Tassa Riscossa - Taxe Perçue. ASTI CPO N° 62 Pèlerinages à Cotignac et à Lourdes Anno XXV n. 3- maggio 2009 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Asti - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IN CASO DI MANCATO RECAPITO, RINVIARE ALL’UFFICIO C.R.P. ASTI PER RESTITUZIONE AL MITTENTE CHE SI IMPEGNA A CORRISPONDERE LA RELATIVA TARIFFA 2 “Sodalitium” Periodico n° 62, Anno XXV n° 3/2009 Editore Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA TO Tel.: 0161.839335 Fax: 0161.839334 - CCP 36390334 INTERNET: www.sodalitium.it - email: info@sodalitium.it Direttore Responsabile don Francesco Ricossa Autorizz. Tribunale di Ivrea n. 116 del 24-2-84 Stampa: - Ages Torino. Le présent numéro a été achevé de rédiger le 1/05/2009 Ai sensi della Legge 675/96 sulla tutela dei dati personali, i dati forniti dai sottoscrittori degli abbonamenti verranno trattati in forma cartacea ed automatizzata e saranno utilizzati esclusivamento per invio del giornale oggetto di abbonamento o di altre nostre testate come copie saggio e non verranno comunicate a soggetti terzi. Il conferimento dei dati è facoltativo ed è possibile esercitare i diritti di cui all’articolo 13 facendone richiesta al responsabile trattamento dati: Centro Librario Sodalitium. En couverture : photo des pèlerinages à St-Joseph de Cotignac et à Lourdes en 2008 Sommaire Éditorial Le cardinal Rampolla était-il franc-maçon ? Une consécration épiscopale valide est-elle nécessaire pour être Pape ? Déclaration de l’Institut Mater Boni Consilii sur le décret du 21 janvier 2009 concernant la levée de l’excommunication des quatre évêques de la Fraternité Saint-Pie X Vie de l’Institut Éditorial Chers lecteurs, odalitium a maintenant vingt-cinq ans. C’est en effet à Noël 1983 que paraissait le premier numéro, de quelques pages seulement. 25 ans de publication représentent un exploit pour tout périodique, et plus encore pour une publication comme la nôtre, privée de tout soutien financier (et même d’abonnement). L’exploit nous comble de satisfaction, même si les difficultés et les déceptions sont loin de manquer. Parmi les difficultés, nous ne pouvons cacher celle de la périodicité qui, avec le temps qui passe, se fait toujours plus rare. À l’époque d’internet les nouvelles vont très vite et une revue d’étude et de réflexion comme la nôtre ne réussit certainement pas à rattraper l’actualité. Pour être plus fréquemment au courant de nos activités, vous pouvez aussi utiliser les sites internet de notre Institut (www.sodalitium.eu et www.casasanpiox.it), ainsi que le supplément de Sodalitium, Le Bon Conseil, qui cette année aussi, pour Noël, a apporté chez vous le calendrier de la nouvelle année. Cependant, la “lenteur” de notre revue a aussi des côtés positifs. Elle nous permet de concentrer l’attention sur un sujet jugé important par nous, et de l’approfondir au cours de l’année grâce aux conférences et aux S p. 2 p. 5 p. 40 p. 49 p. 52 2009 ne peut pas ne pas être dédiée à la défense de la Messe Romaine et de tous les Rites sacramentels de l’Église catholique contre la réforme liturgique. Le Bref Examen critique du Novus Ordo Missæ, signé par les cardinaux Ottaviani et Bacci, attend encore une réponse. congrès (la “Journée pour la Royauté Sociale du Christ” qui se tient à Modène en octobre et le Congrès des Études Albertariennes qui se déroule en novembre à Milan, ainsi que la journée d’études organisée à l’automne par l’Institut à Paris, sont désormais des rendezvous attendus par beaucoup). C’est, par exemple, dans cette perspective que nous avons dédié 2007 à la commémoration de l’encyclique Pascendi du Pape saint Pie X, et à l’illustration de l’actualité de ce document pontifical : tout catholique digne de ce nom doit aujourd’hui encore s’engager dans la lutte contre l’hérésie moderne, le modernisme, comme firent à l’époque les catholiques dits intégraux. 2008 nous a permis d’approfondir le thème de la lutte antimoderniste à l’occasion de trois anniversaires : les quatre- vingt ans de l’encyclique de Pie XI, Mortalium animos (1928), contre le mouvement œcuménique ; les cinquante ans de la mort du Pape Pie XII (1958) ; les vingt ans de la mort de Mgr Guérard des Lauriers (1988). L’anniversaire de la mort de Pie XII, en particulier, nous a permis d’approfondir, pour ensuite mieux faire connaître à tous ceux qui nous ont écoutés, le Magistère du Pape Pacelli, qui providentiellement condamnait toutes les erreurs qui triompheraient peu après ; cette étude était d’autant plus urgente au moment où l’on cherchait à faire passer Pie XII pour un précurseur de Vatican II. 2009 déjà commencée ne peut pas ne pas être dédiée – profitant du triste anniversaire de l’introduction du “nouveau missel” dans les églises de la chrétienté, le premier dimanche de l’Avent de 1969 – à la défense de la Messe Romaine et de tous les Rites sacramentels de l’Église catholique, contre la réforme liturgique (du rite de la Messe et de celui des Sacrements) voulue tragiquement par Jean-Baptiste Montini. Le Sacrifice du Calvaire, renouvelé sacramentellement sur les autels, est certainement parmi les premières pensées du Sacerdoce ; mais les fidèles laïcs et tous ceux qui ont à cœur la civilisation chrétienne ne peuvent se désintéresser du Sacrifice qui nous a sauvés. Il n’existe pas de société sans Sacrifice qui, rappelons-le, n’est pas une dévotion privée, mais le culte public et social que l’on offre à Dieu : Royauté Sociale du Christ et Sacrifice de l’Autel ne peuvent être séparés, exactement comme dans le mot “Christ” sont inclus la Royauté et le Sacerdoce du Seigneur. Quarante ans sont passé : une génération. Quand, lors de l’été 1976, le monde entier se passionna pour l’“affaire Lefebvre”, qui remettait en doute Vatican II et Mgr Annibale Bugnini, un des principaux coryphées de la réforme liturgique et de la nouvelle messe Le Père Guérard des Lauriers auteur du Bref Examen Critique (photo publiée sur la revue du Latran “Divinitas” pour les soixante-dix ans du Père) le nouveau missel, seulement dix ans s’étaient écoulés depuis la clôture du Concile, et moins encore depuis l’introduction de la nouvelle liturgie. Aujourd’hui, sans doute, nous pouvons nous réjouir d’un fait : la Messe romaine n’a pas disparu (elle ne pouvait pas !), et Vatican II est remis en cause. Mais nous devons aussi constamment revenir aux motifs fondateurs de l’opposition aux innovations doctrinales et liturgiques de la fin des années 60, motifs qui sont valides aujourd’hui comme hier. Le Bref Examen critique du Novus Ordo Missæ, signé par les cardinaux Ottaviani et Bacci, attend encore une réponse, a écrit ces dernières années le cardinal Stickler. Or, ce texte bref mais dense, fortement voulu par Cristina Campo (à qui nous devons la version finale du texte italien) et Una Voce, mais composé par le Père Guérard des Lauriers o.p., n’affirme pas que le Missel Romain puisse conserver sa place à côté du nouveau de Montini, comme deux formes du rite romain ; c’est un acte d’accusation à l’orthodoxie doctrinale du missel rénové. Il est évident, comme fit aussitôt remarquer le coryphée de la réforme liturgique, le Père Bugnini, que mettre en doute la rectitude doctrinale de la réforme liturgique veut dire mettre en doute aussi l’autorité et la légitimité de celui qui voulut cette réforme, la défendit, et la promulgua : Paul VI. Aujourd’hui comme à l’époque, le dilemme est le même : ou la réforme liturgique vient de l’Église, puisque voulue par 4 l’autorité suprême, ou non. Dans le premier cas, elle vient du Christ, et ne peut qu’être sainte et catholique. Mais si elle n’est pas sainte et catholique, elle ne peut venir de l’Église, de son Chef, et du Christ. Tertium non datur. Que tous ceux qui sont en train de se rapprocher de la beauté, de la sainteté, de la parfaite orthodoxie de l’ancien rite de l’Église romaine, réfléchissent sur ces mots, et en tirent de courageuses conclusions. Les mêmes que sut tirer le Père M.-L. Guérard des Lauriers. Alors que nous préparions ce numéro de Sodalitium, les événements de la Fraternité Saint-Pie X ont à nouveau fait la une de l’actualité. Nous faisons allusion à la “levée des excommunications” demandée par les quatre évêques sacrés par Mgr Lefebvre en 1988, et accordée par Benoît XVI par le décret du 21 janvier (signé par le cardinal Re), et à toutes les polémiques qui ont suivi cette décision. Les autorités de la Fraternité Saint-Pie X ont aussitôt crié victoire : “la Tradition n’est plus excommuniée” ! Retentissant succès de la diplomatie au travail depuis le jubilé de l’an 2000, qui a obtenu d’abord le motu proprio Summorum Pontificum et ensuite le décret de levée des excommunications ; le tout sans aucune contrepartie. La jubilation a duré quelques jours, sinon quelques heures, très vite remplacée par le trouble et les plus inquiétants désarrois, par des divisions internes, expulsions ou menaces d’expulsions, ordres péremptoires de pleine acceptation du Concile, de la part de Benoît XVI et… des “frères aînés”, auxquels évidemment le Concile (seulement Vatican II, bien entendu) tient paradoxalement beaucoup à cœur. Quiconque défend la Fraternité soutient que jusqu’à présent ont été satisfaits les deux préliminaires (liberté pour la Messe et retrait des excommunications) mais que c’est maintenant que commencent les discussions doctrinales. À notre avis, il était nécessaire avant tout de poser les questions doctrinales, parce que l’unité n’est possible que dans la Vérité, Vérité qui est intégrale, ou bien n’est pas. Au contraire, la Fraternité – comme toujours, comme déjà du temps de Mgr Lefebvre – a mis au premier plan les questions purement disciplinaires, et semble céder sur la doctrine avant même d’avoir commencé à en discuter… Telle est du moins l’impression que laissent, même à beaucoup de prêtres et fidè- Mgr Fellay reçu par Benoît XVI les de la Fraternité, les nombreuses déclarations et interviews accordées par le supérieur général de la Fraternité, Mgr Bernard Fellay. Face au discours de Ratzinger et à la Note de la “Secrétairerie d’État” qui imposent la pleine acceptation du Concile, l’évêque helvétique a répondu de manière tout à fait inadaptée, en se disant disposé à accepter le Concile “à la lumière de la Tradition”, dans une “herméneutique de la continuité”, comme magistère non infaillible (mais néanmoins toujours magistère), réduisant les erreurs conciliaires à des “ambiguïtés” qui pourraient être bien interprétées, comme il a essayé de faire avec l’expression absolument erronée de Jean-Paul II sur les Juifs (actuels) “frères aînés” dans la foi d’Abraham. À dire vrai, l’ambiguïté paraît aussi être pratiquée à Ecône et à Menzingen ! Tristes conséquences d’un vice d’origine de la congrégation religieuse fondée par Mgr Lefebvre, laquelle a toujours privilégié le pragmatisme aux principes. Dans ce numéro, nous publions une déclaration de notre Institut et nous vous signalons aussi le commentaire d’un confrère français, M. l’abbé Belmont, sur la “joie indécente” (lisez l’article sur www.quicumque.com et vous comprendrez le pourquoi de cette dure expression), joie qui a duré l’espace d’un matin. À certains lecteurs notre bataille contre les erreurs modernistes reprises par Vatican II peut sembler une querelle byzantine, alors que même en Italie, siège de la Papauté, on en est arrivé à fouler aux pieds le commandement “tu ne tueras pas” et la loi naturelle, en mettant à mort “légalement” une femme sans défense en la faisant mourir de faim et de soif. Mais nous ne devons pas oublier que cette perte du plus élémentaire sens de l’humanité et de la charité chrétienne, voire même l’obscurcissement de la raison, est une conséquence de la perte de la foi. Et si un tel crime est resté impuni (comme l’est depuis tant d’années l’avortement), puisqu’il est “lé- 5 gal”, on le doit au dogme de la laïcité de l’état et au refus de la royauté sociale du Christ (refus qui réunit les “laïcs” et les catholiques de l’école de la démocratie chrétienne, comme le sénateur Andreotti), royauté que nous, au contraire, obstinément, nous continuons à défendre. Il est vrai – comme beaucoup l’ont fait remarquer – que la question de l’euthanasie ne concerne pas seulement le droit divin positif, mais plutôt le droit naturel. La seule défense du droit naturel et de la raison, toutefois, est insuffisante et inefficace, comme le démontrent les faits… Personne ne doit se faire d’illusions : la pauvre Eluana Englaro a été la victime inconsciente de groupes de personnes bien déterminées – au-delà et bien au-delà de son cas personnel – à introduire petit à petit dans Le cardinal Rampolla était-il franc-maçon ? Par M. l’abbé Francesco Ricossa M ariano Rampolla del Tindaro (18431913) était nonce pontifical en Espagne lorsque Léon XIII le créa cardinal et le prit pour Secrétaire d’État (1887) ; le cardinal Rampolla remplit cette charge délicate jusqu’à la mort de Léon XIII, en 1903. Au conclave ouvert avec la mort du Pontife, l’Empereur d’Autriche François-Joseph opposa son veto, par l’intermédiaire du cardinal archevêque de Cracovie, Puzyna, à l’élection du Cardinal Rampolla au Siège pontifical. Sous le pontificat de saint Pie X, Rampolla, remplacé par le cardinal Merry del Val à la charge de secrétaire d’État, continua à exercer ses fonctions dans les diverses congrégations romaines dont il faisait partie (entre autres comme secrétaire de la congrégation du Saint-Office). Il était considéré comme un successeur possible de saint Pie X, mais il mourut moins d’un an avant le saint Pontife. C’est Mgr Della Chiesa, élève et collaborateur de prédilection du cardinal Rampolla, qui fut élu ; il prit le nom de Benoît XV (1). Dans les milieux dits “traditionalistes” (2) l’opinion commune, considérée quasiment comme certitude historique indubitable, est que le cardinal Rampolla était en réalité affilié à la maçonnerie. Dans cet ar- notre système l’euthanasie (qui n’est pas la mort douce, mais la triste mort), déjà pratiquée d’ailleurs sur des patients déclarés en état de “mort cérébrale”. Il ne s’agit pas seulement d’un pur et simple retour au paganisme ; il s’agit d’une apostasie (déclarée) du christianisme. Et derrière les attaques contre le clergé et l’Église catholique, on aperçoit facilement chez certains la haine de Dieu qu’anime celui qui fut défini par Jésus “homicide et menteur dès le commencement”. Malgré ces amères considérations, nous ne doutons pas de la promesse du Christ : non prævalebunt. C’est pourquoi nous ne devons pas nous rendre, mais nous devons continuer à lutter pour le Règne du Christ, dans les âmes, dans l’Église et dans la société. Dans les milieux dits “traditionalistes” l’opinion commune, considérée quasiment comme certitude historique indubitable, est que le cardinal Rampolla était en réalité affilié à la francmaçonnerie. Mais en est-il vraiment ainsi ? ticle je me demande si cette opinion est fondée, et sur quels arguments et documents on peut éventuellement s’appuyer pour montrer ensuite ce que fut, à mon avis, le vrai tort de l’“école” du cardinal Rampolla, surtout durant et après le pontificat de saint Pie X. Cet article est en parfaite continuité avec ce que Sodalitium a déjà écrit en d’autres occasions (n° 19/1989, pp. 30-44 ; n° 49/1999, éditorial), preuve qu’en une matière aussi importante et délicate que celle des infiltrations maçonniques dans l’Église, notre revue suit avec cohérence et sérieux une ligne d’équilibre. Infiltrations maçonniques dans l’Église Certes, ce n’est pas irrévérence que de se poser une semblable question à propos d’un prince de l’Église, ce que fut, sans aucun doute, le cardinal Rampolla. Dans un 6 Le cardinal Mariano Rampolla del Tindaro ancien numéro de Sodalitium (n° 36, pp. 4458), j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer les événements ayant influé sur plusieurs conclaves du XVIème siècle ; l’hérésie de Valdès y avait plus ou moins influencé de nombreux cardinaux (parmi les plus connus, les cardinaux Pole et Morone) et c’est à quelques voix près qu’ils ne furent pas élus. C’est précisément en cette circonstance que le Pape Paul IV (qui avait fait incarcérer le cardinal Morone pour hérésie et prévoyait la possibilité de son acquittement sous un pontificat ultérieur, comme cela se passa effectivement) promulgua en 1559 la fameuse Bulle Cum ex apostolatus (cf. Sodalitium it. n° 14 ; n° 41 fr., p. 40. Forts dans la Foi n° 42, 1976, pp. 405 et ss) avec l’intention de barrer la route lors d’un futur conclave au cardinal Morone ou à d’autres suspects d’hérésie. La caractéristique intéressante de l’hérésie de Jean Valdès, marrane espagnol, est qu’elle postulait la nécessité du “nicomédisme”, c’est-à-dire de rester à l’intérieur de l’Église tout en cachant le plus possible ses positions personnelles et d’en opérer de l’intérieur la réforme. Quatre siècles plus tard, le modernisme adoptera le même modus operandi. Après la fondation de la maçonnerie moderne (Londres 1717), les prélats, de hauts prélats même, furent nombreux à s’affilier à la secte malgré la condamnation et l’excommunication fulminées par les Souverains Pontifes Clément XII (lettre apostolique In eminenti, 1738) et Benoît XIV (constitution Providas, 1751). Par la suite, la presse catholique n’a jamais manqué de dénoncer ce que l’abbé Emmanuel Barbier appellera les “infiltrations maçonniques dans l’Église”, du titre de l’un de ses livres couronné de succès et loué par l’épiscopat catholique. Je me limiterai à rappeler quelques écrits et faits documentés parmi les plus notoires. En 1859, Jacques Crétineau-Joly (18031875) faisait éditer, avec un Bref de félicitation de Pie IX, son ouvrage L’Église romaine face à la Révolution. Ce livre est le fruit de nombreuses recherches archivistiques demandées à l’auteur par les Souverains Pontifes Grégoire XVI et Pie IX euxmêmes. Y sont entre autres publiés des documents de la Haute Vente dans lesquels était exposé un projet d’infiltration du clergé catholique par la franc-maçonnerie, visant à gagner à sa cause jusqu’au Siège de Pierre : “Nous devons arriver (…) au triomphe de l’idée révolutionnaire au moyen d’un Pape”. “Ce que nous devons demander, ce que nous devons chercher et attendre, comme les Juifs attendent le Messie, c’est un pape selon nos besoins”. Pour prêcher “une révolution en tiare et en chape” tendez vos filets (…) tendez-les au fond des sacristies, des séminaires et des couvents”. En 1904, Mgr Henri Delassus (18361921) publiait son ouvrage Le problème de l’heure présente, avec l’approbation de nombreux évêques et même du cardinal secrétaire d’État du Pape Pie X, Merry del Val. Dans ce livre, l’auteur reprenait le thème de Crétineau-Joly (tome I, chapitres XXII-XXIV), définissant cette tentative d’infiltration jusqu’au Siège de Pierre “suprême attentat” contre l’Église. En 1910, l’abbé Emmanuel Barbier (1851-1925) publiait, avec l’encouragement de six archevêques ou évêques français, ses Infiltrations maçonniques dans l’Église. Ce sont les années de l’hérésie moderniste condamnée par saint Pie X, et l’abbé Barbier rapporte entre autres des passages inquiétants du livre d’Antoine Fogazzaro mis à l’index en 1906, Il Santo [Le Saint]. Ce Saint des modernistes, qui porte le nom de 7 Benoît, se propose une révolution générale de l’Église à partir de l’intérieur. “Nous sommes un certain nombre de catholiques – c’est Giovanni Selva, personnage du roman, qui parle – en Italie et hors de l’Italie, ecclésiastiques et laïcs, qui désirons une réforme de l’Église. Nous la désirons sans rébellion, opérée par l’autorité légitime. Nous désirons des réformes dans l’enseignement religieux, des réformes dans le culte, des réformes dans la discipline du clergé, des réformes aussi dans le suprême gouvernement de l’Église. Pour cela, nous avons besoin de créer une opinion qui amène l’autorité légitime à agir selon nos vues, ne serait-ce que dans vingt ans, dans trente ans, dans cinquante ans” (il en aura fallu 60…). Pour Fogazzaro, cette coterie devait être secrète, “une maçonnerie catholique” (3). À qui craignait que le Pape ne pêche des poissons cachés et ne les mette à la casserole, il était répondu que lorsque la pêche aurait fait venir à la surface “des laïcs importants, des prêtres, des moines, des évêques, peut-être des cardinaux”, le pêcheur, épouvanté, laisserait retomber à la mer hameçon et prises. La situation était particulièrement délicate en France où, en 1905, le gouvernement de la Troisième République, étroitement contrôlé par la franc-maçonnerie, avait déclaré la séparation de l’Église et de l’État et dénoncé le Concordat de 1801. Il en est peu qui savent que le prétexte et l’occasion de ces mesures furent fournis par la destitution (1904) de Mgr Albert Léon Marie Le Nordez (1844-1922) de son siège épiscopal de Dijon, parce qu’il était suspecté d’être affilié à la franc-maçonnerie, au point que ses séminaristes refusaient de recevoir les Ordres Sacrés de ses mains. La mort de saint Pie X et la guerre mondiale opérèrent un profond changement non seulement dans la société temporelle, mais aussi dans l’Église. Au déclin des catholiques intégraux, qui tenaient haut la bannière de la lutte contre le modernisme et la maçonnerie, correspondit la renaissance d’un néo-modernisme, sournois par définition, dans les domaines biblique, œcuménique, liturgique et social, à partir des années vingt. Il en fut de même côté maçonnerie : un lent mais constant progrès d’infiltration de la secte débuta aussi, à travers discussions et rencontres entre représentants du clergé (surtout jésuites) et représentants des loges ; le dialogue aboutira le 25 janvier 1983, date de la ‘promulgation’ du nouveau code de droit canon par Jean-Paul II, à la suppression de l’excommunication des francs-maçons prévue par le canon 2335 de l’ancien code. Les écrits consacrés au “dialogue” avec la franc-maçonnerie sont nombreux, tant du côté ‘catholique’ que du côté franc-maçon ; nous nous contenterons ici de citer les œuvres très connues du prêtre paulinien Rosario Esposito : Le grandi concordanze tra Chiesa e Massoneria [Les grandes concordances entre Église et franc-maçonnerie] (Nardini 1987) et Chiesa e Massoneria. Un DNA comune [Église et franc-maçonnerie. Un ADN commun] (Nardini 1999) où l’on trouvera matière abondante ainsi qu’une riche bibliographie sur le sujet ; les mises en garde ne firent pas défaut non plus, dès l’époque du Concile, dans les écrits par exemple de Pierre Virion et de Léon de Poncins (4). Je me contente ici de résumer des choses bien connues. Le dialogue entre certains membres du clergé catholique et des dignitaires de la secte maçonnique avait déjà commencé bien avant le Concile Vatican II. Rappelons seulement les cas les plus connus et importants : en 1928, le Père Gruber, jésuite, ouvre le dialogue avec le dignitaire maçon Ossian Lang ; dans les années trente, le jésuite français Berteloot avec la Grande Loge de France (A. Lantoine) ; le Père Berteloot met en contact le Nonce Angelo Giuseppe Roncalli avec le baron Yves Marsaudon auquel Mgr Roncalli dira de rester dans la maçonnerie ; en 1952, le cardinal Innitzer, archevêque de Vienne, reçoit Bernard Scheichelbauer, Grand Maître de la Grande Loge de Vienne. Le Concile Vatican II opère, dans ce domaine aussi, un tournant décisif par rapport au passé. Tout d’abord, il n’est pas inutile de rappeler les rapports entre la Loge juive du B’naï B’rith et Jean XXIII. Jules Marx Isaac, membre du B’naï B’rith, obtint de Jean XXIII un engagement à revoir la position catholique sur ses rapports avec le judaïsme (cf. Sodalitium nn° 40 et 41). Jean XXIII confia au cardinal Bea, mis à la tête du Secrétariat pour l’union des chrétiens (cf. Sodalitium n° 38) les relations avec la puissante maçonnerie juive ; la déclaration conciliaire Nostra Ætate (28 octobre 1965) sera le fruit (initial) de cette collaboration. Dès lors le B’naï B’rith est régulièrement reçu au Vatican (y compris par 8 Benoît XVI-Ratzinger). Dans ses colloques avec le nonce Roncalli, le “frère” Marsaudon avait demandé l’abolition de la discipline ecclésiastique contre la crémation ; la demande fut immédiatement exaucée par Paul VI en 1963. Durant la session conciliaire l’évêque de Cuernavaca, au Mexique, Sergio Mendez Arceo, demanda la modification de la discipline ecclésiastique sur la franc-maçonnerie. “… Les déclarations Dignitatis humanæ et Nostra Ætate, approuvées par le Concile œcuménique Vatican II – écrit Roberto Fabiani, lui aussi franc-maçon – avaient été élaborées par des prélats qui fréquentaient des loges maçonniques. Oui, car le fait que dans les temples de la franc-maçonnerie siègent des dignitaires de l’Église catholique n’était pas du tout une légende ni matière à pamphlet comme beaucoup le croyaient ou l’espéraient, mais répondait à la pure vérité. Et de ces prélats-maçons, le plus autorisé avait la stature, la dimension culturelle et l’ouverture d’esprit du cardinal Franziskus König, archevêque de Vienne” (5) et personnage de premier plan au Concile même. Les années soixante et soixante-dix virent le développement, dans le climat post-conciliaire, de très nombreuses rencontres entre ecclésiastiques et dignitaires francs-maçons. Le Père Esposito rappelle le cas de onze cardinaux : Cushing, Cooke, Cody, König (pour lequel on parle d’initiation maçonnique dans la Loge Giustizia e Libertà de l’Orient de Rome, dans l’obédience de la Piazza del Gesù) (6), Etchegaray, Alfrink, Feltin, Marty, Krol, Brandâo Videla et Lorscheider ; pour ce qui est des évêques ils sont encore plus nombreux ; certains d’entre eux (par exemple Pézeril, Joyce, Pursley) parlèrent en Loge, tandis que Brandâo Videla alla jusqu’à y célébrer la “Messe” et fut gratifié par la Loge d’une haute décoration ! (tout comme le cardinal Arns). Dans le dialogue avec la maçonnerie se distinguèrent certains prêtres qui, selon Esposito, avait un accès facile auprès de Paul VI : tel fut le cas du Père Riquet, jésuite, et de l’abbé Miano, salésien, membre du Secrétariat pour les non-croyants, Secrétariat dirigé justement par le cardinal König. Le dialogue aboutit aussi à quelques décisions officielles qui autorisaient, quoique dans certains cas particuliers, la double appartenance à l’Église catholique et à la franc-maçonnerie. Le premier document sur ce sujet est la décision de la Conférence épiscopale scandinavo-baltique d’octobre 1966. En février 1968, c’est la Congrégation pour la doctrine de la Foi elle-même, avec à sa tête le cardinal Seper, qui effectue une enquête auprès de l’épiscopat catholique en vue d’une révision de la discipline sur la maçonnerie. Les conférences épiscopales sont treize à répondre, toutes substantiellement favorables à cette révision ; d’ailleurs les prescriptions du code de droit canon ne sont déjà plus du tout observées, répond au cardinal Seper le cardinal König qui prépare sa réponse en collaboration avec le haut dirigeant de la maçonnerie autrichienne Kurt Baresch (texte et histoire dans Esposito, Chiesa e massoneria. Un DNA comune, pp. 204-218). Le Secrétariat pour les non-croyants, dirigé par le cardinal König, entreprit alors un dialogue officiel confié au secrétaire, l’abbé Vincenzo Miano, salésien, et à deux experts tels que le Père Caprile sj et le Père Esposito ssp : les “conversations catholico-maçonniques de Rome et d’Ariccia”, tenues avec les maçons Gamberini, Ascarelli et Comba, durèrent de 1969 à 1977. Entre-temps la lettre du 19 juillet 1974 du cardinal Seper, de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, au cardinal Krol, président de la Conférence épiscopale nord-américaine, sanctionnait l’ouverture et le changement, de fait, de la loi de l’Église, en admettant la double appartenance à l’Église et à la maçonnerie, quoiqu’en des circonstances déterminées seulement. La lettre “libératrice” du cardinal Seper eut des répercussions dans diverses Conférences épiscopales qui l’appliquèrent à leurs pays respectifs : depuis celle de l’Angleterre et du pays de Galles (1974), jusqu’à celle du Brésil (1975) et de SaintDomingue (1976). L’aboutissement de ce dialogue fut le nouveau Code de droit canon (25 janvier 1983), qui “abroge” l’excommunication des maçons prescrite par Clément XII en 1738 et renouvelée jusqu’alors par tous ses successeurs. Le scandale provoqué par la suppression de l’excommunication, et déjà par les rencontres que nous venons de décrire auparavant, avait provoqué cependant une réaction partielle dès 1980 (déclaration de la conférence épiscopale allemande contre la double appartenance) qui aboutit à l’interven- 9 Benoît XV tion de la Congrégation pour la doctrine de la Foi (cardinal Ratzinger) du 26 novembre 1983 dans laquelle il est affirmé que si l’excommunication est suprimée, l’interdiction d’affiliation à la maçonnerie reste en vigueur et les francs-maçons ne peuvent donc pas s’approcher de la Sainte Table. Que s’était-il passé dans l’intervalle ? On ne peut exclure que sur le revirement partiel de la Congrégation de la Foi ait influé le scandale causé par les dénonciations de la part de nombreux journaux (tels que le bimensuel antimoderniste Sì sì no no dirigé par l’abbé Francesco Putti, et puis L’Osservatore politico, avec sa fameuse liste Pecorelli, du nom de son directeur et journaliste franc-maçon – assassiné par la suite – et publiée dans le n° du 12 septembre 1978) ; était dénoncée l’affiliation à la franc-maçonnerie de nombreux ecclésiastiques de renom tels que les cardinaux Baggio, Pellegrino, Marchisano, Poletti et Villot (ces deux derniers démentirent) ainsi que Mgr Bugnini, auteur principal de la réforme liturgique, éloigné de la Curie romaine suite à ce scandale et envoyé en “exil” à la nonciature d’Iran (7). Le scandale de la Loge maçonnique P2 de Licio Gelli eut probablement une influence plus grande encore. À cette Loge P2 appartenaient en effet d’insignes représentants de la finance “catholique”, tels que les banquiers Calvi et Sindona (tous deux objets d’une enquête judiciaire, puis tragiquement et mystérieu- sement décédés), ainsi que l’ami intime et collaborateur du cardinal Lercaro, Umberto Ortolani ; il n’est pas jusqu’à l’Institut pour les œuvres de religion du Vatican (IOR), et son président l’évêque Mgr Marcinkus qui n’aient été impliqués par tout cela dans les enquêtes des juges italiens (8). Les vicissitudes de la Loge P2 remirent au premier plan de l’actualité les questions liées à l’affiliation de prélats catholiques à la franc-maçonnerie : “problème épineux” pour reprendre les paroles du Père Esposito dans le chapitre X (Le clergé franc-maçon) de son ouvrage déjà signalé, Le grandi concordanze tra Chiesa e Massoneria [Les grandes concordances entre Église et maçonnerie]. Selon Esposito qui cite une vaste bibliographie, on aurait des documents prouvant l’affiliation de certains cardinaux (De Bernis, Delci (9), de Rohan, von Trautmansdorf-Vysberg et Brancaforte, tous du XVIIIème siècle) et d’une cinquantaine d’évêques ou archevêques, presque tous remontant à des époques désormais lointaines… ce qui n’exclue pas des appartenances plus proches de nous, mais que le Père Esposito, spécialiste et maçonnophile, préfère ne pas révéler. Cependant à la mort de Paul VI, la situation était telle que le Grand Maître du Grand-Orient d’Italie, Giordano Gamberini (par ailleurs également vaudois et “évêque” gnostique) écrivait de Paul VI dans la Rivista Massonica [Revue Maçonnique] (juillet 1978) : “pour nous c’est la mort de celui qui a fait tomber la condamnation de Clément XII et de ses successeurs : autrement dit, c’est la première fois – dans l’histoire de la franc-maçonnerie moderne – que le chef de la plus grande religion occidentale meurt en état de non hostilité avec les francs-maçons. Et pour la première fois dans l’histoire les francs-maçons peuvent rendre hommage à la sépulture d’un Pape, sans ambiguïté ni contradiction”. Pour le Père Esposito, qui répondit à Gamberini dans le numéro d’août de la Revue maçonnique, “Il” (Paul VI) “aurait apprécié” l’hommage du Grand Maître : “Aucun geste n’a jamais exigé autant de courage – écrit encore le prêtre paulinien – que celui qui devait être à la base de la réforme – du retournement – des rapports entre Église catholique et franc-maçonnerie”. Retournement prévu, semble-t-il, de longue date : “Le Père dominicain Félix A. 10 Morlion, bien connu comme fondateur de l’Université internationale ‘Pro Deo’ [l’actuelle LUISS, n.d.a.] et activités collatérales, (…) me confiait un jour qu’il avait parlé avec G.B. Montini, Mgr à l’époque, des rapports désastreux entre Église catholique et franc-maçonnerie. Montini lui déclara : ‘Une génération ne passera pas, que la paix ne soit faite entre les deux sociétés’. J’avais déjà fait allusion à l’épisode, sans donner cependant le nom du Pontife, dans un article publié dans Vita Pastorale du mois de décembre 1974. Maintenant que le Pontife est décédé, il n’y a plus aucun motif pour continuer à maintenir le secret. Et la prévision – j’allais dire : la décision – s’est pleinement vérifiée ; la rencontre avec Morlion ne dut pas avoir lieu avant 1948-1950 ; la lettre du Saint-Office au cardinal Krol porte la date du 19 juillet 1974, donc le délai d’une génération est pleinement respecté ”. Tout ce que nous venons de dire a pour but de démontrer comment, en dépit d’environ 3 500 documents pontificaux de condamnation de la franc-maçonnerie (chiffre compté par le Père Esposito), jamais, pas même aujourd’hui, n’ont manqué les malheureux ecclésiastiques qui, comme Judas, trahissent le Christ et l’Église en s’affiliant à la francmaçonnerie ou en en favorisant en quelque façon les desseins. Qui plus est : après Vatican II on en est arrivé au point de pouvoir parler d’une concordance entre franc-maçonnerie et Église catholique, ou mieux : entre la franc-maçonnerie et les modernistes infiltrés dans l’Église catholique. Le Père Ferrer Benimeli par exemple, citant la condamnation de la franc-maçonnerie voulue par Léon XIII, en tant qu’“elle travaille avec ténacité à annuler dans la société toute ingérence du magistère et de l’autorité de l’Église et dans ce but diffuse et prétend la séparation de l’Église et de l’État” commente “aujourd’hui c’est le Vatican qui combat pour cette même séparation entre État et Église…” (cité par Esposito, Chiesa e massoneria…, p. 170). Et le Père Esposito luimême conclut, pour ainsi dire, lorsqu’il écrit : “Le 27 octobre 1986 Jean-Paul II invite à Assise les chefs suprêmes de nombreuses religions. Tous prient pour la paix, chacun reste dans sa propre religion et prie avec ses propres formules. L’esprit d’Assise, qui s’était déjà manifesté un nombre infini de fois, même si c’était en des termes moins solennels et publics, a ensuite réalisé de nombreux autres pas. C’est exactement pour asseoir cet esprit que la franc-maçonnerie a été instituée et elle l’a codifié dès le premier jour de son existence. Depuis lors en loge se réunissent des hommes de toutes les religions, lesquels s’interdisent de parler de ce sujet. À Assise les hiérarchies de toutes les religions priaient et parlaient non de religion, un thème qui les aurait divisées et opposées, mais de paix ; en loge, les frères parlent et prient pour la même chose, ou pour le perfectionnement de l’homme, pour le développement global, pour la bienfaisance, la philantropie. C’est de la tolérance, non de l’indifférentisme religieux, ni du syncrétisme religieux. Il y aura des gens mal pensants ou scandalisés, mais au moins qu’ils se rendent compte d’être du parti de Mgr Lefebvre et non de celui du Concile et du Pape Wojtyla” (ibidem, pp. 12-13). S’il en est ainsi, il n’est même plus nécessaire de s’affilier à la franc-maçonnerie, puisque le fait de suivre le néo-modernisme transforme un baptisé en frère “trois petits points”. Certes, ce n’est pas en un clin d’œil que l’on est parvenu à transformer (de façon plus ou moins inaperçue) la presque totalité du clergé et des laïcs catholiques en une grande loge maçonnique. Il est donc licite de supposer que nombreuses ont été les infiltrations de la secte maçonnique parmi les rangs du clergé catholique ; mais cette supposition est encore loin d’être une démonstration de l’affiliation à la secte du cardinal Rampolla ou de tout autre ecclésiastique… Quand une présumée affiliation maçonnique n’est qu’une légende et une calomnie Une rumeur ou un écrit, ou une affirmation sur l’affiliation maçonnique d’un prélat, d’un prêtre, d’un évêque, d’un Pape ne suffit pas, en effet, pour que cette affiliation soit certaine, ou même seulement probable et non sans