Tassa Riscossa - Taxe Perçue. ASTI CPO N° 66 Anno XXXII n. 1 - Gennaio 2016 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Asti - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - In caso di mancato recapito, rinviare all’ufficio C.R.P. ASTI per restituzione al mittente che si impegna a corrispondere la relativa tariffa 2 “Sodalitium” Periodico n° 66, Anno XXXII n° 1/2016 Editore Centro Librario Sodalitium Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA TO Tel.: 0161.839335 Fax: 0161.839334 - CCP 36390334 INTERNET: www.sodalitium.eu - email: info@sodalitium.eu Direttore Responsabile don Francesco Ricossa Autorizz. Tribunale di Ivrea n. 116 del 24-2-84 Stampa: - Alma tipografica Villanova M.vì. Le présent numéro a été achevé de rédiger le 24/12/2015 Ai sensi della Legge 675/96 sulla tutela dei dati personali, i dati forniti dai sottoscrittori degli abbonamenti verranno trattati in forma cartacea ed automatizzata e saranno utilizzati esclusivamento per invio del giornale oggetto di abbonamento o di altre nostre testate come copie saggio e non verranno comunicate a soggetti terzi. Il conferimento dei dati è facoltativo ed è possibile esercitare i diritti di cui all’articolo 13 facendone richiesta al responsabile trattamento dati: Centro Librario Sodalitium. En couverture : le Pressoir Mystique. Tableau de Angelo Mainardi dit le Chiaveghino (1550-1617). Église de S. Agostino à Crémone. Voir l’article p. 41. Sommaire Éditorial Pape, Papauté et Siège vacant, dans un texte de Saint Antonin de Florence et dans la pensée du Père Guérard des Lauriers La démission du Pape COMMUNIQUÉS DE L’INSTITUT MATER BONI CONSILII : Au sujet de la Consécration épiscopale conférée par Mgr Williamson le 19 mars 2015 La fin d’une équivoque : réflexion sur la “Fraternité Saint-Pie X” ... Aux membres de l’Institut Mater Boni Consilii, et à tous ses amis : in memoriam Mgr Robert F. McKenna, O.P. in memoriam Ezra Pound et la Théosophie Nouvelles du Grand Orient (et des alentours) Le Pressoir Mystique et le Précieux Sang de Jésus Un imposteur Les Juifs & le Catholicisme Vie de l’Institut Éditorial T rente ans. Le 18 décembre 1985, quatre (alors) très jeunes prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X quittaient la société fondée par Mgr Lefebvre. L’un partait du Prieuré San Carlo de Montalenghe, près de Turin ; un autre quittait le Prieuré Saint-Pie X d’Albano Laziale, près de Rome ; un autre encore abandonnait l’église parisienne de Saint-Nicolas du Chardonnet… Pour aller où ? Nous ne le savions même pas, mais nous voulions aller où Dieu voulait, et suivre Sa volonté. Nous n’avions pas de maison (c’est la grand-mère de l’un de nous qui nous accueillit dans son appartement à Turin) ; nous n’avions pas non plus un autel où célébrer en sécurité (en raison des tentatives faites pour nous éloigner de la chapelle de la Via Verdi, y compris devant le tribunal, contre le propriétaire du local qui nous ac- p. 2 p. 4 p. 24 p. 25 p. 26 p. 29 p. 30 p. 30 p. 37 p. 41 p. 45 p. 46 p. 51 Trente ans. Le 1 8 décembre 1985, quatre (alors) très jeunes pr êtres de la Fr ater nité Sacerdotale Saint-Pie X quittai ent l a société fondée par Mgr Lefebvre. Pour aller où ? Nous ne le savions même pas, mai s nous voul i ons al ler où Dieu voulait, et suivre Sa volont é. Nous n’avions pas de maison... cueillait) ; pendant un court moment, nous fûmes même privés de la revue que nous avions fondée peu de temps avant (oui, celle que vous lisez présentement, et qui arrive chez vous : Sodalitium). Noël arriva, et nous célébrâmes la Messe de minuit chez des particuliers. 3 Comment ne pas remercier ces fidèles qui nous firent confiance, qui nous aidèrent, qui nous soutinrent alors ? Comment ne pas nous souvenir de ceux qui nous apportaient de quoi manger, de ceux qui offraient des meubles, de ceux qui donnaient quelque chose. Le n° 10 de Sodalitium, le premier après la fondation de notre Institut, put sortir cinq mois après seulement, en mai 1986 ; et la liste de la célébration des Messes nous rappelle le peu de personnes qui nous accueillirent alors : Nichelino (nous avions finalement une maison), Turin, Valmadrera, Trente, Maranello. Mais notre pauvreté la plus grande n’était pas la pauvreté matérielle – qui faisait prophétiser à plusieurs que nous aurions vite disparu de la scène – c’en était une autre. Désormais persuadés des incurables contradictions de la Fraternité Saint-Pie X (à laquelle jusqu’alors nous avions cru pour persévérer dans la foi catholique), nous n’avions cependant aucune certitude sur ce que serait la meilleure réponse à nos doutes. Nous ne savions pas non plus quelle explication donner, conforme à la vérité, des situations dans laquelle se trouvait (et se trouve) l’Église Catholique. Mais nous nous étions proposés de mieux étudier les questions actuelles ainsi que les questions de foi. Nous nous mîmes alors sous la protection de Notre-Dame du Bon Conseil, afin qu’elle nous conseillât dans les doutes de la vie. Le 6 janvier parut un communiqué aux fidèles (le 19 à Montalenghe, Mgr Lefebvre prit durement position contre nous). Le 12 mars, à Bardonèche, furent rédigés les statuts qui régiraient notre vie commune. Le 25 avril, à Genazzano, nous présentâmes les statuts et nous consacrâmes notre Institut à Notre-Dame du Bon Conseil. Oui, mais quelle voie prendre ? Quelle était la vérité ? La prière et l’étude, mais surtout, nous en sommes certains, l’intercession de Marie, nous aidèrent, alors que nous entendions des voix très différentes de la part de ceux qui cherchaient à nous persuader de nous réunir aux uns ou aux autres. Enfin, arriva la décision vis-à-vis de celui qui, au contraire, ne nous avait pas cherchés. Aller faire la connaissance ou retrouver Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers. L’abbé Munari et l’abbé Ricossa se rendirent alors, au nom de tous, le 24 septembre 1986, fête de Notre-Dame de la Merci, à Raveau, pour rencontrer le religieux dominicain, l’évêque fidèle, presque abandonné de tous. Nous rencontrâmes d’autres prêtres lors de ce voyage, pour demander conseil, pour en entendre les raisons, et à la fin nous revînmes vers Mgr Guérard : notre décision était prise. Voilà, maintenant nous avions eu la réponse à toutes nos questions. À cette occasion, l’Institut fit les choix qu’il maintient encore aujourd’hui, à trente ans de distance, et que le fil du temps n’a pas démentis, qu’au contraire il a malheureusement confirmés, avec l’aggravation de la situation de l’Église, la diffusion de l’hérésie, l’affaiblissement de la résistance à l’erreur (non seulement la Fraternité s’est désormais accordée avec les modernistes, mais Mgr Williamson lui-même, chef moral de la “résistance”, a plusieurs fois affirmé la licéité de l’assistance à la nouvelle ‘messe’) et, à l’opposé, les dérives ‘conclavistes’ ou eschatologistes d’un certain ‘sédévacantisme’. Au-dessus : la première maison de l’Institut à Nichelino Au-dessous : les prêtres et les séminaristes de Orio avec la première sœur de l’Institut 4 L’Institut, évitant tous et chacun de ces écueils, fit son choix et maintient aujourd’hui encore ses positions. D’un point de vue doctrinal, la Thèse théologique que le Père Guérard des Lauriers avait publiée avant le 26 mars 1978, et ensuite dans les Cahiers de Cassiciacum, dans le numéro de mai 1979 (dans ce numéro, le lecteur trouvera une autre réflexion – née de la lecture de certains écrits d’Agostino Trionfo et de saint Antonin – sur la thèse du théologien dominicain). D’un point de vue pratique, nous décidâmes de nous engager dans la préparation au sacerdoce des jeunes vocations : c’est ainsi que naquit le séminaire (au moins de fait) de Orio Canavese, dédié à saint Pierre Martyr. Ce choix aussi était corroboré par les études de Mgr Guérard sur l’épiscopat, qui dissipaient nos doutes à propos des consécrations épiscopales alors évoquées par Mgr Lefebvre, sans savoir justifier un acte aussi grave (gravité qui semble échapper à certains : nous en reparlons dans ce numéro). On arriva ainsi au numéro 13 de Sodalitium , numéro historique peut-on dire, avec lequel prit fin notre recherche. Chose rare, sinon unique, il commençait par une “Amende honorable publique” pour les erreurs que nous avions enseignées au cours de notre appartenance à la Fraternité Saint-Pie X ; et il présentait ensuite une “Importante interview” de Mgr Guérard des Lauriers, qui est beaucoup plus qu’une simple interview. Après avoir expliqué dans les détails sa position théologique sur la situation de l’autorité dans l’Église et sur la nécessité de continuer la ‘Missio’ que le Christ a reçue du Père, in primis en perpétuant l’offrande du Sacrifice, l’‘ Oblatio munda’, qui n’existerait pas sans le sacerdoce, Mgr Guérard conclut par des paroles touchantes, aujourd’hui encore, sur notre Institut, qui se terminaient ainsi : “L’Institut ‘Mater Boni Consilii’ est conçu et né dans la Charité de la Vérité. Dominus incipit. Ipse perficiat”. Oui, le Seigneur commença cette œuvre ; tous n’ont pas persévéré, personne n’est certain de persévérer sans son aide, et sans l’aide de Notre-Dame du Bon Conseil. Et alors “Ipse perficiat” : qu’Il mène à bonne fin ce qu’avec Sa grâce Il a voulu commencer. Doctrine Pape, Papauté et Siège vacant, dans un texte de Saint Antonin de Florence et dans la pensée du Père Guérard des Lauriers Par l’abbé Francesco Ricossa L e matin du 11 février 2013, comme chacun sait, Benoît XVI annonça en Consistoire sa “renonciation au ministère d’Évêque de Rome, Successeur de Saint Pierre” en précisant que le Siège serait effectivement vacant à partir du 28 février, à 20 heures ; le 13 mars suivant, Jorge Mario Bergoglio a été élu à la place de Joseph Ratzinger, en se présentant au monde comme nouvel “Évêque de Rome”. Nous avons exprimé notre avis – pour ce qu’il vaut – dans deux communiqués, l’un du 11 février, dans lequel nous prévoyions que “la nuit sera(it) encore plus profonde”, et l’autre du 15 mars, dans lequel nous constations, avec l’élection de Bergoglio, la réalisation du trop facile pronostic. Dans ces lignes, je n’entends pas m’arrêter particulièrement sur l’action – je ne peux pas dire le gouvernement – de Jorge Mario Bergoglio, qui est visible par tous, mais plutôt, encore une fois, sur ce qu’est, dans l’Église, le Souverain Pontife, surtout à travers le processus par lequel un homme, qui n’est pas né Successeur de Pierre et Vicaire du Christ, le devient, ou cesse de l’être, ou trouve un obstacle à le devenir. Je traiterai, en somme, encore une fois, de l’élection au Souverain Pontificat, thème que notre revue a déjà abordé à d’autres points de vue, dans le passé (1). La renonciation de Joseph Ratzinger, en effet, peut aider à comprendre, avec un exemple concret qui est sous les yeux de tous, qu’une chose est l’homme élu à la papauté, qu’autre chose est la papauté elle-même, et comment le lien accidentel entre cette personne et la papauté dépend aussi (non seulement) d’un acte humain suscité par la volonté humaine : si Benoît XVI avait été Pape (2), en effet, il l’aurait été jusqu’au 28 février 2013 à 20 heures, et 5 Dans ces lignes, je n’entends pas m ’ar r ê t e r p ar t i cu l i è r e ment sur l’action – je ne peux pas dire le gouvernement – de Jorge Mario Bergoglio, qui est visible par tous, mais plutôt, e ncore u ne fois, su r ce qu’est, dans l’Église, le Souverain Pontife, surtout à travers le processus par lequel un homme, qui n’est pas né Successeur de Pier re et Vicaire du Christ, le devient, ou cesse de l’être, ou trouve un obstacle à le devenir. l’instant d’après – par un seul acte de sa volonté – il aurait cessé totalement de l’être, faisant cesser en sa personne cette relation spéciale au Christ dans laquelle, comme nous verrons, consiste formellement, la papauté. C’est un texte intéressant de saint Antonin de Florence, tiré de sa Summa Sacræ theologiæ (3) qu’un lecteur attentif nous a signalé depuis longtemps (4) qui nous viendra en aide. Antonin Pierozzi de Florence (1389-1459), dominicain (1405), fondateur du couvent de Saint-Marc à Florence, fut sacré évêque de sa ville natale en 1446, et canonisé en 1523. Son œuvre la plus célèbre est précisément sa Somme, écrite entre 1440 et 1459. Dans les passages qui nous intéressent, saint Antonin cite volontiers Agostino Trionfo d’Ancône (1243-1328), augustinien, à qui Jean XXII commanda – contre les erreurs de Marsile de Padoue – la Summa de potestate ecclesiastica (écrite entre 1324 et 1328) ; Trionfo défendit aussi, dans un autre écrit, les raisons et la mémoire de Boniface VIII. Le lecteur se rendra compte que la fameuse distinction adoptée par le Père M.-L. Guérard des Lauriers à propos de la papauté (materialiter-formaliter) qui se trouve déjà dans les écrits des grands commentateurs de saint Thomas, le cardinal Cajétan et Jean de Saint-Thomas (5), est bien connue tant de saint Antonin, que d’Agostino Trionfo, contemporain de saint Thomas. Saint Pierre, premier Souverain Pontife, a été élu immédiatement par le Christ Rappelons d’abord la différence qui existe entre Pierre et tous ses successeurs, quant à l’élection : Pierre a été élu Pape directement par le Christ, alors que tous les autres ont été élus par l’Église (Cajétan, De comparatione auctoritatis Papæ et Concilii nn° 269, 284, 563 etc.) (10). C’est le Christ Lui-même qui a donné à Simon le nom de Pierre (Jn 1, 42 ; Lc 6, 14) expliquant ensuite – après la confession de foi par laquelle l’apôtre, divinement assisté, proclame la divinité de Jésus (6) – la signification de cette dénomination : Tu es Pierre, et sur cette Pierre je bâtirai mon Église (Matth. 16, 18). Jésus-Christ, qui est la pierre angulaire sur laquelle doit être édifié l’édifice (Matth. 21, 42 ; Mc 12, 10 ; Lc 20, 17-18 ; Act. 4, 11 ; Rm. 9, 31 ss ; I Cor. 10, 4 ; I Pt 2, 4-8 ; cf. Ps. 117, 22), le roc inébranlable sur lequel bâtir la maison (Matth. 7, 24 ss) promet à Simon d’être lui aussi, avec Lui, cette Pierre, et il lui promet les clefs du Royaume des Cieux, c’est-à-dire de l’Église, et le pouvoir de lier et de délier (Matth. 16, 19). Ce que le Christ a promis, il le maintient, dans sa première apparition en Galilée, après la Résurrection. Le Christ est le Bon Pasteur, qui donne sa vie pour ses brebis : il y aura un seul troupeau, sous un seul pasteur, qui est Jésus-Christ (Jn 10, 11-16). Mais Pierre aussi, avec Jésus-Christ et comme Lui, en devenant une seule chose avec Lui, reçoit la charge de paître le troupeau du Christ : pais mes agneaux, pais mes brebis (Jn 21, 15-17). Ce n’est donc que dans le cas de l’apôtre Pierre, que vient immédiatement En 2013, Joseph Ratzinger a démissionné du “ministère d’évêque de Rome”, à sa place a été élu Jorge Mario Bergoglio 6 du Christ non seulement l’aspect formel de la papauté ( ecce enim vobiscum sum : Matth. 28, 20 ; pasce agnos meos, pasce oves meas : Jn 21, 15-17) mais aussi l’aspect matériel : la désignation et l’élection (Tu es Petrus, Matth. 16, 18). Les successeurs de Pierre sont au contraire désignés par l’Église Les autres Papes, après saint Pierre, ne sont pas désignés immédiatement par le Christ, mais médiatement, par l’Église ; et puisque l’Apôtre Pierre – par disposition de la divine Providence (Lamentabili, prop. 56, DS 3456 ; cf. Vatican I, Pastor Æternus DS 3050) – posa son siège à Rome, par l’Église Romaine. Au Pape seul, successeur de Pierre, revient d’établir les modalités de cette désignation canonique. L’antique usage de l’Église prévoit que l’évêque, dans ce cas l’évêque de Rome, soit désigné par le clergé diocésain et par les évêques voisins : les cardinaux, auxquels depuis 1059 revient en exclusivité l’élection du Pape (7), représentent de fait les trois ordres du clergé romain : cardinaux diacres, cardinaux prêtres et cardinaux évêques. Les laïcs (peuple, empereur, etc.) ont eu canoniquement seulement un rôle consultatif, non délibératif (cf. Sodalitium n° 54, pp. 8-11). Venons-en donc à parler de l’élection ou désignation à la papauté. L’aspect matériel de la papauté : l’élection Puisque nous avons choisi de citer saint Antonin, voyons ce qu’écrit à ce propos l’évêque dominicain : “… illud quod est in papatu materiale, quia papa mortuo potest collegium per electionem personam determinare ad papatum, ut sit talis vel talis” ; “… si nomine papatus intelligimus personæ electionem et determinationem, quod est in papatu materiale…” ; “… quantum ad personæ electionem et determinationem, quod est tamquam quid materiale”… Ce qui veut dire : “ce qui dans la papauté est (l’aspect) matériel, puisque, le Pape étant mort, le collège (des cardinaux) peut au moyen de l’élection déterminer telle ou telle personne à la papauté” ; “si par le terme ‘papauté’ on entend l’élection et la détermination de la personne, c’est ce qui, dans la papauté, constitue l’(aspect) matériel” ; “… quant à l’élec- tion et détermination de la personne, c’est ce qui est comme l’(aspect) matériel”. Le Père Guérard des Lauriers n’a donc pas “inventé” la distinction – dans la papauté – entre un aspect matériel et (comme nous verrons) un aspect formel (distinction qui par ailleurs existe analogiquement pour tous les êtres créés). Dans l’aspect matériel de la papauté, donc, il y a l’élection du Pontife par un collège d’électeurs, et cette élection a pour but de déterminer celui qui, parmi tous ceux qui pourraient être désignés, sera canoniquement élu à la papauté. Dans l’article sur l’élection du Pape, publié dans le n° 54 de Sodalitium, je rappelais qui a le droit de faire partie dudit collège des électeurs et qui ne l’a pas (8), mais la question pour l’heure ne nous intéresse pas. Ce qui nous intéresse en revanche, c’est de faire remarquer que ladite élection s’accomplit au moyen d’actes humains, libres et volontaires, des électeurs. Toujours dans le même article je rappelais que – contrairement à ce que l’on croit communément – les électeurs, bien que dotés de grâces particulières, ne jouissent pas de l’assistance divine infaillible, c’est pourquoi leur élection peut être invalide, douteuse, ou, naturellement, valide, mais pas nécessairement, de fait, celle du meilleur sujet (p. 15). Les électeurs, en somme, comme le démontre l’histoire des conclaves, choisissent leur candidat par – je le répète – un acte libre de leur volonté humaine, soumis à toutes les vicissitudes, contingences, imperfections et déficiences d’un acte humain. L’élection canonique fait, de l’élu, la personne désignée pour être Pape : lui – et seulement lui, à l’exclusion de n’importe qui d’autre – a par cette élection l’aspect matériel de la papauté, est ‘pape’, bien que seulement materialiter (9). Mais l’élection, comme on sait, n’est pas encore suffisante. Est nécessaire encore, de la part de l’élu, l’acceptation canonique de l’élection. L’acceptation de l’élection La personne élue, en effet, n’est pas encore – formellement – Pape, mais est seulement la personne désignée pour l’être. C’est ce que rappelle encore le cardinal Cajétan : “Il faut exprimer trois points. En pre- 7 Le Père Guérard des Lauriers en prière mier lieu : dans le pape existent trois éléments, la papauté, la personne qui est pape, par exemple Pierre, et l’union de ces deux éléments, c’est-à-dire la Papauté en Pierre et de cette union résulte Pierre Pape. En second lieu : en reconnaissant et en appliquant chaque cause à l’effet qui lui est propre, nous trouvons que la papauté provient immédiatement de Dieu, Pierre provient de son père, etc. ; mais l’union de la Papauté en Pierre, après que le premier Pierre ait été institué de manière immédiate par le Christ, ne vient pas de Dieu mais d’un homme, comme cela apparaît évident, parce qu’elle se produit par l’intermédiaire d’une élection de la part des hommes. Deux consentements humains concourent à cet effet, à savoir celui des électeurs et celui de l’élu : il est en effet nécessaire que les électeurs élisent volontairement et que la personne élue accepte volontairement l’élection, autrement il ne se produit rien (nihil fit). Donc, l’union de la P apauté en P ierre ne provient pas de Dieu de manière immédiate mais d’un ministère humain, soit de la part des électeurs, soit de la part de l’élu. (…) du fait que l’union de la papauté avec Pierre est un effet de la volonté humaine, quand la même constitue Pierre Pape, il s’ensuit que bien que le Pape dépende seulement de Dieu dans l’être et dans le devenir (in esse et in fieri), cependant Pierre Pape dépend aussi de l’homme dans le fait de devenir tel (in fieri). En effet, Pierre est fait Pape par l’homme quand, élu par des hommes, l’homme élu accepte, et ainsi la papauté est unie à Pierre” (10). De cette intervention de la volonté humaine dans le devenir (fieri) Pape, Cajétan trouve confirmation, continuant son raisonnement, dans le processus inverse, c’est-à-dire quand par un seul acte de sa volonté, en renonçant à la papauté, Pierre cesse d’être Pape, en séparant la papauté de sa personne : “Pierre-Pape, qui a sa propre cause dans son consentement et dans celui de ses électeurs, en sens contraire peut être annulé par la même cause” (11). La Constitution Apostolique Vacantis Apostolicæ Sedis de Pie XII (8 décembre 1945) établit : “Après l’élection canoniquement faite (…) le Cardinal doyen, au nom du Sacré Collège, demande à l’élu son consentement, en ces termes : ‘Acceptes-tu l’élection qui vient d’être faite canoniquement de ta personne comme Souverain Pontife ?’. Ce consentement ayant été donné dans un espace de temps qui, dans la mesure où il est nécessaire, doit être déterminé par le sage jugement des cardinaux à la majorité des votes, l’élu est immédiatement vrai Pape, et il acquiert par le fait même et peut exercer une pleine et absolue juridiction sur l’univers entier” (nn° 100 et 101). “Le Pontife Romain, canoniquement élu, dès qu’il a accepté l’élection, obtient par droit divin la plénitude de la puissance suprême de juridiction” (C.J.C., can. 219). Nous verrons ensuite, comment et de qui l’élu qui a accepté l’élection reçoit la juridiction sur toute l’Église et devient vrai Pape ; arrêtons-nous pour le moment sur la nécessité de l’acceptation de l’élection. Dans le laps de temps entre l’élection et l’acceptation, l’élu a, comme nous avons vu, de manière exclusive, l’aspect matériel de la papauté, mais n’a pas encore l’aspect formel. Ce laps de temps peut être déterminé par les électeurs, mais de par lui-même est indéfini. L’élu peut, de fait : accepter l’élection, refuser l’élection, ou même ni accepter ni refuser l’élection. Dans le premier cas (acceptation), il devient, s’il n’y a pas d’obstacles, vrai Pape ; dans le second cas (refus), il retourne à la condition dans laquelle il se trouvait avant l’élection, et un autre peut et doit être élu à sa place ; dans le troisième cas, le plus intéressant, il reste l’élu du Conclave sans être encore vrai Pape (‘pape’ materialiter, non formaliter) tant qu’il ne se détermine pas à accepter ou refuser. Telle est, comme nous le verrons, la situation dans laquelle l’Église et la papauté se trouvent actuellement (12). 8 L’élu est constitué Pape par Dieu, et non par l’Église L’élection de cette personne à la papauté vient de l’Église, au moyen d’un acte humain des électeurs ; l’acceptation de l’élection vient elle aussi d’un homme, au moyen d’un acte humain de consentement à l’élection de la volonté de l’élu ; mais l’élément formel de la papauté, c’est-à-dire ce qui constitue cette personne Pape, Vicaire du Christ et successeur de Pierre, ne vient pas de l’homme, et d’en bas, mais du Christ, et d’en haut. Le canon 219 déjà cité le rappelle ainsi : “Le Pontife Romain, légitimement élu, dès qu’il a accepté l’élection” (c’est cela l’aspect matériel qui vient de l’homme) “obtient par droit divin la plénitude du suprême pouvoir de juridiction” (et c’est cela l’aspect formel de la papauté) : “iure divino”, non “iure humano” ou ecclésiastique. L’Église, ainsi que nous le verrons, comme le collège des électeurs, n’a pas le pouvoir suprême ecclésiastique qui revient au Pape, et par conséquent ne peut pas non plus le lui communiquer ; il réside dans le Christ, Chef de l’Église, lequel est l’unique qui puisse le communiquer à Pierre. En quoi consiste formellement la papauté pour le Père Guérard des Lauriers (son aspect formel) Pour le code de droit canonique, comme il vient d’être dit, le Pape est tel puisqu’il reçoit de Dieu “la plénitude du pouvoir suprême de juridiction”. L’Église, et l’Autorité dans l’Église, sont ici présentées principalement dans la mesure où l’Église militante est un “collectif humain”, une société visible et parfaite. Nous adhérons, évidemment, à cette proposition qui n’est pas seulement une donnée juridique, mais aussi de Foi. Une donnée de Foi qui peut cependant être davantage approfondie. Je le ferai en suivant le théologien dominicain M.-L. Guérard des Lauriers (13). Il rappelle, comme déjà Pie XII dans son encyclique Mystici Corporis, que l’Église est principalement, en tant qu’objet de foi, “Corps Mystique du Christ” (14). De ce corps, le Christ est la Tête. La tête gouverne le corps : il s’ensuit – et nous ne devons jamais l’oublier – que “le gouvernement divin est exercé, dans l’Église, par le Christ, qui est le Chef de l’Église” (Cahiers de Cassi- ciacum n° 1, p. 47) [désormais C.d.C. dans la suite de l’article]. Dans Son corps qui est l’Église, le Christ, en tant que Chef, communique à tous ses membres sa Vie divine, la vie surnaturelle de la grâce : celui qui reçoit cette vie divine, et ne pose pas d’obstacle à cette communication, devient “membre du Christ, et ‘fils dans le Fils’” (p. 47), c’est-à-dire fils adoptif de Dieu dans le Fils unique et naturel qui est Jésus-Christ. “Cette Communication est, de soi, celle de la Vie divine. Elle peut, en général temporairement, se réduire à la Communication que ‘l’Auteur de la Foi’ fait de la grâce de la Foi. Qui a la Foi, même morte, demeure membre de l’Église” (p. 45, note 36). Mais il y a une seconde communication qui procède du Christ vers l’Église : l’Autorité dans l’Église, de ce point de vue, est aussi formellement constituée d’une Communication qui lui provient de son Chef, qui est le Christ ; en effet, “rien ne subsiste dans l’Église que par relation au Christ qui en est le Chef” (p. 44) (15). Cette Communication est différente de la précédente, mais elle est aussi attestée par la Sainte Écriture : “Et maintenant, moi, je serai avec vous toujours, jusqu’à la fin des temps” (Matth. 28, 20). Jésus “est avec” ses apôtres – et momentanément avec leur chef saint Pierre – “toujours”, habituellement, quotidiennement, dans l’accomplissement de leur mission qui est celle que le Christ lui-même a reçue du Père : “Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur enseignant à observer tout ce que je vous ai commandé” (Matth. 28, 19) “Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui au contraire qui ne croira pas sera condamné” (Lc 16, 16). “Saint Marc (16, 20) – note le Père Guérard – confirme cet ‘être avec’, post factum : ‘pour eux, étant partis (après l’Ascension) ils prêchèrent en tous lieux, le Seigneur travaillant avec eux (tou kuriou sunergountos: le Seigneur étant en unité d’acte avec eux)…”. C’est pourquoi le Seigneur peut dire en toute vérité : “Qui vous écoute, m’écoute” (Lc 10,16). Ce qui constitue en acte le Pape comme chef de l’Église est “l’être avec” qui a été promis par le Christ. “Le Christ a parlé au présent : ‘Je suis avec !’, avec ceux dont il exige qu’ils soient avec lui : ‘Qui n’est pas avec moi est contre moi’. C’est le même ‘être avec’, lequel, par nature, requiert la réciprocité” (p. 37). 9 Le Christ est donc toujours présent dans Son Corps qui est l’Église : dans les membres, en leur communiquant la vie de la grâce, ou au moins le don surnaturel de la Foi ; dans le chef visible, dans l’Autorité, en lui communiquant son “être avec” de manière habituelle et quotidienne (16). Le Christ sanctifie, comme Prêtre, gouverne, comme Roi, et enseigne, comme Prophète, Maître et Docteur, “avec l’Autorité” : qui vous écoute m’écoute, qui vous accueille m’accueille, qui vous méprise me méprise. Et cela non seulement de manière extraordinaire, quand par exemple est exercé le charisme de l’infaillibilité, mais habituellement et quotidiennement, s’agissant d’un état (“je suis avec vous”) habituel (17). “Et la soumission religieuse et théologale, qui est due à l’Autorité dans le collectif Église et dans celui-là seulement (18) est fondée formaliter sur le fait que l’Autorité est supposée recevoir habituellement la Communication d’‘être avec’ qui procède du Christ. C’est au Christ Lui-même, que, dans l’Autorité, la soumission s’adresse ; puisque le Christ ‘est avec’ l’Autorité : ‘Qui vous écoute, m’écoute !’ (Lc 10, 16). Cela suppose, bien entendu, nous le répétons, que l’Autorité reçoive habituellement la Communication d’‘être avec’, qui seule la constitue formaliter Autorité” (C.d.C., pp. 46-47). La Papauté pendant la vacance du Siège. L’Église pendant la vacance du Siège Nous avons jusque-là examiné comment on “fait” le Pape, et quel est dans la papauté l’aspect matériel, et l’aspect formel. Avant de traiter de l’acceptation de l’élection, et de la communication, de la part du Christ, Chef de l’Église, de sa présence (être avec) le Pape, considérons ce qui se passe, par contre, en période de Siège vacant. C’est ce que se demande explicitement saint Antonin, en suivant toujours les traces de Agostino Trionfo. Le Saint Docteur opère une triple distinction, pour ce qui regarde la “potestas” du Pape : il y a l’élément matériel (l’élection et la détermination de l’élu), l’élément formel (la juridiction et l’autorité) et l’élément tant matériel que formel : l’actuel exercice de la juridiction de la part de l’élu. Or, explique saint Antonin, le Pape étant mort (ou après sa renonciation, ou de toute façon, en pério- de de Siège vacant) l’élément formel ne “meurt” pas, ni l’élément matériel, mais “meurt”, pour ainsi dire, cette union de l’élément formel et de l’élément matériel qui consiste dans l’exercice actuel de la juridiction. Je m’explique. Durant la vacance du Siège, l’élément matériel – l’élection et la détermination du sujet qui occupe le Siège – ne “meurt” pas, c’est-à-dire ne disparaît pas, mais persiste dans sa racine dans le “collège” (une personne morale) qui peut élire le Pape : normalement le collège des cardinaux (le collège des cardinaux comme racine prochaine, l’Église comme racine éloignée). L’élément formel ne “meurt” ni ne disparaît non plus : “si par le terme ‘autorité papale’ nous entendons son autorité et sa juridiction, qui en est comme l’élément formel, ce pouvoir ne meurt jamais, parce qu’il demeure toujours dans le Christ, lequel, en ressuscitant des morts, désormais ne meurt plus”. C’est l’union entre l’élément matériel et l’élément formel, cependant, qui “meurt” à la mort du Pape : “mais si par le nom de ‘puissance papale’ nous entendons l’actuel exercice, qui est quelque chose de matériel et de formel dans la papauté, alors l’actuel exercice meurt effectivement quand meurt le Pape, parce que, le Pape étant mort, d’un côté l’exercice actuel du pouvoir papal ne demeure dans le collège que dans la mesure où il a été établi par ses prédécesseurs, et il ne demeure pas non plus, selon cette modalité, dans le Christ, puisqu’ordinairement, après sa résurrection, le Christ n’exerce ce pouvoir que par l’intermédiaire du Pape ; en effet, bien que le Christ soit la porte, il a constitué ses portiers Pierre et ses successeurs, par l’intermédiaire desquels s’ouvre et se ferme la porte qui permet d’accéder à lui”. Et saint Antonin résume et conclut : “L’autorité de l’Église ne meurt pas, donc, quand meurt le Pape, quant à la juridiction, qui en est comme l’élément formel, mais demeure dans le Christ ; et elle ne meurt pas non plus quant à l’élection et à la détermination de la personne, qui en est comme l’élément matériel, mais elle demeure dans le collège des cardinaux, par contre elle meurt quant à l’actuel exercice de sa juridiction, parce que le Pape étant mort l’Église est vacante (Ecclesia vacat) et est privée de l’exercice de ce pouvoir (et privatur administrationis talis potestatis)”. L’Église est – selon les mots du Père Guérard – en “état de privation” de l’autorité. 10 Donnons un exemple : le 9 octobre 1958, mourut le Pape Pie XII. Ce jour-là, l’Église passa – sans changer son essence voulue par le Christ – d’un état à l’autre : le matin, elle était gouvernée par Pie XII, le soir, elle était privée de son Pasteur (viduata Pastore). Avec ce changement, la puissance papale était-elle aussi changée ? Les éléments qui étaient unis dans la personne de Pie XII étaient maintenant séparés. L’autorité propre à Pie XII – sa juridiction et, surtout, nous l’avons vu, “l’être avec” le Christ – n’était plus en lui, puisqu’il était mort, mais elle était pour ainsi dire toujours vivante dans le Christ, Chef de l’Église, son Corps mystique, pour pouvoir être donnée à son légitime successeur. La désignation de sa personne à la papauté, accomplie par le conclave de 1939, n’avait maintenant, la mort étant survenue, plus aucun effet ; mais in radice demeurait cet élément matériel dans le collège des cardinaux. Ces derniers, qui en 1939 avaient élu le cardinal Pacelli, en le désignant de préférence à un autre, avec les autres cardinaux ‘créés’ entretemps par Pie XII, pouvaient et devaient maintenant en élire un autre à sa place. Mais ni le collège des cardinaux, ni le corps épiscopal, ni l’Église restée veuve de son Pasteur suprême sur la terre, n’avaient ce soir l’exercice de la juridiction papale. Cette “actualis administratio” pouvait sans doute ‘ressusciter’ dans la personne du légitime successeur de Pie XII, mais pour le moment était – selon les mots de saint Antonin – comme ‘morte’ avec le Pape défunt. En effet, bien que durant la vacance du Siège celui qui avait la juridiction normalement la conserve (19), cependant personne ne jouit de la juridiction et de l’autorité propre au Souverain Pontife. Personne n’a le primat de juridiction sur toute l’Église : ni le collège des cardinaux, ni le corps épiscopal, ni le concile œcuménique, qui ne peut pas non plus être convoqué sans le Pontife Romain (20). Personne, ni le collège des cardinaux, ni le corps épiscopal, ni le concile, ni le Camerlingue, ne jouit de cette suprême autorité papale propre à la constitution monarchique (et non collégiale) de l’Église. Personne ne jouit non plus du charisme de l’infaillibilité : ni le collège des cardinaux, ni le corps épiscopal : ni dispersé dans le monde, ni réuni en Concile, puisque audit corps manque la tête qui est le Pontife Romain. En janvier 2014, Bergoglio a invité au Vatican une délégation de rabbins argentins auxquels il a offert un repas rigoureusement casher De la même manière manque le suprême législateur ecclésiastique, qui est toujours le Pontife Romain, qui règle la discipline ecclésiastique et le culte de l’Église. L’existence ou non du pouvoir de juridiction ou du magistère dans le corps épiscopal n’a pas d’influence, de ce point de vue, bien entendu ! Nous avons amplement développé la question dans le n° 55 de Sodalitium (pp. 50-52). Par conséquent, la permanence de la juridiction ordinaire ou du pouvoir du magistère dans l’épiscopat subalterne (bien que cette permanence soit, évidemment, très utile), n’est pas absolument nécessaire à l’indéfectibilité de l’Église (21), mais c’est la permanence d’un corps électoral qui puisse désigner un vrai et légitime Pontife Romain (puisque “l’être avec” demeure dans le Christ) qui l’est seulement et exclusivement. Pendant la période de Siège vacant ordinaire (par ex. à la mort du Pape), comme pendant la période dans laquelle le Siège est occupé, comme maintenant, mais où l’élu ne reçoit pas du Christ l’Autorité, voici ce qu’écrit le Père Guérard : “Si le Christ n’exerce plus la Communication d’‘être avec’ qui constitue formaliter l’Autorité, il ne s’ensuit pas que le Christ ne régit plus l’Église militante. Il la régit provisoirement autrement que par l’Autorité : en ‘étant avec’ ceux de ses mem bres qui ‘sont avec’ L ui…” (C.d.C. n° 1, p. 57). Nous avons vu en effet que pour saint Antonin, également durant la période normale de Siège vacant, le Christ gouverne l’Église de manière différente de celle dont il la gouverne “ordinairement” (c’est-à-dire : par l’intermédiaire du Pape). Le Christ gouverne toujours l’Église militante : “ordinairement” par l’Autorité du Pape, provisoirement sans elle, mais de manière telle que la modalité or- 11 dinaire puisse être rétablie. Les considérations exposées dans ce petit chapitre, répondent à mon avis exhaustivement à certaines objections à la Thèse soulevées récemment, qui reprennent pour l’essentiel celles soulevées par l’abbé Cantoni en 1980 (22). Le Christ communique son “être avec”, sa présence, à l’élu qui accepte réellement l’élection Revenons à l’élection du Pape. Nous avons vu que l’élément matériel consiste dans l’élection et la désignation de ce sujet à la papauté par les électeurs ; nous avons vu que l’élément formel consiste au contraire dans la communication de l’‘être avec’ de la part du Christ à l’élu du conclave (avec tout ce qui s’ensuit : assistance, primat de juridiction, infaillibilité) ; nous avons vu que, afin que l’élu devienne effectivement Pape, il faut cependant qu’il accepte l’élection canonique de sa personne (can. 209 ; Pie XII, Vacantis Apostolicæ Sedis nn° 100 et 101). La chose est claire, et apparemment elle ne l’est que trop. En effet, si nous admettons par exemple que Paul VI fut canoniquement élu, il ne devrait y avoir aucun doute sur le fait qu’il accepta effectivement l’élection, et devint donc Souverain Pontife, recevant du Christ la communication de Son ‘être avec’. Ordinairement, en effet, personne ne se pose la question sur l’acceptation donnée par l’élu, si elle a eu lieu extérieurement ; on se préoccupe au maximum (mais cela est déjà une signification) que le rituel “accetto” soit prononcé sans aucune ombre d’ambiguïté. Ainsi, par exemple, quand le Cardinal Sarto – qui devait devenir le grand saint Pie X – fut élu, il répondit à la question du cardinal Camerlingue par les paroles suivantes : “ accepto in crucem ”, tant la papauté lui paraissait avant tout comme une terrible croix sur laquelle il serait immolé. Le Camerlingue – non satisfait de la réponse, qui était pourtant affirmative – insista alors pour être absolument sûr de l’acceptation. Le droit, que je sache, ne requiert rien d’autre que l’acceptation externe. Mais le droit cependant n’abolit pas la nature des choses ni ne peut le faire. L’acceptation, par conséquent, conserve sa nature d’acte humain, et doit être considérée comme tel. Ce que signifie accepter réellement l’élection Accepter l’élection est donc un acte humain, un acte d’intelligence et de volonté, par lequel l’élu accepte volontairement la papauté, ce qui inclut la connaissance de ce qu’est la papauté et la volonté d’exercer ce rôle. Une personne privée de l’usage de la raison, par exemple, serait incapable d’accepter l’élection et le pontificat, puisque incapable d’un acte humain, et donc aussi de comprendre ce qu’implique son acceptation. Quand l’élu du conclave accepte son élection au Souverain Pontificat, en acceptant l’élection, il accepte aussi et fait siens le rôle et la fonction de Souverain Pontife, qui est indépendante de sa volonté, mais se trouve dans la nature des choses. Celui qui accepte la papauté accepte de faire le Pape, de réaliser la fin de cette charge, qu’il ne lui revient pas d’inventer, mais est déterminée par Dieu. Expliquons-nous mieux. L’essence de l’autorité temporelle : procurer le bien commun Dans la société temporelle, l’autorité est nécessaire pour réaliser la fin de ladite société : le bien commun temporel. L’autorité, pour être telle, doit avoir la volonté de réaliser la fin de la société même, le bien commun. Cette intention doit être objective – c’est-à-dire qu’elle concerne les actes à poser pour réaliser ladite fin et non l’intention subjective qui l’anime, – doit être réelle – c’est-à-dire réaliser de fait, au moins pour l’essentiel, le bien commun – et doit être stable, et donc habituelle, parce que c’est de manière stable qu’elle doit gouverner la société. “L’autorité, définie par sa fonction propre d’assurer l’unité de l’agir des membres (de la société) en vue du bien commun, est formellement constituée par la relation spécifique que le chef soutient avec le bien commun. Cette relation a pour fondement propre l’intention habituelle, objective et réelle de procurer ce bien commun” (ABBÉ BERNARD LUCIEN, La situation actuelle de l’Autorité dans l’Église. La Thèse de Cassiciacum. Documents de Catholicité, 1985, pp. 34-35). En somme, l’autorité est en relation au bien commun à réaliser, et le fondement de cette relation est l’intention (objective, réelle, habituelle) de le réaliser ; de sorte que l’autorité qui n’a pas ladite in- 12 tention n’est pas l’autorité, ou cesse de l’être. Le droit de commander, et le devoir d’obéir, présupposent nécessairement que l’autorité soit par essence relative à l’effectuation du bien commun (ibid. p. 39). L’autorité dans l’État et l’autorité dans l’Église : analogie, similitudes, différences Entre la société temporelle et l’Église, entre l’autorité temporelle et le Pape, il y a une analogie (c’est-à-dire : quelque chose de semblable et, encore plus, quelque chose de différent). L’Église est aussi une société, et en elle l’Autorité est aussi nécessairement en relation à la fin de cette société divinement fondée. D’un point de vue humain, “l’Église est un collectif humain, en ce sens qu’elle est composée d’êtres humains qui, par grâce et par choix libre, ont une Fin commune. Cette Fin, qu’on peut appeler Bien divin, est la Gloire de Dieu réalisée dans la sanctification des membres qui composent l’Église. L ’Église comporte une Autorité, laquelle est divinement instituée en vue du Bien divin dont la réalisation est commise à l’Église. Cette Autorité est ramifiée en trois pouvoirs ; elle s’exerce de deux manières : ordinaire, extraordinaire ; elle est constituée par un ensemble hiérarchique de personnes consacrées” (C.d.C. pp. 42-43). Jusque-là, les dissemblances entre Église et État sont déjà visibles, cependant “de ce point de vue” l’Église est encore “semblable à tout autre collectif humain”, particulièrement dans le fait que “la Relation que soutient l’Autorité avec le Bien-Fin, est le fondement et la norme de toutes les ordinations qui émanent de l’Autorité”. Si l’Autorité réalise la fin, elle doit être obéie ; si l’Autorité ne réalise pas la fin, elle perd sa raison d’être. De fait, note le Père Guérard, se sont comportés ainsi “les fidèles, les prêtres, l’évêque qui demeurent attachés à la Tradition” en ne se soumettant plus, et même en résistant, à une “autorité” qui ne réalisait plus la fin et le bien de l’Église (p. 44). Un ex-confrère a fait remarquer que l’argument peut cependant être utilisé pour arriver à la conclusion opposée : parfois il est nécessaire d’obéir à un gouvernement qui sur plusieurs points ne réalise pas le bien commun, ne serait-ce que pour assurer l’ordre public et éviter l’anarchie. Nous lui avons déjà répondu (Sodalitium n° 61, pp. 18-28). Il y a une différence capitale entre l’Autorité dans l’Église et l’Autorité dans l’État. Dans l’Église, société surnaturelle, l’Autorité est constituée par l’“être avec” : par le fait que Jésus est avec l’Église, est avec l’Autorité, est avec le Pape, chose que l’on ne peut dire de l’autorité temporelle, même si elle est consacrée. Dans l’Église, l’intention de réaliser le bien commun n’est pas l’essence de l’Autorité, mais en est une condition nécessaire. Dans l’Église, je le répète, l’“être avec” est l’essence de l’autorité, alors que l’intention de réaliser le bien commun n’est pas l’essence mais la condition sine qua non et le signe du fait que le Christ est avec l’Autorité ; on tomberait dans un dangereux naturalisme si l’on réduisait l’Église à son aspect naturel de collectif humain, dans lequel la légitimité de l’autorité dépend uniquement du propos effectif qu’elle doit avoir de réaliser le bien commun, en confondant la réalité de l’Autorité propre à l’Église avec ce qui en est seulement une condition pourtant nécessaire (cf. C.d.C. pp. 57-64). Puisque l’autorité temporelle ne gouverne pas – comme celle de l’Église – “avec le Christ”, on comprend qu’elle puisse être encore légitime malgré la constatation de très graves déficiences, et que l’on puisse parfois résister à l’autorité (par exemple en refusant la ‘loi’ sur l’avortement, ou aux temps du paganisme, les sacrifices idolâtres), et parfois lui obéir (par exemple en payant les – justes – impôts) ; ce n’est pas le cas de l’Autorité du Pape, dans lequel “l’être avec” assure habituellement la divine assistance. Le Pape doit vouloir réaliser ce bien divin qu’est la fin de l’Église. Une condition nécessaire non réalisée est un obstacle à la communication de l’Autorité à l’élu du Conclave. Revenons à notre propos. Nous avons dit que l’élu doit accepter l’élection comme Souverain Pontife : il doit accepter le Souverain Pontificat. La condition sine qua non, absolument nécessaire de cette acceptation est alors l’intention objective, réelle et habituelle de procurer le Bien-Fin de l’Église. On objectera que cette condition ne se retrouve pas dans les manuels de théologie ou de droit canonique. Mais elle se retrouve dans la nature des choses. L’acceptation est un acte humain. Tout acte humain a un objet connaissable par l’intelli- 13 gence, sur lequel se porte la volonté. Le Souverain Pontificat est finalisé à la réalisation de cette fin de l’Église, le Bien divin, qui lui est assigné par le Christ Lui-même. Après avoir rappelé le rapport entre l’acte de foi et les arguments de crédibilité (“la Foi requiert la justification rationnelle que d’ailleurs elle transcende. Aucune raison ne fonde la Foi ; mais on ne doit pas croire sans raisons”). Le Père Guérard explique : “Que le Christ exerce vis-à-vis de l’Autorité la Communication qui la constitue formaliter Autorité, qu’il faille par conséquent être soumis à cette Autorité, cela est objet de Foi. Mais poser cet acte de Foi requiert que cet acte soit rationnellement fondé. On ne peut croire que le Christ exerce la Communication qui constitue l’Autorité, que si celleci réalise la condition pour que s’exerce cette Communication. Et le signe, observable, que l’Autorité réalise cette condition, consiste en ce qu’elle a habituellement le propos de réaliser le Bien divin. On peut, et même on doit, appliquer à l’Autorité ce qu’observait Léon XIII : ‘On ne peut juger de l’intention qui, par nature, est interne ; mais on en doit juger en tant qu’elle se manifeste extérieurement’. Ainsi, pour tout objet de Foi, pour l’existence de l’Autorité en particulier, l’acte de croire doit être sous-tendu par les signes de crédibilité que d’ailleurs il doit transcender” (p. 63). En d’autres termes. Normalement, les fidèles n’ont nul besoin de constater si l’élu du Conclave a réellement accepté l’élection au Souverain Pontificat. La chose va de soi. Mais cela n’enlève pas que cette acceptation inclut, par sa nature, une intention chez l’élu, pape materialiter, et une condition qui doit se réaliser : il doit avoir l’intention objective (celle qui regarde les actes extérieurs, la finis operis comme on dit, la finalité de l’acte plutôt que celle de celui qui opère), réelle (ou efficace, dans les faits) et habituelle (c’est-à-dire constante, ce qui admet une réalisation majeure ou mineure, plus parfaite ou moins parfaite, mais toujours habituelle et constante de la susdite intention) de réaliser la fin de l’Église, le bien divin ; et ce en faisant célébrer le Divin Sacrifice à l’Église, en donnant la vraie doctrine aux âmes (en condamnant par conséquent les erreurs), en sanctifiant les âmes par les sacrements, en les gouvernant avec les lois. “Si ce propos n’est pas réel, c’est-à- dire si l’‘autorité’ ne vise pas habituellement à réaliser comme elle doit l’être la ‘Relation’ qu’elle soutient avec le Bien-Fin, alors l’‘autorité’ n’est plus un ‘sujet’ métaphysiquement ‘capable’ de recevoir la Communication ‘d’être avec’ qui pourrait être exercée par le Christ ; et comme cette Communication ne peut être reçue, elle n’est pas exercée. Le Pasteur, même s’il les laisse à l’œuvre, ‘n’est pas avec’ les loups. Le Christ ‘n’est pas avec’ ceux qui détruisent l’Église. Le Christ n’est pas divisé contre Lui-même” (p. 56). Exemples (et analogies) d’un consentement seulement verbal et apparent, mais non réel L’élu du Conclave doit donc donner son consentement à l’élection, c’est une chose connue et indiscutée. Mais par sa nature ce consentement doit être non seulement verbal, et donc apparent, mais aussi réel : verbis et factis. C’est-à-dire qu’il doit avoir pour objet la fin et le bien de l’Église, que l’élu du Conclave doit avoir, objectivement, l’intention de réaliser. Le même bien/fin de l’Église, ensuite, doit être réalisé non seulement verbis – en paroles – mais aussi factis, dans les faits : dans le cas de Paul VI, remarque le Père Guérard, “les ‘verba’ servent à mieux assurer l’efficacité des ‘facta’” (C.d.C. n° 1, p. 68). Les mots (verba) parfois rassurants de Paul VI, servirent concrètement – et ce de manière habituelle et constante – à réaliser des faits (facta) diamétralement opposés (23). Pour permettre au lecteur de mieux comprendre ce que j’ai dit, voyons ensemble certaines analogies. La Justification. Cette analogie a été oubliée dans les années suivant la première publication de la Thèse du Père Guérard, pourtant elle est celle que le théologien dominicain présente précisément dans le n° 1 des Cahiers de Cassiciacum. En effet, comme nous avons vu, le Christ, en tant que Chef du Corps Mystique, exerce une double communication à l’égard de Son Corps : celle de la grâce à l’égard de tous les membres du Corps Mystique, et celle, que nous sommes en train d’étudier, de l’‘être avec’ (qui appartient aux grâces ‘gratis datæ’) à l’égard de l’Autorité. Il va de soi qu’il doit y avoir une analogie entre les deux communications. Voilà comment l’exprime le Père Guérard des Lauriers : 14 “De même qu’un être humain n’est constitué membre du collectif humain ‘Église militante’ qu’en recevant habituellement du Chef de l’Église la Communication de la Vie, ainsi l’Autorité n’est constituée Autorité dans l’Église militante qu’en recevant habituellement ‘l’être avec’ que lui communique le Christ. Les ‘sujets’, c’est-àdire ‘le membre de l’Église militante’ ou ‘l’Autorité de l’Église militante’, existent materialiter comme ‘sujets’, avant la Communication qui procède du Christ ; mais ils ne sont formaliter membres de l’Église ou Autorité de l’Église qu’en vertu et dans l’Acte de la Communication qu’exerce le Chef de l’Église. Il est possible qu’un être humain refuse la Communication de Vie qui procède du Christ. Cela est possible ; car, observe le Concile de Trente : ‘bien que le Christ soit mort pour tous (II Cor. 5, 15), ceux-là seuls reçoivent le fruit de sa mort, auxquels le mérite de sa Passion est communiqué’ (De Justificatione, chapitre 3 ; Denz. 1523). Et si un être humain refuse la Communication qui procède du Chef de l’Église, il n’est en aucune façon membre de l’Église, bien qu’il ne soit pas impossible qu’il le devienne. Pareillement, l’‘autorité’ qui refuserait la Communication de l’‘être avec’ qui procède du Chef de l’Église, ne serait en aucune façon Autorité de l’Église. Elle le pourrait être materialiter, au titre de ‘sujet’ dont il n’est pas impossible qu’il devienne l’Autorité ; mais ce ‘sujet’, privé de ce qui constitue formaliter dans l’Église l’Autorité, n’aurait, dans l’Église, aucune Autorité. L’analogie que nous venons d’indiquer concerne des états. Être membre de l’Église est un état ; être l’Autorité dans l’Église est un état. La Communication de Vie ou d’‘être avec’ qui procède du Christ comporte, quant à la réception en chacun des ‘sujets’ respectivement intéressés et qui peuvent toujours la refuser, un premier instant ; mais, inaugurée, elle est habituelle dans le ‘sujet’ qui en est le terme, comme elle est permanente dans le Christ qui en est le principe” (C.d.C. n° 1, pp. 44-45) (24). Pour faire simple, on devient membre de l’Église, Corps Mystique, en recevant du Christ la grâce (ou au moins la Foi) ; mais il est possible de la part de l’homme de mettre un obstacle à la réception de la grâce ou de la foi ; analogiquement, l’élu du Concla- ve peut mettre un obstacle à la communication de l’‘être avec’ qui constitue l’Autorité dans l’Église. Et comme l’Écriture affirme que ‘le Christ est mort pour tous’ et cependant pas tous se sauvent en recevant la grâce, de la même manière il est écrit ‘je serai avec vous’, mais la communication de cet ‘être avec’ peut être entravée par l’homme (cf. p. 56 et, sur les rapports entre l’acte du Christ et le consentement de l’homme, pp. 50-51). L’intention nécessaire dans les sacrements, ou autres obstacles éventuels, et le cas du consentement matrimonial en particulier. L’abbé Bernard Lucien et l’abbé Hervé Belmont, comme l’on sait, ont présenté une autre analogie intéressante fondée sur le consentement matrimonial (25). Cet exemple, comme nous verrons encore une fois, est particulièrement approprié, puisque le sacrement du mariage (et aussi le mariage naturel) est constitué par un acte humain, le consentement des époux, de même que par un acte humain est constituée l’acceptation de l’élection. À vrai dire, quoi qu’il en soit, l’argument vaut pour tous les sacrements. Il est connu que le sacrement agit ex opere operato, c’est-à-dire par le fait même d’en poser les éléments, matière et forme, par l’action même du Christ, auteur de la grâce et instituteur des sacrements. Mais ceci n’empêche pas que les sacrements puissent être invalides, ou en partie inefficaces, à cause d’un obstacle (obex) placé par l’homme. Parmi ces obstacles, il convient de signaler l’intention, ou mieux l’absence d’une véritable intention, non seulement chez le ministre qui confère le sacrement, mais aussi chez le sujet qui le reçoit comme, par exemple, l’attachement au péché chez celui qui reçoit le sacrement. Celui qui recevrait le sacrement du baptême de manière apparemment régulière, mais aurait une intention explicite de ne pas recevoir absolument le sacrement, le recevrait de manière invalide (il ne serait pas validement baptisé, et ne recevrait pas la grâce sanctifiante, ni le caractère baptismal). Celui au contraire qui vient d’être baptisé, et a l’intention de recevoir le baptême, mais en conservant l’attachement au péché (plaçant donc volontairement un obex, un obstacle) recevrait le caractère baptismal, mais non la grâce sanctifiante (une allusion également dans les C.d.C. n° 1, p. 24). Dans le sacrement de pé- 15 C’est le Christ qui communique à Pierre le pouvoir papal qui le constitue formellement l’Autorité dans l’Église (tableau du Guerchin) nitence, l’absence de douleur suffisante (attrition) chez le pénitent, invalide le sacrement (puisque les actes du pénitent constituent la quasi-matière du sacrement). L’exemple le plus approprié est celui du mariage, qui est généré précisément par le consentement des contractants. Le consentement doit être extérieur, mais il n’est pas suffisant qu’il soit seulement extérieur : un vice de consentement, même intérieur, même seulement chez l’un des contractants, rend invalide le consentement et par conséquent le mariage même. La situation des époux putatifs, cependant, n’est pas la même après le consentement matrimonial, même s’il est seulement apparent et invalide. Si, réellement et devant Dieu, ils ne sont pas mariés (c’est pourquoi – s’ils sont conscients du fait – ils ne peuvent se considérer mariés et ne peuvent, en conscience, accomplir l’acte conjugal objet du contrat) toutefois juridiquement et devant l’Église ils sont encore considérés comme étant unis par le lien conjugal (en vertu du consentement extérieurement échangé devant les témoins) tant que ledit lien n’a pas été déclaré nul canoniquement par la légitime autorité ecclésiastique. Pas seulement. Le consentement extérieur, bien qu’invalidé par un vice de consentement ou par un empêchement dirimant, a cependant des conséquences. Avant tout, comme nous l’avons dit, les époux putatifs sont juridiquement tenus de respecter le lien conjugal jusqu’à la déclaration juridique de nullité : un éventuel nouveau mariage serait invalide pour cette raison. Ensuite, la descendance née au cours de l’union seulement apparente et juridique des deux époux putatifs est considérée comme légitime, comme si elle était née d’un mariage valide. Enfin, s’il est possible de supprimer l’obstacle qui avait rendu nul le consentement (un vice de consentement d’un des époux ou des deux, ou un empêchement qui peut être dispensé par l’Église ou qui de toute façon peut cesser) les deux époux putatifs peuvent valider leur mariage, une fois l’obstacle supprimé, parfois aussi seulement en renouvelant le consentement, cette fois validement, même sans de nouvelles cérémonies extérieures (can. 1036 § 2). Les similitudes avec le cas que nous examinons sautent immédiatement aux yeux du lecteur. L’élu du Conclave doit donner son assentiment extérieur à l’élection faite de sa personne au pontificat ; de même les époux doivent exprimer extérieurement leur consentement au contrat matrimonial. Normalement, la constatation canonique du consentement advenu est suffisante, et personne ne la met en doute. Juridiquement, devant l’Église, l’élu du Conclave est normalement considéré comme Souverain Pontife, de la même manière que les deux époux sont considérés comme des époux légitimes. Toutefois, il est possible que le consentement matrimonial soit nul, devant Dieu et devant la conscience des époux qui en auraient connaissance, à cause d’un vice dans le consentement ou d’un empêchement canonique, qui représentent un obstacle à ce que le consentement ait son effet et sa validité ; en particulier, si l’intention des contractants ne se porte pas d’une manière ou d’une autre sur l’objet du contrat matrimonial, mais sur quelque chose qui en altère la substance. Analogiquement, l’élu du Conclave peut “vicier” son consentement et mettre un obstacle à la réception de l’‘être avec’ de la part du Christ, en n’ayant pas l’intention objective et habituelle de réaliser le bien/fin de l’Église. Il s’ensuit que, 16 comme les époux putatifs ne sont pas réellement mariés, ainsi le “pape” materialiter, n’est pas vraiment et formellement Pape, n’est pas l’Autorité, n’est pas “avec le Christ” pour gouverner l’Église. Cependant, les époux putatifs ne se trouvent pas dans la même condition dans laquelle ils se trouvaient avant le consentement donné extérieurement, bien qu’invalidement, exprimé devant l’Église : par exemple, ils ne peuvent validement contracter de nouvelles noces tant que n’est pas déclarée la nullité du lien précédent ; leur descendance est légitime ; dans certains cas il est possible, en supprimant l’obstacle, de rendre valide le consentement et le mariage. De la même manière, l’élu du Conclave qui a seulement extérieurement et non vraiment donné son consentement à l’élection ne se trouve pas dans l’état dans lequel il se trouvait avant le Conclave (quand il n’avait pas été élu) et avant l’acceptation (quand il était seulement l’élu sans avoir encore accepté). Il est Pontife “putatif” ou “pape” materialiter ; le siège est occupé par lui et ne peut être occupé par d’autres tant que l’élection n’a pas été déclarée nulle par l’Église. Certains actes juridiques indispensables pour la vie de l’Église peuvent avoir effet juridique (ou de par eux-mêmes, ou par suppléance du Christ Chef de l’Église) (26). Et enfin, dans certains cas, il peut rendre valide son acceptation de l’élection, à condition d’ôter l’obstacle par lui placé précédemment qui viciait son consentement (à condition que par nature il soit possible de le supprimer). Certes, les analogies sont seulement des analogies (dans lesquelles les différences entre les analogués sont plus importantes que les similitudes) mais il faut admettre que cet exemple est vraiment persuasif et de compréhension facile. L’intention d’accepter la consécration épiscopale par l’élu du Conclave. En vain les canonistes chercheraient-ils dans les Constitutions Apostoliques sur l’élection du Pape une allusion à cette ‘condition’ pour la validité de l’élection ; aucune n’en fait mention, pas même celle de Pie XII. Pourtant, le même Pie XII, dans un discours aux laïcs catholiques plusieurs fois cité (27) expliqua que si un laïc était élu au Souverain Pontificat, il deviendrait immédiatement le Souverain Pontife, avec juridiction universelle, au moment même de son acceptation de l’élection, avant même de recevoir l’ordination sacerdotale et la consécration épiscopale (nous le rappelons à l’adresse de ceux qui écrivent que la Thèse serait aujourd’hui dépassée si l’on émet l’hypothèse que Ratzinger n’était pas validement consacré et Bergoglio validement ordonné ; cf. Sodalitium n° 62, pp. 40 ss). Toutefois, précisa Pie XII, en acceptant l’élection, ledit laïc devrait avoir nécessairement l’intention de recevoir la consécration épiscopale (Pie XII ne dit pas qu’il doit recevoir la consécration, mais qu’il doit avoir l’intention de recevoir la consécration). C’est pourquoi le Pape est l’Évêque de Rome, et doit l’être, normalement, tant quant au pouvoir de juridiction qu’au pouvoir d’ordre. Être privé du pouvoir d’ordre ne le prive pas du Pontificat ; mais avoir une intention contraire au Pontificat (par exemple en ayant l’intention que le Pontife soit un laïc et non un évêque) vicie son consentement et par conséquent interdit à l’élu seulement apparemment consentant d’être formellement l’Autorité. À plus forte raison, l’intention habituelle et objective de ne pas vouloir le bien/fin de l’Église, c’est-à-dire ce pour quoi il devrait être l’Autorité, vicie le consentement à l’élection et empêche la Communication de la part du Christ de l’‘être avec’ qui constitue formellement l’Autorité dans l’Église. Conclusion : Dieu Lui-même ne peut faire qu’un “sujet” non apte à recevoir la Communication de l’‘être avec’ (et donc de l’Autorité) puisse la recevoir (tant que subsiste l’obstacle qui le rend inapte) On objectera que ce qui est dit sur l’élection du Pape ne se retrouve pas dans le droit canonique (il serait mieux de dire dans les Constitutions Apostoliques concernant l’élection du Pape, puisque le droit canonique, entendu comme Code, ne traite pas de la question) ou dans les auteurs classiques. Quant au droit, nous avons déjà donné l’exemple tiré du discours de Pie XII au congrès des laïcs. Quant aux auteurs “classiques”, nous faisons encore une fois remarquer que la situation tout à fait nouvelle dans laquelle nous nous trouvons impose une approche théologique différente de celle – par exemple – de l’“hypothèse du Pape hérétique” : Vidigal da Silveira 17 s’en était aperçu ( ), lui qui fut parmi les premiers à attirer l’attention sur les études théologiques à ce propos et qui est aujourd’hui encore continuellement cité et saccagé par ses épigones ; la théologie et l’histoire de la théologie sont deux sciences différentes (et la théologie consiste, au moins parfois, à réfléchir et pas seulement à répéter, rappelait le Père Guérard des Lauriers in C.d.C. n° 1 p. 30). Que cela suffise pour réfuter, encore une fois, le volontarisme, philosophique et théologique (29). Nous faisons enfin remarquer aussi que, avant le droit positif et les autorités théologiques, il y a la métaphysique de l’être : “Le Christ n’exerce plus la Communication d’‘être avec’ à l’égard de tel ‘sujet’ qui occupe le Siège de l’Autorité, mais qui ne remplit pas les conditions nécessaires et suffisantes pour recevoir du Christ ce qui, formaliter, le constituerait comme Autorité. La ‘Communication’ est par nature un acte commun à celui qui communique et à celui qui reçoit. Dieu, qui est ‘Celui qui suis’ (Ex. 3, 14) ne peut pas faire que les lois de l’être ne soient pas. S’il est impossible que, de quelque façon, la Communication soit reçue, alors elle n’est pas exercée. Il faut, ou l’accepter, ou le réfuter” (p. 56). 