. DALLE DONNE, op. cit., p. 281. 40) Sanhedrin Jerosol. 22 a. 41) Jn XI, 45-53. 42) Jn XVIII, 40. 43) A. DALLE DONNE, op. cit., p. 282. 44) A. DALLE DONNE, op. cit., p. 285. 45) Shalom, 30 avril 1994, p. 13. 46) A. DALLE DONNE, op. cit., p. 289. 47) O. NARDI, Il Vitello d’oro, ed. Linea diretta, Milano 1989, p. 24. Voir aussi J. LOMBARD, La cara oculta de la Historia Moderna, Fuerza Nueva, Madrid 1979, vol. I, pp. 117-177 et 235-253. 48) O. NARDI, op. cit., p. 103. 49) O. NARDI, op. cit., p. 25. 50) Le magistère épiscopal s’est ainsi exprimé concernant la société multiethnique: «L’unité du Pays dans la vraie foi constitue la plus élevée de ses valeurs spirituelles. Cette unité peut être brisée si l’on ouvre les frontières à des courants d’immigration qui constitueront des tumeurs religieuses!… Au total détriment spirituel des populations catholiques». Mgr ANTONIO DE C ASTRO M AYER , Evêque de Campos, in Problemi dell’Apostolato moderno, Parma 1964, p. 95. 51) O. NARDI, op. cit., p. 104. 52) On connaît les noms des participants italiens : à Cesme, en Turquie, du 25 au 27 avril 1975, on trouve Giovanni Agnelli, Guido Carli, Roberto Ducci, Giorgio La Malfa, Arrigo Levi; à Villa d’Este le 24 avril 1965, Ugo La Malfa, Giovanni Malagodi, Franco Maria Malfatti, Alberto Pirelli; à Megève, en France, du 15 au 21 avril 1974, Enzo Bettiza, Alberto Ronchey ; à Torquay en Angleterre du 22 au 24 avril 1976, Tina Anselmi; à Aquisgrana du 10 au 12 avril 1980, Giorgio Benvenuto, Barbara Spinelli, Romano Prodi. 53) O. NARDI, op. cit., p. 204. 54) O. NARDI, op. cit., p. 215. 55) Tout le monde ou presque parle de la loge P2 comme d’une organisation maçonnique de “droite” en faisant référence au passé de Licio Gelli, d’abord soldat volontaire dans la guerre civile espagnole contre les communistes et ensuite comme adhérent à la RSI. Cependant «en 1944 on le retrouve collaborant avec les partisans, en particulier avec les hommes du PCI de Pistoie. (…) Il s’était donc transformé en délateur de ses anciens camarades, en établissant un contact avec les services secrets italiens» [M. TEODORI, P2: la controstoria, ed. Sugarco, Milano 1986, p. 19]. Un Gelli donc ambivalent, en même temps fasciste et communiste, démocrate-chrétien et informateur des services secrets italiens? Non, simplement franc-maçon et en tant que tel “transversal à tous les partis” ou organisations. On ne s’étonne pas dans ces conditions de le savoir en contact avec le KGB [PIERRE DE VILLEMAREST in Centre Européen d’information, 7 juin 1994, n° 6, p. II], ni d’apprendre que durant son activité de militant dans la RSI il était muni d’une «attestation d’une association juive à l’“héroïque ami” qui a libéré des prisonniers juifs» [GIANCARLO PENNA, in Il Giornale, 22 août 1994, p. 3]. «Le premier tour de valse Gelli l’exécuta (…) entre 1943 et 1945 en se transformant de soldat de la République Sociale Italienne en collaborateur des partisans et même protégé par le PCI. (…) Le second tour de valse Gelli l’exécuta à la Maddalena où, en septembre 1945, il fut arrêté pour des délits commis par un collaborateur. De sa propre initiative, au premier interrogatoire des gendarmes il fournit une liste détaillée de 56 collaborateurs de la RSI et des nazis, détaillant pour chacun faits et attitudes» [M. TEODORI, op. cit. pp. 54 55. Le 29 septembre 1950 le Centre de contre-espionnage de Pistoie envoie au Sifar [Renseignements Généraux italiens de l’époque] central une note sur Licio Gelli “agent suspect du Kominform”, le décrivant 40 comme un personnage “capable d’exécuter n’importe quelle action”, qui en 1944 a commencé la collaboration avec le PCI et qui aujourd’hui encore exerce des activités en faveur des Pays de l’Est communiste [cf. M. TEODORI, op. cit., p. 55]. En outre, d’après Teodori vingt-quatre morts suspectes sont liées d’une certaine manière à sa personne. Méritent attention le livre de ROBERTO FABIANI, I massoni in Italia, ed. Libri dell’ESPRESSO, Milano 1978, [qui met à nu la haine de Gelli pour les prêtres et ses rapports avec Jimmy Carter, le duc de Kent, Grand Maître de la Grande Loge Unie d’Angleterre, et la plupart des politiques italiens], celui d’Enrico NASSI, La Massoneria in Italia, ed. Newton, Roma 1994, et celui de CECCHI, Storia della P2, Ed. Riuniti, Roma 1985. 56) J. STIMPELE, La Chiesa cattolica e la Massoneria, in “Quaderni di Cristianità”, printemps 1986, n° 4, pp. 45 ss. 57) Il y avait presque tout le sommet des forces armées et des services secrets. 58) M. GAMBINO, La loggia P2: la storia e i documenti, Libera Informazione editrice, supplément au n° 12 d’Avvenimenti, année V, p. 5. 59) M. GAMBINO, op. cit., p. 9. 60) M. GAMBINO, op. cit., p. 17. 61) M. GAMBINO, op. cit., p. 13. 62) De Il Giornale, 14/5/1994, p. 11. 63) O. NARDI, op. cit., p. 237. 64) H. DELASSUS, Le problème de l’heure présente, Desclée, Lille-Paris 1905, vol. I p. 396. 65) Cf. Archives Israélites, 1861. 66) Revue de Paris, ann. 35, n° 2, p. 574. 67) I. L OEB , La Littérature des pauvres dans la Bible, Paris, 1892, p. 218. 68) Die Geheimnisse, 3° ed. 1919, p. 17. 69) In The Macabean cité par O. NARDI, op. cit. p. 241. 70) J. BIDEGAIN, Grand Orient, ses doctrines et ses actes, p. 186, cité in DELASSUS, op. cit., p. 363. 71) J. IZOULET, Paris capitale des religions, ou la mission d’Israël, Albin Michel, Paris 1926, p. 56. 72) VERMINJON, Le forze occulte che manovrano il mondo, tip. S.A.T.E.S., Roma 1970, p. 6. 73) La Stampa, 4 novembre 1994, p. 20. 74) Cf. MGR G. B. P RANAITIS , Christianus in Talmude Judeorum, Pietroburgo 1842. 75) Country Magazine, n° 3-4, 1928; cité in VERMINJON, op. cit., p. 23. 76) VERMINJON, op. cit., p. 28. 77) Cf. SVETONIO, Vite dei Cesari. 78) De superstitione, ed. Bipont, 1782, vol. IV, p. 423. 79) Cf. TACITE, Annales, ch. 61, livre X. 80) TERTULLIEN, Scorp., c. X. 81) V ERMINJON , op. cit. pp. 29-31. Cf. aussi U. BENIGNI, Storia sociale della Chiesa, cité in Sodalitium (éd. ital.) n° 43, pp. 29-33. 82) B ERNARD LAZARE , L’Antisémitisme, Documents et Témoignages, Vienne 1969. 83) Cf. Sodalitium n° 34, pp. 21-46. 84) “Les grands fournisseurs américains à l’URSS de bateaux, armes, machines, utensiles, etc.… passèrent tous par la Famille Karp” [VERMINJON, op. cit. p. 43]. 85) Cité in VERMINJION, op. cit., p. 73. 86) ABBÉ D. SANBORN, in Sodalitium n° 45, p. 41. 87) Ibid., pp. 54-55. 88) P. FINLEY, They dare to speak out, Lawrence Hill, Chicago 1989, p. 92. 89) A. COTTA, Le capitalisme dans tous ses états, Fayard, Paris 1991, p. 158. 90) MELVIN I. WROFSKY, We are one! American jewry and Israel, Ander Press-Doubleday, New York 1978, p. 265. 91) C. A TTLEE , A Prime Minister Remember, Heinemann, London 1961, p. 181. 92) E. TIVNAN, The lobby, p. 56. 93) I. L. KENAN, Israel’s defense line, Prometheus, Buffalo 1981, pp. 66-67. 94) S. AVINERI, The Making of Modern Sionism, Basis Book, New York 1981, p. 219. 95) The Time, 21-06-1976. 96) G. VIREBEAU, Mais qui gouverne l’Amérique?, éd. Henry Coston, Paris 1991, p. 3. 97) Ibid., p. 5. 98) Ibid., pp. 10-11. 99) Il Foglio, 11 décembre 1996. La Stampa, 5 février 1997. 100) Ibid., p. 14. 101) Discours-programme tenu par le Rabbin Reicborn au ‘Raleb’ de Prague en 1880, et publié par Sir John Radcliff sur Le Contemporain le 1/7/1886. Cf. VERMINJON, op. cit., p. 86. 102) ST JEAN CHRYSOSTOME, Contra Judeos, hom. I. 103) BUXTORFIUS SENIOR, Synagoga Judaica, Bâle, 1603, p. 24. 104) DANIELE PERGOLA, Gli ebrei popolo reietto e maledetto da Dio, Torino 1886. 105) ST THOMAS D’AQUIN, Super Matt. XXVII, 18; n° 233, Marietti, Torino 1951. 106) SAINT LOUIS MARIE DE MONFORT, Prière embrasée. 107) VERMINJON, op. cit., pp. 145-7. 108) VERMINJON, op. cit., pp. 183. 109) «Il est difficile de retrouver dans l’histoire des dernières décennies une figure plus héroïque et plus populaire que Maximilien Kolbe». In R. ESPOSITO, Santi e massoni al servizio dell’uomo, Bastogi, Foggia 1992, p. 193. 110) Ibid., p. 193. 111) Gli scritti di Massimiliano Kolbe, Città di Vita, Firenze 1975-1978, 3ème volume, p. 771. 112) Ibid., p. 299. 113) “Les juifs - écrivaient Giuliotti et Papini n’auraient pas pris le pouvoir qu’ils ont et n’auraient pas tant d’outrecuidance, si les chrétiens étaient vraiment chrétiens et n’avaient pas adopté les valeurs juives. La conversion des chrétiens au Christianisme apporterait la fin du sémitisme et donc de l’antisémitisme et peut-être la conversion des juifs eux-mêmes à la Vérité crucifiée en Judée”. In G IULIOTTI - P APINI , Dizionario dell’omo selvatico, Firenze 1923, p. 190. 41 ectures Françaises [n° 489 - janvier 1998] a L publié la note suivante: «Roberto de Mattei est bien connu pour son remarquable livre “De Si Massoneria oggi fait de la publicité... l’utopie du Progrès au règne du chaos” publié chez l’Age d’Homme (120 F), il préside le Centre Culturel Lépante, une association très proche de la TFP (Tradition, Famille, Propriété) brésilienne. Il est l’auteur de “Le croisé du XXè siècle. Plinio Corrêa de Oliveira” (L’Age d’Homme 1997). Cette TFP est souvent qualifiée de “secte” et très critiquée en France, le terme secte nous semble un peu abusif mais il est très difficile de se faire une idée précise tellement les attitudes et les informations qui circulent sont contradictoires». Le présent article veut être une contribution pour éclaircir les doutes des amis de Lectures Françaises et des autres lecteurs français de Sodalitium. Après une intéressante recension concernant Julius Evola ( 4), la “revue du Grand Orient d’Italie” conseille à ses vénérables lecteurs une dizaine de livres dans la rubrique “indications bibliographiques”; au milieu d’œuvres maçonniques ou ésotériques, voici - ô surprise! - pointer le livre de Massimo Introvigne sur le satanisme, en bonne compagnie avec celui sur le New Age d’un autre militant d’Alleanza Cattolica (mais aussi propagateur des thèses d’Introvigne sur le Messaggero di Sant’Antonio) Pier Luigi Zoccatelli. Le moins que l’on puisse dire est que les maçons du Palais Giustiniani ne rangent pas Introvigne et Zoccatelli parmi leurs plus dangereux ennemis, puisqu’ils en recommandent les œuvres: dis-moi qui tu loues, je te dirai qui tu es. ALLIANCE... MAÇONNIQUE? ou la dérive de la TFP Le Cesnur et la Grande Loge de France Par le Père Torquemada Q ui ne connaît pas, dans le petit monde catholique “contre-révolutionnaire” italien, l’association Alleanza Cattolica? Elle est estimée pour son sérieux, pour la représentativité de certains de ses membres, pour une activité presque trentenaire au service du mouvement catholique et, enfin, pour ses liens étroits avec la créature du défunt Plinio Corrêa de Oliveira, appelée Tradition, Famille et Propriété (TFP), qui joua un rôle non négligeable dans la défense de la doctrine de l’Eglise durant le concile Vatican II (1). Sur Sodalitium, depuis maintenant plusieurs années (depuis 1993 exactement), j’ai eu l’occasion de m’occuper plusieurs fois de certains membres de cette association, et en particulier du célèbre sociologue Massimo Introvigne (2), tout comme des positions qui font leur chemin dans ce milieu (3), en dénonçant le danger de collusions avec la maçonnerie et avec sa mentalité. Une accusation aussi grave, s’agissant d’associations catholiques et de ses dirigeants, doit être documentée. Nous l’avons fait par le passé. Malheureusement, nous devons le faire à nouveau. Au point de justifier la provocation contenue dans le titre de cet article: peut-on encore parler d’Alleanza Cattolica, ou est-ce mieux d’écrire désormais Alleanza Massonica? Au lecteur l’ardue sentence... Mais il y a pire. Nous lisons en effet sur la “lettre d’informations confidentielles d’Emmanuel Ratier” Faits & Documents (n° 27, 15 mai 1997, p. 5), la nouvelle suivante: La direction du Cesnur France, association d’études sur les ‘nouveaux mouvements religieux’ (appelés également ‘sectes’) filiale du Cesnur Italie dirigée par le sociologue catholique Massimo Introvigne, paraît contrôlée par la Grande Loge nationale française, avec la présence au conseil d’administration du professeur Antoine Faivre, rédacteur en chef des Cahiers Villard de Honnecourt, Maître Olivier-Louis Séguy et du professeur Roland Edighoffer. Pour qui n’aurait pas compris, ces trois messieurs ont une triple activité: ils sont professeurs, sont membres du conseil d’administration du Cesnur et sont des huiles de la Grande Loge nationale de France, la Maçonnerie de “droite”. Une coïncidence? Image de propagande de la TFP 42 Massimo Introvigne ignore-t-il ce fait, que connaît Emmanuel Ratier? Quelle mesure entend-il prendre? Ou bien est-il complice? Ses précédents rapports avec la Maçonnerie & Co. laissent croire que la dernière hypothèse est la bonne (2). A ce point, le problème se déplace d’Introvigne à ses supérieurs et amis d’Alleanza Cattolica. Le Cesnur et Alleanza Cattolica Introvigne, nous l’avons déjà rappelé, est un dirigeant d’Alleanza Cattolica, une association étroitement liée (tout comme le Centro culturale Lepanto et d’autres associations ou sigle) à l’organisation brésilienne Tradition, Famille et Propriété (TFP), fondée par le Dr Plinio Corrêa de Oliveira. La revue Orion (5) a récemment fait remarquer, malicieusement, que le Cesnur “n’est certainement pas une consœur de la TFP. Même si toutes les activités du Cesnur paraissent sur Cristianità [organe officiel d’Alleanza Cattolica, n.d.a.] dans la rubrique La buona battaglia...” (6). Cela signifie que Alleanza Cattolica considère un peu le Cesnur comme sa créature, contrôlée, entre autres, précisément par Massimo Introvigne. La nouvelle qui a été publiée par Emmanuel Ratier démontre que non seulement Introvigne est personnellement compromis avec la maçonnerie (comme cela est amplement démontré sur Sodalitium), sans que Alleanza Cattolica, Lepanto ou la TFP n’y trouvent rien de mal, mais aussi que le Cesnur est infiltré par des (ou infiltre des) francs-maçons. Alleanza, Lepanto et la TFP ne se sont pas désolidarisées d’Introvigne (au contraire...) Après les dénonciations publiées par Sodalitium, en effet, Alleanza Cattolica, la TFP et les associations amies, n’ont pris aucune mesure contre Introvigne, ni ne se sont désolidarisées de ses initiatives. Au contraire. Giovanni Cantoni, “fondateur et régent national d’Alleanza Cattolica” n’a pas hésité à publier un livre, extrêmement intéressant et sur lequel nous reviendrons, justement avec Massimo Introvigne (7). Ce même livre est cité par Roberto de Mattei (8), dans la biographie de Plinio Corrêa de Oliveira, et par l’Office Tradition Famille Propriété de Rome, dans l’opuscule La main qui apaise, la voix qui endort (bref commentaire de l’Office TFP sur un libelle calomnieux), publié en 1996 en réponse à l’édition italienne du “rapport Joyeux” publié par Pietro Parenzo (9). Dans son opuscule la TFP romaine attaque les “lefebvristes/sedevacantistes” (sic), coupables, à son avis, d’avoir conclu un pacte scélérat contre la TFP avec les “socialo-communistes”, réalisant ainsi une “réédition in-16 du Pacte RibbentropMolotov”! A l’appui d’une thèse aussi fantaisiste, une longue citation du “célèbre spécialiste du problème des sectes Massimo Introvigne...” (p. 3, note 4). La TFP oublie de préciser que, au moins dans ce cas, le “célèbre spécialiste” est partie prenante, dans la mesure où il est lui-même un dirigeant d’une association satellite de la TFP, Alleanza Cattolica. Le “Rapport Guyard”, la TFP, et les “lefebvristes/sedevacantistes” L’opuscule de la TFP fait allusion à la dernière tuile qui est tombée sur la tête du controversé mouvement brésilien. Le rapport d’enquête sur les sectes de l’Assemblée Nationale française du 10 janvier 1996 (dit Rapport Guyard) a inclus dans sa liste de sectes à tenir sous le contrôle justement la TFP! Paradoxalement, le “célèbre spécialiste des sectes” Massimo Introvigne appartiendrait, à son tour, à un mouvement satellite d’une secte! La chose ne fait certainement pas plaisir à la TFP, spécialement après les mésaventures judiciaires qui obligèrent l’association à fermer l’école de Saint-Benoît en 1979, les autres ennuis arrivés récemment en Espagne (1995), ceux plus anciens au Venezuela (1984), la condamnation de l’épiscopat brésilien en 1985, etc. Face à ces difficultés, la TFP et ses satellites forment le carré. Pour défendre la TFP et l’Opus Dei (presque aussi chère à nos “contre-révolutionnaires”), il faudra: 1) attaquer les mouvements anti-sectes (qui osent inclure parmi les sectes TFP et Opus Dei). 2) défendre avec acharnement la liberté religieuse des sectes les plus incroyables (s’il s’en tirent, a fortiori nous aussi). 3) se venger des “lefebvristes/sedevacantistes”, présumés coupables de dénonciations contre la TFP et l’Opus Dei, en les dénonçant à leur tour comme sectaires, sans trop cacher le désir de les voir, à leur place, dans un futur et plus actualisé “rapport Guyard”. Et qui, mieux que le “célèbre spécialiste” Massimo Introvigne pourra se charger de cette besogne? 43 Liberté, égalité, fraternité “Sectes” et “droit de persécution”: les raisons d’une controverse. C’est le titre de la contribution d’Introvigne au livre déjà cité écrit en collaboration avec Giovanni Cantoni. Dans cette intervention, Introvigne s’acquitte remarquablement des trois charges qui lui ont été confiées. L’essai est, directement, contre le “rapport Guyard”. Introvigne pourrait le couler facilement en se rappelant, comme ont fait les amis de Lectures Françaises, que le rapporteur du rapport, Guyard en l’occurrence, est luimême un franc-maçon, membre donc d’une société secrète qui est, pour l’Eglise catholique, “la Secte” par excellence. Rien de tout cela. Introvigne préfère attaquer les inspirateurs du rapport (en plus des Renseignements généraux, les services secrets français), c’est-à-dire les mouvements “antisectes” (laïcs) ou “contre les sectes” (religieux). En faisant cela, il s’oppose non seulement aux plus violents et laïcistes parmi ces groupes, mais aussi aux mouvements “très catholiques” comme le GRIS (Groupe de Recherche et d’Information sur les Sectes), auquel, jadis, appartint Introvigne. Sur la question, il y aurait à discuter. Cantoni et Introvigne en appellent à la déclaration conciliaire Dignitatis humanæ personæ pour justifier la plus ample liberté de pensée et d’organisation pour tous les “nouveaux mouvements religieux”, jusqu’aux plus répugnants. Nous ne sommes naturellement pas d’accord sur cette prémisse, même si nous aussi nions à l’Etat (d’autant plus à l’Etat laïc d’aujourd’hui) le droit d’établir les limites de l’orthodoxie, et craignons une persécution du catholicisme sous le prétexte d’extirper les “sectes”. La seconde tâche d’Introvigne consiste à défendre tout genre de sectes pour sauver, dans le tas, même la TFP. Un document officiel du CESNUR de Turin et du CESNUR USA (29 janvier-6 février 1996), intitulé Instauration d’un droit de persécution? Une réponse au rapport de la Commission d’Enquête sur les Sectes, et publié en appendice dans le livre suscité (pp. 120-126) défend, en relevant plusieurs erreurs du rapport Guyard, le New Age, Moon, le Lectorium Rosacrucianum, la Wicca, The Family (ex-Enfants de Dieu) (10), l’Eglise de Dieu Universelle, la religion Aumiste, la Soka Gakkai et les raëliens, pour arriver, enfin, à la TFP (suivie de Scientology). Le document, signé par huit académiciens, dont le premier est Introvigne, se termine en invoquant rien moins que “la devise par laquelle la France aime être représentée dans le monde entier: Liberté, égalité, fraternité”! Rien de mal, pour les ennemis jurés de la révolution française... Rapport sur les sectes? Enlevez la TFP, mettez les sedevacantistes! La troisième tâche, dénoncer les odieux “lefebvristes/sedevacantistes”, a été accomplie par le “célèbre spécialiste” au point 4 de sa Brève analyse critique du ‘rapport Guyard’ (pp. 105-106): ce sont les pages partiellement citées aussi par l’opuscule de la TFP romaine. Le point s’intitule Les étranges omissions du rapport. Nous avons déjà rappelé comment la revue fondée par le célèbre spécialiste de la maçonnerie Henri Coston, Lectures Françaises, avait souligné une évidente omission du rapport: celle de la franc-maçonnerie (11). Introvigne ne s’en scandalise pas du tout. Les “étranges omissions”, pour lui, sont tout autres. La première, que tout bon agent du Mossad ne manquerait pas de signaler, est celle “des groupes islamistes radicaux, dont les connexions avec le terrorisme sont bien connues” (p. 105) (12). Tout de suite après les “terroristes islamistes”, Introvigne dénonce les “lefebvristes/sedevacantistes”: “Une autre singulière omission concerne les groupes [auxquels Introvigne adhéra par le passé! n.d.a.] qui ont rompu avec l’Eglise catholique par voie de schisme, comme la Fraternité Saint Pie X, fondée par le défunt Mgr Marcel Lefebvre, et les nombreux groupes ‘sedevacantistes’ présents en France, qui critiquent comme trop modérée la position de la Fraternité Saint Pie X, considèrent le siège de Rome ‘vacant’ et Jean-Paul II pas ‘vraiment’ Pape” (p. 105). Après avoir lancé la pierre, notre délateur cache hypocritement la main, en précisant ne pas entendre augmenter le nombre des mouvements sectaires dénoncés dans le rapport: “que ce soit bien clair: je ne souhaite pas du tout que l’étiquette de ‘secte’, particulièrement odieuse dans le sens où l’entend la commission, soit appliquée à un nombre encore plus grand que celui, déjà excessif, des mouvements mentionnés dans le rapport. Toutefois...” (pp. 105-106). Toutefois, il est évident que ça l’embête pas mal “que l’on doive mentionner la TFP - dont les dirigeants et les membres n’ont jamais été Photo publiée dans un article de Respinti. Les anticommunistes USA manifestant pour la liberté des juifs soviétiques frappés d’excommunication - (...) et non pas au contraire des groupes ultra-traditionalistes ou sedevacantistes, à l’égard desquels il y a bien eu souvent une excommunication” (p. 106). En somme, Introvigne, pas trop en cachette, invite le Parlement français, à l’occasion d’une réédition du Rapport, à effacer la TFP et à insérer les traditionalistes et les sedevacantistes (peut-être même la revue Sodalitium qui l’indispose tant), sur la base de l’orthodoxie “wojtylienne”. De rage, Introvigne (et ses commettants) passe... au délire (pour une fois le ‘complottiste’ c’est lui). Voici la phrase rapportée aussi par le bureau TFP de Rome dans la réponse à Pietro Parenzo, et par Roberto De Mattei dans la biographie de Plinio (13): “Mais il y a une hypothèse plus inquiétante ou, si l’on veut, plus malicieuse. Particulièrement - mais non seulement - en France, ces dernières années, plusieurs publications ‘lefebvristes’ et ‘sedevacantistes’ ont mené campagne contre les ‘sectes’ avec des tons particulièrement violents (14). S’il s’agissait seulement - ou principalement - de la défense de la doctrine catholique traditionnelle, on ne serait pas étonné. Mais, de fait, cette littérature fait siens les arguments du mouvement anti-sectes laïciste...”. Mais quand donc, cher Introvigne? Aucun de nous n’adopte ces arguments! Mais voici la réplique du sociologue rouge (15): “...et attaque volontiers comme ‘secte’ des réalités du monde catholique comme la TFP et l’Opus Dei”. Voilà le vrai délit! Attaquer TFP et Opus Dei! Et voici la calomnie d’Introvigne, qui après avoir tant attaqué le ‘complottisme’ de ceux qui voient des satanistes et des judéo-maçons sous le lit, devient subitement pire que ses ennemis en imaginant ce scénario fantaisiste made in Brazil: “surgit légitimement le soupçon que le mouvement anti-sectes se sert de certains groupes ‘lefebvristes’ et ‘sedevacantistes’ comme de troupes d’avant-garde, de sapeurs, à jeter dans la mêlée pour la première charge à l’arme blanche; et, naturellement, à sacrifier au moment opportun, puisque - en adoptant les critères habituels du mouvement anti-sectes - ces groupes pourront facilement être, à leur tour, disqualifiés comme ‘sectes’ quand, si et dans la mesure où ce sera nécessaire” (p. 106), et avec la suggestion empressée d’Introvigne, ajoutonsnous, qui depuis longtemps n’a pas manqué d’inclure les ‘lefebvristes/sedevacantistes’ dans la liste des ‘sectes’ (ou ‘nouveaux mouvements religieux’, comme il écrit plus élégamment). La réalité, cher Massimo, est bien plus simple, et n’a pas besoin d’hypothèses si “malicieuses”. Le “Rapport Guyard”, Introvigne l’oublie-t-il (?), a attaqué aussi le mouvement “catholique traditionaliste”, aussi bien que la TFP. Dans le filet, pour être exact, est tombée la CRC (ContreRéforme catholique) de l’abbé de Nantes, avec de graves conséquences dans ses rapports avec l’évêque local. Introvigne et le Cesnur, qui défendent les Enfants de Dieu et la Wicca, ne se fendent pas d’un mot pour le catholique de Nantes, si proche, par tant de côtés, de la TFP. Il n’y a donc aucune protection pour les “traditionalistes” de la part de Guyard et compagnie: éventuellement il y a eu un oubli (que le Cesnur ne manque pas de souligner: merci de tout cœur!). Si de Nantes est tombé dans le filet c’est simplement parce que des personnes ayant quitté son mouvement l’ont accusé (à tort ou à raison, ceci ne m’intéresse pas dans le contexte de cet article) de doctrines et de comportements certainement ‘sectaires’. La même chose est arrivée à la TFP et à l’Opus Dei. Voilà pourquoi - simplement - TFP, Opus Dei et CRC sont cités dans le rapport et non la Fraternité Saint Pie X. L’Institut Mater Boni Consilii n’est pas non plus inclus (au moins pour le moment) dans la liste des sectes (peut-être parce que n’existent pas les litanies de la maman de l’abbé Ricossa, 45 comme existent au contraire celles de la maman du docteur Plinio), alors qu’il se trouvait depuis des années, et à la place d’honneur, dans la bien plus dangereuse liste du rapport sur l’‘antisémitisme’. Comme on le voit, cher Massimo, nous ne jouissons pas (comme vous) de protection en haut lieu, comme “malicieusement” on le laisse croire aux lecteurs des éditions de Cristianità. Le Président Introvigne (de la Société Transylvanienne de Dracula) et Marco Respinti Dans la suite de l’article je reviendrai sur Marco Respinti et son étrange doctrine sociale catholique, que Gianfranco Morra appellerait “catho-capitalisme” (16). Respinti écrit sur le quotidien d’Alleanza Nazionale, Il Secolo d’Italia, mais est aussi un militant d’Alleanza Cattolica. Si Massoneria oggi reccomande les livres d’Introvigne et de Zoccatelli, Respinti ne le fera-t-il pas, lui qui partage avec eux l’expérience d’Alleanza Cattolica? Aucun doute. Lisons donc la recension d’un livre d’Introvigne faite par Respinti (17). Le militant d’Alleanza Cattolica ne lésine pas les louanges sur son Hiérarque: les livres d’Introvigne sont “hautement scientifiques”, son étude sur le satanisme “monumentale”. C’est un “investigateur infatigable... détective non de l’impossible... mais du très possible... maître à penser habile...”