fondement. L’histoire nous offre de nombreux exemples de légendes calomnieuses contre des champions de la cause catholique, faussement accusés d’appartenir à la franc-maçonnerie. Un des cas les plus fameux est certainement celui du Pape Benoît XIV (Prospero Lambertini), qui renouvela l’excommunication de Clément XII contre la maçonnerie et intervint auprès du roi de Naples, Charles III, pour 11 qu’il interdise et extirpe la secte de son royaume. Et pourtant, les hommages hypocrites au Pontife de Voltaire, de Swedenborg et de Walpole ainsi que les rumeurs sur la Loge romaine recueillies par le théologien protestant maçon Münster valurent au Pape l’humiliation d’être suspecté d’être lui-même franc-maçon, ce qui le poussa, entre autres, à renouveler l’excommunication contre ses calomniateurs. Mais son zèle antimaçonnique ne servit à rien contre le préjugé, puisqu’en 1911 encore – comme l’écrit Francovich – P. Duchaine avalalisait la fausse nouvelle de l’initiation de Lambertini (10), et en 1961 le fr Lesaint la répandait – comme le rapporte Coston – dans la revue Pax (11). La légende concernant Pie IX a elle aussi la vie dure. Ce grand et saint Pontife qui condamna la franc-maçonnerie dans au moins vingt-huit documents importants fut accusé d’être lui-même maçon, et la calomnie dure encore aujourd’hui puisque le Dictionnaire des Francs-maçons européens publié en 2005 le met au nombre des “frères” de la Loge Eterna Catena de l’Orient de Palerme dès 1839 et trouve une confirmation de ceci dans le fait que “son appartenance à la franc-maçonnerie fut révélée à la tribune de l’Assemblée nationale, à Paris, par le F Charles Floquet” (12). La source, non citée, du dictionnaire est un article d’un certain Caubet publié en décembre 1865 dans la revue Le Monde maçonnique. Le même Monde maçonnique affirme en 1868, que Pie IX avait été initié à Philadelphie, aux États-Unis en 1823. Dommage que Mgr Mastaï Ferretti n’ai jamais visité ce pays… En 1878 une autre revue maçonnique, La Chaîne d’union, présente carrément le témoignage d’un ‘témoin oculaire’, le parrain en personne de l’initiation de Mastaï, qui, cette fois, aurait eut lieu en 1811 à Thionville ! En 1924, une revue maçonnique française et un livre imprimé à Rome reprennent la calomnie. Dans une étude dédiée à la question (13), Yves Chiron écrit qu’“aujourd’hui aucun maçon ne soutient plus cette thèse” et il allègue le témoignage d’une lettre du bibliothécaire du Grand-Orient de France en date du 30 mai 1995 ; par contre, dix ans plus tard dans le Dictionnaire de la Grande Loge le ‘on-dit’ réapparaîtra. Racontar qui, soit dit en passant, frappe aussi, mais j’ignore si c’est avec plus de fondement, le secrétaire d’État de Pie IX, le cardinal Antonelli (1806-1876) qui fut même un “ami très dévot de saint Jean Bosco” et, naturellement, “intime” de Pie IX, dont il fut le fidèle serviteur durant tout son pontificat, jusqu’à sa mort (cf. l’Enciclopedia Cattolica) (14). La glorieuse figure du cardinal Ottaviani n’a pas été davantage épargnée. Le dernier secrétaire du Saint-Office, celui qui, au Concile, s’opposa à toutes les nouveautés modernistes, celui qui signa le Bref Examen critique du Novus Ordo Missæ, aurait été franc-maçon, du moins selon les insinuations, bien peu crédibles, du vénérable de la fameuse Loge P2 du Grand-Orient d’Italie, Licio Gelli (15). Les faits documentés (et Gelli l’admet) montrent plutôt l’amitié intime entre le cardinal Lercaro, représentant de pointe du progressisme conciliaire et auteur de la réforme liturgique, et le bras droit de Gelli, Umberto Ortolani, et voilà comment par contre pas même le nom d’Ottaviani n’est épargné ! Faut-il donner créance aux insinuations d’un franc-maçon, vu que le démon est le père du mensonge ? En cela Gelli (encore en vie) est digne héritier de la Rivista della Massoneria italiana, laquelle publia, en deux parties, le 1er août 1892 et en juin-juillet 1895, des listes d’ecclésiastiques maçons. “Les deux listes n’ont pas le charisme de la rigueur” – écrit le Père Esposito. “Le tort de la revue – poursuit-il – est aussi de ne pas contrôler jusqu’à obtention d’une certitude certaines affirmations qui, ou apparaissent manifestement infondées, ou ne sont pas suffisamment illustrées ; en ce sens nous rappellerons les affirmations insoutenables de ce périodique (1895, 146) à propos de Clément XIV, de saint Antoine Marie Claret ou de Nocedal” (16). Le grand expert de la franc-maçonnerie (et ennemi de la secte), Henri Coston, écrivait donc en 1964, en parlant du cas Rampolla, après avoir exposé les cas similaires de Benoît XIV et de Pie IX : (“L’accusation portée par les antimaçons contre Mgr Rampolla rappelle celle des maçons contre Pie IX” p. 172) : “compte tenu de ce que nous venons de dire et sauf exception que nous ignorons – nous ne pouvons naturellement prendre pour argent comptant les affirmations de l’auteur des ‘Fils de la Lumière’ [Roger Peyrefitte] – il semble bien improbable que des prêtres de l’Église catholique romaine soient francsmaçons” (17). En 1992 Coston est plus sévè- 12 re (entre-temps il y a eu le Concile) : après avoir rappelé le cas Rampolla et le cas Le Nordez, il conclut : “si nous avons longuement relaté les affaires Rampolla et le Nordez, c’est pour montrer à quel point il est difficile de faire la preuve de l’appartenance maçonnique de hauts personnages. (…) Il n’en demeure pas moins que, selon l’adage fameux, il n’y a pas de fumée sans feu, et que, si l’on a du mal à prouver l’affiliation de hauts prélats à des sociétés secrètes maçonniques, en l’absence de documents authentiques, on peut à juste titre les considérer pour le moins comme des alliés objectifs de la franc-maçonnerie, dans la mesure où leur comportement, ou leur politique sont conformes aux intentions, aux visées, aux plans des arrière-loges qui, elles, sont bien connues” (18). J’anticipe ma conclusion, il est difficile de passer outre le jugement d’Henri Coston et de proclamer certain et démontré ce que lui-même admit ne pas être encore démontré dans l’état actuel des choses (19). L’initiation maçonnique du cardinal Rampolla : état actuel de la thèse Les premiers bruits concernant une éventuelle initiation maçonnique du cardinal secrétaire d’État de Léon XIII remontent – nous le verrons mieux ensuite – à l’année 1929, autrement dit 15 ans après la mort du prélat, et 26 ans après le fameux conclave durant lequel le cardinal Puzyna posa son veto à l’élection du cardinal Rampolla. Depuis lors, depuis 1929 donc, la version “Rampolla-maçon”, qui doit sa diffusion capillaire aux nombreux écrits et conférences du Marquis de la Franquerie dans les années 70, s’est enrichie de nouveaux éléments. Je la présente telle qu’elle est exposée dans le livre l’Église éclipsée ? (Delacroix, 1997, seconde édition), œuvre collective des Amis du Christ-Roi. “À la mort de Léon XIII – peut-on lire dans L’Église éclipsée ? aux pp. 72-73 de la seconde édition – la franc-maçonnerie crut que le moment était venu d’installer l’un des siens sur le trône de saint Pierre. ‘Son homme de main’ s’appelait le cardinal Rampolla del Tindaro ! Secrétaire d’État de Léon XIII, le cardinal Rampolla était un haut initié recevant dans les Loges qu’il fréquentait les instruc- tions lucifériennes pour les appliquer dans le gouvernement de l’Église. Il fonda au Vatican une arrière-loge qui devait recruter les plus hauts dignitaires du Saint-Siège. Pendant ses vacances en Suisse, le cardinal Rampolla allait chaque samedi dans une arrière-loge près de l’abbaye d’Einsiedeln, et tous les quinze jours à la loge de Zurich pour y recevoir les instructions du Pouvoir Occulte : désarmer les catholiques de France par leur ralliement à la république maçonnique ; et fonder une arrière-loge à l’intérieur de l’Église, capable de fournir les hauts dignitaires du Saint-Siège, comme les cardinaux Ferrata, Gasparri, Ceretti, Bea, etc. Cette loge de Zurich faisait partie de l’O.T.O., l’Ordo Templi orientis dont le cardinal Rampolla était en effet membre. Il était arrivé aux plus hauts grades des cultes lucifériens puisqu’il appartenait aux VIIIème et IXème grades de l’O.T.O., seuls grades autorisés à approcher le grand maître général national ainsi que le chef suprême de l’Ordre, appelé ‘brother superior’ (frère supérieur) ou O.H.O. (Outer head of the order). Il n’est pas sans intérêt de savoir que l’Ordo Templi orientis fut fondé par Aleister Crowley, considéré comme le plus grand sataniste des temps modernes. (…) Monseigneur Jouin, fondateur et directeur de la Revue internationale des Sociétés Secrètes (R.I.S.S.), ayant eu en mains les preuves de l’affiliation du cardinal Rampolla, chargea son rédacteur en chef, le marquis de la Franquerie, d’aller les montrer aux cardinaux et évêques de France. Félix Lacointa, directeur du journal ‘Le bloc anti-révolutionnaire’ (ex-Bloc catholique), témoigna de son côté en 1929 : ‘ Au cours de notre dernier entretien (avec Mgr Le cardinal Rampolla arrivant à l’abbaye de Ensiedeln en Suisse 13 Marty, évêque de Montauban), comme nous le tenions au courant des découvertes faites récemment et que nous venions à parler du cardinal Rampolla del Tindaro, il voulut bien dire que, lors de la visite ad limina qu’il fit à Rome, quelque temps après la mort de l’ancien secrétaire d’État de Léon XIII, il fut appelé par un cardinal (Merry del Val, secrétaire d’État de saint Pie X)… qui lui raconta avec force détails qu’à la mort du cardinal Rampolla, on découvrit dans ses papiers la preuve formelle de sa trahison. Ces documents accablants furent portés à Pie X. Le saint Pontife en fut atterré, mais voulant préserver du déshonneur la mémoire du prélat félon et dans le but d’éviter un scandale, il dit très ému : ‘Le malheureux ! Brûlez !’ Et les papiers furent jetés au feu en sa présence” (VIREBEAU : Prélats et francs-maçons, Paris 1978, p. 28). Au Conclave, le cardinal Rampolla concentra sur lui la majorité des voix, mais le cardinal de l’Empire austro-hongrois, Pusyna, intervint et déclara que son gouvernement s’opposait à l’élection de Rampolla. Le Sacré-Collège élit à sa place le cardinal Giuseppe Sarto qui prit le nom de Pie X (note : Les révélations relatives à l’épisode du cardinal Rampolla sont extraites du document ‘Le Bloc Anti-révolutionnaire’, n° juinjuillet 1929 : ‘Le frère Rampolla’). Les francs-maçons avaient donc quasiment réussi au début du XXème siècle à avoir ‘leur pape’ à la tête de l’Église en la personne du cardinal Rampolla del Tindaro. Une fois élu, saint Pie X, afin de contrer l’infiltration ennemie dans le clergé, exigea de chaque prêtre le serment antimoderniste au moment de son ordination”. La citation de l’Église éclipsée s’arrête là. Dans un article anonyme consacré à Mariano Rampolla del Tindaro de l’“encyclopédie libre” virtuelle Wikipedia, ont été ajoutées les informations suivantes : “Après sa mort, un prélat français, Mgr Jouin, fondateur de la Revue internationale des sociétés secrètes, produisit des papiers prouvant, selon lui, l’appartenance de feu Rampolla à la francmaçonnerie. Qui plus est, le prélat aurait été grand maître de l’Ordo Templi orientalis (sic) (OTO), une loge ésotérique. Mgr Jouin déclara également avoir lui-même supplié l’Autriche d’user de son droit d’exclusive afin de barrer le trône de Pierre à un francmaçon”. L’“internaute” anonyme s’est probablement inspiré du livre récent de Craig Heimbichner, Blood on the altar. The secret History of the World’s Most Dangerous Secret Society [Du sang sur l’autel. L’histoire secrète de la Société secrète la plus dangereuse du monde] (Emissary Publications, 2005). De ce livre (que je n’ai pas lu) des recensions ont été publiées dans la presse “traditionaliste”, des recensions totalement favorables ; dans Le Sel de la terre par exemple, la revue théologique des dominicains d’Avrillé (n° 56, printemps 2006, pp. 190196), et, dans le bulletin Sous la bannière (n° 126, août 2006, pp. 4-11), dans un article signé Félix Causas et intitulé Le F Rampolla del Tindaro. Un cardinal affilié à la Contre-Église luciférienne. Ces deux revues sont ouvertement “lefebvristes”, mais le bulletin informatique Virgo Maria publié par l’abbé Marchiset de tendance sédévacantiste-lefebvriste, a entièrement repris et approuvé l’article de Causas (Virgo Maria, 9 octobre 2006, www.virgo-maria.org). Sur les traces d’Heimbichner, Causas va jusqu’à affirmer que tous les Secrétaires d’État de Pie IX à nos jours, ont été nommés par la francmaçonnerie, et va même jusqu’à critiquer, entre autres pontifes, saint Pie X, Benoît XV et Pie XII. Ce sont ces affirmations gravement calomnieuses envers l’Église et des pontifes légitimes qui m’ont incité à écrire cet article : mettre en doute la fidélité d’un haut prélat, fût-il cardinal, est une chose ; tout autre chose est d’accuser l’Église ellemême comme le fait pratiquement l’article de Sous la bannière, dépassant toutes les bornes de la décence. C’est donc ensemble, chers lecteurs, que nous allons voir quels sont les arguments en faveur de la thèse selon laquelle le cardinal fut affilié à la francmaçonnerie, et quels sont les arguments a contrario, pour conclure ensuite par une sévère condamnation d’un certain esprit de diffamation et de dénigrement de toute l’Église qui s’insinue, hélas, parmi certains “traditionalistes”, salissant ainsi le bon renom des véritables défenseurs de la foi catholique intégrale contre les erreurs du modernisme. Nous commençons donc notre “procès” en rappelant d’ores et déjà que, de son vivant, le cardinal Rampolla ne fut jamais jugé par des tribunaux de l’Église (les seuls compétents, d’ailleurs en ce qui le regarde) pour cette présumée affiliation maçonnique ; il aurait pourtant été du devoir de 14 quiconque avait des soupçons en la matière, de le dénoncer à l’autorité ecclésiastique (can. 2336§2) pour violation du canon 2335 qui interdit sous peine d’excommunication l’inscription à la franc-maçonnerie avec, pour les clercs, la peine de suspension et de privation de tout bénéfice, office, dignité et pension ecclésiastique (can. 2336§1). En l’absence d’un jugement ecclésiastique, et dans l’ignorance totale du jugement divin, c’est avec les arguments de l’historien, que sont et resteront toujours les documents et eux seulement, que nous chercherons à nous approcher de la vérité. Premier argument : le veto de l’Empereur contre le cardinal Rampolla durant le conclave de 1903 La parole à l’accusation. “Il convient de rappeler que le cardinal Rampolla était pratiquement élu, mais que l’Empereur d’Autriche, connaissant sans doute l’appartenance aux arrière-loges du Secrétaire d’État de Léon XIII, mit son veto. Ce veto tout providentiel empêcha un suppôt de Lucifer de monter sur le Trône Pontifical et eut pour bienfaisant résultat d’y faire monter un Saint” (MARQUIS DE LA FRANQUERIE, Saint Pie X, sauveur de l’Église et de la France, éd. Résiac, 1976, p. 3). “C. Heimbichner nous précise que ce fut Monseigneur Jouin qui décida l’Empereur d’Autriche à user de son droit de veto pour neutraliser Rampolla lorsqu’il fut presque acquis que ce franc-maçon et sataniste de l’O.T.O. allait être élu pape. Monseigneur Jouin, qui avait pressenti la tournure que prendrait le conclave, persuada alors l’empereur François-Joseph d’Autriche-Hongrie d’invoquer le ‘droit d’exclusion’, remontant au XVIIème siècle, clause depuis longtemps oubliée d’un traité conclu entre Vienne et le Vatican. Traité qui donnait à François-Joseph le pouvoir de veto sur l’élection d’un pape. Ainsi, ce fut grâce à Monseigneur Jouin, le vénéré prélat bien au courant des manigances des sociétés secrètes que Rampolla fut mis sur la touche !” (Felix Causas, in Sous la Bannière, cit., pp. 89). “Les francs-maçons avaient donc quasiment réussi au début du XXème siècle à avoir ‘leur pape’ à la tête de l’Église en la personne du cardinal Rampolla del Tindaro” (Les Amis du Christ-Roi, L’Église éclipsée, Delacroix, 1997, p. 73). La parole est à la défense. C’est là l’argument le plus répandu dans le public en faveur de l’affiliation maçonnique de Rampolla, mais ce n’est pas le plus ancien (Felix Lacointa, il me semble, n’y fait pas allusion) ni le plus fondé. Pourtant c’est le seul dont la fausseté absolue peut être démontrée. Commençons par faire justice de certains détails absolument erronés de cette thèse. Le 31 juillet suivant la mort de Léon XIII survenue le 20 juillet 1903, les 62 cardinaux présents à Rome se réunirent en conclave pour élire son successeur. Après six scrutins, le 4 août, était élu le cardinal Joseph Sarto, Patriarche de Venise, qui devait devenir le grand saint Pie X. Dès le premier scrutin (1er août) s’était dessinées immédiatement les différentes tendances du Sacré Collège. Le cardinal Rampolla, soutenu par le vote unanime des cardinaux français et espagnols (en syntonie, et sous les auspices de leurs gouvernements respectifs) obtint 24 suffrages ; le cardinal Gotti, préféré plutôt des gouvernements des Empires centraux (Autriche et Allemagne ; mais Snider, p. 24, conteste cet appui), en obtint 17 ; restaient 21 votes répartis entre d’autres candidats, dont 5 pour le cardinal Sarto qui sera ensuite élu ; le quorum des deux tiers des votes était fixé à 42. Lorsque, le matin du 2 août 1903, au début du troisième scrutin, le cardinal Puzyna de Kozielsko (1842-1911), prince évêque de Cracovie, déclara au nom de “Sa Majesté apostolique l’Empereur, Roi de Hongrie” l’exclusive contre le cardinal Rampolla, ce dernier n’avait obtenu au second scrutin que 29 votes, chiffre qui monta à 30 et s’en tint là (sans plus jamais monter au-delà) après l’intervention du cardinal polonais : bien loin par conséquent des 42 voix nécessaires pour l’élection. La thèse selon laquelle ce fut le veto de l’Autriche qui empêcha l’élection de Rampolla est donc historiquement infondée : ce n’est pas le veto qui rendit impossible l’élection (les cardinaux protestèrent, officiellement même (20) contre l’inadmissible interférence d’un pouvoir séculier sur le conclave) mais le fait que Rampolla n’avait tout simplement pas, et ce, dès le début, les voix nécessaires pour être élu. Au pire, le veto impérial avait risqué paradoxalement d’obtenir l’effet contraire ! (21). En second lieu, il est impossible que Mgr Jouin ait décidé l’Empereur 15 à faire usage (ou plutôt à abuser) de son “droit” de veto contre le cardinal Rampolla, selon la version de Wikipedia et de Causas, à la suite d’Heimbichner. En effet, non seulement il est invraisemblable que l’Empereur François-Joseph se soit laissé convaincre pour un pas aussi grave par un simple curé, qui plus est d’une nation étrangère, comme l’était Mgr Jouin, mais surtout parce qu’en 1903, quand se déroulèrent les faits, Mgr Jouin ne s’occupait pas le moins du monde de ces questions maçonniques. Ce sont justement les Éditions Saint-Remi, très proches des associations CSI (Catholici semper idem) et Amis du Christ-Roi qui ont eu le mérite de republier la vie de Mgr Jouin (1844-1932) écrite par le chanoine Sauvêtre. C’est seulement à l’âge de 65 ans que celui qui fonda la R.I.S.S. (Revue internationale des Sociétés secrètes) et la dirigea jusqu’à sa mort, commença à s’intéresser au complot maçonnique, suite à une rencontre avec l’ex-secrétaire du GrandOrient de la rue Cadet, Jean-Baptiste Bidegain (1870-1926) ( 22), celui qui – dans le cadre de l’affaire des fiches – fut à l’origine de la chute du ministère Combes. La rencontre avec Bidegain eut lieu en 1909 (23) ; la R.I.S.S. fut fondée en 1912... Trop tard pour interférer dans le Conclave de 1903 ! Aux yeux de l’historien, le zèle catholique et antimaçon attribué à l’Empereur François-Joseph apparaît tout aussi invraisemblable. Ceci non seulement parce que certains de ses illustres prédécesseurs jouèrent un rôle important dans la franc-maçonnerie (nous pensons à François, duc de Lorraine et mari de l’Impératrice Marie-Thérèse) ou en sa faveur (Joseph II et Léopold II, ce dernier peut-être maçon), mais aussi parceque François-Joseph était bien loin, hélas, d’incarner l’idéal du prince chrétien (les espoir des catholiques intégraux étaient plutôt tournés vers l’archiduc François Ferdinand, son héritier qui fut, comme par hasard, assassiné par la Secte à Sarajevo, et qui entretenait avec l’Empereur de très mauvais rapports) (24). La politique ecclésiastique de François-Joseph avait été, en effet, positive entre 1850 et 1855 (date du concordat conclu avec le Saint-Siège) lorsqu’il élimina la législation joséphiste de l’Autriche ; mais, après la défaite de 1866, surtout sous le gouvernement du protestant Beust, l’Autriche promulgua toute une série de lois anticatho- liques qui débouchèrent sur la dénonciation unilatérale du concordat, le 30 juillet 1870, et cela par aversion pour la proclamation du dogme de l’infaillibilité pontificale. C’est ainsi que tandis que du monde entier des volontaires accouraient pour défendre Rome et le Pape, le gouvernement autrichien ne leva pas le petit doigt pour défendre Pie IX, mais menaça même de faire schisme. Avec la “Triple Alliance”, l’Autriche-Hongrie liait une alliance militaire avec l’Allemagne et l’Italie, deux puissances qui justement ces années-là s’opposaient vivement à la Papauté, isolant ainsi diplomatiquement le SaintSiège. Pour ce qui est de la “judéo-maçonnerie” (pour utiliser l’expression chère à Mgr Jouin), François-Joseph s’opposa constamment à la politique antijuive du bourgmestre de Vienne, le social-chrétien Karl Lueger, et le gouvernement autrichien n’apporta aucun appui particulier au Congrès anti-maçon de 1896, qui se déroulait pourtant à Trente, terre alors impériale (25). Par contre, dans la brève période allant de 1896 à 1898, la Secrétairerie d’État (donc Rampolla) émit 41 documents contre la “secte néfaste” de la franc-maçonnerie ! (26). Mgr Jouin ne put donc parler à FrançoisJoseph du maçonnisme de Rampolla, et François-Joseph n’eut pas de raison de mettre obstacle à Rampolla pour ce motif… Mais il est des arguments contre la version de l’accusation encore plus solides. Si le cardinal Puzyna avait fait la moindre allusion à tout le Sacré-Collège ou même seulement à quelque cardinal, au fait que Rampolla aurait été maçon, comment s’expliquer l’indignation de tous les cardinaux à l’intervention autrichienne, vue comme une grave atteinte à la liberté de l’Église ? Comment expliquer qu’il obtint encore un grand nombre de voix jusqu’au dernier scrutin ? Comment expliquer le fait que parmi les électeurs les plus convaincus de Rampolla se trouvait un cardinal qui, sous le pontificat de saint Pie X, fut l’un des plus ardents partisans de la politique antimoderniste du Pape, le cardinal Vives y Tuto (27) ? Comment expliquer que le cardinal Sarto lui-même ait vraisemblablement toujours voté, à tous les scrutins, pour le cardinal Rampolla (28) ? De plus : comment s’expliquer la réaction de ce même cardinal Sarto, devenu saint Pie X, lequel, parmi les premiers actes après son élection, n’imposa pas (comme l’écrit Causas), le ser- 16 ment antimoderniste qui date de 1910 et n’a rien à voir avec l’affaire Rampolla, mais condamna par contre solennellement le veto d’exclusive ? Car, quelques mois après le conclave, le 20 janvier 1904, saint Pie X promulguait la constitution apostolique Commissum nobis que je transcris ici intégralement : “La tâche de gouverner toute l’Église, comme il a été établi par Dieu, Nous exhorte sévèrement à nous appliquer de toutes nos forces à ce que, suite à l’intervention d’une puissance étrangère, il ne soit porté en aucune façon préjudice à la liberté que le Christ lui a concédée comme patrimoine commun, et que tant de hérauts de l’Évangile, tant de très saints prêtres, tant d’illustres de Nos Prédécesseurs défendirent par la parole, les écrits, et aussi par l’effusion de leur sang. Sollicités par leur exemple et leur autorité, à peine élevés à la Chaire de Pierre, encore qu’indignes, nous considérons qu’il est de Notre premier devoir Apostolique de faire en sorte que la vie de l’Église puisse s’exprimer de façon totalement libre, étant écartée toute interférence externe, qu’elle soit telle que la voulut le divin Fondateur et que le requiert absolument sa mission suprême. Or si dans la vie de l’Église il est une situation qui exige au plus haut point la liberté, c’est bien sans aucun doute celle qui se rapporte à l’élection du Pontife Romain, en ce que ‘quand il s’agit de décider du chef, il ne s’agit pas seulement d’une partie, mais de tout le corps’ (Grégoire XV, Æterni Patris)… À cette pleine liberté dans l’élection du Pasteur Suprême s’oppose spécialement ce veto politique, manifesté plus d’une fois par les chefs de gouvernement de diverses nations, et par lequel on tente de barrer à quelqu’un l’accès au Souverain Pontificat. Si cela s’est produit parfois, jamais ce ne fut agréé par le Siège Apostolique. Au contraire, à considérer ce qu’ils instituèrent à propos des futurs conclaves, c’est avec une conviction et un zèle hors du commun que les Pontifes Romains s’efforcèrent de repousser l’intervention de tout pouvoir extérieur à l’Assemblée sacrée des cardinaux convoquée pour élire le Pontife. C’est ce qu’attestent les Constitutions ‘In eligendis’ de Pie IV ; ‘Æterni Patris’ de Grégoire XV ; ‘Apostolatus officium’ de Clément XII, et particulièrement ‘In hac sublimi’, ‘Licet per Apostolicas’ et ‘Consultari’ de Pie IX. En vérité, comme l’a enseigné l’expérience, les dispositions établies jusqu’à ce jour pour empêcher le veto politique ou l’Exclusive n’ont pas correspondu aux espérances et, du fait du changement de circonstances de temps, cette intromission est apparue à notre époque encore plus dénuée de tout fondement de raison et d’équité. Par conséquent, en vertu de la charge Apostolique qui Nous est confiée, suivant les traces de nos prédécesseurs, après mure réflexion, avec science certaine et de Notre propre décision, Nous condamnons radicalement le veto politique autrement dit l’Exclusive (comme on l’appelle), même sous forme de simple désir, ainsi que toute intervention et médiation, et Nous établissons qu’il n’est licite à personne, pas même aux chefs d’État, de s’interposer ou d’intervenir sous quelque prétexte que ce soit dans l’opération solennelle qu’est l’élection du Pontife Romain. Par conséquent, au nom de la sainte obéissance, sous la menace du jugement divin et sous peine d’excommunication latæ sententiæ réservée de façon spéciale au futur Pontife, Nous interdisons aux cardinaux de la Sainte Église Romaine, à tous et à chacun en particulier, ainsi qu’à tous les autres participants au conclave, d’accepter la charge, sous aucun prétexte, de la part de tout pouvoir politique quel qu’il soit, de faire connaître le veto dit Exclusive, même sous forme de simple désir, et de révéler le veto dont il a eu connaissance pour une quelconque raison, tant à l’ensemble des cardinaux réunis en Collège, qu’à chaque cardinal en particulier ; et ce tant par écrit que de vive voix, tant directement et de près qu’indirectement et par l’intermédiaire d’autres. Nous voulons que cet interdit soit étendu à toutes les médiations, intercessions citées ainsi qu’à toutes les autres modalités par lesquelles les pouvoirs laïcs de tout grade et tout ordre auront voulu s’immiscer dans l’élection du Pontife. Enfin Nous exhortons vivement les cardinaux de la sainte Église romaine avec les paroles mêmes de Nos Prédécesseurs : en matière d’élection du Pontife, ‘absolument insouciants des intercessions et autres considérations des Princes laïcs (Pie IV, In eligendis ; Clément XII, Apostolatus officium) avec seuls en vue la gloire de Dieu et le bien de l’Église, qu’ils expriment leur suffrage en faveur de celui que, plus que les autres, ils considèrent, dans le Seigneur, idoine à gouverner fructueusement et 17 avantageusement l’Église universelle. Nous voulons en outre que Notre Lettre, en même temps que d’autres Constitutions sur ce même sujet, soit lue en présence de tous à la première Congrégation habituelle qui se tient après la mort du Pontife ; de nouveau après l’entrée en conclave et pareillement, si quelqu’un est élu à l’honneur de la pourpre, après le serment de garder scrupuleusement les normes décrétées dans la présente Constitution. Ce, envers et contre quiconque y est contraire, quand bien même il serait investi d’une dignité spéciale ou très spéciale. Qu’il ne soit donc licite à personne de violer ou, par une téméraire hardiesse, de contredire cette page de Notre interdiction, ordre, déclaration, lien, volonté, admonition, exhortation, commandement. Et si quelqu’un voulait s’y opposer, qu’il sache qu’il encourt l’indignation du Dieu Tout-puissant et de ses saints Apôtres Pierre et Paul. Fait à Rome, à Saint-Pierre, le 20 janvier de l’année de l’Incarnation du Seigneur 1904, première année de Notre Pontificat” (29). Après la lecture d’un semblable document, comment peut-on le moins du monde émettre l’hypothèse que François-Joseph et le cardinal Puzyna aient agi dans l’intérêt de l’Église ? Et comment peut-on offenser Mgr Jouin au point de lui attribuer une complicité avec une violation ouverte des droits et de la liberté de l’Église ? Objection de l’accusation. Alors comment expliquer l’intervention du cardinal Puzyna, et le veto d’Exclusive de l’Autriche contre le cardinal Rampolla ? Une intervention aussi grave ne se justifie-t-elle pas uniquement dans le cas d’une révélation très importante, telle que celle de l’affiliation de Rampolla à la franc-maçonnerie ? Réponse de la défense. Nous avons déjà vu – en citant les paroles de saint Pie X – que le veto d’exclusive était un abus, et non le fruit d’un traité (qui n’a jamais existé) entre le Saint-Siège et l’Autriche. Abus courant cependant, rien moins qu’exceptionnel, et toujours dû à des motifs politiques. Voyons-en quelques exemples dans l’histoire (30). Le cardinal Gianpietro Carafa reçut trois fois l’exclusive de Charles-Quint, Empereur, mais à la troisième il n’en fut plus tenu compte et il fut élu sous le nom de Paul IV (1555). Le cardinal Aldobrandini reçut par trois fois l’exclusive de l’Espagne, et au quatrième conclave il devint le Pape Clément VIII (1592). Le cardinal Pamphili eut l’exclusive du Roi de France Louis XIV, et devint cependant le Pape Innocent X (1644). Le cardinal Chigi avait eu l’exclusive de la France au conclave de 1665 (deux autres cardinaux furent exclus à ce conclave, un par l’Espagne et l’autre par la France), et fut élu comme Pape sous le nom d’Alexandre VII. En d’autres cas, l’exclusive empêcha effectivement l’élection d’un cardinal : le cardinal Paolucci fut exclu par la France, et c’est Innocent XIII qui fut élu ; le cardinal Cavalchini fut exclu par la France, et c’est Clément XIII qui fut élu ; le cardinal Bellisomi fut exclu par l’Autriche, et c’est Pie VII qui fut élu ; le cardinal Severoli fut exclu par l’Autriche, et c’est Léon XII qui fut élu ; le cardinal Giustiniani fut exclu par l’Espagne, et c’est Grégoire XVI qui fut élu ; le cardinal Gaysruck qui apportait le veto de l’Autriche à l’élection du cardinal Mastaï n’arriva pas à temps au conclave et on eut Pie IX… Comme on le voit, le veto d’exclusive était un abus, c’est vrai, mais intervenant hélas presque à chaque conclave, et certes pas parce que l’exclu était en odeur de francmaçonnerie. Le cas du cardinal Rampolla ne semble pas différent de celui de tant d’illustres prédécesseurs exclus avant lui pour des motifs purement politiques. En effet, le motif de l’exclusion de Rampolla est clairement à rechercher dans l’orientation politique qu’en tant que Secrétaire d’État de Léon XIII, il donna à la diplomatie vaticane. L’attitude intransigeante de Léon XIII et du cardinal Rampolla sur la question romaine (intransigeance augmentée justement avec l’accession de Rampolla à la secrétairerie d’État en 1887 et sa dissension avec l’homme d’État – franc-maçon – Crispi) opposait le Saint-Siège au gouvernement italien qui avait usurpé Rome et l’État de l’Église. La Triple Alliance formée en 1882 entre Allemagne, Italie et Autriche-Hongrie, isolait le Vatican, qui tendait donc nécessairement à soutenir la double alliance entre France et Russie. D’où, entre autres, la tentative (manquée) d’un accommodement avec le gouvernement français (le fameux Ralliement à la République de 1890) et les rapports difficiles avec l’Autriche dans les zones d’influence russe comme la Pologne (partagée à l’époque entre Russie, 18 Autriche et Allemagne) et les Balkans (31). Émile Poulat voit la cause du veto dans les questions complexes de Pologne (et le cardinal Puzyna était en effet polonais) : “il est aujourd’hui reconnu que, lors du conclave où fut élu Pie X, le veto opposé à Rampolla par l’empereur d’Autriche émanait des évêques polonais (cf. Mgr Walerian Meysztowicz, qui leur en fait gloire, La Pologne dans la chrétienté, Paris, Nouvelles Éditions Latines, 1966, pp. 136-139)…” ; le nationalisme à tendance mystique des Polonais ne supportait pas la politique du Saint-Siège vis-à- vis de la Russie et s’appuyait, contre l’Empire du Tsar, sur l’Autriche (32). Certains ont affirmé qu’en réalité, avec le veto, l’Autriche entendait rendre service à l’Allemagne (c’est ce que pensait le cardinal Mathieu) ou plutôt à l’Italie, qui craignait la politique intransigeante du vieux Secrétaire d’État (33) ; mais Benoît XV, qui était comme un fils spirituel de Rampolla, dit à Filippo Crispolti que le veto était au contraire une “manigance autrichienne” ; “il me dit explicitement que [l’Autriche] reprochait au cardinal [Rampolla] d’avoir trop excité l’esprit slave (…). Elle lui reprocha par ailleurs de ne pas avoir immédiatement rappelé le nonce Agliardi après des paroles que ce dernier aurait dites à Budapest (…). Mais depuis que Revertera, l’ambassadeur près le Saint-Siège, pour rapprocher la société noire [papale] et la blanche [philoitalienne] et avec son manque de tact proverbial, fit en sorte que par surprise se trouvèrent ensemble à table le cardinal Rampolla et l’ambassadeur anglais près le Quirinal (34), ce dont se plaignit à juste titre le cardinal, Revertera alimenta en Autriche un esprit de dépit contre lui…” (35). Les documents diplomatiques français confirment les paroles de Benoît XV à Crispolti, à propos du soutien apporté par le cardinal Rampolla aux aspirations indépendantistes des slaves catholiques (36) croates et slovènes. Même pour Adrien Loubier (Bonnet de Viller), qui croit pourtant fermement au maçonnisme de Rampolla (p. 93), la question slave est la véritable cause du veto autrichien contre lui (37). En somme, si divers (et convergents) qu’aient pu être les motifs du veto contre Rampolla, ils semblent avoir été tous d’ordre politique ; une présumée affiliation à la maçonnerie du cardinal comme motif du veto est par contre à exclure, Le cardinal Jan Puzyna vu ce qui est écrit précédemment. Dernier argument de la défense. Un dernier argument le confirme : saint Pie X laissa au cardinal Rampolla la présidence de la Commission biblique pontificale (le cardinal se démit de la charge en 1908) après quoi, en 1908 précisément, le cardinal fut nommé Secrétaire du Saint-Office, Secrétaire de la Sacrée Congrégation pour les évêques ; il fut aussi nommé à d’autres charges de Curie (en 1910) ; il est impensable que saint Pie X ait pu nommer à de tels offices de la Curie romaine un prélat notoirement francmaçon. Second et troisième arguments : les témoignages d’un prêtre et d’un évêque français, recueillis par Félix Lacointa L’accusation. Présentons d’abord le témoin d’accusation à charge. Il s’agit de Félix Lacointa. Né à Toulouse en 1870, Lacointa était un valeureux journaliste catholique intégral (38), ami du prêtre Emmanuel Barbier, directeur de La critique du Libéralisme, lequel reçut de saint Pie X éloges et encouragements bien mérités. De 1902 à 1927, Lacointa dirigea le Bloc catholique, qui, en 1927, prit (dut prendre, nous verrons pourquoi) le nom de Bloc antirévolutionnaire. C’est précisément ce périodique qui publia, en 1929, les nouvelles qui constituent les second et troisième chefs d’accusation contre le cardinal Rampolla. Dans le numéro de février Lacointa rapporte une rencontre qu’il eut avec l’évêque de Montauban, Mgr Marty. En cette occasion, le prélat français lui dit : “lors de la visite ‘ad 19 limina’ qu’il fit à Rome, quelque temps après la mort de l’ancien Secrétaire d’État de Léon XIII, il fut appelé par un cardinal – il vit encore, nous ne le nommerons pas, afin de lui éviter tout ennui – qui lui raconta avec force détails qu’à la mort du cardinal Rampolla, on découvrit dans ses papiers la preuve formelle de sa trahison. Ces documents accablants furent portés à Pie X ; le saint Pontife en fut atterré, mais voulant préserver du déshonneur la mémoire du prélat félon et dans le but d’éviter un scandale, il dit très ému : ‘Le malheureux ! Brûlez !