28 La preuve de la Thèse (arguments non probants, preuve inductive, preuve déductive) La plupart de ceux qu’on appelle “sédévacantistes” pensent pouvoir démontrer avec certitude la vacance du Siège Apostolique par différents arguments ; parmi les principaux, l’hypothèse théologique du “Pape hérétique”, ou bien celui tiré de la Bulle Cum ex apostolatus du Pape Paul IV, ou bien enfin par les mesures contre les hérétiques prévues par le code de droit canonique (can. 188, 4° et can. 2314 § 1), qui reprennent par ailleurs, en grande partie, la susdite Bulle du Pape Carafa. Le premier numéro des Cahiers de Cassiciacum (pp. 76-87 ; cf. aussi pp. 22, 30, 36 ss) explique déjà pourquoi ces arguments, bien qu’“ impressionnants, surtout par leur convergence” (p. 36), ne concluent pas avec certitude, renvoyant ensuite aux nn° 3-4 l’examen approfondi des différentes “pathologies de la foi” (schisme et hérésie, auxquels devait s’ensuivre une étude sur le modernisme comme ‘pathologie de la foi’). L’abbé B. Lucien a, par la suite, exposé et réfuté en détail chacun de ces arguments (30). Rappelons alors quel est l’argument – de type inductif – qui conclut avec certitude (bien qu’avec la ‘certitude probable’ propre à l’induction). Paul VI n’est pas l’Autorité, n’est pas Pape formaliter, puisqu’il n’a pas l’‘être avec’ Jésus-Christ, Chef de l’Église. Et il n’a pas l’‘être avec’ Jésus-Christ, Chef de l’Église, parce qu’il n’a pas l’intention habituelle et objective de réaliser le bien/fin de l’Église, intention qui constitue la condition sine qua non pour être l’Autorité dans l’Église. L’Autorité, quelle qu’elle soit, temporelle ou spirituelle, n’est jamais une fin en elle-même ou, comme on dit aujourd’hui, autoréférentielle. L’Autorité est, par nature, finalisée au bien commun de la société qu’elle doit gouverner. Une société en effet, composée de membres disparates, doit être dirigée à une fin par l’Autorité, et cette fin est le bien commun. “Certains veulent réduire l’autorité au sujet qui est désigné comme chef, en négligeant, ou en oubliant, sa relation réelle au bien commun. Mais il faut bien voir qu’une ‘autorité’ ainsi définie ni ne possède le droit de commander, ni ne crée d’obligations pour ses ‘subordonnés’ (…) la doctrine admise par tous, selon laquelle l’autorité a le droit de commander et oblige ses subordonnés, suppose nécessairement que l’autorité soit par essence relative à l’effectuation du bien commun” (B. LUCIEN, pp. 38-39). L’autorité réalise le bien commun au moyen d’actes humains, par conséquent volontaires. “Cette volonté délibérée de poser l’acte, nous l’appelons intention objective et réelle (ou efficace). ‘Objective’, Paul IV promulgua la Bulle “Cum ex apostolatus” 18 par distinction de l’intention ‘subjective’ qui concerne le motif pour lequel la personne agit. Cette intention ‘subjective’ peut demeurer, partiellement ou même totalement, inaccessible à l’observateur extérieur. Tandis que l’intention ‘objective’, qui porte immédiatement sur l’acte que l’on pose et non sur les motifs de poser l’acte, est discernable par l’observateur extérieur, sinon absolument toujours, du moins, dans la plupart des cas” (B. L UCIEN , p. 34). Donc : intention OBJECTIVE, et non subjective : “ce que l’homme fait, c’est cela, en réalité, qu’il veut : telle est la norme de l’intention objective” (ibid.) (31). En outre, de même que la société est une réalité de soi permanente, de même l’autorité, élément inhérent à son essence, doit être une réalité stable et permanente. La fonction qui définit l’autorité comporte donc un ensemble d’actes produits dans le déroulement du temps, convergeant vers le même bien commun. (…) Cette volonté délibérée stable (…) nous la désignons sous le nom d’intention habituelle” (B. LUCIEN, p. 35). Pour parler simplement (et donc peutêtre de manière imprécise). Toute société requiert une autorité. L’autorité n’est pas une fin en elle-même : elle a la charge de pourvoir au bien commun de la société. Elle pourvoira au bien commun au moyen d’actes volontaires, qui de manière convergente et habituelle, et non rare et épisodique, réalisent effectivement le bien commun. Une autorité qui de fait – réellement et efficacement – réalise le bien commun de la société qu’elle doit gouverner, a le droit à l’obéissance des sujets ; une ‘autorité’ qui non de manière épisodique, rarement, mais habituellement, NE réalise PAS le bien commun de la société qu’elle doit diriger, bien commun qui est toute sa raison d’être, N’est PLUS formellement l’autorité, n’a plus le droit à l’obéissance et à la soumission des membres de la société. Et ceci quels que soient les MOTIFS subjectifs pour lesquels l’‘autorité’ agit ainsi, qu’il ne revient pas aux particuliers de juger et qui peuvent être aussi – subjectivement – pleins de bonnes intentions, Deus scit. Ce que nous venons de dire vaut pour toute autorité, y compris pour l’autorité temporelle de l’État, et donc vaudra aussi pour l’autorité spirituelle : la grâce ne supprime pas la nature, mais la perfectionne. Bergoglio baise les mains de juifs déportés pendant la 2nde guerre mondiale L’autorité de l’Église, en effet, jouit d’une assistance divine dont ne jouit pas l’autorité temporelle, ou plutôt, elle est constituée par le fait d’‘être avec’ Jésus-Christ, Chef de l’Église : de faire avec Lui une seule chose, moralement parlant, en gouvernant, sanctifiant, enseignant l’Église, et la conduire ainsi à sa fin dernière qui est la gloire de Dieu et la réalisation de la ‘mission’ confiée par le Père à Jésus-Christ du salut des âmes par l’enseignement de la Vérité révélée, la célébration du Sacrifice, l’administration des sacrements, la pratique de la vie chrétienne. L’autorité temporelle – qui tient pourtant son autorité de Dieu – ne jouissant pas de l’‘être avec’ promis par le Christ à l’Église, peut donc éventuellement assurer un minimum de bien commun avec de très graves vices ; c’est la raison pour laquelle les sujets sont autorisés et tenus de ne pas obéir aux lois injustes : il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes. Au contraire, l’Autorité dans l’Église ‘est avec’ Jésus-Christ, et Jésus-Christ ‘est avec’ elle, de manière habituelle et quotidienne, c’est pourquoi habituellement et quotidiennement elle réalise le bien/fin de l’Église, la Mission confiée par le Père au Christ, et par le Christ à l’Église (Comme le Père m’a envoyé, ainsi je vous envoie : allez, enseignez, baptisez…). Il n’est pas impossible que par un acte déterminé, à l’exclusion du Magistère extraordinaire, l’Autorité puisse présenter des défectuosités (32) ; il n’est pas possible au contraire que l’Autorité qui est une seule chose avec le Christ puisse ne pas assurer habituellement le Bien de l’Église. “Nous faisons d’autre part état d’une donnée évidente, à savoir que dans l’Église l’Autorité est divinement instituée, et qu’elle est en définitive exercée, quoique médiatement, par Celui qui est la Vérité. Il est impossible que, dans l’Église, HABITUELLEMENT, l’Autorité n’accomplisse pas les fonctions qui sont en propre celles 19 de l’Autorité. Une telle hypothèse est contradictoire, contraire au principe de non-contradiction jouant non seulement dans l’ordre naturel mais dans l’ordre dont le principe permanent est le Verbe Incarné (cf. note 20 des C.d.C.). Si donc, habituellement, l’‘autorité’ n’accomplit pas les fonctions qui sont en propre celles de l’Autorité, il s’ensuit que l’‘autorité’ n’est pas l’Autorité ; car, si l’‘autorité’ était l’Autorité, elle devrait, en vertu de l’‘être avec’ qui lui a été promis, accomplir habituellement les fonctions qui sont en propre celles de l’Autorité…”. Tous ceux qu’on appelle “traditionalistes” (entendus comme catholiques qui s’opposent à Vatican II et à la nouvelle liturgie) dans les faits, Mgr Lefebvre inclus, ont agi et agissent comme si l’‘autorité’ n’était pas l’Autorité, puisque – depuis Paul VI – n’étaient plus assurés aux fidèles et à l’Église ni la doctrine, ni la Messe, ni les sacrements, ni la discipline, ni la défense de l’hérésie et des hérétiques. “Écône – constatait le Père Guérard – en subsistant, témoigne concrètement de ce que nous affirmons intelligiblement”. En concluant toutefois, ‘prophétiquement’ que “ si Mgr L efebvre refuse d’admettre que l’‘autorité’ n’est pas l’Autorité, il s’ensuivra tôt ou tard inexorablement, qu’Écône s’en trouvera vidé ou amalgamé” (33). On remarque comment l’argument inductif en question (l’unique exposé par le Père Guérard des Lauriers dans la première version dactylographiée de la Thèse – pas encore ‘de Cassiciacum’ – datée du 26 mars 1978) est en lui-même probant indépendamment de toutes les discussions (successives) sur l’infaillibilité du magistère, et des diatribes relatives à d’éventuelles “défaillances accidentelles” (mais non habituelles) de la part du Pape (34). Dans la version définitive de la Thèse, publiée dans le n° 1 des Cahiers de Cassiciacum (mai 1979), a été ajouté un “Avis” en guise d’introduction (daté du 11 février 1979) dans lequel on développe un autre argument qui se fonde sur l’opposition de contradiction entre le magistère de l’Église sur la liberté religieuse (par exemple, mais pas seulement, dans l’encyclique Quanta Cura du pape Pie IX) et celui de la déclaration conciliaire Dignitatis humanæ personæ “promulguée” le 7 décembre 1965. Ladite déclaration aurait dû être garantie, sinon par l’infaillibilité du magistère solennel de l’Église à qui appartient normalement un Concile, au moins à l’infaillibilité du magistère ordinaire universel ( 35). On peut en conclure que, au moins à partir du 7 décembre 1965, Paul VI ne jouissait (plus) de l’Autorité, il n’était (plus) Pape formaliter. Ce raisonnement, qui pourrait être appliqué à de nombreux autres documents conciliaires, est ensuite complété par ceux qui se fondent sur l’objet secondaire de l’infaillibilité de l’Église, qui s’étend comme on sait à la promulgation des lois universelles, qu’elles soient canoniques ou liturgiques (36), ainsi qu’à la canonisation des Saints. Le Père Guérard des Lauriers fait remarquer la connexion entre les différents arguments dans l’interview publiée dans le n° 13 de Sodalitium (37), quand il explique qu’il y a des exigences immanentes à la Communication de l’‘être avec’, et d’autres au contraire conséquentes. Les premières sont d’ordre naturel, mais ressortissent à l’ontologie (c’est-à-dire à l’être) : pour recevoir du Christ la Communication de l’‘être avec’ on présuppose, comme on l’a vu, l’intention habituelle et réelle de procurer le bien et la fin de l’Église (argument inductif) ; les secondes sont conséquentes à la Communication de l’‘être avec’, et sont d’ordre surnaturel, dont la principale est l’Infaillibilité, tant du magistère solennel que du magistère ordinaire universel : c’est ce qui concerne l’argument déductif. Conclusion Au terme de ce commentaire (que j’espère pas trop incorrect…) nous pouvons rappeler certaines conséquences de notre thèse (ou mieux : de la Thèse que nous faisons nôtre). Et d’abord, que l’Église (l’unique Église fondée par le Christ : catholique, apostolique et romaine) se trouve actuellement en “état de privation” de l’Autorité (38). Le Siège Apostolique est cependant occupé par l’élu du Conclave – jusqu’à une Déclaration contraire de l’Autorité de l’Église – qui n’est pas un “antipape” (puisqu’il n’y a pas un Pape légitime auquel s’opposer). Ledit occupant se trouve dans un état de “schisme capital”, une sorte de “schisme” (non au sens canonique du terme) propre à celui qui de- 20 cum le Christ’ pour le bien de l’Église : les portes de l’Enfer, en effet, ne prévaudront pas. Que le Seigneur, Chef de l’Église, vienne vite à son secours, par la médiation de Marie, Sa Mère Immaculée. APPENDICE : LE TEXTE DE SAINT ANTONIN Saint Antonin, évêque de Florence Eximii Doctoris BEATI ANTONINI ARCHIEPISCOPI FLORENTINI, ORDINIS PRÆDICATORUM, SUMMÆ SACRÆ THEOLOGIÆ, JURIS PONTIFICII, ET CÆSAREI, TERTIA PARS. VENETIIS, APUD JUNTAS MDLXXXI. vrait être le “chef” visible de l’Église (sans l’être, à cause de l’absence d’intention objective de gouverner l’Église à sa fin) et auquel participent ceux qui déclarent être dans son ‘obéissance’ (‘una cum’). Dans ces circonstances, le devoir des catholiques est de ne reconnaître en aucune façon comme Autorité celui qui n’est pas l’Autorité, ce qui implique entre autres pour les prêtres de ne pas célébrer ‘una cum’ et pour les fidèles de ne pas assister à la messe célébrée ‘una cum’ l’actuel occupant du Siège Apostolique. Pour la continuité de la missio, la mission confiée par le Père au Christ, et par le Christ à l’Église (Comme le Père m’a envoyé ainsi je vous envoie : allez, enseignez, baptisez … ) et particulièrement pour le maintien du Sacrifice du Nouveau Testament, l’Oblation pure – source de la grâce – et par conséquent du Sacerdoce, et pour l’administration des sacrements, il est licite (seulement en cas de graves nécessités) de conférer et de recevoir la consécration épiscopale, naturellement aux conditions requises par l’Église (dans la mesure du possible) et uniquement si l’on reconnaît la vacance formelle du Siège Apostolique. Pour le rétablissement de la Sessio ( Sedebitis super sedes… Matth. 19, 28), il faut prier, témoigner de la Vérité et travailler afin que ceux qui occupent les Sièges épiscopaux ou le Siège Apostolique lui-même condamnent l’hérésie et professent publiquement la Foi catholique, en ôtant les obstacles de sorte qu’ils puissent agir légitimement ‘una TITULUS VIGESIMUS PRIMUS §. 3. Utrum mortuo papa potestas ejus remaneat in collegio cardinalium ? Respondet August. in di. 51. q. 3. Duobus modis potestas papæ remanet in collegio cardinalium ipso defuncto. Primo quantum ad radicem ; comparatur enim collegium ad papam, sicut radix ad arborem vel ramum. Sicut autem potestas arboris vel rami qua floret et fructum producit remanet in radice, ipsa arbore vel ramo destructo, sic potestas papalis remanet in ecclesia, vel collegio ipso papa mortuo. In collegio quidem tanquam in radice propinqua et in ecclesia prælatorum et aliorum fidelium tanquam in radice remota. Secundo talis potestas remanet in ecclesia et in collegio quantum ad illud, quod est in papatu materiale, quia papa mortuo potest collegium per electionem personam determinare ad papatum, ut sit talis vel talis. Unde sicut radix producit arborem mediante qua flores et fructum producit, sic collegium facit papam habentem jurisdictionem et administrationem ejus in ecclesia. Unde si nomine papatus intelligimus personæ electionem et determinationem, quod est quid materiale in papatu (ut dictum est) sic talis potestas remanet in collegio mortuo papa. Si vero nomine potestatis papalis intelligimus ejus auctoritatem et jurisdictionem, quod est quid formale, sic talis potestas nunquam moritur, quia semper remanet in Christo, qui resurgens a mortuis jam non moritur. Unde super illo verbo, data est mihi omnis potestas in cœlo et in terra, et ecce ego vobiscum sum omnibus diebus usque ad consummationem sæculi, Matthæi capite finali dicit Augustinus quod apostoli quibus Christus loquebatur non permansuri erant 21 usque ad consummationem sæculi, sed in persona omnium sequentium eos ipsis locutus est tanquam uni corpori ecclesiæ. Sed si nomine potestatis papalis intelligimus actualem administrationem, quod est quid materiale et formale in papatu, sic actualis administratio bene moritur mortuo papa, quia nec remanet in collegio actualis administratio potestatis papalis ipso mortuo, nisi inquantum per statutum prædecessoris est eis commissum, nec remanet isto modo in Christo, quia de communi lege Christus post resurrectionem non est executus talem potestatem, nisi mediante papa ; licet enim ipse sit ostium, Petrum tamen et successores suos constituit ostiarios suos, quibus mediantibus aperitur et clauditur janua intrandi ad ipsum. Potestas ergo ecclesiæ non moritur mortuo papa quantum ad jurisdictionem, quod et quasi formale in papatu, sed remanet in Christo ; nec moritur quantum ad personæ electionem et determinationem, quod est tanquam quid materiale, sed remanet in collegio cardinalium, sed moritur quntum ad actualem administrationem jurisdictionem ejus, quia mortuo papa ecclesia vacat, et privatur administratione talis potestatis. Nec obstat si dicatur Christi sacerdotium durare in æternum sicut Christus, ergo mortuo papa remanet potestas ejus, quia hoc est verum quantum ad id quod est formale in sacerdotio, sicut enim omnes sacerdotes non sunt nisi unus sacerdos, puta Christus quantum ad potestatem conficiendi, quia omnes conficiunt in persona Christi, sic omnes papæ non sunt nisi unus papa, puta Christus, quia omnes papæ recipiunt jurisdictionem et potestatem administrandi immediate a Deo, moritur tamen actualis administratio dictæ potestatis mortuo isto vel illo papa. Notes 1) Notre revue s’est occupée à plusieurs reprises de l’élection du Pape : par exemple, dans le n° 54 (décembre 2002) avec un article intitulé précisément L’élection du Pape ; puis dans le n° 62 (mai 2009), quand nous posions la question : Une consécration épiscopale valide est-elle nécessaire pour être Pape ?; dans le n° 55 (novembre 2003), en répondant à la Tradizione cattolica sur le thème du sédévacantisme. 2) “S’il avait été Pape”, Benoît XVI, par sa renonciation, aurait cessé de l’être. Mais puisque Benoît XVI n’était pas – formellement – Pape, mais l’était seulement matériellement, le 28 février 2013 il n’a pas cessé d’être Pape (puisqu’il ne l’a jamais été) mais seu- lement d’être, canoniquement, l’élu du conclave, occupant le Siège Apostolique, qui dès ce moment devint absolument vacant. 3) Eximii Doctoris Beati Antonini Archiepiscopi Florentini, Ordinis P ræ dicatorum, Summæ Sacræ Theologiæ, juris pontificii et cæsarei (tertia pars, titulus XXI, § 3). 4) Il s’agit de Patricio Shaw, que nous remercions. 5) Thomas de Vio, dit Cajétan (1468-1533), dominicain, général de l’Ordre (1508), cardinal (1517), écrivit en 1511 son De auctoritate Papæ et Concilii (dernière édition de 1936, auprès de l’Angelicum de Rome). On trouve une longue citation du chap. XX dans le De Papatu Materiali de l’abbé Donald J. Sanborn, édité par notre Centro Librario. Jean de Saint-Thomas (1589-1644), dominicain portugais, traite de la question dans son Cursus Theologicus ; Tractatus de auctoritate Summi Pontificis, disp. II. 6) “Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant” (Matth. 16, 16). Saint Pierre, divinement assisté, confessa, au nom de toute l’Église, la Foi en la messianité (Tu es le Christ) et la divinité de Jésus (Tu es le Fils du Dieu vivant). On remarque comment Caïphe, chef du Sanhédrin, condamnera à mort Notre-Seigneur comme blasphémateur pour les mêmes motifs : “Je te conjure, au nom du Dieu vivant, de nous dire si tu es le Christ, le Fils de Dieu” (...). Le Sanhédrin des Juifs s’oppose donc à l’Église, comme Pierre à Caïphe, et comme Dieu le Père, qui révèle à Pierre la divinité de Jésus, s’oppose au Père du Mensonge du côté de qui sont Caïphe et les Juifs (cf. Jn 18, 14). 7) Cf. Agostino PARRAVICINI BAGLIANI, Morte ed elezione del Papa. Norme, riti e conflitti. Il Medioevo. Viella editore, 2013, pp. 19 ss. 8) Dans l’article en question – auquel je renvoie – je rappelais tant les dispositions canoniques actuellement en vigueur, que ce qui est prévu, par les théologiens, dans des cas extraordinaires. En particulier, je rappelais que les laïcs ne peuvent pas élire le Pape (pp. 8-10), de même que les évêques privés de juridiction (pp. 7-8). Comme il est bien connu, seuls les cardinaux, au moins depuis 1179, sont les électeurs du Pape. “C’est ainsi que se maintient – écrivais-je – la plus ancienne tradition ecclésiastique qui veut que l’évêque soit élu par son clergé et les évêques voisins. Les cardinaux sont en effet les membres principaux du clergé romain (diacres et prêtres), unis aux évêques des diocèses limitrophes, dits suburbicaires (eux aussi cardinaux)” (p. 10). Ce n’est qu’en cas extraordinaire (si, par exemple, il n’y avait plus de cardinaux) que le collège des électeurs devrait être cherché dans l’Église universelle, c’est-à-dire dans le Concile général (imparfait, puisque privé de Pape) (pp. 6-7) qui inclut les ordinaires et non les évêques titulaires, ou en tout état de cause privés de juridiction (can. 223 du code pio-bénédictin de 1917) (pp. 6-7). 9) Cela, au moins, dans le cas où l’élection a été canoniquement valide. Que penser d’une élection canoniquement invalide ou douteuse (comme elle pourrait l’être par un défaut chez les électeurs, un défaut chez l’élu, ou un défaut dans l’élection) ? Dans ce cas, la personne invalidement ou douteusement désignée ne pourrait validement accepter l’élection, si entretemps elle n’avait pas remédié au vice de l’élection même ; mais tant que l’élection invalide ou douteuse n’est pas déclarée telle par celui qui a le droit et le devoir de le faire (ou par l’Église, et en particulier par le 22 collège électoral), la personne ainsi désignée reste en un certain sens telle, et peut donc être encore considérée comme étant l’occupant matériel du Siège. 10) De comparatione Auctoritatis Papæ et Concili, c. XX, cit. in Sanborn, De Papatu Materiali, Centro Librario Sodalitium, Verrua Savoia 2001, pp. 98-101. 11) Ibidem, p. 101. Il est évident pour tous, au moins après la tristement célèbre renonciation de Célestin V, que le Pape peut, par son acte de volonté, renoncer à la papauté. Bien plus discuté est le point de l’intervention des électeurs non plus pour unir la papauté à cette personne, mais pour séparer la papauté de cette personne, dans le cas d’hérésie – comme docteur privé – du Pape. Pour Cajétan cette intervention est possible et nécessaire (Papa hæreticus deponendus est : le Pape hérétique doit être déposé) ; pour Bellarmin ceci n’est pas possible, ni nécessaire, puisque Papa hæreticus depositus est : le Pape hérétique est déposé par le fait même, par Dieu. Ce n’est pas pour cela que Bellarmin exclut toute intervention du corps électoral ou de l’Église enseignante, puisque c’est à Elle qu’il revient soit de constater l’hérésie, soit de constater la déposition. 12) Pour être encore plus exacts, il faut donner une autre précision. Dans le cas actuel, l’élu du Conclave a accepté extérieurement, mais non réellement. Le cas se situe donc comme “à mi-chemin” entre le cas de celui qui accepte (réellement) et le cas de celui qui n’a pas encore accepté. Celui qui accepte en mettant un obstacle qui conditionne cette acceptation est, comme nous verrons, pape materialiter, mais sa situation est en partie différente de celle de celui qui n’a pas encore accepté. 13) M.-L. GUÉRARD DES LAURIERS o.p., Le Siège Apostolique est-il vacant ? (Lex orandi, Lex credendi) in Cahiers de Cassiciacum n° 1, mai 1979. La première version inédite du texte est datée du 26 mars 1978. 14) Il s’agit d’une définition primordiale, par rapport à celle de Bellarmin reprise par le catéchisme : “L’Église militante ne saurait être définie adéquatement comme étant l’ensemble des fidèles soumis au Pape. Elle est, primordialement, le Corps Mystique du Christ ; elle est composée de ceux des membres du Christ qui pérégrinent sur terre. Être soumis au Pape est normalement une condition nécessaire pour être, sur terre, membre du Christ. Mais être membre du Christ n’est pas CONSTITUÉ par ce qui en est seulement la condition. Être membre du Christ, c’est recevoir la Communication de Vie qui procède du Christ” (PÈRE G. DES L., op. cit., p. 58). 15) J’ai retrouvé une perspective en partie semblable – uniquement concernant cet aspect, bien entendu – dans un article de Mgr Antonio Livi à propos de la polémique entre Palmaro et Cascioli sur l’actuel occupant du Siège Apostolique : “Il faut rappeler, d’abord, que pour nous tous catholiques, la principale (et parfois unique) raison pour laquelle nous devons nous intéresser aux paroles et aux gestes du Pape est parce qu’il est à la tête de l’Église du Christ par volonté expresse du Christ Lui-même, comme nous le savons de foi. C’est donc l’adhésion convaincue au dogme du Corps Mystique qui justifie l’obéissance inconditionnelle aux directives pastorales du P ape et motive l’union affective et effective avec lui, cette dévotion qui faisait dire à sainte Catherine de Sienne, au XIVème siècle, que le Pape est «le doux Christ en terre» (ce qui ne l’empêchait pas de se rendre en Avignon pour le ré- primander de ne pas résider à Rome). (…) Ce que le Pape fait et dit dans l’exercice du ministère pétrinien doit intéresser tous les fidèles (…) toujours et seulement pour un motif de foi : parce que le Christ l’a voulu comme Pasteur de l’Église universelle, ou plutôt parce que, d’une manière éminente, il est vraiment le “Vicaire du Christ”. Cela signifie que le Pape – quel qu’il soit en un moment donné de l’histoire – n’intéresse pas tant comme personnalité humaine ou comme “docteur privé”, c’est-à-dire comme simple théologien, qu’au contraire comme garant suprême de la vérité divine confiée à l’Église par l’unique Maître, qui est le Christ. En somme (…), le Pape intéresse relativement, c’est-àdire qu’il intéresse uniquement en relation au Christ, de qui il reçoit l’autorité de «paître ses brebis» en son Nom ; uniquement en relation au Christ, dont il doit garder la Parole, interpréter et annoncer au monde, «sans ajouter et sans retrancher quoique ce soit» ; uniquement en relation au Christ, dont le premier Pape, saint Pierre, dit que «il n’est sous le ciel, d’entre les noms qui se donnent chez les hommes, aucun autre qui doive nous sauver (Act. 4, 12)» ; (…)” A. LIVI, Obbedienza al Papa, solo in relazione a Cristo, in La nuova bussola quotidiana, 18 janvier 2014. Ce qui m’a intéressé est de rappeler que l’Autorité dans l’Église est relation au Christ Chef de l’Église. 16) Cette Communication – du Christ à l’Autorité – est par l’Autorité, une “relation” au Christ. Dans la distinction de la grâce (gratis data ou gratum faciens, tant actuelle qu’habituelle) l’“être avec” “est du type charisme” (gratia gratis data) “et non du type ‘grâce actuelle’” (C.d.C., pp. 48-49). 17) L’intention objective de procurer le bien/fin de l’Église doit être habituelle, comme habituel, de la part du Christ, est l’‘être avec’ l’Autorité. L’‘être avec’ est au contraire actuel, et non pas seulement habituel, quand l’Autorité gouverne et enseigne en acte, et de manière particulière quand elle exerce son magistère infaillible. 