. Ses études “fournissent les meilleures - les uniques - clés vraiment interprétatives...”; sa créature, le Cesnur, est “un réseau d’organisations académiques internationales”. Ne nous étonnons pas alors si “le Cesnur et son directeur” ont produit un “colossal effort intellectuel, culturel et scientifique”. Tant de louanges seulement pour faire la publicité d’un livre d’Introvigne sur Dracula (sujet sur lequel il est “un grand expert” en tant que “président de la section italienne de The Transylvanian Society of Dracula”)? Certainement pas. De Dracula Respinti passe aux Enfants de Satan (appelés une fois par erreur, lapsus freudien?, Enfants de Dieu) de Marco Dimitri, en se réjouissant - avec le Cesnur - de l’acquittement décrété par le tribunal le 20 juin dernier. En effet, écrit Respinti, si l’on commence par persécuter ces gens-là on “finit ensuite par exagérer et s’exciter comme dans le cas de certains récents procès culturels qui ont eu pour objet de très importantes réalités catholiques comme l’Opus Dei, les Sociétés pour la Défense de la Tradition, de la Famille et de la Propriété, le mouvement des Focolarini, Communion et Libération et même Mère Teresa de Calcutta et ses religieuses”. La défense de la TFP est le véritable objectif de Respinti, comme d’Introvigne, dans ce type d’articles. Habilement, le mouvement brésilien est inclus dans une longue liste de “respectables” mouvements catholiques au-dessus de tout soupçon, afin que le lecteur ne s’aperçoive pas du but des deux militants d’un mouvement satellite de la TFP. Taradash contre-révolutionnaire? Liberté Religieuse et législation anti-sectes: c’est le titre d’une ‘table ronde’ qui s’est tenue à Rome en juin 1997 pour présenter le livre de Cantoni et Introvigne dont nous avons déjà parlé, et dont nous parle le militant d’Alleanza Cattolica Francesco Pappalardo, toujours sur le Secolo d’Italia ( 18). Organisateurs: l’Idis (Istituto per la Dottrina e l’Informazione Sociale) et Alleanza Cattolica, parmi lesquels existe la distinction qu’il y a entre blanc bonnet et bonnet blanc, étant donné que le recteur de l’IDIS est Giovanni Cantoni, alors que le régent d’Alleanza est Giovanni Cantoni. Parmi les participants à la table ronde, outre les “représentants de certains nouveaux mouvements religieux”, également Mme Fumagalli Carulli, ainsi que “la voix de son maître”, c’est-à-dire Juan Miguel Montes Cousino, “directeur de l’office Tradition, Famille, Propriété”. Mais voici une surprise: parmi les conférenciers on remarque le nom du député de Forza Italia, Marco Taradash, libéral, libertaire et libertin, pendant de nombreuses années célèbre compère de Marco Pannella dans la guerre au catholicisme, guerre qu’il mène aujourd’hui dans le parti de Berlusconi (P2). Taradash “a exprimé son estime” pour l’œuvre réalisée par les organisations de Cantoni; Cantoni devrait s’en soucier et se demander: où me suis-je trompé? Au contraire, Taradash est enrôlé parmi les askaris de la contre-révolution, sans que Montes ne bronche. Le maximum est rejoint par Massimo (Introvigne), lequel, attaque le rapport du parlement belge sur les ‘sectes’, puisque (comme le rapporte Pappalardo) “dans sa grossièreté il répète à l’égard de certains groupes juifs carrément l’accusation de kidnapper des enfants chrétiens”. Carrément. 46 Repousser Respinti Mais la stratégie TFP-Alleanza Cattolica ne se limite pas actuellement à la question des “sectes”. Digne de particulière attention (19) est la campagne en faveur de la droite anglo-saxonne, de laquelle est porte-drapeau, mais non unique soldat, Marco Respinti, militant d’Alleanza Cattolica et prolifique collaborateur du Secolo d’Italia. Nous avons déjà signalé et dénoncé le danger (3); il s’agit donc seulement de mettre au courant le lecteur. Le fait est que la campagne en faveur du “libéralisme classique anglo-saxon” entrepris par la TFP-Alleanza Cattolica-Lepanto se poursuit sur tous les fronts: du front “traditionaliste” (20) à celui de la droite (21), sans oublier le front modéré d’Alleanza Nazionale ( 22). Quant à l’Opus Dei il n’a pas besoin d’être infiltré ( 23). De notre côté nous répétons notre ferme refus de tout genre de libéralisme: nous repoussons Respinti. Libéraux-conservateurs? Non, merci. Alleanza Nazionale, après le congrès de Fiuggi, liquidateur du néofascisme, de l’antisémitisme et même de l’antisionisme, souffre d’une crise d’identité: qui substituer à Mussolini? Marco Respinti, dans les pages du Secolo d’Italia, propose, évidemment, l’analyse d’un contre-révolutionnaire, même un “contre-révolutionnaire à moustaches” ( 24), le philologue Christian Kopff. “Aujourd’hui - affirme l’américain - avec la naissance d’Alleanza Nazionale ce projet [d’Almirante] semble avoir une nouvelle dignité (...). L’Italie a besoin d’une droite sérieuse, grande; d’un authentique mouvement conservateur...”. Un modèle? Reagan, un “méthodiste” dont la foi “se reflétait dans les choix politiques”. L’éloge du méthodisme vient d’un luthérien, puisque Kopff, “le contre-révolutionnaire à moustaches”, est un “luthérien conservateur”. Les “contre-révolutionnaires”, donc, doivent être “conservateurs” (peu importe qu’ils soient catholiques, luthériens ou méthodistes). Mais ils doivent être aussi “libéraux”. C’est ce qu’explique un autre militant d’Alleanza Cattolica, Andrea Marcigliano, toujours sur le Secolo d’Italia (25). L’adepte d’Alleanza Cattolica se reconnaît dès les premiers mots, par une citation canonique du Dr Plinio: “La bataille des mots, comme disait Corrêa de Oliveira, est effectivement fonda- mentale, et qui la perd remet à l’antagoniste un pouvoir immense, lui donne un avantage qui ne peut pas être comblé”. Sur la base de ce principe, Alleanza Cattolica des années 70 critiquait Léon XIII d’avoir accepté le mot “démocratie”: du mot, expliquaient les disciples de Plinio, on serait passé au contenu... Aujourd’hui la bataille des mots fonctionne en sens inverse: il ne faut pas laisser à l’ennemi (la “gauche”, naturellement) le mot “libéral”! Ainsi Marcigliano offre aux catholiques “contre-révolutionnaires” un nouveau maître, le “libéral” et “libériste” von Hayek. Von Hayek critique les conservateurs, c’est vrai, mais aussi “le libéralisme européen (...) qui s’identifie avec l’utopie rationaliste et jacobine, racine théorique de la Révolution Française”. Du libéralisme “européen” il faut exclure le libéralisme anglo-saxon: “c’est précisément la tradition des vieux whigs britanniques que Hayek considère avec un intérêt particulier...”. Une photographie de deux anglais en haut-de-forme illustre l’article, avec la légende suivante: “deux gentilshommes britanniques sur une vieille photo. L’Angleterre est le Pays où le binôme tradition-modernisation a toujours été particulièrement solide”. Voilà donc que le libéralisme anglais réalise le rêve des étranges catholiques contre-révolutionnaires, un rêve “libéralconservateur”. Michael Novak, un des auteurs “catholiques” américains auquel se réfèrent expressément Respinti et Introvigne, ne craint pas de désigner par son nom le courant de pensée qui, comme lui, soutient la Révolution de 1776 plutôt que celle de 1789: “la tradition américaine a été de manière critique résumée dans la ‘tradition catholique libérale’ représentée par les écrits de Toqueville, Lord Acton, Jacques Maritain et John Courtney Murrey, entre autres” (26). Ne nous étonnons pas de ces noms: le libéralisme oyez! oyez! - a des racines médiévales, thomistes même! (27). Dans un article sur Burke, Respinti écrit: Dans cette optique [de la pensée de Burke] prennent donc une luminosité particulière les mots de Frank S. Meyer l’apôtre nord-américain de la ‘fusion’ entre conservatisme traditionaliste et ‘libéralisme anglo-saxon’ dans une optique d’efficace action antiprogressiste (...) qui s’étant converti au catholicisme peu de temps avant de mourir déclarait: ‘Nous vivons au milieu d’une révolution vouée à détruire la civilisation occidentale. Les conservateurs, par définition, sont les défenseurs de cette civilisation; et à une 47 “Deux gentilshommes britanniques sur une ancienne photo. L’Angleterre est le pays où le binôme traditionmodernisation a toujours été particulièrement solide” (Il Secolo 30-05-97) époque révolutionnaire cela signifie qu’ils sont et doivent être contre-révolutionnaires” (29). Nous pouvons dire, sans crainte d’être démentis, que TFP, Alleanza Cattolica, Centro Culturale Lepanto, etc., sont passés, au moyen d’un transbordement idéologique inaperçu (?) du catholicisme intégral au libéralisme catholique. Il faut le dire clairement, une fois pour toutes. Le Fr. Edmund Burke, de la Jerusalem Lodge n° 44, Clerkenwell, Londres Si le lecteur essaye d’identifier un représentant de ces old whigs, Marcigliano n’hésite pas à lui proposer “Edmund Burke, classique exemple de whig, mais aussi politique et penseur inflexiblement hostile à l’hyper-rationalisme illuministe et au ‘grossier rationalisme militant de la Révolution française’”. Respinti aussi est un inconditionnel de Burke, à la suite de son bien-aimé Russel Kirk, “un des pères de la renaissance burkienne américaine contemporaine”: Dans le Dizionario del pensiero forte de l’IDIS (succursale d’Alleanza Cattolica), Respinti insère naturellement Burke, autrement dit la sagesse du conservateur (28). “Ce n’est pas risqué - écrit Respinti - de considérer Burke comme un contre-révolutionnaire - le premier? - de ‘désir’, en en mettant en relief le catholicisme, au moins culturellement, in pectore” (29). Dommage toutefois que Burke apparaisse dans un autre dictionnaire (que Respinti se garde bien de citer), à savoir l’Encyclopédie de la Maçonnerie d’Albert G. Makey et publiée par la Masonic History Company. A la rubrique Burke (30) le lecteur apprendra que la sagesse de ce conservateur était une sagesse maçonnique, puisque Edmund Burke était affilié à la Jerusalem Lodge n° 44, Clerkenwell, London. Il apprendra même que le célèbre maçon, le lettré et illuministe allemand Lessing était un ami et un estimateur de Burke (31), qui traduisit l’œuvre burkienne Enquête sur le Beau et sur le Sublime que Respinti soutient contenir “des aspects importants de la pensée philosophique de la maturité” de son auteur. Respinti (et ses chefs) veulent donc nous faire suivre Burke, un anglican (mais de mère catholique, pour l’amour de Dieu!) et un franc-maçon! Et pourquoi donc? Il s’opposa à la Révolution française, et fut favorable à la révolution américaine: un libéral-conservateur, donc. Burke, était un whig, c’est-à-dire appartenant au parti du Parlement opposé à l’absolutisme royal; mais pour lui le parlement est certes l’expression du “peuple”, mais le peuple parle à travers “l’aristocratie naturelle” composée surtout des propriétaires terriens: “la civilisation dépend de la propriété et de ses inégalités” (32): musique pour les oreilles des latifundistes brésiliens de la TFP! “Burke continue l’Enciclopedia Treccani - fut un véritable Whig qui révérait autant la méthode que le résultat de la révolution anglaise [de 1688]. Ceux qui croient que la politique de ses dernières années [opposée à la révolution française de 1789] diffère dans les principes de celle de ses premières, le jugent mal”. Respinti confirme ces informations: “Joseph de Maistre (33) reconnut candidement sa dette à l’égard du grand anglo-irlandais et dans le choix du diplomatique savoyard de transcrire certaines pages de l’‘Histoire d’Angleterre’ de David Hume (34) - aujourd’hui encore considérée comme l’une des meilleures descriptions historiques de ce pays - en appendice à son ‘Considérations sur la France’ il n’est certainement pas déplacé d’entrevoir un écho burkien. Les suggestions de Hume à propos de la révolution puritano-républicaine d’Oliver Cromwell des années 1640-1650 ser- 48 vent effectivement à de Maistre pour décrire 1789 et les séquelles françaises. Pour Burke, la révolution de France est subversive, comme pareillement le sont les années du Commonwealth anglais de Cromwell, mais diversement par la soi-disant Révolution glorieuse de Edmund Burke 1688; et de Maistre semble être d’accord” (29). Burke, donc, s’oppose à la révolution anglaise de 1640 et à la révolution française de 1789; mais il soutient la révolution anglaise de 1688 et la révolution américaine de 1776. Or il ne faut pas oublier quelle fut l’origine marrane de la “glorieuse révolution” de 1688 qui détrôna un Roi catholique pour le remplacer par la dynastie protestante des Orange (35), ni l’origine maçonnique de la fameuse révolution américaine, que Respinti aime tant puisqu’elle est une “Révolution conservatrice” (36). On est pas surpris alors que l’admiration pour Burke réunisse le catholique Respinti et l’ambassadeur Sergio Romano, représentant important du courant libéral élitaire, pour qui cependant l’anniversaire le plus agréable est toujours celui du 20 septembre 1870, date de la prise de Rome par les troupes révolutionnaires (37). Toujours en suivant Kirk (et le collaborateur du Giornale R.A. Segre), Respinti regrette que les Etats-Unis, après la guerre de sécession, aient en partie perdu l’identité américaine qui était la conséquence d’une guerre d’indépendance “conservatrice, complètement différente - et jusque dans les idéaux radicalement opposée - à la Révolution française” (38). La défaite des sudistes eut comme conséquence un “déraillement libéral” (au sens anglais du terme), avec un “égalitarisme radical” qui, dans les XIVème et XVème amendements à la constitution (le XVème permet même le droit de vote aux noirs!) “ne faisaient que détruire l’objectif primaire par lequel la Constitution avait été approuvée”. Peu importe à Kirk (39) et Respinti que le XIVème amendement ait garanti la liberté de culte pour les catholiques; le vrai conservateur contre-révolutionnaire est anti-égalitaire et en faveur des élites, qu’elles soient du coton ou du café, protestantes ou catholiques... Un autre “maître”: Lord Acton Nous avons vu comment pour Novak la tradition américaine est résumée, dans le milieu catholique, par la tradition catholicolibérale de Toqueville, Acton, Maritain et Courtney Murrey. Si les deux derniers auteurs cités par Novak sont des contemporains, inspirateurs de la déclaration conciliaire sur la liberté religieuse Dignitatis humanæ, les deux premiers sont des personnages du passé. Respinti s’intéresse spécialement à Lord Acton. Deux solennelles citations de notre Lord, John Emerich Edward Dalberg Acton, baron d’Alenham, apparaissent dans l’article sur Kirk publié dans les actes du Congrès traditionaliste de Civitella del Tronto A vous le temps, à nous l’éternité (pp. 99 et 106). Elles résument bien la thèse de Respinti: “Loin d’être le produit d’une révolution démocratique et d’une opposition aux institutions anglaises, la constitution des Etats-Unis fut le résultat d’une puissante réaction contre la démocratie, en faveur des traditions de la mère-patrie”; “C’est simplement la démocratie impure de la Révolution française qui a détruit l’Union, en désintégrant les restes des traditions et des institutions anglaises”. Parfait! Mais qui était Lord Acton? Neveu de l’amiral anglo-bourbon John Acton (favori de la reine Marie-Caroline, grande patronne de la maçonnerie dans le royaume... avant la Révolution) John Emerich Dalberg Acton (1834-1902), converti au catholicisme, combattit, hélas, toutes les mauvaises batailles du siècle. Membre du parti libéral, il fut le conseiller écouté de Gladstone, qui le considérait comme l’“interprète autorisé du catholicisme libéral”. Naturellement, il fut “réticent à admettre le Syllabus et la définition du dogme de l’infaillibilité pontificale”, qui plus est, s’étant rendu pour l’occasion à Rome, “il devint le centre d’une vive opposition à la majorité du Concile” avec son ami et maître Döllinger, qui pour cette raison quittera l’Eglise pour fonder la secte des vieux catholiques. Acton ne le suivra pas, mais continuera à écrire contre l’infaillibilité et les “ultramontains”, raison pour laquelle deux de ses livres seront mis à l’Index. Voilà qui sont les “maîtres” que nous propose Respinti et, avec lui, Alleanza Cattolica! 49 Un autre “maître”: Churchill (United Studholme Lodge n° 1591) Récemment un jeune brésilien, venu en Italie pour son travail, s’est dit étonné, dans une conversation privée qu’il a eue avec l’auteur de ces lignes, des éloges que la TFP rend, dans son pays, à Winston L. S. Churchill. Il n’y a pas lieu de s’étonner. Notre ami ne doit connaître qu’approximativement la pensée du “docteur Plinio” s’il ignore son estime envers l’homme d’Etat libéralconservateur anglais. Le professeur De Mattei, fondateur du Centro Culturale Lepanto, dans son hagiographie de Plinio Corrêa de Oliveira écrit à ce propos: “Plinio Corrêa de Oliveira nourrit toujours de l’admiration pour la figure de Churchill, protestant, mais fort de caractère et ferme dans les idées, alors que le trait commun des hommes politiques catholiques du temps semblait être la disponibilité à ‘transiger’ et à collaborer avec l’adversaire” (40). Or, ce sera une coïncidence, mais sir Wiston Churchill lui aussi était un frère de la franc-maçonnerie! Il fut initié à la United Studholme Lodge n° 1591 le 24 mai 1901, devint “compagnon” le 19 juillet 1901 et “maître” le 25 mars 1902, à la Loge Rosemary n° 2815 de Londres (41). Comme si cela ne suffisait pas, Henry Coston nous fait savoir que “sir Wiston Churchill doit sa carrière politique à sir Ernest Cassel, le richissime israélite dont Edouard VII avait fait son confident” (42). Quelle conclusion tirer de ce fait? Ou bien le “docteur Plinio” a fait une gaffe (mais alors il n’était pas cet infaillible prophète de la contre-révolution comme il nous est dépeint) ou bien selon lui être protestants et francs-maçons n’était après tout si grave que ça... Si ça continue comme ça... Le “docteur Plinio”, l’Angleterre et les Etats-Unis J’arrive à la fin de mon petit article sansprétention, qui rassemble des nouvelles apparemment décousues. Le point de rencontre peut se retrouver dans la pensée de Plinio Corrêa de Oliveira, “maître” commun à Introvigne, Respinti, De Mattei, etc. Nous avons déjà vu son admiration pour l’un des protagonistes du pacte de Yalta, Wiston Churchill. Je ne prétends pas faire ici une analyse de son système de pensée. Je me limiterai à signaler un passage significatif de sa biographie, qui peut expliquer en partie l’étrange et imprévue passion pour la pensée anglo-saxonne de la part des nostalgiques du “Moyen Age”. Le professeur De Mattei écrit: “Dans la seconde moitié du XXème siècle, tandis que le processus révolutionnaire avançait, les Etats-Unis exercèrent un rôle semblable à celui de l’Europe dans les siècles précédants. Plinio Corrêa de Oliveira, rappelle un de ses disciples, ‘comparait ce rôle à celui joué par l’Autriche au XIXème siècle’. Comme l’empire habsbourgeois représentait la principale cible de l’internationale libérale de l’époque, l’empire américain a fini par constituer la ‘bête noire’ de l’internationale progressiste, qui voit en lui le symbole de la conservation et de l’anticommunisme...” (43). Ce passage est révélateur de certaines erreurs (exotériques) du penseur brésilien. Première erreur: pour Corrêa de Oliveira le libéralisme est un ennemi du passé, du siècle dernier, “d’avant-hier” (44): il n’a au contraire jamais cessé d’être un ennemi actuel, et toujours plus actuel, de l’Eglise. Seconde erreur: voir dans l’empire habsbourgeois (45) la cible principale de l’internationale libérale au siècle dernier: en réalité, hier comme aujourd’hui, cette cible était l’Eglise et, d’un point de vue politique au siècle dernier, son pouvoir temporel (pour lequel les Habsbourg ne levèrent pas le petit doigt). Troisième erreur: voir dans les U.S.A. le moderne Saint Empire Romain (comme Blondet y voit le nouvel empire romain). Les Etats-Unis sont en réalité un pays religieusement protestant, gouverné par une classe politique maçonnique, soumis, en politique étrangère, aux intérêts d’Israël. Les U.S.A. ne sont pas l’Autriche du XXème siècle, tout au plus ils sont l’Angleterre du XXème siècle. Angleterre et Etats-Unis sont la Mère et la Fille d’élection du libéralisme et de la Franc-Maçonnerie. Le philosophe juif Isaiah Berlin, décédé en 97 à 88 ans, a déclaré: “mes idées sont très anglaises. Je me suis fait adopter par l’Angleterre. C’est le meilleur pays au monde: le moins corrompu, le moins cruel, le moins sujet à des énormités. Quand je dis que je suis un libéral, tout ceci me vient d’Angleterre: juger les choses pour ce qu’elles valent, être empirique, ne pas vouloir être lié par des idéologies, la conviction que l’important est de protéger l’individu des partis, de l’Eglise et de l’Etat” (La Stampa, 7-XI-97, p. 23). En Angleterre existe, d’après le 50 maçon Corneloup, “une alliance non écrite mais réelle de la dynastie, de l’église anglicane et de la maçonnerie”. “Le quadrillage maçonnique de la Grande Bretagne est semblable à celui des Etats-Unis: plus de 800.000 maçons dans un pays de 55 millions d’habitants, c’est-à-dire environ 15 maçons sur mille habitants (la France en compte à peine plus d’un)”... Quant aux Etats-Unis, “la plupart des ‘pères fondateurs’ de la République américaine et 16 présidents de la République (de Georges Washington à Georges Bush) appartinrent à l’ordre maçonnique. (...) L’effectif total des francs-maçons aux Etats-Unis s’élève ainsi à plus de 3 millions. (...) On ne peut qu’approuver le jugement du maçon Harry L. Baum qui écrivait en 1950, sur la revue ‘New Age’: ‘Cette nation a été nourrie par les idéaux de la maçonnerie; (...) beaucoup de ceux qui aujourd’hui la dirigent sont aussi membres et dirigeants de l’Ordre maçonnique. Ils savent que notre démocratie américaine, avec son insistance sur les droits et les libertés inaliénables de l’individu, est la maçonnerie au gouvernement (...)’” ( 46). Sodalitium ne veut pas avec cela offenser les catholiques américains ou anglais, ni “diaboliser”, comme font certains, ces pays et leurs habitants. Les anticommunistes n’étaient pas ennemis de la Russie ou des russes; de la même façon, il ne s’agit pas d’être ennemis des Etats-Unis ou de la Grande Bretagne: il s’agit de libérer ces pays (et, désormais, le monde entier) non seulement du communisme, mais aussi du sionisme, de la maçonnerie et du libéralisme, comme de toute doctrine condamnée par l’Eglise, partout où elles prospèrent ou s’enracinent. Qui ne l’a pas compris, ou le sous-évalue, ignore le b.a.-ba de la doctrine sociale de l’Eglise. Appendice: Fernando Pessoa Ce n’est pas tout à fait le courant du libéralisme anglo-saxon. Mais nous sommes encore en plein dans le courant maçonnique... j’entends parler de la redécouverte (à droite comme à gauche) d’un auteur dangereux: Fernando Pessoa. Sur le Secolo d’Italia (47) Andrea Marcigliano, que nous avons vu tenir en grande estime le docteur Plinio, en fait des louanges démesurées (il l’appelle “maître”). Et pourtant... et pourtant Marcigliano n’ignore pas la carrière ésotérique de l’écrivain portugais, puisqu’il écrit: “...ce qui fut, pendant toute la vie non Fernando Pessoa l’un des intérêts, mais l’intérêt principal, et même le fondement du monde de Pessoa: l’ésotérisme. (...) Pessoa s’intéressa certes à la Théosophie... cependant il n’épuisa pas en cela son engagement ésotérique, qui au contraire, devint avec les années toujours plus profond. (...) Il redécouvrit rapidement les chemins des ésotérismes traditionnels bien plus complexes que les formulations théosophiques: la magie, la mystique médiévale et, surtout, l’alchimie et la tradition cabalistique, pour lesquelles il manifesta toujours une propension très forte, revendiquant orgueilleusement une descendance supposée d’un Sancho Pessoa, alchimiste et cabaliste juif, qui aurait été incarcéré par l’Inquisition en 1706”. Marcigliano cite même les rapports entre Pessoa et la Golden Down et l’Oto, définis, que c’est gentil, comme “sociétés hermétiques”. A ce point j’ai peine à croire que Marcigliano soit un disciple de Plinio comme je l’ai écrit. Je me suis sûrement trompé. Ou non? Notes 1) Cf. Storia del Concilio Vaticano II, dirigée par Giuseppe Alberigo, Peeters/il Mulino, Bologna 1996, vol. II, pp. 222 et 226, et ROBERTO DE MATTEI, Il crociato del XX secolo. Plinio Corrêa de Oliveira, Piemme, Casale Monferrato 1996, pp. 263-310 (où l’on explique le rôle de la TFP dans la crise conciliaire et postconciliaire). Ce dernier ouvrage est paru en français sous le titre Le croisé du XXè siècle. Plinio Corrêa de Oliveira, éd. L’Age d’Homme, 1997. 2) Cf. Sodalitium n° 34, pp. 59-64 (Massimo Introvigne et la Maçonnerie); n° 37, pp. 51-55 (Introvigne; des messes noires à la Grande Loge); n° 38, pp. 19-29 (Le “démenti” de Massimo Introvigne); n° 40, pp. 75-78 (Entre ésotérisme et dévotion, ou: relations dangereuses de certains dévots...); n° 42, pp. 62-69 (Entre ésotérisme et dévotion. Les relations dangereuses continuent...). 51 3) Cf. Sodalitium n° 42, pp. 62-69. 4) Luciano Pirrotta fait la critique de l’édition, publiée par Gian Franco Lami, des articles d’Evola publiés sur la “revue philomaçonnique d’inspiration mazzinienne L’Idealismo Realistico”. 5) Nous précisons une fois pour toutes que Sodalitium diffère radicalement d’Orion, tant sur la forme que sur le contenu. Ceci dit, nous signalons certains articles de cette revue sur le sujet qui nous intéresse. La polémique a commencé avec un article de Franco Morelli (n° 6, juin 1996, pp. 6-8), Er Capo, er Mago e i regazzini. On y parlait de pratiques obscènes et contre nature (justifiées par des théories magiques en vogue dans certains milieux ésotériques) diffusées dans un groupuscule anonyme d’extrêmedroite de Rome. L’auteur, en dénonçant les dangers de ces milieux, soulignait cependant que “er Mago” (“le Magicien”) “trouverait tout de suite des alliés, tant du côté de M. Pannella, que du côté d’un certain fondamentalisme catholique (...). (Quiconque touche les satanistes aujourd’hui, pourrait demain toucher l’Opus Dei, est en résumé leur pensée)”. L’allusion à Massimo Introvigne était transparente. D’où la réplique à Franco Morelli, publiée toujours par Orion (n° 11, nov. 1996, pp. 26-28), sous la signature de Massimo Maraviglia. Maraviglia, qui est militant d’Alleanza Cattolica, n’a aucune retenue à écrire pour Orion un article (Une remarque polémique à Franco Morelli sur le problème des sectes. Interdit de dévier? La lutte à la déviance religieuse comme antichambre d’un nouveau totalitarisme) en défense des sectes, fût-ce même celle “du Magicien” susnommé, au nom de la liberté religieuse. Entreprise non impossible auprès d’hérétiques comme les rédacteurs d’Orion, certainement pas favorables à l’intégralisme catholique et à l’Etat confessionnel. Mais Orion connaît son monde (le monde est petit!). Morelli réplique (n° 3, mars 1997, pp. 33-40) dans Réponse à Massimo Maraviglia. Tradition du café, familles-bidon et sacro-sainte propriété. Mais sommes-nous vraiment sur la même barque? Morelli fait remarquer, entre autres, une contradiction inhérente aux différents groupes qui se réfèrent au “Docteur Plinio”: celui-ci exalte la Sainte Vierge “exterminatrice de toutes les hérésies”, alors que ses disciples, comme Massimo Introvigne, défendent la liberté religieuse des sectes (de Moon, de Scientologie, des Mormons... en somme de toutes les sectes, de préférence si elles sont anticommunistes). D’après Morelli, la contradiction s’explique par le fait qu’en 1984 la TFP fut bannie au Venezuela et, en 1985, fut condamnée par l’épiscopat brésilien comme groupe “ésotérique”: depuis la TFP s’engagerait contre le mouvement anti-sectes. Un dernier article (pour le moment) (Orion, n° 4, avril 1997, pp. 31-37), signé par Lucio Tancredi, et intitulé La guerre des mots. Dis-moi comment tu parles... La droite “judéo-chrétienne” fait l’“antimondialiste”, dénonce la tentative d’infiltration d’Alleanza Cattolica dans les milieux “antimondialistes”. Deux conférences de Marco Respinti pour diffuser la pensée libéraleconservatrice de Kirk sont présentées avec un titre absolument différent selon le public présent dans la salle. Après avoir dénoncé “l’hypocrisie” d’Alleanza Cattolica, Tancredi rappelle à Respinti “le caractère maçonnique” de la Révolution américaine tant vantée par Russel Kirk: nefas est ab inimicis discere! L’adresse d’Orion est c/o La bottega del Fantastico, via Plinio 32, 20129 Milan. 6) Orion, n° 150, p. 38. 7) Il s’agit de Libertà religiosa, ‘sette’ e ‘diritto di persecuzione’, édité par Cristianità en 1996. Dans la note bio-biblographique, Cantoni rappelle, et ne renie pas, les traductions et présentations (remontant aux années 1966-68) d’ouvrages d’influence clairement ésotérique (c’est-à-dire tendant à répandre la théorie de l’union transcendante des religions) tels que celui de Servier et ceux de Mircea Eliade (il oublie, par contre, de nous rappeler sa traduction de Frithjof Schuon). Significatif. 