…’ Et les papiers furent jetés au feu en sa présence” (39). Dans le numéro de juin-juillet de cette même revue, Lacointa publie un nouveau témoignage, d’un prêtre français cette fois, dont il ne donne pas le nom. Le prêtre en question avait écrit à Lacointa pour lui raconter une visite qu’il avait faite en 1907 à l’abbaye d’Einsiedeln, avec trente autres prêtres français. Le cardinal [Rampolla] était en villégiature depuis deux mois à Einsiedeln, et les prêtres demandèrent à être reçus. “Il nous parla de l’héroïsme sublime des prêtres français victimes, eux, de la Séparation [de l’Église et de l’État] semblant nous dire que s’il n’avait pas été écarté de la Chaire de Saint Pierre, nous ne serions pas tombés dans cette affreuse situation, due à Pie X. Enfin, frappé par cet air de grand seigneur, je voulus écrire une brochure relatant tous les détails de cette visite. Je demandais à un libraire catholique s’il ne serait pas possible d’obtenir pour cette brochure une courte préface de l’Éminentissime cardinal. Quelle ne fut pas ma surprise d’entendre ce libraire me dire à brûle-pourpoint : ‘Inutile ! Il n’en vaut pas la peine. Tous les quinze jours, il va à la loge de Zurich !’ Je mis cette boutade sur le compte d’une rancune de libraire et je laissai mon projet de brochure. Cette parole m’est seulement revenue depuis la rumeur qui court sur le cardinal dans divers organes et je la donne pour ce qu’elle vaut. F.A., prêtre” (40). La défense. À première vue, les deux témoignages sont impressionnants. Sont-ils tout aussi décisifs ? Nous allons voir par la suite ce qu’il faut penser de l’autorité de Félix Lacointa en la matière, Lacointa étant au fond la seule source directe de ces deux récits (nous ne savons pas si, par exemple, Mgr Marty a jamais publiquement confirmé ce que Lacointa lui attri- bue). Cependant il s’agit, justement, non de témoignages directs, mais de relato : sont rapportées des choses dites par d’autres, et ce, bien des années après les faits (les articles sont de 1929, les faits remonteraient à 1907 et à une date postérieure à la mort de Rampolla en 1913). Le témoignage du prêtre anonyme n’a certes pas grande valeur, vu que nous ne savons rien sur le mystérieux libraire en question. Plus sérieux est le récit “en provenance du Vatican” qui remonterait à un cardinal [anonyme pour Lacointa, Merry del Val pour La Franquerie, lequel Merry del Val fut justement consacré évêque par Rampolla], par l’intermédiaire du témoignage d’un évêque. Mais voyons, à partir des propres paroles d’un Pape, combien il est facile que soient déformées des confidences, et ce dans tous les milieux y compris ceux du Vatican. Durant la première guerre mondiale, Benoît XV accepta de se faire interviewer par un journaliste français, un certain Latapie, du quotidien La Liberté. Il ressortait de l’interview (effectivement accordée) que le Pape aurait fait des déclarations qui, spécialement dans un climat de guerre, parurent gravissimes, en tant que favorables aux puissances des Empires centraux (Autriche et Allemagne). Le scandale en France et ailleurs fut énorme. Benoît XV, le 11 juillet 1915, écrivit alors au cardinal Amette, archevêque de Paris, qui, le 25 juin, avait rapporté au Souverain Pontife la “douloureuse émotion” causée en France par l’interview à La Liberté : “Vous savez que Nous refusons toute autorité à M. Latapie qui n’a reproduit, dans son article, ni Notre pensée, ni Notre parole et qui a voulu le publier sans aucune révision ou autorisation de Notre part, malgré la promesse qu’il en avait faite. Du reste, il n’a pu certainement échapper à votre perspicacité que Notre pensée véritable devait être tirée des actes publics et officiels du Siège apostolique, et non des récits ou relations privées d’entretiens avec Nous ; la passion politique ou les préventions individuelles font souvent interpréter les paroles entendues qui, ensuite, passant de bouche en bouche, prennent des proportions fantastiques” (41). Le Marquis Crispolti, ami intime de Benoît XV et qui fut reçu en audience immédiatement après le journaliste Latapie, raconte qu’en soulignant certaines confidences faites, et en omettant des 20 détails qui changeaient le sens de ce qui fut dit (42), les paroles du Pape purent être déformées même en toute bonne foi. Les confidences parvenues du Vatican au journaliste Lacointa non directement mais indirectement, ne peuvent-elles avoir été déformées comme le furent les paroles adressées directement par Benoît XV au journaliste Latapie ? (Voir appendice). De ce qui vient d’être dit une confirmation est donnée par le document confidentiel écrit à l’approche du conclave par Mgr Umberto Benigni, fondateur du Sodalitium Pianum, l’association antimoderniste si souvent bénie par saint Pie X, conclave où sera élu justement Benoît XV en 1914. Mgr Benigni y dressait la liste de tous les cardinaux qui auraient pu prendre part au conclave (la santé de saint Pie X déclinait lorsque la liste fut rédigée le 27 août 1913) et donnait pour chacun un jugement, sans mâcher ses mots, tout à fait dans le style Benigni. Arrivé au cardinal Rampolla, qui ne jouissait évidemment pas de la sympathie de notre Monseigneur, il écrivait : “homme supérieur, esprit plein d’illusions, rêveur, le Jules Verne de la politique ecclésiastique, le Crispi du gouvernement papal, mégalomane” (43). Ce n’était certes pas des compliments ! Et pourtant Mgr Benigni considérait comme probable l’élection de Rampolla, lequel mourut par contre au mois de décembre suivant, avant saint Pie X. Mais pas un mot sur une affiliation maçonnique du cardinal… Et Mgr Benigni, ennemi expert de la franc-maçonnerie, avait travaillé longtemps à la Secrétairerie d’État, il connaissait les secrets de la Curie et avait à sa disposition, comme l’on sait, une structure d’“espionnage” des ennemis internes (modernistes, démocrates-chrétiens) et externes (juifs, maçons, communistes) de l’Église. Si vraiment il y avait eu je ne dis pas des certitudes mais seulement des bruits de trahison, n’aurait-il pas été au courant ? D’autant plus que, dans la même liste, il ne craint pas de mettre à côté du nom du cardinal Agliardi les fatidiques “trois points” suivis d’un point d’interrogation, signe de suspicion d’affiliation maçonnique pour ce cardinal qui fut effectivement un grand et influent protecteur des modernistes (44). Mgr Benigni suspecta donc Agliardi, pas Rampolla ; jamais non plus, après la mort de Rampolla, il ne fit allusion à l’épisode raconté par Lacointa ou à des faits similaires… Et Mgr Benigni n’était certainement pas le type à cacher ou à brûler des documents qui auraient démontré l’affiliation maçonnique d’un prélat ou même d’un cardinal (à plus forte raison si le cardinal en question était vénéré comme un maître par ceux qui décrétèrent la fin de son Sodalitium Pianum, autrement dit Benoît XV et le cardinal Gasparri) ! Quatrième argument : la revue The Equinox démontrerait que Rampolla faisait partie de l’Ordo Templi Orientis (O.T.O.) du mage Aleister Crowley (la “Grande Bête 666”) L’accusation. L’accusation fut publiée initialement par deux revues antimaçonniques : La Libre parole (1er juillet 1929) ( 45) et Le bloc antirévolutionnaire (juinjuillet 1929) (je ne sais pas exactement laquelle des deux revues eut la priorité sur l’autre, même si comme nous l’avons vu, Le bloc avait déjà commencé sa campagne avec un premier article en février 1929). Les deux publications font référence à une revue The Equinox, organe officiel de l’Ordo Templi Orientis, publié à l’époque aux États-Unis, à Detroit (46). Le numéro de mars 1919 (parvenu entre les mains des rédacteurs des deux revues antimaçonniques françaises seulement dix ans après, donc en 1929), publie à la page 199 une liste “comprenant les principaux affiliés qui l’ont illustré le plus récemment”. Cette liste, qui “fait partie du Manifeste officiel de l’O.T.O. signé par L. Bathurst, IX, grand secrétaire général”, inclut 14 noms, parmi lesquels celui du “cardinal Rampolla”. “Notre accusation – conclut Felix Lacointa, directeur du Bloc antirévolutionnaire – est donc justifiée : le Secrétaire d’État de Léon XIII a fait partie d’une des plus hautes Loges connues”. “Ainsi encadré par le témoignage du grand Pie X et celui de l’humble pèlerin d’Einsiedeln, le nom découvert dans l’annuaire de The Equinox devient une preuve décisive : j’ai le droit d’affirmer que le Secrétaire d’État de Léon XIII appartenait bien à une des plus hautes loges de la Secte” (47). Dans un article ultérieur du Bloc antirévolutionnaire (année 1931) intitulé Le F Rampolla (suite), Félix Lacointa répondant aux premières objections soulevées par ses articles contre le cardinal Rampolla, parle du rôle dans l’O.T.O. d’Aleister Crowley “le chef bien connu des maçons adorateurs de 21 Satan” (p. 38) et précise que la liste des noms qui mettait celui du cardinal Rampolla parmi les affiliés de l’O.T.O. les plus illustres, était une liste “de noms des affiliés morts dans les cinq années qui séparent un volume de celui qui lui succède” (p. 40). Les références précises et détaillées au volume de l’O.T.O. données par les deux revues antimaçonniques, le caractère réservé sinon secret de la revue The Equinox, l’affirmation catégorique du Manifeste de l’Ordre de 1917 publié par The Equinox en 1919, démontrent que Rampolla était non seulement franc-maçon mais sataniste. La défense. Même si – à ma connaissance – les partisans actuels de l’affiliation maçonnique de Rampolla ne sont pas en possession du volume de The Equinox (et il serait très intéressant de le consulter. Dans le fond Giantulli-Vannoni de Verrua Savoia je n’ai jusqu’ici repéré que le volume I, n° VII, année VIII, de mars 1912, imprimé à l’époque à Londres), on ne peut avoir de doutes raisonnables sur le fait que les rédacteurs de La Libre parole et du Bloc antirévolutionnaire l’aient consulté et copié, comme ils l’affirment eux-mêmes ; par ailleurs, la revue The Equinox, en tant que revue de l’O.T.O. (et de l’A.A.) a certainement existé. La R.I.S.S. elle-même publia intégralement (n° 5, 1er mai 1929, partie occultiste, pp. 137-145) le Manifeste de l’O.T.O. et la liste des “adeptes”. De plus, de nos jours, n’importe qui peut lire le célèbre “Manifeste” sur Internet, par exemple à cette adresse: http://lib.oto-usa/libri/liber0052.html ; dans ce texte, considéré comme le “Liber LII” des œuvres de Crowley, est donnée la fameuse liste des personnages ayant appartenu à l’O.T.O., liste dans laquelle apparaît effectivement le nom du cardinal Rampolla. Ceci dit, Félix Lacointa, et ceux qui avec lui et après lui ont donné plein crédit aux affirmations de The Equinox, auraient dû être un peu plus prudents, et mieux exercer leur esprit critique. Et ce, pas seulement parce que ce ne serait pas la première fois qu’une revue maçonnique, à usage interne seulement [en réalité, The Equinox, était en vente publique], attribue à des personnalités catholiques une affiliation maçonnique inexistante (nous avons vu les cas des Papes Benoît XIV et Pie IX). Voilà qui a justement été déjà soulevé par le même Henri Coston : “Qu’y avait-il de vrai dans cette affaire ? Il est indiscutable que le document cité existait. Félix Lacointa et le rédacteur de la Libre Parole l’avaient eu entre les mains. Il s’agissait d’un petit cahier imprimé [Pour Lacointa un volume d’au moins 199 pages… et le numéro en notre possession en a plus de 400 !] portant la signature de Bathurst, Grand Secréraire Général. Etait-ce un simple canular ? [Crowley] avait-il approché Rampolla comme il a été dit ? Aurait-il alors séduit le futur cardinal au point de lui faire oublier ses devoirs envers l’Église ? Ou bien l’avait-il inscrit d’office dans la liste des fondateurs de l’O.T.O. sans le prévenir ? Ou encore, simple mythomane, avait-il porté sur le document le nom d’un dignitaire de l’Église renommé pour décider d’autres personnalités religieuses ou laïques, à faire partie de sa société ? Il est impossible de le dire” (48). Encore une fois Henri Coston, tout en se faisant l’écho d’une nouvelle diffusée à son époque par un quotidien dont il deviendra directeur (La Libre parole), est loin d’avoir les certitudes du bon Lacointa. Mais ce doute un peu générique augmente encore si l’on examine de près le texte de l’O.T.O. tel qu’il fut publié par Lacointa. Il présente, en effet, d’insurmontables incohérences qui rendent la source absolument pas digne de foi. En effet Lacointa écrit que cette liste de 14 noms, incluse dans le Manifeste de l’O.T.O. de 1917 publié par The Equinox en 1919, contient les noms d’illustres personnalités appartenant à l’O.T.O. et morts dans les cinq dernières années. Ces données (appartenance à l’O.T.O. et mort dans les cinq dernières années) sont absolument impossibles pour un bon nombre des 14 personnalités citées. La source, autrement dit The Equinox, n’est donc, salvo meliore judicio, absolument pas digne de foi. Avant de le démontrer, voici la liste des noms telle que la rapporte Lacointa, cité par Sous la bannière (p. 7) : Gœthe Sir Richard Payne Knight Sir Richard F. Burton Forlong Dux Le roi Louis de Bavière Richard Wagner L. von Fischer Frédéric Nietzsche Hargrave Jennings Karl Kellner Eliphas Levi Franz Hartmann Cardinal Rampolla Papus (Dr Encausse) 22 Tous ces personnages auraient été membres de l’O.T.O. et seraient morts, selon Lacointa, dans les cinq années précédant 1917 ou 1919 (donc entre 1912/1914 et 1917/1919). Pour vérifier l’exactitude de ces données il suffit alors de contrôler les dates de la mort des 14 personnalités en question, ainsi que la date de fondation de l’O.T.O. Commençons par ce dernier point. Il est évident qu’une personne ne peut avoir été membre de l’O.T.O. si elle est morte avant la fondation de cette secte occultiste. Or, il est admis par les sources mêmes de l’O.T.O. (49) que l’Ordre fut fondé, sur le papier, par l’industriel autrichien Carl Kellner (1850-1905) en 1896, mais qu’en réalité l’Ordre maçonnico-templier ne fut présenté comme tel qu’en 1904 et ne commença à fonctionner effectivement qu’entre décembre 1905 et janvier 1906 par les soins du maçon et théosophe allemand Théodore Reuss (1855-1923). Edward ‘Aleister’ Crowley (1875-1947), la “Grande Bête 666” n’y entra que vers 1911-1912, et bien que n’en ayant pas été le fondateur, en devint rapidement le principal représentant. En pratique, les membres de l’Ordre se consacraient à la magie sexuelle. À l’O.T.O. correspondait également une structure “religieuse” fondée par les mêmes personnes, l’“Église gnostique catholique”, au sein de laquelle était et est toujours célébrée une “messe obscène” dans laquelle se trouve un “Canon” avec une liste de personnages particulièrement “vénérables”, liste ayant une parenté étroite avec la liste des 14 noms rapportés par Lacointa ; nous y reviendrons. Dans la liste des œuvres de Crowley, la “messe gnostique” est désignée comme le “Liber XV”, et se trouve elle aussi sur Internet (à la barbe du secret initiatique !) à l’adresse suivante : www.hermetic.com /sabazius/gmnotes.htlm Pour que les 14 personnages de la liste se trouvent tous effectivement membres de l’O.T.O., il est nécessaire qu’ils aient été tous encore vivants en 1904, ou du moins en 1895. Or, ceci est absolument impossible pour Gœthe, qui était effectivement maçon, mais mourut en 1832 ; pour Nietzsche, farouche antichrétien, mais qui devint fou en 1889 (et mourut en 1900) ; pour Sir Richard Payne Knight, mort en 1824 ; pour Sir Richard Burton, célèbre explorateur, mort en 1890 ; pour Hargrave Jennigs, oc- cultiste, mort lui aussi en 1890 ; pour Richard Wagner, le célèbre musicien, décédé en 1883 ; pour le mage occultiste Eliphas Levi, pseudonyme de l’ex-abbé AlphonseLouis Constant, décédé en 1875 ; pour le roi fou de Bavière, Louis II, protecteur de Wagner, qui se suicida en 1886. Étaient par contre membres de l’O.T.O., parmi les noms de la liste, Carl Kellner († en 1905) qui en fut le concepteur ou le pionnier ; Franz Hartmann (1838-1912) ; Papus (le docteur Gérard Encausse) (1865-1916). Forlong Dux (autrement dit James George Roche Forlong) étant mort en 1904, aurait pu, en théorie, faire partie de l’O.T.O., comme Rampolla (décédé en 1913) ; de von Fischer, les membres actuels de l’O.T.O. eux-mêmes ne connaissent pas l’identité de façon certaine. Certes le fait que Rampolla soit inséré dans cette liste de membres de l’O.T.O. ne peut rien prouver, puisqu’au moins 8 membres de la liste étaient dans l’impossibilité d’en faire partie ! Mais alors, que signifie cette liste, si elle a un sens ? Il ne peut s’agir de personnes affiliées à l’O.T.O. (nous avons vu que c’est impossible pour bon nombre d’entre elles) ni d’affiliés morts dans les cinq années précédant la publication de la liste (parmi les véritables membres, il nous faudrait biffer Kellner mort en 1905, et Forlong, décédé en 1904). Le texte du Manifeste de l’O.T.O., que Lacointa (et donc Sous la bannière) n’a reproduit que partiellement, nous donne un début d’explication. Après avoir prétendu que l’O.T.O. inclut bien 18 sociétés initiatiques (parmi lesquelles les Chevaliers de Malte et ceux du Saint Sépulcre) (point n° 1 du Manifeste), Crowley présente (point n° 2 du Manifeste) une double liste de membres de l’O.T.O., selon ses dires : une première, de ceux – dans des temps plus reculés – qui constituèrent les assemblées de l’O.T.O. (In more remote times, the constituent originating assemblies of the l’O.T.O. included such men as : et suit une liste de 54 noms) [En des temps plus reculés, les assemblées constituantes originaires de l’O.T.O. incluaient des membres tels que :] puis une autre, celle que nous connaissons déjà et composée des 14 noms, Rampolla inclus, de ceux qui ont illustré “récemment” l’association ésotérique. Nous avons déjà vu que huit de ces personnages ne peuvent être considérés 23 comme membres de l’O.T.O., pour une simple raison d’état civil. Cependant le problème est résolu si, maçonniquement, on considère que l’O.T.O. n’est pas né en 1906, mais dans la nuit des temps. C’est ce que veut faire croire Crowley, puisque les “fondateurs de l’O.T.O.” (les 54 de la première liste) sont les personnages suivants : Fohi, Lao Tseu, Siddartha [le Bouddha], Krishna, Tahuti, Ankh-f-khonsu, Herakles [Hercule], Orpheus, Vergilius [le poète Virgile], Catulle, Martial, Apollon de Tiana [un pythagoricien], Simon le Magicien, Manès, Basilide, Valentin, Bardesanes, King Wu, Christian Rosenkreutz [l’ancêtre mythique des Rose-Croix], Ulrich von Hutten, Paracelse, Michael Maier, Jakob Boehme, Francis Bacon, Andreä [le fondateur des Rose-Croix], Robertus de Fluctibus [Robert Fludd], Chau, Saturne, Dionysos, Amfortas, Hippolyte [il s’agit de saint Hippolyte !], Merlin [l’Enchanteur de la saga de la table ronde], Arthur [Le Roi Arthur !], Titurel, Percivale [Parsifal], Mosheh [Moïse], Odyssée [Ulysse], Mohammed [Mahomet], Hermes, Pan, Dante [Alighieri], Carolus Magnus [Charlemagne], William de Schyren, Frederick of Hohenstaufen [Barberousse], Roger Bacon, Jacobus Burgundus Molensis [Jacques de Molay, le dernier grand maître des Templiers], Ko Hsuen, Osiride, Melchizédech, Khem, Menthu [divinités égyptiennes !], Johannes Dee, Sir Edward Kelly, Thos, Vaughan, Elias Ashmole, Comte de Chazal, Sigismund Bacstrom, Molinos [le célèbre hérétique, auteur du quiétisme]. Il est évident que tous ces personnages du passé n’ont jamais fait partie de l’O.T.O., d’autant qu’un grand nombre d’entre eux, comme les divinités païennes romaines, grecques, égyptiennes ou orientales, n’ont même jamais existé. On pourrait en rire et dire que Rampolla est franc-maçon comme Moïse, Charlemagne, ou Merlin l’Enchanteur ! On comprend pourquoi Lacointa, dans son article de 1929, se garde bien de reproduire cette première liste, qui jette le ridicule aussi sur la seconde, qu’il publie par contre à cause du nom de Rampolla. Dans l’article suivant du Bloc antirévolutionnaire (celui de 1931), dans lequel Lacointa répond aux premières objections, il ne peut par contre éviter de parler au moins un peu de cette première liste extravagante de personnages my- thiques ou réels qui vont de la préhistoire au XVIIème siècle. Lacointa, à l’époque, répondit ainsi : “il ne faut rien connaître des pratiques et des habitudes maçonniques pour ne pas savoir que ce sont là des noms de guerre, des pseudonymes sous lesquels étaient cachés les noms de certains adeptes (tel fut le cas notamment de Joseph de Maistre qui se laissa affilier à une époque où le secret de la Secte n’était pas encore percé à jour). ‘Cette coutume, m’écrit un éminent et vénérable correspondant, ne fait que donner plus de poids à la révélation des noms des affiliés morts dans les cinq années qui séparent un volume de celui qui lui succède.’ C’est dans cette catégorie qu’a paru le nom du cardinal Rampolla” (p. 40). La réponse de Lacointa (et en partie celle de la R.I.S.S., 1.c., p. 139, note 4) n’est pas satisfaisante. En effet, le véritable fondateur de l’O.T.O. figure dans la seconde liste (c’est Kellner) ; 8 membres sur 14 de ladite liste sont morts avant la fondation de l’O.T.O. : si les noms de la première liste sont des pseudonymes, pourquoi pas également ceux de la seconde liste ? Enfin, le sens de ces deux listes nous est expliqué par le Canon de la Messe gnostique, œuvre de Crowley (Liber XV : Ecclesiæ Gnosticæ Catholicæ Canon Missæ). Il s’agit d’une liste de 70 noms – qui se trouve en son entier sur Internet et en partie dans diverses publications (50) – et qui correspond presque exactement aux deux listes du Manifeste de 1919 : un détail frappe immédiatement : le nom du cardinal Rampolla a disparu. À part le nom de Rampolla, les 13 autres noms de la liste publiée par Lacointa se retrouvent dans le “canon de la messe gnostique” ( 51), mais avec un très grand nombre de noms de la première liste, sur laquelle quelques-uns ont été rayés, et quelques autres ajoutés (les deux listes du Manifeste comptent 68 noms, le Canon environ 70). Or, le canon de la “messe gnostique” ne présente pas ces quelques 70 personnages comme des affiliés à l’O.T.O. (comme dans le Manifeste) mais comme des “saints” de l’Église Gnostique Catholique. Un examen de ce canon (et donc aussi des listes du Manifeste) nous fait comprendre le motif de cette insertion de personnages si différents par Crowley… Il s’agit de personnes (mythiques, ou qui ont existé réellement) ayant influencé ou im- 24 Couverture de la Rivista Antimassonica concernant le congrès antimaçonnique international de Trente de 1896 pressionné Crowley lui-même : “le célèbre voyageur anglais Sir Richard Francis Burton, qui l’avait fasciné dans sa jeunesse et dont il tirera divers jugements historiques” (Introvigne), ou encore Rabelais, auquel il prit l’idée de l’abbaye de Thélème, Eliphas Levi, dont Crowley croyait être la réincarnation, étant né l’année de sa mort ( 52). C’est ainsi que Crowley insère des noms de divinités, d’écrivains et de philosophes païens, orientaux et occidentaux, spécialement s’ils sont lascifs ; des représentants de l’idéal gibelin impérial médiéval (Charlemagne, Barberousse, Dante) ; de ceux (littéraires) du cycle chevaleresque du Graal (Arthur, Merlin, Parsifal). Son ami Reuss n’est-il pas un chanteur d’opéra qui a connu Wagner ? Et voilà que sont inscrits parmi les Saints (et à l’O.T.O.) Wagner luimême et son protecteur Louis de Bavière. Il y a les Rose-Croix, depuis le mythique Rosenkreutz jusqu’au véritable Andreas, et les nombreux alchimistes, rose-croix et francs-maçons anglais du XVIIème siècle. Ne manquent pas les anciens gnostiques authentiques (Simon le Magicien, Basilide, Valentin, Manès, Bardesanes) et même un Saint (saint Hyppolite), ainsi qu’un Pape (Alexandre VI) pour des motifs évidents. Il y a le Grand Maître des Templiers (l’O.T.O. prétend être un Ordre Templier). Il s’y trouve des occultistes en tous genres, mais Crowley est aussi poète et artiste, ce pour quoi il insère par exemple dans sa liste Paul Gauguin. Il figurera carrément lui-même deux fois parmi les “Saints”. Une fois en tant que Crowley, et une en tant que To Mega Thérion (La Grande Bête) : une seule fois ne lui suffisait pas. Et il est même, en fait, présent plusieurs autres fois, puisqu’il croyait être la réincarnation d’Ankh-f-Konsu (un de la liste) prêtre thébain aux temps de la XXVIème dynastie, de Ko-Hsuan, disciple de Lao Tseu, de Mahomet, d’Alexandre VI, d’Eliphas Levi et de qui sait qui encore (53). Sans aucun doute, du moins pour un certain laps de temps, la figure du cardinal Rampolla dut fasciner Crowley (et c’est un argument pour l’accusation) étant donné qu’il l’inséra dans le Manifeste pour le rayer ensuite immédiatement du Canon de la “messe”. Nous ne pouvons cependant pas savoir pourquoi il l’inclut et pourquoi il l’exclut ; ce qui est certain, c’est qu’on ne peut absolument pas se fier à une liste enfantée par le cerveau malade de Crowley, liste on ne peut plus fantaisiste ou mythologique, et c’est peu dire ! C’est aussi la conclusion à laquelle arrivera la R.I.S.S., comme nous allons bientôt le voir… Cinquième argument : le dossier de Mgr Jouin cité par le Marquis de la Franquerie L’accusation. Voici le témoignage d’André Le Sage, qui signait ses livres Marquis de la Franquerie (1901-1992) : “Mgr Jouin avait eu en mains l’affiliation du cardinal Rampolla et tout un dossier le concernant. Il chargea le Rédacteur en Chef de la ‘Revue Internationale des Sociétés Secrètes’ – qu’il avait fondée et dirigeait – d’aller montrer ce dossier aux évêques français susceptibles de comprendre la gravité de la chose. L’archevêque de Tours, Monseigneur Albert Nègre, précisa certains points importants à son visiteur concernant une autre forfaiture, celle du cardinal Antonelli, Secrétaire d’État de Pie IX, lors de la guerre contre le Piémont. 25 L’évêque de Montauban, Monseigneur Marty, un grand évêque qui n’a rien à voir avec l’actuel archevêque de Paris, confirma la trahison du cardinal Rampolla [voir le troisième argument, rapporté par Lacointa, que nous avons déjà examiné, n.d.a.]” (54). Le témoignage du Marquis de la Franquerie (témoignage direct, car il était le rédacteur en chef de la R.I.S.S. en 1929), collaborateur de Mgr Jouin, démontre que même le prélat français, ennemi expert et documenté de la franc-maçonnerie, était convaincu de la réalité de l’affiliation maçonnique du cardinal Rampolla, et basait sa conviction sur tout un dossier. La défense. Qu’y a-t-il de certain et d’indiscutable à ce sujet ? Les éléments suivants : Le Marquis de la Franquerie était effectivement rédacteur en chef de la R.I.S.S. (en 1929) et collaborateur de Mgr Jouin (même si à l’époque il n’était pas Marquis). Toutefois, ni Mgr Jouin ni sa revue (la R.I.S.S) n’ont jamais écrit une seule ligne sur la présumée affiliation maçonnique du cardinal. Ou plutôt, ils l’ont démentie. En effet, lorsqu’il publie la fameuse liste de l’O.T.O. (le 1er mai 1929, p. 139, note 5) A. Tarannes écrit, remplaçant le nom du cardinal par ses initiales C…R… “nous supprimons ici le nom d’un haut personnage ecclésiastique, l’allégation toute gratuite de sectaires sans scrupules ne pouvant constituer aucune charge contre personne au monde”. Le Marquis de la Franquerie n’a jamais publié le dossier en question, ni diffusé, à propos du cas Rampolla, d’autres informations que celles déjà divulguées par Félix Lacointa, sauf, et nous en parlerons, celles relatives à la fondation, par le cardinal, d’une arrière-loge au Vatican. On peut en conclure, avec vraisemblance, qu’aucune autre donnée n’a jamais été diffusée par le Marquis de la Franquerie sur le cas Rampolla parce que le fameux dossier ne devait pas contenir d’autres informations que celles diffusées par Lacointa et déjà examinées, ce qui semble confirmé par la date à laquelle Mgr Jouin aurait constitué le fameux dossier (“vers 1930”, dit le Marquis dans une autre conférence, c’est-à-dire tout de suite après la publication des articles de Lacointa) (55). Autrement, La Franquerie n’aurait pas manqué dans les nombreuses conférences qu’il donna durant de longues années sur la question, d’apporter d’autres arguments à l’accusation. Henri Coston, grand expert lui aussi des questions maçonniques, et qui n’a jamais manqué de parler du cas Rampolla se garde toujours de parler du témoignage tardif de La Franquerie qui, nous l’avons vu, est en désaccord avec ce qu’écrit la R.I.S.S. elle-même sur la question ! La prudence de Coston n’est pas sans fondements… En effet, je pense qu’il est licite d’avoir quelque doute sur la crédibilité de notre auteur. Nous avons pour le Marquis de la Franquerie toute l’estime et le respect dus à qui nous a précédés dans la lutte contre la franc-maçonnerie et le modernisme : son curriculum nous donne l’assurance qu’il fit partie de cette honorable “vieille garde”. J’ai eu moi-même l’occasion de faire sa connaissance il y a désormais bien longtemps, en 1975, et il n’est pas dans mes intentions de le dénigrer ou de mettre en doute sa bonne foi. Au cours de sa longue activité d’écrivain et d’homme d’action, il a reçu les félicitations de cardinaux, d’évêques et de théologiens, y compris le Père Garrigou Lagrange, Mgr Lefebvre et le Père Guérard des Lauriers. Ceci n’empêche pas que parfois, on puisse mettre en doute sa pleine crédibilité. Lorsqu’il s’agit – comme dans notre cas – d’un témoignage de relato, il est indispensable d’évaluer la fiabilité du témoin et son sens critique dans le tri des sources. Or c’est justement là qu’est, souvent, le point faible de notre auteur. La Franquerie est connu, par exemple, pour avoir soutenu dans plusieurs de ses œuvres l’ascendance davidique des Rois de France et la venue imminente d’un Grand Monarque et d’un Saint Pape de la même souche royale, tous deux descendants de Louis XVII, lequel ne serait pas mort au Temple, mais aurait survécu. La théorie selon laquelle les Rois de France descendent de la Maison de David n’a pas échappé au cardinal Lustiger (lequel cite notre Marquis) (56) et a nourri les fantaisies malsaines d’un Dan Brown, mais elle n’a évidemment pas le moindre fondement historique. À l’appui de ses deux thèses (ascendance davidique, Grand Monarque), le Marquis cite une série d’apparitions privées jamais approuvées par l’Église (et souvent 26 apocryphes), et n’hésite pas à avaliser “l’autorité” de Nostradamus, magicien et marrane (tant du côté paternel que maternel), de Fernand Crombette (1880-1970), de Gaston Bardet (57), dans les écrits desquels l’influence du cabalisme est claire. L’admiration du Marquis pour Nostradamus me porte à croire qu’il a été indirectement influencé, en cette matière, par un personnage bizarre, le chanoine Rigaux, curé d’Argœuves, qui donna l’hospitalité à la voyante de La Salette, mais qui fut aussi suspens a divinis en 1911 (58), et dont parle longuement un ex-membre du Sodalitium Pianum, l’abbé Boulin, dans un livre curieux et posthume intitulé Autour de la Tiare (59). Quant à l’œuvre et à la pensée de Crombette, le Marquis dut en être fortement impressionné, puisqu’il accepta d’être Président honoraire du CESHE (Cercle Scientifique et Historique), l’association qui continue la pensée de Crombette. Il ne manque pas d’études critiques sur Crombette, personnage original, qui fut en outre influencé par la gnose et la cabale, au point de nier de nombreuses vérités de foi (60). Gaston Bardet était lui aussi un personnage bizarre, assez pour être considéré par beaucoup de gens comme un gnostique cabaliste, bien que, selon ses dires, “catholique”. Du moins, Étienne Couvert, répondant à la veuve de Bardet qui défendait la mémoire de son époux, écrivit dans Lecture et Tradition (61) que les livres de Bardet “sont imprégnés de cette gnose que je dénonce dans mes livres… ” et que son enseignement “est manifestement contraire à la Foi Chrétienne, même s’il a pensé et écrit le contraire…”. Toutefois Bardet devait être meilleur voyant que Nostradamus, puisqu’au moins une fois il se montra prophète lorsqu’il annonça à Mgr Roncalli, troublé et curieux, qu’il deviendrait Pape, et quel nom il prendrait sur la Chaire de Pierre ! (62) Une autre passion du Marquis est le commentaire de l’Apocalypse du vénérable Barthélemy Holzauser (1613-1658), passion qu’il a transmise à un grand nombre de ceux qui l’ont en estime aujourd’hui. Tout ceci serait licite et légitime, si ce n’était que le Marquis considère chaque parole écrite par Holzauser comme directement révélée par Dieu (63), ce qui est impossible, ne serait-ce que par le fait que, selon l’exégète allemand, l’Antichrist aurait dû naître en 1855 et être tué en 1911 : personne ne s’en est aperçu ! (64). Mais ce qui est pire, et qui frise l’hérésie, c’est que La Franquerie applique au “Grand Monarque” les plus importantes prophéties messianiques qui se référent exclusivement à Notre-Seigneur Jésus-Christ. La promesse faite à David d’un règne éternel, par exemple, ne se réaliserait pas tant dans le Règne Messianique du Christ, que dans le règne éternel de la maison royale de France, qui descendrait de David. Or je me demande : si la valeur des témoignages dépend de la crédibilité du témoin, il est licite de douter du témoignage d’un auteur qui montre ne pas peser suffisamment ses sources, et avoir une passion excessive pour le bizarre, l’insolite, et même – parfois – l’ésotérique. Sixième et dernier argument : la politique du cardinal Rampolla del Tindaro, et de son “école” L’accusation. Selon l’heureuse expression d’Henri Coston, la Troisième République, en France, fut notoirement la “République du Grand-Orient”. Avec la politique du “ralliement” des catholiques au gouvernement républicain, le cardinal Rampolla a objectivement travaillé en faveur du Grand-Orient et de la franc-maçonnerie. Félix Lacointa, toujours, écrivait dans un article de juin-juillet 1929 : “‘On nous a trompés’, a dit sur son lit de mort, Léon XIII à son Secrétaire d’État, et l’illustre Pontife a expiré sans se douter que le principal agent de cette abominable tromperie, l’homme qui avait introduit auprès de lui les émissaires chargés de lui suggérer et de lui faire poursuivre la honteuse et néfaste politique dont nous recueillons aujourd’hui les fruits affreusement amers, c’était son collaborateur de tous les jours, l’homme à qui il avait donné toute sa confiance. Nous qui étions hantés depuis tant d’années par la pensée que de tels fruits devaient être le résultat d’une greffe satanique, nous en avons maintenant la certitude. (…) Il y a des statues qu’il faut déboulonner et que la génération qui monte déboulonnera. De ce nombre était celle du cardinal Rampolla. Ce sera une des consolations de ma modeste, mais âpre carrière d’écrivain que d’avoir pu contribuer à renverser celle du maître fourbe dont la trahison fait aujourd’hui encore si cruellement souffrir les 27 meilleurs enfants de l’Église. J’ai mis à nu la source empoisonnée de tant de fautes et de félonies, dont la première est le Ralliement, dont la dernière, qui est un crime sans nom, est la collusion des démocrates chrétiens (?) avec les communistes. Les catholiques de France sont maintenant éclairés. Ils savent que l’école du cardinal Rampolla, à laquelle les cardinaux Gasparri et Lépicier prétendent les remettre, loin d’être l’école de saint Thomas, est celle de Judas…” (65). L’école du cardinal Rampolla est le fruit de son travail maçonnique au Vatican, comme en témoigne le Marquis de la Franquerie : “Le cardinal (Rampolla) passait ses vacances en Suisse, à l’abbaye d’Einsiedeln. Dans le voisinage de l’abbaye se trouvait une arrière-loge où tous les samedis, il allait prendre les directives du Pouvoir Occulte pour les appliquer dans le gouvernement de l’Église. Parmi ces directives, deux étaient d’importance pour la France ; conclure le Ralliement des catholiques à la république ; mais pour assurer le règne luciférien au sein même de l’Église, fonder au Vatican une arrière-loge secrète destinée à préparer de hauts dignitaires du Saint-Siège à l’exécution du plan infernal. C’est ainsi que le Pouvoir Occulte savait pouvoir compter sur des hommes comme les cardinaux Rampolla, Ferrata, Gasparri, Ceretti, Béa, Liénart, etc… pour ne parler que des morts” (66). Dans Sous la bannière Felix Causas, citant Heimbichner, donne d’autres noms liés à l’école de Rampolla : Giacomo Della Chiesa (Benoît XV), Roncalli (Jean XXIII), Montini (Paul VI), et Pie XII : “Avec Craig Heimbichner, examinons un point bien triste. Le très estimé Eugenio Pacelli (Pie XII) ne subit-il pas aussi l’influence de l’O.T.O. ?