18) Seulement dans l’Église. En effet, les autres sociétés humaines, même parfaites, comme l’État, sont essentiellement naturelles, et non surnaturelles, comme l’Église, et en elles l’Autorité ne jouit pas de l’“être avec” de la part du Christ ! Nous avons déjà noté dans Sodalitium (n° 61 pp. 18-28) la grave erreur à laquelle peut conduire la confusion entre l’autorité dans l’Église et l’autorité dans l’État, quand entre les deux sociétés il y a seulement analogie, et non univocité, en citant précisément les Cahiers de Cassiciacum n° 1, pp. 90-99. Cette erreur est favorisée par un naturalisme de fond propre à certains courants théologiques non thomistes. 19) Pour ce qui concerne les fonctions et les facultés au cours de la vacance du Siège Apostolique (certaines fonctions cessent et d’autres non, certains actes peuvent être exercés et d’autres non), voir la Constitution Apostolique Vacantis Apostolicæ Sedis de Pie XII (8 décembre 1945) publiée parmi les documents du code de droit canonique : Titre I. De Sede Apostolica vacante ; chapitre I : De potestate S. Collegii Cardinalium Sede Apostolica vacante ; chapitre III : De nonnullis peculiaribus officiis, Sede Apostolica vacante ; chapitre IV : De Sacris Romanis Congregationibus et Tribunalibus eorumque facultatitibus Sede Apostolica vacante. 20) Un Concile réuni durant la vacance du Siège n’est pas un concile œcuménique, mais est défini “concile général imparfait”. 21) Sur l’indéfectibilité de l’Église, voir ce que j’ai déjà écrit dans Sodalitium n° 55, pp. 48-49. 23 22) Abbé Piero C ANTONI , Réflexions à propos d’une thèse récente sur la situation actuelle de l’Église, Écône, mai-juin 1988 ; abbé Curzio Nitoglia, La Tesi di Cassiciacum : il Papato materiale. Per un dibattito sereno, publié sur le site de l’auteur et de l’éditeur Effedieffe. Voir aussi la note 33 du présent article. 23) Le Père Guérard propose différents exemples : la doctrine sur la collégialité de Lumen Gentium ‘corrigée’ par la ‘nota prævia’ (dont les paroles rassurantes sont restées lettre morte) ; le Novus Ordo Missæ corrigé par les discours rassurants des 19 et 26 novembre 1969, demeurés lettre morte ; les paroles sur le maintien du latin dans la liturgie, démenties par les faits ; les mots de Humanæ vitæ , alors que dans les faits Paul VI donnait libre cours à la négation de l’encyclique par les conférences épiscopales. Aujourd’hui, la situation, dans les paroles et dans les faits, est bien plus grave et plus claire qu’alors ! 24) Dans la note 36, le Père Guérard précise que, pour être membre de l’Église, la Communication en question est normalement celle de la Vie divine, la grâce sanctifiante, mais que temporairement elle peut se réduire à la Communication de la Foi : “Qui a la Foi, même morte, demeure membre de l’Église”. L’analogie est reprise, approfondie et appliquée à la situation actuelle de l’Église aux pages 50-51 et 56, qui sont aussi un admirable résumé du traité de la grâce. Le Père Guérard explique aussi – de manière plus approfondie que je ne l’avais fait en répondant à l’abbé Paladino (F. RICOSSA, L’abbé Paladino et la “Thèse de Cassiciacum”. Réponse au livre : “Petrus es tu ?” pp. 910 et note 19) – le rapport entre la Communication divine et le consentement humain, tant dans l’infusion de la Grâce (justification) que, analogiquement, dans la Communication de l’Autorité dans l’Église. 25) B. LUCIEN, La situation actuelle de l’Autorité dans l’Église. La Thèse de Cassiciacum. Documents de Catholicité, 1985, p. 61, note 69. H. BELMONT, L’exercice quotidien de la Foi dans la crise de l’Église, chez l’auteur Bordeaux, 1984, p. 25. 26) Il s’agit d’un point particulièrement important. La principale application se trouve, à mon avis, dans la possibilité que conservent aujourd’hui encore les ‘cardinaux’ créés par le ‘pape materialiter’ d’élire le Pape. 27) Allocution au deuxième Congrès Mondial de l’Apostolat des laïcs, 5 octobre 1957. Le mérite d’avoir trouvé cet exemple revient encore à l’abbé LUCIEN, op. cit, p. 59, note 65. 28) Arnaldo Xavier V IDIGAL DA S ILVEIRA , La nouvelle messe de Paul VI : qu’en penser ?, Diffusion de la Pensée Française, 1975, pp. 215-216, où l’auteur souhaite de nouvelles études sur la question du “Pape hérétique” qui fassent sortir de la stagnation et des doutes concernant les différentes hypothèses à ce sujet. Après la publication de la Thèse du Père Guérard des Lauriers dans les Cahiers de Cassiciacum, le Père Georges Vinson, écrivit dans sa Simple Lettre que les travaux du Père Guérard avaient exaucé et comblé les désirs et les vœux exprimés par Vidigal da Silveira. 29) Cf. Cahiers de Cassiciacum n° 1, pp. 30-31, 7677. Volontarisme, historicisme et juridisme sont trois options intellectuelles erronées reliées entre elles qui ont causé de profonds dommages en philosophie et en théologie, et qui sont de nos jours encore un obstacle, y compris pour de nombreux esprits pourtant bien intentionnés, pour comprendre quelle est réellement, la situation actuelle de l’Autorité dans l’Église. 30) B. LUCIEN, op. cit. À l’argument du “pape hérétique” sont dédiés les chapitres VI et VII (pp. 6392) ; à l’argument canonique le chapitre VIII (pp. 8592) ; à la Bulle de Paul IV le chapitre IX (pp. 93-96). Le volume, supervisé par Mgr Guérard des Lauriers, n’a pas encore été traduit en italien. 31) Voir aussi C.d.C. n° 1, pp. 78 ss. 32) C.d.C. n° 1, p. 52, où est examiné, entre autres, le cas controversé du Pape Honorius, à propos duquel le Père Guérard conclut : “L’inadvertance, voire la désinvolture d’Honorius Ier, si tant est qu’elle ait été réelle, ne fut qu’occasionnelle ; elle n’a pas exclu le propos habituel de servir le Bien-Fin qui est commis à l’Église. Cette défaillance, si elle a eu lieu, n’a pas privé Honorius Ier de la Communication d’‘être avec’ qui, procédant du Christ, le constitua Pape formaliter tout au long de son pontificat. Tandis que les comportements déficients de Paul VI sont multiples et convergents. C’est seulement cette accumulation qui permet, et qui malheureusement exige, de conclure que l’actuel occupant du Siège apostolique n’a pas le propos habituel de réaliser le Bien-Fin qui est commis à l’Église. D’où il s’ensuit qu’à la différence d’Honorius, il n’est pas Pape formaliter” (C.d.C. n° 1, p. 53, note 43). On remarque combien la preuve de la Thèse conserve toute sa validité malgré tant d’arguments discutés au cours de ces années, tels que l’hypothèse théologique du Pape hérétique (l’exemple d’Honorius a été invoqué, fait remarquer le Père Guérard, tant par les défenseurs que par les accusateurs de Paul VI), ou que la possibilité ou non d’erreurs non seulement dans le gouvernement mais aussi dans les textes du magistère ecclésiastique du Pape. Que des pontifes aient gouverné l’Église mieux que d’autres, ou différemment de leurs prédécesseurs, personne n’en doute ni ne le conteste ; seulement, parfois, des historiens jugent diversement le pontificat de l’un ou de l’autre pontife, étant eux-mêmes certainement moins infaillibles que le Pape ! On a beaucoup discuté à propos de la possibilité d’erreurs dans le magistère authentique (officiel) de l’Église (et donc de son Chef), comme dans les lois et dans la discipline ecclésiastique (liturgie, droit canonique, canonisations, approbations des ordres religieux), tout comme à propos de l’extension de l’infaillibilité définie par le Concile du Vatican (DS 3074 pour ce qui regarde le magistère solennel du Pape, DS 3011 pour ce qui regarde le magistère solennel ou ordinaire de l’Église). L’auteur brésilien Arnaldo Xavier Vidigal da Silveira est le ‘Père’ indiscuté – parfois cité, parfois non, mais toujours pillé directement ou indirectement – par tous ceux qui défendent la possibilité d’erreurs dans les documents du magistère papal et dans les textes liturgiques de l’Église (par exemple, dans son livre La messe de Paul VI, qu’en penser ? et dans l’article Vi può essere errore nei documenti del Magistero ? publié par Catolicismo n° 223, juillet 1969, traduit par Cristianità n° 10, p. 11 mars-avril 1975, et publié récemment par Radio Spada). Récemment aussi l’abbé Nitoglia, revenu à ses origines, et l’historien Roberto De Mattei dans son Apologie de la Tradition, véritable acte d’accusation à l’égard de presque tous les Papes de l’histoire, se sont référés à Vidigal da Silveira. Nous désapprouvons totalement ce courant ‘faillibiliste’ (da Silveira ne peut citer un seul document du magistère en appui de sa thèse) ; cependant, nous faisons remarquer que même dans cette hypothèse la Thèse reste démontrée, puisqu’elle se fonde sur une absence habituelle, durable, convergente d’intention de réaliser la fin et le bien de l’Église, et non en des défaillances – si tant est qu’il y en ait eues – épisodiques, qui n’ont pas compromis la réalisation du bien et de la fin de l’Église. 24 33) La réaction de la Fraternité à la publication des Cahiers de Cassiciacum fut, au moins dans la production intellectuelle, inexistante ; dans la pratique, elle fut celle d’une rupture totale avec le Père Guérard. Seule exception : l’abbé Piero Cantoni, à l’époque professeur au séminaire d’Écône, qui objecta à la Thèse en soutenant que si le Christ avait privé non seulement le Pape, mais tous les évêques en communion avec lui, de l’‘être avec’, se réaliserait l’inadmissible hypothèse d’une “Église Vacante” et la non-réalisation de la promesse divine : Je serai avec vous jusqu’à la fin des temps. L’objection n’est pas rien, même si elle n’est pas insoluble (voir par exemple Sodalitium n° 55, pp. 48-58 pour ce qui concerne l’indéfectibilité de l’Église). Dans un argument ad hominem, le Père Guérard répondit entre autres (C.d.C. n° 6, mai 1981, pp. 111-112, 116-117) que tous ceux qui s’opposaient à Vatican II et à la réforme liturgique étaient obligés d’admettre que l’Église aujourd’hui ‘est toujours avec’ le Christ, mais l’est de manière différente de ce qu’elle était avant Vatican II. Si l’abbé Cantoni voulait être cohérent, il devait refuser cette position commune à tous les opposants à la doctrine conciliaire et à la nouvelle liturgie, et en conséquence quitter la Fraternité Saint-Pie X. Ce fut ce que, de manière cohérente, fit l’abbé Cantoni, en acceptant le Concile in toto et la nouvelle liturgie. 34) Cf. Cahiers de Cassiciacum n° 1, pp. 51-55. 35) L’abbé Bernard LUCIEN a par la suite approfondi les différentes parties de cette argumentation dans les ouvrages suivants : L’infaillibilité du magistère ordinaire et universel de l’Église, Documents de Catholicité, Bruxelles 1984, et Grégoire XVI, Pie IX et Vatican II. Études sur la liberté religieuse dans la doctrine catholique, Forts dans la Foi, Tours 1990. Après avoir abandonné la Thèse (qu’il avait correctement exposée dans La Situation actuelle de l’Autorité dans l’Église. La Thèse de Cassiciacum, 1985) en 1992, l’abbé Lucien a encore écrit des études précieuses sur le magistère, parmi lesquelles Les degrés d’autorité du Magistère, La Nef, 2007, utiles également pour qui, comme nous, ne partage pas la décision prise par l’auteur précisément en 1992. Au fil des années, de nombreux articles, particulièrement de l’abbé Giuseppe Murro, ont été publiés dans Sodalitium, sur le sujet. 36) Cela ne signifie pas, évidemment, que la discipline ou la liturgie de l’Église ne soit pas réformable, ou que chaque canon du droit ou rubrique liturgique exprime une vérité de foi. Cependant, cela signifie que l’Église, dans ses lois comme dans le culte, ne peut approuver ou seulement permettre quelque chose de nocif à la foi ou à la morale et à la vie chrétienne. Si la réforme liturgique (du missel, du pontifical comme du rituel des sacrements) et la réforme canonique venaient de l’Église, et donc du Pape, nous aurions la garantie de leur sainteté et de leur conformité avec la foi et la morale chrétienne ; il n’y aurait aucun motif pour s’abstenir d’embrasser lesdites réformes, obéissant simplement à l’Autorité. Les différents arguments, naturellement, s’impliquent et se corroborent l’un l’autre. 37) L’interview a été publiée à nouveau dans le volume Le problème de l’Autorité et de l’Épiscopat dans l’Église, Centro Librario Sodalitium, Verrua Savoia 2006. Le point en question est traité à la p. 36. 38) C’est cela l’expression correcte pour décrire la situation actuelle de l’Église. Il nous semble moins correct d’expliquer la situation actuelle par la catégorie “Église Catholique” (éclipsée) et “Église Conciliaire”. La démission du Pape Note relative au n° 473 de Chiesa viva R appelant la figure de l’abbé Luigi Villa, fondateur et directeur de la revue Chiesa viva, à l’occasion de sa mort (novembre 2012), Sodalitium avait déjà eu l’occasion de préciser à ses lecteurs quels furent, à notre avis, qualités et défauts, lumières et ombres de la revue catholique de Brescia fondée en 1971. Après la disparition de l’abbé Villa, hélas, les aspects, à notre avis, critiquables de cette revue n’ont pas diminué mais augmenté. Mais nous sommes restés stupéfaits à la lecture – dans le numéro 473 de juillet-août 2014 – d’un article sous la signature d’“Un haut prélat” intitulé : L’“antipape” “dénommé Pape François” ! D’après l’auteur anonyme de l’article, donc, Jorge Mario Bergoglio serait un “soidisant Pape”, même, un “antipape” : une belle nouveauté pour Chiesa viva, qui n’a jamais suivi le sédévacantisme, et a toujours reconnu la légitimité des occupants du Siège Apostolique après le Concile Vatican II. Mais pourquoi, d’après Chiesa viva, le “soi-disant pape François” serait-il un “antipape” ? Parce que – toujours d’après Chiesa viva – la “démission de S. S. Benoît XVI est ‘res nullius’ (sic) et par conséquent l’élection du cardinal Jorge Mario Bergoglio S.J. est non seulement illicite mais nulle”. Laissant de côté les perles de latin, il nous semble comprendre qu’à Chiesa viva on n’est pas devenu sédévacantistes, mais on pense que le légitime Pontife est “Sa Sainteté” Benoît XVI (comme si Joseph Ratzinger n’était pas aussi moderniste que Jorge Bergoglio). Mais il y a pire. Pourquoi, selon Chiesa viva, la démission de Benoît XVI serait invalide ? Simplement, parce que Chiesa viva nie qu’un Pape puisse validement renoncer à la papauté. À l’appui de cette affirmation, le “haut prélat” cite le n° 99 de la Constitutio de Sede Apostolica Vacante promulguée par le Pape Pie XII, où il serait dit que “le Pontife Romain NE peut démissionner”. Dommage que la Constitution Vacantis Apostolicæ Sedis au n° 99 ne dise absolu- 25 ment pas ce que lui attribue le – nous pouvons le penser – dénommé “haut prélat” : Pie XII se limite à prier (rogamus) l’élu du Conclave de ne pas refuser l’élection, mais de l’accepter, confiant dans l’aide de Dieu. Par contre, le code de droit canonique promulgué par Benoît XV, au canon 221, stipule : “dans le cas de renonciation du Pontife Romain, l’acceptation des cardinaux ou de quiconque n’est pas nécessaire pour la validité de ladite renonciation”. Par conséquent, le Pontife Romain peut renoncer au pontificat. Par contre avec son erreur, Chiesa viva de manière cohérente, nie la validité de la renonciation à la papauté de saint Célestin V (affirmant faussement qu’il fut par la suite tué de manière barbare) et nie la validité de l’élection de son successeur, Boniface VIII, en 1294, faisant siennes les calomnies de Philippe IV, Roi de France, et des hérétiques médiévaux dits fraticelles et spirituels. Si on se demande ensuite à qui profitent des affirmations aussi saugrenues et infondées, et d’autres du même acabit, l’unique réponse possible est : aux modernistes. En effet, ils jettent injustement, sur les défenseurs de la Tradition de l’Église, le discrédit et le ridicule. Aux fidèles désorientés, Sodalitium rappelle que – par sa renonciation – Joseph Ratzinger n’est même plus l’élu du Conclave ; qu’à sa place a été élu Jorge Bergoglio ; et que Jorge Bergoglio, exactement comme Joseph Ratzinger avant lui, ne peut être formellement Pape – c’est pourquoi JésusChrist Notre-Seigneur, Chef de l’Église, n’est pas avec lui pour la vivifier et la gouverner – puisque, de manière objective et habituelle il n’a pas l’intention de procurer la fin et de réaliser le bien de l’Église. Dans notre note critique il n’y a aucune malveillance envers quiconque, comme nous, s’efforce d’aimer l’Église et de combattre le modernisme ; et nous souhaitons que tous les bons catholiques restent unis dans la charité et dans la vérité pour continuer le bon combat (avec un peu de prudence en plus). Sodalitium Communiqués de l’Institut Mater Boni Consilii DÉCLARATION DE L’INSTITUT MATER BONI CONSILII Au sujet de la Consécration épiscopale conférée par Mgr Williamson le 19 mars 2015 omme tout le monde le sait désormais, Mgr Richard Williamson, l’un des quatre évêques sacrés par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988, a, à son tour, sacré Mgr Jean-Michel Faure le 19 mars 2015, à Nova Friburgo au Brésil. Dans un communiqué de la Maison Généralice, la Fraternité Sacerdotale SaintPie X a condamné cette consécration épiscopale avec des arguments et des expressions qui furent ceux des prêtres qui quittèrent Mgr Lefebvre en 1988 pour fonder la Fraternité Saint-Pierre ; la Fraternité Saint-Pie X gouvernée par Mgr Fellay accuse Mgr Williamson de “sédévacantisme” pratique, et de ne reconnaître l’autorité du Pape qu’en paroles (accusation plus sérieuse de la part de la Fraternité Saint-Pierre, qui se soumit à Jean-Paul II, que de la part de la Fraternité Saint-Pie X qui, jusqu’à maintenant et au moins en apparence, désobéit encore habituellement à François Ier). Beaucoup de catholiques, qui justement en tant que catholiques s’opposent au modernisme et à Vatican II, sont donc tentés de mettre leur espérance en Mgr Williamson, et se demandent si on ne peut pas approuver et reconnaître la consécration épiscopale de Mgr Faure. La consécration épiscopale du 19 mars 2015 se réfère explicitement à celle de 1988 et, aujourd’hui comme alors – par la lecture d’un “mandat romain” apocryphe – on y déclare ouvertement et catégoriquement, que tant Mgr Williamson que Mgr Faure (qui l’a répété dans une interview du 18 mars), suivant en cela l’exemple de Mgr Lefebvre, reconnaissent l’autorité et la légitimité de François Ier-Bergoglio. C’est pourquoi, exerçant notre devoir de témoigner publiquement de la foi, nous C 26 La fin d’une équivoque : réflexion sur la “Fraternité Saint-Pie X” ou “Fraternité des Apôtres de Jésus et de Marie” e 1er septembre 2015, dans une lettre adressée au ‘Président du Conseil Pontifical pour la promotion de la nouvelle Évangélisation’, Mgr Rino Fisichella, l’actuel occupant du Siège Apostolique, Jorge M. Bergoglio, a déclaré que, durant ‘l’Année Sainte de la Miséricorde’, à partir donc du 8 décembre, 50ème anniversaire de la clôture du Concile Vatican II, les prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, par sa disposition, auront les pouvoirs pour confesser tous les fidèles qui recourront à leur ministère, de telle sorte que les absolutions sacramentelles par eux administrées seront valides et licites. Cette décision a fait beaucoup de bruit, même si en réalité elle ne fait que confirmer d’autres décisions tout aussi importantes. Le 17 mars 2015, en effet, le gouvernement argentin a reconnu la Fraternité Sacerdotale des Apôtres de Jésus et de Marie (vrai nom de la Fraternité Saint-Pie X) comme personne morale en tant qu’association de droit diocésain, jouissant des privilèges que l’État accorde aux organisations reconnues par l’Église catholique, et ce, suite à une demande expresse de l’archevêque (moderniste) de Buenos Aires, successeur de Bergoglio, Mario Aurelio Poli. Ce dernier a déclaré au gouvernement argentin, le 23 février, que la Société fondée par Mgr Lefebvre a été érigée dans son diocèse comme société de droit diocésain en vertu du canon 298 du (nouveau) code de droit canonique (association de fidèles) en attendant d’être reconnue comme Société de vie apostolique. Rappelons que la Fraternité Saint-Pie X fut érigée, à l’époque, dans le diocèse de Genève-Lausanne-Fribourg, ad experimentum, comme ‘pia unio’. L’acte accompli le 1er novembre 1970 par Mgr Charrière est pratiquement identique (mais qui plus est, l’approbation de l’ordinaire de Buenos Aires n’est pas ad experimentum) à celui déclaré par Mgr Poli au gouverne- L Mgr Faure et Mgr Williamson ne pouvons que répéter à propos de la consécration de 2015 ce que nous disions à propos de celle de 1988 (cf. Sodalitium n° 17 pp. 4-9), à savoir que l’acte accompli par Mgr Williamson implique : sacrilège et schisme capital ; une praxis de nature schismatique ; et une contradiction vivante – signe manifeste de l’erreur – en reconnaissant comme Souverain Pontife de l’Église catholique et Vicaire de JésusChrist sur la terre Jorge Mario Bergoglio dans le rite même de la Messe, et en accomplissant dans le même temps une consécration épiscopale contre sa volonté et dans l’intention explicite de s’opposer à son autorité et à son magistère. Notre Institut invite donc les catholiques fidèles, qui s’opposent au néo-modernisme de Vatican II, à ne pas se laisser tromper par la Fraternité Saint-Pie X de Mgr Fellay, non plus que par la ‘Fraternité Saint-Pie X’ de Mgr Williamson : l’une et l’autre désirent en effet, de manière déclarée et programmatique, faire partie du bataillon de ceux qui reconnaissent Jorge Mario Bergoglio comme Vicaire du Christ, donnant donc pleine légitimité à son œuvre de destruction (à Dieu ne plaise !) de l’Église et de la foi entreprise par le modernisme. “Enfin, les récents événements confirment la position que prit, dans la crise actuelle, avec esprit de foi, Mgr Guérard des Lauriers” (notre déclaration de juillet 1988). Verrua Savoia, 20 mars 2015. 27 ment argentin. En outre, on sait que Mario Poli a agi à la demande précise de J. M. Bergoglio. Le 5 juin 2015, la Congrégation pour la doctrine de la Foi a accordé à Mgr Fellay, en qualité de supérieur général de la même Fraternité Saint-Pie X, les pouvoirs de juge de première instance dans un procès canonique concernant un prêtre de la Fraternité. La décision du 1er septembre est donc en parfaite continuité avec les précédentes. Depuis 1974, lorsque Paul VI voulut la suppression de la Fraternité Saint-Pie X, on parle d’“un accord” entre la Fraternité et les modernistes (redouté par les uns, espéré par les autres). Aujourd’hui encore on discute pour savoir si cet “accord” (c’est-à-dire la reconnaissance canonique de la Fraternité Saint-Pie X par l’‘autorité’ moderniste, qui reste telle) se fera ou pas. Nous sommes étonnés de constater que personne, ou presque personne, ne se soit aperçu que l’“accord-reconnaissance canonique” (un ‘accord’ tacite a toujours existé) est déjà intervenu, et ce, précisément sous le ‘pontificat’ de J. M. Bergoglio. On ne peut officiellement déclarer à un gouvernement que la Fraternité SaintPie X a été canoniquement érigée dans son propre diocèse, sans que – d’une manière ou d’une autre – ce soit réellement arrivé. On ne peut nommer le supérieur général de ladite Fraternité juge de première instance sur ses sujets, et par conséquent ordinaire, sans que ladite société existe canoniquement d’une manière ou d’une autre. Et on ne voit pas comment on peut donner le pouvoir de juridiction aux membres d’une société qui n’est pas reconnue dans l’Église, ne serait-ce même que pour confesser. Et de fait la Fraternité Saint-Pie X ou Fraternité des Apôtres de Jésus et de Marie ne se distingue plus réellement des autres mouvements Ecclesia Dei ou Summorum Pontificum, puisqu’en effet, les ‘évêques’ l’accueillent même déjà dans des églises – et de façon stable – pour la messe et qu’elle collabore in sacris avec les ‘prêtres’ susnommés (Ecclesia Dei et Summorum). On objectera que dans la lettre adressée à Mgr Fisichella, Jorge Bergoglio précise que les prêtres et les supérieurs de la Fraternité ne sont pas encore “en pleine communion”. Certes, une reconnaissance canonique définitive et officielle n’est pas encore intervenue. Mais précisément en cela on note l’habileté, et le style ‘pastoral’ de Bergoglio, allergique à la théologie et au droit, qu’il laisse volontiers aux théologiens et aux canonistes. Contournant toute difficulté, il a reconnu de fait la Fraternité Saint-Pie X, sans que presque personne ne s’en rende compte et donc sans soulever les obstacles qui, d’un côté et de l’autre, avaient été soulevés quand Joseph Ratzinger préparait la reconnaissance canonique. Là où le ‘théologien’ Ratzinger a échoué, le ‘pasteur’ Bergoglio a atteint le but. Pour le reste, le concept de ‘pleine communion’ ou de ‘communion imparfaite’ est un concept et une terminologie conciliaire (de la constitution Lumen Gentium en particulier) : on ne peut donc appliquer à la théologie conciliaire les principes catholiques de l’encyclique Mystici Corporis, par exemple. Pour Bergoglio, en particulier, la ‘pleine communion’ paraît être une question juridique secondaire, là où pour l’essentiel, autrement dit le baptême commun, “nous sommes déjà tous une seule chose, tous... catholiques, évangéliques, orthodoxes...” et... lefebvristes. Le pasteur Traettino ou l’évangélique pentecôtiste, le prêtre ‘callejero’ [terme espagnol signifiant ‘prêtre des rues’, n.d.r.] de la théologie de la libération, le patriarche byzantin avec son modèle synodal d’Église et l’économie de la miséricorde dans le mariage qui autorise de nouvelles unions, et également le prêtre lefebvriste, sont à ses yeux simplement des chrétiens qui évangélisent les pauvres et apportent la ‘miséricorde’ sur les chemins de la périphérie existentielle, expressions diverses mais authentiques du sentiment religieux. Mgr Fellay, supérieur de la Fraternité Saint-Pie X 28 Pour la Fraternité Saint-Pie X, de l’autre côté, il est impossible de refuser ce qui est généreusement offert par celui qui est reconnu comme ‘Souverain Pontife’ et ‘Saint-Père’. L’‘una cum Papa nostro Francisco’ est déjà une manière de se déclarer membre et sujet de celle qui, pourtant, était appelée par eux ‘église conciliaire’. Face au don généreux du ‘Saint-Père’, comment refuser ? Comment ne pas remercier ? Comment ne pas exulter ? Pourtant, la juridiction accordée pour l’année sainte (à partir donc du 8 décembre, pour le 50ème anniversaire de Dignitatis Humanæ , de Nostra Ætate et du ‘culte de l’Homme’) pour pouvoir confesser validement outre que licitement, laisse entendre que, avant cette date, et depuis 1974, les prêtres de la Fraternité ont confessé illicitement et invalidement ! Timidement, la maison généralice rappelle que pour eux les confessions administrées jusque-là, l’ont été validement et licitement selon les normes générales du code de droit canonique, en raison du cas de nécessité. Mais comment invoquer l’état de nécessité (que, de toute façon, le droit canonique limite au danger de mort et à l’erreur commune, et n’étend pas, comme le fait la Fraternité, légitimement mais non canoniquement, à chaque cas) qui accorderait une juridiction de suppléance, étant donné que, si l’on se fonde sur les principes de la Fraternité elle-même – spécialement de nos jours – clairement, il n’existe pas. Quelle serait la nécessité de se confesser aux prêtres de la Fraternité Saint-Pie X si, pour elle, l’Église a un Pape, des évêques diocésains, des sacrements et une messe absolument valides, même s’ils sont administrés selon le nouveau rite (et même licites, d’après la revue Sì sì no no) ? Quelle nécessité, si en tout état de cause, ces sacrements, y compris celui de la Pénitence (ou – comme il est appelé maintenant – de la Réconciliation) sont administrés par des prêtres tous validement ordonnés, en communion avec le Pape, et que l’on puisse, de toute façon, les obtenir dans l’ancien rite par des prêtres Ecclesia Dei – Summorum Pontificum ou par d’autres prêtres bienveillants ? Si l’on répond que ces prêtres sont hérétiques ou ne professent pas intégralement la foi catholique, comment se fait-il que la Fraternité les ac- cueille fréquemment dans ses maisons, les fait célébrer sur ses autels (même s’ils ont été ordonnés avec le nouveau rite et célèbrent habituellement ledit nouveau rite) ? Il est évident que, étant donné la situation actuelle, du point de vue de la Fraternité Saint-Pie X ne subsiste aucun état de nécessité qui soit si grave au point de justifier, chez les prêtres de la Fraternité, une juridiction de suppléance, d’autant plus que Bergoglio leur accorde la juridiction déléguée sans même qu’ils aient à la demander (au moins en apparence). Nous pouvons alors légitimement demander : en vertu de quels principes les prêtres de la Fraternité confessent-ils et confesserontils ? De celui d’un état de nécessité qui pour eux n’a plus de raison de subsister ? Ou en vertu des pouvoirs accordés par l’occupant du Siège Apostolique ? Et pour réaliser quelle mission confessent-ils, célèbrent-ils, administrent-ils les sacrements : celle que Jésus-Christ a confiée à l’Église (‘celui qui croira sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné’) ou celle qui a pour Chef J. M. Bergoglio (qui prêche le dialogue interreligieux et l’œcuménisme : même celui qui ne croira pas sera sauvé) ? Une telle question devrait poser aux malheureux pénitents des prêtres de la Fraternité (et semblables) de pénibles doutes et des tourments de conscience... Pour qui a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre, les conséquences logiques et inéluctables de l’‘una cum’ – à savoir de la reconnaissance – comme la Fraternité Saint-Pie X a toujours fait, de la légitimité et de l’autorité des modernistes qui au moins depuis 1965 occupent le Siège Apostolique, devraient être toujours plus claires. Certains, bien que se disant ‘sédévacantistes’, craignent que se fasse l’‘accord’ entre la Fraternité et J. M. Bergoglio, accord représenté comme un piège. Nous souhaitons au contraire que cesse enfin l’équivoque, et que les catholiques qui naïvement avaient fait confiance à des guides aveugles, sachent finalement ouvrir les yeux, en abandonnant définitivement une œuvre qui n’a jamais eu le courage de dire jusqu’au bout la Vérité. 