8) R. DE MATTEI, op. cit., p. 242 n° 105. Il est évident dans ce cas qu’Introvigne (d’Alleanza Cattolica) et De Mattei (du C.C. Lepanto, mais ex-dirigeant d’Alleanza Cattolica) sont à la remorque de la TFP. 9) Tradition Famille Propriété. Association catholique ou secte millénariste? Rapport rédigé par une équipe d’ex-militants TFP, anciens élèves de l’école St Benoît, parents et prêtres. Pro manuscripto, mai 1996. 10) La défense d’office qu’Introvigne fait des “Enfants de Dieu”, fondés par David Berg (dit Moses David) aux pp. 93-96 mérite d’être lue. On ne sait pas s’il faut rire ou pleurer! 11) Introvigne parle de la question aux pp. 89 et 92 de son étude. A la p. 64 du Rapport sont exclues explicitement du nombre des sectes “les structures initiatiques et ésotériques en général”. Seule une loge irrégulière de rite égyptien (sur les dix existant en France) a été incluse dans la liste. 12) Sodalitium n’a pas de sympathie pour l’Islam, et encore moins pour les islamistes, qu’ils soient radicaux ou non. Cependant nous dénonçons la campagne antipalestinienne et anti-arabe de ces faux “catholiques traditionalistes” qui se retranchent derrière la religion et les souvenirs de Lépante pour faire une campagne à sens unique (toujours anti-islamique, jamais anti-sioniste ou anti-israélienne) digne du gouvernement de TelAviv et certainement pas des héritiers spirituels de St Pie V. Le même discours vaut pour l’anti-communisme de guerre froide de nos “contre-révolutionnaires” à sens unique, qui de la révolution n’attaquent efficacement qu’une seule face, et jamais les autres. 13) DE MATTEI, op. cit., p. 242 n° 105. 14) Il s’agit d’une affirmation gratuite d’Introvigne, non étayée par les faits. Il cite en note deux études contre l’Opus Dei et une contre la TFP. L’opuscule contre l’Opus Dei d’Arnaud de Lassus, cité par Introvigne, ne provient pas, comme il fait croire, des milieux “ultra-traditionalistes” ou “sedevacantistes” excommuniés. De Lassus est un fidèle de Jean-Paul II autant que Massimo Introvigne. Quant à la littérature anti-TFP, Introvigne cite exclusivement la revue Sous la Bannière, revue de pas ou peu de poids, depuis que n’y collabore plus le P. Guérard des Lauriers. Il évite ainsi que le lecteur intéressé se tourne vers des sources plus sérieuses (et donc dangereuses pour la TFP) qui ont traité du problème et qui sont la vraie cible du “célèbre sociologue”. Pour la petite histoire: Sous la Bannière place parmi les sectes, à côté de la TFP et de la CRC, également la “micro-secte macaroni”, alias Institut Mater Boni Consilii. 15) Rouge... seulement de cheveux, naturellement! 16) Allusion à un article de Morra dédié à Michael Novak, intitulé justement Il cattocapitalista, et publié sur le Giornale du 1er avril 1997, p. 19. 17) M ARCO R ESPINTI , Nemici di Satana, sur Il Secolo d’Italia du 29 juin 1997, p. 17. 18) F RANCESCO P APPALARDO , “Sette”, il grande equivoco, in Il Secolo d’Italia du 4 juin 1997. 19) Je signale en passant, d’autres initiatives qui ne peuvent pas ne pas obtenir le soutien de tous les bienpensants, qui ne savent pas toujours qu’ils envoient des offrandes et des listes de noms à des satellites de la TFP... Le Centro culturale Lepanto est spécialisé (sous différentes étiquettes): comme Luci dall’Est, dans la promo- 52 tion d’une image de Notre-Dame de Fatima (mais pas n’importe laquelle: uniquement l’image ‘miraculeuse’ que possède la TFP); comme SOS Ragazzi, dans la lutte contre la télévision violente ou immorale; comme Lepanto et Famiglia domani, dans la lutte contre l’homosexualité légalisée; d’autres associations, dans la lutte contre l’immigration (naturellement “musulmane”). Le même phénomène se reproduit en France, où la TFP se cache sous d’autres sigles tels que “Avenir et Culture”, etc. 20) Cf. MARCO RESPINTI, La figura e il pensiero di Russel Kirk, in ‘A voi il tempo, a noi l’eternità’, Letterati e pensatori controrivoluzionari. Actes du Congrès Traditionaliste de Civitella del Tronto 1997, supplément à Controrivoluzione, n° 47-49, décembre 1996-mai 1997, pp. 98-116. Naturellement, le Congrès de Civitella ne s’aplatit pas sur une seule position, et celle des disciples de Corrêa de Oliveira n’est qu’une voix parmi les autres... 21) Je fais allusion, par exemple, à la conférence tenue à Turin par Marco Respinti et Maurizio Blondet, intitulée L’Amérique antimondialiste: thèmes et visages du milieu national-conservateur américain (janvier 1997) et qui tend à diffuser la pensée de Russel Kirk. Il est curieux de noter la collaboration entre Respinti (proche de la TFP) et Blondet (proche de l’Opus Dei mais aussi du mouvement de L. LaRouche, ennemi acharné de la TFP). 22) “L’Italie a besoin d’une droite sérieuse, grande; d’un authentique mouvement conservateur dans les principes et dans la pratique.... Gianfranco Fini me semble être le bon leader au bon moment...”. Telle est l’opinion de Christian Kopff interviewé par Respinti sur le Secolo d’Italia du 20 août 1997, p. 13. 23) Enrico Colombo recense positivement sur Studi Cattolici (n° 433, mars 1997, p. 228) le livre de Russel Kirk Les racines de l’ordre américain dans l’édition italienne éditée par Respinti. La revue opusdéiste fait une seule critique à Kirk: “Apparaît ... trop tranchant son refus, sous la direction d’Edmund Burke, de la Révolution française, considérée exclusivement comme événement historique antichrétien et non, aussi, comme fin du monde féodal et naissance du moderne Etat bourgeois, dont ce livre est souvent un éloge implicite”. La Révolution américaine, plaît à Kirk (et à Respinti), mais non la Révolution française; toutes deux plaisent à Studi Cattolici. C’est bon à savoir. 24) M. R ESPINTI , La destra italiana vista da Christian Kopff, Controrivoluzionario coi baffi, sur Il Secolo d’Italia, 20 août 1997, p. 13. 25) A. MARCIGLIANO, Liberale e/o conservatore? sur Il Secolo d’Italia du 30 mai 1997. 26) M. N OVAK , Elogio della democrazia in America, sur Nuntium, revue de l’Université Pontificale du Latran, juin 1997, n° 2, p. 42, n° 13. Ce n’est pas un hasard que Respinti, dans sa conférence sur Kirk tenue à Civitella, cite Acton et Toqueville. Sur Acton, voir ce que j’écris dans cet article. 27) M. RESPINTI, I liberalassolutisti, in Il Secolo d’Italia, 28 juin 1997, p. 15. “John Gray, avec son étude ‘Libéralisme’ ... offre de très bonnes pistes de recherches pour considérer la dette médiévale d’un certain libéralisme, surtout anglo-saxon, en allant jusqu’à reconnaître des éléments thomistes dans la pensée de John Locke”. 28) M. RESPINTI, Burke, la saggezza del conservatore, in Il Secolo d’Italia, 6 décembre 1996, p. 20. 29) M. RESPINTI, Duecento anni fa moriva Edmund Burke. Il grande conservatore, in Il Secolo d’Italia, 9 juillet 1997, p. 15. 30) A. G. M ACKEY 33°, Encyclopedia of Freemasonry, éd. revue en 1953 par R.I. Clegg, The Masonic History Company, Chicago, U.S.A., vol. 1, p. 162. 31) Lessing, ami de Voltaire et de Moses Mendelssohn, fut un des pionniers de la critique rationaliste des Evangiles. Dans le drame Nathan le Sage (1779) il reprend la parabole des trois anneaux qui rendent également agréables à Dieu “le Templier, le Mahométan et le Juif”. 32) Enc. Treccani, article Burke. 33) Après la Révolution Française, Joseph de Maistre défendit la religion catholique, combattit le Gallicanisme, soutint l’infaillibilité du Pape et écrivit même en faveur de l’Inquisition espagnole. De grands auteurs, par conséquent, citent de Maistre comme une autorité dans le domaine de la doctrine sociale de l’Eglise. Cependant, il faut être prudents, sinon sur la personne, du moins sur la doctrine. Il est bien connu que de Maistre était un haut gradé de la Maçonnerie. Initié en 1774, il devint vite “Grand Orateur” à la Loge Aux Trois Mortiers de Chambéry sous le nom de Josephus a Floribus, “La lecture des textes rédigés par ses maîtres spirituels, Boehme, Swedenborg, Martinez de Pasqually [cabaliste juif et maçon], le poussait dans cette voie, vers la maçonnerie occultiste” (Francovich, Storia della massoneria italiana dalle origini alla Rivoluzione francese, p. 253). Célèbre est son Mémoire au duc de Brunswick, rédigé en 1782 en vue du convent maçonnique de Wilhelmsbad. Dans ce mémoire de Maistre, qui défend le caractère licite de l’initiation maçonnique en réfutant explicitement les condamnations des Papes, soutient que le véritable but de la Maçonnerie est la réunion de toutes les Eglises chrétiennes (aujourd’hui nous dirions: l’œcuménisme)et, qui plus est, le Christianisme Transcendental des Elus Coen inventé par le marrane Martinez de Pasqually (cf. Francovich, pp. 339-342). A la veille de l’éclatement de la Révolution, de Maistre rencontre même un Illuminé de Bavière, qui nous décrit le noble savoyard soignant un “frère” par l’hypnotisme et le mesmérisme. “En négligeant donc les dons thérapeutiques du penseur et de l’homme politique savoyard, il est curieux de remarquer comment le futur champion du catholicisme romain dans les années de la Restauration, le futur auteur de ‘Du Pape’, bien qu’en restant dans les bornes de l’orthodoxie [sic], passât à travers toutes les phases de l’irrationalisme préromantique: de chevalier templier à Grand Profès lyonnais et enfin à adepte du mesmérisme” (Francovich, p. 431). A ce point la question que l’on peut se poser ici est la suivante: jusqu’à quel point de Maistre, sorti de la Maçonnerie, purifia-t-il ses idées? Jusqu’à quel point est-il pour les catholiques un penseur digne de confiance? 34) Hume, ami du fondateur du libéralisme économique Adam Smith, était athée. Toutes ses œuvres, par conséquent même celle louée par Burke, de Maistre et Respinti, sont à l’Index depuis 1761. 35) Les juifs espagnols et portugais se réfugièrent pour la plupart, après avoir été expulsés de ces pays catholiques, dans la Hollande protestante, qui devint leur Mecque tant qu’ils ne s’envolèrent pas pour l’Angleterre et, ensuite, les Etats-Unis. 36) Cf. M. RESPINTI, Quella Rivoluzione conservatrice, in Il Secolo d’Italia, 15 juillet 1997, p. 17. “Les patriotes nord-américains portaient dans le cœur un ‘monde ancien’ qui pour eux avait les traits et l’âme de la tradition britannique”. 37) Cf. S. ROMANO, Burke, un rivoluzionario contro la rivoluzione, sur La Stampa du 1er août 1997, p. 19. Romano termine son article en citant Crispi: “...nous avons une date meilleure [que celle de la révolution française], celle du 20 septembre 1870, qui, en abolissant les 53 derniers restes de la féodalité politique, donna aux peuples complète et entière liberté de conscience...”. 38) M. R ESPINTI , Nascita di una nazione, sur Il Secolo d’Italia, du 14 août 1997. 39) Kirk naquit en 1918 dans une famille puritaine. Il devint ensuite agnostique. “Eloigné de toute foi religieuse durant ses années de jeunesse, Kirk n’a jamais fait de sérieuses professions d’athéisme, même si dans certains de ses écrits de jeunesse la défense du patrimoine culturel et spirituel de l’Occident alterne avec certaines (évidemment contradictoires) critiques du christianisme” (M. Respinti, La figura e il pensiero di Russel Kirk, in Atti del Convegno tradizionalista di Civitella del Tronto 1997, p. 103). Dans les années 50 il se rapproche de la pensée de Burke, mais ce n’est qu’en 1964 qu’il se convertit au catholicisme de Vatican II. Cette conversion n’empêche pas Kirk de défendre la continuité entre le monde juif et classique, le monde médiéval anglais, le monde protestant anglican, considéré comme un “Moyen Age sans Eglise” et “protestation contre l’Humanisme et sa pénétration dans l’Eglise de Rome” et, enfin, celui de la révolution américaine; Respinti est visiblement embarrassé pour exposer la pensée de son chouchou sur le protestantisme (p. 108), mais finit par le justifier! 40) R. DE MATTEI, op. cit., p. 95. Dans la note 113, l’auteur explique quels furent les hommes politiques catholiques ayant pactisé avec l’adversaire, c’est-à-dire “Quisling, Mosley, Degrelle, Seyss-Inquart & Co.”, qui collaborèrent avec l’Allemagne. Mis à part le fait que, parmi ceux-ci, tous n’étaient pas catholiques, nous nous demandons si Churchill n’avait pas lui aussi collaboré avec l’adversaire n° 1 pour le docteur Plinio, autrement dit Staline! Le même De Mattei, sur Cristianità (année VIII, n° 60, avril 1980, pp. 9-12), organe d’Alleanza Cattolica, dénonça les crimes de Churchill dans l’article Esclaves de Moscou et victimes de Yalta, comme le rappelle Marco Respinti lui-même sur Il Secolo d’Italia du 6 juin 1997, p. 20, dans l’article 1945, le massacre des slaves anticommunistes. On dirait que dans le “docteur Plinio” l’amour pour les “courageux soldats anglo-américains” (cité par De Mattei, p. 99) dépassa même son anticommunisme proverbial. L’attitude de la TFP durant la guerre des Falkland-Malouines, contre l’Argentine et pour l’Angleterre, le confirme. 41) Cf. ALEC MELLOR, Dictionnaire de la FrancMaçonnerie et des Francs-Maçons, Belfond, Paris 1989, p. 249, et Yann Moncomble, L’irrésistible expansion du mondialisme, Faits et documents, Paris, 1981, p. 201. Churchill était aussi membre de l’organisation mondialiste Royal Institut of International Affairs. 42) H. C OSTON , Les financiers qui mènent le monde, Publications H.C., Paris, 2ème éd. 1989, p. 315. 43) R. DE MATTEI, op. cit., pp. 46-47 n° 89. 44) Ibidem, p. 101. 45) “L’Autriche - écrit De Mattei (op. cit., p. 45), qui avait recueilli l’héritage du Saint Empire Romain carolingien, constituait à ses yeux l’expression historique par excellence de la Civilisation chrétienne. Entre le XVIème et le XVIIIème siècle, face au protestantisme déferlant dans l’Europe du Nord et à la culture laïque et pré-illuministe qui se formait, l’Empire habsbourgeois représenta le symbole de la fidélité à l’Eglise”. Nous ne sommes certes pas opposés au Saint Empire Romain. Mais qu’il nous soit permis de redimensionner l’éloge inconditionnel qu’en fait le docteur Plinio. Malheureusement, toutes les dynasties de l’Ancien Régime manquèrent gravement à leur devoir, en s’opposant à l’Eglise, avant et après la Révolution. On pense, pour l’Autriche, à l’affiliation maçonnique de François Ier de Lorraine et à la propagande maçonnique et janséniste de ses fils Joseph II et Léopold II. Le même FrançoisJoseph, après avoir stipulé le concordat méritoire de 1855 qui brisait les chaînes posées par Joseph II, tomba, à partir de 1866, aux mains du parti libéral. Avec comme chef du gouvernement le protestant Beust, l’Autriche approuva les lois anti-catholiques du 25 mai 1868 (contre lesquelles Pie IX protesta le 22 juin de la même année), s’opposa par tous les moyens à Vatican I en 1870, allant même jusqu’à dénoncer unilatéralement le Concordat, approuvant enfin de nouvelles lois anticatholiques en 1874. Il est bien connu que l’Empire, durant la Belle époque tant aimée par le docteur Plinio était culturellement redevable de l’influence juive, et que François Joseph fut toujours favorable à ses sujets israélites. Je ne reprocherai pas à Plinio Corrêa de Oliveira sa sympathie pour l’Empire et les Habsbourg; il ne faut cependant pas se boucher les yeux en face des faits historiquement vérifiés que j’ai signalés: un peu moins d’enthousiasme serait convenable... [On doit affirmer la même chose, et illud magis, du schismatique empire byzantin, loué par Marco Tangheroni (autre dirigeant d’Alleanza Cattolica) sur le Secolo d’Italia du 11 juillet 1997, p. 20, dans le Dizionario del pensiero forte]. 46) Toutes ces citations sont tirées du bon ouvrage: Arnaud de Lassus, Connaissance élémentaire de la FrancMaçonnerie, Action familiale et scolaire, 31 rue Rennequin, 75017 Paris (IIème éd., mars 1996), pp. 29-32. 47) A. MARCIGLIANO, Nel mondo di Pessoa (1er juillet 1997, p. 15), et Pessoa monarchico puro (21 septembre 1997, p. 15). La citation est tirée du premier article. Revue de Presse A fin de publier une “revue de presse” plus élaborée nous la ferons paraître désormais dans un tiré à part qu’il vous sera possible de vous procurer auprès de notre rédaction moyennant 20 F (frais de port compris). Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano 36 10020 VERRUA SAVOIA (TO) ITALIE Tel. (de France): 00. 39. 161. 83.93.35 Fax (de France): 00. 39. 161. 83.93.34 Année scolaire 1998-1999 ECOLE SAINT-JOSEPH 38470 Serre-Nerpol 04.76.64.24.11 Internat privé catholique pour filles (primaire et secondaire) tenu par les Sœurs du Christ-Roi. 54 L’OSSERVATORE ROMANO LE DOCUMENT SUR LA “SHOAH” DE LA COMMISSION POUR LES RAPPORTS RELIGIEUX AVEC LE JUDAISME L e document tant annoncé sur l’“Holocauste” vient finalement d’être publié sous un titre inhabituel: Nous nous souvenons: une réflexion sur la Shoah. Il ne s’agit pas d’une encyclique, seulement d’un document émis par une Commission vaticane, mais il est accompagné d’une lettre, datée du 12 mars, de Jean-Paul II au cardinal Cassidy, président de la Commission en question. Il faut le reconnaître, ce texte est finalement beaucoup moins grave que ce qui avait été prévu et annoncé, d’où les plaintes amères de diverses personnalités et organisations juives (cf. notre rubrique Revue de presse), mais signe qu’à la Curie romaine, de fortes résistances se sont manifestées devant le projet original de Jean-Paul II. Il n’en demeure pas moins que “Nous nous souvenons” contient par ailleurs des ambiguïtés et des erreurs doctrinales; dans cette analyse critique qui suivra le texte, chapitre par chapitre, nous allons nous efforcer de les relever. Nous déclarons tout d’abord qu’il n’est pas dans nos intentions d’entrer dans le vif de la dispute en cours entre historiens sur l’existence et/ou l’importance d’un projet systématique d’extermination du peuple juif mis en œuvre par le gouvernement allemand durant la seconde guerre mondiale; le document en question donne pour indiscutable la version officielle émanant du procès de Nuremberg, procès voulu par les puissances sorties victorieuses de la guerre (Union Soviétique, EtatsUnis, Grande Bretagne). Cette version est même imposée par le droit pénal dans la législation de beaucoup de pays. “I. La tragédie de la Shoah et le devoir de mémoire”. Dans ce premier chapitre sont exposés le motif et l’origine du document, qui s’inspire de l’intention manifestée par Jean-Paul II dans Tertio millennio adveniente que l’Eglise se “charge des péchés de ses fils”. Ceci plus particulièrement vis-à-vis du “peuple juif”, avec lequel existe “un lien très étroit de parenté spirituelle”. Il y a là une ambiguïté voulue: la “parenté spirituelle” existe certainement entre le Christianisme et les Saints de l’Ancien Testament, mais pas du tout avec l’actuel Judaïsme, car elle est privée de fondement. “II. Ce dont nous devons nous souvenir”. Le second chapitre pose le status quæstionis: le Document s’interroge sur la “question de la relation entre la persécution nazie et l’attitude des chrétiens, au cours des siècles, vis-à-vis des juifs”. Les paroles d’introduction du chapitre sont inacceptables: “Alors qu’il rendait son témoignage au Seul Saint d’Israël et à la Torah, le peuple juif a grandement souffert à diverses époques et en de nombreux lieux. Mais la Shoah fut certainement la souffrance pire de toutes ”. Or, il est contestable que le Judaïsme, 1942-44 années après Jésus-Christ, puisse rendre témoignage au “saint d’Israël” (Dieu) et à la “Torah” (Loi), car “Celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père...” (Jn V, 23) et “Vous scrutez les Ecritures ...ce sont elles qui rendent témoignage de moi” (de Jésus-Christ renié par le Judaïsme officiel) (Jn V, 39). “III. Les rapports entre juifs et chrétiens”. C’est ainsi qu’on entre dans le vif du sujet, en présentant un tableau tendancieux et partisan de la relation deux fois millénaire entre “juifs et chrétiens”; une histoire“tourmentée” au “bilan négatif”. La fresque historique peut se diviser en deux parties: depuis le début du Christianisme jusqu’au XVIIIème siècle; depuis le XVIIIème siècle jusqu’à 1939. A) L’antijudaïsme, de l’Eglise primitive à l’émancipation des Juifs. “A l’aube du christianisme, après la crucifixion de Jésus, des disputes sont nées entre l’Eglise primitive et les responsables et le peuple juif qui, par observation de la Loi, s’opposèrent parfois violemment aux prédicateurs de l’Evangile et aux premiers chrétiens”. Cette affirmation est extrêmement grave. Il y a là deux erreurs. La première: que le conflit “entre juifs et chrétiens” ait commencé après la mort du Christ, et non déjà auparavant, par un conflit des pharisiens et des sadducéens avec le Christ même, conflit qui se termina par Son arrestation, Sa condamnation et Sa crucifixion. Deuxièmement: que l’opposition violente aux premiers chrétiens ait été soulevée “par observation de la Loi”. C’est peutêtre ce que croyaient les persécuteurs qui suivaient leur interprétation aberrante de la Loi (“quiconque vous fera mourir, croira faire à Dieu un sacrifice agréable”, Jn XVI, 2; “Nous avons une loi et, d’après notre loi il doit mourir, parce qu’il s’est fait fils de Dieu”, Jn XIX, 55 7), mais certainement pas par observation de la Loi de Dieu dans son authentique signification! Autrement la Synagogue aurait eu raison de persécuter qui violait la Loi! Suit alors une liste des actes d’hostilité accomplis en régime de chrétienté, comportements que le document considère, indistinctement, comme censurables: 1) “des groupes agités de chrétiens qui assaillaient les temples païens firent parfois de même contre les synagogues” 2) “une discrimination généralisée qui se termina parfois par des expulsions ou des tentatives de conversions forcées ” 3) “jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, ceux qui n’étaient pas chrétiens ne jouissaient pas toujours d’un statut juridique pleinement garanti” 4) “malgré cela, les juifs, dans toute la chrétienté, ont conservé leurs traditions religieuses (...) Aussi les regardait-on avec une certaine suspicion et méfiance.” 5) “Dans les temps de crise (...) la minorité juive fut parfois prise comme bouc émissaire et devint victime de violences, de saccages et même de massacres”. Ces épisodes historiques seraient le fruit de “sentiments d’antijudaïsme” causés également par “des interprétations erronées et injustes du Nouveau Testament concernant le peuple juif dans son ensemble”. Ceci regarde plus particulièrement “sa culpabilité présumée”. “Ces interprétations du Nouveau Testament ont été totalement et définitivement rejetées par le Concile Vatican II (cfr. Nostra ætate, 4)”. Reprenons les arguments un à un. 1) “Nous nous souvenons” évite de condamner explicitement les Pères de l’Eglise et leur présumé “enseignement du mépris” (Jules Isaac). Sur ce point, cependant, il est clairement fait allusion à l’épisode de Callinico qui met en cause saint Ambroise (cf. Sodalitium n° 43, pp. 68-69 ). 2) “Nous nous souvenons” évite aussi de condamner explicitement les Souverains Pontifes. Mais, alors que ceux-ci ont toujours réprouvé les “conversions forcées”, on ne peut dire de même des expulsions qu’ils considéraient comme une mesure licite, l’appliquant parfois eux-mêmes (c’est ce que fit saint Pie V, avec la bulle Hebreorum gens du 26 février 1569, ordonnant que les juifs soient expulsés des Etats de l’Eglise, à l’exception de Rome et d’Ancône). 3) Non seulement les non-chrétiens, mais aussi les non-catholiques ne bénéficiaient pas “d’un statut juridique pleinement garanti”, car l’Eglise a toujours condamné la “liberté religieuse” (soutenue au contraire par Vatican II). Ce point est donc lui aussi une condamnation implicite non seulement des “chrétiens” mais également de l’Eglise (concernant les juifs voir par exemple les Bulles de saint Pie V Romanus Pontifex du 19 avril 1566 confirmant la Bulle Cum nimis absurdum de Paul IV, qui impose aux juifs un signe distinctif, et la Bulle Cum nos nuper du 19 janvier 1567 leur interdisant la possession de biens immobiliers, sans parler des dispositions des Conciles œcuméniques: Nicée II de 787 - interdiction d’avoir des esclaves, can. 8 - et le IVème Concile du Latran de 1215 avec ses constitutions: n° 67 contre l’usure, 68 sur le signe distinctif, 69 interdisant d’assumer des charges publiques, 70 sur les judaïsants. 4) “une certaine suspicion et méfiance.” sont absolument licites envers qui s’oppose au christianisme... Or le “demeurer fidèles” des juifs “à leurs traditions religieuses” antichrétiennes, cela signifie, dans la pratique, s’opposer au christianisme. 