…” (p. 9). Et même : “Il faut savoir que depuis Pie IX pratiquement tous les secrétaires d’État sont affiliés à la Loge en vertu d’une exigence de la Contre-Église” (p. 10, note 8). La défense. Cette fois, il ne s’agit plus seulement du cardinal Rampolla, mais de l’Église catholique. Je dois dire que ce sont précisément ces dernières paroles de Félix Causas qui m’ont décidé à écrire cet article, parce qu’un vrai catholique qui aime l’Église ne peut supporter de si graves calomnies proférées non contre les modernistes, non contre les illégitimes occupants du Siège de Pierre après Vatican II, mais contre l’Église elle-même et ses légitimes représentants. En effet l’Église catholique, au moins de- puis la nomination du cardinal Antonelli comme Secrétaire d’État de Pie IX (et sans doute même auparavant, sous Pie VII déjà, comme le soutient l’équipe de Sous la bannière) (67) aurait été sous l’influence de la franc-maçonnerie et de Satan en personne ; le cardinal Merry del Val lui-même, Serviteur de Dieu et secrétaire d’État de saint Pie X, n’échappe pas, pour certains, aux accusations d’être un “apôtre de Satan” (68). Ces accusations impliquent inévitablement les Souverains Pontifes eux-mêmes, autrement dit Pie IX, Léon XIII, saint Pie X, Benoît XV, Pie XI et Pie XII. Mais commençons par le début, c’est-àdire par les accusations de Lacointa et de La Franquerie. Les paroles de Félix Lacointa, et celles aussi du Marquis de la Franquerie, peuvent expliquer l’origine de l’accusation portée non seulement contre Rampolla, mais aussi contre d’autres cardinaux, comme Ferrata, Gasparri, Cerretti. Les noms ne sont pas l’effet du hasard. Les “preuves” contre Rampolla que nous avons examinées jusqu’alors n’ont fait que transformer en certitude ce qui jusque-là dans leur cœur n’était qu’un grave soupçon. Dû à quoi ? Ils le disent explicitement : aux deux “erreurs” de la politique vaticane : le “ralliement” des catholiques à la Troisième République, voulu pas Léon XIII avec l’encyclique Au milieu des sollicitudes (1892), et la condamnation de l’Action Française, décidée sous Pie XI avec la mise à l’index des œuvres de Maurras et du quotidien L’Action française en 1926. La responsabilité des Papes (Léon XIII, Pie XI), est alors déchargée sur leurs plus proches collaborateurs. Le cardinal Rampolla del Tindaro, Secrétaire d’État de Léon XIII, est par conséquent co-responsable de la politique du Ralliement. Le Secrétaire d’État de Benoît XV, le cardinal Ferrata, qui était Nonce en France à l’époque du Ralliement, est donc lui aussi corresponsable. De même pour le Secrétaire d’État de Benoît XV et de Pie XI, Gasparri, qui fut à l’Institut catholique de Paris de 1880 à 1888, mais qui était surtout Secrétaire d’État à l’époque de la condamnation de Maurras. Et le Nonce à Paris en cette même période, Bonaventura Cerretti est lui aussi co-responsable de la condamnation de Maurras. En effet Lacointa et La Franquerie, écrivains catholiques certes mais aussi monarchistes se rangèrent du côté de l’Action française (69), et ce n’est 28 pas un hasard si les articles contre Rampolla apparaissent en 1929, en pleine crise entre le Saint-Siège et le mouvement maurrassien : la condamnation de l’A.F. est vue comme un second Ralliement à la République reprenant l’erreur du premier, aux temps de Léon XIII (cf. LOUBIER, op. cit., pp. 129 et ss). Ce n’est pas le sujet de cet article que de parler du Ralliement et de la condamnation de Maurras, événements qui ont blessé tant d’âmes d’élite du catholicisme français... Je dirai seulement qu’en tant que catholique, je suis fidèle au magistère de l’Église, qu’avec saint Thomas je considère que la monarchie est la meilleure mais non l’unique forme de gouvernement, et enfin que la soumission au gouvernement constitué (sauf cas de légitime insurrection) est présent dans la pratique et l’enseignement de l’Église depuis l’aube du christianisme, puis tout au long des siècles, bien avant Léon XIII et son Secrétaire d’État (70). Mais la question du Ralliement est hors sujet, et le but de cet article est d’évaluer le pour et le contre de la théorie “Rampolla maçon”. Or, si l’accusation considère que la politique rampollienne et celle des prélats de sa ligne jette un soupçon d’affinité avec la franc-maçonnerie (que la Troisième République ait été la République du Grand-Orient, cela ne fait aucun doute, je le répète), la défense peut dire que ce Une couverture de The Equinox, la revue de Aleister Crowley qui publia le nom du cardinal Rampolla parmi ceux des membres de l’O.T.O. “préjugé” politique défavorable a pu être le motif pour lequel Rampolla et ses associés ont été accusés de maçonnisme certain sur la base de quelques arguments incertains. En admettant que la politique française de Rampolla soit un élément d’accusation, il faudrait encore examiner toute la politique ecclésiastique du Secrétaire d’État de Léon XIII et de tout le pontificat léonien. On s’apercevra alors qu’entre tous les pontificats c’est celui de Léon XIII qui fut le plus hostile à la franc-maçonnerie, dans l’enseignement et dans les initiatives, et qu’un grand nombre de documents antimaçonniques de cette époque portent précisément la signature du Secrétaire d’État Rampolla. De même l’attitude du cardinal vis-à-vis du gouvernement italien, non moins maçonnique que le gouvernement français, fut toujours absolument intransigeante, et bien davantage que l’attitude conciliatrice d’un saint Pie X, par exemple. C’est si vrai que la presse catholique intransigeante italienne, et ses représentants, comme Messeigneurs Scotton, eurent toujours le plein appui de la Secrétairerie d’État de Mgr Rampolla (71) dans l’Œuvre des Congrès et dans toutes leurs activités, in primis le journal intransigeant La Riscossa ; de même que tous les intransigeants italiens, comme par exemple Mgr Benigni, furent liés à Léon XIII. Ceux-ci devinrent par la suite les porte-drapeaux de la lutte contre le modernisme : le catholicisme intégral et antimoderniste en Italie fut en pleine continuité avec le pontificat de Léon XIII (à la différence du catholicisme intégral français, comme on peut le déduire de la mise à l’index, sous saint Pie X, de deux livres de l’abbé Barbier critiquant Léon XIII, malgré l’appui que saint Pie X donnait à ce prêtre exemplaire). Ensuite ce n’est pas un hasard si les rumeurs concernant le maçonnisme de Rampolla naissent en France, et non parmi les ecclésiastiques (nous avons vu que la R.I.S.S. de Mgr Jouin refusa toute valeur à la liste de l’O.T.O. pour ce qui regarde le nom de Rampolla), mais parmi les laïcs catholiques ou nationalistes (c’est le cas de la Libre Parole), plus liés, pour des motifs évidents, aux passions politiques. Mais ceci est un argument contre la thèse de l’affiliation maçonnique de Rampolla, qui, si elle avait été vraie, aurait laissé quelque indice non seulement en France mais aussi et surtout à Rome, sous la plume par exemple 29 Aleister Crowley : franc-maçon, toxicomane, sorcier… d’un Mgr Benigni – voir plus haut. Et ce d’autant plus que la ligne de Rampolla, intransigeante sous Léon XIII, ne fut pas favorable au zèle antimoderniste de saint Pie X, comme nous le verrons par la suite : le Sodalitium Pianum – qui n’estimait pas Rampolla – aurait eu des motifs encore plus graves d’accuser Benoît XV, et le cardinal Gasparri. Il ne le fit pas. Pour ce qui est du cardinal Gasparri, quelques rumeurs de maçonnisme ont couru sur lui (72), mais bien plus rares que pour Rampolla ; ce qui est certain c’est que ses mémoires présentent de nombreuses attaques contre la maçonnerie, et la R.I.S.S. de Mgr Jouin a toujours pu jouir du plein appui de Benoît XV (73) et du cardinal Gasparri dans la lutte contre la “judéo-maçonnerie” (74) ; s’il avait été maçon, il n’aurait eu aucun scrupule à faire mourir la presse antimaçonnique, vu qu’il fit mourir le Sodalitium Pianum et la presse catholique intégrale. Le véritable tort de l’“école du cardinal Rampolla” L’accusation. Mais alors vous êtes de fervents partisans du cardinal Rampolla et de son “école” ! Réponse. Pas du tout. Que l’historien, avec objectivité, sur la base de références aux sources documentaires et avec le respect qu’il se doit, se forme une opinion sur les vicissitudes historiques de l’Église et de ses ministres, est chose licite. Nous avons vu déjà quelle était, en 1913, l’opinion certes peu flatteuse de Mgr Benigni sur le cardinal Rampolla del Tindaro. Nous savons qu’à son tour le cardinal Gasparri avait une très mauvaise opinion de Mgr Benigni et du Sodalitium Pianum, au point que le Secrétaire d’État de Benoît XV et de Pie XI témoigna contre la canonisation de saint Pie X parce que le Pape Sarto avait favorisé et soutenu cette association et, en général, les positions catholiques intégrales. L’Église en a jugé autrement, et, contre l’opinion du cardinal Gasparri, a canonisé le Pape qui condamna le modernisme, répondant à ces objections et autres semblables par la “Disquisitio circa quasdam objectiones modum agendi Servi Dei respicientes in modernismi debellatione…” que le Père (cardinal par la suite) Antonelli o.f.m., pour la S. Congrégation des Rites rédigea en 1950. Le Pape Pie XII (qui connut personnellement et de près tous les protagonistes de cette affaire, Pie X, Gasparri, Benigni, etc.) (75) déclara, le 3 juin 1951, que Pie X était Bienheureux, et le 29 mai 1954 qu’il devait être compté au nombre des Saints. Ce n’était pas l’opinion de tous, nous l’avons vu, même dans l’Église et dans la Curie romaine, au moment de la mort de Pie X, et même auparavant à entendre le Saint Pontife répéter amèrement : de gentibus non est vir mecum. J’ai déjà cité le témoignage de Filippo Crispolti, ami de Benoît XV. Après la condamnation du modernisme par l’encyclique Pascendi, le marquis Crispolti, qui appartenait donc à l’“école Rampolla”, fut reçu en audience par Pie X et se réjouit avec lui “de l’effet salutaire que l’Encyclique devait avoir et semblait déjà avoir eu”. “Il me demanda tristement : ‘Vous le croyez ?’ Et comme j’ajoutais que ce n’était pas compliment mais persuasion raisonnée, il se montra curieux de connaître ces raisons et je les lui exposai”. Elles ne furent cependant pas convaincantes : “Le Pape écouta : mes paroles ne lui parurent pas mal raisonnées. Mais au lieu de convenir comme je le désirais pour son réconfort qu’un tel raisonnement (…) aurait été efficace sur les esprits des modernistes ou des enclins au modernisme, il continua à secouer la tête. C’était un homme qui accomplit un acte solennel parce que devant Dieu il y était obligé, mais quant aux effets, il demeurait pessimiste. Et – conclut Crispolti – dire que pour reconnaître que le coup porté par lui au modernisme avait été vraiment mortel, quelques années suffirent !” (76). Crispolti pensait que les 30 faits avaient donné raison à son optimisme, et démenti ce Pape qui “vit toujours en noir les conditions de l’Église qu’il avait à gouverner”. Il était convaincu que le modernisme était vaincu, et que le mal venait des antimodernistes, ceux qui “faisaient du zèle”, lesquels, selon une parole qui lui avait été dite par le cardinal Maffi, prendraient prétexte de Pascendi “pour leurs habituelles violences et accusations” (77). À la mort de saint Pie X le conclave hésita entre le nom du cardinal Maffi, évêque de Pise, et celui du cardinal Della Chiesa, évêque de Bologne, tous deux critiques du pontificat de leur prédécesseur et hostiles à ces “zélés” qui s’acharnaient à condamner… un mort (le modernisme). Rien ne changea dans le magistère de l’Église qui continua à condamner l’erreur moderniste et à propager la Sainte Foi. Mais c’est l’orientation du pontificat qui changea. “Entre modernistes et antimodernistes existait un ‘troisième parti’ personnifié jusqu’à 1913 par le cardinal Mariano Rampolla del Tindaro (…). Rampolla, en 1901, avait choisi comme collaborateurs directs Mgr Giacomo Della Chiesa et Mgr Pietro Gasparri. (…) Pie X, après avoir nommé le cardinal Merry del Val secrétaire d’État, avait éloigné de la secrétairerie d’État les deux protégés du cardinal Rampolla [lesquels furent Couverture de la R.I.S.S. (Partie occultiste : la série rose) cependant tous deux élevés à la pourpre par saint Pie X : Gasparri en 1907, et Della Chiesa – surprise – en 1914, n.d.a.] (…) Pie X mourut le 3 août 1914 ; à peine trois mois après avoir été élevé à la pourpre, le 3 septembre 1914, Mgr Della Chiesa fut élu – surprise encore – au Siège Pontifical : ‘les coulisses du conclave, désormais assez bien connues dans les cercles romains – écrit Buonaiuti à Houtin le 17 septembre 1914 – montrent sans l’ombre d’un doute que l’élection du cardinal Della Chiesa a voulu représenter l’indication d’un gouvernement ecclésiastique qui soit l’antithèse parfaite du régime de Pie X’. Quatre mois après la mort de Pie X, Mgr Eudoxe Mignot (1842-1918), archevêque d’Albi, fit parvenir au cardinal Ferrata, premier secrétaire d’État du nouvel élu Benoît XV, un Mémoire dans lequel était durement attaqué le mouvement de réaction antimoderniste promu par saint Pie X et invitait le Saint-Siège à une politique de ‘réconciliation’ avec les modernistes. Le 13 octobre 1914, en nommant comme secrétaire d’État, après le cardinal Ferrata, le cardinal Pietro Gasparri, Benoît XV manifesta sa ferme volonté de changer l’orientation du pontificat de Pie X, revenant ainsi à la ligne de gouvernement ‘rampollien’ abandonnée par saint Pie X. Benoît XV, en accord avec le cardinal Gasparri, démantela le Sodalitium pianum (78) et tendit la main, sans succès, à Buonaiuti” (79). Le cas du Sodalitium pianum de Mgr Begnini ne fut pas le seul : Mgr Volpi fut privé de son diocèse (80), Messeigneurs Scotton (deux des frères Scotton), furent privés du périodique, La Riscossa, que Léon XIII et Pie X leur avaient confié, et, soumis aux vexations de leur évêque, admirateur de Fogazzaro, en moururent de douleur ( 81 ), alors qu’au contraire un grand nombre de ceux qui avaient été suspectés de modernisme étaient réhabilités : entre autres un certain Angelo Giuseppe Roncalli, secrétaire de l’évêque de Bergame, Mgr Radini Tedeschi… (82), et admirateur secret de l’américanisme condamné par Léon XIII (83). Ces éléments suffisent-ils pour faire penser à une affiliation maçonnique, et qui plus est luciférienne, de Rampolla et des membres de son “école” ? À mon avis, absolument pas, et Henri Coston lui-même est loin d’avoir les certitudes qui distinguent des auteurs moins sérieux et intellectuellement moins honnêtes. Pas maçons 31 donc jusqu’à preuve du contraire, mais incapables de reconnaître dans le pontificat de saint Pie X et dans la lutte sans quartier contre l’hérésie moderniste la grande bataille de notre temps. Ils crurent trop facilement que l’hérésie était vaincue. Ils crurent qu’il y avait eu des exagérations et un zèle amer à le combattre. C’est ainsi qu’à la fin du pontificat de Benoît XV “l’âpre débat qui avait opposé le modernisme à l’antimodernisme s’éteignit peu à peu. Une saison de trêve apparente s’ouvrit dans laquelle le modernisme sembla sombrer et l’antimodernisme se dissoudre” (79). Mais les faits n’ont pas démenti le “pessimisme” de saint Pie X, ils ont démenti leurs prévisions, vraiment trop optimistes. Le modernisme qui, par sa nature, ne veut pas quitter l’Église mais la changer de l’intérieur (84), du sein et des viscères mêmes de l’Église pour employer l’expression de saint Pie X, n’était pas mort. Bien au contraire. Comme l’animal blessé en péril, il avait fait le mort ; mais en réalité, une fois éliminés les “chiens de garde” de la foi qui peut-être n’avaient pas toujours aboyé et grondé à bon escient, mais qui avaient toujours défendu l’Église, il était prêt à relever la tête. En canonisant saint Pie X, le Pape Pacelli démontra au contraire que cet optimisme, cet irénisme était vain et que ceux qui sous saint Pie X et avec saint Pie X avaient brandi le drapeau d’un catholicisme intègre de tout compromis avaient eu raison. L’encyclique Humani generis du 12 août 1950 condamnait en effet la “Nouvelle Théologie”, le néo-modernisme qui serpentait de l’autre côté des Alpes avec des Congar, Chenu, de Lubac, Daniélou … tandis qu’un cardinal archevêque de Paris, Suhard, en était encore à dénoncer le péril “intégriste”. L’affrontement du début du siècle n’était pas encore vraiment conclu. Survint Vatican II. Vatican II n’est rien d’autre qu’une bataille, perdue, de cette guerre séculaire de l’orthodoxie catholique contre l’hérésie de notre époque, le modernisme ; et dans cette bataille, la franc-maçonnerie a joué son rôle, il n’y a pas de doute. L’histoire, dit-on, est maîtresse de vie ; mais jamais maîtresse ne fut si peu écoutée. Saint Pie X avait extirpé chirurgicalement la tumeur mortelle, mais ensuite s’attendant à une prompte et définitive guérison, on interrompit les soins considérés comme trop durs et amers. La débacle actuelle qui, cent ans après l’encyclique Pascendi, dévaste l’Église, s’étale sous les yeux de tous, et l’aurait déjà achevée, si cela n’était impossible du fait de la promesse divine. Ne répétons pas l’erreur de nos pères, ne ralentissons pas la lutte antimoderniste, rendons-nous compte que l’hérésie est le loup rapace devant lequel le pasteur ne doit pas fuir, mais plutôt exposer sa vie. Aujourd’hui, après un siècle de lutte, nous savons, mieux qu’hier, que saint Pie X avait raison. Notes 1) Giacomo Della Chiesa fut le secrétaire personnel de Mgr Rampolla del Tindaro à Madrid. Devenu Pape sous le nom de Benoît XV, il avait le portrait du cardinal Rampolla sur son bureau (cf. Filippo Crispolti, Pio IX, Leone XIII, Pio X, Benedetto XV. Ricordi personali, Trevese Treccani Tumminelli, Milano-Roma 1932, p. 153). Dans une lettre au Marquis Crispolti à l’occasion de la mort du cardinal Rampolla, Mgr Della Chiesa s’exprimait ainsi à propos du cardinal : “De Rome où je suis venu rendre un dernier tribut d’affection à mon vénéré Père et Maître, je vous écris pour vous remercier des affectueuses condoléances que vous m’avez envoyées à Bologne. Vous avez bien interprété mon état d’âme : personne n’a eu probablement comme moi une si longue intimité avec le regretté cardinal, personne n’a été comme moi objet de sa prédilection. De là vous imaginez l’amertume de mon âme. Mais je suis content d’être venu déposer un baiser chaleureux sur ses mains froides !” (Lettre du 18 décembre 1913 de Mgr Della Chiesa, archevêque de Bologne, au Marquis Crispolti, ibidem, pp. 153-154. Sur les rapports entre les deux personnages, voir les pages 148 à 165). 2) Il n’en fut pas toujours ainsi. À l’occasion du cinquantenaire de la mort du cardinal Rampolla, par exemple, Fabrizio Sarazani publia dans le périodique Lo Specchio un article commémoratif favorable au cardinal sicilien et à la mémoire de Léon XIII (Fabrizio Sarazani, La scuola del Cardinal Rampolla, dans Lo Specchio, 31 mars 1963). Sarazani était un représentant de cette portion de la noblesse romaine fidèle à l’Église qui, à l’occasion du Concile et de la réforme liturgique, se rangea ouvertement en faveur de la tradition catholique. Le périodique Lo Specchio participa en première ligne à la campagne contre le Novus Ordo Missæ. 3) Antonio Fogazzaro (1842-1911), neveu de Giuseppe Fogazzaro, prêtre libéral et rosminien (18131901), était un représentant du modernisme, et il eut comme biographe Tommaso Gallarati-Scotti (La vita di Antonio Fogazzaro, Baldini & Castoldi, Milano 1920 ; le livre est à l’index). Fogazzaro n’appartint jamais – pour ce qu’on en sait – à la franc-maçonnerie, malgré l’étroite amitié qui le liait au “frère” Arrigo Boito. Il ne se faisait pas faute cependant de s’intéresser à l’ésotérisme, à l’occultisme, comme le spiritisme d’Andrzej Towianski (1778-1853) et de l’écrivain marrane polonais, Adam Mickiewicz (1798-1855), qui fit partie effectivement de la franc-maçonnerie et in- 32 fluença également la pensée et l’œuvre de Jean-Paul II (cf. F. RICOSSA, Karol, Adam, Jacob, dans Sodalitium n° 48, avril 1999, pp. 61-73 ; sur Fogazzaro : p. 64 et note 13, p. 71). Après la mise à l’index du roman Il Santo (1906), il fit une soumission réticente, purement extérieure et apparente (cf. Gallarati-Scotti, pp. 447 ss) et nombreux sont les prélats qui lui manifestèrent sympathie et soutien, parmi lesquels au moins quatre cardinaux : Svampa, Agliardi, Capecelatro et Mathieu (ibidem, pp. 450-453). Avec le changement de pontificat (1914), l’évêque de Vicence (diocèse de l’écrivain), Mgr Rodolfi, qui avait chanté les louanges de Fogazzaro défunt, put persécuter librement Messeigneurs Scotton du périodique La Riscossa, fidèles à la ligne de saint Pie X (cf. Giovanni Azzolin, Gli Scotton. Prediche, battaglie, imboscate [Les Scotton. Sermons, batailles, embûches], La Serenissima, Vicenza 1998). 4) P. VIRION, Mystère d’iniquité. Mysterium iniquitatis, Éd. Saint Michel, Saint-Cénéré 1967 (troisième édition) [Virion collabora longtemps avec la R.I.S.S. de Mgr Jouin] ; L. de Poncins, Le problème juif devant le Concile (le texte, présenté aux Pères conciliaires, fut ensuite inclus dans l’œuvre collective Infiltrations ennemies dans l’Église, Documents et témoignages, La librairie française, 1970, pp. 69-84). 5) R OBERTO F ABIANI , I massoni in Italia [Les francs-maçons en Italie], I libri de l’Espresso, Rome 1978, p. 78. Fabiani, décédé à l’heure actuelle, était lui-même franc-maçon, mais opposé à la Loge P2. Son témoignage est d’autant plus intéressant que souvent il ne confirme pas les rumeurs sur les prélats maçons au Vatican ; il qualifie par exemple de “montagne de bobards élevée sur des documents grossièrement faux” (p. 89) la série d’articles publiés par l’abbé Putti dans Sì sì no no sur les cardinaux francs-maçons, dont il est parlé à la note 7, sans dire un mot de Mino Pecorelli, qui pourtant, quelques mois auparavant, avait publié dans OP sa liste de la “Loge vaticane”. 6) Cf. ROBERTO FABIANI, I Massoni in Italia [Les francs-maçons en Italie], cit., pp. 78 et 130 ; Aldo A. Mola, Storia della Massoneria italiana dalle origini ai nostri giorni [Histoire de la franc-maçonnerie italienne de ses origines à nos jours], Bompiani, 1992, p. 744 ; C.A. Agnoli, La Massoneria alla conquista della Chiesa [La franc-maçonnerie à la conquête de l’Église], E.I.L.E.S., Rome 1996, pp. 31-32. Le cardinal König patronna la revue œcuméniste Kairòs, véritable cénacle guénonien, sur laquelle S. Panunzio nous donne d’intéressantes informations dans un article à la mémoire de l’abbé Divo Barsotti (in Metapolitica nn. 2-3, mai-août 2006, p. 41 ; cf. P. TORQUEMADA, nous construirons encore des cathédrales, dans Sodalitium n° 50, p. 21). À une enquête de la S.C. pour la doctrine de la Foi, König, toujours lui, comme nous le verrons, répondit en faveur de la franc-maçonnerie, après avoir pris des informations auprès du dignitaire maçonnique Baresch, avec lequel, en 1970, il avait travaillé à la Déclaration commune de Lichtenau (cf. FERRER BENIMELI-CAPRILE, Massoneria e Chiesa Cattolica [Franc-maçonnerie et Église catholique], San Paolo 1979, pp. 191-194 ; AGNOLI, op. cit., p. 32). König fut le “grand électeur” de Jean-Paul II. 7) La revue antimoderniste Sì sì no no, dirigée par le prêtre Francesco Putti, a publié une longue série d’articles sur la franc-maçonnerie et ses tentatives d’infiltration dans l’Église à partir du n° 5 de mai 1975, et jusqu’à 1977. Dans le n° 6 de juin 1976 étaient accusés le cardi- nal Baggio et Mgr Bugnini ; dans le n° 7-8 (juillet-août 1976), le cardinal Pellegrino et Mgr Marchisano ; dans le n° 9, septembre 1976, le cardinal Poletti. Entre-temps, la presse nationale avait diffusé, durant l’été, une liste de 114 prélats francs-maçons. L’abbé Putti, dans le numéro de septembre à la p. 2, écrit à propos de cette liste publiée le 10 août par Panorama : “on pourrait penser que l’article se propose d’élargir encore davantage le scandale des ecclésiastiques réellement francs-maçons, mais, un examen à peine plus attentif montre à l’évidence qu’il vise principalement à défendre, en les noyant dans la masse (114 !) les véritables maçons. (…) En outre, en examinant attentivement les 114 noms, qui figurent dans la liste publiée, il ressort de façon évidente qu’il s’agit d’une ruse, peu intelligente cependant, de stratégie maçonnique. En effet, les noms des vrais maçons, que nous connaissions déjà, ont été mêlés à ceux de nombreuses personnes qu’il serait absurde de croire francs-maçonnes. La maçonnerie, s’étant aperçue qu’on était en possession d’une liste authentique, y a astucieusement inséré de nombreux autres noms (jusqu’à 114 !) dans le but de désorienter et, par contre-coup, de susciter la non crédibilité de toute nouvelle donnée ou à donner, y compris sur les ecclésiastiques réellement maçons : c’est ainsi qu’a été jetée de la poudre aux yeux des lecteurs ingénus et irréfléchis et cela en faveur des maçons intéressés, (…)”. Le 12 septembre 1978 la revue OP (Osservatorio Politico) de Mino Pecorelli publiait un article (La gran loggia vaticana) avec la liste de 122 ecclésiastiques francs-maçons (Pecorelli était aussi à l’origine de la liste de 1976, même si entre les deux listes il y a quelques divergences, avec des ajouts et des suppressions de noms). Le Père Esposito écrit : “à ma connaissance, il n’y a que peu de noms pour lesquels il est possible d’avancer quelques doutes concernant l’appartenance” (R. ESPOSITO, Le grandi concordanze tra Chiesa e Massoneria [Les grandes concordances entre Église et franc-maçonnerie], Nardini, Firenze 1987, p. 358, note 2). Au contraire, le magistrat C.A. Agnoli (La Massoneria alla conquista della Chiesa [La franc-maçonnerie à la conquête de l’Église], op. cit.) expose des arguments pour démontrer que les deux listes sont fiables dans l’ensemble (quoique pas pour tous les noms) même si elles ne sont pas exhaustives ; étrangement, il ne mentionne pas les articles de l’abbé Putti et son opinion à leur égard. Pecorelli, membre de la loge maçonnique P2, fut assassiné le 20 mars 1979. Mgr Bugnini, tout en démentant toute affiliation à la francUn des documents extraits des archives maçonniques : c’est un opuscule de 1924 qui affirme l’appartenance de Pie IX à la franc-maçonnerie 33 maçonnerie, admet que s’il est tombé en disgrâce, c’est à cause de cette accusation (A. BUGNINI, La riforma liturgica (1948-1975), CLV-Edizioni liturgiche-Roma 1983, pp. 13 et 279). 8) À l’abondante presse d’actualité sur la Loge Propaganda 2 (P2) s’est ajouté récemment le livreinterview de Sandro Neri à Licio Gelli, Parola di Venerabile [Parole de Vénérable] (Aliberti, Reggio Emilia 2006). Sur les rapports entre Licio Gelli, le Vénérable précisément, de la Loge, et Paul VI, cf. pp. 71, 105106, 224 ; sur Umberto Ortolani, pp. 199-200, 210. 9) L’appartenance du cardinal Delci (ou d’Elci) à la franc-maçonnerie est liée aux informations sur l’existence d’une Loge romaine dont le cardinal aurait été Vénérable, et deux autres cardinaux, Domenico Passionei et Stefano Borgia, affiliés. Sur la question, encore en doute aujourd’hui, voir CARLO FRANCOVICH, Storia della massoneria in Italia dalle origini alla Rivoluzione Francese, La Nuova Italia, Firenze 1974/1989, pp. 120-123. 10) Cf. C. FRANCOVICH, op. cit., pp. 114-131. 11) H. COSTON, La République du Grand-Orient, op. cit., p. 175. 12) M. GAUDART DE SOULAGES, H. LAMANT, Dictionnaire des francs-maçons européens, Dualpha, Paris 2005, p. 755. Les auteurs sont francs-maçons et c’est le Grand Maître de la Grande Loge nationale de France, Jean Murat 33.·., qui a écrit la préface du dictionnaire. 13) Y. CHIRON, Pie IX et la franc-maçonnerie, Éditions B.C.M., Niherne. C’est de cet opuscule que j’ai tiré les informations sur Pie IX et la franc-maçonnerie. De nombreux autres détails sur les accusations contre Pie IX et Benoît XV sont tirés de H. COSTON, La République du Grand-Orient, La librairie française, 1964/1976, pp. 172-176. 14) L’accusent FELIX LACOINTA dans Le bloc antirévolutionnaire, année 1931, p. 38 (sans crainte d’être démenti, écrit Lacointa) ; et le Marquis de la Franquerie, L’infaillibilité Pontificale, DPF, 2ème éd. 1973, p. 76 (qui attribue l’information à l’évêque de Tours). 15) S. NERI, Parola di Venerabile, op. cit. : Gelli parle du cardinal Ottaviani aux pp. 72 et 106. Gelli ne dit pas que le cardinal ait été maçon (il ne le dit de personne que la chose ne soit déjà du domaine public) mais il le laisse entendre, et c’est du moins ainsi que l’a compris Francesco Specchia dans sa recension de l’interview de Gelli dans le quotidien Libero (29 octobre 2006, p. 28). L’hebdomadaire de La Stampa, Specchio, a publié la photo de Gelli avec Andreotti et le cardinal Ottaviani à l’occasion de l’inauguration de l’établissement Permaflex de Frosinone. La disponibilité éventuelle du cardinal envers Gelli pourrait très bien s’expliquer sans émettre l’hypothèse d’une quelconque invraisemblable initiation maçonnique : le fait qu’ils connaissent tous deux Giulio Andreotti et leur amitié commune avec lui est plus que suffisante pour motiver une présumée confiance certainement mal placée. 16) R. ESPOSITO SSP, Le grandi concordanze tra Chiesa e massoneria, Nardini, Firenze 1987, pp. 358360. Candido Nocedal (1821-1885) est cité comme franc-maçon aussi dans le Dictionnaire… de Gaudart et Lamant. 17) H. COSTON, La République du Grand-Orient, op. cit., p. 176. 18) G. VIREBEAU (pseudonyme d’H. Coston), Prélats et Francs-maçons, Publications Henri Coston, réédition 1992, p. 34. De Rampolla on parle aux pp. 2229 ; de Le Nordez aux pp. 29-34. En 1970 déjà, Vire- beau-Coston considérait Rampolla comme “fortement suspect” de maçonnerie (D ELAMARE , DE P ONCINS , BORDIOT, DE COUESSIN, VIREBEAU, Infiltrations ennemies dans l’Église, Librairie française, Paris 1970, pp. 16-17), renvoyant le lecteur à La République du Grand-Orient. Mais jamais Coston ne donne pour certaine et démontrée l’affiliation de Rampolla. Pour ce qui est de Mgr Le Nordez le cas est plus grave, en ce sens que l’évêque de Dijon fut contraint de donner sa démission à saint Pie X. Une lettre de la Secrétairerie d’État (cardinal Merry del Val) à Mgr Le Nordez précisait cependant que “le Saint-Père, ayant à cœur de sauvegarder le bon renom de votre caractère épiscopal et d’arrêter toutes les accusations qui pourraient trouver un écho dans la presse ou ailleurs, me charge de déclarer en son nom et de la façon la plus explicite que le Saint-Siège n’a formulé ni prononcé aucun jugement contre Votre Grandeur et que par conséquent Votre Grandeur quitte son poste parce qu’Il le juge nécessaire en présence des événements publics de ces derniers temps” (cf. Y. CHIRON, Saint Pie X…, op. cit., p. 198, note 29). Pas condamné par conséquent… mais pas non plus absout, Mgr Le Nordez ne fut pas l’objet d’un procès canonique. 19) Pourtant le jeune Coston collaborait avec La libre parole dirigée par Ploncard d’Assac qui, en 1929, diffusa la nouvelle d’une affiliation possible de Rampolla à l’O.T.O. 20) Le camerlingue, cardinal Oreglia di Santo Stefano déclara à propos du veto : “Cette communication ne peut être accueillie par le conclave, ni à titre officiel ni à titre officieux, il n’en sera pas tenu compte” (CHRISTIAN-PHILIPPE CHANUT, L’élection de Saint Pie X, Sicre, Paris 2003, p. 207). 21) Surtout le Camerlingue et cardinal chanoine, Oreglia di Santo Stefano, qui sera hostile à saint Pie X comme il le fut à Léon XIII, et voulait à tout prix éviter l’élection de Rampolla (en qui il voyait le continuateur de Léon XIII) “craignait beaucoup que l’exclusive fit s’écrouler les prévisions optimistes de ses alliés et bouleversât le Conclave. Selon lui, l’élection du cardinal Rampolla del Tindaro qu’il avait jugée jusquelà très délicate, voire improbable, risquait de devenir possible si l’indignation dont il voyait des signes [parmi les cardinaux] l’emportait” (CHANUT, p. 209). 22) En 1904, Bidegain, affilié à la franc-maçonnerie depuis 1892, cédait au député nationaliste Guyot de Villeneuve les dossiers avec le fichage (les “fiches” donneront leur nom à l’“affaire”) que, pour le compte du gouvernement, le Grand-Orient faisait des officiers français, dans le but de bloquer la carrière des officiers catholiques. Le scandale qui s’ensuivit amena la démission du ministre de la Guerre, le général André et, en 1905, du chef même du gouvernement, le maçon Émile Combes (cf. HENRY COSTON, La République du Grand-Orient, La Librairie Française, (1964) 1976, 1982, pp. 67-85). 23) C HANOINE S AUVETRE , Un bon serviteur de l’Église : Mgr Jouin, Paris, Casterman, 1936, réédition : Vie de Mgr Jouin Saint-Rémy, Cadillac, s.d., p. 167. De nombreux catholiques intégraux, parmi lesquels Mgr Benigni et surtout l’abbé Boulin, du Sodalitium pianum, collaborèrent à la revue de Mgr Jouin se battant avec lui contre la judéo-maçonnerie (expression créée par Mgr Jouin lui-même). Toutefois le Sodalitium pianum et Mgr Benigni ne signalèrent jamais la R.I.S.S. parmi les revues amies, car ils ne partageaient pas la 34 position de la revue sur la question du satanisme dans les Loges, et surtout les relations d’amitié de Mgr Jouin avec certains modernistes tels que Mgr Lacroix, Houtin, Hébert (cf. É. POULAT, Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman, 1969, p. 282). 24) “La politique européenne de [Mgr] Benigni – rappelle Poulat – avait placé toutes ses espérances dans l’archiduc héritier François-Ferdinand et sa femme la comtesse Sophie, et leur assasinat à Sarajevo sera un deuil pour les catholiques intégraux (Cor. Cath., 4 juillet 1914) (…) ‘Mon fils, vous êtes notre principal espoir en Europe’, lui avait dit Pie X…” (É. POULAT, Intégrisme…, op. cit., p. 528). Sur François-Ferdinand et ses rapports avec François-Joseph, cf. CARLO SFORZA, Costruttori e distruttori [Constructeurs et destructeurs], Donatello De Luigi, Roma 1945 (chap. III : L’Archiduc François-Ferdinand, l’homme qui aurait pu sauver l’Empire des Habsbourg pp. 45-57) ; éd. française : Les bâtisseurs de l’Europe, 1945. 25) “Le gouvernement impérial de Vienne, comme l’écrit la ‘Civiltà Cattolica’, ‘accorda bien la faculté de convoquer le Congrès, mais n’envoya aucun représentant officiel, et excepté la tutelle de l’ordre public par les gardes de sécurité publique, ne donna aucun autre signe d’adhésion’ (1896, IV, 237)” (ROSARIO F. ESPOSITO, Chiesa e massoneria, un DNA comune, Nardini, Firenze 1999, pp. 64-65). 26) R. ESPOSITO, Chiesa e massoneria, un DNA comune, Nardini, Firenze 1999, p. 88 ; répertoire des documents : pp. 75-88. Le Fond “Giantulli-Vannoni” de Verrua Savoia comporte une collection de la Rivista Antimassonica qui était publiée à Rome par l’Unione Antimassonica. En 1896, la revue publia, en tant que supplément, un Bollettino Ufficiale del I° Congresso Antimassonico Internazionale. Voici ce qu’écrivait le cardinal Rampolla à la conclusion du Congrès, en réponse au Prince évêque de Trente, qui présidait les travaux : “Illustrissime et Révérendissime Seigneur, La parole et la bénédiction du Saint Père ont accompagné les Catholiques congressistes réunis à Trente dans le but louable de s’opposer, conformément aux enseignements pontificaux, à l’audace croissante des sectes maçonniques. Sa Sainteté avait donc le vif désir que l’œuvre du Congrès ait une heureuse issue. Dès lors que votre Illustrissime et Réverendissime Seigneurie qui, en cette occasion a accueilli et présidé la réunion, informe avec autorité de l’heureux couronnement des désirs communs, l’auguste Pontife ne peut que s’en féliciter et exprimer le désir et la confiance que du Congès à peine achevé naisse une prudente et constante activité, par laquelle, tout en épargnant les errants, les catholiques s’efforcent d’empêcher la prédominance ultérieure des erreurs maçonniques. Heureux d’exprimer personnellement à Votre Seigneurie la satisfaction pontificale pour le zèle employé à l’heureuse réussite du Congrès luimême et Vous faisant part de la Bénédiction apostolique, Je Vous confirme l’expression de mon estime la plus distinguée et me redis, votre très dévoué serviteur Mariano cardinal Rampolla” (décembre 1896, p. 16). 