3 septembre 2015, fête de Saint Pie X, 30 ans après notre sortie de la Fraternité Saint-Pie X (décembre 1985) 29 Aux membres de l’Institut Mater Boni Consilii, et à tous ses amis : in memoriam. “Laudemus viros gloriosos, et parentes nostros in generatione sua…” (Ecclésiastique 44, 1 ss). e 27 février de chaque année n’est pas un jour comme les autres pour notre Institut Mater Boni Consilii, dont les membres et les amis se réunissent autour de l’autel où est célébré le Saint Sacrifice de la Messe, l’Oblatio munda annoncée par Malachie, pour le repos de l’âme de Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers, et également pour le repos de l’âme de Mgr Umberto Benigni qui tous deux, à cette date, quittèrent ce monde et furent appelés par Dieu à l’éternité. Avant même la fondation de notre Institut, ordonnés prêtres depuis peu, nous décidâmes de reprendre la bannière du Sodalitium Pianum de Mgr Umberto Benigni : c’était en 1982. C’est après avoir quitté la Fraternité Saint-Pie X en décembre 1985, qu’eut lieu la rencontre avec Mgr Guérard des Lauriers, le 24 septembre 1986, qui donna à notre Institut sa forme, et traça sa voie, la Providence répondant ainsi à la demande de Bon Conseil adressée à la Vierge Marie. Aujourd’hui, nous nous honorons d’être encore fidèles au choix d’alors. Nous avons déjà à plusieurs reprises traité – lors de congrès, de conférences et dans Sodalitium – de la vie de Mgr Umberto Benigni (né à Pérouse le 30 mars 1862, et mort à Rome le 27 février 1934) et de celle de Mgr M.-L. Guérard des Lauriers (né à Suresnes le 25 octobre 1898, et mort à Cosne-sur-Loire le 27 février 1988), c’est pourquoi nous n’y reviendrons pas dans cette brève commémoration. En revanche, nous voudrions rappeler, au-delà des inévitables différences de personnalités si originales tant du prêtre italien que du religieux français, certains traits qui les réunissent. L’un et l’autre furent des hommes de profonde et vaste culture, appelés par l’Église à enseigner à Rome à l’élite du L Mgr Umberto Benigni et Mgr Michel-Louis Guérard des Lauriers clergé catholique : historien, Mgr Benigni ; philosophe, théologien et mathématicien, le Père Guérard. Tous deux furent fidèles à la Tradition et en même temps modernes, originaux et innovateurs. Semblable fut la parabole de leur vie : estimés par des Souverains Pontifes (Léon XIII et saint Pie X pour Mgr Benigni, Pie XII pour le Père Guérard), honorés et estimés dans l’Église des temps meilleurs, ils ne craignirent pas, les temps ayant changé, de tout perdre par fidélité à la Vérité : charges, renommée, honneurs. La dernière partie de leur vie fut, pour l’un et l’autre, une succession d’abandons, un véritable martyre moral, vécu dans une grande pauvreté, soumis à une damnatio memoriæ qui venait non seulement de leurs ennemis mais aussi de ceux qui auraient dû être ou avaient été leurs amis. Mgr Benigni fut la bête noire du modernisme et le collaborateur de saint Pie X, en combattant par tous moyens le cloaque de toutes les hérésies ; Mgr Guérard des Lauriers affronta d’abord la nouvelle théologie, fille et héritière du modernisme, et ensuite le modernisme triomphant à Vatican II : mêmes ennemis, même combat. Tous deux restent célèbres pour leur style inimitable, leur franchise de parole, y compris dans la polémique et l’ironie envers les ennemis intérieurs et extérieurs de l’Église, et envers les faux amis, à l’exemple du Christ (cf. Summa Theologiæ, III, q. 42, a. 2). L’un et l’autre travaillèrent sans relâche, sans s’épargner jusqu’aux derniers jours de leur vie. Leur programme fut celui de saint Pie X : “tout restaurer dans le Christ”. Mgr Benigni, en historien et militant contre-révolutionnaire, dénonça le travail séculaire des ennemis du Christ et de l’Église, in primis celui de la Synagogue. Mgr Guérard des Lauriers, sur les pas de saint Do- 30 minique et de saint Thomas, fidèle à sa vocation de frère prêcheur, dénonça dans le volontarisme l’erreur intellectuelle qui affaiblit – depuis la fin du Moyen Âge – la pensée catholique. L’un et l’autre ont été de fidèles serviteurs de Celui qui est la Voie, la Vérité et la Vie. C’est ainsi que nous avons voulu nous souvenir d’eux. Verrua Savoia, 27 février 2015 † Mgr Robert F. McKenna, O.P. 8/07/1927 – 16/12/2015 Requiescat In Pace Mgr Robert Fidelis McKenna à Mgr Robert Fidelis McKenna, religieux Dominicain et Verrua lors d’une Ordination Évêque Catholique, est décédé à l’âge de 88 ans aux Étatssacerdotale Unis. Mgr McKenna avait été ordonné prêtre dans l’Ordre Dominicain par le Cardinal Amleto Cicognani (18831973), et le 22 août 1986, il avait reçu à Raveau la Consécration Épiscopale de Mgr Guérard des Lauriers o.p. puisqu’il partageait la “Thèse de Cassiciacum” du grand théologien dominicain français sur la vacance du Siège Apostolique. Ami de l’Institut Mater Boni Consilii, il était venu à plusieurs reprises à notre aide pour administrer les Sacrements, affrontant le long voyage pour l’Europe ; il était venu à Verrua la première fois en 1991 (pour l’Ordination de l’abbé Giugni), en 1994 (pour l’Ordination de l’abbé Cazalas), en 1996 en Belgique (pour l’Ordination de l’abbé Stuyver) et enfin en 2002, lorsqu’il avait sacré évêque Mgr Geert Stuyver, afin d’assurer la continuité du sacerdoce catholique. C’est avec beaucoup d’affection que l’Institut se souvient de lui pour sa bonté, sa charité et sa fidélité à la bonne doctrine. Le suffrage de nos prières ne lui fera certainement pas défaut et nous recommandons sa belle âme aux prières de nos fidèles et amis. “Accordez satisfaction à nos prières, Seigneur, en faisant pénétrer dans la société de vos saints l’âme de votre serviteur Robert Fidelis, que vous avez soustraite aux rudes combats de ce monde” (Missel Romain). Requiescat in pace ! Ésotérisme Ezra Pound et la Théosophie Par l’abbé Francesco Ricossa U n regard suffit. La noble figure du poète Ezra Pound impose le respect à quiconque en contemple les traits. Ses chaînes méritent davantage encore le respect. Le poète qui chanta la beauté de l’Italie du Moyen Âge et de la Renaissance, et qui condamna l’usure, l’homme qui resta fidèle tout en sachant que, humainement parlant, il allait au devant de la défaite, ne peut que susciter une instinctive admiration. C’est précisément pour cela que j’ai pensé qu’il était de mon devoir de mettre en garde les catholiques fidèles à la tradition, afin que le respect pour l’homme ne se transforme pas en adhésion à la pensée d’Ezra Pound. Le militant catholique doit être catholique : ni libéral, ni socialiste. Et si certains – en matière économique – sont tentés par les principes du libéralisme, d’autres n’évitent pas les erreurs du socialisme, même quand ils croient suivre une “troisième voie”, mais qui n’est pas celle indiquée par le magistère de l’Église (qui n’est pas la 31 La noble figure du poète Ezra Pou n d i m pos e l e r e spe ct à quiconque en contemple les tr aits. Ses chaînes mér i tent davantage encore le respect. L’homme qui resta fidèle tout en sachant que, humainement parlant, il allait au devant de la défaite, ne peut que susciter une instinctive admiration. C’est précisément pour cela que j ’ai pensé qu’il était de mon devoir de mettre en garde les catholiques fidèles à la tradition, afin que le respect pour l’homme ne se transforme pas en adhésion à la pensée d’Ezra Pound. troisième, mais bien celle qui précède les deux autres). Parmi eux, très nombreux sont ceux qui se réfèrent explicitement ou implicitement, directement ou indirectement, à la pensée, ou au nom d’Ezra Pound. Ce n’est pas mon intention, ici, d’examiner cette pensée. Je me limiterai exclusivement à informer nos lecteurs sur les milieux dans lesquels cette pensée trouva son origine culturelle, de sorte que, à partir de la source on puisse mieux évaluer le cours d’eau auquel nous devrions – d’après certains – nous abreuver. Dans ce but, me servira de guide le livre de Luca Gallese, Le origini del Fascismo di Ezra Pound (Edizioni Ares, Milano, 2005), qui peut être complété par Il Dio di Ezra Pound. Cattolicesimo & religioni del mistero (Edizioni Ares, Milano, 2011), d’Andrea Colombo. La maison d’éditions Ares est, comme l’on dit, “proche de l’Opus Dei”, et a une collection “poundienne”. Et les auteurs sont des admirateurs d’Ezra Pound, tant est si bien que l’ouvrage de Gallese s’honore d’une préface de Giano Accame, et celui de Colombo d’une introduction de Mary de Rachewiltz, la fille du poète. Concernant les deux volumes cités, particulièrement celui de Gallese, ils ne viennent donc ni de sources hostiles au catholicisme ni de sources hostiles à Pound. Pourtant, la dette culturelle que Pound a à l’égard du mouvement Théosophique du colonel Olcott et de Madame Blavatski, et donc avec le monde maçonnique et occultiste, est évidente. D’où le titre de notre article. La religion de Pound Ezra Pound n’a jamais été catholique. Né aux États-Unis, le 30 octobre 1885, dans une famille protestante (“une race de pionniers, puritains et quakers” COLOMBO, p. 17), mère presbytérienne, père quaker pour des motifs sociaux actif dans l’église baptiste (p. 127), Pound mourut à Venise le 1er novembre 1972 sans adhérer à aucune confession religieuse, même s’il se considérait confucéen. Sa fille témoigne : “je ne l’ai jamais vu faire le signe de croix” (COLOMBO, p. 121). Le livre de Colombo insiste beaucoup sur les points de contact entre Pound et le catholicisme, mais malgré tous ses efforts il doit conclure : “en prenant en considération l’hypothèse d’un Pound ‘catholique’ il faut préciser que le poète est plus attiré par les éléments esthétiques, philosophiques et de politique sociale du christianisme, que par le message religieux en soi” (p. 119). Pound en Angleterre (1908-1920) C’est sur la période que Pound passe en Angleterre – de 1908 à 1920 – que se concentrent les recherches de Gallesi. C’est là, dans la mouvance de la revue The New Age que Pound adhère aux théories économiques du guild socialism (socialisme des guildes) du directeur A. R. Orage, et ensuite au Social Credit du major C. H. Douglas. Pound lui-même reconnut dans la pensée de Proudhon, Orage et Douglas les traditions qui ont le plus contribué à sa formation (GALLESI, p. 28). Pound arrive à Londres en 1908 avec des lettres de présentation “fournies par son amie Katherine Ruth Heyman, pianiste et passionnée d’occultisme” et désire connaître celui qu’il considère comme le plus grand poète vivant, William Butler Yeats, comme il arriva l’année suivante (p. 29). Demetres Tryphonopoulos (Pound e 32 Templi de la Golden Dawn avec pour nom d’initié Frater D.E.D.I. (Dæmon est Deus Inversus) : tout un programme ! Yeats ne fut pas, pour Pound, une connaissance superficielle ou passagère. Pound est introduit auprès d’Yeats par Olivia Shakespear (1863-1938, née Tucker), qui avait été l’amante d’Yeats et qui pour Pound était “la femme la plus fascinante de Londres”. Olivia aussi est une occultiste initiée à la Golden Dawn, et deviendra la belle-mère de Pound, puisque le jeune américain épousa sa fille Dorothy (elle aussi passionnée de chiromancie et d’astrologie). Après leur rencontre en Angleterre en 1909, Yeats et Pound nouèrent toujours plus une amitié qui culmina dans les années 1913-1916, au cours desquelles les deux poètes vécurent ensemble à Stone Cottage. Nous savons que Pound ne partageait pas les pratiques théurgiques d’Yeats ; mais il est difficile de penser qu’une si étroite proximité n’ait pas eu une profonde influence sur Pound. l’occulto. Le radici esoteriche dei Cantos. Mediterranee, 1998) fait remonter (pp. 83 ss) l’intérêt de Pound pour l’occulte à 19031904, quand le très jeune poète rencontra sa “Béatrice” en la personne précisément de la musicienne Katherine Ruth Heyman (18741944), fille du violoniste juif Arnold Heyman et d’une mère chrétienne. K. Ruth Heyman était théosophe, astrologue, occultiste, passionnée de Zen et Yi Jing, et “grande prêtresse du culte de Scriabine”, c’est-à-dire du compositeur russe Alexandre Scriabine (1872-1915), autre adepte des théories de Madame Blavatski. Déjà aux USA, donc, Pound se passionna pour un monde qu’il fréquenta ensuite de près à Londres. Yeats et les deux Shakespear Pound veut connaître William Butler Yeats (1865-1939) : mais Yeats n’était pas seulement “le plus grand poète vivant” et futur prix Nobel, chantre du nationalisme irlandais et des mythes celtiques. Yeats, qui en 1888 avait adhéré à la Société Théosophique, était aussi, au moins depuis 1890, un adepte de l’Ordre Hermétique de l’Aube Dorée (The Hermetic Order of the Golden Dawn) où le mage Aleister Crowley fut initié en 1898. En 1900, Yeats était Magister Les deux Bergson Avec Moina Bergson, sœur du très célèbre philosophe Henri Bergson, nous restons dans la mouvance de la Golden Dawn. Plus encore, dans le cœur de cette société magique et ésotérique. Mina Bergson (1865-1928), dite Moina, fut en effet initiée à la Golden Dawn en 1888 et en épousa l’un des fondateurs, le franc-maçon rosecroix Samuel Liddell “McGregor” Mathers (1854-1918) en 1890, devenant Moina Mathers. Moina était une artiste et une actrice, mais aussi une magicienne, au point d’être suspectée de sortilèges ad mortem contre des collègues. Plus prosaïquement, elle se travestissait en prêtresse d’Isis pour les messes égyptiennes de son mari, auteur de l’œuvre La Cabale dévoilée. Moina et son frère philosophe appartenaient à la famille juive polonaise des Bereksohn (avant que le nom fût transformé en Bergson). Apparemment, rien de commun entre la vie de la sœur et celle du frère Henri Bergson (1859-1941), l’austère philosophe de l’“évolution créatrice” et de l’“élan vital” qui déclara sa conversion au catholicisme (en version moderniste) renonçant au baptême uniquement par solidarité avec son peuple persécuté. Pourtant Gallesi (pp. 3134) voit qu’il y a quelque chose en com- 33 Olivia Shakespear Moina Bergson longtemps méprisés, nous allons prendre le pouvoir” (pp. 36-37). William Butler Yeats A. R. Orage et le “Socialisme des Guildes” mun. Et avec Pound aussi : puisque c’est leur ami commun Thomas Ernest Hulme (1883-1917) – commun à Bergson et à Pound – qui introduit Pound à la revue The New Age, qui lui fait connaître Orage, et lui inspire le nom de son mouvement littéraire, l’Imagisme. Hulme est bergsonien, et les théories du philosophe français “étaient très en vogue en ces années-là dans les milieux intellectuels, radicaux et ésotériques. (…) Et c’est encore à la philosophie bergsonienne, d’après G.D. H. Cole, que l’on doit l’inspiration de la naissance et la diffusion du féminisme, syndicalisme, unionisme industriel et socialisme des guildes”. Pound et Hulme fréquentaient la Quest Society de G. R. S. Mead (1863-1933), autre occultiste, chercheur passionné du gnosticisme, du néoplatonisme et de l’hermétisme, membre depuis 1884 de la Société Théosophique. Mead quitta la Société Théosophique, mais non ses théories, pour fonder précisément la Quest Society, qui réunissait notamment les deux prix Nobel, Tagore et Yeats, et le célèbre cabaliste Gershom Scholem (p. 36). Faisant la recension d’une conférence de Hulme à la Quest Society, Pound écrit : “L’introduction des esprits, des divinités tribales, fétiches, etc. dans les arts est donc un heureux présage… Nous nous retournons, nous les artistes, vers les puissances de l’air, vers les esprits qui étaient nos alliés, les esprits de nos aïeux. C’est à travers eux que nous avons gouverné et gouvernerons encore (…). La civilisation moderne a élevé une race avec des cervelles de lapin et nous, qui sommes les héritiers des sorciers et du vaudou, nous les artistes qui avons été depuis La pensée économique d’Ezra Pound est redevable au “Guild Socialism” d’Orage, et au “Social Credit” de Douglas. La tribune de ces théories fut le journal The New Age. Essayons d’en savoir plus, en commençant par Alfred Richard Orage (18731934). En 1894, il devient socialiste, en adhérant au Parti Travailliste Indépendant. En 1896, il épouse Jean Walzer, grâce à qui il s’affilie à la Loge de Leeds de la Société Théosophique et se rapproche de la spiritualité hindoue : le poème épique Mahabharata devient pour lui “un des textes fondamentaux – avec l’œuvre de Platon et de Nietzsche – de toute sa vie” (GALLESI, p. 117). Au cours de ces mêmes années il se noue d’amitié avec A. J. Penty († 1937) et Holbroock Jackson, eux aussi théosophes et socialistes. Ils fondent tous les trois le L eeds Art Club, qui accueille en même temps la Fabian Society et la Société Théosophique (p. 77). C’est Jackson qui introduit Orage à la pensée de Nietzsche, tandis que Penty rêve d’un retour aux Guildes et aux corporations médiévales, qui intéressent les Théosophes (et les francs-maçons, qui se disent les héritiers des anciennes corporations) (pp. 7 et 118). En 1906, à Londres, Penty et Orage fondent la Guild Restoration League et en 1907, Orage fonde avec Jackson le Fabian Arts Group. C’est le moment où les deux nietzschéens, Jackson et Orage, reprennent le journal socialiste The New Age. Les financeurs sont l’écrivain George Bernard Shaw et le banquier Lewis Fallace, lui aussi affilié à la Société Théosophique. Il n’est pas seul : d’autres théosophes collaborent comme Florence Farr (1860-1917, adepte de la Golden 34 fut une espèce de charnière entre les idées économiques de Pound et l’ésotérisme de Gurdjieff. (…) Taylor démontre comment étaient très répandues dans ce milieu intellectuel la recherche d’une ‘troisième voie’ économique et la propension à l’ésotérisme…”. Ce n’est pas par hasard si, de nos jours encore, le journaliste et essayiste Maurizio Blondet, qui actualise la pensée de Pound, ne cache pas le rôle des écrits d’Ouspensky et Gurdjieff dans sa “conversion” ( Gurgjieff e la luna ). Ainsi, de la Théosophie à Gurdjieff, toute la vie et la pensée d’Orage passèrent sous l’étoile de l’ésotérisme et de l’occultisme. Pound collabora à la revue d’Orage, The New Age, pendant dix ans, de 1911 à 1921, y publiant près de trois-cents articles (p. 159). Henri Bergson Dawn depuis 1890 à la suite d’Yeats), P. D. Ouspensky (correspondant de la Russie et depuis 1915 disciple de Gurdjieff), L. Haden Guest, “Beatrice Hastings” (Emily Haig 1879-1943), amante de Modigliani et de Katherine Mansfield, mais aussi d’Orage, dont il dénoncera par la suite les pratiques de magie noire (pp. 128-129) et sa dépendance d’Aleister Crowley. La même Katherine Mansfield écrivit sur The New Age que pour elle Orage est celui qui lui “enseigna à écrire et à penser” et “lui montra ce qui devait se faire et ce qui devait être évité” (p. 161). K. Mansfield, elle aussi célèbre écrivain, connut Crowley – expérimentant ses drogues – comme l’atteste John Symonds (Aleister Crowley. La Bestia 666. Ed. Mediterranee, p. 258), mais, surtout, elle suivit le Mage Gurdjieff qui mourut en 1928 au Prieuré d’Avon, près de Fontainebleau, siège de son Institut pour le développement harmonieux de l’Homme en 1928. Orage également, après l’expérience de The New Age, devint pour longtemps disciple déclaré et enthousiaste de Gurdjieff (1872-1949), connu par le déjà cité Piotr D. Ouspensky (cf. Paul Beekman Taylor, Gurdjieff e Orage, Fratelli in Elisio, Edizioni Mediterranee), en déménageant exprès en France. “Pound avait une bonne opinion de Gurdjieff, qui deviendra le Maître spirituel d’Orage” (p. 129). Gianfranco De Turris, dans l’introduction italienne au livre de Taylor (p. 10), écrit : “Orage, à travers les théories du Crédit Social du Major Douglas, C. H. Douglas et le Crédit Social Clifford Hugh Douglas (1879-1952) est le principal représentant des théories économiques sur le “Crédit Social”, qui furent rendues publiques pour la première fois, en 1919, précisément sur la revue de A. R. Orage, The New Age. Tant Orage que Pound adhérèrent aux théories économiques du Major Douglas, que Pound rappellera à plusieurs reprises dans les Cantos. Mais dans la figure de Douglas voyaient-ils et admiraient-ils seulement l’économiste, ou plutôt le “réformateur religieux et politique” (p. 246) ? Le Major Douglas était aussi un occultiste. Demetres Tryphonopoulos écrit dans Pound e l’occulto. Le radici esoteriche dei Cantos (Ed. Mediterranee, 1998, introduction de Luca Gallesi) : “Même si Pound n’avait pas été intéressé, quelqu’un d’autre, dont le nom est étroitement lié à ceux de Pound et Orage, était attiré par la forme d’occultisme de Mitrinovic. Je me réfère au Major Douglas. Quand, au début des années Trente, Mitrinovic fonda le mouvement New Britain (“engagé pour une société fonctionnelle, guildes, crédit social, système d’assistance, une fédération européenne, le triple Commonwealth de Rudolph Steiner, et une restauration du Christianisme”), le Major Douglas était une des personnes impliquée” (p. 123, note 99). La référence concerne l’ésotériste bosniaque Demetrio Mitrinovic (1887-1953), lui aussi, entre autres, collaborateur de The New Age. 35 Clifford Hugh Douglas La Société Théosophique Arrivés à ce point, il est nécessaire, pour qui n’a pas la moindre idée de ce qu’est la Société Théosophique que nous avons vu apparaître partout dans les milieux fréquentés par Pound, de dire deux mots sur elle. La Société Théosophique fut fondée à New York, en 1875, par dix-sept membres fondateurs, tous liés de quelque manière à la Franc-Maçonnerie et aux études ésotériques. Parmi eux, deux américains, le premier président de la Société, le colonel Henri Steel Olcott (1832-1907) et William Quan Judge (1851-1896), ainsi que la noble russe Helena Petrovna von Hahn, connue – par le nom de son mari – sous le nom de Madame Blavatsky (1831-1891). À la tête de la section ésotérique, succéda à Madame Blavatsky, en 1891, l’anglaise Annie Besant (18471933) qui, à la mort d’Olcott, devint seconde présidente de la Société. La “papesse” des Théosophes, Annie Besant, avait été membre de la Fabian Society, et est l’un des principaux représentants du mouvement féministe. Le président de la section allemande, Rudolf Steiner (1861-1925), fondateur de l’Anthroposophie, se sépara de la Société Théosophique. La Théosophie se réclame dans son nom à la philosophie néoplatonicienne et au gnosticisme, de même qu’aux antiques religions des mystères ; mais dès le début elle s’orienta vers les religions orientales, en répandant la passion pour l’Inde et le Tibet. Olcott et Blavatsky se dirent bouddhistes mais, comme le rappelle A. Besant, “Le lien d’union entre les membres de la Société Théosophique n’est pas une croyance commune, mais plutôt une commune recherche de la vérité” (on dirait le programme de la réunion ratzingérienne d’Assise ‘pèlerins de la vérité’ !). Dans la Théosophie, le rôle féminin et l’empreinte anglo-indienne sont importants. L’idée de fond est celle de l’unité ésotérique de toutes les religions, apanage des initiés. Cela, au moins, pour la façade. La réalité, on la trouve, par exemple, La théosophe Madame Blavatsky dans ces mots de Madame Blavatsky : “Le grand Trompeur” n’est pas le “tant calomnié Satan” mais “le Démiurge anthropomorphisé, le Créateur du Ciel et de la Terre” (cit. par Roberto Hack – le père théosophe de Margherita Hack – Le origine del movimento Teosofico, Trieste 1971, pp. 216-217). Théosophie, Fascisme et Antifascisme L’adhésion d’Ezra Pound au Fascisme fait suite à ses fréquentations des milieux théosophiques. À première vue, le soutien au Fascisme de la part de quelqu’un qui a fréquenté d’aussi près les milieux ésotériques pourrait sembler contradictoire. Mussolini, en effet, soutint d’abord l’incompatibilité entre l’appartenance à la Franc-Maçonnerie et l’appartenance au Parti Socialiste. Par la suite, en 1923, le Grand Conseil du Fascisme – sous l’impulsion des Nationalistes – décréta l’incompatibilité entre l’appartenance à la Franc-Maçonnerie et l’appartenance au Parti Fasciste. En 1925, la loi sur les Associations (qui interdisait les sociétés secrètes) aboutit de fait à la dissolution des deux principales obédiences maçonniques : celle de Palazzo Giustiniani, qui organisa à l’étranger, spécialement en France, l’antifascisme et celle de Piazza del Gesù (qui déclara que le Fascisme, en réalisant ses propres fins, avait rendu inutile leur société). En Italie, la Maçonnerie ne put se réorganiser qu’à la chute du Fascisme, favorisée par les vainqueurs anglais et américains. Entre 1925 et 1926, il y eut quatre attentats à la vie de Mussolini : celui de Zaniboni, dans lequel fut impliqué le général franc-maçon Capello, celui de l’anthroposophe anglaise Violet Gibson, et ceux de Lucetti et Zamboni ; dans tous il y 36 a une trace ésotérique et, il paraît que dans celui de V. Gibson fut impliqué l’ancien ministre anthroposophe, le Duc Giovanni Antonio Colonna di Cesarò (fils d’Emmelina Sonnino De Renzis, elle aussi théosophe, sœur de Sidney Sonnino, et membre du Groupe d’Ur d’Evola et Reghini). Colonna di Cesarò fut un des protagonistes de l’Aventin. Par ailleurs, des équipes fascistes frappèrent en 1925 l’homme politique antifasciste Giovanni Amendola – théosophe et franc-maçon – qui mourut l’année suivante suite aux coups reçus. Le gouvernement italien n’eut aucun respect pour le Mage Crowley quand, en 1923, il l’expulsa de Cefalù et le renvoya dans sa patrie, l’Angleterre, d’où la ‘papesse’ de la Théosophie, Annie Besant, attaquait le régime mussolinien ennemi de la démocratie. Pourtant, il existe aussi l’autre aspect, pour lequel je renvoie le lecteur à deux ouvrages significatifs : Massoneria, Fascismo e Chiesa Cattolica de Gianni Vannoni (Ed. Laterza, 1980) et Esoterismo e Fascismo, publié par Gianfranco de Turris (Ed. Mediterranee, 2006). L’historien de la Franc-Maçonnerie, Aldo Alessandro Mola, y énumère les noms de frères maçons qui furent aussi des partisans fascistes : Giacomo Acerbo, Michele Bianchi, Alessandro Dudan, Italo Balbo, Achille Starace, Giovanni Marinelli et probablement Emilio De Bono (qui se servit du maçon Dùmini pour le crime Matteotti), Cesare Rossi, Edmondo Rossoni, Roberto Farinacci, peut-être Dino Grandi (Vannoni en est certain, comme pour De Bono, Cesare Maria De Vecchi et Giuseppe Bottai), Massimo Rocca, Alberto Beneduce et alibi aliorum plurimorum. Tous ceux-ci restèrent – en sommeil – aux sommets du nouveau régime, pour ensuite choisir qui la chute du Benito Mussolini avec des dignitaires fascistes parmi lesquels : Emilio De Bono, Italo Balbo, Michele Bianchi, Cesare Maria De Vecchi et Achille Starace Duce, en 1943 (comme Grandi, De Bono, Marinelli, De Vecchi), qui l’aventure de la RSI, comme Farinacci. Et ne parlons pas des militaires… Parmi les syndicalistes révolutionnaires et les fiumani de D’Annunzio (y compris le Vate), les francs-maçons qui préparèrent soit le Fascisme soit l’antifascisme (tel Alceste De Ambris) furent très nombreux, ainsi que parmi les futuristes (dont le maçon théosophe pythagoricien Arturo Reghini, appartenant à l’O.T.O., ne fut pas le dernier). L’autodissolution des Loges maçonniques n’impliqua pas les clubs services, comme le Rotary, ni les Sociétés Théosophiques (jusqu’en 1939), ni l’Anthroposophie (jusqu’en 1941). La lutte contre la Maçonnerie fut donc superficielle, sans remonter aux principes, et ce, même dans le cas de l’ex-prêtre Giovanni Preziosi – le plus hostile à la Maçonnerie – qui faisait cependant collaborer à sa revue Vita italiana les ésotéristes René Guénon, Julius Evola, Massimo Scaligero (alias Antonio Massimo Sgabelloni, anthroposophe, disciple de Giovanni Colazza, qui fréquentait la même Loge théosophique qu’Amendola et Colonna di Cesarò) et Guido De Giorgio. L’antimaçonnisme de Preziosi ne peut donc être confondu avec celui des catholiques intégraux, comme Mgr Benigni, qui s’opposa toujours à tout type de secte et d’ésoté risme. En guise de conclusion Avec ce petit article, je n’entends certes pas rejoindre les geôliers d’Ezra Pound… Je considère cependant – comme il est dit au début – que le catholique militant ne doit pas se laisser entraîner par de dangereux syncrétismes doctrinaux. Il y en a qui pensent que les “libres penseurs” de Casa Pound (auxquels peut-être, comme disait le franc-maçon Reghini des autres maçons, il manque d’être libres et d’être penseurs) se glorifient abusivement du nom de Pound ; peut-être, au contraire, ne sont-ce pas eux qui se trompent sur ce point, mais les catholiques poundiens ! En matière sociale (et Pound n’aurait pas émis d’objection) une bonne formation de base peut se trouver dans les encycliques pontificales, comme – entre autres – Rerum novarum de Léon XIII et Quadragesimo anno de Pie XI ; pour qui en a les capacités et veut 37 avoir une formation plus approfondie, l’Église indique la voie de saint Thomas : Ite ad Thomam. Gardons-nous au contraire des maîtres à penser qui se sont abreuvés aux sources enchanteresses du monde trouble des sectes initiatiques (qu’elles soient anglo-saxonnes – comme dans le cas présent – ou indigènes). Gurdjieff et Orage Nouvelles du Grand Orient (et des alentours) Par le Père Torquemada Amendola et Napolitano I ntéressantes généalogies, du Risorgimento à nos jours, à travers les colonnes des Temples maçonniques. Le livre d’Alfredo Capone sur Giovanni Amendola (18821926) (Salerno editrice), n’est pas passé inaperçu, ne serait-ce du fait que sa présentation est due à l’illustre plume de l’ancien président de la République italienne, Giorgio Napolitano. Napolitano est lié à Amendola non seulement par le fait que Giorgio Amendola (1907-1980), fils de Giovanni, ait été son maître dans les rangs du Parti Communiste, mais aussi du fait que Napolitano aussi, comme Giorgio Amendola, eut un père libéral initié à la Maçonnerie. Voici ce qu’écrivent à ce propos Luigi Pruneti et Aldo Alessandro Mola, sur la page internet de Pruneti : “Le père de Giorgio Napolitano fut-il franc-maçon ?” Telle est l’interrogation soulevée en marge du récent livre de Ferruccio Pinotti et Stefano Santachiara, I panni sporchi della sinistra [Le linge sale de la gauche] (Chiarelettere), qui a ranimé les ragots sur la présumée initiation maçonnique du président de la République. Quelqu’un ajoute que, s’il ne ressort d’aucun document que Giorgio Napolitano ait été “frère”, son père, Giovanni, le fut de manière certaine, mais ne précise pas quand et comment. Le Professeur Luigi Pruneti, Grand maître de la Grande Loge d’Italie, en a parlé avec le Professeur Aldo A. Mola, directeur Intéressantes généalogies, du Ri sor gi m ent o à nos jour s, à t r a v e r s l e s c ol on n e s d e s Temples maçonniques. du Centre pour l’histoire de la Maçonnerie. De leur entretien émerge ce qui suit. “Le père de Giorgio Napolitano, Giovanni, né le 17 février 1883, fut initié maçon dans la loge “Giovanni