5) Seul le cinquième point est donc réprouvé à juste titre par le document du Vatican que nous sommes en train d’analyser. Des faits aux principes: “Nous nous souvenons”, dans la ligne de Vatican II et JeanPaul II, réprouve une interprétation antijudaïque du Nouveau Testament qui était “mentalité prédominante” avant Vatican II, qui l’a “totalement et définitivement rejetée”. Le document fait allusion à l’interprétation que les Pères de l’Eglise, les Docteurs et le Magistère ont donné du Nouveau Testament avant Nostra ætate, mais ne parle pas explicitement de ces thèses rejetées, renvoyant au document conciliaire. Notons, à ce propos, l’interprétation authentique donnée de Nostra ætate n° 4: elle parle de la Révélation (interprétation du Nouveau Testament) et prononce une sentence définitive: elle engagerait donc l’infaillibilité de l’Eglise... B) L’antijudaïsme et l’antisémitisme depuis l’émancipation des juifs jusqu’à l’année 1939. Le document distingue: a) un antijudaïsme “plus sociologique et politique que religieux” consistant à accuser les juifs “d’exercer une influence disproportionnée par rapport à leur nombre” et dû à un “nationalisme faux et exacerbé ” (XIXème siècle.) b) le national-socialisme, professant des doctrines racistes, et condamné par l’Eglise catholique (Documents des évêques alle- 56 mands; Pie XI, enc. Mit brennender sorge de 1937 et discours aux pèlerins belges de 1938; Pie XII, enc. Summi Pontificatus de 1939). Une remarque s’impose à ce propos: alors que l’Eglise a condamné les erreurs signalées par le point b), le document du Vatican ne peut pas citer un seul document du Magistère qui s’oppose à l’antijudaïsme du point a). “IV. L’antisémitisme nazi et la Shoah”. Le chapitre commence par prendre soin de distinguer l’antisémitisme “basé sur des théories contraires à l’enseignement constant de l’Eglise” et dont les racines sont “au dehors du christianisme”, “et les sentiments de méfiance et d’hostilité que nous appelons antijudaïsme, dont, malheureusement, les chrétiens eux aussi ont été coupables”. Il y a donc, au-delà de la terminologie (il suffit de s’expliquer) une distinction très correcte entre les deux phénomènes (l’un antichrétien, l’autre chrétien). Le premier est contraire à la Révélation, et il a été condamné par l’Eglise. Le second... n’est pas contraire à la Révélation, ni condamné par l’Eglise... et pourtant, pour “Nous nous souvenons”, il s’agit d’une faute (“ont été coupables”). De quelle faute, de grâce? On ne le dit pas. Après cette distinction, le document du Vatican répond à la demande qui était faite au n° 2: quelle est la responsabilité des chrétiens dans ladite “Shoah”? Le texte exclut toute responsabilité du Chef de l’Eglise de l’époque, Pie XII, apportant en témoignage (note 16) les déclarations même “d’organisations et de personnalités juives”. Mais JeanPaul II a déjà parlé plusieurs fois de responsabilité chrétienne; certains, mais on ne donne pas plus de précisions, “cependant ne furent pas suffisamment forts pour élever leur voix et protester”. Le point théologiquement plus critiquable du chapitre est celui dans lequel l’actuel peuple juif est défini comme un “peuple appelé à témoigner du Dieu unique et de la Loi de l’Alliance”; encore une fois le texte présuppose, faussement, que le peuple juif actuel non chrétien est toujours le peuple élu de Dieu et que son élection est encore en vigueur, nonobstant le rejet du Christ. “V. Regarder ensemble vers un avenir commun”. C’est peut-être le paragraphe le plus mauvais du document, avec le troisième. Deux erreurs y sont reprises. La première consiste à faire une confusion constante entre Hébraïsme de l’Ancien Testament et Judaïsme antichrétien. La seconde réside dans l’“acte de repentir (teshuva)” pour l’antijudaïsme des chrétiens. Pour ce qui est de la première erreur, on lit: “nous demandons en premier lieu à nos frères et sœurs catholiques de renouveler leur conscience des racines juives de leur foi. Nous leur demandons de se souvenir (...) que l’Eglise se nourrit des racines de ce bon olivier sur lesquelles ont été greffées les branches de l’olivier sauvage des gentils (cfr. Rm 11, 1724); que les juifs sont nos frères très aimés, et que, dans un certain sens, ils sont ‘nos frères aînés’” et que chrétiens et juifs sont “ceux qui adorent l’unique Créateur et Seigneur et qui ont un Père commun dans la foi, Abraham”. Lorsque saint Paul parle du “bon olivier” sur lequel sont greffés les gentils, il n’entend certes pas parler des juifs qui refusent le Christ, lesquels sont “des branches qui ont été retranchées” (Rm. 11, 17): il est impossible que les rédacteurs du document l’ignorent, étant donné que c’est justement à ce verset qu’ils se réfèrent! Et les juifs n’ont pas non plus Abraham pour père dans la foi. Jésus avait déjà démenti cette présomption, en disant: “ Si vous étiez enfants d’Abraham, vous feriez les œuvres d’Abraham. Mais maintenant, vous cherchez à me faire mourir moi qui vous ai dit la vérité que j’ai entendue de Dieu. Ce n’est point ce qu’a fait Abraham. Vous faites les œuvres de votre père. (...) Le père dont vous êtes issus, c’est le diable...” (Jn 8, 39-44). Si le père dans la foi est différent (et il est impossible d’être plus différent) on ne peut pas être frères, sinon à la façon dont Caïn, Ismaël, Esaü, étaient les frères aînés d’Abel, d’Isaac et de Jacob. La seconde erreur réside dans la condamnation de l’antijudaïsme: “nous souhaitons tranformer la conscience des péchés passés en une ferme résolution de construire un avenir nouveau dans lequel il n’y aura plus d’antijudaïsme parmi les chrétiens ou de sentiments antichrétiens chez les juifs (...). on ne doit jamais permettre aux semences empoisonnées de l’antijudaïsme et de l’antisémitisme de prendre racine dans le cœur de l’homme”. Or, même si le rappel qui est fait - quoique fugitivement - de l’existence d’un sentiment antichrétien chez de nombreux juifs, est appréciable, il n’est pas admissible qu’antichristianisme (opposition à une vraie religion) et antijudaïsme (opposition à une fausse religion) soient mis sur un même plan. Il n’est pas admissible non plus que l’on condamne en le qualifiant de “semences empoisonnées”, l’antijudaïsme entendu comme 57 opposition à la fausse religion rabbinique, au même titre que l’antijudaïsme entendu comme “sentiment de suspiscion et d’hostilité” envers les ennemis du Christ et de la foi chrétienne. Ce qui est condamnable et condamné est «cette haine envers un peuple autrefois élu de Dieu, haine que l’on nomme aujourd’hui vulgairement “antisémitisme”» (Décret du SaintOffice, 25 mars 1928) exactement comme «cette façon d’agir et de parler étrangère au sensus Ecclesiæ, à la pensée des Pères et de la sainte Liturgie même» (même Décret). En effet, quoiqu’en dise “Nous nous souvenons”, cette condamnation ne concerne pas seulement le simple chrétien, elle concerne l’Eglise même. Conclusion “Nous nous souvenons”, ne peut donc être considéré comme un document émanant de l’Eglise catholique, parce qu’il contredit en plusieurs points la Sainte Ecriture et le magistère de l’Eglise. Ceci, d’un point de vue théologique. D’un point de vue historique, il s’agit d’un document ambigu, fruit de pressions contradictoires: d’un côté les divers groupes de pression juifs, et probablement Jean-Paul II lui-même, de l’autre des personnalités catholiques pas mieux identifiées qui considèrent comme peu opportune la “teshuva” de cette fin de millénaire. Il y a, au milieu de toutes les honteuses capitulations de ce document, des passages courageux, tels que celui où sont rappelées les conditions iniques du traité de paix de Versailles (1918) (n. III), les nombreux autres génocides et actes de racisme de l’histoire contemporaine (sans omettre le communisme et “le drame du Moyen Orient”) (n. IV), la distinction dans les positions des différents adhérents au national-socialisme, les responsabilités des nations occidentales [les sionistes sont oubliés] qui refusèrent d’accueillir les juifs sur le point d’être expulsés d’Allemagne, comme le leur proposait ce pays et enfin et surtout, la prise de position claire à la défense de Pie XII. Seraient-là de petits signes, encore trop timides, de début de “révisionisme”, ou bien les dernières résistances avant une reddition sans conditions? Espérons que la première hypothèse soit la bonne. Qui vivra, verra.. Le “magistère” de Jean-Paul II contredit explicitement le Magistère de Pie XII. Qui croire? Audience de Jean-Paul II aux participants à la séance plénière du Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité entre les Chrétiens (19 février 1998, L’Osservatore Romano, éd. it., 20 février 1998, p. 7). Je me limite à un seul passage du discours: “Le but, auquel le Seigneur Jésus nous appelle, vers lequel il nous guide et où il nous attend, - a dit Jean-Paul II - est l’unité pleine avec ceux qui, ayant reçu le même Baptême, sont entrés comme membres de l’unique Corps mystique” (n. 1). Jean-Paul II enseigne donc explicitement que les baptisés non-catholiques font partie du Corps mystique du Christ. Cette doctrine est déjà présente dans Vatican II (Lumen gentium et Unitatis redintegratio): mais elle est formulée différemment, pour ne pas contredire ouvertement Pie XII. Celui-ci, en effet, après avoir dit que “l’Eglise est le Corps mystique du Christ”, poursuit en affirmant que: “seuls font partie des membres de l’Eglise ceux qui ont reçu le baptême de régénération et qui, d’autre part, ne se sont pas, pour leur malheur, séparés de l’ensemble du Corps ou n’en ont pas été retranchés pour des fautes très graves par l’autorité légitime. (...) Et ceux qui sont divisés pour des raisons de foi ou de gouvernement ne peuvent vivre dans ce même Corps ni par conséquent de ce même Esprit divin” (Doc. Pont. pp. 163-164; enc. Mystici Corporis). Cette encyclique était de 1943. En 1950, Pie XII condamnait comme suit ceux qui n’acceptaient pas la doctrine: “Certains sont d’avis qu’ils ne sont point liés par la doctrine que Nous exposions il y a peu d’années en Notre encyclique et qui s’appuie sur les sources de la Révélation, à savoir que le Corps mystique du Christ et l’Eglise catholique romaine sont une seule et même chose. Quelques-uns réduisent à une vaine formule la nécessité d’appartenir à l’Eglise pour arriver au salut éternel. D’autres enfin n’admettent pas le caractère rationnel des signes de crédibilité de la foi catholique” (enc. Humani generis; Doc. cath. n° 1077, 10 sept. 1950, vol. 47, p. 1162). Remarquons que pour Pie XII l’identification entre Eglise catholique romaine et Corps mystique du Christ, avec exclusion des non-catholiques, est une doctrine fondée “sur les sources de la Révélation”. Dans une matière qui engage la Révélation, et par conséquent la Foi, Jean-Paul II enseigne le contraire de Pie XII. Or, en vertu du principe de non contradiction, il n’est pas possible de croire en même temps que les baptisés non-catholiques appartiennent et qu’ils n’appartiennent pas au Corps mystique du Christ; tout catholique doit choisir: ou accepter Pie XII, et refuser Jean-Paul II, ou accepter Jean-Paul II et refuser Pie XII. Ce dilemme nous semble inévitable. A moins qu’il ne se trouve quelque chari- 58 table prélat pour nous démontrer que tertium datur? [Qu’il existe une troisième voie?] Nous souhaiterions une réponse.    TOUTE VIOLENCE AU NOM DE LA RELIGION EST-ELLE INTRINSEQUEMENT MAUVAISE? Jean-Paul II ne manque jamais de mettre à profit ses voyages “apostoliques” pour rencontrer les communautés acatholiques présentes dans les pays qu’il visite. Il n’a pas fait d’exception pour son “pèlerinage au Nigeria” du 21 au 23 mars 1998, au cours duquel il a rencontré, à la Nonciature Apostolique d’Abuja, les Chefs musulmans du Nigeria, leur adressant un discours rapporté par L’Osservatore Romano (éd. fr., 31/3/98). Je m’arrêterai sur un seul point qui n’est pas une nouveauté dans la pensée de Jean-Paul II: Les chrétiens et les musulmans sont d’accord sur le fait que, en matière religieuse, il ne peut y avoir de coercitions. Nous sommes engagés à promouvoir des attitudes d’ouverture et de respect à l’égard des fidèles des autres religions. Toutefois, il est possible de faire un usage erroné de la religion et il est certainement du devoir des dirigeants religieux de veiller afin que cela ne se produise pas. Surtout, chaque fois qu’une violence est accomplie au nom de la religion, nous devons expliquer à tous que, dans ces circonstances, nous ne nous trouvons pas face à la véritable religion. En effet, le Tout-Puissant ne peut tolérer la destruction de sa propre image dans ses fils” (n° 3). “Les chrétiens et les musulmans sont d’accord sur le fait que, en matière religieuse, il ne peut y avoir de coercitions”. Cette première proposition déjà est erronée, et non seulement en ce qui concerne la religion musulmane (qui ne concède pas de pleins droits aux juifs ni aux chrétiens, les nie totalement aux païens, et punit de mort l’apostasie de l’Islam), mais également en ce qui regarde les chrétiens. Certes la foi ne peut être imposée de l’extérieur, par coercition ou violence. Mais, contrairement à Dignitatis humanæ, l’Eglise a toujours enseigné et pratiqué la licéité, dans certains cas, de la coercition en matière religieuse, tant sur des baptisés, qui se soumettent librement au pouvoir coercitif de l’Eglise, qu’indirectement sur des non-baptisés. L’Eglise a en effet un pouvoir coercitif qui consiste à imposer aux violateurs de la loi, même contre leur volonté, des peines spirituelles et/ou temporelles (C.J.C., can. 2195- 2414; Denz. 499, 1504-1505, 1697, 1724), et pour leur application, elle peut recourir à l’aide de l’Etat ou “bras séculier” (Denz. 401, 468 s, 640, 682, 773, 1689 s, can. 2198), lequel peut appliquer des peines même sanglantes, jusqu’à la peine de mort, pour délits en matière religieuse (D 773). Il en est de même pour la violence. “Surtout, chaque fois qu’une violence est accomplie au nom de la religion…”. Si nous donnons au terme “violence” un sens nécessairement et exclusivement négatif, le réservant seulement à l’usage illégitime et illicite de la force, alors la violence est, évidemment, toujours illicite et contraire à la religion. Mais là n’est pas la signification exacte du terme, ni dans le langage courant, ni dans le langage philosophique ou théologique. Le dictionnaire “Zingarelli” la définit comme une “coaction physique ou morale exercée par un sujet sur un autre, de façon à l’induire à accomplir des actes qu’il n’aurait pas accomplis autrement”, la “coaction” étant définie comme“violence exercée sur la volonté d’autrui” (1), et il donne comme synonymes “coercition” et “contrainte”. Or, ces concepts ne comportent pas nécessairement une valeur négative: par exemple, toute peine pour un délit, toute guerre ou défense légitime (vim vi repellere licet), ainsi que de nombreuses lois et de nombreux préceptes impliquent une certaine “violence” sur la volonté d’autrui, ce qui n’est pas toujours illégitime. La violence selon justice est licite pour les pouvoirs publiques, c’est ce qu’affirme saint Thomas (II-II, q. 66, a. 8), à la suite de saint Paul (“car ce n’est pas en vain qu’il [le prince] porte l’épée, étant le ministre de Dieu”, Rm XIII, 4). Le sera-t-elle aussi pour l’Eglise? Sans aucun doute, justement parce que l’Eglise est, comme l’Etat, société parfaite, et possède comme lui le pouvoir coercitif (cf. les citations précédentes extraites du code et du Denzinger; cf. aussi saint Thomas II-II, q. 10, a. 8; q. 11, a. 3). L’Eglise a, par exemple, approuvé et promu les Croisades, tant contre les infidèles que contre les hérétiques (Cf. IVème Concile du Latran); indiscutablement on y faisait usage de la “violence” ou de la force. Comment peut-on dire alors que “dans ces circonstances, nous ne nous trouvons pas face à la véritable religion” ? Si Jean-Paul II entend signifier que la Religion qui déclare licite la coer1) La définition du Petit Robert est moins précise lorsqu’elle propose pour “faire violence”: “agir sur quelqu’un ou le faire agir contre sa volonté en employant la force ou l’intimidation”. Et même dans ce cas la violence ne semble pas intrinsèquement mauvaise. 59 cition, y compris corporelle, de ses sujets et la défense, y compris par la force, contre ses ennemis est une fausse religion, il affirme alors que la Religion catholique est fausse, du moins jusqu’à Vatican II, et il transforme les chefs des religions (y compris le Pape, chef visible de la vraie religion) en un propagandiste du pacifisme et de la non-violence (du moins en matière religieuse). Si par contre Jean-Paul II entendait seulement dire que la Foi surnaturelle et ses obligations ne peuvent être imposées par la force aux non-baptisés (et, a fortiori, ne le peuvent être les fausses croyances), pourquoi ne s’explique-t-il pas mieux? AVEUX RÉVÉLATEURS DU CARDINAL SODANO “‘L’écorce et le tronc. L’Eglise entre apparence et réalité’ tel est le thème de la conférence tenue par le Cardinal Angelo Sodano, Secrétaire d’Etat, dans la soirée du mardi 24 mars, à la Salle de la Conciliation du Palais du Latran” (L’Osservatore Romano, éd. it., 26/3/98, p. 8). Le thème de la conférence, tenue dans le cadre de la préparation au Jubilé, concerne l’Eglise. Et dans les quatre premiers points de sa conférence, elles sont si belles et ferventes les paroles de Sodano, qu’elles pourraient faire croire à la sincérité du désir qu’il exprime, en conclusion, d’avoir cette inscription sur sa tombe: “Il a aimé l’Eglise et s’est efforcé de la faire aimer” (n° 17). Mais comment y croire vraiment, lorsqu’on lit ce qu’il dit à partir du n° 5 (Le péché en l’Eglise?) “Certes en l’Eglise, composée d’hommes, existe le péché, existe l’erreur, existe la limite”. La preuve, nous devons la chercher dans le livre de Rosmini, Delle cinque piaghe della Chiesa. [Des cinq plaies de l’Eglise]. Sodano évite de rappeler que le livre en question fut mis à l’Index le 30 mai 1849. Si en l’Eglise existent le péché et l’erreur, il faut continuellement la réformer: c’est ce qu’explique Sodano aux points 6 et 8, en prenant cette fois comme guide le Père Congar et son livre Vraie et fausse réforme dans l’Eglise. Sodano évite de rappeler aux auditeurs que les opinions de Congar furent condamnées par Pie XII dans l’encyclique Humani generis (1950, la même année que Vraie et fausse réforme dans l’Eglise) et que toute traduction ou réédition de cette œuvre de Congar fut interdite, tandis que Congar lui-même était interdit d’enseignement et de confession. Mais justement en l’Eglise existent le péché... et l’erreur... seulement que, s’il en est ainsi, si on peut affirmer que Pie XII a erré et péché, pourquoi ne pas penser plutôt que ce sont Sodano et Jean-Paul II qui errent et qui pè- chent? Enfin, si Sodano réhabilite les réprouvés d’hier (Congar) et d’avant-hier (Rosmini), qui nous dit que demain ne seront pas réhabilités les réprouvés d’aujourd’hui, tel que l’archi-hérétique Hans Küng? Sodano le fait lui-même implicitement en citant longuement et positivement le dernier livre de l’hérésiarque suisse (Christianisme. Essence et histoire) au n° 16 de sa conférence. Nous conseillons à Sodano de revenir non seulement avec nostalgie, comme il le fait (n° 15), mais avec adhésion de foi à l’“l’Eglise de” son “enfance” et à la définition que donne de l’Eglise le catéchisme de saint Pie X, définition “qui semble aujourd’hui très étroite pour le corps de l’Eglise”, puisque “l’ecclésiologie du Pape Jean-Paul II” (n° 12) en a étendu les limites non plus seulement aux catholiques mais à tous les baptisés, sinon à tous les hommes... Quant à nous, justement parce que nous aimons l’Eglise et voulons la faire aimer, nous nous reconnaissons dans celle décrite par saint Pie X et par Pie XII, et certes pas du tout dans celle inventée par Küng et Congar. UN NOUVEAU LIVRE SUR LE CÉLIBAT ECCLÉSIATIQUE L’Osservatore Romano (Ed. it., 16/1/98, pp. 7-8) recommande, dans une excellente recension d’Alfredo Marranzini, l’œuvre de Stefan Heid, Zölibat in der frühen Kirke. Die Anfänge einer Enthaltsamkeitsflicht für Kleriker in Ost und West (Le célibat dans l’Eglise antique. Les débuts d’une obligation de continence en Orient et en Occident) Ferdinand Schoening, Paderborn-Monaco-Vienne-Zürich 1997, 339 p.; cet ouvrage s’inscrit sur la même ligne que ceux d’autres auteurs, parmi lesquels celui de Stickler dont nous avons fait la recension (C. Cochini, Origines apostoliques du célibat sacerdotal, Le Sycomore, Letuilleux-Namur-Paris, 1981; Id.: Il celibato sacerdotale nella tradizione primitiva della Chiesa (Le célibat sacerdotal dans la tradition primitive de l’Eglise) chez Pittau-Sepe, Identità e missione del sacerdote, Città Nuova, Rome 1994, pp. 166-189; R. Cholji, Le célibat dans les Pères et dans l’histoire de l’Eglise, dans Solo per amore, Paoline, 1993, pp. 27-47; id., (Célibat des clercs en Orient et en Occident) (Hereforshire 1989). Nous recommandons aux lecteurs la lecture de ces livres (de même que celui d’Henri Deen, Le célibat des prêtres dans les premiers siècles de l’Eglise; à demander à Sodalitium ou à Forts dans la Foi), ou du moins de jeter un coup d’œil sur l’article de L’Osservatore que nous venons de citer. 60 Doctrine omme nous l’annoncions par le passé, nous C publions en l’honneur de Mgr Guérard des Lauriers (dont c’est cette année le dixième anniversaire de la mort) une étude sur la “Thèse de Cassiciacum”, traduite par nos soins. Il s’agit de l’article “De Papatu materiali” édité par l’abbé Sanborn sur la revue Sacerdotium. Dans le présent numéro vous pourrez lire la première partie (de “Sacerdotium” n° XI, pars verna 1994); dans le prochain nous publierons la suite. LA PAPAUTE MATERIELLE Le R. P. Guérard des Lauriers O.P. Par M. l’abbé Donald J. Sanborn Introduction de “Sacerdotium” L a grande difficulté qui se présente aux catholiques qui s’opposent au Concile Vatican II et à ses réformes est celle de l’autorité papale, c’est-à-dire de quelle manière on peut justifier le refus de la “nouvelle religion” lorsqu’elle est proclamée, au moins apparemment, par l’autorité suprême. La solution proposée par la Fraternité Saint Pie X est la suivante: les papes de Vatican II sont de vrais papes mais on ne doit pas leur obéir quand ils nous ordonnent de croire ce qui est faux ou de faire ce qui est mal. Toutefois, cette solution bien qu’elle puisse s’appliquer sans problème aux ordres du pape qui agit en tant que personne privée, implique une défection de l’Eglise s’il s’agit du magistère ordinaire universel ou des lois générales, qui sont des vérités infaillibles. En d’autres termes, un vrai pape, en vertu de l’assistance du Saint-Esprit, ne peut au nom de l’Eglise, nous enseigner des choses fausses ou nous ordonner de faire le mal. Donc, l’unique solution qui maintienne l’indéfectibilité de l’Eglise consiste à affirmer que ces “papes” qui promulguent et diffusent la défection de la foi de Vatican II et de la “nouvelle religion” en général ne jouissent pas de l’autorité papale. Cependant, parmi tous ceux qui soutiennent cette thèse, certains affirment que ces papes sont totalement privés de la dignité pontificale, d’autres soutiennent qu’ils n’en sont privés que partiellement, c’est-à-dire formaliter (formellement) et non materialiter (matériellement). Cette seconde thèse a été exposée pour la première fois par Mgr Guérard des Lauriers dès 1973, toutefois elle est ignorée de beaucoup et mal comprise de presque tous. Dans cette série d’articles, l’auteur explique les principes de cette thèse afin que tout le monde la comprenne plus clairement et jugent de sa valeur. PREMIERE PARTIE: RECHERCHE POSITIVE SUR LA DISTINCTION ENTRE SUCCESSION FORMELLE ET SUCCESSION MATERIELLE Préface Parmi ceux qui nient que Jean-Paul II est vrai pape, nous trouvons deux blocs: 1) le camp de ceux qui nient qu’il est pape tant materialiter (matériellement) que formaliter (formellement); 2) le camp de ceux qui nient qu’il est pape formaliter (formellement) mais soutiennent qu’il est pape materialiter (matériellement). On a déjà beaucoup écrit sur ces deux thèses. Cependant, puisque plusieurs prêtres ne comprennent pas bien la seconde - exprimée par Mgr Guérard des Lauriers - dans cette série d’articles j’expliquerai cette thèse afin que tous au moins la comprennent clairement et puissent juger de sa valeur. La principale raison pour laquelle elle est contrecarrée par le plus grand nombre, est due au fait que ceux-ci dans leur esprit ne distinguent pas matière et forme de l’autorité, ou s’ils les distin- 61 guent, la distinction n’est pas appliquée de manière correcte à la papauté. De plus, plusieurs prêtres considèrent la thèse de Mgr Guérard (que désormais nous appellerons simplement “Thèse”) comme trop abstraite, presque inintelligible et la distinction entre matière et forme de l’autorité, illégitime, une pure invention théologique imaginée artificieusement pour expliquer un sujet épineux. Rien de tout cela n’est vrai. La distinction entre matière et forme de la papauté et de l’autorité en général est “classique” et on la trouve chez presque tous les théologiens. Implicitement on la retrouve dans la question de la succession apostolique là où il s’agit de la succession matérielle et non formelle chez les schismatiques et, d’après certains, chez les anglicans. Selon l’opinion la plus répandue, la succession apostolique peut être matérielle ou formelle. La première est la possession nue du siège, c’est-à-dire la possession du siège sans l’autorité, la seconde est la possession du siège avec l’autorité. Cette distinction entre succession matérielle et succession formelle ne pourrait pas exister s’il n’était pas possible d’avoir la possession du siège sans l’autorité. Cette distinction, qui bénéficie d’une très grande autorité auprès des théologiens, démontre comment la thèse qui établirait de manière adéquate une réelle distinction entre la possession du siège apostolique et la possession de l’autorité apostolique n’est pas une “invention abstraite” ou “illégitime” ou “artificieuse” comme beaucoup l’ont dit, mais au contraire une distinction simple et claire tirée de la philosophie thomiste et confirmée par le témoignage de nombreux théologiens de toutes les écoles. Pour traiter ce sujet j’adopterai la méthode suivante: I) Dans le premier article, [que nous publions ici] je présenterai des témoignages de théologiens sur la distinction entre succession apostolique formelle et matérielle qui explicitement contiennent la distinction entre possession du siège sans la possession de l’autorité et possession du siège avec la possession de l’autorité. Ces témoignages prouvent que cette distinction n’est pas une pure invention mais est au contraire une distinction très connue, reconnue de tous, antérieure à la présente question de la vacance du siège; je montrerai en outre comment l’Eglise ne peut demeurer comme unique corps moral si la lignée matérielle légale ne continue pas sans interruption à partir de Saint Pierre lui-même. II) Dans le second article je traiterai de manière spécu- lative de la philosophie de l’autorité en général, et ensuite en particulier de la matière et forme de la papauté en apportant le témoignage de certains auteurs et je démontrerai comment d’une part ne peuvent coexister dans le même sujet le fait de favoriser l’hérésie et l’autorité papale, mais d’autre part comment peut demeurer la possession légale du siège s’il n’y a pas une sentence authentique contre l’occupant hérétique du siège apostolique. III) Dans le troisième article j’appliquerai les conclusions à Montini, Luciani et Wojtyla et je répondrai aux objections. TEMOIGNAGES DES THEOLOGIENS VALENTINUS ZUBIZARRETA Theologia Dogmatico-Scholastica, I, Theologia fundamentalis. Bilbao, Ed. Eléxpuru Hnos.,1937. Est nécessaire non seulement [la succession apostolique] matérielle qui réside dans la pure et simple succession des pasteurs, mais aussi la succession formelle dans la mesure où chacun succède légitimement aux autres. L’ordre des évêques qui court depuis le commencement par les successions, se développe de telle manière «que ce premier évêque aura eu comme instituteur et prédécesseur un des apôtres ou des hommes apostoliques pourvu qu’il soit toujours resté avec les apôtres» (Tertullien, De Prescrip., c. 32; ML 2, 53). Pour cette raison les schismatiques et les intrus qui usurpèrent le siège par la force ou par la fraude interrompent la succession formelle et on dit qu’ils commencent une nouvelle série de pasteurs. J. V. DE GROOT O.P. Summa Apologetica de Ecclesia Catholica, Ratisbona, Institutum Librarium pridem G.J. Manz., 1906. Afin que [la succession Apostolique] soit légitime il est nécessaire qu’il y ait une succession formelle et non seulement une succession matérielle. En effet la succession formelle se fonde sur les préceptes du Christ, la succession matérielle, la règle du Christ étant délaissée, consiste dans la pure et simple occupation du siège pastoral. Dans la succession formelle il y a le droit et il y a la mission légitime; si celle-ci fait défaut, il n’existe aucun pouvoir de juridiction. La mission légitime dans l’Eglise n’est pas possible s’il n’y a pas la succession légitime (p. 184). 