27) José Calasanz Vives y Tuto, (1854-1913) capucin espagnol, créé cardinal par Léon XIII en 1899. Fidèle à Léon XIII, il fut aussi l’“un des conseillers les plus écoutés de Pie X et de Merry del Val (lui-même espagnol) : l’un des trois cardinaux, avec ce dernier et De Lai, en qui le Pape avait mis sa confiance et qu’il consultait dans les cas difficiles, témoigneront au Procès de canonisation les cardinaux Siri et Gasparri (Po- sitio super virtutibus, pp. 276 et 456)” (É. POULAT, Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman, Paris 1969, p. 587). Le cardinal Vives était très proche non seulement de saint Pie X, mais aussi, naturellement, du Sodalitium pianum de Mgr Benigni, lequel, ayant à défendre le Sodalitium des accusations qui amenèrent sa dissolution, cita précisément le défunt cardinal Vives y Tuto parmi les prélats qui étaient au courant de l’existence du Sodalitium, qui en étaient garants et qui se servaient de son action (cf. Réponse officielle de Mgr Benigni au cardinal Sbarretti, du 16 novembre 1921, in POULAT, op. cit., pp. 578-586). Sur la position de Vives y Tuto au conclave de 1903 en faveur du cardinal Rampolla cf. C H .-P H . C HANUT , L’élection de Saint Pie X, op. cit., pp. 109, 128, 210, 227 ; CARLO SNIDER, L’episcopato del cardinale Andrea C. Ferrari, vol II, I tempi, di Pio X, Neri Pozza editore, Vicenza 1982, p. 26) : le cardinal Vives fut le “principal agent électoral” de Rampolla, son “dévouement au cardinal était total” et à l’exemple de Vives les cardinaux espagnols votèrent pour Rampolla jusqu’au dernier scrutin. Une telle attitude de la part d’un cardinal qui sera chef de file de la lutte antimoderniste serait inexplicable dans le cas du plus minime soupçon, de sa part, sur une collusion de Rampolla avec la franc-maçonnerie. 28) Cf. le tableau des six scrutins publié par CHANUT (op. cit., pp. 252-255). Voir aussi, C. SNIDER (op. cit., p. 68) où l’auteur écrit du cardinal Sarto qu’il fut “une créature rampollienne ou pour le moins un partisan sincère de l’élection de Rampolla”. Cet ouvrage consacre deux chapitres entiers au conclave de 1903 pp. 1-129. 29) Traduction libre sur la traduction italienne d’UGO BELLOCCHI, Tutte le encicliche e i principali documenti pontifici emanati dal 1740 [Toutes les encycliques et les principaux documents pontificaux promulgués depuis 1740], Libreria Editrice vaticana, vol. VII, pp. 71-73. 30) Cf. GAETANO MORONI, Dizionario di erudizione storico-ecclesiastica, [Dictionnaire d’érudition historique et ecclésiastique] Tipografia Emiliana, Venezia 1843, vol. XXII, rubrique : Esclusiva ; CARDINAL WISEMAN , Souvenir sur les quatres derniers Papes, Bruxelles 1858, pp. 388-389 ; Enciclopedia Cattolica, rubriques Pio VII, Pio IX. 31) Telle est la raison du veto selon l’Enciclopedia Cattolica (rubrique Rampolla) : “Les dangers de la situation furent aggravés par l’isolement politique du Saint-Siège face à l’Italie, alliée avec l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne, ce qui poussa le cardinal Rampolla, appuyé par le Pontife, à normaliser les rapports avec la France républicaine et en particulier à intégrer les forces catholiques dans la vie politique de la nation, à laquelle elles étaient demeurées étrangères depuis 1870 à cause de leur préalable monarchisme. Ce ralliement, dicté par la nécessité de sauvegarder le Saint-Siège contre l’anticléricalisme italien, et tendant peut-être aussi à modifier en sa faveur l’indifférence des Habsbourg vis-à-vis de la papauté, fut interprété au contraire par les sphères gouvernementales viennoises comme une prise de position contre les puissances de la Triple Alliance. Et ce fut justement la crainte d’avoir un pape ‘français’ qui détermina François-Joseph à faire mettre, par le cardinal Puzyna, évêque de Cracovie, le veto à l’élection au pontificat de Rampolla au conclave d’août 1903”. 32) É. POULAT, Catholicisme, démocratie et socialisme. Le mouvement catholique et Mgr Benigni de la naissance du socialisme à la victoire du fascisme, Casterman, 35 Paris 1977, p. 415. Selon Meysztowicz, le gouvernement tsariste voulait “russifier” les diocèses polonais qui lui étaient soumis, et ce, même dans la liturgie, et il avait obtenu la faveur de la Secrétairerie d’État. C’est alors que les évêques polonais des provinces annexées à la Russie demandèrent au cardinal Puzyna d’intervenir. Celui-ci obtint – par l’entremise du Comte Goluchowski, ministre des affaires étrangères du gouvernement austro-hongrois – une instruction de François-Joseph qui le chargeait de mettre le veto au cardinal Rampolla. “Le geste du cardinal Puzyna, dont tous les motifs n’étaient connus de personne et qu’on attribua à la simple docilité envers François-Joseph, fut très mal vu des autres cardinaux. (…) Le cardinal Puzyna ne pouvait rien objecter pour se défendre. Il s’enferma dans le mutisme, même lorsque, de retour à Cracovie, il eut à entendre les reproches de son propre clergé qui ne comprenait pas son acte. Mais le rituel russe n’obtint pas l’autorisation du Saint-Siège, et le danger auquel il eût exposé l’Église en Pologne fut conjuré” (p. 139). C. SNIDER (op. cit. pp. 22-24) donne des preuves plus qu’abondantes de cette version des faits. 33) C’est l’opinion de CHRISTIAN-PHILIPPE CHANUT in L’élection de Saint Pie X, (op. cit., p. 207) qui l’attribue aux cardinaux les plus au courant des choses. Voir aussi, SNIDER, op. cit., pp. 28-29. 34) Le Saint-Siège ne reconnaissait pas le gouvernement italien et l’occupation de Rome (y compris le palais du Quirinal, de papal devenu royal), c’est pourquoi le contact entre Rampolla et un ambassadeur auprès d’un état non reconnu par l’Église était malséant. 35) FILIPPO CRISPOLTI, Pio IX, Leone XIII, Pio X, Benedetto XV. (Ricordi personali), Treves-TreccaniTumminelli, Milano-Roma 1932-X, pp. 154-155. 36) Cf. YVES CHIRON, Saint Pie X, réformateur de l’Église, publications du Courrier de Rome, Versailles 1999, p. 141. 37) A. LOUBIER, Démocratie cléricale, Éd. Sainte Jeanne d’Arc, Vailly-sur-Sauldre 1992, pp. 102-103. 38) Sa revue n’apparaît pas dans la liste des “revues amies” du Sodalitium Pianum (cf. É. POULAT, Intégrisme…, op. cit., p. 69) mais y collabora, sous le pseudonyme de Roger Duguet (ivi, p. 76), l’abbé Paul Boulin (1875-1933), ami de Mgr Benigni et membre du Sodalitium – qui collabora aussi à la R.I.S.S. sous le nom de Pierre Colmet. 39) L’épisode raconté par Lacointa est rapporté par H. COSTON, La République du Grand-Orient, op. cit., p. 171 ; par G. VIREBEAU, Prélats et Francs-maçons, op. cit., p. 24 ; par le MARQUIS DE LA FRANQUERIE, L’infaillibilité pontificale, Diffusion de la pensée française, Chiré-en-Montreuil, II éd. 1973, p. 76 (il résume le fait, donne le nom du cardinal, qui serait Merry del Val, et laisse entendre que c’est Mgr Marty qui lui aurait raconté l’incident à lui directement et non à Lacointa) ; par F. CAUSAS, in Sous la bannière n° 126, août 2006, pp. 5-6). Causas critique ouvertement saint Pie X parce qu’il aurait détruit les preuves du méfait : “N’est-il pas regrettable que saint Pie X ait ordonné de brûler ces preuves accablantes pour sauver du déhonneur (?) la mémoire du cardinal félon ! Le scandale des faibles n’at-il pas bon dos ? Ainsi donc les pires ennemis de l’Église et leurs complices ecclésiastiques auraient toute latitude pour opérer leur abominable travail de termites, miner l’Église de fond en comble, et nous devrions – après leur mort et surtout lorsque nous disposons des preuves de leur trahison – préserver leur mémoire du scandale et du déshonneur d’exposer sur la place publique leurs plus viles forfaitures ? Quel triste comportement ! L’ennemi peut en conséquence avancer tranquillement : aucune sentinelle n’osera tirer sur la sonnette d’alarme ? Quant à nous, nous préférons avec sainte Catherine de Sienne crier la vérité sur tous les tons et sur tous les toits avec ‘cent mille langues’, que cela fasse plaisir ou non” (ivi, p. 10, note 10). Les paroles de F. Causas sont inadmissibles pour un catholique, car, sans respect, il critique non seulement un Pape, mais un Saint. L’auteur de ces lignes se rend-il compte que son jugement est une négation implicite de la sainteté de Pie X ? (abstraction faite de la question de savoir si saint Pie X a réellement donné l’ordre de brûler ces documents, ces documents ont-ils jamais existé). 40) Cf. Sous la bannière n° 126, pp. 7-8. Nous verrons comment le Marquis de la Franquerie reprendra, à sa façon, le témoignage du prêtre français anonyme. 41) J’ai trouvé le texte de la lettre au cardinal Amette dans La Semaine Religieuse du Diocèse de Grenoble (n° 49, 22 juillet 1915, pp. 690-691). 42) Cf. F. CRISPOLTI, op. cit., pp. 156-158. L’auteur voulait souligner la différence de caractère entre le “très réservé” cardinal Rampolla, et son disciple plus imprudent, le cardinal Della Chiesa-Benoît XV… 43) Cf. É. POULAT, Intégrisme et catholicisme intégral, op. cit. p. 330. 44) Cf. L. BEDESCHI, L’antimodernismo in Italia. Accusatori, polemisti, fanatici [L’antimodernisme en Italie. Accusateurs, polémistes, fanatiques], San Paolo 2000, pp. 33, 69, 100-102, 123, 173, 184. Comme l’indique le sous-titre, l’auteur est moderniste déclaré (ou plutôt était, car il est mort récemment). 45) Quotidien fondé en 1892 par Édouard Drumont (1844-1917), écrivain nationaliste et antisémite français, auteur de La France juive (1886). En 1910 Drumont vend le journal à Henri Bazire (1873-1919), ex président de l’ACJF (Action catholique de la jeunesse française), et Joseph Denais (1877-1960), lesquels le revendent à l’Action Française en 1924. Durant la période de Basire, La libre parole s’oppose aux catholiques intégraux qui considéraient La Libre parole comme un organe “démocrate libéral” (et pour eux comme pour nous ce n’était pas un compliment). En 1924 le quotidien disparaît, et il est repris plus tard par Jacques Ploncard d’Assac (nationaliste catholique qui a connu Mgr Benigni) en 1928-1929, lorsqu’est publié l’article sur Rampolla. Le directeur politique en était le Dr Jules Molle (1868-1931), député antisémite d’Oran (Algérie) pour le Parti National Populaire de Doriot. Après une brève interruption des publications, en 1930 c’est Henri Coston qui en devient directeur, et ce, jusqu’à la disparition du journal en 1939 (cf. É. POULAT, Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman, Paris, pp. 237239 ; H. COSTON, Dictionnaire de la politique française, (1967-1982), vol. I, p. 638, 709 ; H. COSTON, La République du Grand-Orient, op. cit., pp. 171-172). 46) Voici les références exactes données par Lacointa : “The Equinox, an. XV, vol. III, n. 1, March 1919 E.V., The Universal Publishing Company, 57 Grand River Avenue, Detroit, Michigan. Price : 666 cent (!)” (cit. in Sous la bannière, n° 126, juillet-août 2006, p. 6). 47) FELIX LACOINTA, Le Frère.·. Rampolla, dans Le Bloc antirévolutionnaire, juin-juillet 1929, article reproduit quasiment intégralement par Félix Causas in Sous la Bannière n° 126, juillet-août 2006. Les phrases citées sont aux pp. 6-8 de Sous la bannière. 36 48) H. COSTON, La République du Grand-Orient, op. cit., p. 172. 49) “Il est probable que pendant de longues années l’O.T.O. n’a existé que dans l’imagination de son fondateur, car il ne semble pas qu’on en ait jamais entendu parler entre 1895, date de sa supposée fondation, et 1904, lorsque l’on commença à en mentionner le nom dans un périodique appelé l’Oriflamme” (The Secret Rituals of the O.T.O., édité par FRANCIS KING, avec introduction du même, C.W. Daniel Company, London 1973, p. 22). Cf. aussi M. INTROVIGNE, Il cappello del mago [Le chapeau du magicien], Sugarco 1990, p. 267 ss ; M. INTROVIGNE, Il ritorno dello gnosticismo [Le retour du gnosticisme], Sugarco 1993, p. 162. 50) M. INTROVIGNE, Il ritorno dello gnosticismo, op. cit., pp. 163-164 ; cf. Il cappello del mago, op. cit., p. 251. 51) Onze d’entre eux dans le canon de la messe de Crowley, les deux autres sont ajoutés dans le canon de la messe de Reuss. Seul Rampolla est rayé. 52) J. Symonds, La grande bestia. Vita e magia di Aleister Crowley [La grande bête. Vie et magie d’Aleister Crowley]. Préface de Julius Evola, Mediterranee, Roma 1972, pp. 24 ss. Nous déconseillons vivement la lecture de tout ce qui concerne l’O.T.O. et Crowley. 53) J. SYMONDS, op. cit., p. 22. 54) MARQUIS DE LA FRANQUERIE, L’infaillibilité Pontificale. Le Syllabus, la condamnation du modernisme et la crise actuelle de l’Église. Conférences, Diffusion de la Pensée Française, Chiré-en-Montreuil 1973 (seconde édition), p. 76. 55) MARQUIS DE LA FRANQUERIE, Maurras. Grand défenseur des vérités éternelles, 20ème anniversaire de sa mort, supplément au n° 7 du Bulletin de l’Occident Chrétien, p. 3. 56 ) Juifs et chrétiens, demain, Allocution du cardinal Jean-Marie Lustiger, archevêque de Paris, à l’occasion de la remise du Prix Nostra Ætate qui lui a été remis, en même temps qu’au Grand Rabbin Sirat, par le Centre pour la Compréhension entre Juifs et Chrétiens (CCJU) de l’Université du Sacré-Cœur, à Fairfield, Connecticut (USA), le 20 octobre 1998, note 5. 57) MARQUIS DE LA FRANQUERIE, Le Saint Pape et le Grand Monarque d’après les prophéties, Éd. de Chiré, 1980, pp. 17, 30, 14 note 3. Le thème du “Grand Monarque” a toujours eu un grand écho dans les milieux hétérodoxes ; en Italie, le cas de David Lazzaretti (1834-1878), le “prophète” du Mont Amiata, est bien connu. 58) Dans Le Saint-Siège et le “Secret de La Salette” (Centre Libraire Sodalitium, Verrua Savoia 2004), le lecteur trouvera les textes de la condamnation du curé, entre autres, une lettre du cardinal Merry del Val et une de saint Pie X (pp. 12-14) et leur présentation (p. 36). 59) ROGER DUGUET (Paul Boulin), Autour de la Tiare, F. Sorlot, Paris, s.d. (texte de 1931). L’abbé Boulin, qui connut Rigaux en 1914, publie et commente un document de prophéties sur les Papes, document qui était en la possession du curé d’Argœuves. L’abbé Rigaux était dévôt au Secret de La Salette, à Nostradamus, à la cause des Naundorff et à la théorie du ‘Grand Monarque et du Saint Pape’ (pp. 39-46 par ex.). Mais l’abbé Boulin explique que ces “prophéties” sont nées en fait dans un milieu “spirituel” (franciscains hérétiques joachimites) et gibelins (famille Colonna), un peu comme la pseudo-prophétie de saint François dont parle Sodalitium n° 48, avril 1999, pp. 60-61. 60) Sur les hérésies de F. Crombette cf. Fr. PIERD. VIAIN, G. SALET, Crombette et le crombettisme, Éditions scientifiques Saint-Edme. Personnellement, de Crombette j’ai lu Lettre à mon Évêque, un écrit du 21 juin 1962, diffusé par le CESHE. L’erreur de fond consiste en la négation de l’autorité du magistère de l’Église. Autres erreurs importantes : la négation de la transsubstantiation et la préexistence de l’âme humaine du Christ. 61) Lecture et Tradition n° 179, janvier 1992, pp. 21-24. 62) Sodalitium n° 33, pp. 39-40. 63) “Aucun prophète n’a décrit avec plus d’exactitude ni plus de détails notre époque qu’un vénérable, mort en 1658, Barthélemy Holzhauser. Dans son ‘Interprétation de l’Apocalypse’’, écrite sous l’inspiration divine…” ; “mais revenons à l’‘Interprétation de l’Apocalypse’, inspirée par Dieu au Vénérable Holzhauser” (MARQUIS DE LA FRANQUERIE, Le Saint Pape et le Grand Monarque d’après les prophéties, Éd. de Chiré, 1980, pp. 5-6 et 12). 64) A. ROMEO, in Enciclopedia Cattolica, 1948, Città del Vaticano, rubrique Anticristo, vol. I, col. 1439. 65) Cf. Sous la bannière n° 126, p. 8. 66) Cf. L’infaillibilité pontificale…, p. 76, repris in Sous la bannière, p. 5. 67) Cf. A. LOUBIER, Démocratie cléricale, op. cit., qui va jusqu’à accuser Pie VII de schisme pour avoir signé le Concordat : “Il en est résulté, on le sait, le schisme de la petite Église. Mais qui parle de schisme ? La signature de ce concordat n’était-elle pas schismatique par bien des aspects ? Ne réalisait-elle pas, dans la pratique, la mise en place de l’Église de Talleyrand, et de tout son personnel, que la convention n’avait pas réussi à cause de l’opposition des peuples catholiques ? N’était-ce pas la constitution civile du clergé, telle que Pie VI l’avait condamnée parce que jugée schismatique ?” (p. 29). Contre cette position, cf. J. MORIN, E. VICART, Le Pape Pie VII précurseur de Vatican II ?, chez l’auteur, Saint-Malo (voir la recension in Sodalitium n° 48, pp. 74-75). 68) L’accusation se trouve par exemple dans Le Secret de la Salette devant l’Épiscopat français, livre écrit par le Marquis de la Vauzelle en 1916-1917 et réédité par Delacroix en 2002. Ce n’est pas un hasard s’il s’agit du même éditeur que celui de L’Église éclipsée, ouvrage dont nous avons déjà parlé et qui a relancé dans le public l’accusation contre le cardinal Rampolla. En application du décret du Saint-Office du 21 décembre 1915 sur le “secret de La Salette”, le pauvre Marquis fut privé des sacrements par décret de son ordinaire, l’évêque de Fréjus en date du 13 janvier 1916, confirmé, par un décret du Saint-Office du 21 août 1916 contre un recours du Marquis. Les documents en question, publiés par le Marquis lui-même dans son livre, seront adjoints à une prochaine édition de l’opuscule que nous avons déjà publié : Le Saint-Siège et le secret de La Salette. Le livre du Marquis de la Vauzelle est diffusé aussi par DPF… 69) André Le Sage de la Franquerie, collaborateur du Bloc, de Lacointa, fut également secrétaire des Comités royalistes et des sections de l’Action Française. J’ai déjà cité de lui une conférence qu’il fit en l’honneur de Maurras, où il disait entre autres : “L’un des honneurs de ma vie sera d’avoir connu et aimé le Maître” (p. 2). Dans la même conférence, ne manquent pas les critiques personnelles contre Pie XI RE-MARIE O.P., 37 Le premier congrès international antimaçonnique de Trente de 1896. Un exemple de l’engagement antimaçonnique du pontificat de Léon XIII et les cardinaux Gasparri et Cerretti (pp. 30-31). Félix Lacointa, “monarchiste et catholique fervent”, “après la condamnation de l’Action Française par le Vatican (1927), transforma sa publication [le Bloc catholique] en Bloc antirévolutionnaire” (H. COSTON, Dictionnaire de la politique française, vol. III, p. 392 et vol. IV, p. 396). Les modernistes ont toujours identifié les positions des catholiques intégraux (comme le Sodalitium pianum de Mgr Benigni) et celles du nationalisme intégral de Maurras et de l’Action Française, depuis le livre de NICOLAS FONTAINE (pseudonyme de Louis Canet) Saint-Siège, “Action Française” et “Catholiques intégraux”, (Paris, Gamber, 1928) ; confusion maintenue par le Père CONGAR o.p. dans Vraie et fausse réforme de l’Église, Cerf, Paris 1950 (pp. 604-622, appendice III : Mentalité “de droite” et Intégrisme en France) puis plus explicitement dans La crise dans l’Église et Mgr Lefebvre, Paris 1976. En réalité, s’ils avaient en commun l’estime portée à saint Pie X et à son pontificat (cf. CH. MAURRAS, Le Bienheureux Pie X, Sauveur de la France, Plon, 1953), ainsi que de nombreux ennemis et adversaires (protestantisme, libéralisme, judaïsme, démocratie chrétienne, maçonnerie), le Catholicisme intégral d’un Mgr Benigni et le nationalisme intégral de Ch. Maurras ne pouvaient que s’exclure réciproquement sur le plan spéculatif (les maîtres de l’A.F., tels que Renan, Taine, Comte, etc. n’étaient certes pas catholiques, tout comme Maurras, leur chef indiscuté). Sur le plan pratique, il n’y eut pas rupture (même s’il s’en est fallu de peu), mais pas non plus collaboration (cf. É. POULAT, Intégrisme et catholicisme intégral, op. cit., pp. 15, 78, 239, 265, 281, 399, 471). À propos du nationalisme, le programme du Sodalitium pianum énonçait au point 11 : “Nous sommes absolument (…) contre le nationalisme païen, qui fait pendant au syndicalisme areligieux, l’un considérant les actions comme l’autre les classes, c’est-à-dire des collectivités dont chacune peut et doit pousser amoralement ses intérêts propres, complètement en dehors et à l’encontre de ceux des autres, selon la loi brutale dont nous venons de parler ; et en même temps contre l’antimilitarisme et le pacifisme utopiste, exploités par la Secte dans le but d’affaiblir et d’endormir la société sous le cauchemar judéo-maçonnique ; [Nous sommes absolument] pour le patriotisme sain et moral, patriotisme chrétien dont l’histoire de l’Église catholique nous a donné toujours des exemples splendides ;” (Disquisi- tio, cit., p. 265). Si, de fait, quelques catholiques intégraux soutinrent aussi l’Action Française, et si vice versa quelques nationalistes défendirent le Sodalitium pianum, ceci n’enlève rien au fait que les deux causes n’étaient absolument pas les mêmes. 70) Personne n’ignore que le Christianisme naissant enseignait (déjà dans le Nouveau Testament) la fidélité des baptisés aux Empereurs, même païens et persécuteurs, étant entendu que demeurait le devoir de ne pas tenir compte des “lois” contraires aux droits naturel et divin. Après le triomphe du Christianisme, l’Église a toujours enseigné le droit du Pape de déposer les Souverains manquant à leurs devoirs, et donc la faculté de délier les sujets de l’obligation d’obéir. Mais étant donné qu’une telle décision était souvent impraticable, le Saint-Siège a souvent imposé aux catholiques la tolérance de régimes non catholiques et même persécuteurs, comme ce fut le cas pour l’Irlande et la Pologne opprimées l’une par l’Angleterre protestante et l’autre par la Russie schismatique (Grégoire XVI par ex., encyclique Cum primum du 9 juin 1832 ; encyclique Mirari vos du 15 août 1832 ; ep. Litteras libentissime du 6 avril 1839 ; tandis qu’en des circonstances différentes, différent aussi fut le langage de Pie IX sur la Pologne et la Russie en 1864). Le cas de la France, ne fut donc pas seul et unique, et la politique de Léon XIII et du cardinal Rampolla envers le gouvernement français, bien qu’elle se soit révélée en fait un insuccès, n’était pas en opposition avec une longue tradition diplomatique et même doctrinale. Sur le droit d’insurrection ou l’obligation de soumission au gouvernement constitué, cf. SAINT THOMAS, Summa Theologica, II-II, q. 42, a. 2, corpus et ad 3. 71) Cf. AZZOLIN, op. cit., pp. 83, 184-186, 245-246, 359-360. 72) Cf. G. VANNONI, Massoneria, Fascismo e Chiesa cattolica, [Franc-maçonnerie, Fascisme et Église catholique] Laterza 1979, pp. 167-171. L’auteur, du point de vue anti-conciliariste, présente les arguments pour et contre, avec un penchant personnel favorable au maçonnisme de Gasparri. 73) “Vous avez affirmé avec constance et courage les droits de l’Église catholique – non sans péril pour votre vie – contre les sectes ennemies de la religion …”, écrivait Benoît XV, à l’époque le plus proche collaborateur de Rampolla, à Mgr Jouin dans le Bref Præstantes animi laudes du 23 mars 1918. 74) “Monseigneur, le Souverain Pontife a daigné agréer avec une bienveillance toute paternelle l’hommage de votre nouvelle étude sur la ‘Guerre maçonnique’. C’est avec raison que, dans ce travail, vous avez pris soin de mettre en lumière par des documents et des raisonnements irréfutables, la doctrine aboutissant fatalement, comme on le voit aujourd’hui, à la négation même de Dieu, à l’athéisme social, au ‘laïcisme’, forme actuelle de cette impiété qui, au plus grand détriment des peuples, prétend bannir des sociétés toute trace de religion et toute intervention de l’Église. Vous avez eu soin tout particulièrement de faire ressortir, en dépit des mensonges qui trompent parfois les catholiques euxmêmes, l’identité de la franc-maçonnerie avec elle-même, partout et toujours, comme la continuité du plan des sectes, dont le dessein est bien la ruine de l’Église catholique. Sa Sainteté se plaît donc à vous féliciter et à vous encourager dans vos travaux, dont l’influence peut être si féconde pour mettre en garde les fidèles et les aider à lutter efficacement contre ce qui tend à détruire 38 l’ordre social aussi bien que la religion. (…)” (P. Cardinal Gasparri à Mgr Jouin, 20 juin 1919). Il ne s’agit, certes pas, de paroles de circonstances. 75) Eugenio Pacelli (Pie XII) avait été élève de Mgr Umberto Benigni aux cours de diplomatie que ce dernier donnait à l’Académie des Nobles Ecclésiastiques. Quand Mgr Benigni dut donner sa démission du Secrétariat aux Affaires ecclésiastiques extraordinaires “pour ne pas céder à une insurrection d’évêques étrangers contre lui, un petit nombre, se comptant sur les doigts de la main, lui restèrent attachés”. Parmi ces derniers “monseigneur Eugenio Pacelli” son successeur, lequel, “alors et ensuite, tandis que tous jetaient la pierre à celui qui était tombé pour la défense d’une idée du reste rien moins qu’éteinte, a été, avec un autre éminent cardinal (qui dans sa modestie cache des sentiments très élevés de piété et de foi) celui qui non seulement rappela lorsqu’il en eut l’occasion, son ancien Substitut et professeur, mais eut aussi une respectueuse considération pour ses doctrines”. Voilà ce qu’écrivait un ami sincère de Mgr Benigni, le journaliste Guido Aureli (1869-1955), neveu du cardinal Galimberti, qui était opposé à Rampolla, dans La Vita italiana (fascicule CCCXII, mars 1939, p. 279). Et en effet, la canonisation de saint Pie X et l’éloge de Mgr Benigni dans la Disquisitio sont le plus beau cadeau que Pie XII ait pu faire à son vieux maître. 76) F. CRISPOLTI, op. cit., pp. 130-132. 77) Ibidem, p. 128. 78) Sur les vicissitudes romanesques qui menèrent à la dissolution du Sodalitium pianum, cf. É. POULAT, Intégrisme…, passim. La première dénonciation à Rome, après la mort de saint Pie X, vint de l’archevêque d’Albi, Mgr Mignot (1842-1918), protecteur d’un excommunié, Loisy. Mais le complot qui conduisit à la dissolution débuta en Allemagne, chez les tenants de l’“école de Cologne” qui défendait l’interconfessionalisme des syndicats chrétiens, contre les directives de saint Pie X. C’est dans ces milieux que l’on réussit à obtenir du directeur politique de l’administration militaire allemande en Belgique, Van der Lancken-Wakenitz, un ordre de perquisition contre un membre flamand du Sodalitium, l’avocat Joncks, de Gand (18 mai 1915) avec pour conséquence la confiscation des documents réservés du Sodalitium. Mgr Benigni avait été faussement présenté aux autorités allemandes comme impliqué dans des actes d’espionnage en faveur de la Russie, de la Serbie et de la France ! Dans la première phase étaient impliqués des éléments modernisants allemands, belges et hollandais ; c’est le Père Höner, camillien († 1920) qui resta en possession des documents. La seconde phase débuta en 1921, quand l’historien sulpicien Fernand Mourret (1854-1938), ami du moderniste Blondel, qui sera tenu au courant de toute la manœuvre, se rendit auprès du prêtre hollandais Geurts, héritier du fond Höner. À son retour à Paris avec la copie des documents, l’affaire était prise en mains par les jésuites d’Études, qui avaient contrecarré la politique religieuse de saint Pie X : y étaient mêlés les Pères de Grandmaison, du Passage, RolandGosselin, Desbuquois, Danset, Dumont, Gadenne, d’Herbigny… (ce qui explique, sinon justifie la campagne antijésuite de Mgr Benigni et de l’abbé Boulin dans les années 20). En avril 1921, Mourret composait un mémoire anonyme sur le Sodalitium qui fut envoyé à Rome, entre autres aux Cardinaux Gasparri (secrétaire d’État) et Cerretti (affaires ecclésiastiques ex- traordinaires) avec le but d’obtenir la suppression du Sodalitium Pianum (pratiquement inactif depuis 1914). Le 10 novembre 1921 le cardinal Sbarretti, de la S. C. du Concile (la Congrégation qui avait traité les affaires du Sodalitium sous saint Pie X) interpelle Mgr Benigni pour la première fois ; le 25 novembre le cardinal demande au nom de Benoît XV la dissolution du Sodalitium ; le 1er décembre Mgr Benigni annonce la dissolution pour le 8 décembre 1921. Officiellement (et c’est ce qui compte) le S. P. ne fut l’objet d’aucune condamnation, et la dissolution fut demandée seulement vu “le changement de circonstances” ; en réalité, on désapprouvait, mais on ne pouvait pas le dire, ce qu’avait décidé saint Pie X à ce sujet. Le procès de canonisation du Pape Sarto donnera raison à ce dernier. C’est après la fin du S.P. qu’est née la “légende noire” à son propos, suite à une campagne de presse qui dura de 1922 à 1928 et soulevée par des milieux du gouvernement français et des milieux ecclésiastiques libéraux à l’occasion de la condamnation de l’Action Française de Maurras. Cette campagne déboucha sur le fameux livre Saint-Siège, ‘Action Française’ et ‘Catholiques intégraux’ (1928), signé par Nicolas Fontaine. Il s’agissait d’un pseudonyme (N. Fontaine était un ancien janséniste) derrière lequel se cachait Louis Canet (1883-1958), haut fonctionnaire du gouvernement, exécuteur testamentaire de Loisy et ami de Laberthonnière, lequel mettait dans le même sac le catholicisme intégral de Mgr Benigni et le nationalisme intégral de l’Action Française, en pleine tourmente après la condamnation de Rome. Il faudra attendre 1950, avec la publication de la Disquisitio vaticane sur Pie X et Mgr Benigni, pour voir triompher la vérité avec la pleine réhabilitation de Mgr Benigni. Mais entretemps en France l’intégrisme était devenu un épouvantail, dénoncé par rien moins qu’une lettre pastorale de l’archevêque de Paris, le cardinal Suhard (Essor ou déclin de l’Église, Lettre pastorale pour 1947). Moins de vingt ans passèrent, et les eaux troubles du “Rhin” (la théologie moderniste qui sous le manteau dominait déjà en France, en Allemagne, en Belgique, Autriche, Hollande, Suisse) se jetaient dans le Tibre romain avec Vatican II, par lequel le modernisme a vaincu une bataille importante d’une guerre qui, sur le plan divin, est perdue d’avance [pour eux]. Les portes de l’enfer ne prévaudront pas ! 79) R. DE MATTEI, Modernismo e antimodernismo nell’epoca di Pio X dans M. BUSI R. DE MATTEI, A. LANZA, F. PELOSO, Don Orione negli anni del modernismo, Jaca Book, Milan 2002, pp. 68-71. 80) Cf. ANGELO TAFI, Il servo di Dio Mons. Giovanni Volpi (1860-1931), [Mgr Volpi, serviteur de Dieu] Arezzo 1981. Mgr Volpi fut le directeur spirituel de sainte Gemma Galgani et de la bienheureuse Elena Guerra. 81) G IOVANNI A ZZOLIN , Gli Scotton. Prediche, battaglie, imboscate [Les Scotton, prédications, batailles, embûches], La Serenissima, Vicenza 1998. 82) Sur toute la question, voir également F. RICOSSA, Le Pape du Concile ; troisième partie : de Bergame à Rome (1914-1925) dans Sodalitium n° 24. 83) Cf. LUCIA BUTTURINI, Tradizione e rinnovamento nelle riflessioni del giovane Roncalli [Tradition et renouvellement dans les réflexions du jeune Roncalli], in AA.VV., Un cristiano sul trono di Pietro [Un chrétien sur le trône de Pierre], Servitium editrice, Gorle (Bergamo) 2003, pp. 13-26. C’est justement 39 l’américanisme qui explique le modernisme particulier de Roncalli, modernisme pragmatique, optimiste, désireux d’“aggiornamento”. 84) “Le modernisme se proposait (…) de transformer le catholicisme de l’intérieur, laissant intacte, dans la mesure du possible, l’enveloppe extérieure de l’Église : ‘Le culte extérieur – continue Buonaiuti – durera toujours comme la Hiérarchie, mais l’Église, en tant que maîtresse des sacrements et de ses ordres, modifiera la hiérarchie et le culte selon les temps : elle rendra celle-là plus simple, plus libérale, et celui-ci plus spirituel ; et par cette voie elle deviendra protestante ; mais un protestantisme orthodoxe, graduel ; non violent, agressif, révolutionnaire, insubordonné ; un protestantisme qui ne détruira pas la continuité apostolique du ministère ecclésiastique ni l’essence même du culte’” (M. BUSI, R. DE MATTEI, A. LANZA, F. PELOSO, Don Orione negli anni del modernismo [Don Orione dans les années du modernisme], Jaca Book, Milano 2002, p. 50 ; la citation de Buonaiuti, le dernier excommunié “vitandus”, est extraite de E. BUONAIUTI, Il modernismo cattolico [Le modernisme catholique], Guanda, Modène 1943, p. 130 ; cf. aussi Sodalitium n° 58 (février 2006), pp. 42-43. APPENDICE e présent article a déjà été publié en italien L dans le n° 60 de notre revue, en février 2007. Depuis lors, quelques changements sont intervenus : le Père Rosario Esposito a été affilié à la franc-maçonnerie, l’abbé Marchiset ne dirige plus le site internet Virgo Maria, pour ne citer que ces exemples… Mis à part ces détails et autres semblables, l’information la plus importante pour cette mise à jour concerne le cardinal Rampolla et c’est elle que je rapporte dans cet appendice. Ce qui ressort du témoignage de von Pastor (Tagebücher – Briefe – Erinnerungen, par les soins de Wilchelm Wühr) nous a incité à effectuer d’ultérieurs approfondissements sur le rôle joué d’abord par le cardinal Rampolla puis par le cardinal Gasparri, pendant et après le pontificat de saint Pie X ; mais pour des motifs de temps et d’espace Sodalitium renvoie à plus tard la publication des résultats de ces recherches qui ne modifient cependant pas l’essentiel de ce qui est écrit à propos d’une présumée affiliation maçonnique des deux cardinaux. Une précision importante sur le cardinal Rampolla Le 18 avril 2007, une lettre me parvenait d’un lecteur attentif de Sodalitium, l’éditeur suisse Andreas Pitsch (Verax Verlag, Müstair, Grisons), à propos de l’article Il cardinale Rampolla era massone ? [Le cardinal Rampolla était-il franc-maçon ?] pu- blié dans le n° 60 de l’édition italienne de Sodalitium (pp. 5-37). Le but de la lettre était de porter à ma connaissance un jugement sévère exprimé par saint Pie X à l’historien catholique Ludwig von Pastor (1854-1928), le célèbre auteur de la monumentale Histoire des Papes depuis la fin du moyen-âge (en vingt volumes dans la troisième édition française de 1935 que j’ai en ma possession !). Von Pastor fit publier également un journal, source de précieuses informations pour tous les historiens, notre auteur ayant vécu de longues années en contact étroit avec la Curie romaine. C’est précisément de ce journal (Ludwig Freihewrr von Pastor, Tagebüscher-Briefe-Erinnerungen, par les soins de Wilhelm Wühr, F.H. Kerle Verlag, Heidelberg, 1950, p. 598) qu’est extraite la citation que m’envoyait mon correspondant. En voici la teneur dans la langue originale, l’allemand, et dans une traduction française : “Der Papts sprach dann noch länger über die Korrespondenz Rampollas mit seinen Modernisten-Freunden, die nach dem Tode des Kardinals aufgefunden wurde, und sagte : ‘Sie wären erstaunt, wenn Sie diese lesen würden’. Lächelnd meinte der Hl. Vater, die in jenen Briefen ersehnte Katastrophe (sein Tod, auf den man warten sollte) sei doch nicht eingetreten. Ernst bemerkte Se. Heiligkeit, es sei traurig, aber wahr, Rampolla habe aus zwei verschiedenen Menschen bestanden”. “Le Pape alors m’a parlé encore longuement de la correspondance de Rampolla avec ses amis modernistes, correspondance qui fut trouvée après la mort du cardinal, et il me dit : ‘Vous seriez stupéfait si vous pouviez la lire’. Avec un sourire le Saint-Père ajouta que la catastrophe tant souhaitée dans ces lettres (autrement dit sa propre mort, à laquelle on devait s’attendre) ne s’était pas encore produite. Puis, sur un ton sérieux, Sa Sainteté observa que le fait qu’il y eut en Rampolla comme deux personnes différentes était triste mais vrai”. C’est le 31 mai 1914, quelques jours après le consistoire du 25 mai qui créa cardinal son futur successeur, Giacomo Della Chiesa, Benoît XV, et quelques mois avant la mort même de saint Pie X survenue en août de la même année, durant une audience privée accordée par saint Pie X au comte Von Pastor qu’eut lieu l’entretien ; Pie X 40 confia à Pastor que, pour lui succéder, on pensait au cardinal Ferrata, qui par contre fut premier secrétaire d’État de Benoît XV, mais mourut lui aussi la même année (c’est le cardinal Gasparri qui succeda au cardinal Ferrata). Nous avons là finalement un témoignage direct et non de relato, et qui plus est, impartial, qui rappelle tout de suite au lecteur l’épisode publié par le journaliste Félix Lacointa dans Le Bloc antirévolutionnaire, épisode que lui aurait raconté un évêque qui à son tour l’aurait tenu d’un cardinal (cf. ci-dessus pp. 18-19). Von Pastor et Lacointa parlent certainement du même épisode, car il y a trop de ressemblances entre les deux récits. Et pourtant, si cette ressemblance saute immédiatement aux yeux du lecteur, il est facile aussi de voir en quoi les deux versions diffèrent. Dans le témoignage direct de Von Pastor, saint Pie X a eu la possibilité de lire la correspondance du cardinal Rampolla après sa mort (survenue, rappelons-le, le 17 décembre 1913), mais il n’y a trouvé aucune preuve de son affiliation à la franc-maçonnerie, contrairement à ce qu’atteste Lacointa, qui n’est pas témoin oculaire, si