Bovio” de Naples le 20 juin 1911, à l’obédience du Grand Orient d’Italie (matricule 36.019). “En plus d’avocat, Giovanni Napolitano (1883-1955) fut un poète réputé et un essayiste apprécié. La chose ne doit pas du tout étonner. Le père de Giorgio Amendola, Giovanni, fut lui aussi maçon actif et cotisant, bien qu’avec des phases alternées : avec une plus grande assiduité dans les moments de la persécution totalitaire”. “Il faut ajouter que dans l’Appendice a Malaparte. Vite e leggende di Maurizio Serra (Ed. Marsilio, Premio Acqui Storia 2013), Giorgio Napolitano rappelle ses rencontres dans sa jeunesse à Capri avec Curzio Malaparte, “un communiste presque déclaré”. Tout de suite après le débarquement à Naples (27 mars 1944) – rappelle Napolitano – Palmiro Togliatti “se précipita pour aller le trouver”. Peu savent que Kurt Suckert lui aussi (“Malaparte”, précisément) fut initié à la Grande Loge d’Italie après la victoire du Listone fasciste aux élections du 6 avril 1924 et quelques jours avant l’assassinat de Giacomo Matteotti. Il entra le 28 mai 1924 à la loge “Nazionale”, directement à l’obédience du grand maître Raoul Palermi (correspon- 38 Giorgio Amendola et Giorgio Napolitano dant à la fameuse loge “Propagande maçonnique” du Grand Orient). “La documentation – concluent Pruneti et Mola – démontre qu’une grande partie de notre histoire s’est écoulée aussi entre les colonnes des temples, où tant d’Italiens de valeur se sont formés aux principes de la liberté et de la tolérance”. Rome, 21 novembre 2013”. Le lecteur me pardonnera la longue mais documentée citation ; et que le lecteur note que, tant Napolitano qu’Amendola (les fils, non les pères) appartinrent, au sein du PCI, à ce courant, dit “miglioriste”, qui se rapproche le plus de la tradition laïque libérale ou sociale-démocrate (malgré la responsabilité de Amendola dans l’attentat de la Via Rasella) et qui conduisit à la fin du PCI. Revenant à Giovanni Amendola, lui aussi napolitain comme les Napolitano, il était le fils de Pietro Amendola, avec un passé garibaldien, et d’Adelaide Aglietta, de famille mazzinienne : digne héritier, donc, de la tradition du Risorgimento. À quinze ans seulement il adhéra au socialisme, et ensuite le directeur du quotidien radical La Capitale, Edoardo Arbib (18401906, garibaldien, sénateur, israélite et franc-maçon), “vieux camarade et ami de son père” (Michele Magno, Il Foglio, 21 décembre 2013, p. IV) l’initia à la Société Théosophique, fondée en 1875 par Helena Petrovna Blavatsky (qui fut à Mentana avec Garibaldi). Dans la Loge romaine de la Société Théosophique, Amendola fréquenta des ésotéristes, hindouistes, spiritistes, sous la conduite d’Isabel Cooper Oakley, qui succéda à la théosophe féministe Annie Besant ; parmi ses amis la Baronne Emmelina Sonnino De Renzis, sœur de Sidney Sonnino et disciple de Rudolf Steiner. Amendola fréquenta la Société Théosophique capitoline de 1900 à 1905, mais sa rupture avec les Théosophes ne comporta pas la rupture avec le monde ésotérique, puisque la même année il fut initié à la Maçonnerie du Palazzo Giustiniani à l’Orient de Rome (Loge Giandomenico Romagnosi). Pendant ce temps, il avait connu dans les milieux théosophiques la toltstoïenne végétarienne Eva Kuhn, qu’il épousa dans le rite Vaudois en 1906. Protestantisme, Maçonnerie, Occultisme, Socialisme : tout se tient. Et, pour confirmer les pulsions religieuses mais hétérodoxes d’Amendola, voilà son adhésion au modernisme, avec la collaboration au Rinnovamento d’Alessandro Casati. Pour Amendola, le modernisme représentait “la démocratie religieuse (…). La formule récapitulative, Dieu et peuple (de Mazzini) contient en substance la doctrine catholique du modernisme”. L’expérience maçonnique d’Amendola se termina en 1908 par sa “mise en sommeil”. Selon Vittorio Vanni, Amendola poursuivit cependant probablement ses intérêts ésotériques dans le Rite Philosophique Italien d’Arturo Reghini (1878-1946), autrefois compagnon et ensuite adversaire de Julius Evola. La carrière parlementaire d’Amendola, dans le courant libéral, son antifascisme, et sa mort à la suite d’une agression de squadristi, sont connus de tous. À sa mort, il était assisté par son fils Giorgio, Nelia Pavlova, et Ruini : c’est-à-dire Meuccio Ruini, célèbre représentant politique (socialiste, radical, puis dans l’Unione Nazionale d’Amendola, président du Sénat en 1953) et membre insigne de la Maçonnerie italienne (Loge Rienzi de Rome, 5 mai 1901). Silvio Oddi Étant mort le 29 juin 2001, le cardinal Silvio Oddi ne peut se défendre ou donner des explications. Mais, si la lettre publiée (et reproduite aux pp. 507-510) par Giacomo Galeazzi et Ferruccio Pinotti dans leur Vaticano massone (Piemme, Milano, 2013), un mauvais livre de type presse à scandale, est authentique, le cardinal Oddi – s’il était en vie – devrait donner des explications. Il s’agit d’une lettre signée précisément par le cardinal Oddi et par le Grand Maître de la Maçonnerie de l’époque, Virgilio Gaito, et adressée à Jean-Paul II, dans le but d’obtenir la réconciliation entre l’Église et la Franc-Maçonnerie, dont on fait une effron- 39 tée apologie. La lettre, non datée (mais remontant à 1999-2001), qui reprend dans les grandes lignes une précédente missive à Jean-Paul II du seul Gaito (cf. pour les circonstances de la lettre, l’interview de Gaito dans le livre susnommé, pp. 491-492 ; cf. aussi pp. 46-50), pourrait, à première vue, étonner un lecteur ingénu. En effet, le cardinal Oddi est connu pour la sympathie qu’il a démontrée à l’égard de Mgr Lefebvre et de la Fraternité Saint-Pie X (notoirement opposés à la Maçonnerie), comme aux milieux de la TFP et d’Alleanza Cattolica. Mais la sympathie du cardinal Oddi pour la Maçonnerie étonne moins, si l’on se souvient du passé du prélat de Plaisance. Il fut en effet secrétaire de Mgr Roncalli à la nonciature de Paris de 1946 à 1949. Nous avons déjà eu l’occasion de parler des fréquentations maçonniques du nonce Roncalli avec le baron Marsaudon, franc-maçon “catholique” de l’Ordre de Malte (cf. Sodalitium nn° 27, 28, 42, 62), fréquentations confirmées, approuvées et défendues par l’autre secrétaire de nonciature de Roncalli, de 1947 à 1951, Mgr Bruno Heim (19112003) (cf. Il confronto tra Mons. Heim e il dott. C. A. Agnoli sur Controrivoluzione, nn° 67-68, juillet 2000, pp. 28-28). Mgr Heim lui aussi, proche de la famille royale anglaise et passionné d’héraldique, pourrait être pris pour un prélat “conservateur”, ce qu’était certainement aussi le cardinal Oddi, proche de l’Opus Dei et, politiquement, de Silvio Berlusconi. Tant Oddi que Heim restèrent toujours très liés à leur ancien Nonce Roncalli : ce fut le cardinal Roncalli qui consacra Oddi évêque en 1953, avec le titre de Mesembria, qui avait déjà appartenu à Roncalli et qui, après Oddi, passera au secrétaire de Jean XXIII, Loris Capovilla. Le cardinal Silvio Oddi (à droite) Dommage que le cardinal Oddi ne soit plus, et ne puisse raconter plus de détails sur le climat qui se respirait à la nonciature de Paris à l’époque du nouveau “saint” conciliaire, Angelo Giuseppe Roncalli… Parmi les catholiques Ecclesia Dei Messe “en rite extraordinaire” et communion avec l’“Ordinaire” du lieu : c’est la recette des catholiques Ecclesia Dei ou Summorum Pontificum . Dans ce milieu aussi, les infiltrations ésotériques ne manquent pas. Au Centre Saint-Paul de Paris, par exemple, dirigé par un prêtre du Bon Pasteur, une certaine Valérie Maillot a tenu, le 7 et le 8 mars 2014, des cours (payants) d’“Initiation à l’Ennéagramme”. Ce fut l’ésotériste Pyotr Uspenskij (cf. l’article sur Ezra Pound dans ce numéro) qui divulgua les méthodes de l’Ennéagramme dans son Fragments d’un enseignement inconnu, dans le sillage de son maître, Georges Gurdjieff (1872-1949). En italien, ce sont les éditions maçonniques Atanòr qui ont publié Études sur l’Ennéagramme de J. Bennet. Dans le milieu chrétien, durant la crise des années 60, des jésuites américains commencent à répandre l’Ennéagramme, altérant ainsi la vie spirituelle des catholiques. Valérie Maillot – par exemple – répand la pratique de l’Ennéagramme dans les communautés religieuses contemplatives. Sur le site de V. Maillot, un article du père jésuite Badenhauser essaye de justifier la pratique de l’Ennéagramme malgré son origine ésotérique (Gurdjieff, Uspenskij) et ses origines chaldéennes, pythagoriciennes, néoplatoniciennes, cabalistes revendiquées (autrement dit, pour qui connaît un peu ces choses, tout le ‘monde’ des ésotéristes et des francs-maçons). Dans l’église de la Miséricorde de Turin, où est célébré le “rite extraordinaire”, l’Archiconfrérie de la Miséricorde et l’ARS ont collaboré, en 2013, à une série de rencontres sur le thème la Femme et le Sacré, qui se sont conclues par un concert le 1er octobre dans l’église de l’Archiconfrérie. Musique et récitation ont présenté au public tant des textes d’auteurs catholiques, comme sainte Thérèse d’Avila et sainte Hildegarde, que d’hérétiques comme Marguerite Porete, ou de Simone Weil, ou encore de la tradition non chrétienne (soufis- 40 Franco Cardini me, bouddhisme tibétain, taoïsme). ARS pour Associazione Ricerche Spirituali de Turin. Le Président de l’Association est Maurizio Barracano, que nous ne sommes pas surpris de trouver comme orateur apprécié au premier Congrès National d’Études d’Alchimie qui s’est tenu le 25 octobre 2008 au château de Pavone (Ivrée) à l’initiative du Grand Orient d’Italie (cf. Erasmo, revue du Grand Orient d’Italie, n° 1920, 15-30 novembre 2008, p. 5). Grande nouvelle : Franco Cardini est un profane ! Pas possible ! Le Professeur Franco Cardini, à ce qu’il paraît, est un profane. C’est le site officiel du Grand Orient d’Italie dans le communiqué suivant du 8 octobre 2013 intitulé “La distinction ‘Galileo Galilei’ à Franco Cardini” qui nous donne l’inattendue nouvelle : “Le Grand Maître, Gustavo Raffi, a accordé la ‘Galileo Galilei’ au professeur Franco Cardini. La remise de la prestigieuse distinction a eu lieu à la fin de la présentation du livre ‘Metamorfosi del Graal’, de Francesco Zambon, qui s’est tenue à Rome le 7 octobre au Théâtre ‘il Vascello’, organisée par le Servizio Biblioteca du Grand Orient”. Voici la motivation de la reconnaissance accordée à l’historien, et qu’il a acceptée, en assistant à la cérémonie : “La mémoire est racine pour vivre le présent et construire le futur. Franco Cardini a créé des ponts à la rencontre des différences, en faisant connaître par des études approfondies l’histoire profonde de ces Cathédrales de pierre et de sagesse qui au Moyen Âge virent l’Homme lutter à la recherche de sens. Académicien international et maître à penser pour de nombreux jeunes étudiants, il a fait découvrir l’actualité du Moyen Âge, l’esprit des Chevaliers, le rêve des Templiers d’une paix religieuse entre Orient et Occident, Christianisme et Islam. C’est pourquoi rien n’est plus proche de no tre sensibilité d’aujourd’hui que l’esprit médiéval. Le Grand Orient d’Italie est honoré de le désigner comme exemple d’homme d’études rigoureux et de vérité historique. Passion et raison font de Cardini un interprète authentique du Moyen Âge, une référence sûre pour toute conscience qui veut construire sur la culture et le dialogue pour abattre les murs de l’intolérance et de la haine. Pour nous un compagnon de voyage qui se relie à la chaîne des hommes du doute pour construire encore des rencontres et faire place à la paix”. La distinction ‘Galileo Galilei’ a été instituée en 1995 par le Grand Orient d’Italie, comme reconnaissance pour les non francsmaçons qui se sont distingués par leur engagement dans la recherche du vrai et du juste, dans l’exécution et dans la défense des principes et des idéaux maçonniques, dans la recherche des valeurs tendant à la réalisation d’une Humanité meilleure et dépourvue de préjugés”. Elle se distingue en deux classes : Soleil et Lune. Parmi les personnalités qui ont été décorées de la distinction, on trouve Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, Tenzin Gyatso – XIVème dalaï lama – et Nelson Mandela, Salvatore Accardo et Aldo Masullo”. Il semble donc établi que le Professeur Cardini n’est pas maçon, mais qu’il est seulement un “compagnon de voyage” des maçons “qui se lie à la chaîne des hommes du doute” “dans la réalisation et dans la défense des principes et des idéaux maçonniques”. En particulier, le professeur Cardini semble être “compagnon de voyage” de la famille Raffi (l’ex-Grand Maître de la Maçonnerie, qui a remis le prix Galileo à Cardini). Franco Cardini a en effet écrit la préface de l’ouvrage “Apologia dei Cavalieri Templari” (ed. Mursia, mais aussi Il Cerchio) du fils du Grand Maître, Michele Raffi, malheureusement mort suicidé en 2013. Les bénéfices du livre sont destinés aux Asiles de Nuit – œuvre de bienfaisance gérée par la Franc-Maçonnerie italienne. 41 Art et Foi Le Pressoir Mystique et le Précieux Sang de Jésus Par l’abbé Ugolino Giugni D Manuel Valls (à la synagogue) P.S. : répondant de manière polémique à Gnocchi et Palmaro (Questo Papa non ci piace), Cardini a écrit dans le quotidien Europa (18 octobre 2013) un article intitulé Io sto con Bergoglio, Monsieur Tartuffe no. Que Cardini soit avec Bergoglio, qui peut s’en étonner ? Mais le dilemme est mal posé : on ne doit pas se demander si le Pape nous plaît ou ne nous plaît pas, mais si Bergoglio peut être Pape ou non. La République du Grand Orient C’est ainsi que Henri Coston appelait la “Troisième République” française : la “République du Grand Orient”, tant État, gouvernement et Maçonnerie étaient inséparablement liés. On peut dire la même chose des Républiques successives, jusqu’à l’actuelle. À ce propos, nous recommandons le livre d’Émmanuel Ratier, Le vrai visage de Manuel Valls (éditions Facta, 2014) dédié à l’irrésistible ascension de Manuel Valls, actuel chef du gouvernement français, initié en 1989 au Grand Orient de France par Jean-Pierre Antebi, entre autres trésorier de la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) dans une Loge au nom significatif : ni maîtres, ni dieux. Ses parrains politiques : Stéphane Fouks, du Crif, et Alain Bauer, ex-grand Maître du Grand Orient de France. Pour compléter le tableau, voir l’incroyable (ou que trop croyable) déclaration du Président Hollande : “Si – comme c’est mon cas – l’on croit dans la République, à un moment il faut passer par la Franc-Maçonnerie” ; vidéo à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch?v=gSGNEf84bM ans cet article, je voudrais expliquer le sens du tableau “le Pressoir Mystique”, que vous trouvez sur la couverture de ce numéro de Sodalitium. L’art fait partie de la culture des peuples et la peinture classique a souvent été inspirée par la foi, et la foi, à son tour, a trouvé son expression et sa représentation en images dans les tableaux que nous trouvons dans nos églises. Le retable d’autel de Mainardi, dit le Chiaveghino, se trouve dans l’église de S. Agostino à Crémone au fond de l’abside mais dans l’iconographie catholique on en trouve beaucoup d’autres en différents lieux. Dans le livre d’Isaïe (63, 3) on lit ces paroles : “Torcular calcavi solus. Et aspersus est sanguis eorum super vestimenta mea”. (J’ai foulé le pressoir tout seul et d’entre les nations il n’y a pas un homme avec moi ; je les ai foulés aux pieds dans ma fureur, et je les ai foulés aux pieds dans ma colère ; leur sang s’est répandu sur mes vêtements, il a souillé tous mes habits). Quelle est la signification de ces paroles et à qui s’appliquent-elles ? On sait que dans la Sainte Écriture se trouvent de nombreux symboles et de nombreuses significations ; il existe aussi un sens allégorique dit “typique” qui indique la réalité qui doit venir ; c’est pourquoi Cet article a pour but d’expliquer le sens du tableau “Le Pr e s soi r Myst i qu e ” qu i s e trouve sur la couverture de ce numéro de Sodalitium . Voyons comment les paroles du verse t d’Isaï e s’appl i qu en t à Jé sus-Chr i st de m an iè r e évidente. 42 l’Ancien Testament est souvent une figure du Nouveau et annonce l’accomplissement parfait des prophéties dans le Christ NotreSeigneur. Les paroles du verset d’Isaïe s’appliquent à Jésus-Christ de manière évidente, mais voyons comment. Dans ce chapitre, Isaïe décrit l’œuvre accomplie par Jahvé contre Édom, c’est-à-dire contre ses ennemis, pour faire ressortir aux croyants l’œuvre du salut. Dans les deux premiers versets (Quel est celui qui vient d’Édom, de Bosra les vêtements teints ? Il est beau dans sa robe, il marche dans la grandeur de sa puissance. “C’est moi qui parle avec justice et qui viens pour défendre et pour sauver”. Pourquoi donc rouge est votre robe, et vos vêtements comme les vêtements de ceux qui foulent dans un pressoir ?), se déroule un dialogue entre le prophète et un guerrier qui rentre victorieux du combat : ce héros est le Messie qui, pour apporter le salut, abattit ses ennemis, le mystérieux guerrier et vainqueur prend lui-même la parole et décrit sa propre nature. Il parle (c’est le Verbe de Dieu) avec justice (le Christ est juge) et Il vient pour défendre et sauver, c’est-à-dire pour procurer le salut après avoir rétabli la justice de la victoire sur ses ennemis. On comprend clairement qu’il s’agit ici du serviteur de Jahvé (c’est-à-dire le Messie qui est le Christ). Dans le verset 4 il est question du “jour de la vengeance, et de l’année de rédemption” pour signifier que le temps de la vengeance (contre les ennemis) est d’un jour alors que le temps de la miséricorde de Dieu, de la grâce et de Ansbach (Allemagne), église de Saint Gumbert : Marie Corédemptrice et le Pressoir Mystique (École de Dührer) la rédemption est d’une année, donc bien plus long que le châtiment. Nous arrivons ainsi au verset qui nous intéresse le plus, le verset 3, auquel nous pouvons donner plusieurs sens. Sens littéral : le guerrier répond en utilisant l’image qui lui est suggérée par son interlocuteur, le prophète : le foulage du raisin dans le pressoir ; elle correspond à la “moisson”, c’est-à-dire au jugement de Dieu. La vendange était abondante et il était seul à fouler dans la cuve, c’est pourquoi ses vêtements sont ainsi maculés de rouge. Le Messie se suffit à Lui-même pour se venger de ses ennemis, il a accompli seul l’œuvre de la rédemption, aucune nation n’est venue à son aide, son unique aide était dans le Seigneur. Sens allégorique : c’est l’interprétation chrétienne qui est donnée à ce passage. Dans ce sens, selon saint Augustin, on parle de la Passion du Christ dans laquelle son Sang a été aspergé sur son vêtement, c’est-àdire sa chair. C’est ainsi que s’applique au Seigneur le passage de la Genèse (49, 11) il lavera dans le vin sa robe, et dans le sang du raisin son manteau, qui est un sens indirect adapté à ce passage. La Passion fut le pressoir du Christ, dans laquelle a été répandu son Sang et, de la même manière, les démons ont été écrasés et foulés aux pieds par Lui dans le pressoir. Le Christ en effet par son Sang remporta la victoire, il a répandu le sang de ses ennemis (1), par sa mort il a tué ses ennemis et par ses blessures et ses cicatrices, comme trophées, le Christ est entré triomphant au ciel. Saint Grégoire (2), en outre, l’explique ainsi : “le pressoir il l’a foulé seul, parce qu’il foula seul le pressoir dans lequel il est foulé, puisque par sa puissance il accomplit sa Passion, il vainquit et il ressuscita de la mort avec gloire”. C’est ce que veut signifier saint Jean, quand dans l’Apocalypse il dit : il était vêtu d’une robe teinte de sang (Apoc. 19). La robe du Christ est son humanité ensanglantée par les Juifs avec laquelle il entre au ciel ; où maintenant aussi elle est rougie par les blessures des cicatrices qui y demeurent ; cela signifie que le Christ en montant au ciel porte avec Lui les signes et la mémoire de son Sang et de celui de ses martyrs, injustement répandu par les impies, Sang qui appelle la vengeance. Sens accomodatice : c’est celui qui est représenté dans les peintures du Pressoir Mys- 43 tique du bas Moyen Âge. En effet, le Pressoir Mystique (torculus Christi) figure et représente le Seigneur Jésus dans la cuve du raisin dans lequel Il fut pressé : sa Croix est devenue la presse ou la vis du pressoir, et son Sang Précieux qui sort des blessures et coule dans un récipient comme dans un calice, c’est le vin eucharistique. Dans certaines représentations, c’est Dieu le Père Lui-même qui tourne la vis du Pressoir, signifiant ainsi que c’est le Père qui nous a donné son Fils pour nous racheter et qui l’envoie à sa Passion. Tout cela a pour but de montrer de manière synthétique par une représentation douloureuse l’ensemble des souffrances du Christ. Le Pressoir Mystique tire ses origines en général de la thématique de la Vigne et du raisin qui se trouve dans plusieurs passages, tant dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament comme Moi je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron (Jn 15, 1) ou encore dans la parabole des vignerons homicides (Matth. 21, 33-41), repris et commentés amplement par les Pères de l’Église. Textes des Pères en référence au Pressoir Mystique • Au IVème siècle, l’évêque Astérios d’Amasée, dans ses homélies comparait l’autel au pressoir prêt pour le foulage : “La vigne a été vendangée et l’autel, comme un pressoir, a été rempli de grappes”. • Saint Augustin : commentant le Psaume 55, écrivit : “La première grappe de raisin écrasée dans le pressoir est le Christ. Quand cette grappe fut pressée dans la Passion, il en a jailli ce vin dont le calice est autant enivrant qu’excellent !” (3). Dans le beau commentaire du Psaume 80, saint Augustin voit tout le psaume comme la figure d’un pressoir ; dans le commentaire du Psaume 83 il dit ensuite : “Celui qui se consacre au service de Dieu doit savoir qu’il est entré dans le pressoir. Il sera broyé, écrasé, pressé. Non pour qu’il doive mourir physiquement, mais pour qu’il s’écoule dans les citernes divines” (4). • Saint Maxime de Turin (au Vème siècle) écrivit dans ses homélies que “La grappe suspendue au pieu est le Christ suspendu à la croix”. • Saint Alphonse de Liguori, citant saint Grégoire le Grand (voir ci-dessus) traduisit et commenta ainsi ce passage : “Il dit calca- vit, parce que Jésus-Christ par sa Passion vainquit les démons ; il dit ensuite calcatus est, parce que dans la Passion son corps fut broyé et brisé, comme sont broyés les raisins sous le pressoir”. • Saint Pierre Damien (XIème siècle) s’adressa à la très Sainte Vierge en disant : “De toi est sortie la grappe qui devait être pressée sous le pressoir de la croix”. • Saint Bonaventure (XIIIème siècle) dit : “Le Christ crucifié, comme une grappe écrasée dans le pressoir, a extrait par les blessures de son corps fleuri ce suc parfumé qui peut guérir toute maladie”. Le Pressoir Mystique dans l’art «Le Pressoir Mystique s’inséra dans la tradition médiévale de la peinture comme un moyen efficace pour la catéchèse, dont il devint l’une des expressions les plus exacerbées : Pour mieux exprimer l’horreur de la Passion, et pour bien faire comprendre que Jésus a versé son Sang jusqu’à la dernière goutte, ils le mettent sous la vis d’un pressoir, le Sang jaillit comme le suc du raisin et coule dans la cuve. L’ancêtre figuratif des pressoirs mystiques est une miniature de l’Hortus Deliciarum, qui représente (en commentaire de la Parabole des vignerons homicides) le Christ fouleur : le vin coule du pressoir et l’Église, personnalisée par le pape et par des prêtres et des moines, porte le raisin. À partir du XIVème siècle, Jésus devint la victime du foulage, et les images le représentèrent souvent entouré par d’autres personnages, souvent par des anges et des personnages bibliques, parfois avec des Pères ou des Saints locaux, parfois aussi avec le commanditaire de l’œuvre. Le très fort réalisme de la scène uni au symbolisme eucharistique résume en luimême les principaux éléments de la spiritualité du temps, en particulier la spiritualité augustinienne ; au XVème siècle ensuite, la dévotion aux reliques du Précieux Sang s’étendit des Flandres à toute l’Europe (spécialement du nord) et plusieurs confréries dédiées à ce culte naquirent. On reproduisit des Pressoirs Mystiques sur des fresques, des tableaux, des vitraux : ceux exécutés en France à l’époque des rois Louis XII et François Ier sont célèbres et très précieux, tel le vitrail de l’église de Sain- 44 te-Foy à Conches-en-Ouche (Eure), ou dans l’église parisienne de Saint-Étienne-duMont ; nous trouvons aussi une description du Pressoir Mystique sur les vitraux des églises dans la biographie du peintre et maître verrier Roberto Pinagrier, qui vécut entre la fin du Quattrocento et le XVIème siècle. La disposition des personnages était très variée, et souvent étaient présents des cartouches reproduisant en latin les références scripturaires, habituellement Torcular calcavi solus (Isaïe 63) ou Ego sum vitis vera (Jn 15, 1). Le Pressoir Mystique connut un grand succès dans l’Europe du XVIème siècle : en général, il possédait un langage iconographique très fort, apprécié selon le goût de l’époque ; en particulier, en pleine période de la Contre-Réforme il était une expression très efficace de l’Eucharistie et de la transsubstantiation» (5). Le Précieux Sang de Jésus Le Seigneur a versé son Sang pour nous racheter comme on lit dans le verset de l’Apocalypse : Redemisti nos Domine in sanguine tuo (Apoc. 5, 9), et dès l’aube du Christianisme la vertu salvifique du Précieux Sang de Jésus a été exaltée par la littérature et la dévotion catholique, jusqu’à attribuer à ce Sang un culte qui lui soit propre, puisqu’il est uni à la Divinité en la Personne du Christ. Cette dévotion est donc une conséquence naturelle de la dévotion à l’humanité du Christ. Parmi les propagateurs de cette dévotion, nous pouvons citer saint Bernard de Clairvaux, saint Bonaventure, sainte Gertrude la Grande et surtout, plus près de nous, saint Gaspard del Bufalo avec sa congrégation. Il est certain que les représentations du Pressoir Mystique contribuèrent à la diffusion du culte du Précieux Sang et en constituèrent l’expression, avec les anges recueillant le sang qui jaillit du côté, des mains et des pieds de Jésus Crucifié, ou des fons salutis dont jaillissent les sacrements. La légende médiévale du saint Graal dans le sens chrétien contribua à cette diffusion du culte du Précieux Sang de Jésus. En 1263 eut lieu le miracle eucharistique de Bolsena, quand de l’Hostie consacrée jaillit le Sang de Jésus qui imprégna le corporal ; ce miracle donna une place toujours plus importante au Précieux Sang et fut aussi à l’origine de l’office de la Fête-Dieu, composé par saint Thomas d’Aquin. Marco dal Pino : Pressoir Mystique et le Christ en gloire (Pinacothèque vaticane) On trouve des reliques insignes qui donnèrent lieu à des fêtes liturgiques dédiées au Précieux Sang à Mantoue, à Venise, à Bruges (Belgique) et à Fécamp (France, SeineMaritime). La première concession d’une fête propre date de 1582 au diocèse de Valence en Espagne, et par la suite les concessions se multiplièrent dans tout le monde catholique. À Rome, la dévotion était pratiquée dans la basilique de San Nicola in Carcere, où résidait la confrérie du “Précieux Sang” instituée au XVIIIème siècle. Comme nous l’avons déjà dit, l’apôtre le plus zélé et le propagateur de cette dévotion fut certainement saint Gaspard del Bufalo, qui, dans les trente premières années du XIXème siècle, obtint de pouvoir la célébrer dans les maisons de sa congrégation le premier dimanche de juillet. Le Pape Pie IX, exilé à Gaète, sur la suggestion du supérieur des Missionnaires du Précieux-Sang (la congrégation de saint Gaspard), fit le vœu d’étendre la fête à toute l’Église s’il pouvait rentrer à Rome ; il fut exaucé et par le décret Redempti sumus du 10 août 1849 il établit la fête au premier dimanche de juillet avec rite double de seconde classe pour toute l’Église. Saint Pie X la fixa au 1er juillet et Pie XI l’éleva au rite de 1ère classe. Le Sang de Jésus dans l’Évangile Je voudrais terminer ce petit article par quelques textes du Nouveau Testament (par conséquent des textes révélés) où il est 45 fait référence de manière directe au Sang du Seigneur Jésus versé pour notre salut, afin d’exciter notre amour envers Jésus et d’accroître notre respect et notre dévotion pour son Précieux Sang. • Sur le Mont des Oliviers : Luc 22, 3944. Et étant sorti, il alla, selon sa coutume, à la montagne des Oliviers ; et ses disciples le suivirent. Lorsqu’il fut arrivé à son lieu accoutumé, il leur dit : “Priez, de peur que vous n’entriez en tentation”. Puis il s’éloigna d’eux à la distance d’un jet de pierre ; et, s’étant mis à genoux, il priait disant : “Mon Père, si vous le voulez, éloignez ce calice de moi ! Cependant que ma volonté ne se fasse pas, mais la vôtre”. Alors lui apparut un ange du ciel, le fortifiant ; et étant tombé en agonie, il priait encore plus. Et il lui vint une sueur, comme des gouttes de sang découlant jusqu’à terre. • Le coup de lance : Jn 19, 31-37. Les Juifs donc (parce que c’était la préparation), afin que les corps ne demeurassent pas en croix le jour du sabbat (car ce jour de sabbat était très solennel), prièrent Pilate qu’on leur rompît les jambes et qu’on les enlevât. Les soldats vinrent donc, et ils rompirent les jambes du premier, puis du second qui avait été crucifié avec lui. Mais lorsqu’ils vinrent à Jésus, et qu’ils le virent déjà mort, ils ne lui rompirent point les jambes ; seulement un des soldats ouvrit son côté avec une lance, et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau. Et celui qui l’a vu en a rendu témoignage, et son témoignage est vrai. Et il sait qu’il dit vrai, afin que vous aussi croyiez aussi. Car ces choses ont été faites, afin que s’accomplît l’Écriture : Vous n’en briserez aucun os. Et dans un autre endroit, l’Écriture dit encore : Ils porteront leurs regards sur celui qu’ils ont transpercé. • Épître de saint Jean : I Jn 5, 6. C’est celui qui est venu avec l’eau et le sang, JésusChrist ; non pas avec l’eau seulement, mais avec l’eau et le sang. Bibliographie • http://it.cathopedia.org/wiki/Torchio_mistico • Cornélius a Lapide, Commentaria in Scripturam Sacram, tomus undecimus in Isaiam prophetam, col 732. • La Sacra Bibbia commentata da P. M. Sales e G. Girotti o.p., Il libro di Isaia, Lice Torino 1942. • Enciclopedia Cattolica, Città del Vaticano 1953. Notes 1) Il en a répandu le sang ou il a frappé les peuples non dans le sens physique puisque le démon n’a pas un vrai sang que le Christ aurait pu répandre, mais dans le sens où, comme dans les victoires des hommes, il y a beaucoup d’effusion de sang ; ainsi de la même manière Isaïe voulut y faire allusion en s’adressant aux juifs charnels qui attendaient, et attendent, un Messie temporel comme David puissant et belliqueux qui propageait son royaume par l’effusion du sang de ses ennemis (Cornélius a Lapide). 