62 G. VAN NOORT Tractatus de Ecclesia Christi. Hilversi in Hollandia, 1932. La première voie [pour constater qu’un évêque est légitime successeur des apôtres] est, que l’on puisse démontrer avec des documents historiques, qu’il est en connexion avec l’un des apôtres au moyen d’une série ininterrompue de prédécesseurs; il est toutefois nécessaire de démontrer en même temps que personne dans toute la série n’a jamais occupé illégitimement la place de l’immédiat prédécesseur ni n’a jamais perdu sa mission après avoir été légitimement coopté; en effet, la succession matérielle à elle seule ne prouve rien (n° 120). Donc, quiconque se vante de la succession apostolique mais n’est pas uni au Pontife romain peut certainement avoir le pouvoir de l’ordre, peut occuper par succession matérielle le siège fondé par un apôtre, ou au moins pourrait le faire, mais n’est pas le vrai et formel successeur des apôtres dans la charge pastorale (n° 120). En parlant de Michel Cérulaire: Et s’il a cessé d’être membre du collège épiscopal, il a perdu nécessairement le pouvoir apostolique qu’il possédait en tant que membre de ce collège. Donc, bien qu’il continuât à occuper le siège apostolique matériellement, il ne faisait plus partie des légitimes successeurs des apôtres (n° 140). CARDINAL CAMILLO MAZZELLA De Religione et Ecclesia Prælectiones Scholastico-dogmaticae, Roma 1896. [La succession apostolique] est dite pérenne ou ininterrompue, soit materialiter, dans la mesure où ne font pas totalement Le cardinal Camillo Mazzella défaut des personnes qui sans interruption ont pris la place des apôtres, soit formaliter, dans la mesure où ces mêmes personnes ayant succédé aux Apôtres jouissent de l’autorité transmise par les apôtres eux-mêmes en la recevant de celui qui la possède en acte et peut la communiquer (p. 559). E. SYLVESTER BERRY, D.D. The Church of Christ. St. Louis B. Herder Book Co., 1927. La succession, comme entendue dans ce contexte, est la succession d’une personne après l’autre dans une charge officielle et elle peut être légitime ou illégitime. Les théologiens appellent la première succession formelle et la seconde succession matérielle. Un successeur matériel est une personne qui occupe la place officielle d’une autre à l’encontre des règles ou de la constitution de la société dont il s’agit. Celui-ci peut être appelé successeur en tant qu’il occupe matériellement la place, mais n’a pas l’autorité et ses actes n’ont pas de valeur officielle même dans le cas où il ignore occuper illégalement la charge. Un successeur formel, ou légitime, non seulement succède dans la place du prédécesseur mais reçoit aussi l’autorité due pour exercer les fonctions de la charge avec force coactive dans la société. Il est évident que l’autorité ne peut être transmise que par une succession légitime; c’est pourquoi l’Eglise doit avoir une succession légitime de pasteurs, ou formelle, pour transmettre l’autorité apostolique au cours des siècles. Celui qui s’introduit dans le ministère contre les lois de l’Eglise ne reçoit absolument pas l’autorité et par conséquent ne peut transmettre aucune autorité à ses successeurs (pp. 139-140). Dans certains cas elles [les églises Orthodoxes orientales] peuvent même avoir une succession matérielle d’évêques remontant au temps des Apôtres, mais ceci leur est inutile du moment qu’elles n’ont ni unité ni Catholicité - deux éléments de distinction fondamentaux de la vraie Eglise. Elles n’ont absolument en aucun cas une succession légitime... (pp. 184-185). M. JUGIE Art. “Apostolicità” In Enciclopedia Cattolica, Città del Vaticano 1948 Vol. I, col. 1693. La notion donc générale et complète de l’apostolicité veut dire continuité avec l’Eglise fondée par les Apôtres par succession ininterrompue de légitimes Pasteurs 63 (apostolicité matérielle); et identité essentielle de ministère et de régime hiérarchicomonarchique (apostolicité formelle). SAINT ROBERT BELLARMIN S.J. De Romano Pontefice I. 2, c. 17. Il faut observer que dans le Pontife coexistent trois éléments: Le Pontificat luimême (le primat précisément), qui est une certaine forme: la personne qui est le sujet du Pontificat (ou primat) et l’union de l’un avec l’autre. De ces éléments, seul le premier, c’est-à-dire le Pontificat lui-même provient du Christ; la personne au contraire en tant que telle procède sans doute de ses causes naturelles, mais en tant qu’élue et désignée au Pontificat elle procède des électeurs; il leur appartient de désigner la personne: mais l’union elle-même procède du Christ, par le moyen (ou en le présupposant) l’acte humain des électeurs... On dit donc en vérité que les électeurs créent le Pontife et sont la cause qu’un tel soit Pontife... toutefois ce ne sont pas les électeurs qui donnent l’autorité ni ne sont cause de l’autorité. De même que dans la génération des hommes l’âme est infuse seulement par Dieu et cependant, puisque le père qui engendre en disposant la matière est cause de l’union de l’âme avec le corps, on dit que c’est un homme qui engendre un autre homme mais on ne dit pas que l’homme crée l’âme de l’homme. RAPHAEL CERCIÀ, S.J. Tractatus de Ecclesia Vera Christi, Neapoli Typis Caietani Migliaccio 1852. Enfin [la succession apostolique est dite] ininterrompue tant materialiter que formaliter dans la mesure où ne font pas défaut des personnes qui sans interruption prennent la place des Apôtres et dans la mesure où ces mêmes personnes qui prennent la place des Apôtres maintiennent cette unité de foi et de communion sur lesquelles, depuis le commencement fleurissait la hiérarchie fondée sur les Apôtres. Et sur cela se fonde la notion de mission (missio) et d’appel (vocatio). En effet il y a légitime avènement (assumptio) et assignation (deputatio) à accomplir les charges apostoliques dans la mesure où quelqu’un succèdera légitimement à la place des Apôtres. Sans doute la mission et la vocation dépendent de la succession et c’est parce que quelqu’un a été fait successeur des Apôtres dans la forme prescrite par la loi, qu’il a la mission et se trouve dans l’état de vocation apostolique (p. 270). Et en vérité l’apostolicité de l’origine exige que l’Eglise en tout temps, au moins indirectement, ait été connexe même materialiter avec les Apôtres ses fondateurs (p. 271). Il est donc évident que dans l’Eglise la vraie succession Apostolique, et précisément ni materialiter ni formaliter, ne pourra jamais faire défaut. Si en effet l’Eglise doit toujours avoir formellement l’apostolicité de la foi et de la communion elle doit aussi toujours avoir formellement l’apostolicité de la succession. De même, comme l’Eglise doit toujours être formellement une, de la même façon elle doit être dotée formellement de la succession apostolique sans laquelle, comme nous l’avons vu, elle ne serait pas une et unique. En outre, le Christ a promis que les successeurs des Apôtres existeraient jusqu’à la fin du monde, ce qui démontre que la succession matérielle ne peut faire défaut. Puisqu’Il a aussi ajouté qu’Il accorderait son assistance à perpétuité à ses successeurs comme aux Apôtres, on conclut que même formellement la succession apostolique ne peut être ébranlée dans la vraie Eglise. Les choses étant ainsi en matière de succession, ce que l’on doit penser de la mission apostolique est évident. Nous avons dit, justement, que la possession de la mission dépend de la possession de cette succession. Si donc l’Eglise ne peut jamais être privée de la succession considérée tant formaliter que materialiter, elle ne peut jamais non plus être dépouillée de la mission apostolique prise dans les deux sens. Si la mission persiste, perdure aussi l’attitude et l’autorité pour l’exercer (pp. 272-273). Nous reconnaissons en effet que [les églises grecques et ruthènes] ne sont pas destituées d’une certaine apparence de succession, toutefois elle n’est que matérielle et non formelle puisque manque l’adhésion qui doit être maintenue au chef dans l’unité de foi et de gouvernement. Comme donc la succession matérielle ne sert pas aux partisans de Nestorius et d’Eutychès bien qu’elle soit plus ancienne, ainsi elle ne sert pas à l’église grecque ou ruthène. A fortiori on doit dire la même chose concernant la succession de l’église anglicane (pp. 340-341). SERAPIUS AB IRAGUI, O.F.M. CAP. Manuale Theologiæ Dogmaticæ, I Theologia fundamentalis. Madrid, Ed. Studium 1959. Que dire de la succession matérielle? La succession matérielle n’est rien d’autre qu’une suite ininterrompue d’une personne après une autre sur un siège. Et ceci peut être vérifié fa- 64 cilement dans les documents historiques et pour cette raison la succession matérielle est une propriété plus reconnaissable que l’Eglise elle-même. Mais la succession matérielle peut manifester la vraie Eglise seulement négativement, en d’autres termes, il n’est pas incompatible que même une église illégitime présente cette note, et de fait les églises séparées qui la possèdent ne manquent pas. DOMENICO PALMIERI, S.J. Tractatus de Romano Pontifice, Prati Giachetti 1891. Par un triple fondement, l’Eglise est dite Apostolique: en raison de l’origine puisqu’elle a commencé avec les Apôtres; en raison de la doctrine, puisqu’elle professe la foi transmise par les Apôtres; en raison du ministère ou gouvernement, puisqu’elle est dirigée et conduite par ceux qui sont les successeurs des Apôtres en ligne ininterrompue. Si le troisième point est présent, il y a aussi les deux précédents: en effet, il y a certainement l’origine apostolique quand une succession de Pasteurs qui se succèdent l’un après l’autre a commencé par les Apôtres et il y a aussi la doctrine Apostolique, puisque l’infaillibilité a été promise à la série ininterrompue des successeurs des Apôtres. En vérité, pour que ces éléments fondamentaux soient présents il est nécessaire que soit présent le troisième non seulement materialiter mais aussi formaliter; et qu’ainsi la succession des Pasteurs soit formelle. La succession matérielle est une pure et simple série de Pasteurs ou Evêques qui se suivent de manière ininterrompue en remontant jusqu’aux Apôtres ou à l’un des Apôtres à partir desquels elle a commencé: la succession formelle est cette série qui en plus jouit de l’autorité transmise par les Apôtres à chaque successeur, qui par cette autorité sont constitués successeurs formellement. C’est donc pour cela que chacun des successeurs reçoit l’autorité provenant des Apôtres de ceux ou de celui qui a reçu la même autorité en acte et peut la communiquer aux autres; il arrive de cette manière que l’autorité demeure formellement au moyen de la succession. Les successions sont toutes les deux nécessaires, et l’une ne peut exister sans l’autre; la première cependant est plus reconnaissable, la seconde au contraire on la connaît quand on connaît la vraie Eglise. Puisqu’ici nous traitons des caractéristiques propres de la succession, analysons-la correctement et revendiquons-la pour l’Eglise. Saint Robert Bellarmin En vérité, 1° la succession matérielle est nécessaire. En effet le Christ institua le ministère apostolique et voulut qu’il fût perpétuel: voici, dit-Il, je suis avec vous tous les jours, etc... Or, il ne serait pas perpétuel si les ministres de l’Eglise n’étaient pas dans une série ininterrompue successeurs des Apôtres; ergo. Et encore: l’Eglise doit être une seule et toujours égale. Le principe de l’unité de l’Eglise est le ministère institué par le Christ; donc il est nécessaire que dans l’Eglise il y ait toujours un unique ministère: il est nécessaire donc que l’Eglise soit dirigée par ce ministère que dès le commencement le Christ confia aux Apôtres. Et cela ne peut arriver si elle n’est pas toujours dirigée par ceux qui sont issus des Apôtres en une série ininterrompue; si en effet elle est dirigée par d’autres qui ne peuvent pas être mis en relation avec les Apôtres, en substance elle est dirigée par un ministère qui commence par lui-même, et non par celui qu’institua le Christ. Dans ce cas l’autorité serait multiple et l’Eglise cesserait d’être une mais deviendrait multiple, le principe de l’unité se multipliant. C’est pourquoi il est aussi manifeste que la série des successeurs ne doit jamais être interrompue, si en effet à un certain point elle est interrompue, cesse ce ministère avec lequel l’Eglise doit être gouvernée et cesse le principe de sa vraie unité, l’Eglise elle-même cesse donc: mais si jamais un jour l’Eglise cesse, elle ne pourra plus 65 être rétablie. En effet son principe efficient est le ministère des Apôtres qui consiste à enseigner, gouverner et sanctifier, et qui dans cette hypothèse n’existerait plus. Les ministres ne peuvent pas s’engendrer d’euxmêmes, puisque le ministère doit être Apostolique et pour être Apostolique il doit provenir par transmission de la succession: «s’ils avaient été corrompus (les bons par la compagnie des mauvais) alors (au temps de Cyprien) l’Eglise n’existait pas. Répondez: d’où tire-t-elle son origine ici-bas? D’où Donat tire-t-il son origine? Où a-t-il été baptisé, où a-t-il été ordonné?» dit Augustin aux Donatistes in de Baptismo, I. 2. c. 6. 2° Mais cette succession doit être formelle. C’est elle la vraie succession afin que la seule succession matérielle ne soit pas succession seulement en apparence. Comme nous l’avons dit, l’Eglise doit toujours être dirigée avec l’autorité instituée par le Christ et avec elle seule; en effet dans l’Eglise l’autorité est surnaturelle, c’est-à-dire qu’elle ne peut venir que de Dieu et afin que l’Eglise soit dirigée à perpétuité avec cette autorité il existe une série perpétuelle de successeurs: il faut donc que les successeurs empruntent cette même autorité que reçurent les Apôtres. Mais afin que celui qui succède obtienne l’autorité, il faut qu’il la reçoive de ceux ou de celui qui obtient en acte l’autorité provenant des Apôtres et peut la transmettre; ni il ne peut l’acquérir de lui-même parce qu’alors il ne succéderait pas, ni il ne peut l’emprunter à celui chez qui elle ne provient pas des Apôtres, parce qu’alors il ne recevrait pas l’autorité apostolique, ni il n’est suffisant que l’on dise qu’il la reçoit de celui qui l’eut un temps parce qu’on peut la perdre, et il n’est pas suffisant que l’on dise qu’il la reçoit de celui qui la possède mais ne peut la transmettre parce qu’alors en ce cas il ne recevrait rien. Ergo. Ceci est la succession formelle. Sans doute, afin que quelqu’un ait l’autorité dans l’Eglise, la mission est demandée (Rom. X, 15, col. I Tim. V, 22, 7: Tim. II. 2; Tit. I, 5): mais il ne peut envoyer que celui qui obtient en acte l’autorité Apostolique et peut la transmettre. Donc, c’est de lui que l’on doit recevoir l’autorité; donc, un successeur doit succéder formellement. Ceux par conséquent qui succèdent de cette manière sont les seuls qui puissent vraiment être dits successeurs des Apôtres; puisqu’eux seuls obtiennent cette autorité que les Apôtres reçurent du Christ (pp. 286-288). PERES JESUITES PROFESSEURS DES FACULTES DE THEOLOGIE EN ESPAGNE Sacrae Theologiae Summa, I: Theologia Fundamentalis, Madrid, La Editorial Catolica 1952. L’apostolicité de la succession est double: 1) matérielle: c’est la pure et simple succession d’une personne après l’autre dans une charge, sans la nécessaire permanence du même droit. 2) formelle: c’est le remplacement d’une personne dans les droits et dans les devoirs d’une autre dans la mesure où elle se conforme à une charge déterminée, sans aucun changement du droit (n° 1178). CARD. LUDOVICUS BILLOT, S.J. De Ecclesia Christi, Roma Università Pontificia Gregoriana 1927. Et ici notez qu’il est question de la succession formelle, distincte de la succession purement matérielle qui est compatible avec l’absence de l’apostolicité. La succession matérielle consiste en la nue occupation du siège par une série continue d’évêques. La succession formelle au contraire ajoute l’identité permanente de la même personne publique, de sorte que malgré la multiplicité des titulaires, un changement substantiel n’interviendra jamais dans l’exercice et dans l’attribution de l’autorité (p. 262). YVES DE LA BRIERE Eglise (Question des Notes) in Dictionnaire Apologétique de la Foi Catholique. éd. A. D’Alès. Paris, Beauchesne 1911. Cette «note» de la succession apostolique est diversement concevable et probante, selon qu’il s’agit d’une succession matériellement continue (sans autre indice) ou d’une succession attestée comme légitime. Dans le premier cas, la succession apostolique sera une «note» négative, permettant d’exclure toute Eglise qui ne posséderait pas, depuis les apôtres, la succession matériellement continue de ses pasteurs. Dans le second cas, la succession apostolique sera une «note» positive, permettant de reconnaître pour unique et véritable Eglise du Christ celle qui établirait le caractère légitime de la succession de ses pasteurs depuis les apôtres. Une succession est attestée comme légitime, lorsqu’elle a lieu conformément aux règles prescrites et qu’aucun vice essentiel n’en invalide l’exercice. La chose est comprise et vérifiable parmi les hommes, de même qu’est comprise et vérifiable la régularité d’une nomination ou la validité d’un mandat officiel. 66 Par conséquent, dans telle Eglise locale, la succession apostolique des évêques sera matériellement continue lorsque, remontant de titulaire en titulaire du même siège, on trouve chez les apôtres l’origine de la succession. Il y aura, de la sorte, origine directement apostolique, si le siège a été fondé par les apôtres eux-mêmes. Il y aura, d’autre part, origine indirectement apostolique, si le siège n’a pas été fondé par les apôtres, mais se rattache à une succession antérieure, émanant elle-même des apôtres. Quant au caractère de légitimité de cette succession apostolique matériellement continue, il résultera du fait que la validité de la juridiction épiscopale n’aura pas été annulée par le schisme ou l’hérésie; c’est-àdire par la rupture déclarée avec l’œuvre authentique de Jésus-Christ. Après semblable rupture, en effet, il ne peut évidemment pas y avoir de transmission régulière, valide, légitime, de l’autorité gouvernante, du pouvoir pastoral des apôtres: puisque, par hypothèse, on s’est notoirement exclu, séparé, de la hiérarchie apostolique on a cessé d’être un vrai «pasteur» de l’Eglise pour devenir «rebelle» à l’Eglise du Christ. Mais où faudra-t-il chercher la preuve extérieure du caractère légitime de la succession épiscopale? Comment établir l’absence de tout schisme, de toute hérésie, bref de toute rupture qui ait invalidé la juridiction transmise? - La preuve de légitimité apparaîtra si l’on trouve, joints à la succession matériellement continue depuis les apôtres, deux caractères distinctifs qui seront étudiés plus loin: les «notes» d’unité visible et de catholicité visible. Ces deux caractères permettront d’exclure pratiquement toute hypothèse de schisme, d’hérésie, de rupture. Ils garantiront ainsi la validité, la légitimité de la succession apostolique dans le gouvernement de telle Eglise chrétienne. Donc la «note» d’apostolicité, prise dans toute l’ampleur de sa signification, envelopperait les «notes» d’unité et de catholicité, qui attesteraient la légitimité successorale. C’est la réunion de ces trois notes qui formerait un critère juridique de la véritable Eglise, en manifestant la transmission régulière du pouvoir pastoral des apôtres. En tant que distincte de l’unité et de la catholicité, la «note» d’apostolicité n’aura qu’une valeur négative et d’exclusion, puisqu’elle n’attestera pas, par elle-même, le caractère légitime de l’autorité transmise. Ce sera néanmoins acquérir un indice précieux, pour l’examen des titres de chaque communion chrétienne, que de vérifier si elle possède - ou ne possède pas - la succession continue depuis les apôtres dans le gouvernement de l’Eglise. (Tomus I, col. 1283 s.). JOHANNES MACGUINNES C.M. Commenterai Theologici, Parisiis, P. Lethielleux, 1913. Selon la doctrine catholique, l’Eglise est essentiellement apostolique dans le ministère dans ce sens, que par l’institution du Christ un groupe particulier ne peut pas en faire partie s’il n’est pas uni aux Apôtres par une série ininterrompue de pasteurs. Deux éléments, l’élément matériel et l’élément formel, concourrent à créer cette union avec les Apôtres. L’élément matériel est la série même ininterrompue de pasteurs, l’élément formel consiste en la succession légitime. De plus, pour la succession légitime on exige que le double pouvoir par lequel les hommes deviennent pasteurs, c’est-à-dire le pouvoir d’ordre et de juridiction, soit transmis avec toutes les conditions essentielles prescrites par le Christ tant concernant les personnes qui confèrent ce pouvoir, que celles qui le reçoivent ou en ce qui concerne la manière de le conférer. Les deux éléments, matériel et formel, contiennent la définition de succession apostolique rapportée et expliquée par Cercià (sect. 3, lect. 8, p. 223): «substitution publique, légitime, solennelle et jamais interrompue de personnes à la place des Apôtres pour gouverner et être pasteurs dans l’Eglise» (Tome I, n° 116). Répondant à l’objection que les fidèles puissent se choisir les pasteurs, comme la société civile peut se donner un gouvernement: Par droit naturel la société civile peut se donner un gouvernement, si elle ne l’a pas encore: dans l’Eglise, qui est une société surnaturelle constituée par la volonté de Dieu, il peut y exister seulement un ministère sacré et d’après les conditions établies par Dieu (ibid. n° 127). Dans l’Eglise ont la juridiction pastorale seulement ceux qui l’ont obtenue de la source apostolique par une succession continue (médiate ou immédiate) - Contre les partisans de Pusey. Preuve I. Dans l’Eglise ont la juridiction pastorale seulement ceux qui l’ont obtenue légitimement de la source où dès le commence- 67 ment le Christ l’avait placée exclusivement; et 1) le Christ a confié la juridiction ecclésiastique exclusivement aux Apôtres pris collectivement comme a un seul collège, et 2) de cette source personne ne peut obtenir légitimement la juridiction sinon par une succession continue (immédiate et médiate); ergo (ibid. n° 128). Pour cela même une société hérétique ou schismatique est privée de l’apostolicité du ministère - Contre les Protestants en général. Preuve. Pour l’apostolicité du ministère on requiert le pouvoir tant d’ordre que de juridiction: en effet personne ne peut exercer la charge de pasteur sinon sur les brebis qui lui sont attribuées et confiées conformément aux règles; or les hérétiques et les schismatiques n’ont pas la juridiction, donc n’importe quelle secte hérétique ou schismatique est privée de l’apostolicité du ministère. Preuve de la mineure. Ce n’est que de la vraie Eglise Apostolique qu’on peut recevoir la juridiction (comme prouvé précédemment); or “a priori” il est impossible que l’Eglise confie les brebis à des pasteurs hérétiques ou schismatiques et “a posteriori” et dans la pratique l’Eglise a toujours eu l’habitude de déposer les évêques hérétiques ou schismatiques (ibid. n° 132). H. HURTHER S.J. Medulla Theologiæ Dogmaticæ, Œniponte: Libreria Academica Wagneriana 1902. Dans l’apostolicité du ministère on distingue un double élément: matériel, qui consiste essentiellement dans la série même des pasteurs, et formel qui consiste dans la succession légitime et proprement dite. Il est donc nécessaire que le successeur non au moyen de la force mais d’après les lois et le rite entre dans la société en vigueur à la place du prédécesseur, et succède dans la charge et dans le rapport avec le groupe restant de pasteurs et avec l’Eglise, et que dès lors il ne se sépare pas de l’unité de l’Eglise par schisme. En effet, celui qui est l’auteur d’un schisme sera un rameau coupé et pourra commencer une nouvelle série de pasteurs qui cependant n’aura pas la continuité organique et vitale avec ses prédécesseurs. Certains groupes schismatiques d’Orient purent peut-être se glorifier d’une série matérielle de pasteurs qui remonte aux Apôtres; mais ils sont privés de l’élément formel: ainsi aura pu être admis dans cette série un pasteur qui, ne voulant pas être successeur de son prédécesseur, se sera séparé de l’unité ecclésiastique et aura commencé une nouvelle série de pasteurs (n° 237). ÆMIL DORSCH Institutiones Theologiæ Fundamentalis, Œniponte 1914 Tome II. Est dite apostolicité du ministère cette propriété de l’Eglise par laquelle les pasteurs et les docteurs qui en ce moment la gouvernent tirent leur origine des apôtres au moyen d’une série ininterrompue de successions; c’est pourquoi cette apostolicité est aussi dite de succession. Donc, par le moyen de cette apostolicité non seulement dans l’Eglise il y a maintenant le même ministère matériel, mais il y a aussi formellement presque les mêmes ministres qu’il y avait depuis le commencement, dans la mesure où les ministres qui exercent maintenant la charge dans l’Eglise sont le prolongement ininterrompu des Apôtres, tant que par leur disposition ils possèdent le même ministère par légitime héritage. Division I) La première division se produit d’après un double élément que l’on peut distinguer aussi dans l’apostolicité du ministère: l’un matériel qui consiste essentiellement dans la série même de pasteurs et l’autre formel qui consiste dans la succession légitime et proprement dite. Ainsi se distinguent l’apostolicité matérielle et l’apostolicité formelle. La première consiste dans le fait que dans une église dont le premier évêque remonte aux Apôtres, les évêques ordonnés validement se sont succédés sans interruption jusqu’à l’évêque actuel, bien que depuis un temps déterminé la mission légitime leur manque. L’apostolicité formelle est celle qui à la succession matérielle, c’est-à-dire à la valide ordination ayant existé sans interruption, ajoute la légitime mission ou juridiction ininterrompue jusqu’à aujourd’hui (p. 517). Le ministère confié au commencement par le Christ aux Apôtres est pérenne dans l’Eglise; c’est pourquoi dans l’Eglise il doit toujours y avoir des pasteurs, comme étaient les Apôtres: “voici que je suis avec vous [les apôtres prêchant] jusqu’à la consommation des siècles”. Or dans l’Eglise personne n’est pasteur sinon celui qui a été envoyé; personne n’est pasteur de la même manière que les Apôtres s’il n’a pas été envoyé avec la même mission par laquelle les Apôtres aussi ont été envoyés par le Seigneur. Et encore, cette mission que les Apôtres reçurent directement du Christ, désormais ne peut se 68 réaliser, ou tout au moins ne se réalise pas de manière aussi immédiate, mais comme elle a été transmise par les Apôtres aux premiers successeurs, ainsi elle doit être transmise ultérieurement par les successeurs légitimes. C’est pourquoi, nécessairement toute la série des ministres au cours les siècles est ramenée aux Apôtres par une certaine généalogie spirituelle et pour cela même l’Eglise, grâce à une série jamais interrompue de pasteurs remontant jusqu’aux Apôtres, doit être considérée apostolique en fonction du ministère (p. 519 s). RÉSUMÉ ET COMMENTAIRE DE LA DOCTRINE DES AUTEURS SUSMENTIONNÉS I) La succession apostolique doit être pérenne et continue tant materialiter que formaliter de telle manière que l’Eglise par analogie avec un corps physique vivant ait légalement un seul corps moral (= une hiérarchie constituée légalement avec les membres qui lui sont connexes) et une seule âme morale [une autorité] tandis qu’elle traverse les siècles jusqu’à la fin du monde. Si l’un ou l’autre venait à manquer, l’Eglise manquerait. Si l’unicité corporelle venait à manquer, c’est-à-dire si les personnes n’étaient pas légalement substituées aux Apôtres, alors l’autorité qui est la mission de l’Eglise et la forme par laquelle l’Eglise est la vraie Eglise du Christ, ne pourrait pas être reçue dans la matière et la mission de l’Eglise finirait. En outre, si jamais l’Eglise, comme unique corps légal fondé par Notre-Seigneur Jésus-Christ et continué par les Apôtres jusqu’à aujourd’hui finissait, personne ne pourrait la rétablir. Dans ce cas, c’est-à-dire si elle était rétablie après la cessation de la série matérielle des pasteurs, il s’agirait d’une nouvelle église, parce que le principe de l’unité l’identification même matérielle avec l’Eglise fondée par Jésus-Christ - ferait défaut. La cessation de la ligne matérielle est analogique à l’annihilation du corps dans un être physique, de manière que rien ne subsiste, ni même une partie de la substance qui puisse recevoir la forme. Ainsi l’identité de l’Eglise exige qu’elle maintienne une seule forme comme constitutif formel de la personnalité morale pour tous les siècles, et ceci est l’autorité même du Christ qui est transmise à tout pape qui a une élection valide et indubitable et n’oppose aucun obstacle à recevoir l’autorité. En outre, l’essence de l’Eglise exige qu’en tant que corps moral cette unique autorité soit reçue dans une matière moralement unique, c’est-à-dire dans une unique série de pasteurs constituée légalement et non interrompue. Donc, l’autorité qui gouverne l’Eglise est cette autorité possédée principalement par le Christ et par le pape de manière vicariale. Deux autorités ne sont pas possibles, seulement une unique autorité est possible, qui constitue l’Eglise seule personne morale surnaturelle qui perdure dans les siècles. Pareillement, ne sont pas possibles plusieurs corps ecclésiastiques, mais est possible seulement un unique corps à cause de la continuité légale de la série de pasteurs. Unique corps moral de l’Eglise + unique autorité possédée du Christ et transmise à l’élu = unique personne morale de l’Eglise Catholique II) Il n’y a pas de mission légitime si la succession légitime fait défaut. L’autorité apostolique ne peut être reçue que de celui qui a légitimement succédé dans la possession du siège apostolique. Les intrus, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas reçu