ce n’est une correspondance inattendue avec les modernistes dans laquelle Rampolla manifeste entre autres l’espoir qu’avec la mort prochaine de Pie X se réalise un changement dans le gouvernement de l’Église. Laquelle des deux versions doit-on préférer ? Certainement celle de von Pastor, c’est évident, car elle donne le noyau de vérité à l’origine de la version déjà déformée de Lacointa (le glissement relations avec les modernistes, relations avec les franc-maçons, n’est pas difficile à expliquer). Alors que l’affiliation du cardinal à la franc-maçonnerie est invraisemblable et non démontrée (et peut-être même exclue justement par le témoignage de von Pastor, puisqu’il n’en fait pas mention), un rapport épistolaire avec les modernistes n’est pas du tout invraisemblable, non plus que l’espoir – très répandu ces années-là – de la mort du Pontife et du changement de directives pontificales; c’est d’ailleurs ce qui adveint effectivement avec l’élection du “fils spirituel” de Rampolla à la Chaire de Pierre. Nous avons vu, par exemple (ci-dessus p. 20 et note 3 p. 32) que des contacts de ce genre, des cardinaux comme Svampa, Agliardi, Capecelatro, Mathieu, et qui sait combien d’autres… en avaient. L’impression de saint Pie X sur Rampolla (il y avait en lui comme deux personnes différentes) s’explique si l’on pense à l’estime que le Pape Sarto avait nourrie pour lui (rappelons qu’à tous les scrutins, il avait voté pour le secrétaire d’État de Léon XIII), estime amèrement déçue par le comportement ultérieur du cardinal qui “fit la fronde” durant son pontificat. C’est probablement la déception d’avoir été exclu de la papauté et de la secrétairerie d’État, et le désaccord sur la politique de rupture avec le gouvernement français qui, pour le diplomate qu’il était menait à la catastrophe, qui firent de Rampolla un ennemi de saint Pie X et le poussèrent, dans sa correspondance avec les ennemis du Pape, à souhaiter la mort prochaine de ce dernier (en 1913, Pie X avait déjà frôlé la mort mais Rampolla le précédera dans le sépulcre). Le témoignage de von Pastor ne fait donc que confirmer la conclusion de cet article dédié au “cas Rampolla”. Doctrine Une consécration épiscopale valide est-elle nécessaire pour être Pape ? Par M. l’abbé Francesco Ricossa L’occasion de cet article L es lecteurs les plus attentifs se rappelleront que Sodalitium a déjà traité de cette question, et même à plusieurs reprises (numéros 58 et 59 par exemple). Il nous faut cependant y revenir car, en dépit de nos explications, l’idée selon laquelle Benoît XVI ne serait pas Pape parce que non validement consacré évêque fait son chemin (dans les milieux sédévacantistes, évidemment). Le problème a été soulevé par certains sites internet français dont nous avons déjà parlé. Ces sites ont acquis ces derniers temps une certaine notoriété due en grande partie à ce moyen de diffusion qui permet une grande rapidité d’intervention à moindres frais. Nous ne partageons pas les thèses de ces sites, non plus que la façon de les exposer. Mais il n’est pas dans notre intention d’en parler, ici du moins. Nous nous 41 bornerons exclusivement à l’examen de la question exposée dans le titre de cet article. Tout en ne partageant pas les idées ni les méthodes de ces personnes, nous devons leur reconnaître un mérite : celui d’avoir approfondi la question de la validité du sacrement de l’Ordre administré avec le rite réformé après Vatican II, en particulier celui de la consécration épiscopale. Les écrits en question ont soulevé un débat (dans lequel tous d’ailleurs ne sont pas intervenus avec la même compétence). Les ‘dominicains’ d’Avrillé (1) ont écrit en faveur de la validité des consécrations épiscopales selon le nouveau rite ; au contraire, l’abbé Cekada (2) par exemple, a défendu la thèse de l’invalidité du nouveau rite de consécration épiscopale. Notre position sur l’invalidité des nouveaux rites d’ordination Pour sa part Sodalitium (n° 57, pp. 45-46) a repris à son compte la vieille conviction du Père Guérard des Lauriers o.p. selon laquelle, tout en maintenant fermement le principe que c’est à l’Église qu’il reviendra de donner une réponse définitive sur la question, il faut au moins admettre la probabilité de l’invalidité des consécrations épiscopales administrées selon le nouveau rite. En effet, non seulement un rite de l’Église et promulgué par l’Église ne peut être invalide, mais il ne peut rien contenir de contraire à la foi ou à la morale. Or, étant donné que la Réforme liturgique dans son ensemble, la réforme des rites du sacrement de l’ordre incluse, est moralement inacceptable et s’éloigne de façon impressionnante de la foi catholique telle qu’elle a été définie par le Concile de Trente, elle ne peut provenir de l’Église et ne peut donc être garantie par sa sainteté et son infaillibilité ; (ceux qui reconnaissent l’autorité des ‘papes’ conciliaires et dans le même temps refusent la réforme liturgique, doivent encore nous expliquer comment il est possible que cette réforme puisse venir de l’Église et de son Chef et être en même temps moralement inacceptable). Il s’ensuit que celui qui aurait reçu l’épiscopat, le sacerdoce ou les autres ordres avec le rite réformé ou reçu d’un évêque consacré avec le rite réformé, devrait être à nouveau ordonné “sub conditione”. La question devient d’autant plus urgente qu’avec l’augmenta- Joseph Ratzinger, en compagnie du grand rabbin de Haïfa, Shear Yashuv Cohen, et de la délégation des grands rabbins d'Israël qu'il a reçue tion du nombre de prêtres qui célèbrent avec l’authentique missel romain promulgué par saint Pie V, il y a risque que certains d’entre eux, peut-être sans le soupçonner, ne soient pas validement ordonnés et consacrent donc invalidement. Une nouvelle théorie “sédévacantistelefebvriste”… Mais certaines personnes prétendent tirer de ce fait d’autres conséquences. Si le nouveau rite de consécration épiscopale est invalide, alors Joseph Ratzinger, consacré précisément avec ce rite, ne serait pas évêque. Et puisque le Pape est évêque de Rome, il serait démontré par le fait même et par ce seul argument que Joseph Ratzinger n’est pas non plus Pape. Enfin, avec ce même argument, l’on voudrait démontrer que la Thèse de Cassiciacum, défendue et exposée par le Père Guérard des Lauriers et selon laquelle l’occupant du Siège apostolique (du moins depuis 1965) n’est pas formellement Pape, tout en le demeurant encore matériellement, aurait perdu toute validité et probabilité avec précisément l’élection de Joseph Ratzinger lequel, n’étant pas évêque (consacré) ne pourrait être ‘pape’ même matériellement. Il y a plus : selon ces auteurs, le Père Guérard des Lauriers lui-même – s’il était encore vivant – arriverait à cette conclusion et penserait que la Thèse de Cassiciacum n’a plus aucune probabilité d’être vraie, comme il pourrait être démontré par certaines de ses propres affirmations. Sur ces deux derniers points ces écrivains “sédévacantistes” (mais dévots à la mémoire et à l’œuvre de Mgr Lefebvre) trouvent l’appui d’une revue “lefebvriste” italienne, selon laquelle les disciples du Père Guérard devraient logiquement abandonner la Thèse de Cassiciacum, puisque si Benoît XVI n’est pas évêque, il ne peut être Pape ni formellement ni même matériellement. 42 … qui critique la Thèse de Cassiciacum sans la connaître Avant d’examiner une nouvelle fois la (l’in)consistance de ces affirmations, rappelons brièvement aux lecteurs la signification des expressions utilisées par la Thèse dite de Cassiciacum : “l’actuel occupant du Siège apostolique n’est pas Pape formaliter, tout en étant encore ‘pape’ matérialiter”. En effet, et cela semble incroyable, il y a encore des gens qui écrivent sur la Thèse de Cassiciacum et prétendent en démontrer la fausseté, sans en avoir toutefois compris l’énoncé. Je donnerai pour exemple un article récent (29 décembre 2008 ; arguments repris ensuite le 13 janvier 2009) paru sur l’un de ces sites internet où il est écrit : “Sodalitium (abbé Ricossa) se livre à une critique de cette commission [la commission canonique de la Fraternité Saint Pie X, qui s’arroge entre autres le pouvoir d’annuler les mariages, d’approuver de nouvelles congrégations religieuses, d’exercer – en un mot – des pouvoirs réservés au Saint-Siège, n.d.r.], en faisant valoir que la FSPX – qui prétend exiger de tous la reconnaissance de la légitimité des Papes conciliaires – ne saurait s’arroger une juridiction qui n’appartient qu’au Pape et aux instances qu’il a mises en place, en se basant sur la thèse dite de Cassiciacum, du pape materialiter (possédant encore la juridiction) mais non formaliter (prêchant l’hérésie, et donc étant déchu de son Magistère). Or cette thèse s’avère aujourd’hui caduque, elle n’a plus de base logique, car désormais le prétendu ‘pape materialiter’, l’abbé apostat Ratzinger-Benoît XVI n’est pas sacré validement évêque catholique (ce que reconnaît dans le même temps l’abbé Ricossa). Ratzinger-Benoît XVI ne possédant pas la plénitude du Sacerdoce (potestas ordinis episcopale) de Melchisedech, n’est pas ontologiquement évêque catholique. Il ne peut donc être reconnu pape, ni materialiter ni formaliter”. On prétend combattre la Thèse de Cassiciacum mais, disions nous, on prouve ne pas la connaître du tout. Dire que pour la Thèse de Cassiciacum être ‘pape’ materialiter signifie que ledit ‘pape’ “a encore la juridiction” est une énormité. La Thèse de Cassiciacum en soutenant que quelqu’un n’est pas Pape formaliter, entend dire qu’il n’a pas “l’être avec” de Jésus-Christ, la divine assistance, et donc pas même le pouvoir non seu- lement de magistère mais aussi de juridiction. Affirmer qu’un Pape pourrait avoir le pouvoir de juridiction mais pas celui de magistère est une absurdité. Être encore ‘pape’ materialiter signifie seulement être le sujet canoniquement désigné pour occuper le Siège apostolique (du moins jusqu’à déclaration contraire de la part de l’Église). Certes, un bon catholique n’est pas tenu à connaître la Thèse de Cassiciacum pour rester bon catholique ; mais qui prétend démontrer qu’elle est fausse, ne peut toutefois en ignorer au moins les points fondamentaux. Fermons la parenthèse et passons à l’examen de la question : Benoît XVI n’est pas Pape et ne peut l’être, ni materialiter ni formaliter, parce qu’il n’a (peut-être) pas été validement consacré évêque. C’est ce que pensent nos objecteurs, et c’est ce que nous nions. Venons-en aux preuves. Origine de l’erreur : un faux concept de l’épiscopat, paradoxalement semblable à celui de Vatican II Ce n’est pas la première fois que nous avons l’occasion de le faire remarquer : la racine de l’erreur de ces “sédévacantistes et/ou lefebvristes” consiste dans une conception erronée de l’épiscopat, absolument semblable à celle défendue par Vatican II dans la “constitution dogmatique sur l’Église, Lumen Gentium ”. Nous avons traité cette question de manière approfondie dans l’article intitulé “L’Évêque dans Vatican II et dans le Magistère de l’Eglise. Confrontation des doctrines” (Sodalitium n° 59, pp. 5-38). Dans cet article, je rappelais les prescriptions canoniques post-conciliaires. Selon le nouveau code de droit canon voulu par Jean-Paul II, “par la consécration épiscopale les évêques reçoivent avec la charge de sanctifier, celles d’enseigner et de gouverner…” (can. 375 § 2), et, toujours en vertu de la consécration épiscopale, ils sont faits membres du “Collège des évêques” (can. 336). Le même principe vaut pour le Souverain Pontife, qui est évêque de Rome : selon les constitutions apostoliques Romano Pontifici eligendo de Paul VI (1er octobre 1975) et Universi Dominici gregis de JeanPaul II, l’élu du conclave qui n’aurait pas été consacré évêque n’est pas Pape tant qu’il n’a pas été consacré, ce qui doit se faire aussitôt (cf. Sodalitium n° 59, p. 5). 43 Le code réformé aussi bien que les constitutions apostoliques post-conciliaires sont une application de la doctrine de Vatican II sur l’épiscopat exposée dans Lumen Gentium (chap. III, n° 21) et dans Christus Dominus , doctrine selon laquelle c’est la consécration épiscopale – qui est sacramentelle – qui donne à l’évêque non seulement le pouvoir d’ordre mais aussi celui de juridiction et de magistère, l’intégrant, de plus, dans le collège épiscopal. Si l’on suit cette doctrine conciliaire qui est aussi l’un des piliers fondamentaux de l’œcuménisme “catholique”, on arrive en effet aux conclusions théorisées par nos objecteurs : si l’on réussit à démontrer que Joseph Ratzinger n’a pas été validement consacré, et si la consécration épiscopale est indispensable pour être Pape, alors on peut légitimement conclure que – même pour ce simple motif – Joseph Ratzinger n’est pas le Souverain Pontife. Toutefois, même dans la perspective vatican-secondiste, je n’arrive pas à comprendre comment l’éventuelle invalidité de la consécration épiscopale de Joseph Ratzinger démontrerait qu’il n’est pas non plus ‘pape’ materialiter. Le ‘Pape’ materialiter est celui qui a été élu par le conclave, et n’a cependant pas encore reçu de Dieu l’assistance divine, et par conséquent le charisme de l’infaillibilité, le pouvoir de juridiction et de magistère. Or même dans la perspective de Vatican II, adoptée par les sédévacantistes et les lefebvristes, Joseph Ratzinger serait un bel exemple de ‘pape’ materialiter mais non formaliter, en tant qu’élu canoniquement, mais pas encore Pape du fait de la … consécration épiscopale reçue invalidement ! Selon la doctrine catholique, par contre, la juridiction épiscopale ne dérive pas de la consécration épiscopale (doctrine certaine). Si un laïc est élu et accepte, il est déjà Pape (Pie XII) même avant d’être consacré Nous l’avons abondamment répété et à plusieurs reprises : la première fois en défendant la licéité de la consécration épiscopale de Mgr Guérard des Lauriers (Digitus Dei non est hic : Réponse à l’article ‘Les filles de Lot’ de l’abbé Belmont – Le débat sur l’épiscopat continue : la ‘thèse Belmont’ revue et corrigée dans Sodalitium n° 44, 1997), puis dans l’article cité ci-dessus sur la Collégialité épiscopale (Sodalitium n° 59, spécialement aux pp. 13-15). Je ne reviendrai pas sur la question une énième fois, ce pour quoi je renvoie le lecteur aux auteurs cités dans ces articles, et surtout aux textes du magistère, jusqu’à celui de Pie XII, plus récent et particulièrement clair, dans au moins trois encycliques : Mystici corporis (1943), Ad sinarum gentes (1954), Ad Apostolorum principis (1958). Je me bornerai à citer un discours parfaitement clair de Pie XII, prononcé en français au IIème Congrès mondial de l’apostolat des laïcs ; ce congrès se teint à Rome le 5 octobre 1957 (Discorso Six ans, in Discorsi e radiomessaggi di SS Pio XII, vol. XIX, p. 457, Tipografia poliglotta Vaticana, 1958. Discours Six ans, Documentation catholique, n° 1264, p. 1415) : “Si un laïc était élu Pape, il ne pourrait accepter l’élection qu’à condition d’être apte à recevoir l’ordination et disposé à se faire ordonner ; l e p o u v o i r d ’ e n s e i g n e r e t d e gouverner ainsi que le charisme de l’in faillibilité lui seraient accordés dès l’instant de son acceptation, même avant son ordination”. Laissons pour le moment de côté la condition que le Pape Pacelli pose à l’acceptation de l’élu ; il nous suffira de considérer que ce laïc, élu à la papauté, peut avoir le pouvoir de juridiction et de magistère, avec le charisme de l’infaillibilité, et donc être vraiment Pape (formaliter), immédiatement, étant encore laïc et avant d’avoir reçu la consécration épiscopale (et même l’ordination sacerdotale), contrairement aux prétentions de ces nouveaux et originaux “sédévacantistes”. Dans ce discours, Pie XII ne faisait rien d’autre qu’appliquer la doctrine catholique sur l’origine de la juridiction épiscopale et les constitutions apostoliques réglant l’élection du Souverain Pontife, dont il avait luimême promulguée la dernière le 8 décembre 1945, Vacantis apostolicæ sedis (cf. les nn. 101 et 107 de cette constitution). Une objection : si le laïc élu Pape n’est pas consacré dans la semaine qui suit, aura-t-il jamais été Pape ? Le site internet auquel nous faisions allusion, toujours dans le texte du 29 décembre 2008, poursuit : “En effet, un élu à la papauté (fut-il un simple laïc) doit, après avoir accepté publiquement son élection, accepter par là même 44 de recevoir la plénitude des Ordres sacrés dans la semaine qui suit son élection. Si cela n’a pas été effectué de par sa propre carence, l’acceptation publique de son élection – qui le constitue Pape – doit être réputée nulle et non avenue et avoir été insincère, et par conséquent il doit être tenu par tout catholique pour n’avoir jamais été Pape sous quelque rapport que ce soit. Ratzinger-Benoît XVI ne peut donc être reconnu comme ‘pape materialiter’ car cela reviendrait à lui reconnaître une puissance (la juridiction comme ‘pape materialiter’) sans l’être. Ce qui serait une aberration philosophique de premier ordre. Qu’un thomiste affiché comme l’abbé Ricossa puisse soutenir une telle aberration a de quoi surprendre… La thèse materialiter/ formaliter étant aujourd’hui définitivement caduque depuis l’avènement de l’abbé apostat Ratzinger-Benoît XVI, cela signifie qu’il n’y a plus en ce moment de juridiction pontificale d’un pape régnant sur terre”. Après cette série d’absurdités (nous avons déjà expliqué, par exemple, que le ‘pape’ materialiter n’a pas le pouvoir de juridiction), l’auteur de l’article en ajoute une autre, en reconnaissant dans les évêques de la Fraternité Saint-Pie X la continuité de l’Église, et dans la Commission canonique voulue par Mgr Lefebvre, un début d’Église de suppléance. Remarquons en passant que la négation de la Thèse de Cassiciacum conduit souvent à cette dérive que Mgr Guérard des Lauriers appelait “sessionite créativiste”, c’est-à-dire à la nécessité logique d’inventer une pseudo-église et une pseudo-hiérarchie pour remplacer l’Église et la Hiérarchie que l’on considère comme irrémédiablement défuntes (du moins dans la pratique). Mais revenons à nos moutons… L’auteur anonyme du passage cité ne donne aucune référence à l’appui de ce qu’il dit (nécessité d’être consacré dans le délai d’une semaine, sous peine de ne jamais avoir été Pape) ; il est probable qu’il se rappelait vaguement le texte de Pie XII auquel nous nous sommes référés, sans savoir d’où il était extrait. Dans la Constitution apostolique de Pie XII il est seulement établi que le nouveau Pontife doit être consacré prêtre ou évêque par le Doyen du Sacré Collège, sans que soit prescrit un temps déterminé pour accomplir le rite. Aucun délai déterminé (une semaine ou autre) n’est mentionné non plus dans le discours Six ans dont il est question ci-dessus (et même si un temps déterminé était fixé ailleurs, on devrait prouver qu’il est établi de droit divin !) (3). Pie XII spécifie seulement que ne serait pas valide l’acceptation et non l’élection de l’élu à la papauté, si celui-ci n’était pas apte à recevoir la consécration épiscopale, ou ne voulait pas la recevoir. Notons donc déjà que le simple fait de ne pas être disposé à recevoir la consécration épiscopale ne comporte pas, par le fait même, la nullité de l’élection (qui constitue le sujet ‘pape’ materialiter) mais de l’acceptation (à la suite de laquelle Dieu donnerait à l’élu l’autorité et la divine assistance le constituant ainsi Pape formaliter). Tant que les électeurs ne constatent pas légalement qu’il n’y a pas eu acceptation, et tant qu’ils ne procèdent pas à une nouvelle élection, l’élu demeure donc ‘pape’ materialiter, encore capable de changer d’avis, d’enlever l’obstacle qui dépend de son intention de ne pas être consacré, devenant ainsi, dans l’instant même, Pape formaliter, avant même d’être consacré évêque. Appliquons maintenant ce cas hypothétique à celui de Joseph Ratzinger. Pour pouvoir démontrer que n’étant pas consacré validement il n’est pas non plus Pape formaliter, il faudrait : a ) démontrer avec certitude que sa consécration est invalide b) démontrer avec certitude qu’il en est conscient et que par conséquent il ne veut pas être validement consacré Ces deux points a) et b) une fois démontrés, il serait démontré aussi que, pour ce seul motif, il ne peut être véritablement Pape (formaliter). Par contre il ne serait pas encore démontré qu’il ne peut pas même être ‘pape’ materialiter, autrement dit la personne désignée à la papauté qui n’a pas encore (validement) accepté la désignation en question. Je dirais même plus, ce cas hypothétique serait une parfaite illustration de la Thèse dite de Cassiciacum : c’est-à-dire qu’il expliquerait, à titre d’exemple, comment un sujet élu au pontificat (‘pape’ materialiter) peut ne pas être vraiment Pape (formaliter) à cause d’un obstacle posé par une intention contraire qui peut cependant être rétractée et qui n’est pas, en soi, liée à l’hérésie de l’élu. En réalité l’argument ne démontre pas non plus que Joseph Ratzinger n’est pas vraiment Pape (formaliter), en ce sens que : 45 a) même un laïc, à plus forte raison un prêtre, peut être vraiment Pape s’il accepte l’élection (Pie XII) a1) et de toute façon il n’est pas démontré avec une absolue certitude que Joseph Ratzinger n’a pas été consacré validement évêque b) et quoiqu’il en soit, même s’il était démontré avec une absolue certitude que sa consécration épiscopale était invalide puisque effectuée avec le rite réformé, on ne voit pas comment démontrer qu’il sait, croit et pense ne pas être évêque, et par conséquent refuse par principe d’être consacré évêque catholique. En effet, répétons-le, pour Pie XII ce n’est pas le fait de ne pas être consacré évêque qui rend invalide l’acceptation de l’élu à la papauté (il est dit le contraire : un non Evêque est immédiatement Pape) mais l’intention de ne pas être consacré évêque. Si donc, malgré l’intention d’être évêque, le Pape ne l’est pas de fait (quant au pouvoir d’ordre), il est véritablement et légitimement Pape ; il n’a pas, de fait, une intention contraire à celle que Pie XII a déclarée nécessaire pour accepter l’élection. Or, le point a) est explicitement enseigné par Pie XII. Le point b) se démontre facilement : l’Église ne s’est pas encore officiellement prononcée sur la validité du nouveau rite du sacrement de l’Ordre (comme le fit au contraire Léon XIII avec les ordinations anglicanes, mettant fin à toute discussion à ce sujet). Quant au point c) comment est-il possible de savoir si, au for interne, Ratzinger est convaincu de l’invalidité du nouveau rite et sait être un imposteur, ou si au contraire il est convaincu de la validité de ses ordres sacrés ? Même si les “traditionalistes” d’Avrillé ou d’ÉcôConsécration épiscopale (du Pontifical Romain) ne se disent convaincus de la validité de son ordination épiscopale ? Nous n’avons pas d’arguments certains, et pas même seulement conjecturaux à ce sujet. Convaincu que Ratzinger n’est pas véritablement Pape (formaliter) et aussi que cela est démontré, Sodalitium pense cependant que l’argument se basant sur l’invalidité de la consécration épiscopale de Benoît XVI est un faux argument, qui n’est pas probant et doit donc être mis de côté. Une objection ‘ad hominem’ : pour Mgr Guérard un tel ‘pape’ serait “un figurant” À ce que nous avons dit s’opposerait, comme plusieurs personnes nous l’ont signalé, un texte de Mgr Guérard des Lauriers : “Une telle perpétuation [de la hiérarchie purement matérielle] n’est pas, ex se, impossible. Elle requiert cependant expressément des Sacres épiscopaux qui soient certainement valides. Et comme le nouveau rite est douteux, les ‘occupants’ (du Siège apostolique) ne seront bientôt plus que des figurants” (Sodalitium n° 13, p. 21). Certains “sédévacantistes” ou “lefebvristes” (quoiqu’avec des finalités opposées) en déduisent que si Benoît XVI est un figurant il n’est même pas ‘pape matériellement ou en puissance’, auquel cas la Thèse de Cassiciacum s’effondrerait en faveur du siège totalement vacant. Sodalitium devrait donc avoir la cohérence ou bien d’accepter la vacance totale du siège apostolique, ou bien de reconnaître la légitimité de Benoît XVI, sans plus soutenir la thèse materialiter/formaliter. À cette objection, nous avons déjà répondu dans cet article de même que dans un précédent numéro de Sodalitium (n° 57, p. 45 ). Qu’entend dire alors Mgr Guérard lorsqu’il écrit qu’un tel élu, douteusement consacré, serait “un figurant” ? Notons que Mgr Guérard n’écrit pas qu’un tel élu ne serait plus ‘pape materialiter’, mais qu’il serait ‘un figurant’, ce qui n’est pas la même chose. Déjà, un ‘pape materialiter’ qui prétend l’être aussi ‘formaliter’ est de ce point de vue, un figurant, c’est-à-dire prétendant avoir une autorité et une assistance divine qu’il n’a pas. Privé aussi de la consécration épiscopale, un tel élu serait encore plus figurant, en ce qu’il prétendrait être évêque 46 de Rome sans l’être, non seulement quant au pouvoir de juridiction, mais aussi quant au pouvoir d’ordre. Il demeurerait toutefois ‘ pape materialiter’ , au moins parce que l’Église n’a pas pourvu autrement en ce qui concerne son élection, et parce qu’il est toujours possible que l’élu du Conclave ôte les obstacles qui l’empêchent – actuellement – d’être divinement assisté. Dans le cas d’une décision, à souhaiter bien que pour l’instant invraisemblable, de Benoît XVI ou d’un successeur, d’ôter tout obstacle, confirmant ses frères dans la foi et, donc, condamnant les erreurs modernes, inévitablement se poserait le problème de la réforme liturgique et de la validité des nouveaux rites sacramentaux; et au cas où l’Église devrait se prononcer pour l’invalidité du sacrement de l’ordre et de la consécration épiscopale conférés avec les nouveaux rites, ou pour la persistance du doute, l’élu du Conclave non consacré (ou douteusement consacré) serait, en temps voulu, consacré (simpliciter ou sub conditione), ce qui suppose que dans l’Église soit demeurée et demeure encore et toujours la transmission valide et licite du sacerdoce et de l’épiscopat. Mgr Guérard ne voulait donc pas déclarer que la Thèse de Cassiciacum était sur le point de devenir caduque par le fait que les nouveaux rites du sacrement de l’Ordre et de l’épiscopat sont douteusement valides, il voulait seulement – et tout le contexte d’un article favorable aux consécrations épiscopales sans mandat romain dans la situation actuelle de l’autorité dans l’Église le confirme – argumenter en faveur d’une nécessité : celle de maintenir dans l’Église la transmission non seulement valide (ce qui est assuré par les rites orientaux) mais aussi licite et sainte du sacerdoce et de l’épiscopat, pour la continuité de la Mission de Jésus-Christ, de la hiérarchie ecclésiastique et de la papauté ellemême (materialiter puis formaliter). En effet, bien que le pouvoir d’ordre et le pouvoir de juridiction soient réellement distincts, et peuvent par conséquent être séparés de fait ; bien qu’il y ait dans l’Église des Ordinaires qui n’ont pas reçu la consécration épiscopale (Abbés nullius, Vicaires et Préfets apostoliques) mais ont le pouvoir de juridiction, et des évêques consacrés privés de toute juridiction (comme les évêques titulaires), il n’en reste pas moins vrai que la hiérarchie est une, et que par conséquent, normalement, l’évêque réunit en soi le pouvoir d’ordre et celui de juridiction ; et bien que la consécration épiscopale ne donne pas à l’évêque consacré le pouvoir de juridiction (contrairement à ce qu’affirme Vatican II), elle lui confère une aptitude propre et une certaine exigence à la juridiction (4). Il n’est donc pas impossible que quelqu’un ait (en acte, ou puisse avoir en puissance) le pouvoir de juridiction sans l’Ordre épiscopal, ou ait l’ordre épiscopal sans aucune juridiction (comme c’est le cas aussi des évêques consacrés sans mandat pour continuer la “Missio”) ; mais il serait impossible, parce que contraire à la divine constitution de l’Église, que l’épiscopat disparaisse complètement de l’Église, tant en ce qui concerne la juridiction (et là il suffit qu’il y ait la puissance même sans l’acte) qu’en ce qui concerne l’Ordre (ce pour quoi sont nécessaires des consécrations épiscopales certainement valides) : et c’est ce que Mgr Guérard voulait démontrer. Mais pour ce qui est de la possibilité que l’élu à la papauté puisse ne plus être ‘pape’ materialiter, Mgr Guérard des Lauriers s’empressa, dans l’article cité, de donner le critère qui permette de l’affirmer : “La personne physique ou morale qui a, dans l’Église, qualité pour déclarer la vacance TOTALE du Siège Apostolique est IDENTIQUE à celle qui a, dans l’Église, qualité pour pourvoir à la provision du même Siège apostolique” (Sodalitium n° 13, p. 22). La règle “impérieuse et évidente” rappelée par Mgr Guérard des Lauriers, pour que l’on puisse déclarer que le Siège apostolique n’est pas occupé materialiter ne s’est certainement pas réalisée avec l’élection de Benoît XVI, ni ultérieurement ; elle consiste en effet en ceci : l’occupant du Siège apostolique ne cessera d’être ‘pape’ materialiter que lorsqu’il y aura un vrai Pape (formaliter), lui-même ou un autre sujet (élu par qui a le pouvoir de le faire dans l’Eglise) (5) à sa place. Mgr Guérard des Lauriers toujours (ibidem) soutient que même au cas où l’on démontrerait que l’élection du Conclave était invalide (du fait d’un obex touchant les électeurs ou l’élu), cet élu serait encore “du moins provisoirement ‘pape’ materialiter”, jusqu’à ce que la personne physique ou morale habilitée à le faire dans l’Église, déclare la nullité 47 de cette élection. Il est donc évident que même aujourd’hui, conformément à sa pensée, Mgr Guérard soutiendrait que Benoît XVI est encore ‘pape’ materialiter. Une objection possible qui se fonde sur les prescriptions canoniques concernant l’évêque diocésain Nous avons vu, dans le cas du Pape, qu’aucun temps déterminé n’est prescrit pour que l’élu soit consacré évêque (au cas où il ne le serait pas déjà évidemment). Cependant nos adversaires pourraient être tentés d’appliquer au Pape les prescriptions du Code de droit canon. Le code wojtylien, au can. 375 § 2, établit que l’évêque reçoit la charge de gouverner et d’enseigner par la consécration épiscopale ; et ce, en parfaite conformité avec Lumen Gentium. Par contre le Code de Benoît XV de (1917) prévoit, en conformité avec le magistère de l’Église, que l’élu à l’épiscopat devient effectivement et à plein titre évêque d’un diocèse grâce à la “provision ou institution canonique” (can. 332 § 1) reçue du Pontife romain (“Cuilibet ad episcopatum promotum, etiam electo, presentato vel designato a civili quoque Gubernio, necessaria est canonica provisio seu institutio, qua Episcopus vacantis diocesis constituitur, quæque ab uno Romano Pontefice datur”). La consécration épiscopale est un acte ultérieur, effectué sur quelqu’un qui est déjà évêque, à tous les effets, quant à l’enseignement et à la juridiction. Toutefois, le Code fixe un délai dans lequel doit se faire cette consécration épiscopale : “Nisi legitimo impedimento prohibeatur, promotus ad episcopatum, etiamsi S.R.E. sit Cardinalis, debet, intra tres menses a receptis apostolicis litteris, consecrationem suscipe, et infra quatuor ad suam diœcesim pergere, salvo præscripto can. 238 § 2”. (canon 333) S’il n’y a pas empêchement légitime, l’évêque doit donc être consacré dans les trois mois suivant la réception des lettres apostoliques. Mais il y a plus. Le canon 2398 prévoit en effet que : “ Si quis ad episcopatum promotus, contra præscriptum can. 333 intra tres menses consecrationem suscipere neglexerit, fructos non facit suos, fabricæ ecclesiæ ca- thedralis applicandos ; et si postes in eadem negligentia per totidem menses perstiterit, episcopato privatus ipso iure manet”. Donc si, par sa faute, le nouvel évêque n’est pas consacré dans les six mois, il perd par le fait même l’épiscopat ! Or, le Pape n’est-il pas l’évêque de Rome ? Et donc, ne peut-on pas dire que six mois après son élection, Joseph Ratzinger, invalidement consacré, a cessé d’être Pape (s’il l’a jamais été) ? Même cette dernière tentative est infructueuse. En effet, ce qui est sanctionné par la loi canonique oblige le sujet, non le législateur, et ne concerne pas le Pape. Les lois qui régissent l’élection du Pape se trouvent dans la Constitution de Pie XII citée ci-dessus, et non dans les canons du Code de droit canonique. D’autant plus que, tandis que l’évêque, recevant son autorité du Pape, suprême législateur ecclésiastique, peut en être privé par le Pape (comme dans le cas du canon 2398), on ne peut pas en dire autant du Pape qui reçoit son pouvoir de Dieu, et non de l’Église ou d’une autorité humaine. Le droit positif à propos de l’évêque diocésain ne s’applique donc pas au Souverain Pontife ; mais ne peut-on penser que ce qui est prescrit par le Code est en réalité de droit divin ? Absolument pas. Ce qui est prescrit par le Code est une mesure disciplinaire introduite par le concile de Trente (session VII, de reformatione, c. 9 ; sessione XXIII, de reformatione, c. 2). Le Concile entendait ainsi extirper divers abus concernant la résidence de l’évêque. Avant la Réforme catholique, en effet, il n’était pas rare qu’un évêque, appartenant le plus souvent à une grande famille, ne réside pas dans son diocèse et ne reçoive même pas la consécration épiscopale, se contentant d’encaisser les revenus du diocèse et gouvernant par l’intermédiaire des évêques auxiliaires lesquels, consacrés, administraient les confirmations et les ordres sacrés. Parmi les nombreux exemples des coutumes de l’époque, je citerai le Pape Pie III Piccolomini. Lorsqu’il fut élu en 1503, on dut le consacrer évêque ; pourtant il avait été évêque de Sienne pendant quelque chose comme 43 ans ! Durant ces longues 43 années Piccolomini, avec l’autorisation de son oncle, le Pape Pie II, avait été évêque de sa ville natale sans avoir été consacré ni même avoir 48 Le Pape Pie XII été ordonné prêtre, et ce sont des auxiliaires qui le remplaçaient dans ses fonctions sacramentelles. Il s’agit certes d’une décadence de la discipline, justement réformée à Trente, mais cette décadence dans la discipline n’était pas contraire à la loi de l’époque et ne s’opposait donc pas, en soi et à strictement parler, à la nature de l’épiscopat, étant donnée la distinction entre ordre et juridiction. La loi passée du Tridentin au Code est donc de droit positif, et ne peut être appliquée au cas du Souverain Pontife (6). appliquer Vatican II et ses réformes est en effet incompatible avec la réalisation de la finalité de l’Église. Élu au Pontificat suprême, Joseph Ratzinger est encore ‘pape’ matériellement. L’unique autorité qui pourrait déclarer que Joseph Ratzinger n’est pas ‘pape’ matériellement est celle de l’Église, autrement dit – durant le siège vacant – le collège des Cardinaux ou bien le Concile général imparfait. Le temps qui passe et le prolongement de la “crise” qui secoue l’Église, loin de rendre caduque la thèse théologique du Père Guérard des Lauriers o.p. la rend encore plus actuelle. Notre Institut et la revue demeurent fidèles à cette thèse théologique qui leur permet d’éviter les graves conséquences inhérentes aux autres opinions et choix concrets et opposés à la Thèse de Cassiciacum, qui ont pris naissance chez les catholiques voulant demeurer attachés à la Tradition de l’Église, qu’il s’agisse du sédévacantisme complet, du lefebvrisme ou de l’acceptation de Vatican II (Ecclesia Dei). La Thèse de Cassiciacum ne deviendra caduque, quand Dieu voudra, que lorsque, avec l’éradication de l’hérésie moderniste, la crise ouverte par Vatican II prendra fin. Conclusion Notes Pour conclure, nous voudrions rappeler – brièvement et clairement – l’opinion de notre Institut et de notre revue sur ces questions plusieurs fois soulevées et qui font l’objet de cet article : La réforme liturgique voulue par Paul VI après Vatican II, avec une finalité œcuménique, ne peut venir de l’Église catholique, et par conséquent de son autorité légitime. De ce fait, les nouveaux rites du sacrement de l’Ordre ne jouissent pas des garanties propres à tout rite de l’Église catholique : sainteté, licéité, validité. Vu que Joseph Ratzinger a été consacré avec le nouveau rite, sa consécration épiscopale est douteuse. Avoir reçu la consécration épiscopale n’est pas indispensable pour être Souverain Pontife (Pie XII). Joseph Ratzinger n’est pas formellement Pape non parce que sa consécration épiscopale est douteusement valide, ni même parce qu’il serait formellement hérétique, mais parce qu’il n’a pas l’intention objective et habituelle de réaliser le bien et la finalité de l’Église. Vouloir 1) F. Pierre-Marie, Sont-ils évêques ? Ed. du Sel. 2) L’abbé CEKADA a écrit quatre articles à ce sujet: 1- Absolutely Null and Utterly void (2006) [Absolument nulles et complètement invalides] 2- Why the new Bishops are not true bishops ? (2006) [Pourquoi les nouveaux évêques ne sont pas de vrais évêques] 3Still null and still void (2007) [Toujours nulles et toujours invalides] 4- New Bishops , empty tabernacle [Nouveaux Évêques, tabernacles vides] Sur www.traditionallmass.org/articles. 