2) Homil. 13 in Ezech. lib. 2, hom. 1, n. 9. ML 76-942. 3) Exposition sur le Psaume 55, cap. 4. 4) Exposition sur le Psaume 83, cap. 1. 5) http://it.cathopedia.org/wiki/Torchio_mistico Un imposteur I l nous a été signalé qu’un inconnu (de nous tout au moins) prétend avoir reçu la consécration épiscopale de Mgr Geert Stuyver, de l’Institut ‘Mater Boni Consilii’. Il s’agit d’un imposteur. Mgr Stuyver, en effet, a jusqu’à présent conféré à plusieurs reprises le sacerdoce, mais n’a jamais conféré à quiconque la consécration épiscopale. Cet épisode, qui en lui-même ne mériterait pas grande importance (sinon pour le caractère calomnieux de la fausse information, et pour les conséquences sacrilèges d’une consécration qui n’a jamais eu lieu) nous donne l’occasion de dire quelques mots sur le phénomène des consécrations et des ordinations illicites (ou invalides) dans le monde dit des ‘évêques vagants’ et des ‘petites églises’, et de mettre en garde les esprits contre ce danger. Tout le monde sait que depuis septembre 1986, notre Institut a fait sienne la Thèse théologique du théologien dominicain M.-L. Guérard des Lauriers, tant pour ce qui concerne la situation actuelle de l’autorité dans l’Église (vacance formelle du Siège Apostolique), que pour ce qui concerne la licéité des consécrations épiscopales – bien que sans le nécessaire mandat romain – dans la situation d’extrême nécessité dans laquelle la vacance formelle du Siège Apostolique et la réforme liturgique (du missel, 46 du rituel et du pontifical romain) place l’Église et les âmes. Toutefois, cela ne signifie pas que la gravité de la situation et l’absence de l’Autorité rendent tout licite, et que l’on puisse administrer les sacrements, et avant tout les Ordres Sacrés, de manière injustifiée, et souvent même schismatique (*). Dès le commencement, donc, notre Institut a pris pour règle de ne pas accepter dans ses rangs, de ne pas conférer les Ordres Sacrés, et de ne pas permettre la célébration de la Messe et l’administration des sacrements dans ses propres lieux de culte, à ceux qui ont reçu les Ordres dans ces milieux de manière douteuse ou en tout état de cause illicite. Par le présent communiqué, nous invitons les baptisés à se comporter de la même manière, en évitant de recevoir les sacrements de ministres ordonnés de manière douteuse ou illicite, en attendant que – avec le rétablissement d’une légitime Autorité – la situation canonique de ces personnes soit décidée précisément par l’Autorité ecclésiastique. Note *) Plusieurs “évêques vagants” ont reçu directement ou indirectement les Ordres Sacrés d’‘évêques’ appartenant à des ‘églises’ schismatiques, dont nous donnons ici une liste non exhaustive : Église Janséniste de Hollande. Union d’Utrecht Église Vieux-Catholique Église Gallicane Église Catholique Libérale de France Sainte Église Celtique Église Catholique Orthodoxe de France Église Catholique Latine (de Toulouse) Église Catholique Apostolique Palmarienne Église Catholique Apostolique du Brésil Communauté Ecclésiale Catholique de France À cette liste, il faut ajouter les ‘conclavistes’ qui se déclarent “Papes”, et ceux qui se vantent de consécrations qui n’ont jamais eu lieu. Histoire Les Juifs & le Catholicisme N ous publions ici un texte de Mgr Umberto Benigni (1) tiré de “L’histoire sociale de l’Église” et publié en français dans la “Revue Internationale des Sociétés Secrètes” en 1922. Les Dessous politiques du Drame du Calvaire L’Histoire sociale de l’Église prend les Juifs en plein Évangile ; mais les origines du conflit qu’elle expose remontent beaucoup plus haut. Personne ne peut plus ignorer aujourd’hui le plan grandiose de revanche, audacieusement élaboré dès avant JésusChrist par les Princes d’Israël, aussitôt que le sceptre leur parut sortir de Judas, pour leur prompt retour triomphal à Jérusalem. L’immense aventure de la Dispersion, d’abord volontaire, de la part de ce peuple avide et tenace, visait à la conquête du monde par le commerce et l’usure. Mais, en même temps, cet éternel stratagème faisait son œuvre jusque parmi les Juifs de la Diaspora. Quelques-uns, trop favorisés du sort, acclimatés parmi les goïim, se seraient volontiers accommodés, comme nos magnats de la Haute Banque, aujourd’hui, d’une tranquille et croissante domination de leur or sur le monde antique ; d’autres, en général moins bien pourvus, continuaient de nourrir une sorte de fanatisme “sioniste” qui s’est perpétué jusqu’à nos jours. Ceux-là ne voulaient songer qu’au rétablissement du trône de David sur la Terre promise ; et ce sont ces intransigeants qui financèrent, il y a deux mille ans, pour la dernière grande révolte préchrétienne du judaïsme territorial, la farouche réaction des Macchabées contre l’asservissement définitif de leur pays. Quand naquit le Sauveur, l’écrasement local des dernières résistances, le joug inexorable de la domination romaine, la politique des Hérodes, l’affaiblissement ou les déviations des grandes espérances messianiques : tout concourait sans doute à contenir en Judée les ressentiments des Juifs sé- 47 dentaires, leurs instincts d’anarchie et la propagande des riches agitateurs du dehors. Mais les ferments de guerre civile et de soulèvement xénophobe demeuraient virulents, en ce vase clos, sous la main des tétrarques et du Gouverneur. C’est l’explosion de ces haines, de ces dissensions fratricides, de la grande attente tour à tour exploitée et dévoyée par les interprètes les moins fidèles, qui allait aboutir au drame du Calvaire, consommation de tant d’infidélités et début du providentiel châtiment qui, jusqu’à la fin des temps, doit faire éclater à tous les yeux le témoignage à la fois des promesses prodiguées au Peuple élu et de son abdication déicide. Pharisiens, Sadducéens, Esséniens : les trois types, à la rigueur, se retrouveraient de nos jours parmi les Juifs les plus évolués ; et c’est ce qui fait la permanente actualité de ces récits antiques. L’attitude des Juifs à l’égard du Christ, toujours vivant dans les siens, n’a guère varié. Rabbinistes réactionnaires, politiciens libéraux ou bolchéviques, vrais Israélites, prisonniers des pires préjugés de race, qui confondent la Loi avec la Massore : c’est de leur accord foncier, de leurs dissensions superficielles, de la confusion de leurs efforts même les plus convergents, que dépend le salut toujours menacé des Peuples : car leur serment est de nous domestiquer comme un bétail, au compte du Prince qui doit enfin venir pour jeter sous leurs pieds la terre. Nation de prophètes réprouvés et déments, chargés de prêcher naguère au monde l’universalité du vrai Dieu et qui ne songent qu’à monopoliser à leur profit l’empire de Jéhovah sur l’univers. Bien entendu, de ces pages où l’auteur s’est appliqué à dégager du récit évangélique le point de vue de la plus humaine politique, il serait absurde de conclure qu’il n’a vu ou ne veut voir, de la vie du Christ, que le côté le moins surnaturel et le moins spécifiquement théologique. Il fallait bien historiquement et politiquement s’en tenir là, puisque tel était exactement l’objet de l’ouvrage. Mais il y a, certes, autre chose, de plus essentiel et de plus haut, qu’il n’est question ni de méconnaître ni de subordonner à l’aspect particulier d’une Histoire sociale de l’Église. Il ne s’agit pour le moment que des “préparations” naturelles de la péripétie la plus mystérieuse de la “Divine Comédie”. La Vie politique en Judée au temps de Jésus-Christ Après l’écroulement de la puissance des Macchabées (de 178 à 66 avant J.-C.), le sentiment politico-messianique en Israël se trouve définitivement émietté ; mais aussi bien ces divers partis, à les considérer de près, offrentils la gamme diatonique des différences de caractère et de tempérament, que déterminent, en face des intérêts individuels ou des intérêts de classe partout disputés, les circonstances particulières de temps et de climat. La droite conservatrice est représentée par les Pharisiens. Le pharisaïsme était né d’un sentiment religieux. C’était, pour l’israélite, le parti de l’intransigeance, qui ne voulait d’aucune infiltration païenne dans la vie sociale ou individuelle du peuple élu. Mais comme cet exclusivisme religieux coïncidait d’autre part avec les préjugés nationalistes, la direction du mouvement tomba vite aux mains des politiques, grâce à cette évolution naturelle de tout programme d’idées que conçoivent d’abord les enthousiastes et que finissent par exploiter les positifs. Le pharisaïsme, donc, signifie le nationalisme juif, le parti de la revanche, pour la restauration de la dynastie de David. Son affectation de pratiques religieuses extérieures est devenue, à cette époque, un moyen politique de conserver intact et vivace l’esprit mosaïque chez les Hébreux ; tout son puritanisme cérémonial - dont l’Évangile nous offre tant d’exemples - tend à rappeler, à tout instant, à l’Israélite qu’il est un pur parmi les impurs et que, s’il sait se conserver tel, il finira par secouer le joug de l’oppresseur. Mais il apparaît non moins clairement, aux chefs trop habiles du mouvement, qu’il n’y a pas autre chose à faire pour l’instant qu’à maintenir fermement cet état d’esprit, en attendant l’occasion propice pour un soulèvement. Une fois sur cette pente, il devait fatalement arriver et il arriva, en effet, que le pharisaïsme, tout en conservant quelques adeptes honnêtes, comme Gamaliel, chez qui dominait encore la bonne foi, le pharisaïsme, dis-je, pris en bloc, perdit le sens de la sincérité spirituelle et tombât dans l’hypocrisie systématique de tous ceux qui se posent en zélateurs jaloux d’un rite, sans se soucier beaucoup de sa valeur intime. 48 Ainsi apparaît-il au temps de Jésus comme le parti patriotique, puritain et conservateur, pour le maintien des formes religieuses au profit de l’esprit national. Aux yeux de ses adhérents, le Messie ne pouvait être qu’un grand politique ou un grand guerrier, un Judas Macchabée supérieur, pour l’avènement duquel il fallait tenir prêt, c’est-à-dire ethniquement pur, le peuple prédestiné. Tout le cérémonial pharisaïque des purifications, ablutions, etc., auxquels les Pharisiens tenaient si fort, au point de reprocher à Jésus d’en avoir peu tenu compte, - était pour eux comme un dur revêtement ou vernis, dont ils entendaient cuirasser l’Hébreu, de sorte que, même dispersé à travers la Diaspora, dans l’immense empire romain et jusqu’au delà de ses frontières, il ne courût aucun risque de se gentiliser. À tout instant, la Loi défendait au Juif tel ou tel contact ou bien, si elle le lui permettait par nécessité ou par intérêt, l’obligeait sur le champ à un acte de purification, le maintenant ainsi dans un perpétuel sentiment d’hostilité contre l’esprit et les usages des païens. Ces souillures superficielles glissaient sur l’émail ; l’âme hébraïque restait, en-dessous, indemne. Il valait bien la peine de beaucoup sacrifier à pareille fin. Parmi les Pharisiens, unis quant à ce programme fondamental, il était naturel cependant qu’il se produisît des divisions quant à la liberté plus ou moins grande qu’il convenait de laisser aux mouvements spontanés de l’opinion populaire ainsi préparée. Les prudents et les audacieux, les têtes pratiques et les esprits visionnaires ne pouvaient tomber d’accord à ce propos : et nous voyons se multiplier les indices de ces dissensions dans les dernières années de Jérusalem, c’est-à-dire au temps du Christ, puis des apôtres. Les prudents, les timides, les positifs ne pensaient pas que le moment fût venu de secouer le joug de l’étranger. La main de fer de Rome était lourde ; il était à prévoir qu’exciter sa colère, ou simplement ses soupçons, déchaînerait une foudroyante et inexorable vengeance, et par conséquent la catastrophe définitive d’Israël, l’abolition des derniers vestiges de l’indépendance nationale qu’avait respectés le vainqueur. Car celui-ci n’avait coutume de laisser aux peuples soumis que tout juste assez d’autono- mie pour les maintenir moins mécontents et partant plus dociles - sous la domination du Capitole : aussi convenait-il d’éviter, non seulement toute émeute ouverte, mais encore toute agitation susceptible de porter ombrage à ce maître soupçonneux. Comme toujours, les chefs opulents du parti, les grands propriétaires terriens appartenaient à ce clan des prudents ; et c’est eux que nous retrouverons bientôt, condamnant cyniquement le Juste à mort par habileté politique. Les audacieux, - ceux qui, dans la Florence de la Renaissance, se seraient appelés les “enragés”, - étaient d’une opinion toute différente. Leur faction, recrutée surtout dans le bas peuple, entraînée par des meneurs, se soulevait continuellement ; et, chaque fois que s’élevait un agitateur d’un peu d’audace, la révolte éclatait, plus ou moins grave et longue, dans l’espérance de renouer la tradition macchabéenne et de libérer le territoire. Déjà cette surexcitation était extrême, au temps de l’Évangile, bien avant la chute de Jérusalem ; car l’histoire nous a gardé le souvenir de diverses tentatives de ce genre. Gamaliel, parlant des premiers chrétiens, citait l’exemple de Théodat et de Judas le Gaulonite révoltés sous Auguste. Et il est certain que le parti révolutionnaire des zélotes - véritables boxers de l’hébraïsme - fit de continuels progrès durant le dernier demi-siècle ; il finit même par devenir le maître de la situation : c’est lui qui poussera Jérusalem et Israël tout entier à la ruine, en tentant sous Adrien le “coup” désespéré de Bar-Kokhba. Sans doute, il semble étrange qu’après tant de désillusions la masse juive ait poursuivi ce rêve d’une prochaine restauration par la violence ; mais, à bien considérer la situation, on s’aperçoit que le peuple, - curieux mélange, en tout temps, d’aveugle impulsivité et de lucide bon sens, - était également poussé par l’une et par l’autre de ces forces contraires à une fatale illusion ; car il est naturel aux impulsifs de bon sens de tirer de prémisses sensées et sûres, par le fait d’une logique spéciale, des conclusions insensées. Le bon sens et ce discernement naturel, fruit de toute une existence laborieuse passée au milieu des réalités de la vie, avaient fait comprendre confusément au peuple hébraïque que tout était humainement fini pour lui et que, selon les prévi- 49 sions terrestres, rien ne le délivrerait plus de Rome. Mais ce sentiment positif et juste se combinait en son esprit avec le préjugé désormais traditionnel que la rédemption messianique ne pouvait être que politique au sens macchabéen. Il s’ensuivait logiquement que la venue du Messie politique et guerrier ne pouvait plus tarder, puisque, dans ce naufrage de toute humaine espérance, seule pouvait intervenir l’action divine. D’où l’attente de l’imminent Sauveur, générale au temps du Christ. Mais la masse fanatique attendait la Guerre sainte ; elle espérait un madhi plutôt qu’un docteur. Et, comme il advient toujours en pareil cas, le phénomène économique des lourdes taxes imposées par les Romains achevait d’exaspérer la foule : car ce fut la source de fréquentes révoltes (il suffit de feuilleter Tacite pour s’en convaincre) qui éclatèrent ici et là dans ce vaste Empire. D’où la question brûlante : “Est-il permis, oui ou non, de payer le tribut à César ?” À cette demande, Judas le Gaulonite et les autres répondaient “non”, et c’est pourquoi ils se firent suivre de tant de fanatiques, prêts à marcher avec eux à la mort ; c’est pourquoi les ennemis du Christ tentèrent de lui créer à ce sujet des embarras, ou bien en le dénonçant comme séditieux à l’autorité, ou bien en le traitant d’antipatriote devant le peuple. Telle était donc la coalition de droite, conservatrice et nationaliste, divisée pratiquement en parti de l’attente prudente et parti de l’action immédiate. La gauche était constituée par une autre coalition, libérale, latitudinaire, hellénisante, à laquelle appartenaient tous ceux qui, n’ayant plus une foi bien vive et bien entière, jugeaient vaine désormais toute espérance de révolution. Ceux-là pensaient que le seul remède à la situation était de tolérer le nouvel état de choses, en adoptant tout ce que la civilisation gréco-romaine offrait de meilleur ou de plus utile. Le clan philosophico-social était représenté dans ce parti par les Sadducéens, le clan politique par les Hérodiens. C’est-à-dire que les Hérodiens étaient pour la plupart des Sadducéens attachés à la dynastie, qui, appliquant au fait politique le principe général, tenaient que la meilleure forme de gouvernement adaptée aux circonstances était la monarchie libérale de la Maison régnante. Naturellement, sauf quelques exceptions individuel- les, les Sadducéens, de leur côté, étaient des Hérodiens, comme en d’autres temps nos libéraux (italiens) furent ou demeurent des Monarchistes constitutionnels. C’est la bourgeoisie financière et commerçante qui constituait, ici comme ailleurs, ce parti libéral, avec, au surplus, cette partie du peuple dont le vernis pharisaïque était tombé, comme pour les Juifs de la Diaspora, et qui, vivant au milieu des païens pour ses affaires, n’éprouvait pas grand scrupule à se prêter aux contacts et aux condescendances. Une autre espèce de recrues, c’étaient les jouisseurs, les riches épulons, la jeunesse dorée, qui ne songeaient qu’à mener joyeuse vie à Antioche, à Alexandrie et jusqu’à Rome : le type de cette catégorie, dans l’Évangile, est, comme nous le verrons, l’Enfant prodigue. Tous ces gens qui voulaient “faire des affaires” et ceux qui ne pensaient qu’à “vivre leur vie” étaient donc Sadducéens, sinon Hérodiens. Car, au fond, la mentalité sadducéenne était formée d’un matérialisme plus ou moins masqué de doctrines antirésurrectionnistes et autres du même genre ; mais, dans ces milieux hébraïques, comme aujourd’hui dans les milieux anglais, quiconque tenait à l’estime publique et ne voulait pas se créer d’ennuis, se gardait de se déclarer franchement athée. Du reste, le Sadducéen conservait à sa manière l’instinct juif. Pas plus que les Pharisiens, il n’aimait l’étranger ; et, s’il lui empruntait certaines idées ou certains usages, c’était pour les retourner contre lui. Même le Juif banquier et marchand de la Diaspora, complaisant à l’égard des mœurs païennes et peu scrupuleux dans sa façon d’observer la loi pharisaïque des purs et des impurs, poursuivait lui aussi sa “guerre sainte” contre les goïim, les Gentils ; et il la menait avec une arme qui, à travers les siècles, n’a pas cessé d’être redoutable et toujours de saison, au rebours des vieilles catapultes : c’est-à-dire l’argent et les affaires. Les financiers et les grands négociants, qui avaient étendu leur filet serré de banques et de comptoirs sur toutes les grandes cités d’Orient et sur tous les ports de la Méditerranée, combattaient les Gentils à coups d’usures et d’hypothèques, de ventes à gros profits et d’habiles courtages. À Rome, la Banque juive était toute-puissante dès le temps de Jules César ; et, quand mourut ce- 50 lui-ci, les Juifs, qui avaient fait avec lui et sous lui de splendides affaires, le pleurèrent avec éclat (2). Tel fut le principal champ de bataille des Sadducéens de la Diaspora. Quant à ceux qui se vouèrent à la politique, ils y apportèrent la même largeur de principes et se rallièrent à Hérode, Juif d’adoption, prototype du Sadducéen, qui s’abstenait à Jérusalem de battre monnaie à son effigie et, au dehors, bâtissait des temples païens. Ces libéraux devinrent hérodiens, parce qu’ils comprirent que c’était l’unique moyen pour eux de conserver l’ombre d’une monarchie nationale : d’où le bruit qu’ils avaient proclamé Hérode leur Messie, proposition qu’il ne faut pas prendre à la lettre, car cette “laïcisation” du concept messianique ne signifiait en réalité qu’une chose : qu’il était inutile de se bercer davantage de l’illusion d’obtenir plus ou mieux en Judée que la monarchie hérodienne (3). Les chefs pharisiens et sadducéens se disputaient la direction du mouvement politico-religieux d’Israël, sans qu’un parti réussît à l’emporter définitivement sur l’autre. Sous la pression du danger ou de l’intérêt, il leur arrivait même de conclure de passagers accords. C’est ainsi que les Pharisiens consentirent à l’égard d’Hérode vainqueur à une politique de transaction (4) ; et ce fut par un accord très significatif entre Pharisiens et Sadducéens du Sanhédrin que fut acquis le vote pour la mort de Jésus. Ces deux partis, auxquels appartenait la grande majorité des Juifs, malgré leurs divergences d’opinion, profanaient du reste l’un et l’autre l’idée messianique, quoique dans des proportions différentes ; d’où dériva nécessairement le phénomène d’un troisième courant : la tendance des Juifs vraiment pieux, des “spirituels”. Ce furent les Esséniens. On a beaucoup écrit sur les Esséniens ; pratiquement, on n’a guère abouti à des conclusions sérieuses. Si nous ne nous trompons, cela tient à ce fait qu’ils étaient, pour ainsi dire, un parti négatif, un parti de purs sécessionnistes au sein de la vie politique contemporaine ; ils n’ont donc pas d’histoire concrète : il leur a manqué une large et systématique extériorisation de leurs idées. Il convient, d’ailleurs, de ne pas confondre, comme certains l’ont fait, l’essé- nisme en lui-même avec les diverses communautés esséniennes, nazaréennes, etc., qui lui sont comme le monachisme est à l’ascèse chrétienne en général. L’essénisme est né de désillusions politico-messianiques qui devaient avoir un écho profond dans les âmes pieuses. La même cause produisait ainsi les effets les plus divers selon la diversité des cœurs. Pour le matérialiste sadducéen, ne plus espérer en un Messie à la Macchabée conduisait à s’adapter à l’hérodianisme ; pour le spiritualiste essénien, c’était une raison de se réfugier dans l’idéal d’un Messie spirituel, d’un Maître qui établirait le règne divin de la sainteté et vaincrait le monde, non par les armes, mais par sa vertu et par de pacifiques miracles ; il fallait seulement, par le détachement du monde et par la pratique de la pénitence, préparer les voies du Seigneur. Tous les mystiques, toutes les âmes vraiment religieuses, douces et dégoûtées du péché, étaient appelées à l’essénisme ; les plus austères et les plus dévotes formèrent des communautés, assez divergentes, d’ailleurs, de caractère et de statuts. Il en est résulté une certaine confusion, chez plusieurs auteurs, sur la nature de ces associations ; et c’est un préjugé de croire que toutes furent du même type, alors qu’en réalité le mouvement essénien n’était ni concentrique ni organique. Chaque maître y avait ses disciples et s’y façonnait une règle selon ses tendances propres et les circonstances, à la manière de l’érémitisme égyptien à ses débuts. Par ailleurs, en dehors de ce cénobitisme hébreu, il y avait l’essénisme populaire, prêt à suivre celui des maîtres qui émergerait davantage, tels les piagnoni du temps de Savonarole. Mais comme l’indestructible fond judaïque, qui subsistait jusque chez les Sadducéens, ne pouvait faire défaut aux Esséniens (qui n’étaient, en somme, que des Pharisiens de bonne foi et en dehors de la politique), eux-mêmes n’échappaient pas au rêve d’une restauration terrestre du royaume d’Israël. Quand aurait été rétabli le règne spirituel du peuple élu, alors, croyaient-ils, le monde présent s’écroulerait avec ses empires tout puissants et oppresseurs, et, sur l’univers renouvelé pour mille ans, le Messie glorieux régnerait avec ses saints ; la terre recommencerait d’être le paradis de délices, où nos premiers parents menèrent avant leur chute la vie bien- 51 heureuse. L’humanité finirait comme elle avait commencé ici-bas, par l’Eden. Et ce millénarisme était toute la concession que la spiritualité essénienne faisait au matérialisme juif : il suffisait à faire supporter plus volontiers à ce peuple de circoncis les adversités de cette heure grise qui pesait sur la Judée, suspecte à Rome et à Hérode, auxquels les Esséniens - au rebours des révolutionnaires zélotes - prêchaient une obéissance tranquille et passive, car ils abhorraient les violences et la mondanité. Telle était toute leur politique. C’est face à cette politique pharisaïque, sadducéenne et essénique qu’apparaît Jésus de Nazareth. Notes 1) MGR UMBERTO BENIGNI. Storia sociale della Chiesa. Vol. I La Preparazione. Dagli inizi a Costantino. - Milano, Francesco Vallardi, 1912. 2) Cf. MANFRIN, Gli Ebrei sotto la dominazione romana, Roma 1880, cap. 7. 3) Cf. E. RENAN, Les Juifs sous la domination romaine, Hérode le Grand, “Revue des deux mondes” Paris, 1/01/1894. à suivre... 4) Idem, ibid., p. 8. Vie de l’Institut C hers amis et lecteurs, dans ce numéro vous pourrez suivre la vie de notre Institut depuis presque trois ans : du 1er janvier 2013 au 30 novembre 2015. Nous nous limiterons aux principales informations. La maison de Verrua et l’Institut • Séminaire Voici la liste des ordinations qui ont eu lieu au séminaire Saint Pierre Martyr de Verrua Savoia. - Le 23/04/2013 : Bernard Langlet, première tonsure et Charbel Madi, premiers ordres mineurs. - Le 14/11/2013 : Charbel Madi, seconds ordres mineurs, une ordination au diaconat (sub conditione). - Le 15/02/2014 : une ordination sacerdotale (sub conditione). - Le 3/01/2015 : Charbel Madi, sous-diaconat (à Dendermonde). - Le 10/10/2015 : Bernard Langlet, premiers ordres mineurs, Charbel Madi, diaconat. Actuellement, 3 séminaristes fréquentent l’année 2015-2016, on enregistre l’entrée d’un garçon italien. De 2013 à 2015 nous comptons 7 entrées dans l’Institut Mater Boni Consilii (dont 2 séminaristes, 2 frères et une sœur). • Les frères de l’Institut La maison de Verrua a ouvert ses portes pour la formation aussi à des jeunes gens qui souhaitent vivre la vie religieuse sans devenir prêtres ; ils forment la communauté des frères de l’Institut Mater Boni Consilii. Après 6 mois de postulat et 2 années de noviciat, ils émettront leurs premiers vœux religieux de chasteté, pauvreté et obéissance, selon les préceptes évangéliques. En 2013, est entré comme postulant Federico Dalla Costa de Vicence (prise d’habit le Maison de Verrua : ordinations et professions religieuses 52 • La profession d’une religieuse de l’Institut 28/06/2013 sous le nom de frère Felice-Antonio) ; en 2014, ce fut le tour de Pasquale Lorusso de Altamura (BA) (prise d’habit le 13/06/2015 sous le nom de frère PasqualePio) ; en 2015, Jérémie Redon, fidèle de Paris, est entré comme postulant. • Sœurs de l’Institut Samedi 27 avril 2013 : Jeanne Langlet a pris l’habit avec le nom de Sœur Jeanne de Jésus, tandis que Sœur Cécile-Marie et Sœur Imelda de Jésus ont prononcé leurs premiers vœux temporaires. Le 24/04/2015, Sœur Jeanne de Jésus a prononcé ses premiers vœux. ADMINISTRATION DES SACREMENTS • Mariages • 2013 - 25/05 à Strevi, Silvio Bragagnolo et Francesca Airoldi - 1/06 à Charenton-le-Pont, Philippe Sfeir et Sydnée Jalkh - 15/06 à Annecy, Damien et Angelica Pasquier - 30/06 à Potenza, Mario Zippo et Margherita Gorpia - 27/07 Stefano Falcone et Benedetta Rosignoli - 10/10 à Poggiorsini (BA), Pierfrancesco Palmisano et Julia Buczko • 2014 - 26/04 à Ferrare, Daniele Bertaggia et Laura Galavotti - 3/05 à Verrua, Marco Lorenzi et Alessandra Scacchi - 3/05 à Lyon, Josselin Privat et Naomi Marie Fujita • Les prises d’habit des frères - 22/05 à Fasano (BR), Gianvito Armenise et Marilinda Boccuzzi - 14/06 à Renon (BZ), Alessandro Trentini et Giada Patruno - 21/06 à Raveau, Mickaël Buliard et Agathe Michaud - 13/09 à Paris, Jean-Jacques Della Gaspera et Anne Boulestin - 13/09 à Serre-Nerpol, Nicolas Ramis et Clémence Vezin - 28/09 à Ivano Fracena (TN), Alfredo Armanini et Camilla Tettamanti - 29/11 à Milan, Samuele Galbiati et Chiara Angela Fradegrada - 28/12 à Modène, Nilo Pacenza et Teresa Sicilia • 2015 - 3/01 à Rimini, Alex Candoli et Giuditta Silvia Barbieri - 11/04 à Rovereto (TN), Francesco Risato et Serena Franceschi - 11/04 près de Verrua, Francesco Lorenzi et Margherita Maria Vietti - 2/05 à Rome, Cristiano Romano et Claudia Pulcinelli 53 - 6/06 à Pescantina (VR), Marco Tezza et Rachele Righetti - 20/06 à Dendermonde, Alex Blanchard et Mélanie Valenduc - 20/06 à Annecy, Nicolas et Sonia Rousselot - 27/06 à Portobuffolé (TV), Michele Prandi et Silvia Pascutto - 29/06 à Pescantina (VR), Alessandro Tacconelli et Sandra Rossini - 5/08 à Verrua Savoia, Pierre-Loïc Olympie et Teresa Fontan - 29/08 Maurice Panissard et Murielle Teston - 12/09 à Bry-sur-Marne, Christophe Foulquier et Isabelle Job - 12/09 Paolo di Giovanni et Cristiana Petracca - 26/09 à Milan, Francesco Fazio et Katia Rodriguez-Lara - 26/09 à Verrua, Walter Raimondi et Annalisa Cominelli - 28/09 un mariage à Verrua • Baptêmes • 2013 - 19/01 Juliette Langlet, à Vailly-sur-Sauldre - 20/01 Lorenzo Spanò, à Rovereto - 9/02 Pierre Benusiglio, à Paris (avec le rite des adultes) - 30/04 Stéphane Brancaleone, à SerreNerpol - 25/05 Céline Vicari, à Paris - 15/06 Damien Pasquier, à Annecy - 15/06 Johannes Van Overbeke, à Dendermonde - 17/06 Marie Bernadette Cazalas, à Annecy - 19/07 Clara, Alexis et Olivia Pasquier, à Sao Paolo (Brésil) - 22/07 Cesare Adamo Fattor, à Bolzano - 27/07 Antoine Di Santos, à Chevry - 9/09 Gabriel et Joy Rincon Hernan Gomez, à Dendermonde - 6/10 Sara Grasselli, à Rovereto - 4/11 Achille Attila Armanini, à Rovereto - 9/11 Vicky Waizenegger, à Annecy - 11/11 Eleonora Moreau, à Dendermonde - 16/11 Ysmaela Carbonaro, à Verrua - 9/12 Emmanuel Salmon, à Dendermonde - 15/12 Louna Maria Aveline, à Paris • 2014 - 4/02 Estelle Rothe, à Serre-Nerpol - 11/02 Ines Bertaglia, près de Modène - 15/02 Ferdinando Romualdo Fabbretti, à Sogliano (FC) - 16/02 Francesco Ronconi, à Rovereto - 20/03 Rosa Maria Palmisano, à Bari - 20/03 Massimo De Leo, à Foggia - 