l’élection légale, ne sont pas aptes à être de vrais successeurs des Apôtres. III) Il n’y a pas de succession apostolique légitime si elle n’est pas formelle. La succession matérielle, tant par élection légale que par prise de possession par la force ou en dehors de la loi, n’est pas suffisante pour qu’il y ait une succession apostolique légitime, parce que l’autorité est la forme avec laquelle quelqu’un est constitué vrai successeur des Apôtres. L’élection légale n’est pas suffisante pour que quelqu’un soit constitué et soit considéré comme vrai successeur des Apôtres formellement. IV) Il existe une distinction réelle entre la simple occupation du siège et la possession de l’autorité; en outre ces deux réalités peuvent être séparées. Cette distinction est le fondement même de la Thèse Materialiter-Formaliter; précisément parce que, la désignation à recevoir l’autorité n’implique pas nécessairement la possession de l’autorité et si la personne désignée posait un quelconque obstacle à recevoir cette autorité qui naturellement convient à la désignation reçue, elle resterait dans l’état purement matériel quant à l’auto- 69 La chaire de Saint Pierre rité. Dans ce cas, le sujet de la désignation ne perdrait pas la désignation elle-même à moins qu’elle ne lui fût enlevée légalement, mais en même temps il ne posséderait pas l’autorité et ne serait pas pape ou évêque du lieu “simpliciter”, mais le serait seulement “secundum quid”, c’est-à-dire par disposition. Inversement, la perte ou la nue nonpossession de l’autorité n’exclut pas la désignation légale. La désignation légale à recevoir l’autorité d’une part et la possession de l’autorité de l’autre, sont deux choses réellement distinctes et séparables. V) Le premier sujet de l’autorité de l’Eglise est le Christ Lui-même, qui la transmet à la personne qui a été légitimement élue et désignée au pontificat. L’Eglise est toujours dirigée principalement par le Christ son chef et l’autorité dont jouit le pape est l’autorité même du Christ, une et toujours égale, qui demeure telle pour tous les siècles même si les titulaires se multiplient. L’autorité ou juridiction est unique, c’est-à-dire celle du Christ et cette unité et unicité de l’autorité est la forme même de l’Eglise qui demeure formellement une et unique personne morale pour tous les siècles. VI) La succession formelle peut être morale sans être physique; au contraire la succession matérielle doit être physique. En effet, un pape étant mort, alors que le siège est vacant, la continuité de la papauté ne fait pas défaut puisque l’Eglise a l’intention d’élire un nouveau pontife. Donc la suc- cession d’un pape à l’autre est purement morale dans la mesure où persiste l’intention d’élire un pape et tant que dans les membres de l’Eglise demeure la soumission à cette autorité. La succession serait physique si, avant de mourir, un pape choisissait son successeur et lui remettait l’autorité. La succession matérielle, au contraire, doit être physique de cette manière: il faut qu’il y ait toujours des personnes légalement aptes à élire le pape. En d’autres termes, la lignée corporelle de l’Eglise, non seulement de ses membres mais encore et surtout de la hiérarchie, ne peut jamais tolérer une interruption physique. Si, par une hypothèse absurde, cette lignée était interrompue même seulement pour un court laps de temps, l’Eglise ferait défaut et ne pourrait pas être rétablie. Cette continuité du corps de l’Eglise, qui est essentiellement hiérarchique, est analogique au feu, qui une fois qu’il a été éteint reste éteint. La raison est que, les successeurs matériels légitimes faisant défaut, il n’y aurait personne qui pourrait légitimement recevoir l’autorité du Christ et gouverner l’Eglise comme son vicaire. La partie formelle de l’autorité de l’Eglise demeure dans le Christ tandis que le siège apostolique est vacant, mais la partie matérielle, c’est-à-dire la personne légitimement désignée à recevoir l’autorité ne peut demeurer s’il n’y a personne qui légitimement puisse la choisir. Dans ce cas, cette lignée matérielle ou purement légale ferait défaut et ne pourrait être rétablie que par celui qui a l’autorité, c’est-à-dire par le Christ Luimême, qui étant donnée la divine constitution de l’Eglise, “devrait” faire un nouvel appel d’Apôtres et une nouvelle Eglise différente de celle fondée sur Saint Pierre. 70 Recensions LA DESTRUCTION DU TEMPLE CHEZ MESSORI ET BLONDET: Seconde partie: “LES FANATIQUES DE L’APOCALYPSE” de Maurizio Blondet M aurizio Blondet, comme Messori (1), a lui aussi abordé le thème de la destruction du Temple de Jérusalem dans un livre intitulé: “Les fanatiques de l’Apocalypse” (2), dans lequel il démontre comment justement la destruction du Temple (3) nous signifie la fin de l’Ancienne Alliance et comment la volonté de le reconstruire jette une lumière sinistre et apocalyptique sur les événements futurs (4). LE TEMPLE Le Temple d’Hérode (5) - écrit Blondet construit sur les ruines du plus ancien Temple de Salomon, englobait le Saint des Saints, le Tabernacle où Dieu était réellement présent. Ce Tabernacle dans l’Ancien Testament était unique: il était le cœur de la Religion mosaïque, la preuve de sa vérité. Là en effet affleure toujours le rocher sur lequel Abraham, mille neuf cents ans avant le Christ, se tenait pour sacrifier son fils Isaac, et ce rocher, le Mont Moria, incorporé dans le Tabernacle du Temple, était la preuve juridique du pacte stipulé entre Abraham et son peuple: la descendance d’Abraham. C’est seulement là - dans l’Ancienne Alliance - sur le même rocher du sacrifice d’Isaac (symbole et figure du sacrifice de la Nouvelle et Eternelle Alliance) que le pacte entre Abraham et son peuple pouvait être périodiquement renouvelé. C’est seulement là qu’était accompli par le prêtre le Sacrifice sanglant pour les péchés, qui ne pouvaient être lavés sans lui. Mais, comme nous l’enseigne l’histoire et le confirme notre Foi, le Pacte de l’Ancienne Alliance a été abrogé, et le Sacrifice n’est plus offert depuis deux mille ans, c’est-à-dire depuis cette nuit de 70 dans laquelle les légions de Titus conquirent Jérusalem. Les Romains construisirent ensuite sur le rocher leur temple dédié à Jupiter Capitolin. Maintenant au contraire sur le Mont Moria est édifiée la Mosquée islamique d’Omar. Le 8 octobre 1990 Le Monde relatait la nouvelle selon laquelle parmi les quelques vingt mille fidèles juifs rassemblés pour la fête du Sukkot auprès du Mur des Lamentations ( 6) il y avait aussi les Fidèles du Temple, qui veulent construire le troisième Temple au centre de l’Esplanade des Mosquées. Quelques mètres plus haut s’étaient réunis également plusieurs milliers de musulmans qui, face à la tentative des Fidèles du Temple de pénétrer par la force dans l’Esplanade où il y a deux mille ans se dressait le Temple hébreu, réagirent en lançant des pierres: l’intervention de la police israélienne, qui tira sur la foule, fit des dizaines de victimes parmi les Arabes. LES FIDELES DU TEMPLE Mais qui sont les Fidèles du Temple? Il s’agit d’une secte religieuse juive d’extrême droite, dont la fin principale est la reconstruction du Temple sur le lieu où se dressait le Saint des Saints pour hâter la venue du Messie. Mais pour les Juifs orthodoxes le Temple descendra du ciel à la venue du Messie et ceux qui prétendraient le reconstruire avec des moyens humains commettraient une espèce de violence contre les plans de Dieu. Après la Guerre du Golfe Israël est plus fort que jamais, alors que les Palestiniens, désormais abandonnés par tous, sont contraints à demander la pax israélienne (7); les Fidèles du Temple, par ailleurs, sont toujours plus riches d’appuis politiques. EVENEMENTS APOCALYPTIQUES Du point de vue chrétien les sacrifices de l’Ancien Testament ont été remplacés par le Sacrifice de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur le Calvaire, qui est renouvelé sur les autels à la Sainte Messe, grâce au ministère des prêtres. C’est pourquoi il existe depuis deux mille ans un seul vrai Sacrifice agréé par Dieu: celui de la Messe Catholique. Les sacrifices des agneaux et des boucs étaient surtout une figure de la Sainte Messe et les célébrer aujourd’hui signifierait nier que Notre-Seigneur JésusChrist est l’Agneau de Dieu qui, par Sa mort, a pris sur Lui les péchés du monde. C’est pourquoi le désir exprimé par les “Fidèles du Temple” de répéter les rites de l’Ancien Testament exprime la volonté radicale de nier la valeur du Sacrifice rédempteur du Christ. Si ensuite ces sacrifices doi- 71 vent vraiment hâter la venue du Messie (qui est déjà venu), c’est que celui-ci sera l’AntiMessie, c’est-à-dire l’Antéchrist, châtiment aussi pour ceux qui refusant d’accueillir le vrai Messie devront être soumis, de gré ou de force, au joug de l’“homme d’iniquité”. Ben Gourion, nous informe Blondet, imagina l’identification du Temple reconstruit à Jérusalem avec le Gouvernement Mondial. “Pour le Catholicisme cette identification… fait allusion irrésistiblement au règne de l’Antéchrist” (8). Eezer Weizman, l’ex-ministre de la Défense israélienne, répondit à un journaliste qui l’interviewait, que “les juifs et Dieu sont une seule et unique chose”; mais, “quand on pense que les Juifs et Dieu sont une seule chose, combien de temps reste avant que s’accomplisse l’événement que St Paul attribue à l’Antéchrist, s’asseoir dans le Temple de Dieu, en se déclarant lui-même Dieu?” (9). VERS LE SACRILEGE Deux écoles talmudiques près du Mur des Lamentations enseignent à deux cents étudiants les détails complexes du service du Temple. D’autres groupes cherchent les lignes génétiques des prêtres judaïques, les seuls qui puissent exécuter les sacrifices. En bref, les préparatifs pour renouveler le sacrifice de l’Ancienne Alliance sont déjà en cours, comme si l’événement était imminent, et c’est le grand rabbin qui les guide; les “Fidèles du Temple”, donc, ne sont pas que quelques extrémistes isolés, quand déjà on entend parler d’identification génétique des prêtres de l’Ancienne Alliance, les seuls qui puissent offrir le rite. “Hélas – s’exclame Blondet – frères juifs… nous assistons avec une terrifiante compassion à votre course vers les extrêmes de votre destin” (10). St Grégoire le Grand en effet a affirmé que “ceux qui refuseront de croire au Rédempteur se donneront ensuite… à l’Antéchrist” (11). TEMOIGNAGES PROPHETIQHES La présence réelle de Dieu dans le “Saint des Saints” garantissait l’indestructibilité du Temple et de la ville de Jérusalem qui l’abritait. Si le peuple d’Israël avait respecté les pactes, aucune puissance humaine ne l’aurait détruit. Mais cette protection, ce pacte entre Dieu et son peuple était conditionné à sa fidélité à la Volonté de Dieu. Et ce pacte fut rompu non par Dieu mais par le peuple hébreu (“Deus non deserit nisi prius deseratur”). La destruction du Temple arrivée en 70, avec en conséquence la cessation de l’unique culte de l’Ancien Testament, est un signe non équivoque que Dieu a laissée déserte Sa maison puisqu’Il a justement été trahi par le peuple qu’Il avait élu. En conséquence Il n’est plus présent au milieu du peuple de Juda, puisque le Messie est déjà venu. Il est présent dans le monde entier, partout où un prêtre célèbre la Sainte Messe comme Jésus Lui-même l’a instituée. LES PIERRES CRIERONT Le Dimanche des Rameaux, aux pharisiens qui Lui disaient de faire taire les foules qui L’acclamaient comme Messie, Jésus répondait: “Je vous le déclare que si ceux-ci se taisent, les pierres crieront”. Cette scène se déroule devant le Temple pour symboliser que ce seront justement les pierres du Temple qui confirmeront que Jésus est vraiment le Messie, car en moins d’une génération le Temple sera détruit pour toujours. Cessera donc avec lui et pour toujours le culte de l’Ancienne Alliance, et ce sera pour les Juifs le signe par excellence que le Messie est déjà venu et que la Nouvelle et Eternelle Alliance est déjà en action. JULIEN L’APOSTAT En 362 l’empereur Julien fit appeler les chefs des Juifs et leur demanda comment il se L’Empereur Julien l’Apostat 72 faisait qu’ils n’accomplissaient pas les sacrifices prescrits par la Loi et ils répondirent qu’il ne leur était permis de sacrifier seulement dans le Temple de Jérusalem. Julien décida donc de reconstruire le Temple pour contredire les prophéties du Christ (12). Les Chrétiens soutenaient l’impossibilité de réédifier le Temple, dont la destruction avait été annoncée par le Christ comme signe éternel de la fin de l’Ancienne Alliance, alors que les Juifs voyaient désormais proche l’heure où ils auraient pu démentir le Christianisme. Mais, durant les travaux “un fort tremblement de terre fit écrouler les premières pierres des murs qui se bâtissaient; les Juifs qui dirigeaient les travaux se réfugièrent dans une construction auxiliaire… mais une seconde secousse les ensevelit dans l’écroulement; des croix rouges apparurent sur les vêtements de ceux qui avaient collaboré à la construction, un feu qui se dégageait du sous-sol brûla les outils de travail et les… pierres accumulées pour la construction” (13). CONCLUSION L’essai de Blondet, brièvement résumé ici dans ses lignes essentielles, peut nous aider à mieux comprendre comment le pacte passé entre le Vatican et l’Etat d’Israël, défini par L’Osservatore Romano (14) comme “imprégné de l’esprit du Concile”, est contradictoire à la Volonté du Christ et, par contre, préparatoire de ce “Nouvel Ordre Mondial” qui n’est rien d’autre, comme le démontre admirablement Blondet, que la prémisse du règne de l’Antéchrist (15). Notes 1) Cf. Sodalitium n° 42, pp. 70-73. 2) MAURIZIO BLONDET, I fanatici dell’Apocalisse, ed. Il Cerchio, Rimini 1992. 3) 70 après J-C. 4) Le livre se signale en outre, comme tous les ouvrages de l’auteur, par la richesse des informations concernant également l’actualité politique. Il me semble cependant qu’il ne fait pas la distinction due entre religion musulmane et Etat palestinien et voit ainsi dans la lutte entre Palestine et l’Etat d’Israël, une opposition entre Islam et Judaïsme qui en soi ne subsiste pas du point de vue théologique, mais qui n’a eu lieu que pour des contingences historico-politiques. 5) 34-37 avant J-C. 6) L’affirmation de Jean-Paul II: “Ce mur, demeuré au cours des siècles comme le reste de l’ancien Temple de Salomon, cesse d’être le mur des lamentations pour devenir un lieu de paix et de réconciliation pour les croyants au Dieu unique” (LA STAMPA, 3/2/1994, p. 8) ne peut pas ne pas éveiller la plus vive préoccupation. Ce mur en effet peut cesser d’être le mur des lamentations à la seule condition que soit reconstruit le troisième Temple de Jérusalem, et cela a été l’objet d’une longue conversation dans la soirée du 21 septembre 1993, entre un groupe de rabbins ultra-orthodoxes et Jean-Paul II à Castel Gandolfo (LA STAMPA, 2 février 1993, p. 7). 7) Le livre, édité en 92, se réfère à la situation politique du moment. 8) Op. cit., p. 74. 9) Ibidem, p. 83. 10) Ibidem, p. 103. LA RECONSTRUCTION DU TEMPLE DE JERUSALEM a contribution du mysticisme juif dans l’inspiration du futur de l’humanité”: c’est “L le thème d’un colloque qui se tient en Espagne sous l’égide de l’Institut d’études sur la Tradition Mythique. Colloque très important, où parleront Léon Poliakov, le juif russo-français qui a été un observateur influent derrière les coulisses du Concile Vatican II et Abraham Foxman, directeur de l’Anti-Defamation League. On y discutera, ni plus ni moins, de la reconstruction du troisième Temple à Jérusalem. Plus intéressant encore le mystérieux Institut d’Etudes sur la Tradition Mythique: cet organisme a été fondé par Lord Northampton (de la Loge Unie d’Angleterre) et par Giuliano Di Bernardo, qui préside la Grande Loge Régulière d’Italie, la seule reconnue par la maison-mère britannique après la scission de la Maçonnerie du pays qui a eu lieu en 93. Pour les francs-maçons qui le connaissent, l’intérêt de Di Bernardo pour les Etudes mythologiques est une surprise: en 1992 Di Bernardo publia sur Hiram (n° 1, 1992) un article sur René Guénon et la Maçonnerie, qui fut démoli par la Rivista di studi Tradizionali comme “absolument profane et superficiel”, et tel qu’il “abaisse la Maçonnerie au niveau d’un objet d’une science profane”. Parmi les accusations que ses confrères du Grand Orient ont soulevées contre Di Bernardo n’a pas manqué, du reste, celle de l’athéisme. Mais les nouveaux amis anglo-britanniques du professeur abruzzain ont des compétences moins mystiques et plus politiques. Léon Poliakov (le premier à accuser Pie XII de collusion avec le nazisme), est l’auteur d’une cinquantaine de volumes, parmi lesquels une Histoire de l’Antisémitisme, un livre sur Moscou et La Troisième Rome (1989) et une Histoire des Idées Racistes en Europe. En outre, depuis 1949, à l’invitation de Raymond Aron, Poliakov écrit régulièrement sur Commentaire, qui est la version française de Commentary, publication officielle de l’American Jewish Committee. Extrait de “L’Italia settimanale” n° 38, 28 septembre 1994, p. 53. 73 11) ST GREGOIRE LE GRAND, Commentarii in I Reg. II. 12) Ici émerge le lien étroit qui unit le Paganisme (et le Néopaganisme) avec le Judaïsme contre l’Eglise catholique. 13) BLONDET, op. cit., pp. 121-122. 14) L’Osservatore Romano, 1/1/1994, p. 1. 15) L’ouvrage de Blondet peut être complété par les chapitres XX-XXIII du livre Il a souffert sous Ponce Pilate de Vittorio Messori, éd. F.-X. de Guibert, Paris 1995. Abbé Curzio Nitoglia MAURIZIO BLONDET, I fanatici dell’Apocalisse, ed. Il Cerchio, Rimini 1992. UNE INSURRECTION CATHOLIQUE D éception. Voilà mon impression, après lecture des actes de l’“Université d’été” tenue au château de Couloutre et dédiée à la Ligue. Le titre (“une insurrection catholique”), dans le cadre d’une collection consacrée à la “politique chrétienne”, laissait croire qu’enfin la Ligue aurait eu gain de cause; les citations sur la dernière page de couverture, toutes favorables à la Ligue, du Père Lacordaire et de Louis de Bonald (qui pourtant n’appartiennent pas à notre école de pensée), ont fini de m’abuser... Hélas, la Ligue catholique qui, malgré ses excès de guerre civile, sauva la France (et vraisemblablement, avec elle, toute la chrétienté) du protestantisme, est encore incomprise par les “traditionalistes”. Et pourtant... c’est bel et bien la gloire de la France, de la meilleure partie de son clergé, de sa noblesse, de sa bourgeoisie et de son peuple, que cette Ligue par laquelle les Français du XVIème siècle mirent en pratique l’enseignement de l’Evangile: Cherchez d’abord le royaume de Dieu, et tout le reste vous sera donné par surcroît. C’est bien cet esprit qui anima les Parisiens lors du dernier, terrible siège de la ville, de six mois, “soldé par peut-être 50.000 morts de faim” (p. 37). Morts, pour que la France demeure catholique... Les conférenciers concèdent bien que la Ligue sauva leur pays du protestantisme, et garda le caractère catholique de la monarchie française, caractère que le sacre (et la promesse que les Rois y font d’exterminer les hérétiques) atteste. Mais c’est bien la seule concession qu’ils font à cette “insurrection catholique”. Pourquoi donc? A cause d’une fausse conception de l’origine du pouvoir politique. Même l’abbé Schaeffer, le maître du logis, qui, de tous, est visiblement le plus sympathisant pour les ligueurs, parle d’une “dérive démocratique de la Ligue” (p. 45). C’est ne rien comprendre à sa doctrine politique. Ses thèses (origine du pouvoir venant au Roi de Dieu mais par le canal du peuple, licéité d’une insurrection armée contre le tyran, catholicité de l’état et proscription des hérétiques, possibilité de l’élection d’un Roi, licéité de la déposition du Roi par le Pape) n’ont rien à voir avec les doctrines politiques des protestants de ce temps, ni avec les doctrines libérales et démocratiques issues de la Révolution... La Ligue n’était pas un mouvement “parfaitement révolutionnaire” (p. 47). Loin de là! Elle remettait en honneur la doctrine politique de St Thomas et des scolastiques mise à jour par les théologiens de la deuxième scolastique florissante alors en Espagne, de même que l’enseignement et la pratique des Papes et des Rois du Moyen Age, avant la naissance de l’absolutisme et du gallicanisme. St Robert Bellarmin et Suarez écrivaient à ce sujet contre la théorie du “droit divin du Roi” soutenue par Jacques Ier Stuart, “pape” protestant de l’“église” d’Angleterre, selon laquelle le Roi, désigné directement par Dieu, n’avait de comptes a rendre qu’à Lui, sans être limité en haut par le Pape et en bas par le “peuple” (c’est-à-dire par les libertés, franchises et privilèges traditionnels des corps sociaux du Moyen Age). Très justement, l’abbé Portail écrit: “(la Ligue) fait litière des prétentions gallicanes. En ce sens, elle est authentiquement dans le prolongement du concile de Trente et sa dissolution en 1594 est peut-être le symbole de l’impossible réalisation d’une réforme catholique intégrale en France” (p. 39). Jacques Clément, le meurtrier de Henri III. C’est l’image qu’on mettait sur les autels, avec la prière qu’on récitait pendant la messe 74 On accuse aussi la Ligue d’avoir négligé la “loi salique”, loi fondamentale du Royaume: “dans le cas où Henri de Navarre aurait persévéré dans son hérésie, la loi salique aurait suffi à interdire la désignation d’un autre successeur” (p. 47). Hugues Capet et ses premiers successeurs (tous élus à la royauté) auraient été bien étonnés d’apprendre l’absolue intengibilité de cette loi (qui assure, il faut l’avouer, la stabilité de la succession et du gouvernement), selon laquelle leur dynastie, de même que celle de Charlemagne, aurait été illégitime... Pour trancher sur la doctrine politique de la Ligue il ne faut pas recourir à des petites hérésies (tel que parler d’un “huitième sacrement”, p. 72) ou à des thèses gallicanes condamnées (en niant que le Pape puisse déposer des souverains): il faut revenir à la doctrine de St Thomas. C’est ce que Béatrice Decossas est censée faire dans son intervention (intéressante quand-même) sur le tyrannicide (pp. 22-28), où elle estime que “St Thomas pose le problème plus, d’ailleurs, qu’il ne le résout” (p. 22), pour continuer en affirmant que la théorie du pouvoir de la 2ème scolastique “est un enseignement erroné” (p. 27) et conclure que l’Eglise “n’est pas qualifiée à apprécier” la légitimité d’une résistance active (p. 28). On se demande si elle ne comprend pas St Thomas ou si elle ne veut pas le comprendre... Enfin, le bon Roi Henri IV, le vert galant... Dans un procès à François Ravaillac, trois avocats (maître Rocquain, maître Wagner et maître Remy) exaltent l’ancien chef des calvinistes et accablent le régicide Ravaillac (en réalité Remy aurait dû le défendre, mais à la place de Ravaillac nous aurions récusé un si tiède défenseur!). Entendons-nous, Ravaillac était coupable. Mais Henri IV n’a pas été le bon Roi que l’on prétend. Avec son avènement, le protestantisme devient, sous le gouvernement d’un hérétique relaps que ses prédecesseurs auraient mis au feu, officiellement reconnu; Sully, protestant, va gouverner avec Henri, et ses corréligionaires vont former un état dans l’état. C’en est fini, ainsi, de la chrétienté du Moyen Age; une nouvelle ère commence, où la Religion ne sera plus à la première place: la liberté religieuse, gage de paix pour la nation, est à l’horizon. Ravaillac avait assurément tort, mais il n’avait pas tous les torts (quant à Clément, son seul tort était qu’un clerc ne pouvait pas manier l’épée; pour le reste il a tout sauvé...). C’est curieux que la Fraternité Saint Pie X, si opposée à la liberté religieuse et si favo- rable à l’état catholique, exalte autant le Roi de l’édit de Nantes. Seul l’abbé Schaeffer l’attaque, lui qui, sans que son éditeur s’en rende compte (?) expose tout au long de sa conférence la Thèse de Cassiciacum (il suffit de mettre Jean-Paul II à la place d’Henri de Navarre...). Cher abbé Schaeffer: pourquoi donc, si vous embrassez encore la Thèse, êtes-vous “una cum” avec les “una cum”? Antoine Neyrot OUVRAGE COLLECTIF Une insurrection catholique. La Ligue (entre les protestants et les politiques). Clovis, 1997.      “TRADITIONALISME” D ans le dernier numéro de Sodalitium nous avons eu l’occasion de nous entretenir d’histoire du “traditionalisme”... Puisque j’aime l’histoire (n’est-elle pas maîtresse de vie, bien que sans disciples), je vais présenter d’autres ouvrages du même genre. Ce ne sont pas des nouveautés: les trois volumes dédiés à l’abbé de Nantes datent respectivement de 1988, 1993 et 1996; celui écrit par l’abbé Coache de 1993... mais on peut, encore aujourd’hui, profiter de ces lectures. De l’abbé de Nantes je n’aime pas le style (ça, c’est la moindre des choses), les idées politiques et philosophiques (c’est plus sérieux), la position sur la situation de l’Autorité dans l’Eglise (il nous traite de schismatiques et hérétiques), la (fausse) mystique (qui lui a causé tant d’ennuis). Toutefois, on ne peut pas oublier qu’il fut l’un des premiers et des plus courageux, à s’opposer aux erreurs de Vatican II: il suffit de relire ses écrits, reproduits dans le IIème volume, pour s’en rendre compte. Si le premier tome (L’annonce de l’orage) nous fait connaître les origines familiales, religieuses et politiques de l’abbé de Nantes (que l’on accusait de modernisme; il n’était certainement pas un catholique intégral) jusqu’à son départ forcé de la paroisse de Villemaur et sa fondation à Saint-Parres-lès-Vaudes, le deuxième (Dans l’œil du cyclone) contient le récit passionnant et l’examen attentif des événements et des textes du Concile; le troisième (Contre la dérive schismatique) illustre la position de l’abbé de Nantes sur la nouvelle Messe et sa cassure d’avec ceux qu’il appelle, avec mépris, 75 “les intégristes” (soit sedevacantistes, soit lefebvristes). Ce qui alourdit les trois tomes c’est le “culte de la personnalité” qui perce à travers chaque page des disciples de l’abbé. Ce qui retient notre attention, par contre, c’est surtout la position de l’abbé au sujet du problème du Pape. A son avis, Paul VI était schismatique, hérétique, apostat; mais on ne peut prouver qu’il le fut formellement (et en cela je suis d’accord, contre les “sedevacantistes”). Il faut donc tenir que Paul VI (et Jean-Paul II) est le Pape légitime: il faut donc lui obéir (parfois) sans se séparer des paroisses, sans ordonner des prêtres, sans confesser ou bénir des mariages si on est privé de juridiction, etc. (en cela je ne suis pas d’accord). Fonder des centres de Messes, voire un séminaire comme celui d’Ecône, c’est se mettre dans une voie sans autre issue que le schisme. Ce qu’il fallait faire, c’était dénoncer les hérésies de Paul VI à Paul VI, afin qu’il se juge lui même, ou qu’il soit déposé par les cardinaux. Il y a dans cette position du vrai et du faux; en tout cas, un juste intérêt pour la doctrine. L’abbé de Nantes, qui diminue l’infaillibilité du Pape et de l’Eglise (exagérée, à son avis, par les “intégristes”), trouve tout à fait normal que l’on puisse rencontrer des erreurs, voire des hérésies, dans le magistère authentique; voilà pourquoi il n’arrive pas à comprendre que Paul VI ne pouvait pas être Pape formellement. D’où son acceptation de la licéité de la nouvelle Messe: promulguée par le Pape elle ne peut pas être mauvaise (alors que, puisqu’elle est mauvaise, elle ne peut pas avoir été promulguée par un Pape légitime!). Il avait raison, par contre, quand il mettait en garde contre l’idée selon laquelle l’Eglise hiérarchique aurait sombré totalement: le “materialiter”, dans la Thèse de Cassiciacum, évite cette erreur (qui est une hérésie). Sa dénonciation de Paul VI pour hérésie, pour laquelle il fut sous procès au Saint-Office, était une voie à suivre, et il est dommage que Mgr Lefebvre, sollicité par l’abbé de Nantes pour “frapper à la tête” en dénonçant, en tant qu’Evêque, Paul VI, n’ait pas suivi ce bon conseil. Ces volumes, enfin, nous donnent beaucoup de renseignements sur les premiers adversaires de la réforme: le Père Saenz, le Père Guérard des Lauriers, le Père Barbara, l’abbé Coache, etc. C’était le temps où Mgr Lefebvre “était encore en ce moment en retrait” (Fideliter, n° 102, p. 69) et où il écrivait à l’abbé Coache, qui lui demandait son soutien, des lettres de ce genre (encore en 1972): “je ne puis rien faire de publique et de solennel dans un diocèse sans avoir le placet de l’évêque (...)” puisque “je dois m’étendre et avoir le Droit Pontifical...” pour la Fraternité, alors reconnue par Paul VI. En ces années-là, les chefs-de-file du “traditionalisme” étaient tous (Saenz, Coache, Barbara, Guérard des Lauriers) convaincus, depuis 1965 ou 1969, que Paul VI n’était pas un Pape légitime, sauf de Nantes, qui l’estimait quandmême un hérétique à déposer... Ce n’est qu’en 1975-76 que la Fraternité St Pie X va tout prendre en main et balayer ceux qui s’opposent, ou les réduire au silence (comme c’est le cas de l’abbé Coache, qui, lui, suivit Mgr Lefebvre), en imposant la soumission (apparente) à Paul VI et Jean-Paul II et celle (bien réelle), à Ecône. Un exemple typique: les pèlerinages à Rome de Pentecôte inaugurés par l’abbé Coache en 1970, dirigés par le P. Barbara en 1971 et 1973, organisés à Rome par Mme Gerstner et M. Franco Antico, unissant sur la Place Saint-Pierre français, italiens, mexicains, américains... enfin, des catholiques du monde entier (cf. Coache, pp. 193-220). La fin de ces merveilleux pèlerinages vraiment catholiques (c’est-à-dire ouverts aux fidèles du monde entier, dans la capitale du monde chrétien) furent sabotés en 1972 par Jean Madiran (pp. 203-204) et en 1975 par... Mgr Lefebvre: “... en 1975 il n’y eut pas de Marche romaine. Elle avait été prévue, nous avions commencé à l’organiser lorsque le mouvement traditionaliste CREDO, avec Michel de Saint Pierre, annonça la mise en œuvre d’un grand Pèlerinage à Rome pour cette année 1975, et sous la présidence de son Exc. Monseigneur Marcel Lefebvre; nous ne pouvions que nous effacer et céder la place” (p. 210): scénario qui se répéta combien de fois par la suite, avec SaintNicolas-du-Chardonnet (prise sous la direction de l’abbé Coache et avec la condamnation d’Ecône, pp. 223-224), Flavigny, etc. Et après 1975, Rome ne vit plus ces pèlerins qui dérangeaient tellement... Malheureusement, l’abbé Coache s’effaça jusqu’au bout, acceptant le protocole du 5 mai comme les sacres... on devait désobéir à Rome, mais on ne pouvait désobéir à Ecône... Quel gâchis! Abbé Francesco Ricossa Pour l’Eglise. Quarante ans de ContreRéforme Catholique (1948-1988) * Tome I 1948-1963 L’annonce de l’orage par Frère Michel de la Sainte Trinité des 76 Petits Frères du Sacré-Cœur, Renaissance catholique Contre-Réforme Catholique 10260 Saint-Parres-Lès-Vaudes 1988. * Tome II 1963-1969 Dans l’œil du cyclone Frère François de Marie des Anges, éditions de la Contre-Réforme Catholique 1993. * Tome III (1969-1978). Contre la dérive schismatique Frère François de Marie des Anges, Editions de la Contre-Réforme Catholique 1996. ABBÉ LOUIS COACHE, Les batailles du Combat de la Foi, éditions de Chiré, 1993.   