3) Ce qui est évidemment impossible, puisque sur ce point les us et coutumes ont changé plusieurs fois dans l’histoire, comme on peut le lire, entre autres, dans Gaetano Moroni, Dizionario di erudizione storico-ecclesiastica, Venezia, Tipografia Emiliana, 1842, vol. 16, pp. 305-317. Jusqu’au Xème siècle, les élus au Pontificat romain n’étaient pas évêques, et souvent pas même prêtres, à cause du principe de l’inamovibilité de l’évêque. De fait, la première exception à la règle, avec l’élection en 891 du Pape Formose qui était évêque, fit impression. À cette époque-là on pensait que le règne du Pape commençait avec la consécration mais, laissant de côté les questions de théologie positive (cf. la note 46 dans Sodalitium n° 59, p. 34), on doit considérer que de toutes façons l’autorité papale ne dérive pas de la consécration elle-même mais – avec l’acceptation de l’élu – de Dieu même. L’obligation abusive imposée par les Empereurs d’Orient de communiquer à Constantinople (ou à l’exarque de 49 Ravenne) la nouvelle de l’élection avant la consécration retardait beaucoup l’accomplissement du rite sacré qui précédait souvent l’intronisation. Les derniers Pontifes consacrés après l’élection furent Clément XI en 1700, Clément XIV en 1769, Pie VI en 1775 et Grégoire XVI en 1831 : tous furent effectivement consacrés dans un laps de temps allant de 4 à 10 jours environ. Mais il n’en fut pas toujours ainsi : Jean V fut élu en mars et consacré en août (898) ; Gélase II élu en janvier attendit jusqu’en mars 1118 (il n’était même pas prêtre) ; le grand Innocent III fut élu le 8 janvier, ordonné prêtre le 21 février et évêque le lendemain (1198) ; Adrien V mourut en 1276, 39 jours après l’élection, sans avoir même été ordonné prêtre, et pourtant il est considéré par tous comme un Pape légitime, et c’est le cas qui nous paraît le plus frappant. En réalité, tout comme le couronnement, l’éventuelle consécration a lieu à la date choisie par le Pape. 4) F. RICOSSA, La question de l’épiscopat : Réponse à l’abbé Belmont. Le Débat sur l’épiscopat continue… , Sodalitium n° 44, pp. 26-29 ; F. R ICOSSA , L’Épiscopat dans Vatican II et dans le magistère de l’Église. Confrontation des doctrines, dans Sodalitium, n° 59, spécialement à la note 44. Selon la Nota prævia à Lumen Gentium, la consécration donne à l’évêque ontologiquement le pouvoir de juridiction, même s’il n’est pas libre quant à son exercice. 5) Cf. F. RICOSSA, L’élection du Pape, dans Sodalitium n° 54, pp. 5-17. 6) Un petit détail aide à comprendre que le cas du Pape est bien différent de celui des autres évêques. La Constitution apostolique du Pape Pie XII, “Vacantis Apostolicæ Sedis” du 8 décembre 1945 prévoit au n° 107 que le nouveau Pontife peut ne pas être évêque et même prêtre, et doit donc être ordonné prêtre et ensuite consacré. Pour l’évêque résidentiel, par contre, le Code prévoit au canon 331 § 1, 3° que le nouvel Evêque doit être prêtre depuis au moins cinq ans. Joie indécente : un prêtre de la Fraternité Saint-Pie X (l'abbé de La Roque) exhulte après la levée des excommunications en débouchant une énorme bouteille de champagne (cf. article une "joie indécente" sur le site www.quicumque.com) Documents Déclaration de l’Institut Mater Boni Consilii sur le décret du 21 janvier 2009 concernant la levée de l’excommunication des quatre évêques de la Fraternité Saint-Pie X ar un décret du 21 janvier 2009, le Préfet de la Congrégation pour les évêques, le cardinal P Giovanni Battista Re, a remis “aux évêques Ber- nard Fellay, Bernard Tissier de Mallerais, Richard Williamson et Alfonso de Galarreta l’excommunication latae sententiae décrétée par cette Congrégation le 1er juillet 1988”, déclarant privé d’effet juridique, “à partir de ce jour, le décret émis à l’époque”. Comme le rappelle ce même décret, la levée de l’excommunication a été accordée après une demande en ce sens, faite par Mgr Fellay au nom des quatre évêques, et adressée au cardinal Castrillon Hoyos, président de la Commission pontificale Ecclesia Dei (lettre de Mgr Fellay du 15 décembre 2008). En soi, le décret du 21 janvier concerne exclusivement les quatre évêques, qui sont ainsi “absous” de “l’excommunication” qui les avait frappés plus de vingt ans auparavant, et non pas la Fraternité Saint-Pie X qui pour le moment, avec ses évêques, est encore considérée comme privée de la “pleine communion” et de tout statut canonique. Bien que personne n’en parle, la “suspens a divinis” pour tous les prêtres de la Fraternité semble toujours être en vigueur. Les faits contredisent donc la prétention de la Fraternité elle-même d’avoir été pleinement réhabilitée par le décret du 21 janvier. Voici les faits, dans leur aspect matériel, mais quel jugement peut-on porter sur cet événement qui, qu’on le veuille ou non, aura une influence sur la vie de l’Église ? Les consécrations du 30 juin 1988 Un jugement exact, à la lumière de la Foi, sur ce décret et sur le fait que les autorités de la Fraternité Saint-Pie X l’aient sollicité, en l’imposant comme préalable à un futur accord, doit, avant toute chose, se fonder sur l’événement qui fut l’occasion du “décret d’excommunication” qui est privé aujourd’hui d’effets juridiques : les consécrations épiscopales sans mandat pontifical faites par Mgr Lefebvre et Mgr de Castro Mayer le 30 juin 1988. À l’occasion des consécrations épiscopales de 1988, l’Institut Mater Boni Consilii publia une Déclaration (Sodalitium n° 17, septembre-octobre 1988) qui garde toute sa valeur. Nous y disions notamment : “L’Institut Mater Boni Consilii constate que Mgr Lefebvre, et ceux qui le suivent, n’ont pas fait formellement schisme, parce que désobéir à Jean-Paul II qui n’est pas formellement Pape n’est pas un schisme. De son côté, Jean-Paul II, étant pri- 50 vé de toute autorité, ne peut excommunier personne, et les censures prévues par le droit lui-même ne s’appliquent pas en l’absence d’autorité. Cependant, Mgr Lefebvre et la Fraternité SaintPie X distillent dans l’esprit des fidèles qui les suivent une pratique – qui se transforme chaque jour davantage en doctrine – absolument schismatique, selon laquelle on doit, dans les faits, désobéir même en matière grave au vrai Vicaire du Christ, sans tenir aucun compte de sa juridiction universelle et immédiate sur les fidèles catholiques. De leur point de vue, le fondateur, les membres et les fidèles de la Fraternité Saint-Pie X, agissent schismatiquement”. À notre avis, on pouvait donc appliquer aux protagonistes de la journée du 30 juin 1988 cette phrase de la Sainte Écriture : “il n’y a personne qui fasse le bien, pas même un seul”. La Fraternité Saint-Pie X n’a pas agi licitement en consacrant des évêques non seulement sans l’accord du Pape, mais contre la volonté de celui qu’ils considéraient être le Pape. Les modernistes agissaient encore moins licitement, eux qui occupaient et occupent encore les Sièges épiscopaux, y compris le Siège apostolique, en imposant une doctrine contraire, et même contradictoire, en plusieurs points avec la doctrine de l’Église, et une réforme liturgique d’esprit protestant : “Mais quand nousmême, quand un ange venu du ciel vous annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons annoncé, qu’il soit anathème”(Gal. I, 8 ; cf. Concile Vatican I, DS 3070). Le fidèle catholique ne pouvait, ce jour-là, suivre ni Mgr Lefebvre, ni Jean-Paul II, d’autant que nous annoncions déjà à ce moment là, en nous fondant sur les paroles mêmes de Mgr Lefebvre : “Des tractations futures ne sont pas exclues, au contraire même, elles sont prévues. La tromperie continue, comme avant et plus qu’avant”. La douloureuse impression d’alors (que l’esprit de l’Église catholique ne se trouve ni auprès des modernistes, évidemment, ni même à Écône) se renouvelle aujourd’hui – vingt ans après – face au décret du 21 janvier 2009. Un geste œcuménique, selon la logique de Vatican II Les observateurs superficiels (ou malicieux) des récents événements ecclésiastiques, ont d’abord diffusé l’idée que Joseph Ratzinger – Benoît XVI est ou voudrait être le fossoyeur de Vatican II (plaise à Dieu !). La même théorie fut déjà défendue, en son temps, au sujet de Jean-Paul II et même de Paul VI. Il s’agit hélas d’une erreur flagrante, contredite par leurs propres déclarations explicites. Benoît XVI, comme avant lui Paul VI, Jean-Paul Ier et Jean-Paul II, veut simplement appliquer Vatican II, avec la prétention que Vatican II est la continuité (et le développement) du magistère traditionnel (cf. le discours de Benoît XVI à la Curie romaine du 22 décembre 2005, republié de façon significative par l’Osser- vatore Romano du 25 janvier 2009, p. 5 ; voir la critique sur Sodalitium n° 59, pp. 28-30). L’absolution des quatre évêques “lefebvristes” intervient, selon Benoît XVI, dans cette optique conciliaire. Concédée durant la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, publiée la veille de la fin de cette Semaine et du 50ème anniversaire de l’annonce de la réunion du Concile de la part de Jean XXIII (25 janvier 1959), la décision ne peut pas ne pas rappeler un geste analogue et encore plus solennel : l’absolution réciproque (!) des excommunications que s’échangèrent le “Patriarche” schismatique de Constantinople Athénagoras et Paul VI le 7 décembre 1965, avec une déclaration commune qui fut lue à la clôture de Vatican II par le cardinal Willebrands devant le concile réuni en session solennelle. L’Église catholique exige pour l’absolution des censures ecclésiastiques (dont fait partie l’excommunication) que le coupable mette fin à sa contumace (can. 2248 §2)*, ce qui implique que le coupable “se soit repenti du délit commis et qu’il ait accompli, ou au moins sérieusement promis d’accomplir, une satisfaction appropriée pour les dommages et le scandale causés” (can. 2242 §3) ; bien qu’il revienne à l’autorité qui absout de juger si les conditions requises sont présentes (ibidem), il apparaît évident que les quatre évêques n’y ont pas obtempéré, prétendant au contraire n’avoir jamais été excommuniés (cf. la déclaration de Mgr Fellay du 24 janvier 2009). Mais par ailleurs les Orientaux se sont-ils jamais repentis de leur schisme ? Croyez-vous qu’Athénagoras ait reconnu le primat de juridiction du Pape et l’infaillibilité de son magistère ? Bien sûr que non. Analogiquement, l’absolution accordée par Benoît XVI aux quatre évêques s’inscrit dans l’ecclésiologie œcuménique de la “communion imparfaite” (Unitatis redintegratio, Lumen Gentium) et “au nouveau style d’Église voulue par le concile qui préfère la médecine de la miséricorde plutôt que la condamnation” (Osservatore Romano, 26-27 janvier 2009). La levée des excommunications est donc, comme soutient l’ Osservatore Romano (25 janvier 2009) un des innombrables bons fruits du concile : “Les bons fruits du concile sont innombrables, et il faut compter parmi eux maintenant le geste de miséricorde à l’égard des évêques excommuniés en 1988. C’est un geste qui aurait plu à Jean XXIII et à ses successeurs [peut-être pas à Paul VI, n.d.a.], un cadeau sincère que Benoît XVI, Pape de paix, a voulu rendre public en coïncidence avec l’annonce de Vatican II (…). Un demi-siècle après cette annonce, Vatican II est vivant dans l’Église”. Même Benoît XVI l’a dit le 25 janvier, dans la Basilique de Saint-Paul, entouré durant la cérémonie liturgique par des “orthodoxes”, des anglicans et des luthériens, en faisant l’éloge de l’œcuménisme conciliaire qui prévoit la conversion de tous, * Les canons cités font référence au code de droit canon promulgué par Benoît XV. 51 “même de l’Église catholique”, commente scandaleusement l’Osservatore du 26-27 janvier. Le vrai but de Benoît XVI ? Avec la levée de l’excommunication, “le Pape débarasse le terrain de possibles prétextes à des polémiques infinies, pour entrer dans le fond du problème : la pleine acceptation du magistère, y compris évidemment le concile Vatican II” (Osservatore Romano, 26-27 janvier 2009) : c’est bien sûr dans ce sens qu’il faut lire les paroles du décret, qui demande désormais “véritable fidélité et véritable reconnaissance du Magistère et de l’autorité du Pape par la preuve de l’unité visible”. Si quelqu’un avait encore des doutes, le discours tenu par Benoît XVI le 28 janvier a effacé toute ambiguïté, en parlant explicitement de Vatican II : “C’est justement pour accomplir ce service de l’unité, qui qualifie de façon spécifique mon ministère de Successeur de Pierre, que j’ai décidé il y a quelques jours, d’accorder la rémission de l’excommunication qu’avaient encourue les quatre évêques ordonnés en 1988 par Mgr Lefebvre sans mandat pontifical. J’ai accompli ce geste de miséricorde paternelle parce que ces prélats ont manifesté à plusieurs reprises leur vive souffrance du fait de la situation dans laquelle ils s’étaient retrouvés. Je souhaite que mon geste soit suivi d’un engagement diligent de leur part à accomplir les pas ultérieurs nécessaires pour réaliser la pleine communion avec l’Église, en témoignant ainsi une vraie fidélité et une vraie reconnaissance du magistère et de l’autorité du pape et du concile Vatican II.” Mgr Fellay : ambiguïté, pragmatisme et contradiction Si l’on peut reconnaître une certaine logique – comme on l’a vu – aux modernistes, on ne peut pas en dire autant de la Fraternité Saint-Pie X. La Fraternité Saint-Pie X reconnaît en Benoît XVI le Vicaire du Christ ; mais malgré cela continue à refuser son enseignement sur Vatican II. La Fraternité demande à Benoît XVI l’absolution de l’excommunication pour ses quatre évêques, reconnaissant (implicitement) la validité de cette censure, et se reconnaissent ainsi (implicitement) repentis du délit commis. Pour ses fidèles, par contre, elle déclare l’avoir “toujours contestée”, présentant l’absolution comme une victoire de la “Tradition”. Et en effet les quatre évêques ont vécu, pendant vingt ans, comme si elle n’avait jamais existé, et même en s’en vantant et en la revendiquant comme signe d’orthodoxie, tout en sachant que si un excommunié, impénitent, reste durant un an dans l’excommunication, il est suspect d’hérésie (can. 2340 §1). Selon le décret, l’excommunication des évêques a été levée parce que Benoît XVI est “confiant en leur volonté, exprimée dans la lettre citée auparavant, de ne ménager aucun effort pour approfondir, via des discussions nécessaires avec les autorités du Saint-Siège, les questions qui restent en suspens afin de pou- voir parvenir rapidement à une pleine et satisfaisante solution au problème qui s’est posé à l’origine”. Le problème est certainement d’ordre disciplinaire (quel statut donner à la Fraternité) mais aussi et surtout d’ordre doctrinal, et concerne Vatican II et ses réformes. La levée de l’excommunication ne résout pas du tout, mais plutôt couvre, de son ambiguïté, les problèmes posés par Vatican II. Lumen Gentium, Gaudium et spes, Unitatis redintegratio, Nostra Ætate, Dignitatis humanæ etc., sont-ils le développement de la doctrine catholique, ou sont-ils en contradiction avec la doctrine catholique ? Et s’ils sont en contradiction avec la doctrine catholique, de telles erreurs, et les réformes qui les ont suivis, peuvent-elles venir de la sainte Église, infaillible et indéfectible, et donc du Vicaire du Christ ? La déclaration de Mgr Fellay du 24 janvier parle seulement de “raisons doctrinales de fond qu’elle (la Fraternité) estime être à l’origine des difficultés actuelles de l’Église”, difficultés énoncées par Jean-Paul II luimême ! Lesdites raisons doctrinales, qui à ce stade ne sont pas davantage spécifiées, sont présentées comme une opinion de la Fraternité, et non comme la doctrine non négociable de l’Église… Les premiers actes posés par Mgr Fellay après la “levée des excommunications” semblent confirmer que la Fraternité Saint-Pie X est désormais disposée à accepter des renoncements douloureux, pourvu qu’elle arrive à une solution “positive” des négociations, et à accomplir ainsi le pas suivant désiré par Joseph Ratzinger ; cela de façon cohérente avec l’affirmation de la Fraternité (incluse entre autre dans toutes leurs célébrations de la Messe una cum famulo tuo Papa nostro Benedicto) qui dit reconnaître son autorité et son magistère. Perspectives futures Hélas pour les catholiques, des discussions entre la Fraternité Saint-Pie X et des néo-modernistes risque de naître une réponse ambiguë que tous les deux semblent souhaiter, et qui est indispensable pour un accord entre les parties. Tout fait penser, en effet, qu’on puisse “parvenir bientôt” (décret du 21 janvier) à l’accord. Benoît XVI a pleinement satisfait aux conditions imposées par la Fraternité Saint-Pie X, d’abord avec le Motu Proprio Summorum Pontificum , puis maintenant avec le décret de la Congrégation pour les évêques. Il n’est pas réaliste de penser qu’il l’ait fait sans recevoir de la part de Mgr Fellay et de la Fraternité un engagement à trouver rapidement un accord. Dans cette perspective, la Fraternité SaintPie X devrait suivre l’exemple de toutes les autres sociétés religieuses qui, lorsqu’elles se sont séparées d’elle, ont, les premières, signé un tel accord : à savoir accepter la nouvelle doctrine conciliaire et la légitimité de la nouvelle liturgie. Si, par contre, la Fraternité – dans sa totalité ou en partie – devait refuser de faire “le pas suivant” 52 qui lui est demandé, elle conserverait toutefois cette position contradictoire et fausse, qui la discrédite, selon laquelle les catholiques devraient – pour rester catholiques – désobéir à un Pape légitime et s’opposer à son magistère, puisque les erreurs, que la Fraternité condamne à raison, viendraient du Pape et donc de l’Église, et en définitive du Christ. Qui ne voit pas que ces affirmations sont un outrage à la Papauté, à l’Église, à Notre-Seigneur ? La ligne de conduite à tenir La ligne de conduite à tenir est celle que nous avons déjà exprimée dans un précédent communiqué (juin 2008) : “Notre devoir n’est donc pas de favoriser les “tractations” en cours ou, au contraire, de les dénoncer, mais d’espérer plutôt que, tant la Fraternité Saint-Pie X que ceux qui suivent les erreurs conciliaires – après avoir renoncé aux erreurs jusque là défendues et proclamé intégralement la foi catholique – s’unissent enfin, non dans l’erreur, mais dans la Vérité.” De son côté, l’Institut Mater Boni Consilii, conformément à ses statuts, “entend représenter pour tous les fidèles qui le désirent (…) en ces temps de désorientation un instrument pour persévérer dans la fidélité absolue au dépôt de la foi révélé par Dieu et proposé par le Magistère infaillible de l’Église”. Nous sommes certains d’avoir en Jésus-Christ, la Voie, la Vérité, la Vie, et dans l’Église catholique, colonne et fondement de la Vérité, la voie à parcourir et le rocher indestructible sur lequel s’appuyer, rocher contre lequel les portes de l’enfer ne prévaudront point. L’Institut renouvelle donc sa profession de foi catholique, son adhésion au magistère infaillible et non réformable du Pape et de l’Église. C’est pour cela qu’il estime encore aujourd’hui que la position théologique qui décrit le mieux la situation actuelle de l’Église reste toujours celle que Mgr Guérard des Lauriers défendit publiquement, selon laquelle le Siège apostolique est vacant, formellement mais non pas matériellement, à partir de Vatican II. La résolution de cette crise ne passe pas par une solution disciplinaire comme celle demandée et obtenue par la Fraternité Saint-Pie X, mais seulement par la condamnation des nouveautés introduites par Vatican II contre l’enseignement de l’Église et sa discipline canonique et liturgique (tant pour le rite du Saint Sacrifice de la Messe, que pour les rites de tous les sacrements), et la défaite définitive de l’hérésie moderniste. Dans l’unique Église de Celui qui est la Vérité, ne peuvent cohabiter la vérité et l’erreur, la Messe catholique et le rite réformé. Nous confions cette intention à l’intercession spéciale de la Très Sainte Vierge, de saint Joseph, patron de l’Église universelle, des saints apôtres Pierre et Paul, et des saints pontifes Pie V et Pie X. Verrua Savoia, 28 janvier 2009 Vie de l’Institut C hers lecteurs, le dernier numéro de Sodalitium (61) terminait sa chronique au 31 mars 2008, et c’est à partir de cette date que nous reprenons le récit de la vie de notre Institut jusqu’au 28 février 2009. L’Institut… compte désormais deux nouveaux membres, que Mgr Stuyver a accueilli lors d’une cérémonie qui s’est déroulée dans la chapelle de Notre-Dame du Bon Conseil à Dendermonde, le 22 février 2009. De la maison de Verrua. Nous mentionnons toujours avec plaisir les visites de certains confrères dans le sacerdoce ; parmi eux, celle d’un prêtre et d’un diacre de Pologne, au mois d’octobre. Séminaire Saint Pier re Martyr. Samedi 9 août 2008, fête du saint Curé d’Ars, à la fin des Exercices Spirituels des hommes à Ra- Séminaire Saint Pierre Martyr : les ordinations à Raveau le 9 août 2008 53 Les Sœurs de l’Institut Mater Boni Consilii Les Sœurs de l’Institut Mater Boni Consilii continuent leur formation religieuse sous la houlette de l’abbé Murro. Grâce à Dieu et à leur apostolat, les familles reçoivent une grande aide dans l’éducation des fillettes, et de nouvelles familles, y compris de Verrua, nous confient leurs enfants. Les Sœurs, en plus d’aider les prêtres, s’occupent en effet de l’éducation de la jeunesse, particulièrement féminine, en donnant des répétitions scolaires, en s’occupant du catéchisme à Verrua et à Turin, en organisant des sorties et en accueillant petites filles et jeunes filles dans leur Casa Maria Ausiliatrice. Dans leur petit Journal, nous lisons que le “25-27 avril 2008, pour la fête de Notre-Dame du Bon Conseil, les enfants ont mis des fleurs devant le petit autel pour chaque petit sacrifice fait ; puis glace (même pour les prêtres), jeux, et le soir chasse aux hérissons dans le jardin (personne n’en a trouvé !). Pour la Fête-Dieu (22 mai) nous conduisons les fillettes qui, vêtues de blanc, jettent les fleurs devant le Saint-Sacrement à la procession. Le 20 juin 2008, la Casa Maria Ausiliatrice est tout illuminée le soir avec de petites bougies pour la fête de la Consolata (comme c’était l’usage à Turin) ; et le lendemain tout le monde en promenade à Campiglia avec l’abbé Murro : barbecue (saucisses !) dans le bois, jeux dans le torrent ; les enfants ont pu prendre en main des têtards ! Après le camp d’été (voir les activités estivales), les petites filles ont été nos hôtes en septembre, du 5 au 7 et ensuite du 19 au 21, quand nous nous sommes unies au pèlerinage à Lourdes par notre petite procession dans le parc : chaque fillette dépose aux pieds de la Sainte Vierge une enveloppe avec une lettre à la Sainte Vierge pour demander les grâces qu’elle désire. Du 17 au 19 octobre 2008 : les sœurs commencent à enseigner un peu de couture aux enfants ; veillée le soir ; du 1er au 2 novembre 2008 : préparation d’une représentation. 6-8 décembre : grande réunion de la Croisade Eucharistique (les séminaristes s’occupent des garçons) avec bénédiction du Saint-Sacrement après laquelle les pages, croisés et chevaliers renouvellent leurs engagements ; neuf entrées dans la Croisade. L’année se termine par l’examen de catéchisme avec prix, les chants de Noël, la préparation de la Crèche à Turin, la procession pour l’Immaculée à Moncestino, la visite au musée de la montagne près du Monte dei Cappucini, au musée des crèches de Cracovie et à la crèche mécanique de l’église de l’Annunziata à Turin. Du 1er au 4 janvier 2009 : petit camp d’hiver : les fillettes mettent en scène “Le martyre de saint Tarcisius”, suivent une petite retraite prêchée par l’abbé Ricossa avec deux conférences, et préparent (et mangent !) des crêpes ! Les fillettes reviennent du 31 janvier au 1er février 2009 : “grand jeu” en l’honneur de saint Jean Bosco avec quiz sur la vie du saint. 20-21 février 2009 : autre réunion de la Croisade Eucharistique (même programme que l’autre) ; encore enfants aux fourneaux (pour les biscuits) et ensuite promenade à la campagne… En pratique, nous faisons au moins une sortie par mois pour les fillettes (sauf au mois d’août quand nous devons aider aux Exercices Spirituels en France et en Italie), plus catéchisme et réunions de la Croisade régulièrement. Nous publions aussi un Bulletin de la Croisade qui a toujours plus de lecteurs. Pendant ce temps, à la Casa Maria Ausiliatrice, un nouveau hangar a remplacé celui d’avant, tout croulant”. 54 Avec les enfants de la Croisade Eucharistique, cette année nous nous sommes aussi rendus à la grotte de Lourdes… mais il s’est agi de la reproduction qui se trouve à Nevers au couvent Saint Gildard où sont conservées les reliques de sainte Bernadette veau, Mgr Stuyver a promu au diaconat Michel Andriantsarafara, et a conféré les premiers ordres mineurs à Nathanaël Steenbergen. Les cours ont repris – comme chaque année – en septembre ; au cours du mois de février est entré au séminaire un étudiant franco-libanais qui a commencé la première année de philosophie avec l’abbé Murro, l’abbé Giugni et l’abbé Le Gal. En plus des cours et de la prière, les séminaristes organisent des activités pour les garçons : catéchisme, retraites spirituelles, mais aussi jeux, promenades, matchs de foot, etc. Cet hiver il y a eu cinq rendez-vous à Verrua : le 18-19 octobre (promenade à Turin) ; le 1er novembre, avec aussi des garçons français (promenade à Superga, au Musée des Sciences, à Marie Auxiliatrice, et entrée dans la Croisade Eucharistique) ; le 21 novembre, avec les garçons italiens et français (excursion au Lac d’Orta, au Sacro Monte et à l’Ile de San Giulio) ; réunion de la C. E. pour les garçons italiens du 6 au 8 décembre et visite à Orta et Turin (Armurerie Royale, Auxiliatrice, Musée des Sciences naturelles) ; enfin, du 21 au 24 février, en préparation au Carême, réunion de la Croisade Eucharistique pour garçons italiens et français sur le thème “Sacrifie-toi”. Les activités propres à la Croisade s’y sont déroulées : Sainte Messe, Bénédiction du Saint-Sacrement avec trois nouvelles entrées dans la Croisade, renouvellement des promesses pour les autres, chants, prières, topos, histoires, etc. Puis les jeux et les promenades : au Sacro Monte di Belmonte (avec les chapelles dédiées à la Passion du Christ, et où nous avons fait le chemin de croix) et à Asti, où nous avons visité la cathédrale et les églises de San Giuseppe et San Martino. Activités estivales 2008. Nos prêtres organisent ou collaborent à quatre camps d’été selon l’esprit de la “Croisade Eucharistique”. À Raveau, du 6 au 20 juillet, s’est déroulé le 18ème camp de la Croisade Eucharistique (le vingtième tombera en 2010 et nous invitons tous les “anciens” à se rendre à Raveau pour des retrouvailles). Comme chaque année, grâce à la sollicitude de trois prêtres et des séminaristes, une trentaine de garçons a pu passer deux semaines de vacance au grand air et sous le regard de Dieu. En plus des jeux, des excursions en forêt, des différents catéchismes, cette année nous nous sommes à nouveau rendus (à l’occasion du 150ème anniversaire des apparitions de Lourdes) à Nevers, où repose sainte Bernadette, et également à la basilique de Vézelay. À la fin du camp : veillée, représentation théâtrale, chants. Nous remercions tous ceux qui nous ont aidés, les jeunes en particulier (un bon signe : souvent il s’agit d’anciens participants au camp). Les inscriptions pour le camp 2009 (du 6 au 20 juillet) sont ouvertes ! Pour les garçons plus grands s’est déroulé en France, face au Parc des Écrins, du 27 juillet au 7 août, le camp organisé par l’abbé Cazalas et l’abbé Jocelyn Le Gal. Messe quotidienne, excursions en montagne, visites, conférences… quelques jours dans lesquels on apprend un peu plus à se vaincre soi-même pour mettre sa volonté à l’école et au service de la grâce du Bon Dieu, pour devenir un bon chrétien, bien formé dans son intelligence, fort dans sa Foi et dans sa conduite. Cette expérience constitue une leçon de vie. Merci à l’encadrement, en particulier à M. Basset et M. Lauzier. Le prochain camp aura lieu du lundi soir 27 juillet au vendredi matin 7 août. Le camp pour les filles avec les Sœurs du Christ-Roi s’est tenu du 6 au 26 juillet dans le Val de Suse ; il a laissé un souvenir particulier, par exemple avec l’ascension du Rocciamelone (3538 m.), sur la cime duquel se trouve la statue de Notre-Dame, érigée par l’évêque de Suse à la fin du XIXème siècle pour arrêter l’infiltration de l’hérésie. La statue offerte par des enfants de toute l’Italie, avec l’obole d’un centime chacun, fut portée sur le sommet par les Chasseurs Alpins. Cette année aussi l’abbé Murro en était l’aumônier. Difficile de tout se rappeler : l’abbaye de Novalesa, les reliques de Saint Eldrade, la crèche, les cascades, les forteresses, les petits veaux nouveau-nés… Prochain rendez-vous : du 6 au 24 juillet. À Verrua, toujours durant le mois de juillet, les Sœurs de l’Institut ont accueilli les fillettes 55 pour le Camp Sainte Imelda, avec l’abbé Ricossa comme aumônier, et des jeunes filles italiennes et françaises pour aider. Nous rappelons les promenades en montagne (à Campiglia, dans le Parc du Grand Paradis et à Monfol, au-dessus de Sauze d’Oulx) et le pèlerinage à Mondonio, pour visiter la maison de saint Dominique Savio. Comme dans tous nos camps, clôture solennelle avec les prix et les entrées dans la Croisade Eucharistique. D ANS DIFFÉRENTS PAYS … Au cours de l’été, à la demande des fidèles et envoyé par son supérieur, Mgr Sanborn, l’abbé Thomas Le Gal s’est rendu en Irlande pour la célébration de la Messe non una cum, pour ensuite rentrer à Verrua. ARGENTINE. L’abbé Sergio Casas Silva réside à Rosario, où la sainte Messe est célébrée quotidiennement. Petit à petit il a réussi à assurer des Messes dominicales régulières y compris à Buenos Aires (le deuxième dimanche du mois) et à Cordoba (le troisième). Le lundi suivant la Messe de Buenos Aires, l’abbé célèbre pour les fidèles de La Plata, et a commencé aussi une activité missionnaire (Messe et confessions) à Posadas (capitale de la province de Misiones) et à La Paz (ville de la province de Entre Ríos). À Rosario, il assure aussi un cours de formation catholique (Grand Catéchisme de saint Pie X) pour jeunes et adultes au Centre d’Études Hugo Wast. Le Centre d’Études accueille aussi des cours pour adultes donnés par la professeure Monica Cuello, des cours de rattrapage pour élèves ayant des difficultés d’apprentissage, des sessions de phoniatrie et de phonaudiologie données par la professeure Patricia Dufur à des enfants ayant des problèmes de prosodie et de dyslalie ; le Centre est aussi le siège de nombreuses conférences. L’abbé Casas Silva exerce aussi son apostolat en enseignant dans plusieurs collèges secondaires de Rosario, et en participant à de nombreuses émissions radiophoniques locales. À Cordoba, les travaux dans la maison de l’Institut, laissée par Virginia Bonelli, continuent. L’abbé Casas Silva remercie particulièrement les Pères Claudio L. Formica et Hugo Esquives, avec lesquels il a eu la possibilité de collaborer en Argentine, les bienfaiteurs, et les fidèles qui l’aident de différentes manières dans son apostolat. BELGIQUE. Mgr Stuyver poursuit l’enseignement et le ministère en Belgique, Hollande et France. Les visites de prêtres de différents pays européens n’ont pas manqué. Un problème de santé l’a obligé à suspendre, cet été, la prédication des Exercices Spirituels, mais il est maintenant complètement rétabli. F RANCE . Notre apostolat s’intensifie. L’Institut est présent dans le Nord (Lille), où Mgr Stuyver célèbre la Ste Messe deux fois par mois. À Lyon, où la Messe est célébrée au moins deux dimanches par mois, se poursuivent les conférences qui se déroulent une fois par mois, le samedi après-midi, dans le local situé au-dessous de la chapelle, données par l’abbé Thomas Le Gal et l’abbé Murro sur des sujets d’actualité. À Annecy également la Messe est célébrée au moins deux dimanches par mois, avec des cours de catéchisme et de doctrine pour les adultes. À Serre-Nerpol (Maison St-Joseph), l’abbé Cazalas assure l’aumônerie de l’École St-Joseph et le ministère auprès des fidèles du Dauphiné. À l’École, il donne quelques cours de catéchisme aux garçons, et une fois par mois, le dimanche après-midi, il donne un cours de doctrine pour les adultes. À Cannes, à la chapelle de la rue Fellegara, la Messe est célébrée deux dimanches par mois et les catéchismes ont lieu le lundi. Le 3 mai, près de Cannes, a eu lieu l’inauguration d’une nouvelle chapelle construite par un particulier, au Rouret, village situé dans les collines de l’arrière-pays cannois. C’est le 1er avril 2006 que l’abbé Cazalas et les fidèles cannois ont fait la connaissance de cette personne qui évoqua alors l’idée de construire une chapelle dans sa propriété. Deux ans après, en la fête de l’invention de la Ste Croix, Mgr Stuyver était là pour bénir cette magnifique petite chapelle dédiée à la Ste Croix et y conférer à cette occasion le sacrement de la Confirmation. Le 15 août dernier, les Cannois ont pu célébrer dignement dans cette chapelle la Vierge montée au Ciel. Actuellement, la Messe y est célébrée trois fois par mois, dont une fois le dimanche, alors que Mgr Stuyver administrant les Confirmations dans la chapelle du Rouret, près de Cannes 4 mai 2008 : Mgr Stuyver avec les confirmands près de la chapelle du Rouret avec l’abbé Cazalas et M. Courant, le propriétaire et constructeur de la chapelle se poursuivent les célébrations dans la chapelle de Cannes. Les fidèles, avec des sentiments de reconnaissance et gratitude chrétiennes, remercient Dieu et prient pour le bienfaiteur qui a mis à disposition son terrain et son argent pour édifier ce lieu de culte. L’apostolat se développe aussi, durant l’été, à Raveau, dans le Centre du pays… mais depuis trois ans, également à Paris. Dans la capitale, l’Institut Mater Boni Consilii poursuit toujours son apostolat. L’abbé J. Le Gal y célèbre la Messe dominicale deux ou trois fois par mois pour un groupe de fidèles qui va croissant. Son ministère lui permet de donner les bons sacrements, mais aussi la bonne doctrine par la prédication, les conseils spirituels, le catéchisme aux enfants et l’organisation de conférences. Nous tenons à remercier tous les fidèles qui soutiennent ce ministère par leurs offrandes mais aussi par leur disponibilité ou encore pour embellir le service de l’autel (merci notamment à la chorale grégorienne et polyphonique !). La souscription pour acquérir une chapelle à Paris, lancée il y a un an et demi, suit son cours (près du tiers de la somme totale a été rassemblée) : nous faisons toujours et plus que jamais appel à votre générosité… pour la plus grande gloire de Dieu. Tous nos fidèles parisiens prient pour les bienfaiteurs et à toutes leurs intentions. Occasionnellement, nos prêtres font une “tournée apostolique” pour visiter ou remplacer des prêtres amis : ainsi, par exemple, le dimanche 8 juin, l’abbé Jocelyn Le Gal a célébré la sainte Messe à Nantes (ville dont il est originaire), à la demande de l’abbé Philippe Guépin, qui célèbre dans la cité bretonne. Le dimanche 22 juin, l’abbé J. Le Gal, accompagné d’un séminariste, s’est rendu au prieuré bénédictin de Faverney chez les Pères Verrier et Mercier, à l’occasion des célébrations de l’anniversaire du miracle eucharistique de Faver- ney. En septembre, l’abbé J. Le Gal a également rendu visite à des prêtres et des fidèles en Bretagne. I TALIE . Commençons par Rome . Le 19 avril 2008, la chapelle Saint Grégoire VII a organisé un pèlerinage à Genazzano (Rome), au sanctuaire de Notre-Dame du Bon Conseil, pour vénérer la Patronne de notre Institut. “Les samedis de Saint Grégoire VII” se poursuivent (voir le paragraphe sur les conférences). Le 19 octobre 2008, pour l’anniversaire des 50 ans de la mort de Pie XII (9 octobre 1958), la sainte Messe dominicale a