6/04 Maddalena Sperandio, à Rovereto - 19/04 Maddalena Dinoi, à Rimini - 25/04 Mattia Galavotti, à Ferrare (avec le rite des adultes) - 3/05 Naomi Marie Fujita, à Lyon (avec le rite des adultes) - 2/06 Greta Maria Zippo, à Potenza - 16/07 Karel Van Overbeke, à Dendermonde - 22/07 Marie-Madeleine Adda Benatia (avec le rite des adultes) et sa fille Marguerite-Marie Naomie, à Serre-Nerpol - 26/07 Trystan Kacenelen, à Villabé - 27/07 Lorenzo Bonardi, à Novellara - 3/08 Marjorie Gabrielle Marie Langlet, à Raveau - 4/10 Louis-Marie Rolland, à Paris - 4/10 Stefano Lorenzi, à Turin (compléments) - 16/10 Dario Bragagnolo, à Strevi - 1/11 Apolline Dumortier, à Dendermonde - 2/11 Marie Arnoult, à Raveau - 5/11 au Robert (Martinique) Jeanne Mimiette ; Marie Bard ; Marie Elima - 8/11 Jeanne Buliard, à Paris - 23/11 Antonio Pacenza, à Modène - 13/12 Emma Agnese Furlan, à Milan - 26/12 Lucia Agostina Fattor, à Bolzano • 2015 - 17/01 Agostino Giuseppe Galbiati, à Milan - 31/01 une petite Isabelle, à Paris - 31/01 Sveva Marta Succi, à Mercato Saraceno (FC) - 5/02 Adelinda Coulon, à Dendermonde - 28/03 Léonard Ma, à Dendermonde - 12/04 Ève Dyniewicz, à Annecy - 17/04 Marie Joseph Cazalas, à Annecy - 26/04 Leïlou Ducornet et Némésis Kacenelen, à Paris - 10/05 Angélina Langlet, à Raveau - 17/05 Joseph Baroud, à Paris - 31/05 Flavio Ettore De Fanti, à Rovereto - 6/06 Louis Privat, en Ardèche - 6/06 Caterina Maria Lescarini, à Rome - 21/06 Michaël Jorland, à Lyon - 22/06 Thibaud Douvre, à Paris - 27/06 Lili Zita, Melisse Rosalina Anne et Johanna Nina Rousselot, à Annecy 54 - 4/07 Axel Lesueur, à Paris (avec le rite des adultes) - 17/07 Maria Camilla Lorenzi, à Turin - 18/07 Louise Vigand, à Paris - 9/08 Ludovico Aldo Benito Carlo Candoli, à Rimini - 15/08 Joséphine Salmon, à Dendermonde - 23/08 Marie Mézières, à Serre-Nerpol - 23/08 Jerry Waizenegger, à Servion - 13/09 Adélaïde Bergez, à Serre-Nerpol - 19/09 Louis de Blanquet de Rouville, à Mardié - 26/09 Katia Maria Rodriguez-Lara, à Milan (avec le rite des adultes) - 27/09 Thomas Ramis, à Serre-Nerpol - 4/10 Élise De Grave, à Dendermonde - 4/10 Alessandro Giovanni Carmelo Manara, à Rovereto - 10/10 un petit Emmanuel - 5/11 Mario Stefano Palmisano, à Bari - 22/11 Benoît K/Bidi, à Paris - 28/11 Sofia Fassone, à Turin • Premières Communions • 2013 - 6/01 à Annecy, Julien Jazarguer - 14/04 à Annecy, Marguerite-Marie Larfaillou - 2/06 à Serre-Nerpol, Jeanne Ardisson et Charles Van Gorp - 9/06 à Serre-Nerpol, Louis-Marie Carpène - 20/06 à Serre-Nerpol, Guillaume Brun - 30/06 à Ferrare, église san Luca, Lodovica Fabbri - 8/09 à Paris, Jean-Baptiste Bourbon - 27/10 à Annecy, Enzo Saugneaut et Clara Pasquier - 16/11 à Verrua, Ismaela Carbonaro - 29/12 à Serre-Nerpol, Nicolas Ramis • 2014 - 1/01 à Serre-Nerpol, Quentin Leduc - 8/02 à Milan, Luca Splendore - 30/03 à Serre-Nerpol, Philomène Chiocanini - 20/04 à Modène, Giuliano Esposito - 8/06 à Annecy, Samuel, Freddy et John Waizenegger - 6/07 à Paris, une petite Sophie - 6/07 à Annecy, Justine Jazarguer et Alexis Pasquier - 3/08 à Raveau, Marjorie et Manon Langlet - 22/08 à Serre-Nerpol, Marie-Madeleine Adda Benatia - 26/10 à Verrua, Angelica Ricossa - 8/12 à Serre-Nerpol, Marguerite-Marie Naomie Adda Benatia • 2015 - 19/04 à Rome, Sergiomaria Pulitelli - 19/04 à Rovereto, Pietro Giuliana, Claretta et Maria Grazia Manara - 21/06 à Paris, Némésis-Anne Kacenelen, Thomas Vigand et Jeanne Vigand - 21/06 à Serre-Nerpol, Paul et Joseph Cazalas - 28/06 à Annecy, Olivia Pasquier, Lili Zita et Melisse Rosalina Rousselot - 5/07 à Annecy, Marie Geneviève Cazalas - 12/07 à Serre-Nerpol, Valentin Pirin - 19/07 à Raveau, Guillaume Langlet - 26/07 à Raveau, Anne-Solange de Rouville - 2/08 à Modène, Anna Cerbasi - 9/08 à Raveau, Roseline Pons, Nina Dupuy et Madeleine Bourbon - 27/09 à Modène, Flavio Esposito - 1/11 à Raveau, Bastien Langlet et LeïlouMuriel Ducournet - 28/11 à Turin, Sofia Fassone. • Confirmations Mgr Geert Stuyver a administré le sacrement de la Confirmation dans les lieux suivants : - 20 avril 2013 à Verrua - 21 avril 2013 à Rovereto - 16 juin 2013 à Paris Cérémonies à Verrua Messe solennelle 55 - 10 août 2013 à Raveau - 14 novembre 2013 à Verrua - 23 mars 2014 à Serre-Nerpol - 28 juin 2014 à Verrua - 2 août 2014 à Raveau - 5 octobre 2014 à Épagny - 31 mai 2015 à Paris - 27 juin 2015 à Modène - 28 juin 2015 à Pescara - 26 juillet 2015 à Raveau - 10 octobre 2015 à Verrua - 25 octobre 2015 à Rosario (Argentine) • Anniversaires - 26/05/2013 à Turin, Messe pour les vingt ans de la mort du notaire Ezio Mamini. Cérémonies à Verrua Fête-Dieu - 3/12/2013 à Rimini, l’abbé Ugo Carandino a célébré son 25ème anniversaire de sacerdoce. - 5/09/2014 à Modugno, Messe pour Pino Tosca. - 5/07/2015 à Turin, Messe en mémoire et en l’honneur des militaires et civils, du Royaume des Deux Sicile et des autres États italiens. - 8/09/2015 à Modugno, Messe pour Pino Tosca et Piero Lorusso. - Le 15/11/2015 à Faverney, l’abbé Jocelyn Le Gal ainsi que le Père Joseph-Marie ont célébré leurs 10 ans de sacerdoce par une Messe solennelle. Centro Studi Davide Albertario • Le 16/03/2013, à Milan, conférence intitulée “L’Univers, deux conceptions face-àface : matérialisme soviétique contre cosmologie chrétienne. La dispute scientifico-philosophique entre la Russie communiste et l’Église catholique au XXème siècle”. • Le 8/06/2013, s’est déroulée la seconde “Journée Albertarienne” à Filighera (PV), pays natal de l’abbé Albertario. L’abbé Ugolino Giugni a célébré la Messe au cimetière de Filighera, sur la tombe de l’abbé Davide Albertario. Visite de la maison natale de la famille Albertario, puis repas amical à Belgioioso, ensuite visite de la Chartreuse de Pavie. • Le 22/04/2014, à Milan, conférence de l’abbé Ricossa, intitulée : “ Simonino de Trente et le culte volé”. Présentation du livre : “La vera storia del Beato Simonino da Trento Innocente e Martire e del suo culto” édité par le Comité san Simonino et le CLS. • 7/03/2015, à Milan, conférence : “Les racines du mal dans la société moderne : la pensée maçonnique”. Présentation du livre d’Arthur Preuss “Essai sur la Franc-Maçonnerie Américaine”, rapporteur : l’abbé Carandino, introduction par l’abbé Giugni. • 20/06/2015, Journée albertarienne à Colle don Bosco (AT) avec visite de la maison du Saint. • Congrès Albertarien, à Milan en novembre : trois éditions (de 2013 à 2015). - 2013, le 12ème (16/11) : “IN HOC SIGNO VINCES - De l’édit de Milan de 313 à la christianisation de l’Empire”. - 2014, le 13ème (15/11) : “La Thèse de Cassiciacum hier et aujourd’hui. L’Église à l’époque de Jorge Mario Bergoglio”. 56 • Exercices Spirituels à Raveau (août 2015) • Confirmations à Raveau - 2015, le 14ème (14/11) : “Ipsa conteret Elle t’écrasera la tête (Gn. 3, 15) : le rôle de la T. Sainte Vierge Marie dans la défense de la foi”. Centro Studi Federici • Rimini, 2/3/2013 : “313-2013 : 1700 ans de Chrétienté. De la bataille du Pont Milvius aux édits de Constantin et Théodose”, par la doctoresse Sara Fabbrizioli. Rimini, 9/11/2013 : “À la solde de la spéculation. Burattini et burattinai de la Haute Finance”, par Augusto Grandi. • Journées pour la Royauté Sociale du Christ à Modène - 5/10/2013 : “Le Règne du Christ, l’Empire de l’Église. 313 – 2013 : considérations sur l’anniversaire constantinien”. - 11/10/2014 : “Divorce, une arme de destruction massive. 40 ans après le référendum sur le divorce”. - 17/10/2015 : “Sainte Inquisition et hérétique perversité. 50 ans après la déclaration sur la liberté religieuse”. Conférences • Présentations de livres à Pescara faites par l’abbé Carandino et Marco Solfanelli, organisées par Amiciz ia Cristiana : 21/11/2014 “Essai sur la Franc-Maçonnerie Américaine” d’Arthur Preuss ; 23/01/2015 “La vendetta del mercedario” de Anton Huonder. • Les “Samedis de Saint Grégoire VII” tenus par l’abbé Carandino à la chapelle de Rome et en partie répétés à la chapelle de Pescara. Le 19/1/2013 : “Les documents de saint Pie X sur les études bibliques” ; le 16/2/2013 : “Le Carême dans l’enseignement des Souverains Pontifes” ; le 20/4/2013 : “Les documents de saint Pie X sur la Sainte Eucharistie” ; le 18/5/2013 : “Les lettres pastorales du Patriarche de Venise, le cardinal Giuseppe Sarto” ; le 15/6/2013 : “L’encyclique Haurietis aquas de Pie XII sur le Sacré-Cœur” ; le 16/11/2013 : “Préparer l’Avent pour préparer Noël” ; le 14/12/2013 : “La Nativité et l’Épiphanie de Notre-Seigneur” ; le 18/1/2014 : “Le magistère de Léon XIII” ; le 15/2/2014 : “L’encyclique Æterni Patris sur la philosophie thomiste” ; le 15/3/2014 : “Retraite spirituelle pour le Carême” ; le 14/6/2014 : “L’encyclique Annum Sacrum sur le Sacré-Cœur” ; 15/11/2014 : “L’encyclique Humanum genus sur la secte maçonnique” et présentation du livre de A. Preuss : “Essai sur la Franc-Maçonnerie Américaine” ; 20/12/2014 : “La lettre apostolique Neminem fugit sur la Sainte Famille” ; 17/1/2015 : “L’encyclique Immortale Dei sur la constitution chrétienne des états” ; 14/2/2015 : “Retraite spirituelle pour le Carême” ; 18/04/2015 : “L’encyclique Satis Cognitum” sur l’unité de l’Église et sur le Primat de Pierre” ; 20/06/2015 : “L’encyclique Sancta Dei Civitas sur les missions” ; 14/11/2015 : “L’encyclique Dall’alto dell’Apostolico Seggio, sur l’action de la maçonnerie en Italie”. • 24/11/2013 à Paris, conférence de l’abbé Ricossa : “Le règne du Christ, l’empire de l’Église. 313-2013 : considérations sur l’anniversaire de l’édit de Constantin”. • 1/03/2014 à Rome, pour le 80ème anniversaire de la mort de Mgr Umberto Benigni († 27 février 1934), fondateur du “Sodalitium Pianum”, conférence de l’abbé Ricossa intitulée : “Mgr Benigni avec Saint Pie X contre le modernisme”. • 24/09/2014 à Moncalieri, conférence de l’abbé Ricossa sur “Mentalité contemporaine et doctrines maçonniques”. 57 • Récollection à Raveau le 1er novembre • 30/11/2014 à Paris, conférence de l’abbé Ricossa : “La Thèse de Cassiciacum hier et aujourd’hui, l’Église à l’époque de Jorge Mario Bergoglio”. • 29/11/2015 à Paris, conférence de l’abbé Ricossa : “La sainte Inquisition et l’heretica pravitas. À l’occasion du 50ème anniversaire de la déclaration conciliaire sur la liberté religieuse”. • Lyon : deux cycles de conférences ont eu lieu : sur le Syllabus, pour l’anniversaire des 150 ans de sa promulgation (1864-2014 ; et sur l’encyclique Pascendi de saint Pie X. Les conférences de l’IMBC en français sont disponibles sur le site Youtube.com (chercher : “conférences de l’Institut Mater Boni Consilii”). Activités diverses - Le 25 mai 2013, l’abbé Carandino a béni à Pesaro un monument en l’honneur du Grande Torino. - 2-3 août 2104 et 1-2 août 2015, au cours des manifestations “Notti del brigante” à Borgo Case Troiano (Spoltore, PE), l’abbé Carandino a célébré la Sante Messe. Pèlerinages • 5-6/10/2013 à Ars auprès du saint Curé et à Lyon (Fourvière). • Pèlerinages organisés par la chapelle de Paris : - 8-9/06/2014, à Bruges (Belgique) avec la vénération des reliques du Saint-Sang. - 14-21/09/2014, à Paris vénération des reliques des martyrs de septembre du couvent des Carmes (116 évêques et prêtres réfractaires tués par les révolutionnaires en 1792). • Modène : Journée pour la Royauté Sociale 2015 - 29/10-1/11/2014, à Rome avec une trentaine de pèlerins français et belges (et une italienne). - 24-25/05/2015, à Turin pour l’Ostension du Saint Suaire. - 7/11/2015, à Issoudun (N.-D. du SacréCœur) et à Neuvy-Saint-Sépulchre avec soixante-dix fidèles en action de grâce pour les 10 ans d’apostolat à Paris. • Le 6/06/2014 s’est déroulé un pèlerinage à Riese Pio X sur les lieux où vécut le Saint Pontife pour le centenaire de sa mort ; une trentaine de pèlerins venant des régions limitrophes y ont participé. • Pèlerinage National Osimo-Lorette : il s’est déroulé aux dates suivantes : 11-12 mai 2013, 17-18 mai 2014 et 16-17 mai 2015 avec un nombre toujours croissant de pèlerins. • Pèlerinage de l’Osier. Le 8 mai se déroule le pèlerinage annuel à N.-D. de l’Osier. Les sujets traités au cours des traditionnelles conférences de la veille ont été : - en 2013 : à l’occasion de l’anniversaire des 1700 ans de l’Édit de Constantin : “313 Édit de Milan. In hoc signo vinces : du paganisme au christianisme. Le miracle de l’Osier : du protestantisme au catholicisme”. De même que la vision du monogramme de Jésus-Christ ouvrit la voie à la victoire puis à la conversion de Constantin et par conséquent à celle de la société de l’Empire, ainsi l’apparition de la très Sainte Vierge au huguenot entraîna sa conversion et le retour du Dauphiné à la Foi catholique. - en 2014, à l’occasion des 150 ans du Syllabus : “150 ans du Syllabus de Pie IX et confirmation du message de Notre-Dame de l’Osier : « à Dieu sois-tu mon ami »”. Parmi les erreurs condamnées par Pie IX en 1864, 58 le libéralisme et le latitudinarisme - très répandus de nos jours - sont en opposition avec le message de Notre-Dame. - en 2015 : “Le message de Notre-Dame à l’Osier et la doctrine catholique sur le protestantisme : depuis 50 ans l’un et l’autre ont été effacés”. Dans l’apparition, Notre-Dame avertissait le protestant Port-Combet de ne pas retarder sa conversion pour ne pas finir en Enfer. Le Concile Vatican II, les enseignements de Jean-Paul II, Benoît XVI et François font table rase de la doctrine de l’Église. • Pèlerinage à Saint Joseph de Cotignac (Var) : en 2013, 2014 et 2015. • Pèlerinages organisés par la chapelle de Pescara : le 27/04/2013, le 22 /03/2014 et le 21/03/2015 à la Scala Santa de Campli (TE) ; le 7/09/2013, le 13/09/2014 et le 12/09/2015 au Volto Santo de Manoppello (PE) ; le 21/06/2014 à l’Ermitage de san Domenico à Villalago (AQ) ; le 25/04/2015 à l’Ermitage de san Venanzio à Raiano (AQ). • 29/11/2015, pèlerinage organisé par la chapelle de Rimini, à la basilique du Miracle eucharistique de Bagno di Romagna (FC). • Pèlerinage en Terre Sainte, du 2028/10/2014. Une trentaine de pèlerins italiens accompagnés de trois prêtres (MM. les abbés Carandino, Giugni et Le Gal) ont visité les lieux saints de la Galilée à la Judée. Camp pour les garçons en montagne • Pèlerinages régionaux organisés par la chapelle de Milan : - 12/10/2013 à l’abbaye de Chiaravalle, près de Milan. - 4/10/2014 au Sacro Monte de Varèse. - 3/10/2015 au Sacro Monte de Orta s. Giulio (NO) et à l’île de s. Giulio. • Signalons à Bologne les habituels pèlerinages à l’Osservanza au mois de mars, à San Luca-Bologne au mois d’octobre, et à Bocca di Rio au mois d’août. Exercices Spirituels La prédication des Exercices Spirituels de saint Ignace, selon la méthode du Père Vallet est une activité qui occupe souvent les prêtres de l’Institut tant en Italie qu’en France. En 2013, 10 sessions ont été données en France (Raveau et Serre-Nerpol) et 4 en Italie (Verrua). En 2014, 8 sessions ont été données en France (Raveau et Serre-Nerpol) et 4 en Italie (Verrua). En 2015, 9 sessions ont été données en France (Raveau et Serre-Nerpol) et 4 en Italie (Verrua). Des journées de retraite pour la persévérance se sont également déroulées à Serre-Nerpol le 4 mars 2013, le 6 avril 2014 et le 15 mars 2015 ; et à Raveau le 1er novembre de chaque année, comme il est désormais de tradition. 59 Pèlerinages • Pèlerinage Osimo-Lorette 2015 • Pèlerinage en Terre Sainte 2014 : • Bethléem (“Ici, le Verbe s’est fait chair”) • La Via Dolorosa dans les ruelles de Jérusalem • Les pèlerins au bord du lac de Tibériade • Pèlerinage à Ars • Les fidèles parisiens à Issoudun (N.-D. du Sacré-Cœur) • Pèlerinage à Bruges : les pèlerins - La relique du Saint-Sang 60 ACTIVITÉS ESTIVALES : CAMPS ET CROISADE EUCHARISTIQUE • Camp St Louis de Gonzague à Raveau en France au cours du mois de juillet. - 2013 : 23 enfants dont 2 espagnols, 4 italiens et (nouveauté) 1 américain. L’abbé Steenbergen a été promu aumônier pour la première fois. Paray-le-Monial (lieu béni des apparitions du Sacré-Cœur) ainsi que les mines de charbon de La Machine (très appréciées des enfants, mais pas seulement !...) ont fait l’objet de visites. - 2014 : le record d’affluence est battu pour le nombre d’enfants (avec, entre autres, 2 espagnols, 3 italiens, 2 belges et 3 américains). Visite de la cathédrale de Bourges (avec l’ascension des 400 marches pour arriver en haut de l’une des tours). Ce fut un séjour particulièrement pluvieux… - 2015 : 25ème camp à Raveau (Deo gratias !) avec un nouveau record d’affluen- Administration des Sacrements • Ordination au sous-diaconat à Dendermonde • Annecy : premières Communions ce de garçonnets (avec également 1 espagnol, 4 italiens, 3 belges et 4 américains). Sortie à Vézelay, à la basilique de Ste Madeleine d’où St Bernard prêcha la 2ème Croisade. Ce fut au contraire un séjour très ensoleillé… • Camp d’été Bienheureuse Imelda Lambertini organisé par les sœurs de l’I.M.B.C. à Verrua pour les fillettes et les jeunes filles. 3 éditions de 2013 à 2015 avec un nombre toujours croissant de participantes. • Les camps d’été avec les Sœurs du Christ-Roi se sont déroulés en 2013 à Molines dans le Dauphiné, avec la visite du sanctuaire de Notre-Dame du Laus ; en 2014, à Massello dans le Val Chisone, avec des visites à Turin aux sanctuaires de Marie-Auxiliatrice et de Cottolengo ; en 2015, à Bardonnèche, avec la visite du fort de Bramafam. • Camp pour les garçons en montagne. Il se déroule chaque année dans les Alpes françaises pour les garçons à partir de 14 ans. En 2013, à Pellafol dans l’Isère, en 2014, à Champagny-en-Vanoise (en Savoie), et en 2015 à Moulins-Vieux dans l’Isère. • Signalons aussi trois éditions du camp pour garçonnets à Dendermonde en Belgique au cours de l’été. Nouvelles et anciennes chapelles de l’Institut Au cours de ces dernières années, l’Institut a ouvert dans différentes localités de nouvelles chapelles pour la célébration de la messe dominicale, permettant ainsi de consolider l’apostolat de ses prêtres. • À Milan, après 15 années de location d’un local au sud de la ville, finalement, en mai 2013, grâce aussi à la générosité de nombreux fidèles ambrosiens, nous avons pu acquérir un local. C’est là que, après les nécessaires travaux de réaménagement, a emménagé l’historique “oratorio S. Ambrogio”. Le local, plus grand que le précédent, comprend une chapelle artistiquement décorée, une sacristie, et un logement pour le prêtre. La première messe a été célébrée le 1er septembre mais l’inauguration officielle a eu lieu le 1er novembre 2013 par une messe solennelle à laquelle étaient présents MM. les abbés Giugni, Ricossa et Carandino. • Potenza et Bari. Alors que nous mettons sous presse se préparent les inaugurations de la chapelle San Lorenzo Martire 61 Camps d’été • Camp saint Louis de Gonzague à Raveau en 2015 • Représentation des enfants français de Potenza et de la chapelle San Michele Arcangelo di Carbonara de Bari. Il s’agit d’un pas en avant notable dans le développement du ministère sacerdotal en Basilicate et dans les Pouilles. Chronique et photos dans le prochain numéro. • Dans la province de Florence, l’abbé Fraschetti se rend une fois par mois pour célébrer la sainte Messe. • À Marseille et Aix-en-Provence, l’Institut célèbre depuis plus de deux ans, un dimanche par mois dans un hôtel. Le nombre des fidèles est en augmentation et on espère trouver un endroit plus digne pour la célébration. • À Cannes, l’Institut, malheureusement, a dû abandonner la chapelle qu’il utilisait depuis 1996, année de la mort de l’abbé Delmasure ; il l’avait ouverte au début des années 80 quand il avait été chassé par son évêque de la paroisse de Théoule-surMer. La célébration a lieu, pour le moment, d’une manière provisoire dans l’attente de trouver une meilleure organisation. • Martinique : depuis novembre 2014, un prêtre de l’Institut s’y rend deux fois par an afin d’y dispenser les Sacrements à un groupe de fidèles ; plusieurs baptêmes ont déjà été administrés et des conversions sont en préparation. Prions pour ces fidèles fervents mais très isolés. • De Belgique nous signalons que la sainte Messe n’est plus célébrée à Lille (F) mais à Tournai (B). Un prêtre se rend régulièrement en Hollande pour célébrer à Bergen op Zoom et Zwartemeer ; en Allemagne, à Lierfeld (localité à 50 km au nord de Trèves) et en Angleterre près de Londres. DÉFUNTS • 2013 - 19/02/2013 à Lavis (TN), Gina Selber veuve Stenico avait reçu les sacrements de l’abbé Giugni. - 5/04/13 à Milan, Enrico Garancini. - 18/04/2013 Madeleine Marly, munie des sacrements. - 31/03/2013, Françoise Guérard des Lauriers (nièce de Mgr Guérard), décédée à l’âge de 85 ans à Paris ; elle avait reçu de l’abbé Jocelyn Le Gal les sacrements avec une grande piété au cours des trois mois précédant sa mort. Funé- Apostolat des Sœurs I.M.B.C. 62 railles célébrées dans l’église paroissiale de Chanzeau (Maine-et-Loire) et inhumation dans la chapelle funéraire familiale. Notons que la famille des Lauriers avait acquis l’église mise en vente par les révolutionnaires et l’avait ensuite restituée – gratuitement – au diocèse après la Révolution. - Le 6/05/2013, Marie-Laure Le Gal (mère des abbés Jocelyn et Thomas), après une longue maladie et munie des sacrements de l’Église. Ses funérailles ont été célébrées près de Nantes, le 11 mai par l’abbé Thomas Le Gal, assisté de son frère l’abbé Jocelyn Le Gal dans la chapelle Notre-Dame des Dons (mise à disposition par l’abbé Guépin). Notre pensée et nos prières vont à son époux et à sa famille. - Le 11/06/2013 à Turin, Olga Bressy veuve Sivier ; avec son mari, elle avait accueilli chez elle à Orio Canavese, le séminaire naissant de l’IMBC. Funérailles célébrées le 13/06. - 8/05/2013, Jeanine Hinniger, qui avait fait les Exercices Spirituels. Le 18/08/2013 à Lille, Élisabeth Duriez, veuve Brabant. Avec son mari Étienne, elle avait soutenu dès le début le Père Guérard et sa position doctrinale, ensuite fidèle de l’Institut, elle avait mis à disposition dans sa maison de Lille une chapelle, où l’Institut a assuré la célébration dominicale de la sainte Messe jusqu’à cette année. Mgr Stuyver a célébré ses funérailles. - 29/07/2013 à Nevers, Christian Gotteri, fidèle de longue date de l’IMBC et qui avait reçu tous les sacrements ; ses funérailles, célébrées par l’abbé Giugni, se sont déroulées à Raveau. 31/08/2013, Gilberta Angelini veuve Villa, à Valmadrera ; elle accueillit dès le début la Messe chez elle ; ses funérailles ont eu lieu le 2 septembre à Valmadrera, célébrées par l’abbé Giugni. - 10/10/2013, Valerio Pagani de Cortone. - 14/10/2013, Benizzi Ferrini à Forlimpopoli, funérailles célébrées le 16 (en partie) par l’abbé Carandino à Predappio. 17/10/2013, funérailles de Corradino Di Domenico. - 8/11/2013, Adelina Tacconelli, âgée de 47 ans, de Ripa Teatina. 31/12/2013, Maria Luisa Mascetti veuve Correggiari, de Bologne. • 2014 - 7/01/14 Zefirino Pastorello, à Copparo. - 14/01/2014, Pietro Villa, fidèle de l’IMBC à Valmadrera ; funérailles le 18. - 26/1/2014, Marino Solfanelli, de Chieti, journaliste et éditeur, funérailles célébrées par l’abbé Ca- Marie-Laure Le Gal (mère des abbés Jocelyn et Thomas) randino. - Le 7/02/2014 à Milan, Giuseppe Mendella ; il avait été parmi les premiers fidèles de l’Oratoire s. Ambrogio et parmi les fondateurs du Centro Studi D. Albertario. - Le 24/02/2014 à Lyon, Paulette Giraud, décédée après avoir reçu les sacrements. Fidèle de la première heure, elle faisait partie du groupe de Lyonnais qui avaient réagi tout de suite à la nouvelle messe et aux réformes. - 12/03/2014, Rosalina Zanin épouse De Ganis à Annecy. 23/03/2014, Enore Ossimprandi à Parme, funérailles le 25 à Medesano. - 9/05/2014, Giampaolo Galavotti à Ferrare. 10/07/2014, Mgr Oliver Oravec, en Tchécoslovaquie ; nous le recommandons à vos prières. - 14/07/2014, René ‘Maurice’ RouxDuplâtre, ancien retraitant des Coopérateurs Paroissiaux du Christ-Roi (CPCR) de Chabeuil, il fut ensuite un des premiers fidèles du Père Vinson à la Maison Saint-Joseph où il assista à la Messe tous les dimanches jusqu'à quelques jours avant sa mort. Funérailles à la Maison Saint-Joseph (Serre-Nerpol). - 17/07/2014, Francesca Lamura, à Bergame ; elle avait reçu les sacrements. - 19/08/2014, Livia Zanini, à Villalagarina (TN). - 1/09/2014, Luciana Gori, funérailles le 3 septembre à Turin. 8/09/2014, Odile Aynaud, à Thionville. 29/9/2014, Ivo Mazzoni de Mercato Saraceno ; il avait reçu les derniers sacrements. 18/10/2014, Michel Morphée à Palaiseau, muni des sacrements. - 9/11/2014, Lucia Noseda veuve Ortelli à Cernobbio (CO), funérailles célébrées par l’abbé Giugni le 11 novembre. - 13/11/2014, Rocca Calabrese, de Carbonara di Bari, funérailles célébrées par l’abbé Carandino. - 22/11/2014, Liliana Palestini, veuve Mattioli. 63 • 2015 - 12/01/2015, Giovanni Piero Marcandelli à Milan. - 6/02/2015, Franco Ferrari à Modène. - 20/02/2015, Sebastiano Marrone, enfant de 5 ans, à Casale Monferrato. 28/03/2015, Elio Mario Naldi à Bologne, funérailles le 30 mars. - 24/04/2015, Marcel Riedenger de Cannes nous a quittés à l’âge de 102 ans. Il était un fidèle et un bienfaiteur de la chapelle Notre-Dame des Victoires à Cannes depuis une vingtaine d'années. Il a employé ses longues dernières années à faire du bien autour de lui moralement et matériellement avec la simplicité et la discrétion que Jésus recommande dans l’Évangile. - 11/05/2015, Georgette Padey épouse Ducimetière à Annecy. 23/06/2015, Marzia Caselle veuve Murro à Potenza, décédée à l’âge de 98 ans. Ses funérailles ont été célébrées par son fils, l’abbé Giuseppe Murro le 24 juin. - 11/07/2015, Viviano Giuseppe Milardi à Turin. 2/8/2015, Gaetano Zonno de Bari, sacrements reçus de l’abbé Carandino. 5/08/2015, Jean-Jacques Della Gaspera, décédé avec les sacrements après une longue maladie ; funérailles à Saint-Germainl’Auxerrois le 12 août. - 7/8/2015, Ernesta Bianchi veuve Bianchi de Santarcangelo, funérailles à la chapelle de Rimini. 9/08/2015, Elisa Cipriani veuve Senter à Rovereto. - 13/08/2015 à Nevers, Jean-Paul Girardel, il avait reçu les sacrements. 19/8/2015, P ierino Lorusso de Bari. 10/09/2015, P ierre Assonion, est décédé après une longue maladie ; depuis les années 80 il était un fidèle de la Messe à la Maison Saint-Joseph. - 10/10/2015, Oscar De Ganis à Annecy. - 26/10/2015, Gustave Lesueur à Creil. - 26/10/2015, Fausta Aureli veuve Bonfanti, fidèle de longue date de la chapelle de Rome. Librairie : Nouveauté Le chemin du Ciel Livre de prières et missel pour les enfants Livre soigné et à la couverture solide, il contient : - les prières usuelles (prières de chaque jour, dévotion à la Sainte-Vierge, une prière pour chaque mois, le chemin de croix, etc.) - examen de conscience et méthode pour se confesser - prières avant et après la communion - les prières pour suivre la Messe, accompagnées de beaux dessins C.L.S. Verrua Savoia 2015 125 pages - (11 x 16 cm) 16,00 € à commander sur le nouveau site e-commerce: www.sodalitiumshop.eu Activités 2016 • 11-25 juillet à Raveau en France : camp Saint Louis de Gonzague pour garçons de 8 à 13 ans • 16-23 juillet à Verrua Savoia : camp Bhse Imelda pour fillettes et jeunes filles • 01/08-12/08 camp en montagne pour garçons de 14 à 21 ans Exercices Spirituels de Saint Ignace à Raveau : • Pour dames et jeunes filles : du lundi 1er août (à 12 h) au samedi 6 août • Pour hommes et jeunes gens : du lundi 8 août (à 12 h) au samedi 13 août Pour tout renseignement, s’adresser à : Institut Mater Boni Consilii Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tél. : + 39.0161. 839.335 350 route de Mouchy Raveau 58400 France – Tél. et fax : 03.86.70.11.14 Site : www.sodalitium.eu - email : info@sodalitium.eu CENTRES DE MESSES RÉSIDENCES DES PRÊTRES DE L’INSTITUT ITALIE: Verrua Savoia (TO). Maison-Mère. Istituto Mater Boni Consilii - Località Carbignano, 36. Ste Messe: en semaine à 7h30, le dimanche à 18h. Tél.: +39.0161.83.93.35 - Email : info@sodalitium.it San Martino dei Mulini (RN). Casa San Pio X. Abbé Ugo Carandino - Via Sarzana 86. Pour toute information, Tél (et Fax) +39. 0541.75.89.61. E-mail : info@casasanpiox.it. ARGENTINE: Rosario. Casa San José - Abbé Sergio Casas Silva, Iguazú 649 bis, C. P. 2000 Rosario (Santa Fe). Tous les dimanches, Ste Messe à 10h. E-mail : casasanjose@sodalitium.it BELGIQUE: Dendermonde. Mgr Geert Stuyver: Kapel O.L.V. van Goede Raad, (chapelle N.D. du Bon Conseil) Koning Albertstraat 146 9200 Sint-Gillis Dendermonde: Ste Messe le dimanche à 10h. Tél. (et Fax): (+32) (0) 52.38.07.78. FRANCE: 350 route de Mouchy Raveau 58400. Pour toute information, tél. au 03.86.70.11.14. AUTRES CENTRES DE MESSES FRANCE Aix-en-Provence: Ste Messe le 3ème dimanche du mois à 18h. Confessions à 17h. Hôtel Ibis Styles Aix-en-Provence 3 boulevard de la Grande Thumine. Pour toute information, tél.: 06.77.08.60.35. Annecy: Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 10 h. Confessions à 9h. Se renseigner pour les autres dimanches, tél : 04.50.52.81.20. Cannes: Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 18h. Confessions à 17h.30. Pour toute information, tél.: 06.77.08.60.35. ou 09.82.24.80 09. Lyon: Chapelle N.-D. du Bon Conseil. 11 rue Pareille, 69001. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche du mois à 17h. Confes sions à partir de 16h30. Se renseigner pour les autres dimanches, tél.: 06.70.45.77.28. Marseille: Ste Messe le 1 er dimanche du mois à 18h00. Confessions à 17h15. Hôtel Ibis, Marseille Est (La Valentine) : Av. de Saint-Menet, Quartier des Ecoles, 13011 Marseille. Pour information: tél.: 06.77.08.60.35. Paris: pour toute information tél. +39.0161.839.335. Deux lieux: • Messe tous les dimanches et fêtes à 10h00, le plus souvent 18 passage Dubail, 75010 (métro Gare de l’Est). • Offices en semaine : Oratoire du Bon Conseil, 19 rue Théodore Deck, 75015 Paris (programme diffusé tous les mois par e-mail ou sur notre site). • Pour toute information tél. +39.0161.839.335 - info@sodalitium.eu BELGIQUE Dendermonde: voir ci-dessus. Tournai: Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à 17h. Confessions à 16h30. Se renseigner au +32(0)52380778 HOLLANDE Bergen op Zoom: se renseigner au +32(0) 52380778 Zwartemeer: se renseigner au +32(0)52380778 ALLEMAGNE Lierfeld: (50 km au nord de Trier/Trèves): Herz-Jesu-Kapelle, Hauptstraße 7. Se renseigner au +32(0)52380778. Confessions une demi-heure avant les messes. 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