NOUS SIGNALONS AUX LECTEURS CERTAINS LIVRES QUE NOUS AVONS REÇUS À LA RÉDACTION: N ous signalons à nos lecteurs une petite plaquette de grande importance: la “Réponse aux évêques ‘repentants’” de Vincent Reynouard. Les “évêques” en question sont ceux qui ont signé la fameuse “déclaration de repentance” du 30 septembre 1997. La brochure que nous vous conseillons, publie un “document qui prouve que le clergé a eu raison de se taire face aux statuts des juifs promulgués sous Vichy”. Il s’agit d’un document d’un extrême intérêt (bien que pas inédit): la lettre que l’ambassadeur de France auprès du Vatican, Léon Bérard, envoya au Maréchal Pétain le 2 septembre 1941. Le gouvernement français avait prié son ambassadeur de demander au Vatican si, et en quels points, les lois sur les Juifs promulguées en France en 1940 et 1941 allaient à l’encontre de la doctrine catholique. La réponse de l’ambassadeur montre en quoi les lois françaises (et les lois raciales du gouvernement italien) s’opposaient au Magistère ecclésiastique, et en quoi elles y étaient conformes: tout y est dit, avec une grande clarté. En annexe, la déclaration épiscopale de 1997, un article de Henri Labroue (moins exact doctrinalement) et le chapitre IV (L’origine juive des persécutions antichrétiennes) du livre de Flavien Brenier Les Juifs et le Talmud, de 1913. Vincent Reynouard Réponse aux évêques “repentants” Publications de l’ANEC (B.P. 21, F- 44530 Saint-Gildas-des-Bois. Tél.: 02 40 91 80 04), janvier 1998, diffusion hors commerce. * CLAUDE BARTHE. Trouvera-t-Il encore la Foi sur la terre? Une crise de l’Eglise: histoire et questions, F.X. de Guibert, Paris 1996. Nous avons déjà signalé ce livre, en promettant d’en publier une recension. Nous maintenons la promesse. Comme Chiron, qui a réussi à trouver un éditeur progressiste, de la même manière Barthe essaye, depuis quelques temps, de faire sortir la culture “traditionaliste” du “ghetto” dans lequel elle est enfermée et s’enferme. L’intention est plus que louable et l’entreprise n’est pas facile. C’est plus difficile pour Barthe, prêtre et “sedevacantiste” que pour Chiron, laïc et “lefebvriste”. L’abbé Barthe a réussi ici avant tout à éviter consciencieusement le style fantaisiste, exagéré, peu scientifique et peu sérieux de nombreuses publications “traditionalistes”, qu’elles soient “sedevacantistes” ou non et qui finissent par être dommageables à la cause qu’elles prétendent servir. Cependant, l’abbé Barthe, à notre avis, a exagéré. Tant est si bien que le lecteur qui ne le connaît pas ne peut pas comprendre en lisant le livre que l’Auteur est prêtre (et “sedevacantiste”), d’autant plus du fait de la présentation assez floue et ambiguë du problème. Le but est probablement celui de faire “passer” ou au moins de faire connaître certaines de nos critiques de Vatican II dans le milieu conciliaire (cf. la recension du livre publiée sur Famille chrétienne, n° 1006, 24 avril 1997, p. 54), mais il en résulte un affaiblissement de la position extrêmement préoccupante non seulement pour les conclusions à déduire sur la situation de Jean-Paul II (il n’y en a aucune trace) mais aussi sur le diagnostic du mal, extrêmement bénin, malgré le titre du livre. L’argumentation de l’abbé Barthe se développe en deux temps: d’abord il analyse la “crise de l’Eglise” d’un point de vue historique, et ensuite d’un point de vue doctrinal. L’analyse historique de la “crise” est, à notre avis, limitée et défectueuse. La genèse de la crise de l’Eglise est trop liée à la crise institutionnelle en France, pour avoir cette largeur de vues qu’elle mérite au contraire. Les critiques aux présumées “ambiguïtés” de l’“Eglise du Syllabus” (adressées à Grégoire XVI, Léon XIII, Pie XI, etc.) sont non seulement inacceptables, mais contribuent même à diminuer les responsabilités des “papes” conciliaires. A tort l’abbé Barthe se réfère à la tradition des catholiques intégraux (pp. 67-70) pour justifier ces critiques “de droite” aux 77 Papes susnommés, au moins en ce qui concerne l’élément le plus important de l’intégrisme, c’est-à-dire le fondateur du Sodalitium pianum, Mgr Benigni. Emile Poulat, un historien que Barthe aime justement citer, a montré avec pertinence comment beaucoup d’“intégristes” (Benigni, le cardinal Vivès y Tutò, etc.) furent de proches disciples de la ligne de Léon XIII qui était continuée par Saint Pie X, au contraire des autres (comme l’abbé Barbier). De la même manière, Poulat montre la distance et la froideur du Sodalitium pianum pour l’Action Française [nous sommes sous Saint Pie X]; c’est pourquoi les ecclésiatiques qui la soutenaient, comme le cardinal Billot lui-même, n’étaient pas, à proprement parler, des “catholiques intégraux”. Substantiellement exacte, argumentée et intéressante, la présentation historique du Concile (ch. VII) et de sa préparation (ch. VI). Beaucoup plus discutable, l’examen doctrinal de Vatican II (ch. IX). Pour Barthe, les “conservateurs”, aveuglés par un excès de “papalisation” (p. 119) s’opposèrent vaillament à Lumen gentium, en oubliant les trois textes qui constituent “l’esprit du concile”: Unitatis redintegratio [dont les erreurs se trouvent déjà dans Lumen gentium!], Nostra ætate et Dignitatis humanæ. Cependant, même dans ce chapitre, on est surpris par la modération des critiques: de Nostra ætate, par exemple, on laisse passer le n. 4 sur le judaïsme, pour s’arrêter sur le n. 2 § 2. Total désaccord, ensuite, sur le ch. X, dédié au Magistère. L’auteur a, sur l’infaillibilité du Magistère en général, et sur celle présumée de Vatican II en particulier, la même position que la Fraternité Saint Pie X (bien qu’il sache mieux la défendre). Le summum de la confusion (dans la tête de l’auteur) est exprimé p. 147. Certes, on peut parler d’un “état de démission” du “pape” et des “évêques”, quant au gouvernement et au magistère, comme fait constamment Barthe, même si nous préférions l’expliquer différemment. Les derniers chapitres, qui traitent de l’après-concile jusqu’à aujourd’hui, montrent comment on a essayé en vain de sortir de cet “état de démission” de la “hiérarchie”, et comment ladite “hiérarchie” n’y a pas réussi même quand elle a essayé de le faire. Le livre se termine en espérant la solution de cette impasse, solution certaine, eu égard aux promesses divines, et solution qui peut venir seulement de l’Eglise, c’est-à-dire du “pape” et des “évêques” (ou, selon notre position, de la “hiérarchie” materialiter). En cela, nous sommes d’accord avec l’auteur, qui par son livre (et avec le suivant, Reconstruire la liturgie) entend faciliter cette issue. Mais si l’objectif est bon et digne d’approbation, il nous semble de notre devoir de repousser le moyen utilisé: inventer des erreurs dans l’“Eglise du Syllabus”, diminuer les erreurs de l’“Eglise du Concile”, présenter un Concile réformable puisque, de droit, non infaillible, avancer - masqués - dans les milieux conciliaires... Veritas liberabit vos, non mendacium! D’autres ouvrages parus en italien sont recensés dans l’édition italienne de Sodalitium; les lecteurs intéressés peuvent se la procurer en nous écrivant. Etude sur la FrancMaçonnerie américaine “U ne remarquable étude”: tel est le jugement d’un expert, Léon de Poncins (in Christianisme et F.·. M.·.) sur le livre d’Arthur Preuss, Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine, qui est réédité par le Centro Librario Sodalitium. L’auteur Arthur Preuss naquit à Saint Louis (Missouri, Etats-Unis) le 22 mars 1871 d’Edward et Concordia Schuricht. Il fut un écrivain, journaliste et éditeur catholique. Après avoir étudié au Canisius College de Buffalo (New York), Preuss débuta sa carrière journalistique et littéraire en collaborant avec son père au Saint Louis Daily America (1890-1892). En 1893 il fonda la Chicago Review, qui devint The Review (1894) et enfin The Catholic Fortnightly Review (à partir de 1905). Comme éditeur, Preuss diffusa surtout aux Etats-Unis des textes de théologie dogmatique et morale. Comme auteur, il publia The Fundamental Fallacy of Socialism (1907), A Study in American Freemasonry (1908) et Dictionary of Secret and Other Societies (1924). L’auteur se situe dans le courant de pensée qui peut être défini comme “catholique intégral”. D’après certains, Arthur Preuss appartint au célèbre Sodalitium Pianum (plus connu en France sous le nom de 78 Sapinière), fondé par Mgr Umberto Benigni (1862 -1934) et encouragé par Saint Pie X en personne, qui s’en servait dans la lutte contre le modernisme. Ce qui est certain, c’est que Preuss et Benigni étaient en relation étroite (cf. E. Poulat, Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman, 1969, p. 69). Les deux champions du catholicisme intégral moururent tous les deux en 1934: Mgr Benigni le 27 février, à Rome; Arthur Preuss, le 16 décembre à Saint Louis. Preuss fut aussi en rapport avec Mgr Ernest Jouin (1844-1932), fondateur et directeur de la R.I.S.S. (Revue Internationale des Sociétés Secrètes), la plus importante et la plus documentée revue catholique sur la “judéo-maçonnerie” (pour utiliser un vocable forgé par Mgr Jouin) et sur l’occultisme, qui fut publiée entre 1912 et 1939. L’œuvre de la R.I.S.S., approuvée par Benoît XV dès 1918, ne s’identifie pas avec celle du catholicisme intégral (qui se termine avec la fin du pontificat de Saint Pie X); cependant les principaux représentants du Sodalitium Pianum, Mgr Benigni et l’abbé Boulin, collaborèrent à cette revue. Ce fut précisément la R.I.S.S. de Mgr Jouin qui traduisit en français et diffusa auprès de ses lecteurs l’ouvrage de Preuss qui eut le plus de succès, connaissant cinq éditions (la dernière parut en 1924), c’est-à-dire Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine, que nous présentons ici en copie anastatique. L’Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine Par comparaison avec les obédiences maçonniques d’autres pays, la Maçonnerie des EtatsUnis est certainement peu connue. Beaucoup la considèrent comme inoffensive et absolument pas hostile à l’Eglise, et se demandent même si elle peut être considérée comme une Société Secrète, étant donné que dans les pays anglosaxons, et spécialement aux Etats-Unis, la Maçonnerie est une institution très visible et, apparemment, sans rien de mystérieux. Qui plus est, la Maçonnerie semble se confondre avec la plus grande démocratie du monde: “notre démocratie américaine - écrit Harry L. Baum en 1950 sur la revue maçonnique New Age - avec son insistance sur les droits et libertés inaliénables de l’individu, est la maçonnerie au gouvernement”. Conscient combien cette mentalité était répandue même de son temps, Preuss, dans son Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine veut démontrer que la Maçonnerie, malgré ses divisions en de nombreuses obé- diences souvent rivales, est une dans sa doctrine et dans ses buts, et que c’est la raison pour laquelle il n’y a pas une différence essentielle entre la Maçonnerie américaine et la Maçonnerie européenne (ch. XVIII). La Maçonnerie est en effet une religion (ch. V) inconciliable avec la religion chrétienne (ch. XII). La Maçonnerie anglo-saxonne se vante d’imposer à ses adeptes la croyance en Dieu; Preuss démontre que le “dieu” de la Maçonnerie, le Grand Architecte de l’Univers, est en réalité le Jéhovah de la Cabale (ch. IX). La force du livre de Preuss consiste dans le fait qu’il se fonde exclusivement sur des sources maçonniques, telles que Pike et Mackey, qui aujourd’hui encore font autorité dans les loges américaines. Pourquoi réimprimer le livre de Preuss ? Le lecteur de la fin du XXème siècle se demandera sans doute si cela vaut la peine de réimprimer un ouvrage du début du siècle: n’a-t-il peut-être pas perdu de son actualité? Nous pensons, au contraire, que le livre de Preuss est bien plus actuel en 1998 qu’en 1908, quand il fut imprimé pour la première fois. Depuis, les Etats-Unis (qui, rappelons-le, sont la “Maçonnerie au gouvernement”) ont gagné deux guerres mondiales et, après 1989, avec l’écroulement de l’Union Soviétique, sont devenus la seule grande puissance mondiale. L’Amérique gouverne le monde. Mais, pour employer une expression de Henri Coston, qui gouverne l’Amérique? C’est alors que le livre de Preuss devient indispensable pour connaître et comprendre la religion maçonnique qui informe de sa propre pensée les institutions et les principes des Etats-Unis. Un autre motif nous a ensuite poussés à publier l’étude fondamentale de Preuss sur la Maçonnerie américaine. Le libéralisme est sans doute l’expression exotérique et politique de la Maçonnerie anglo-saxonne. La statue de la Liberté, qui accueille le visiteur à son entrée aux Etats-Unis, rappelle à tous le “culte de la Liberté” qui est en vigueur dans ce pays: liberté de pensée, de conscience, de religion... Cette mentalité a fini par influencer, inévitablement, même une bonne partie des catholiques de ce pays; déjà en 1899 Léon XIII condamna, dans l’encyclique Testem benevolentiæ, l’américanisme. Pourtant cette mesure ne fut pas suffisante, puisque nous devons à un religieux américain, le Père John Courtney Murrey, l’élaboration de la doctrine sur la li- 79 berté religieuse, définie par le Concile Vatican II dans la déclaration Dignitatis humanæ. Il est donc étonnant que des catholiques qui se définissent comme “contre-révolutionnaires” n’hésitent pas, au cours de ces dernières années, à promouvoir l’école catholicolibérale ou néoconservatrice américaine (qui compte des penseurs tels que Kirk, Novak, Neuhaus) comme un modèle de pensée pour les catholiques contre-révolutionnaires. Selon cette école il y aurait une distinction essentielle entre les révolutions communiste et jacobine d’un côté, et les révolutions libérales de 1688 (en Angleterre) et de 1776 (aux EtatsUnis). Le passage idéologique du catholicisme contre-révolutionnaire et antilibéral à la pensée libérale anglo-saxonne s’accomplit en passant de de Maistre à Edmund Burke, tous deux critiques de la Révolution française, mais tous deux passés par les loges... De Burke à la pensée libérale-conservatrice anglo-saxonne il n’y a qu’un pas, qui n’est même plus à faire. On sera surpris, alors, de voir loués en même temps le Moyen Age et Ronald Reagan, Saint Thomas et Locke, la défense de la tradition, de la famille et de la propriété, et celle de la liberté religieuse et du libéralisme économique. Enfin, les inquiétants contacts entre certains de ces catholiques “contre-révolutionnaires” et des représentants de la Maçonnerie de “droite” ne font pas non plus défaut. L’ouvrage d’Arthur Preuss, qui souligne comment la différence indéniable qui existe entre la Maçonnerie anglo-saxonne et la Maçonnerie latine n’est qu’accidentelle et non pas substantielle, est donc extrêmement actuel pour mettre en garde, aujourd’hui comme hier, contre les infiltrations maçonniques dans l’Eglise et dans les milieux catholiques, même les plus proches de la défense de la tradition. ARTHUR PREUSS Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine Centro Librario Sodalitium Vie de l’Institut Verrua Savoia 1998, (330 p) 120 F A commander à notre rédaction. rgentine. Le nouveau prêtre, l’abbé Carlos Ercoli, est retourné dans sa patrie, l’Argentine, au cour d’un voyage du 1er au 17 décembre, accompagné (dans une partie du séjour) par l’abbé Ricossa. L’abbé Carlos a eu la joie de revoir sa famille après de longues années d’éloignement, et de célébrer en terre argentine sa première messe solennelle. Nous rappelons en particulier la première messe chantée célébrée au séminaire N-D de Guadalupe de la Compagnie de Jésus et de Marie à Carlos Keen (près de Lujan), avec la très belle homélie du prêtre assistant, le P. Andres Morello, le jour de l’Immaculée Conception (l’abbé Carlos a aussi donné les premières communions), et la messe solennelle célébrée dans l’ancienne église dominicaine de Molinari (Cordoba) le 12 décembre (fête de N-D de Guadalupe), où l’abbé était l’hôte des Pères Espina et Jurado. Durant le voyage l’abbé Ercoli et l’abbé Ricossa ont rencontré aussi d’autres prêtres argentins et de nombreux fidèles, dans l’intention de préparer le futur apostolat de l’Institut dans cette grande nation, A déjà représenté, à Cordoba, par Mme le Docteur Virginia Bonelli. Un autre désir serait celui de réaliser une édition en espagnol de Sodalitium: qui se sent capable de collaborer? Enfin, un vif remerciement à tous ceux qui nous ont accueillis et hébergés; nous les recommandons tous dans nos prières. Belgique. Le jour de Saint Etienne, l’abbé Geert Stuyver a quitté Verrua Savoia pour rejoindre Dendermonde (Belgique). Grâce à lui, l’Institut Mater Boni Consilii commence son apostolat dans un autre pays européen, après l’Italie et la France. Pour le moment, l’abbé Stuyver célèbre deux messes dominicales à Dendermonde, en attendant de pouvoir acquérir un local plus grand qui lui serve à la fois de résidence et de lieu de culte. Sodalitium remercie l’abbé Medina, qui a assuré la célébration de la Sainte Messe dans les Flandres après la mort de l’abbé Valéry Stuyver (oncle de l’abbé Geert), et Mlle Germaine Veldeman, qui après avoir été tant d’années au service de l’oncle, s’est mise maintenant à la disposition du neveu. Durant les vacances de Noël l’abbé Ercoli s’est rendu aussi en Belgique; à l’invitation de l’abbé Medina, il a célébré la Sainte Mes- L’abbé Carlos Ercoli donnant la bénédiction au P. Morello après la Sainte Messe se à Drogenbos (Bruxelles), et le 4 janvier il a chanté la Messe solennelle dans la paroisse de Steffeshausen, assisté de M. le Curé Schoonbroodt (diacre) et de l’abbé Stuyver (sous-diacre). Italie. Naturellement, le pays où notre apostolat est le plus intense est l’Italie. A Turin, le nombre des participants aux deux messes dominicales augmente. L’abbé Giugni a repris les célébrations dans la région de Trente et à Milan, avec des résultats prometteurs. A Ferrare, après avoir complété l’aménagement de la chapelle de la via Ripagrande (dédiée à Saint Pierre Martyre), s’est présentée une occasion à laquelle nous n’avons pas su résister: l’achat de la première église de l’Institut. En vérité l’église (dédiée à Saint Louis) est une petite église, et n’est pas située en ville (bien que ce soit sur la commune de Ferrare) mais à la campagne... Cependant on a pensé que pour la dignité des cérémonies il valait la peine de faire ce pas. La chapelle, qui avait appartenue à la famille Zanardi-Prosperi, a été achetée le 30 mars, mais pour pouvoir la restituer au culte des travaux de restructuration qui ne peuvent être différés sont nécessaires. En attendant, les cérémonies continuent via Ripagrande, à Ferrare. Exercices Spirituels. Les dates pour les exercices de cet été, qui seront prêchés en français, italien et flamand ont déjà été fixées! Il ne reste qu’à vous y inscrire! Toutefois, il y a eu un tournant positif: organiser une session d’exercices en dehors de la période estivale. Nous y avons réussi avec une session pour les hommes prêchée en français à Verrua Savoia, et qui s’est terminée à la fin de l’année (1997, bien entendu). Maintenant nous en envisageons une en italien pour le mois de mai. La ferons-nous? Fai- tes-nous connaître d’une façon ou d’une autre, votre disponibilité pour de telles initiatives. Conférences. Le 19 décembre dernier, l’abbé Ricossa a tenu une conférence à Ferrare avec le député Alberto Lembo (Ligue du nord) sur le thème: Les états préunitaires et le processus d’unification italienne. Le livre d’Israël Shahak, Histoire juive et judaïsme. Le poids de trois millénaires, a été présenté au public par l’abbé Nitoglia dans plusieurs localités italiennes. Grande participation de public à la présentation du livre qui eut lieu à Rome, le 8 février, à la Residenza di Ripetta. Le journaliste, historien et éditeur Pierangelo Maurizio en était le rapporteur, tandis que l’abbé Curzio Nitoglia, le Père Ignazio Mancini OFM, Gardien émérite de Terre Sainte, et le Général Ambrogio Viviani y ont pris la parole. La relation de l’écrivain Piero Buscaroli, absent pour raisons de santé, a été lue par sa fille. Etait absent aussi l’auteur, Israël Shahak, de l’Université de Jérusalem, qui a envoyé ses salutations aux congressistes. La manifestation très réussie a été organisée par l’association Amici di Sodalitium de Rome. Nous comptons publier prochainement les actes du congrès. L’abbé Nitoglia, toujours, a présenté le livre à Gênes le 17 décembre et à Legnano le 25 février. Le 17 janvier, à Rome, à l’A.S.I., s’est tenue une conférence sur le thème: Le paradigme évolutionniste entre science et foi. Les rapporteurs ont été le Professeur Giuseppe Sermonti, titulaire de génétique à l’Université de Pérouse et directeur de la Revue de Biologie, et l’abbé Ricossa. Ce dernier a aussi parlé sur le thème: De Romolo Murri à Romano Prodi, l’aventure des catholiques progressistes. L’orateur a été présenté par Luigi Berselli, de l’association organisatrice (Uniti per l’alternativa) dans la salle communale de San Pietro in Casale (Bologne), samedi 21 mars. Ils parlent de nous. L’Institut Mater Boni Consilii présente ses vœux aux Sœurs du Christ-Roi pour les vœux simples de Sœur Marie-Hélène et les vœux perpétuels de Sœur Anne-Myriam. Simple Lettre (n° 108, janv.