été offerte pour l’âme du Pontife. Pour les lecteurs du Latium ont été diffusés les n° 2 et 3 de l’édition romaine du Buon Consiglio. Romagne. Les travaux de la chapelle Saint Grégoire le Grand de Rimini ne s’arrêtent pas : au début de l’été dernier, grâce à la générosité des bienfaiteurs, on a pu procéder à un nouveau dallage et à un nouvel aménagement du mur derrière l’autel. Le 29 juin 2008, l’abbé Carandino a célébré la sainte Messe dans l’ancienne église paroissiale de Paderno (Forlì-Cesena). À la chapelle, le dimanche 12 octobre, la Messe a été offerte pour l’âme de Pie XII, alors que le 6 décembre a été prêchée une retraite pour l’Avent et Noël et le 28/02/2009 pour le Carême. Nous rappelons enfin la publication régulière de Opportune Importune, le supplément de Sodalitium qui est envoyé aux fidèles liés à l’apostolat de la Casa S. Pio X (consultable sur Internet à la page : www.casasanpiox.it/ opportune.asp). Marches. Au printemps 2008 s’est répété le rendezvous à Serravalle del Carda (PU), sur invitation du Prieur de la Confrérie du Saint-Sacrement et du Saint-Rosaire. Jeudi 1er mai, l’abbé Carandino a chanté la Messe de l’Ascension dans l’église paroissiale. Après la Messe, au pied du Monte Nerone, les Confréries se sont rendues en procession au milieu des champs sur le lieu où s’élevait une ancienne implantation monastique. Suivant les directives du Concile de Trente, le Prieur a fait ériger une croix en souvenir du monastère : la croix, haute de quatre mètres, en fer forgé, a été bénite par l’abbé Carandino. Le 3 novembre, il a également béni le nouveau siège du Club Fedelissimi Granata de Pesaro. Abruzzes. La chapelle du Précieux Sang de Chieti Scalo continue d’être le point de repère des fidèles abruzzains pour les offices et les catéchismes. Le lundi de Pâques, une promenade a été organisée à Caramanico Terme (PE), alors que le 20 septembre a eu lieu la Vème édition du pèlerinage au Volto Santo de Manoppello. Le 21/02/09 a été prêchée une retraite pour le Carême. En plus 57 de l’habituelle présence de l’abbé Carandino, l’abbé Thomas le Gal a assuré les Messes au mois de juillet et le 2 novembre. Basilicate . Pour les fidèles de Potenza (et de Salerne), les visites mensuelles de l’abbé Carandino et de l’abbé Murro assurent une certaine régularité à l’apostolat. Le 29 juillet, à partir de Potenza, a été organisé un pèlerinage à Pagani (SA), sur la tombe de saint Alphonse de Liguori. Pouilles. De la Lucanie, l’abbé Carandino rend visite aux fidèles de M o d u g n o (BA). Le 19/02/2008 l’émetteur de télévision Telenorba a repris des moments de la Messe qu’il a ensuite retransmise le lendemain dans les éditions du Journal Télévisé. Le 3/09/2008, l’abbé Murro a célébré la Messe à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Pino Tosca ; les familiers et les amis du Centro Tradizione e Comunità étaient présents. Lombardie. C’est, avec l’est de l’Italie, la zone d’apostolat de l’abbé Giugni. La chapelle Saint Ambroise de Milan a été embellie avec une statue de son saint Patron qui a été bénite le dimanche 7 décembre précisément à l’occasion de la fête du Saint ; la Messe a ensuite été célébrée dans l’antique rite ambrosien. Le 12 octobre, la Messe a été offerte pour l’âme du Pape Pie XII. Le 13 décembre, l’abbé Giugni a prêché une retraite de préparation à Noël. Cette année, à Noël, Messe de minuit chantée à la chapelle, suivie de l’adoration de l’Enfant-Jésus ; un merci aux courageux chanteurs arrivés de la Suisse voisine. Le samedi, à la chapelle se déroulent les catéchismes pour la préparation à la première Communion des enfants. Continuent en outre avec régularité les célébrations des Messes à Valmadrera deux fois par mois et à Varèse (le 4ème dimanche du mois). Trentin et Vénétie. À Rovereto , grâce à Dieu, on a finalement trouvé un endroit stable et convenable pour la célébration de la Messe, suivie par un nombre toujours plus important de personnes. Le lundi qui suit le 3ème dimanche, l’abbé Giugni fait à Trente et à Rovereto le catéchisme aux enfants et donne ensuite des cours de doctrine pour les adultes le soir à Trente. À Abano Terme, la célébration régulière de la Messe, le 2ème dimanche du mois, se poursuit pour les fidèles des provinces de Padoue, Trévise et Rovigo. Émilie et Toscane. C’est l’abbé Ricossa qui s’en occupe. À Maranello, les fidèles augmentent, mais, après 24 années, nous sommes dans la nécessité de trouver un nouveau lieu de culte. Cependant pour le moment, les offices continuent dans la chapelle de la Villa Senni à Maranello. À Ferrare, comme chaque année, la fête de l’Immaculée a été solennisée Camp pour les garçons en France (Parc des Écrins) par une Messe en chant polyphonique. Visite, le 9 août, de l’abbé Ricossa à la paroisse de San Martino di Maiano (diocèse de Fiesole) où fut curé jusqu’à sa mort, en 1965, l’abbé Paolo De Toth, champion de la lutte contre le modernisme. Beaucoup s’en souviennent encore avec affection. Piémont. À Turin, en plus des offices habituels dont ne bénéficient malheureusement pas d’autres localités (premiers vendredis du mois, procession des Rameaux à travers les rues du quartier, Neuvaine de Noël, Heure Sainte prêchée et Te Deum le dernier jour de l’année, etc), signalons les bons fruits de l’apostolat des sœurs et des séminaristes, dont nous avons déjà parlé. Un vif remerciement au Professeur Duccio Mallamaci qui, le 20 juillet, a donné à la chapelle du Sacré-Cœur de Turin un tableau ancien représentant la Consolata (vocable sous lequel Notre-Dame est spécialement vénérée à Turin). C e n t r o S t u d i G i u s e p p e F e d e r i c i . Le 29/05/2008 à Rimini , le CSGF a organisé le congrès : “Giovannino Guareschi et le petit monde ? Ou comment survivre avec foi et ironie au monde moderne ?”. Le 29/05/2008 ont été publiés deux articles, par La Voce della Romagna (“Guareschi rappelé par son biographe”) et par Il Corriere di Rimini le 29/05/2008 (“Le petit monde de Guareschi à un congrès”). Le 28/06/2008 l’année sociale du CSGF s’est conclue par le “dîner papalin”, à l’occasion de l’anniversaire du couronnement de Pie IX. Le 8/11/2008, l’abbé Ricossa a donné la conférence :“Pie XII, Pastor Angelicus. Hommage au Pape Pacelli pour le 50ème anniversaire de sa mort”. Après la conférence ont été fêtés les 50 ans de l’abbé Ricossa. Journée de la Royauté Sociale du Christ. Le Centro Studi Federici, en collaboration avec la revue Sodalitium, a organisé à Modène la IIIème Journée pour la Royauté Sociale du Christ. Les 80 ans de la promulgation de l’encyclique Mortalium animos de Pie XI (1928) ont suggéré aux organisateurs d’inviter l’abbé 58 Ricossa à tenir un séminaire d’études sur “L’œcuménisme : dans l’Église, contre l’Église”. Le séminaire a eu une très bonne audience : nous avons compté plus de cent dix personnes, parmi lesquelles de nombreux jeunes qui ont suivi les travaux. L’habituel intermède théâtral n’a pu avoir lieu à cause d’un malheur qui avait frappé, la veille, Mme Elisabetta, du Groupe théâtral de Teolo : nous présentons nos meilleurs vœux à l’intéressée. Journée à l’occasion de l’anniversaire de G i o v a n n i n o G u a r e s c h i (1908-1968). Le 12/04/2008, les Centri Studi Davide Albertario et Federici ont organisé une journée sur les lieux liés à Giovannino Guareschi, pour célébrer le centenaire de la naissance de l’écrivain. Une couronne de lauriers a été déposée sur sa tombe au cimetière de Roncole Verdi (Parme). Les participants ont ensuite été accueillis au “Club dei Ventitrè” par Albertino et la Pasionaria qui, avec leur gentillesse proverbiale, ont fait visiter l’exposition permanente dédiée à leur père et donné aux présents de précieux témoignages sur lui. Dans l’après-midi, le groupe s’est rendu à Brescello (Reggio Emilia), à travers les chemins et les villages du “petit monde”, pour se souvenir et approfondir la saga cinématographique des films de Don Camillo et Peppone, avec la visite du musée et des lieux liés aux prises de vue, comme l’église et la place du pays. Centro Studi Davide Albertario. Samedi 8 mars 2008, le CSDA a organisé à Milan une conférence intitulée “Darwin et l’évolutionnisme. Vérité scientifique ou superstition ?”. Le conférencier était notre ami le Docteur Giuseppe Santoro, médecin à l’hôpital de Varèse, qui, aidé d’une simple mais efficace projection de diapositives sur le sujet, a démonté tous les mythes fondateurs de l’évolutionnisme darwinien. Le 7 juin 2008, l’abbé Giugni et de très fidèles amis du Centro Studi se sont rendus à Filighera (PV), pays natal de l’abbé Albertario. Après s’être recueillis au cimetière sur la tombe du prêtre pavesan, ils ont visité la paroisse et la maison natale de don Davide (hélas presque réduite à l’état de ruine !). Le 28 juin 2008 a eu lieu la seconde édition du “dîner albertarien”. Samedi 15 novembre, le CSDA a organisé le VIIème Congrès d’Études Albertariennes. Dans la salle trônait un beau tableau du Pape Pie XII et une galerie de photographies qui illustraient la vie du Père MichelLouis Guérard des Lauriers. Le congrès était intitulé : «Le Pape Pie XII (1939-1958), le dernier pape “romain”. Le Père Michel-Louis Guérard des Lauriers (1898-1988), le dernier Journée pour l’anniversaire de Giovannino Guareschi organisée par le CSGF et le CSDA, le 12 avril 2008. Photo de groupe à Roncole avec les enfants de l’écrivain théologien “romain”. In memoriam». Les intervenants étaient l’abbé Ricossa et l’abbé Murro, prêtres de l’Institut Mater Boni Consilii. C e n t r o S t u d i G i a c o m o M a r g o t t i . La conférence du Docteur Santoro sur Darwin (“Darwin et l’évolutionnisme. Vérité scientifique ou superstition ?” [dont on a parlé plus haut] a été redonnée avec égal succès et intérêt à Turin le 17 mai 2008. Conférences. L’abbé Carandino a donné les conférences suivantes. À Rome : “La formation du Missel Romain à l’époque apostolique” (17/05/2008), “Les siècles d’or de la liturgie romaine” (21/06/2008), “Le Magistère de Pie XII, à l’occasion du 50ème anniversaire de la mort du Pape Pacelli” (18/10/2008), “L’encyclique Mystici Corporis de Pie XII, sur le Corps mystique du Christ” (15/11/2008), “Le Temps de Noël” (20/12/2008),“L’encyclique Mediator Dei de Pie XII, sur la liturgie sacrée” (17/01/2009), “Le temps liturgique de Carême” (14/02/2009). À V o l a n o ( T N ) , le 3/10/2008 avec Alessandro Gnocchi : “Giovannino Guareschi à l’occasion du centenaire de sa naissance” . À Fermo le 12/06/2008 : “Invitation à la lecture de Les Papes et la Maçonnerie de Angela Pellicciari”. À Pescara, le 21/06/2008 : “L’essence de la Franc-Maçonnerie” ; le 25/10/2008, présentation de l’encyclique Humani Generis ; le 22/11/2008 : “Giovannino Guareschi, écrivain catholique. Pour le 50ème anniversaire de sa mort”. Le 24/01/2009, toujours à Pescara, “Rencontre de formation traditionaliste”. À Modugno (BA), le 19/02/2008 : “ Les oraisons du Vendredi Saint” ; le 21/10/2008 : “Souvenir de Pie XII, pour le 50ème anniversaire de sa mort” ; le 17/11/2008 : “Giovannino Guareschi, écrivain catholique. Pour le 50ème anniversaire de sa mort” ; le 19/01/2009 : “La Confirmation : parfaits chrétiens et soldats du Christ”. Conférences en France. À Paris aussi, comme à Milan et Modène, se déroule désormais chaque année un véritable congrès. Cette année, une centaine de personnes ont suivi la 59 journée de conférences – le 25 octobre 2008 – sur le thème : “Mgr Guérard des Lauriers : un Théologien pour notre temps” (le CD avec les conférences est disponible auprès de notre Centro Librario). L’abbé Murro et l’abbé Ricossa ont pris tour à tour la parole pour les exposés suivants : “Mgr Guérard des Lauriers, sa vie, ses écrits”, “Le combat de Mgr Guérard des Lauriers pour sauver la vraie Messe, et la nécessité de l’épiscopat pour le Sacrifice et le Sacerdoce”, “Le Concile Vatican II : le problème posé à la conscience des catholiques et la thèse de Cassiciacum”, et enfin “La pensée de Mgr Guérard des Lauriers aujourd’hui : actualité de la thèse de Cassiciacum et perspectives futures”. Ces exposés font comprendre l’étendue des thèmes abordés tout au long d’une journée à la fois très instructive et très conviviale. Cela a été une occasion unique pour faire connaître la personne et la pensée de Mgr Guérard des Lauriers, 20 ans après sa mort. Le lendemain, 26 octobre, fête du Christ-Roi, l’abbé Ricossa a répété (et résumé) le congrès parisien à la Maison St-Joseph de Serre-Nerpol, à la demande de la Mère Supérieure. Pour en revenir à Paris, au cours de l’année, c’est l’abbé J. Le Gal qui donne des conférences, parmi lesquelles nous rappelons au premier trimestre 2009 celles sur la réforme liturgique des sacrements, 40 ans après le N.O.M., le commentaire du communiqué de l’Institut sur la Fraternité Saint-Pie X (janvier 2009), et une préparation au Temps du Carême. L’Institut et la presse. La “révocation” de l’“excommunication” et les événements de la Fraternité ont attiré l’attention de la presse, mal informée et encore plus mal intentionnée, sur le “monde traditionaliste”. Notre Institut aussi a été impliqué avec des articles sur Il Foglio, Panorama, La Periferia, La Voce di Romagna, Il Gazzettino , etc. Un article “ami”, au contraire, sur le turinois Però. Le C e n t r o L i b r a r i o S o d a l i t i u m . Notre maison d’édition a aussi voulu commémorer l’anniversaire de Mgr Guérard des Lauriers avec la première traduction italienne de La via regale, la carità della verità. Ont également été imprimées en italien une nouvelle édition du Bref Examen Critique du Novus Ordo Missæ et la réédition d’un écrit de Mgr Balan sur Giordano Bruno intitulé Il vero volto di Giordano Bruno [Le vrai visage de Giordano Bruno]. Tous ces livres peuvent être commandés à notre rédaction. Autres moyens de communication. Nous rappelons à nos lecteurs qu’ils peuvent trouver toute information officielle sur notre Institut Conférence à Paris sur le Père Guérard des Lauriers : les intervenants sur le site (www.sodalitium.it) qui est mis à jour en différentes langues (italien, français, espagnol, anglais). En particulier, pour ce qui concerne le site en français (www. sodalitium.eu), nous signalons qu’au moyen d’un courriel mensuel, nous tenons désormais au courant le lecteur des mises à jour du site. Une nouvelle rubrique propose d’ailleurs d’importants documents, parfois inédits, parfois oubliés, comme ceux qui conduisirent à la rupture définitive entre le Père Guérard des Lauriers et Mgr Lefebvre en 1978. Le site de la Casa San Pio X (www.casasanpiox.it) appartient aussi à l’Institut. Nous recommandons aussi les sites des Centri Studi Giuseppe Federici (www.centrostudifederi ci.org) et Davide Albertario (www.davidealbertario.it). Sur le site Youtube, le Centro Studi G. Federici a un canal qui recueille un grand succès, en particulier pour les vidéos sur la vie de Pie XII. Très apprécié aussi celui sur la victoire pontificale à Mentana (3/11/1867) : http://it.youtube. com/watch?v=4MDIge6fk9Y Quant aux émissions radio, nous signalons l’interview de l’abbé Carandino par Silvia Sanzini du 28 juin 2008 sur Radio Padania Libera, et la collaboration habituelle de l’abbé Casas Silva à de nombreuses émissions radio en Argentine. Exercices Spirituels de saint Ignace. À Serre-Nerpol, l’abbé Cazalas a prêché une session d’Exercices à 4 dames du 31 mars au 5 avril 2008. Les Religieuses de l’Institut ont suivi les Exercices du 1er au 7 juin, à Verrua. À SerreNerpol, Exercices du 30 juin au 5 juillet (avec les abbés Murro et Ricossa, 10 personnes). À Raveau, deux sessions d’été à cheval entre juillet et août, données par l’abbé Murro et l’abbé Giugni : pour les dames du 28 juillet au 2 août (7 participantes) et pour les hommes du 4 au 10 août (18 participants) ; les Exercices des hommes se sont terminés par les ordres (diaconat et ordres mineurs) à nos séminaristes. À Serre-Nerpol encore, il y a eu 5 personnes à la session d’août (du 16 au 21), prêchée 60 par l’abbé Giugni et l’abbé Cazalas ; vingtdeux religieuses à celle de septembre (du 2 au 9), prêchée par l’abbé Ricossa ; 5 dames en novembre, à la retraite prêchée par l’abbé Cazalas ; neuf personnes en décembre (qui a vu le début de l’abbé Jocelyn Le Gal dans la prédication des Exercices, avec l’abbé Cazalas) ; neuf personnes encore à la session de février, avec les mêmes prédicateurs. Tandis qu’à Verrua, en plus des habituelles sessions d’été données par l’abbé Carandino et l’abbé Ricossa (du 18 au 23 août à 14 dames et du 25 au 30 août à 24 hommes), a été expérimentée une session d’hiver mixte du 5 au 10 janvier 2009, donnée par les abbés Murro, Giugni et Ricossa : beaucoup de neige et 15 participants. Et toujours à Verrua s’est déroulée du 22 au 27 septembre 2008 la session pour les prêtres, prêchée cette année aussi par l’abbé Cazalas, mais qui a dû interrompre la prédication, remplacé par l’abbé Ricossa, à cause de la grave et dernière maladie de son père. Retraites de persévérance. Une journée de retraite de persévérance a eu lieu à Serre-Nerpol le 20 avril 2008, prêchée par l’abbé Cazalas et l’abbé Murro, qui a rassemblé une cinquantaine de participants. Un autre jour de récollection avec le même nombre de participants a eu lieu le 1er novembre à Raveau, beaucoup venant même de loin : ces journées constituent une bouffée d’oxygène spirituel, qui aide à surmonter les nombreux problèmes de la vie quotidienne et facilite la persévérance. Pèlerinage national Osimo-Lorette 2008. Le pèlerinage à Lorette, qui est entré dans le cœur de tous, cette année aussi n’a pas déçu les attentes. Les prêtres, occupés avec les méditations (données aux pèlerins durant la marche) et les confessions, ont constaté une grande générosité et une grande ferveur de la part des cent vingt-cinq participants. Samedi 24 mai 2008 sur la place d’Osimo sont arrivées autos et minibus. Le pèlerinage était introduit par la Croix processionnelle, dont la vue incitait de nombreux passants et automobilistes à se siExercices Spirituels de saint Ignace à Raveau gner. Suivaient les pèlerins avec les bannières et les drapeaux des différentes villes présentes. Durant les 22 kilomètres parcourus à pied , se succédaient prières et chants qui se faisaient vibrants à l’entrée des centres habités. La rencontre conviviale du samedi soir a permis de cimenter de vieilles amitiés et d’en faire naître de nouvelles. Le dimanche matin, la halte à l’ossuaire de Castelfidardo a été précédée du lever des couleurs, évidemment pontificales : tout de suite après, l’abbé Ricossa a adressé des paroles enflammées aux participants, pour les encourager à militer pour le Christ-Roi. La basilique de Lorette a enfin accueilli les pèlerins qui, fatigués mais heureux, se sont agenouillés dans la Santa Casa déposant aux pieds de la Sainte Vierge leurs intentions. L’abbé Carandino remercie en particulier les garçons et les filles qui se sont dépensés et sacrifiés pour l’organisation. Entre-temps, est en route la “machine” pour l’édition 2009. Autres pèlerinages. Comme d’habitude, le pèlerinage à Notre-Dame de l’Osier a eu lieu le 8 mai, en présence de quatre prêtres. La veille au soir, une conférence ayant pour thème “Hors de l’Église, point de salut” a été donnée par l’abbé J. Le Gal, l’abbé Cazalas et l’abbé Murro. Ont été abordés à la fois l’exposé de la doctrine de l’Église et ses implications dans la situation actuelle. Cette année encore, une centaine de fidèles ont pérégriné vers Notre-Dame sous un soleil généreux. Au pèlerinage de St-Joseph du Bessillon à Coti gnac (1er mai), organisé par l’abbé Cazalas, il y a eu cette année la participation de l’abbé Giugni et de Mgr Stuyver, venu pour les Confirmations et l’inauguration d’une chapelle. La Grand-Messe a été chantée par Monseigneur sous une tente dans une clairière près de l’église Notre-Dame-de-Grâces. Dans le sermon, il évoqua le souvenir de M. le Curé Gustave Delmasure : curé de Théoule-surMer à quelques kilomètres de Cannes, il fut en effet un des rares curés du sud-est à refuPèlerinage à Saint-Joseph de Cotignac en présence de Mgr Stuyver 61 Pèlerinage de Lourdes 2008 1858 : l’Immaculée Conception apparaît à Bernadette Soubirous, à Lourdes. Notre Institut aussi n’a pas voulu manquer le rendez-vous à Lourdes pour les 150 ans de l’apparition. Après une longue et soigneuse préparation de la part de l’abbé Jocelyn Le Gal, plus de 200 fidèles de plusieurs pays (français, italiens, belges, espagnols même) se sont réunis aux pieds de Notre-Dame pour en chanter les louanges du 19 au 21 septembre 2008. Trois jours de grande ferveur, avec l’assistance spirituelle de cinq prêtres (l’abbé Murro et l’abbé J. Le Gal pour l’Institut, l’abbé Th. Le Gal, l’abbé Guépin et le Père Joseph Mercier) et l’aide des séminaristes de Verrua et de l’abbé Christ van Overbecke. Les pèlerins ont pu assister quotidiennement à la sainte Messe (le dernier jour sur l’esplanade), visiter les sanctuaires et la grotte, participer à la procession aux flambeaux, rentrant chez eux fatigués mais comblés de grâces. L’abbé Le Gal prépare – pour la période qui va du 28 octobre au 1er novembre – un pèlerinage à Rome, capitale de la Foi, pour manifester notre fidélité à la Sainte Messe… Procession nocturne aux flambeaux La messe sur l’esplanade le dernier jour Plaque encastrée sous la Acte de Foi dans le dogme de l’infaillibilité statue de saint Pierre dans du Pape. la crypte du sanctuaire de Seigneur Jésus, couvrez de la protection de Lourdes. Il s’agit d’un téVotre Sacré-Cœur le Saint-Père le Pape dans moignage de catholicité, l’infaillibilité duquel nous croyons fermement. sur lequel bon nombre de catholiques tentés “Qui vous écoute m’écoute” (Luc X, 16) aujourd’hui par le… faillibilisme, devraient méditer ! ser la nouvelle messe et les nouvelles doctrines de Vatican II, pour rester fidèle à la Foi catholique. Lorsqu’il fut chassé de sa paroisse par l’évêque du diocèse, il vint s’installer dans la petite chapelle qu’il aménagea au rez-dechaussée d’un immeuble du centre de Cannes, rue Fellegara, chapelle que l’Institut dessert encore aujourd’hui. M. l’abbé Delmasure – nous dit Mgr – fut un exemple pour tous de fidélité à la Foi, de zèle pour le salut des âmes, et de Charité, un exemple à ne pas oublier. Devant la source miraculeuse, au pied de la statue de saint Joseph, notre pèlerinage se termine, nos prières et nos vœux montent vers le Protecteur et Chef de la Ste Église. Certains se souviennent qu’une année précédente, ils avaient demandé une grâce spirituelle, ou de guérison, et qu’ils l’ont obtenue… Prochain pèlerinage à S. Joseph : le jeudi de l’Ascension 21 mai, rendez-vous sur le parking du sanctuaire de N.-D-des-Grâces à 10h30. D’autres pèlerinages locaux sont rappelés plus haut (à Genazzano, Manoppello, Pagani, etc.) ; ici nous signalons celui à la Basilique du Saint, à Padoue, le 14 juin, au Sanctuaire de Bocca di Rio (avec la Messe en plein air au milieu des montagnes de l’Apennin toscano-émilien suivie par de nombreux fidèles), le 16 août, au Sacro Monte de Varèse le 4 octobre, et à S. Luca (Bologne) le 18, à l’occasion du Mois du Rosaire. Anniversaires . Le 19 avril, M. Christian Moyet et son épouse ont fêté leurs noces d’or, réunissant toute leur famille, enfants et petitsenfants, à Serre-Nerpol pour une Messe d’action de grâces célébrée par l’abbé Cazalas. Le 5 juin, Mgr Robert Fidelis McKenna o.p. a fêté le 50ème anniversaire de son ordination sacerdotale ; notre Institut s’est uni par la prière et l’action de grâces aux festivités ! Le 28 juin, l’abbé Cazalas a célébré la Messe à l’occasion de l’anniversaire de la mort du P. Vinson à Serre-Nerpol. À Verrua, le 27 février 2009, Messe de Requiem à l’intention de Mgr Guérard des Lauriers. Baptêmes. 3 mai 2008, à Paris : Thomas Vigand (abbé J. Le Gal). 9 juin, à Raveau : Guillaume Langlet (abbé Murro). 13 juillet, à Paris : Sophie W. (abbé J. Le Gal). 15 novembre, à Paris : Jeanne Vigand (abbé J. Le Gal). 13 décembre, à Annecy : Lilli Marie Saugneaut (abbé Murro). Janvier 2009, à Buenos Aires : Martín Miguel Carpinella Fermoselle (abbé Casas Silva). Premières Communions. “Laissez venir à moi les petits enfants”. À Serre-Nerpol, l’abbé Cazalas a donné la première communion le 11 mai à Pierre Carpène et le 25 mai à Lidvi- 62 ne Miche ; en même temps avaient lieu les communions solennelles de 8 garçons. À Turin, Alessandra Ghibaudo, a reçu la première communion le 15 juin, après une retraite de préparation chez nos religieuses, à Verrua. Le camp sainte Imelda, à Verrua, a été égayé par une cérémonie de première communion le 16 juillet. À Monahagh (Irlande), au mois de juillet, Michael McGirr a reçu la sainte communion des mains de l’abbé Thomas Le Gal. À Maranello, première communion de Giuseppe Cerbasi, le 9 novembre. Confirmations. Mgr Stuyver a administré le sacrement de Confirmation à deux occasions : le 4 mai, à Cannes, à l’invitation de l’abbé Cazalas, et le 24 août à Modesto, en Californie, à l’invitation de l’abbé Zapp. À l’occasion de ce séjour aux États-Unis, Mgr Stuyver a rendu visite – du 19 au 21 – à Mgr McKenna et à ses religieuses. Mgr Stuyver remercie tout le monde pour l’accueil qu’il a reçu partout ! Mariages. À Turin, le 16 avril 2008, l’abbé Ricossa a béni les noces de Vincenzo Pilato et Adriana Marafioti. À Annecy, le 13 septembre, l’abbé Murro a uni en mariage Benjamin Bétend avec Claire Radice. L’abbé J. Le Gal a béni un mariage en France au mois de décembre. Défunts. Le 10 juin 2008 à Parme est décédé, dans un tragique accident, Cesare Fontana, âgé de 33 ans, jadis notre fidèle, avec sa fiancée Marilena Marziliano, âgée de 25 ans. Mlle Marie-Françoise Collion, fidèle de la chapelle Notre-Dame du Bon Conseil à Lyon nous a quittés subitement le 19 juin dernier. L’abbé Cazalas a célébré ses funérailles dans cette même chapelle le 25 juin. Mlle Collion avait une piété forte ; célibataire, elle avait trouvé en ses frères dans la Foi lyonnais une vraie famille. Toujours restée fidèle à l’intégrité de la Foi, elle fit partie du premier groupe lyonnais qui s’est levé lors des déviations modernistes du Concile et des nouveaux rites. Ce groupe a eu la grâce de marcher à la suite de quelques-uns de ces prêtres exemplaires qui furent à l’origine de la résistance au modernisme à Lyon et, pour certains d’entre eux, bien au-delà de Lyon : les R. P. Vinson, Guérard des Lauriers, Vermeil, les abbés Lou, Sifflet, Gentilhomme, Chirat. Sa fidélité à la Foi a été nourrie et renforcée par la lecture des auteurs des premiers siècles de l’Église : elle avait une grande dévotion à saint Irénée et connaissait ses écrits à fond. Son érudition s’étendait, entre autres, à l’histoire de l’Église primitive de Lyon, ainsi qu’à l’histoire de Fourvière, et, d’une manière plus générale, aux Pères de l’Église. Elle a aidé certains de ses amis dans les études religieuses, par exemple sur la Gnose, sur la lutte anti-moderniste sous saint Pie X à Lyon, sur l’histoire de N.-D. de l’Osier. Que son souvenir reste pour nous comme un aiguillon pour la fidélité à la Foi et à la persévérance. Le 22 juillet, dans sa maison de Cesenatico, est morte Mme Luisa Giamboni veuve Mosconi, de 95 ans. Malgré son âge, jusqu’à la dernière Pâques, elle affrontait le voyage de Cesenatico à Rimini pour assister à nos Messes, accompagnée par son petit-fils Pasquale. Après une vie chrétienne exemplaire, elle a reçu dans les meilleures dispositions les dernières grâces sacramentelles. Ovidio Mocci était notre voisin, quand nous sommes arrivés à Verrua ; il est décédé ce 30 juillet. Le 5 août est mort Pino Cascella, de Modugno. Quinze jours avant, il avait reçu de l’abbé Carandino les sacrements de la Pénitence et de l’Extrême-Onction. Le 8 août est décédé à l’Aquila l’abbé R i c a r d o R o d g e r , après une longue maladie ; ancien compagnon de séminaire, il nous rendit visite à Verrua en manifestant son soutien à notre œuvre. L’abbé Ricossa recommande à vos prières l’âme de Serge-Alain Collet, qu’il connut dans les années 70, décédé en Suisse le 12 septembre. Il fonda les “centres de messe” de Lausanne et Vevey. Le 25 septembre est décédée Mme Laura Filippini ; l’abbé Giugni lui avait administré les sacrements la semaine précédente. Le 5 octobre est décédé le docteur Jean-François Cazalas, père de l’abbé Thomas. Il avait alimenté sa foi dans la pratique des Exercices Spirituels de saint Ignace. S’étant rendu compte du dommage apporté par le Concile et la nouvelle messe, il avait adhéré à la position du P. Guérard des Lauriers ; il fut parmi ceux qui nous présentèrent le religieux dominicain en septembre 1986, et qui nous aidèrent quand naquit l’édition française de Sodalitium. Notre Institut venait de naître, quand il vint à Nichelino en décembre 1986 avec son épouse, en un hiver plein de neige, pour nous demander de célébrer la Messe à Annecy, et, puisqu’il n’y avait pas encore de lieu de culte, il mit généreusement à disposition sa maison. Ce fut ainsi que notre Institut put commencer l’apostolat en France. Après une brève maladie, il est décédé dans les bras de l’abbé Thomas, qui lui avait donné l’Extrême-Onction et qui a célébré ses funérailles dans la paroisse de La Thuile. Le 18 octobre, est décédée à Turin Concetta Petracca veuve Venticinque, à qui l’abbé Cazalas avait donné le Viatique et l’abbé Murro l’Extrême-Onction. Luisa Danieli est décé- 63 dée le 28 octobre près de Genève ; elle fréquentait, tant que sa santé le lui a permis, nos offices à Annecy. Samedi 6 décembre, est décédé à Serville, en Belgique, Olivier Paris, père d’une religieuse de la Congrégation du Christ-Roi ; Mgr Stuyver a célébré ses funérailles à Serville le 10 ; Messe solennelle de Requiem à Dendermonde le 13 ; à sa veuve et à ses enfants, Sodalitium exprime ses condoléances. Dimanche 7 décembre, nous avons appris le décès de Jean-Charles Ceruti , qui avait connu le Père Guérard des Lauriers. Le 8 décembre, l’abbé Cazalas a célébré à SerreNerpol les funérailles de Mme Sette, décédée à l’âge de 99 ans. Le 28 décembre, à Turin, l’abbé Murro a donné l’Extrême-Onction à Aldo Abrate quelques instants avant son dernier soupir. Antonino Cozzuccoli habitant à Rovereto est décédé en janvier 2009. Le 5 janvier, à 84 ans, après une longue maladie supportée chrétiennement, est décédé M. André Nutelet, fidèle de la Maison St-Joseph ; il avait fait plusieurs fois les Exercices Spirituels. Inez Dryden est décédée aux États-Unis (Utah), où elle résidait, ce 5 mars. Abonnée fidèle et bienfaitrice de Sodalitium, c’était une vraie amie de l’Institut. Elle était particulièrement attachée à l’Italie, où elle vécut dans sa jeunesse. Avec son mari, elle fut parmi les premiers à s’opposer aux réformes conciliaires aux États-Unis. Francesco Valle est mort à Turin le 7 mars ; la veille, il avait reçu les derniers sacrements de l’abbé Ricossa. Que tous reposent en paix ! PÈLERINAGE À ROME (40 ans après la “nouvelle messe”, 40 ans de fidélité à la Messe) du mercredi 28 octobre au dimanche 1er novembre 2009 • Visite des principaux lieux de catholicité (dont les “fouilles de Saint-Pierre”), Messe quotidienne, hébergement en plein centre de Rome. • 350 euros par personne (pour 4 nuits, tous les repas et le transport sur place). Ce prix ne comprend pas le voyage qui est à la charge du pèlerin. • Nombre de places limité : réservez au plus tôt. Dépliant, programme et plus d’information sur notre site ou par courriel. Venez nombreux ! Renseignement sur le site: www.sodalitium.eu e-mail: info@sodalitium.eu Activités • CAMP SAINT LOUIS DE GONZAGUE pour garçons de 8 ans accomplis à 13 ans du lundi 6 (à midi) au lundi 20 juillet (à midi) à Raveau (Nièvre) • CAMP EN MONTAGNE POUR GARÇONS de 14 à 21 ans dans le massif de la Chartreuse (près de Grenoble) du lundi 27 juillet (dans l’après-midi) au vendredi (matin) 7 août • CAMP EN ITALIE POUR JEUNES FILLES de 8 à 16 ans du samedi 11 juillet au samedi 18 juillet, à Verrua Savoia (près de Turin) • CAMP DANS LES ALPES POUR JEUNES FILLES de 8 à 16 ans du lundi 6 au vendredi 24 juillet. Organisé par les Sœurs du Christ-Roi. Inscrivez-vous et demandez le programme auprès de la Maison Saint-Joseph, Tél. 04 76 64 24 11. EXERCICES SPIRITUELS DE SAINT IGNACE À RAVEAU (NIÈVRE) • Pour hommes et jeunes gens : du lundi 3 août à 12 h, au samedi 8 août à 12 h • Pour dames et jeunes filles : du lundi 27 juillet à 12 h, au samedi 1er août à 12 h Pour tout renseignement s'adresser à : Institut Mater Boni Consilii • Loc. Carbignano, 36 - 10020 Verrua Savoia (To) Italie Tél.: + 39.0161.839.335 Fax: + 39.0161.839.334 • 350 route de Mouchy Raveau 58400 France - Tél. et Fax 03.86.70.11.14. • Site: www.sodalitium.eu - e-mail: info@sodalitium.eu CENTRES DE MESSES RÉSIDENCES DES PRETRES DE L’INSTITUT ITALIE: Verrua Savoia (TO). Maison-Mère. Istituto Mater Boni Consilii - Località Carbignano, 36. Ste Messe: en semaine à 7h30, le dimanche à 18h. Tél.: +39.0161.83.93.35 Fax : +39.0161.83.93.34 - E-mail : info@sodalitium.it San Martino dei Mulini (RN). Casa San Pio X. Abbé Ugo Carandino - Via Sarzana 86. Pour toute information, Tél (et Fax) +39. 0541.75.89.61. E-mail : info@casasanpiox.it. ARGENTINE: Rosario. Casa San José - Abbé Sergio Casas Silva, Iguazú 649 bis, C. P. 2000 Rosario (Santa Fe). Tous les dimanches, Ste Messe à 10h. E-mail : casasanjose@sodalitium.it BELGIQUE: Dendermonde. Mgr Geert Stuyver: Kapel O.L.V. van Goede Raad, (chapelle N.D. du Bon Conseil) Koning Albertstraat 146 9200 Sint-Gillis Dendermonde: Ste Messe le dimanche à 9h30. Tél. (et Fax): (+32) (0) 52.38.07.78. FRANCE: 350 route de Mouchy Raveau 58400. Pour toute information, tél. au 03.86.70.11.14. AUTRES CENTRES DE MESSES FRANCE Annecy: 11 avenue de la Mavéria. Tél.: 09.53.16.39.01. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 10 h. Confessions à 9h. Cannes: Chapelle N.-D. des Victoires. 4 rue Fellegara. Tél.: 04.93.46.78.54. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 18h. Confes. à 17h30. Lille: Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à 17h. Confessions à 16h30. Pour toute information: Mgr Geert Stuyver en Belgique. Lyon: Chapelle N.-D. du Bon Conseil. 11 rue Pareille, 69001. Tél.: 06.70.45.77.28. Ste Messe le 2 ème et 4 ème dimanche du mois à 17h. Confessions à partir de 16h30. Paris:: 17 rue Bleue, 75009 (code 65B09, au fond de la cour à gauche, 2° étage). Ste Mes- se le 1er et 3ème dimanche du mois à 10h30. Confessions à 9h45. Autres dates possibles. Pour toute information: 06.78.37.81.43. ITALIE Chieti Scalo: Oratorio del Preziosissimo Sangue, via Colonnetta 148. Le 2ème dim. à 18h30, le 4ème dim. à 10h30. Ferrare: Chiesa S. Luigi, Via Pacchenia 47 Albarea. Ste Messe tous les dimanches à 17h30. Le 3ème dimanche du mois à 11h30. Loro Ciuffenna (Arezzo): Fattoria del Colombaio, str. dei 7 ponti. Ste Messe le 1er dimanche du mois à 17h30. Maranello (Modène): Villa Senni. Strada per Fogliano. Ste Messe tous les dimanches à 11h, sauf le 3ème dimanche du mois à 9h. Milan: Oratorio San Ambrogio. Via Vivarini 3. Ste Messe tous les dimanches et fêtes à 11h. Padoue: le 4ème dimanche du mois à 18h. Rimini: Oratorio San Gregorio Magno , via Molini 8: le 1er et 2ème dimanche Messe à 11h, le 3ème et 4ème dimanche du mois à18h30. Rome: Oratorio San Gregorio VII. Via Pietro della Valle, 13/b: Messe le 1er, 3ème, 5ème dim. à 11h. Rovereto (Trente): Messe le 1er, 3 ème, et 5 ème dimanche du mois à 18h. Turin: Oratorio del Sacro Cuore, via Thesauro 3/D. Dimanches: Messe chantée à 9h. Messe basse à 11h15. Tous les premiers vendredis du mois: Messe à 18h15. Valmadrera (Lecco): via Concordia, 21. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois. Varèse - Modugno (BA) - Potenza: se renseigner à Verrua Savoia. Tél.: +39.0161.83.93.35 Confessions une demi-heure avant les messes. Pour toute information, téléphoner à Verrua Savoia ou à San Martino dei Mulini. COMMENT NOUS AIDER • LIBELLER À: ASSOCIATION MATER BONI CONSILII - 350 route de Mouchy - 58400 RAVEAU (France). • VIREMENT BANCAIRE: Compte LCL Le Crédit Lyonnais (Références Internationales): IBAN: FR52 3000 2075 3100 0007 9074 U78 BIC: CRL YFRPP • VIREMENT CCP: n° 2670 37 W DIJON. I B A N : FR78 2004 1010 0402 6703 7W02 537 BIC: PSSTFRPPDI - Reçu fiscal sur simple demande, pour bénéficier notamment des exonérations fiscales (66% de votre don à une association est déductible de votre impôt sur le revenu, dans la limite de 20% de votre revenu net imposable). EN CAS DE NON-LIVRAISON, VEUILLEZ RENVOYER A L’EXPEDITEUR QUI S’ENGAGE A PAYER LE RETOUR A L’ENVOYEUR: ASTI C.P.O SODALITIUM PERIODICO Loc. 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