-fév. 1998) fait le récit de la belle cérémonie en signalant la présence aux côtés du Père-fondateur, le R.P. Vinson, de M. l’abbé Giugni de l’Institut Mater Boni Consilii. La diffusion du livre d’Israël Shahak, Histoire juive et judaïsme, le poids de trois millénaires a eu un grand succès. Des lettres d’appréciation ou d’intérêt pour le livre ont 81 été écrites par le Président de la République, Oscar Luigi Scalfaro, par le Cardinal archevêque de Turin, Giovanni Saldarini, par le sénateur Giulio Andreotti, par l’ambassadeur Sergio Romano; malgré cela, la grande presse a refusé toute recension, même quand des collaborateurs habituels l’avaient proposée pour être publiée. Des recensions du livre n’ont été publiées que sur Il Paese de Lugano (30 janvier 1998, p. 2) sous la signature de Paolo Pittaluga et sur Orion (n° 159, décembre 1997, pp. 30-36) sous la signature de Giovanni Landini et avec une présentation de Paolo Poggi; “Paolo Poggi” est revenu sur Sodalitium dans un article antichrétien publié toujours sur Orion (n° 161, février 1998, pp. 38-39 et 42). L’abbé Nitoglia le remercie pour les compliments sur son courage. Mais pourquoi accuser de “judéocentrisme” (c’est-à-dire croire que le peuple juif a un rôle tout à fait spécial dans l’histoire)? Poggi aussi, à sa façon, est “judéo-centriste”, puisqu’il n’écrit pas un seul article sans traiter du sujet (un motif de plus pour le lire avec attention). Que nous sachions, Poggi n’écrit pas autant sur les esquimaux. Le problème, donc, existe. Et restera substantiellement incompréhensible à ceux qui, comme Poggi, savent le voir seulement avec des yeux séculiers et profanes, du bas, et non, comme il se doit, du haut. Pour ce faire, donc, il faut la foi, cette foi que, hélas, Poggi (et tant d’autres comme lui) n’a pas (plus). Le livre de Shahak a été aussi signalé par l’agence d’informations Dejpress (n° 3, février 1998) d’Avellino, sur le quotidien La Padania (14 février, lettre de M. Alessandro Bertotto) et, d’après ce qui nous a été rapporté, sur l’hebdomadaire Il Borghese avec une recension de Maurizio Cabona. Le livre d’Emmanuel Ratier, Mystères et secrets du B’naï B’rith a été recensé par Marco Della Valle sur la revue Heliodromos (n° 12, hiver 1998, pp. 69-73) de Catane, et signalé par Pietro Golia dans sa préface à l’ouvrage de Luca Ferrari, Bassolino & la nuova camorra (ed. Controcorrente, Napoli). Controrivoluzione de Borgo san Lorenzo (n° 50-53, juin-janvier 1997) relate l’information de la conférence de présentation du même livre, tenue le 24 mai dernier à Ferrare, et en recommande à nouveau la lecture (p. 79). Nous remercions ensuite particulièrement le directeur de Controrivoluzione pour avoir inséré, dans la liste des endroits où l’on peut assister à la Sainte Messe “en rite romain an- cien” (pour reprendre son expression) également ceux desservis par notre Institut (p. 54). Faits & Documents (n° 42, 15-28 février 1998, p. 10) présente aux lecteurs le n° 45 de l’édition française de Sodalitium, défini comme “passionnante revue antisioniste catholique”, et fait connaître l’activité d’édition de notre Centro librario. Chiesa viva (n° 292, février 1998, pp. 12-15) a anticipé pour ses lecteurs l’article de l’abbé Nitoglia sur Un grand initié: René Guénon. Une longue et élogieuse présentation de l’Institut et de Sodalitium, intitulée Un ‘sodalitium’ contre le modernisme, est apparue sur Il Conservatore (n° 8, juillet-novembre 1997, p. 1), un périodique de Bologne (C.P. 297). La manifestation de Trente pour rétablir le culte de Saint Simon a été rappelée par l’historien Yves Chiron dans son dernier livre Enquête sur les canonisations (éd. Librairie Académique Perrin, 1998). De la p. 267 à la p. 274, l’auteur, dans le cadre du chapitre Les causes difficiles, reparcourt les vicissitudes du culte de Saint Simon et trace une histoire de l’“homicide rituel”, rappelant en note aussi l’article de Sodalitium par l’abbé Nitoglia publié en son temps sur la question. Nous avons reçu deux numéros de la nouvelle revue de Giovanni Perez, Carattere août-novembre 1996 et mai 1997 (probablement il n’en est pas paru d’autres). Dans le premier (p. 23) on fait référence à l’article de l’abbé Nitoglia Julius Evola, homme traditionnel ou cabaliste? publié sur le n° 41 de Sodalitium. Carattere promet de revenir sur cet article. Nous attendons donc de lire les observations de la revue véronaise que nous prévoyons critiques, étant donnée la ligne favorable à Mordini et Evola qui transparaît des articles publiés jusqu’à présent. La revue turinoise Inter multiplices una vox, au contraire, recense le n° 45 (éd. ital.) de Sodalitium; parmi les articles qui ont le moins plu, ceux de l’abbé Nitoglia sur la L’église achetée à Ferrare 82 question juive et ceux de l’abbé Murro sur le Magistère (parfois l’importance d’un article se voit plus par les critiques que par les approbations qu’il est capable de susciter). L’ultima Crociata (n° 7, sept. 1997, pp. 4-5) fait un compte rendu de la commémoration faite par l’abbé Ricossa à Turin et Rovegno des victimes de la violence des maquisards dont nous avons parlé dans le dernier numéro de la revue. Rivarol (n° 2373 du 13 février 1998, p. 8) de Paris, dans un article de Max P. Morf (Suisse: la dérive des Eglises), mentionne l’Institut Mater Boni Consilii et la revue Sodalitium, “qui dénonce le complot des forces obscures”. Une sympathique mention de Sodalitium de la part du Professeur Giuseppe Patanè a été publiée par le bulletin suisse Courrier du Continent (n° 397, mars 1998, p. 7): “Sodalitium” conclut le critique, “est une revue jeune, libre, courageuse, traditionnelle, qui brise bien des idées reçues. A lire”. Lo Stato (n° 14, du 7/4/98, pp. 12-15) consacre au petit monde “traditionaliste” une enquête de Fabio Torriero (Tradizionalisti: tanti gruppi, pochi adepti). Entre autres (et même en première ligne) on signale la revue Sodalitium. Malheureusement, avec des imprécisions qui nous ont obligés à écrire une lettre pour clarifier notre position. Ils parlent mal de nous. Le mensuel de la communauté israélite romaine, Shalom, s’occupe à nouveau de nous, dans son n° 2/1998, à propos de l’édition italienne du livre d’Israël Shahak et de sa présentation qui a eu lieu, comme cela est relaté dans cette même rubrique, le 8 février à Rome. Un évident embarras face à la figure du Professeur Shahak: “juif polonais, émigré en Israël, ex-enseignant de chimie à l’Université de Jérusalem” dont on ne peut nier la “stature culturelle”, transpire à travers l’écrit de Karen Hassan. L’auteur, donc, évite de venir au cœur de la question des thèses du livre (affirmant seulement que “il collectionne une série de citations extrapolées du contexte” admettant implicitement que pas une seule de ces citations n’est fausse) pour faire dévier le discours sur l’éditeur, c’est-àdire le Centro Librario Sodalitium, “une organisation qui gravite autour de la célèbre revue Sodalitium de type lefebvriste [sic] et ouvertement antisémite [sic] (férocement opposée à la politique de détente et d’ouverture que JeanPaul II réalise à l’égard des juifs) en permettant de cette manière que ses propres opinions soient exploitées par ceux qui, plus que Shahak et pour de bien plus graves motifs, sont claire- ment hostiles aux juifs. (...) Nous nous demandons si [Shahak] était conscient du choix accompli”. Comme l’abbé Nitoglia l’a fait remarquer dans une lettre à Shalom, les accusations de Hassan au Professeur Shahak sont injustes et un peu hypocrites. Le manuscrit de Shahak se trouvait, en effet, depuis de longues années dans les tiroirs d’une importante maison d’édition, La Nuova Italia, qui n’osait pas le publier pour des motifs facilement imaginables. Les mêmes motifs pour lesquels, publié finalement par notre toute petite maison d’édition, les grands quotidiens nationaux n’osent pas le recenser. Si Hassan tient tant à ce que des livres comme ceux de Shahak ne soient pas publiés par les “antisémites”, pourquoi une maison d’édition juive ne s’est-elle pas occupée de le publier? Quant au Professeur Shahak, il savait parfaitement quelles étaient les positions de notre maison d’édition, et malgré tout, a voulu nous confier l’édition italienne de son livre, plutôt qu’à une autre maison d’édition laïque: preuve de l’ouverture d’esprit de l’auteur. Notre maison d’édition, d’autre part, n’a pas censuré une seule ligne du livre, ni même dans ses parties inconciliables avec la foi catholique ou opposées à nos opinions: signe d’une très grande correction de notre part, très éloignée de la duplicité que suppose l’auteur de la recension. Lequel, ensuite, décrit comme “intolérant” le climat du colloque à Residenza di Ripetta: “sans l’invitation, en effet, on ne pouvait pas accéder à la salle”... Comment, alors, le critique de Shalom a-t-il pu accéder à la salle? Les lecteurs de Shalom, par la recension de Hassan, ne peuvent certainement pas se faire une idée des positions “d’un livre discutable” qui cependant “fera beaucoup parler”; nous les invitons à lire directement Shahak, pour se faire une idée qui ne soit pas entachée par les préjugés de Karen Hassan. Changeant de registre, un certain “Geremia”, anonyme sedevacantiste-lefebvriste (!) de Trente, attaque l’Institut pour sa position sur la crise actuelle; celui-ci ne nous avait pas envoyé son opuscule Breve manifesto del sedevacantismo, que nous nous sommes procuré par combine récemment. Il ne s’agit pas d’un écrit sérieux, comme n’importe qui peut le comprendre à une première et même superficielle lecture. Pour nous limiter à la critique de la Thèse, l’anonyme ne l’a jamais lue (p. 24); il ne comprend pas grand-chose à ce qu’il lit (dire que Jean-Paul II n’est pas formellement Pape et dire qu’il est certainement hérétique n’est pas une contradiction comme 83 il croit: cf. p. 25); il pense qu’il existe au sens propre une “Eglise conciliaire” (p. 25) alors que le drame consiste justement dans le fait que les déviants n’ont pas, au moins visiblement, quitté l’Eglise et n’en ont pas été exclus; il se pique de formation juridique, et ne sait pas comprendre la signification des canons (l’hérésie “publique” est quelque chose de plus que “externe”, cher Geremia! cf. p. 26); il pense que matière et forme secondes sont inséparables (p. 27), alors que Geremia (matière seconde) sans science théologique (forme accidentelle) peut très bien exister; il écrit que le péché matériel n’existe pas (p. 28) quand tous les moralistes enseignent qu’il doit être évité même s’il n’est pas formellement tel... En somme, il s’agit d’un auteur absolument incapable de distinguer l’acte de la puissance (b a ba de la philosophie). Pour lui il est tout à fait évident, qu’il n’y a pas besoin de démontrer que Jean-Paul II est formellement hérétique, pas catholique, etc. Il ne faut pas non plus démontrer que Paul VI était un sataniste (p. 7). Et le problème de la continuité et indéfectibilité de l’Eglise? Facile: elle n’a pas besoin de successeurs en continu sur le Siège de Pierre, mais seulement d’évêques (p. 11), au nez et à la barbe de Vatican I (D. 18241825: Si quelqu’un affirme qu’il n’est pas par institution du Christ Lui-même, c’est-à-dire par droit divin, que le Bhx Pierre ait toujours de perpétuels successeurs dans le Primat sur toute l’Eglise (...) qu’il soit anathème). Et quels évêques subsistent aujourd’hui, s’ils sont tous membres de “l’Eglise conciliaire”? Ceux de Mgr Lefebvre? Ceux de Mgr Thuc? Geremia ne sait-il pas qu’ils ne font pas partie de l’Eglise hiérarchique, en tant qu’ils sont privés de mission canonique et de juridiction? Que Geremia nous excuse pour la dure critique, mais lui même a écrit qu’il “devient nécessaire de réagir, en affirmant comme il faut la vérité, même quitte à ridiculiser l’adversaire” (p. 5). Mais auparavant il faut veiller à ne pas se ridiculiser soi-même... Comme font les amis du B.O.C. dont vous pouvez lire ci-dessous... Une attaque contre Mgr Guérard des Lauriers. Un extrait du Bulletin de l’Occident Chrétien (n° 39), revue sur laquelle écrivit aussi, in illo tempore, Mgr Guérard, nous a Centro Librario Sodalitium N ou ve au té NOS PUBLICATIONS A COMMANDER AUPRES DE NOTRE REDACTION Bon de commande au verso 84 été envoyé anonymement. Depuis longtemps le B.O.C. est hostile, pour des motifs personnels à la famille qui le dirige, à la mémoire de Mgr Guérard. Précisément pour cela (nous sommes tout à fait étrangers à ces motifs personnels et familiaux qui divisèrent ceux qui alors étaient les deux principaux responsables du B.O.C.) nous n’avons jamais fait écho aux polémiques répétées de ce bulletin. Nous faisons une exception pour l’article qui nous a été envoyé, Les querelles de l’Una cum, ou les effets de la subversion religieuse, sous la signature E&P T. Pour éclairer les éventuels lecteurs du B.O.C. sur le “sérieux” des accusations, nous rapportons la plus risible. Pour T., “Guérard” était un “farceur”, puisqu’il prétendait s’appuyer sur l’autorité de Saint Thomas en citant le Supplément de la Somme Théologique. “Or il apparaît”, écrit T. avec suffisance, “après une étude longue et approfondie de cette question fondamentale, que le texte invoqué comme étant de St. Thomas, n’est pas de St. Thomas, lequel n’a pas écrit le supplément de la Somme. Mais Guérard l’ignorait, bien évidemment, lui qui prétendait, en toute humilité, vouloir... ‘terminer la Somme’ (sic)!”. Pour démontrer la sensationnelle nouvelle qui a coûté à T. “une étude longue et approfondie”, l’auteur ajoute en note: “On sait que St. Thomas n’ayant pas achevé la Somme, quelques théologiens se sont essayés à le faire. Ces questions supplémentaires sont répertoriées sous la rubrique supplément”. Dommage que T., espèce rare de sedevacantiste lefebvriste (espèce qui n’existe pas seulement à Trente, à ce qu’il paraît), ne sache pas que ces continuateurs de la Somme n’ont pas écrit une seule ligne de leur main, mais ont pris les textes du “Supplément” du commentaire de Saint Thomas au livre des Sentences... C’est pourquoi comme chacun sait sans longues études (sauf T.), le Supplément de la Somme a été écrit par Saint Thomas, même si la rédaction n’est pas la sienne. Ce petit mais significatif et instructif épisode enseignera-t-il à T. (et à ceux comme lui) à être plus humbles et prudents avant de calomnier (aussi) par ignorance le prochain? Nous craignons que non... Appendice à la question des consécrations épiscopales. La question a été traitée sur le numéro spécial de l’édition française de Sodalitium (n° 44). L’abbé Belmont (n’) a Bon de commande Veuillez envoyer ARTHUR PREUSS, Etude sur la Franc-Maçonnerie américaine (330 pages). Prix: 120 F + port exemplaires: Abbé ANTHONY CEKADA, On ne prie plus comme autrefois... (64 pages). Prix: 50 F + port exemplaires: Abbé HENRI DEEN, Le célibat des prêtres (64 pages). Prix: 40 F + port exemplaires: à l’adresse suivante: Frais de Port: + 25 F pour commande inférieure à 210 F + 33 F pour commande à partir de 210 F Nom Prénom Adresse Ville Code Tél.: A retourner à l’une des deux adresses suivantes: Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano 36 10020 VERRUA SAVOIA (TO) - ITALIE “Sodalitium” Mouchy 58400 RAVEAU - FRANCE Vous pouvez aussi téléphoner à: Tel. (de France): 00. 39. 161. 83.93.35 Fax (de France): 00. 39. 161. 83.93.34 INTERNET: www.plion.it/sodali/librif.html - email: sodalitium@crescentino.alpcom.it 85 (pas) répondu par les deux pages de décembre 1997, intitulées Explications conjointes au numéro 5 des Deux-Étendards. Il déclare clos le débat (“on remarquera aussi que, dans ce numéro, la controverse concernant les sacres épiscopaux n’est pas poursuivie”) qui avait été ouvert uniquement pour faire savoir que l’on ne devait pas compter sur lui (“Pour nous, en effet, après de longues ruminations, la cause est entendue: nous avons voulu exprimer qu’il ne fallait pas compter sur nous pour entrer dans cette aventure ou pour l’approuver en quelque manière - en parole ou en acte”). Nous respectons son choix. Cependant, l’abbé Belmont ne se retient pas de confirmer ses arguments théologiques pour soutenir cette décision, et là nous ne pouvons que désapprouver à nouveau. L’abbé Belmont argumente en rappelant que la hiérarchie de l’Eglise est une, même si “elle s’ordonne selon deux raisons diverses: l’ordre et la juridiction. L’unité de ces deux aspects existe dans l’épiscopat qui, seul par institution divine, prend place simultanément dans la hiérarchie d’ordre et dans la hiérarchie de juridiction”. Jusque-là nous sommes d’accord, d’autant plus que B. ne fait rien d’autre que répéter ce qu’expliquait Mgr Guérard des Lauriers in Consacrer des évêques (cf. notre schéma sur Sodalitium n° 44, p. 31). Mais si la prémisse est correcte, la conséquence est tout à fait arbitraire (je le cite et, entre crochets, je le réfute): “En conséquence, faire un évêque c’est faire une hiérarchie [distinguo: selon la raison d’ordre ou selon la raison de juridiction]; et si cet évêque n’est pas fait par le Pape - seul fondement de la hiérarchie catholique [selon la raison de juridiction] - c’est faire une autre hiérarchie [si l’on fait une hiérarchie seulement selon la raison d’ordre, nego; mais aussi selon la raison de juridiction: concedo]. On ne peut sortir de là [nego]”. Dans sa conclusion, B. semble nier la distinction des deux raisons (ordre et juridiction) au nom de l’unité de la hiérarchie, unité assurée justement par l’épiscopat. C’est ce point dans lequel B. erre à nouveau, en ne s’apercevant pas de passer de l’universel (“l’unité de ces deux aspects existe dans l’épiscopat....”, “l’épiscopat est donc la ‘brique élémentaire’ dont est bâtie la hiérarchie de l’Église”) au particulier (“faire un évêque...”, “si cet évêque n’est pas fait par le Pape...”). Erreur de logique qui porte avec elle une erreur de fond! L’épiscopat est une chose, une seule consécration épiscopale, une autre! Le Pape, par exemple, peut déposer un évêque et laisser vacant un diocèse, il ne peut pas supprimer l’épiscopat... Ainsi, nous avons vu avec Billot que “le degré épiscopal a été choisi de droit divin pour exercer le pouvoir ordinaire de gouvernement” (l.c., p. 29) mais qu’il n’est pas impossible que “il y ait un vrai évêque sans juridiction” (p. 30); il doit donc exister nécessairement (au moins en puissance) un épiscopat avec juridiction, alors que tel évêque peut en être privé. Ainsi, pour répondre directement à la dernière objection de B., on doit dire: pour assurer l’unité de la hiérarchie il doit y avoir des évêques qui unissent au pouvoir d’ordre le pouvoir de juridiction, concedo; mais, pour assurer l’unité de la hiérarchie il est nécessaire que tous les évêques consacrés aient le pouvoir de juridiction (sous peine de fonder, autrement, une autre “hiérarchie”): nego (voir le cas des évêques titulaires). Mais B. pourrait avancer, et avance de fait, une ultime instance: l’épiscopat, à la différence du sacerdoce (“d’ordre essentiellement sacramentel”) est “d’ordre essentiellement hiérarchique”. Nous avons déjà démontré que cette affirmation de B. est fausse: “L’essence de l’épiscopat réside dans le pouvoir d’ordre, autrement dit dans la plénitude du sacerdoce” (P. Zapelena, cit. p. 27). D’autre part, B. lui-même, implicitement, admet que l’on ne peut faire cette distinction entre ordinations sacerdotales et consécrations épiscopales (quant à l’état de nécessité). Il rappelle en effet (note 3), que “ceux-là sont dits être appelés par Dieu, qui sont appelés par les ministres légitimes de l’Eglise” (Catéchisme du Concile de Trente, de Ordine, § 1). Cette difficulté vaut pour la vocation sacerdotale en soi: appliquée dans le sens que veut lui donner B., elle vaudrait aussi contre lui, puisqu’il n’a pas été appelé au sacerdoce par son évêque diocésain, mais par Mgr Lefebvre. Encore une fois donc le dilemme se pose dans toute sa rigueur: ou l’on accepte la possibilité des consécrations épiscopales, ou l’on doit pratiquer la “périlleuse abstention de toute vie sacramentelle”: les compromis, comme celui pratiqué par B., sont illogiques et indéfendables. Ceci en théorie: dans la pratique, l’opportunité de telle ou telle autre consécration, ou même de toutes, relève d’éléments contingents qui sont passibles de différentes évaluations; nous l’admettons tranquillement. Enfin, B. se demande: dans ce débat “les pauvres y sont-ils évangélisés?”. Nous croyons que oui, tant parce que la vérité est toujours bénéfique pour les âmes, que parce que les simples fidèles doivent savoir si en assistant à telle messe, en communiant des mains de tel prêtre, ils se sanctifient ou bien of- 86 fensent Dieu. Ce n’est pas une différence de peu d’importance... Baptême. L’abbé Thomas Cazalas a baptisé à Tours, le 1er mars, Victoria Lombart. Mariages. Le 3 janvier, dans l’église paroissiale de Domqueur, l’abbé Thomas Cazalas a uni dans le mariage son frère François avec Mlle Laure Méry de Montigny. Les jeunes mariés s’étaient préparés à un pas aussi important en faisant les Exercices Spirituels de Saint Ignace. L’Institut adresse aux époux Cazalas ses vœux les plus sincères et remercie vivement le curé de Domqueur, l’abbé Philippe Sulmont. Le 22 février, dans l’église paroissiale de Sabbioncello San Pietro (Ferrare), l’abbé Ricossa a uni dans le mariage Gianfranco Fabbri (de Pontelagoscuro) et Nicoletta Pastorello (de Cocconile). Que Dieu bénisse ce nouveau foyer chrétien. Décès. La veille de Noël, à Ferrare, est morte Giovannina Carradori, grand-mère de notre cher ami Alessandro Ferretti: elle avait communié et s’était confessée à l’abbé Ricossa quelques jours avant; l’abbé Maffei a célébré ses funérailles. Le 8 janvier nous avons appris la nouvelle de la mort de Sœur Margherita Spagna, arrivée le 11 novembre dernier. Sœur Margherita était entrée dans l’Institut à Nichelino le 23 mars 1987, et elle nous avait aidés longtemps au séminaire de Orio Canavese. Par la suite nos chemins s’étaient séparés, mais elle était restée en bons termes avec nous, spécialement avec l’abbé Nitoglia, à qui elle avait confié la charge de célébrer un trentain grégorien après son décès. Chère Sœur Margherita, les messes ont été célébrées dès que nous avons appris votre mort, et nous espérons ainsi que vous vous trouvez déjà au Ciel. Le 13 janvier, Dieu a rappelé à Lui au Paradis la petite Cecilia, fille d’Alberto et Pascale Fontan. Elle n’avait que neuf jours. Née à six mois, elle avait été immédiatement baptisée par sa maman: le geste de foi de ses parents lui a obtenu ce sacrement indispensable au salut, qui applique aux âmes le Sang rédempteur du Seigneur. L’abbé Ricossa a célébré ses funérailles à Turin, dans la Chapelle du Sacré-Cœur, le 16 janvier. Le même jour (16 janvier), décédaient la mère de notre chère amie Olga Bressy Sivier, dont nous sommes proches dans la douleur et la prière, la mère du Professeur Coppellotti, et Mme Simone Janson. Malade depuis longtemps, cette dernière était une fidèle assidue de la Chapelle ND des Victoires (Cannes), desservie d’abord par le regretté abbé Delmasure et, actuelle- janvier, et l’abbé Nitoglia a célébré ses funérailles à Cannes le 20 janvier. L’Institut est proche de sa famille en ce douloureux moment, et l’assure des prières de ses membres pour la défunte. Luigina Gallardo était notre voisine, ici à Verrua, et même une amie qui nous était très chère. Après des mois de souffrances elle nous a quittés le 25 janvier. L’abbé Ercoli l’a assistée dans sa maladie, et lui a administré tous les saints sacrements, célébrant ensuite pour elle la messe d’enterrement, en présence de sa famille, le lendemain. L’abbé Ricossa a célébré la messe du trentième jour le 15 mars à Verrua, devant de nombreux parents et amis de la défunte. Le 7 février est mort à Funo (Bologne), Umberto Benini. Sa petite-fille, Raffaella Moschetta, lui a procuré les réconforts de la religion, en appelant à son chevet un prêtre de l’Institut. Nous lui adressons nos remerciements et la promesse de nos prières. Les fidèles qui se sont rendus à Rome se souviennent certainement du Père Antonio Coccia, o.f.m. conv., illustre philosophe scolastique et professeur à l’Université du Collège Séraphique, qui a maintenu le flambeau de la Messe dans la Ville Eternelle dans les églises de St Jérôme-de-la-Charité et Ste Marie-dellaLuce; le Seigneur l’a rappelé à Lui le 24 février, et nous le recommandons à vos prières. Ad multos annos. Nous signalons aux lecteurs trois anniversaires d’ordination sacerdotale: le Père Barbara fêtera à Tours ses 60 ans de sacerdoce, le 20 juin; Mgr McKenna se souviendra le 5 juin des 40 ans écoulés depuis que le Cardinal Cicognani lui imposa les mains, le constituant ministre du Christ; l’abbé Belmont n’est arrivé qu’à... 20 ans de travaux apostoliques pour son Seigneur. A tous nous souhaitons sincèrement ad multos annos, en participant à leur joie et à leur prière. L’Institut s’est au contraire uni dans la prière de suffrage ce 27 février, dixième anniversaire de la mort de Mgr M.-L. Guérard des Lauriers; une messe de Requiem a été chantée à Verrua par l’abbé Murro. Ils nous ont écrit. Selon notre habitude, nous ne signalons pas les lettres élogieuses, mais les lettres de critique ou de précision utile. L’historien Yves Chiron n’a pas apprécié notre recension de son livre sur Padre Pio. Nous précisons donc que nous n’entendions pas dire qu’il a publié une simple répétition des ouvrages de Pagnossin; seulement, dans une revue “traditionaliste”, il nous semblait que la publication, de la part des éditions Paoline, d’un livre qui reprenait les thèses de Pagnossin 87 Le Père Barbara à Rome dans les années 70 était l’‘événement’ le plus digne de remarque. Dans le dernier numéro (p. 36) nous rapportions sous la forme dubitative comment Pie XI aurait refusé, en son temps, de déclarer Ste Thérèse de l’Enfant Jésus Docteur de l’Eglise, comme cela lui avait été proposé, dans la mesure où une femme ne peut accéder à ce titre. Un lecteur italien nous a gentiment précisé que le fait est relaté par le cardinal Confalioneri dans sa biographie de Pie XI, et que la proposition avait été faite par Mgr Combes. On s’étonne donc de voir une revue de la Fraternité saint Pie X, Certitudes (n° 26, pp. 1214) acclamer la décision de Jean-Paul II de nommer Ste Thérèse “Docteur de l’Eglise”, contrairement à toute la tradition ecclésiastique fondée sur la Sainte Ecriture (signalons cependant pour son intérêt, dans le même n° de Certitudes, l’article de l’abbé de Tanoüarn, Œcuménisme: un grand bond en avant dans la transparence, aux pp. 41-47). Un lecteur de Nantes, M. Jacques Le Goff, corrige notre erreur (cf. Sodalitium n° 45, p. 64): Laurentin n’est pas, en réalité, un partisan de la “non mort” de la très Sainte Vierge, même s’il admet, comme souligne le P. Roschini, la valeur des argumentations théologiques des “immortalistes” (parmi lesquels nous continuons à nous ranger). Une autre erreur nous a été signalée par M. André Lucien (de Saint-Etienne), à propos de la Déclaration de repentance lue à Drancy (cf. Sodalitium, n° 45, pp. 66-67). Nous nous sommes fiés à la version donnée en avant-première du quotidien Le Monde, qui s’est révélée être un texte qui a été revu avant sa publication définitive (cf. Présent, 2 et 4/10/97; le texte authentique a été publié, par ex., par la La Documentation catholique, n° 2168, 19/10/07, pp. 870-872 ou par La Nef, n° 77, nov. 1997, pp. 23-24). Par rapport au texte que nous avons commenté, il y a deux différences importantes: les signataires (pas tous les évêques de France, mais seulement 29 d’entre eux, parmi lesquels Balland de Lyon, fait cardinal par Jean-Paul II et mort peu après) et la phrase sur le “schisme primordial” entre juifs et chrétiens. Le terme a été changé en “séparation originelle”. En réalité, la signification est substantiellement la même (schisme et séparation sont synonymes), même si les mots employés sont plus nuancés. Notre critique reste donc substantiellement inchangée. EXERCICES SPIRITUELS A Raveau (Nièvre) En Belgique [retraite de trois jours prêchée en flamand] HOMMES ET JEUNES-GENS: du lundi 10 août à 12 h au samedi 15 août matin. HOMMES ET JEUNES-GENS: du lundi 24 août au jeudi 27 août. DAMES ET JEUNES-FILLES: DAMES ET JEUNES-FILLES: du lundi 3 août à 12 h au samedi 8 août à 12h. du lundi 17 août au jeudi 20 août. (Pour tout renseignement s’adresser à l’abbé Stuyver, Tél.: 052/21 79 28 - voir adresse au verso) CROISADE EUCHARISTIQUE CAMP POUR GARÇONS A RAVEAU Enfants de 8 ans accomplis à 13 ans: du jeudi 9 juillet à 12h au jeudi 23 juillet à 12h. POUR TOUT RENSEIGNEMENT S’ADRESSER À L’INSTITUT MATER BONI CONSILII Tél. (de France): 00.39. 161. 83.93.35 - Fax (de France): 00.39. 161. 83.93.34 CENTRES DE MESSES RÉSIDENCES DES PRETRES DE L’INSTITUT ITALIE: Verrua Savoia (TO) Maison-Mère. Istituto Mater Boni Consilii - Località Carbignano, 36. Tél. de l'Italie: (0161) 83.93.35 - Ste Messe: en semaine à 7h30. Salut du Saint-Sacrement: tous les vendredis à 21h. Heure Sainte: le premier vendredi du mois à 21h. FRANCE: Mouchy Raveau 58400 - La Charité sur Loire. Tél. 03.86.70.11.14. Permanence assurée seulement pendant les mois d’été. Tours. Abbé Thomas Cazalas: auprès de l’association Forts dans la Foi. Chapelle St Michel, 29 rue d’Amboise. Ste Messe le dimanche à 10h30. Tél.: 02.47.64.14.30. ou 02.47.39.52.73. (R. P. Barbara). BELGIQUE: Dendermonde. Abbé Geert Stuyver: Kapel O.L.V. van Goede Raad SintChristianastraat 7 - 9200. Tél.: (0032) (0) 52/21 79 28. Ste Messe le dimanche à 8h30 et 10h. AUTRES CENTRES DE MESSES FRANCE Annecy: 11 avenue de la Mavéria. Tél.: 04.50.57.88.25. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 10 h. Confessions à 9 h. Cannes: Chapelle N.D. des Victoires. 4 rue Fellegara. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 10h15. Tel.: 04.93.68.10.85. Commercy: chez M. l’abbé Petit. 12 rue de Lisle. Ste Messe tous les dimanches à 11h. Lyon: Tél.: 04.78.42.14.79. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois, à 17h. Confessions à partir de 16h30. ITALIE Ferrare: Ste Messe tous les dimanches à 17h30. Via Ripagrande 104/A. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia. Florence: via Ciuto Brandini 30, chez Mlle Liliana Balotta. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia. Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à 18h15. Confessions à 17h30. Maranello (Modène): Villa Senni. Strada per Fogliano. Tél. de l'Italie: (0536) 94.12.52. Ste Messe tous les dimanches à 11h. Milan: Ste Messe le 4ème dimanche du mois à 11h. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia. Rome: Via Pietro della Valle, 13/b. Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à 11h. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia. Turin: Oratoire du Sacré-Cœur, via Thesauro 3/D. Dimanches: Confessions à 8h30. Messe chantée à 9h. Messe basse à 11h15. Tous les jeudis et les premiers vendredis du mois: Messe à 18h15. Confessions à 17h30. Valmadrera (Lecco): via Concordia, 21. Tél. de l'Italie (0341) 58.04.86. Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à 10h. Confessions à 9h30. COMMENT NOUS AIDER - Il n'y a pas d'abonnement à “Sodalitium”. Ce périodique est envoyé gratuitement à tous ceux qui désirent le recevoir. 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